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Université Panthéon-Sorbonne, Paris I

UFR Etudes internationales et européennes

L’ORGANISATION DE LA
CONFERENCE ISLAMIQUE
ET
LES DROITS DE L’HOMME

Mémoire pour le Master 2 recherche


Droit des pays arabes
présenté et soutenu
par
M. Sami KILIC

Sous la direction du Professeur Slim LAGHMANI

Année universitaire 2009-2010


L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises
dans ce mémoire. Les opinions exprimées devront être considérées comme propres à
leur auteur.
TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION......................................................................................................................1
Chapitre I : La promotion idéologisée des droits de l’Homme...............................................5
Section 1 : Une conception religieuse des droits de l’Homme...........................................6
§ 1 : La consécration d’une approche particulariste.......................................................6
A) La défense de l’exception islamique......................................................................6
B) Le fondement : la théorie de l’Homme et donc des droits de l’Homme dans
l’islam.........................................................................................................................9
§ 2 : Les manifestations d’une approche particulariste.................................................12
A) Panorama rapide sur les droits de l’Homme dans le corpus islamique originel..13
B) La coloration traditionaliste dans la garantie de certains droits par l’OCI..........14
Section 2 : Une conception politique des droits de l’Homme..........................................21
§ 1 : Une attention particulière pour le droit des peuples.............................................21
A) Le combat \« existentiel \» contre le sionisme et le racisme...............................21
B) La problématique de la défense des minorités musulmanes................................23
§ 2 : Une approche globale dans la promotion des droits de l’Homme........................25
A) L’adoption du principe de l’indivisibilité des droits civils et politiques/droits
économiques, sociaux et culturels.............................................................................25
B) La promotion des droits de la troisième génération.............................................29
Chapitre II : La protection ineffective des droits de l’Homme.............................................33
Section 1 : Les faiblesses institutionnelles........................................................................33
§ 1 : L’émergence de mécanismes de protection ?.......................................................33
A) L’importance de la justiciabilité des droits garantis............................................33
B) Les évolutions récentes vers une surveillance du respect des droits de l’Homme
...................................................................................................................................36
§ 2 : Le soubassement idéologique : le principe de non-ingérence..............................39
A) L’exposé du principe...........................................................................................39
B) Les critiques.........................................................................................................41
Section 2 : Les faiblesses fonctionnelles..........................................................................42
§ 1 : Une préoccupation sélective des droits de l’Homme sur la scène internationale. 43
A) La carence d’une politique des droits de l’Homme en matière de politique
extérieure...................................................................................................................43
B) Les tentatives d’instrumentalisation des droits de l’Homme...............................45
§ 2 : Les perspectives d’évolution................................................................................48
A) La référence à l’ijtihad.........................................................................................48
B) Une Organisation à double vitesse.......................................................................51
CONCLUSION GENERALE...................................................................................................54
TABLE DES ABREVIATIONS
Les résolutions de l’OCI se lisent ainsi : le numéro de la résolution est suivi d’une barre qui
introduit la session au cours de laquelle elle a été adoptée puis d’un tiret qui précise par une
lettre majuscule la matière de la résolution. Lorsque la référence est suivie du sigle IS, il s’agit
d’une résolution adoptée au cours d’un Sommet islamique (exemple : rés. 2/6-C IS) ; s’il n’y
a rien, le document émane de la Conférence des Ministres des Affaires étrangères (exemple :
rés. 50/25-P). S’agissant des matières, P ou POL signifie politique, LEG juridique, E
économique, C culturelle, ORG organisationnelle.

AFDI Annuaire français de droit international


AGNU Assemblée générale des Nations Unies
CEDH Convention européenne des droits de l’Homme
CIMAE Conférence islamique des Ministres des Affaires étrangères
DUDH Déclaration universelle des droits de l’Homme
ERISM Équipe de recherche interdisciplinaire sur les sociétés méditerranéennes
musulmanes
INALCO Institut national des langues et civilisations orientales
IS Conférence islamique au Sommet
OCI Organisation de la Conférence islamique
ONU Organisation des Nations Unies
PIDCP Pacte international relatif aux droits civils et politiques
PIDESC Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
PUF Presses universitaires de France
RDH Revue des droits de l’Homme
RDP Revue du droit public
RTDH Revue trimestrielle des droits de l’Homme
RUDH Revue universelle des droits de l’Homme
INTRODUCTION

« J’ai lu dans les écrits des Arabes que le Sarrasin Abdallah, comme on lui demandait quel
spectacle lui paraissait le plus digne d’admiration sur cette sorte de scène qu’est le monde,
répondit qu’il n’y avait rien à ses yeux de plus admirable que l’homme »

Pic de la Mirandole
De hominis dignitate, 1486

« Dans la forêt, quand les branches des arbres se querellent, les racines s’embrassent »

Proverbe africain

Les droits de l’Homme sont, aujourd’hui, une préoccupation universellement partagée1 en


même temps qu’une disposition communément piétinée. Il n’y a ni Occident ni Orient en
matière d’atteintes aux droits fondamentaux de l’Homme. Nul espace géographique ne saurait
être accablé plus que les autres ; il existe certes, des différences quant à l’inclination ou à la
bonne foi mais nul lieu ne saurait être érigé en modèle dans ce domaine. Les rapports des
organisations telles qu’Amnesty International ou Human Rights Watch le montrent très
clairement.

Nous l’avons dit, c’est au plus, la sincérité qui pourrait servir d’étalon ; sincérité dans
l’action car même les régimes les moins sourcilleux en matière de garantie des droits de
l’Homme n’en adoptent pas moins la rhétorique, quitte à prendre leurs aises avec ce qu’elle
implique. On peut appréhender les droits de l’Homme comme « les droits et facultés assurant
la liberté et la dignité de la personne humaine et bénéficiant de garanties institutionnelles »2.
Au niveau international, il existe une obligation coutumière de respecter les droits de
1
« Dans un Etat de droit, les droits de l’homme jouent le rôle du « droit du droit ». Dans une démocratie, ils lui
sont consubstantiels. Dans un régime autoritaire ou dans une dictature –du prolétariat, théocratique ou mafieuse–
ils constituent l’essence de la résistance. Dans un pays en transition démocratique, ils sont un objectif à
réaliser », Gérard FELLOUS, Les droits de l’homme. Une universalité menacée. La Documentation française,
2010, p. 12.
2
Frédéric SUDRE, Droit européen et international des droits de l’Homme, PUF, 8è éd., 2006, n° 2, p. 13. Voir
également François RIGAUX, « Les fondements philosophiques des droits de l’Homme », RTDH, n° 70, avril
2007, pp. 307-345.

1
l’Homme ; la Cour internationale de justice précisa dans un arrêt du 27 juin 1986 que
« l’inexistence d’un engagement (en la matière) ne signifierait pas qu’un Etat puisse violer
impunément les droits de l’Homme » (§ 267)3.

Nombre d’organisations internationales ont eu l’occasion de s’intéresser à cette question.


Des organisations à vocation planétaire comme l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui a
vu le jour après le traumatisme de la Seconde guerre mondiale et qui a fait du respect de la
dignité humaine son fer de lance4, ou des organisations à champ géographique déterminé
comme l’Organisation des Etats américains, le Conseil de l’Europe, l’Union africaine,
l’Association des Nations de l’Asie du Sud-est ou encore l’Organisation de la Conférence
islamique (OCI). Nous allons nous attacher à analyser les rapports qu’entretient cette dernière
avec cette thématique.

L’OCI voit le jour à la suite d’un événement précis, l’incendie en 1969 de la mosquée Al-
Aqsa de Jérusalem. Mais sa naissance répond, en réalité, à une longue quête des musulmans,
celle de la restauration de l’unité islamique ; du mouvement panislamiste au XIXè siècle aux
différents congrès réunis çà et là après l’abolition du califat par la jeune République turque en
19245, de l’indépendance des Etats islamiques dans les années 1950-1960 à la défaite de la
guerre des Six jours en 1967, le besoin de retrouver l’unité d’antan a atteint son paroxysme le
21 août 1969, jour de l’incendie du troisième monument saint de l’islam6. Dans un premier
temps, ce sont les ministres des affaires étrangères des Etats arabes qui se réunissent au Caire

3
Arrêt cité par Gérard COHEN-JONATHAN, « Universalité et singularité des droits de l’Homme », RTDH, n°
53, 2003, pp. 3-13 : p. 6.
4
Le préambule de la Charte des Nations Unies signée le 26 juin 1945 et entrée en vigueur le 24 octobre 1945,
débute par le fameux : « Nous, peuples des Nations Unies, résolus (…) à proclamer à nouveau notre foi dans les
droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des
hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites (…) ». En outre, l’article 1er alinéa 3 range
parmi les buts de l’ONU, la volonté de « développer et encourager le respect des droits de l’homme et des
libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion ». L’article 55 al. c
indique également que les Nations Unies favoriseront « le respect universel et effectif des droits de l’homme et
des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion ».
5
Pour plus d’approfondissements sur l’activisme de Djamal al-din al-Afghani (1839-1897) et d’Abdurrahman al-
Kawakibi (1849-1902), sur les congrès du Caire (1926), de La Meque (1926), de Jérusalem (1931) et les autres
réunions des dirigeants musulmans, voir Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au
développement du droit international des droits de l’Homme, thèse Strasbourg, 1987, pp. 335-342. Voir
également Nadine PICAUDOU, « Politiques arabes face à l’abolition du califat », La question du califat, Les
Annales de l’Autre Islam, N° 2, Publication de l’ERISM, INALCO, 1994, pp. 191-200.
6
Il semble que ce soit un extrémiste israélien qui ait mis le feu à la mosquée. M. Alaoui parle d’un « groupe
d’extrémistes israéliens » (L’Organisation de la conférence islamique. Etude d’une organisation internationale
spécifique, thèse Bordeaux IV, 2001, p. 1) alors que M. Mellouk dit qu’il s’agit d’un incendie « de caractère
accidentel » qu’une enquête du gouvernement israélien aurait imputé à un Australien protestant, Michael Rohen,
Mohamed MELLOUK, Les institutions et mécanismes de coopération dans le cadre de l’Organisation de la
conférence islamique, thèse Paris I, 1994, p. 51 et p. 63.

2
dès le 25 août et qui lancent un appel à une conférence islamique ; ensuite, ce sont les
ministres des affaires étrangères des pays islamiques qui s’entretiennent à Djeddah en mars
1970 et enfin, l’Organisation de la Conférence islamique est officiellement mise sur pied lors
de la troisième conférence de ces mêmes ministres réunis derechef à Djeddah du 29 février au
4 mars 1972. « Le système institutionnel de l’OCI a été mis en place progressivement. Simple
conférence diplomatique en 1969, elle est vite devenue une organisation internationale
régionale à vocation religieuse et politique, les deux domaines étant étroitement mêlés en
islam. Aux organes principaux créés initialement par la charte est venue s’ajouter une
multitude d’autres organes chargés de promouvoir les multiples domaines de la coopération
inter-étatiques et les innombrables secteurs ouverts à la solidarité islamique »7.

L’Organisation adopte sa Charte8 en 1972. Celle-ci réaffirme l’adhésion des Etats membres
« à la Charte des Nations Unies et aux droits fondamentaux de l’homme dont les buts et
principes constituent la base d’une coopération fructueuse entre tous les peuples », à la
promotion de « la prospérité », du « progrès » et de « la liberté de l’humanité » et à « la paix
universelle ». En réalité, le but est principalement politique : libérer Jérusalem et les territoires
arabes occupés. Cet « ordre du jour mental » va occuper l’Organisation pendant deux
décennies et ce n’est qu’à partir de la fin des années 1980 qu’elle se lance dans « une
politique de séduction en direction de l’Occident »9. L’OCI montre alors qu’elle n’est pas
seulement une structure qui fulmine des imprécations contre Israël mais également une
organisation capable de se pencher sur d’autres problématiques comme la question des droits
de l’Homme ; certes insuffisamment, partiellement et partialement, mais il n’en demeure pas

7
Rachid Ben El Hassan ALAOUI, op. cit. p. 2. Initialement, les organes de l’OCI sont : la Conférence des Rois
et Chefs d’Etats et de Gouvernement, instance suprême qui coordonne l’action de l’OCI, la Conférence des
Ministres des Affaires étrangères qui applique la politique générale de l’Organisation, le Secrétariat général et
ses organes subsidiaires. Ces organes dérivés forment un écheveau complexe d’institutions, de comités, et
d’universités.
8
Elle a sans doute été influencée par la Charte des Nations Unies et a repris le même terme (Mîsâq en arabe,
Charter en anglais) sans forcément saisir la symbolique qu’il pouvait y avoir derrière : « Le titre annonce
l’ambition. Il s’agit d’une Charte, non d’un Pacte. La Société des Nations avait été créée par un accord
international en bonne et due forme. Le terme de « Pacte », de Covenant en anglais, repris du droit des contrats,
traduisait l’accord consensuel entre Etats souverains, le traité en bonne et due forme. Avec la Charte, les
références sont constitutionnelles. Elles rappellent le long combat pour les libertés et la démocratie, la grande
Charte arrachée à Jean-sans-Terre, les franchises établies au profit des bourgs et de leurs citoyens ; la montée du
mouvement démocratique de par le monde trouve enfin son expression sur le plan international », Jean-Pierre
COT, Alain PELLET et Mathias FORTEAU, La Charte des Nations-Unies. Commentaire article par article,
Paris, Economica, 3è éd., 2005, tome 1, p. 288.
9
Rachid Ben El Hassan ALAOUI, op. cit., p. 407. L’auteur note cependant que ce tournant est également dû à la
transformation interne de l’Organisation ; d’une organisation « intégriste » qui appelle au jihad, elle devient un
groupement d’Etats confrontés eux-mêmes à des dissidences internes fondamentalistes (troubles iraniens à La
Mecque en 1987, création du Hamas, guerre civile en Algérie, etc.). Depuis, elle ne cesse de condamner le
terrorisme et a adopté un code de conduite et une convention en la matière.

3
moins qu’elle n’est plus une « paper organisation »10. En 2008, elle révise sa Charte et range
la promotion et la protection des droits de l’Homme parmi les objectifs de l’organisation11.

Elle s’est ainsi lancée dans l’élaboration de sa propre déclaration, mettant de côté la
Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH), pourtant « idéal commun à atteindre
par tous les peuples et toutes les nations »12. Sans doute, a-t-elle voulu suivre la voie des
autres organisations régionales qui ont préféré se doter d’un instrument régional plutôt que de
s’en remettre à la DUDH. En 1979, l’OCI rédige un « Projet de déclaration des droits et des
obligations fondamentaux de l’homme en Islam » ; celui-ci est suivi d’un « Projet de
document sur les droits de l’homme en Islam »13 en 1981 (projet de Taïf) puis de la
« Déclaration de Dacca sur les droits de l’homme en Islam »14 en 1983 qui ne comporte pas,
contrairement aux documents précédents, des articles mais des paragraphes. Enfin, en 1990,
c’est la « Déclaration du Caire des droits de l’homme en Islam »15 qui s’impose comme la
référence officielle de l’OCI sur la question des droits de l’Homme 16. Celle-ci n’est qu’une
source d’inspiration pour les Etats membres, elle ne comporte que des « directives
générales », précise le préambule. Mais en 1998, l’Organisation estime nécessaire de
« renforcer le mécanisme existant au sein de l’OCI pour la recherche des voies et moyens,
dont l’élaboration d’un ensemble d’instruments islamiques appropriés afin de promouvoir et

10
Muazzam ALI, « Role of OIC in Promoting World Peace », L’Islam et les relations internationales, Actes du
IVè colloque franco-pakistanais, Paris, mai 1984, EDISUD, Aix-en-Provence, 1986, p. 8.
11
On trouve de nombreuses références aux droits de l’Homme en tant que concept dans les différentes
déclarations mais elles apparaissent plus comme des tics d’écriture qu’autre chose. Par exemple, la Déclaration
de La Mecque de 1980 parle déjà de « garantir les droits de l’Homme », ou d’ « assurer l’inviolabilité des droits,
des libertés et des besoins fondamentaux de l’homme » mais n’est pas suivie d’une déclaration des droits en
bonne et due forme.
12
Paul TAVERNIER, « Les Etats arabes, l’ONU et les droits de l’Homme. La DUDH et les Pactes de 1966 »,
Islam et droits de l’Homme, Gérard CONAC et Abdelfattah AMOR (dir.), Paris, Economica, 1994, pp. 57-72.
L’auteur rappelle que la DUDH, adoptée le 10 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations Unies, a été
soutenue par l’Egypte, l’Iraq, le Liban et la Syrie et qu’elle a fait l’objet de l’abstention de l’Arabie Saoudite.
13
Voir les textes en annexe.
14
Voir le texte en annexe.
La quatorzième Conférence des ministres des affaires étrangères (1983) adopte le texte mais renvoie sa
publication au quatrième Sommet en janvier 1984 (rés. 3/14-ORG). Or le communiqué final du Sommet décide
de « renvoyer l’adoption du document sur les droits de l’homme en islam jusqu’à l’achèvement de son examen »
(point 28). Lors de la quinzième Conférence des ministres (décembre 1984), le Secrétaire général invite les Etats
membres à envoyer des experts afin de former une commission de réexamen du projet (rés. 2/15-ORG). Mais le
cinquième Sommet (1987) décide de soumettre à nouveau le projet à la prochaine Conférence des ministres (rés.
14/5-P IS). Celle-ci, la dix-septième (1988), va cette fois-ci soumettre le projet aux ministres de la justice des
Etats membres afin de formuler une version définitive (rés. 44/17-P). Ce n’est qu’à la dix-neuvième Conférence
des ministres des affaires étrangères en 1990 que le projet sera approuvé sous le nom de « Déclaration du Caire
sur les droits de l’homme en Islam » (rés. 49/19-P).
15
Voir le texte en annexe. Il est étonnant que l’OCI ne mette pas en vedette le texte de la Déclaration sur son site
internet. Il faut la chercher dans la résolution 49/19-P (1990) à laquelle elle est attachée.
16
La résolution 37/37-POL (2010) proclame le 5 août (jour d’adoption de la Déclaration du Caire), « Journée
islamique des droits de l’Homme et de la Dignité Humaine ».

4
de préserver les droits de l’homme » (rés. 50/25-P). Elle appelle, depuis, à la rédaction de
covenant sur les droits de l’Homme en Islam. A l’heure actuelle, il n’y a que la Déclaration du
Caire et une Convention sur les droits de l’enfant en Islam qui font office de documents
internes relatifs aux droits de l’Homme.

Il faut alors s’interroger sur ce particularisme ; les inflexions, les éventuelles remises en
cause, les apports qu’il implique. En outre, proclamer des droits est une chose, assurer leur
respect en est une autre. Force est de constater que la réception de ces droits dans l’ordre
juridique achoppe sur l’impréparation mentale, sociale, culturelle, religieuse ou économique ;
« les droits fondamentaux impliquent trop de préalables pour pouvoir être vécus réellement, là
où ces préalables n’existent pas ». Du coup, « ces droits sont proclamés mais la vie se situe
totalement à côté »17. Les mécanismes régionaux de promotion et de protection des droits de
l’homme ne sont pertinents que s’ils renforcent les normes universelles en la matière. Or,
l’OCI a une identité avant tout religieuse et c’est à l’aune de cette référence qu’elle va définir
sa position ; islamique ou non, le critère religieux n’est pas sans conséquence car « les
grandes religions, tout en se proclamant tolérantes, sont souvent « totalitaires » puisqu’elles
visent à gouverner la totalité de la vie des hommes sur les plans spirituel et matériel, religieux
et politique »18.

Force est d’admettre que l’OCI, loin de renforcer les droits de l’Homme, va s’appliquer à
les édulcorer en oeuvrant à une promotion idéologisée de ces droits (chapitre 1) et en faisant
preuve d’apathie quant à leur protection, justifiée sans doute par la circonspection proverbiale
de ses Etats membres (chapitre 2).

Chapitre I : La promotion idéologisée des droits de l’Homme

17
Yadh BEN ACHOUR, « Les droits fondamentaux entre l’universalité et les spécificités culturelles et
religieuses », Droits fondamentaux et spécificités culturelles, Henri PALLARD et Stamatios TZITZIS (dir.),
Paris, L’Harmattan, 1997, pp. 81-94 : p. 90.
18
Paul TAVERNIER, « L’O.N.U et l’affirmation de l’universalité des droits de l’Homme », RTDH, n° 31, 1997,
pp. 372-393 : p. 386. Comp. René CASSIN, « Religions et droits de l’Homme », Mélanges René Cassin,
Amicorum discipulorumque liber, tome IV. Méthodologies des droits de l’Homme. Pedone, Paris, 1972, pp. 97-
104.

5
L’OCI est certes une organisation fondée sur l’appartenance religieuse mais elle regroupe
également des Etats qui sont politiquement marqués. Cette double identité idéologique des
Etats membres oriente l’approche que l’institution elle-même peut avoir des droits de
l’Homme. Une conception politique des droits de l’Homme (section 2) se combine alors à une
conception religieuse (section 1).

Section 1 : Une conception religieuse des droits de l’Homme


L’OCI est formée d’Etats musulmans. Elle n’hésite donc pas, dans ses documents officiels,
à mettre en avant l’islamité des valeurs qu’elle défend. Bravant le principe cardinal qui
prévaut en matière de droits de l’Homme, soit l’universalisme des droits humains, elle défend
clairement une approche particulariste dans ce domaine (§ 1). La déclinaison des droits
garantis dans le cadre de l’OCI permet de saisir le sens de ce particularisme (§ 2).

§ 1 : La consécration d’une approche particulariste


Toute cette construction (A) repose sur une vision de l’Homme qui, elle-même, explique et
justifie la conception des droits de l’Homme dans l’islam (B).

A) La défense de l’exception islamique

La référence à l’exception islamique est très nette dans les textes de l’Organisation. Celle-ci
ne biaise pas, elle le revendique solennellement mais pas dans l’idée de se soustraire à une
conception occidentale qui serait trop permissive, plutôt dans la conviction que l’islam défend
le mieux possible les droits de l’Homme. L’OCI est convaincue qu’elle défend la meilleure
approche. Le secrétaire général Azeddine Laraki pouvait ainsi affirmer à la tribune de la
Commission des droits de l’Homme à Genève, le 17 mars 1997, que les droits de l’Homme et
les libertés universelles font partie de la foi islamique et que la Déclaration islamique sur les
droits de l’Homme contient les plus hauts standards de conduite, de moralité, de tolérance, de
libertés et le droit à une vie digne19. Dans la Déclaration de La Mecque adoptée lors de la
troisième conférence islamique au Sommet (25-28 janvier 1981), les Etats membres
« considèrent que notre Ummah dispose de ses propres moyens qui sont de nature à renforcer
son unité et sa solidarité à promouvoir son progrès, son bien-être et sa gloire. Elle trouve dans
le Coran et la Tradition du Prophète, Paix soit sur Lui, des règles de vie parfaites qui la
19
Saad S. KHAN, Reasserting International Islam. A Focus on the Organization of the Islamic Conference and
other Islamic Institutions, Karachi, Oxford University Press, 2001, p. 164.

6
guident vers la justice, le bien et le salut (…) » et ajoutent : « Nous affirmons également notre
souci de sauvegarder les droits et la dignité de l’homme en nous inspirant du Livre d’Allah et
des enseignements de son Prophète (…) ».

L’expression d’une telle assurance conduit naturellement l’OCI à demander à ses membres
de défendre ce particularisme dans toutes les enceintes. Par exemple, la résolution 22/6-P (IS)
de 1991 appelle à « une coordination plus étroite en vue de consolider les valeurs culturelles
et sociales communes sur la scène internationale ». Mais ce particularisme qui consisterait ici
à une démarche fondée sur la volonté d’apporter sa pierre à l’édifice tourne souvent au
relativisme qui apparaît plus comme un repli sur soi. Il en résulte une schizophrénie textuelle
où les termes d’universalisme et de particularisme se suivent sans grande cohérence. L’un
devant disqualifier l’autre, c’est le particularisme qui apparaît comme le plus fondamental ;
ainsi, à l’issue de la vingt-et-unième conférence des ministres des affaires étrangères tenue à
Karachi du 25 au 29 avril 1993, l’OCI adopte la résolution 41/21-P intitulée « Sur la
coordination entre les Etats membres dans le domaine des droits de l’Homme ». Ce texte
exprime la position de l’OCI sur cette question à l’approche de la Conférence de Vienne20. Le
contenu de cette résolution est particulièrement édifiant : la conférence « souligne la nécessité
d’assurer l’universalité, l’objectivité et la non-sélectivité dans l’application des normes et
instruments relatifs aux droits de l’Homme » avant de reconnaître dans le paragraphe suivant
que « malgré leur caractère universel, les droits de l’Homme doivent être considérés dans le
cadre d’un processus dynamique et évolutif de définition de normes internationales, en tenant
compte de la nécessité de respecter les différents contextes historiques, culturels et religieux
en même temps que le système juridique principal ». C’est la première affirmation claire de sa
« politique » en matière de droits de l’Homme : l’ambivalence.
L’OCI reste constante dans l’observance de cette politique. Ainsi dans la résolution 40/22-P
de 1994 (Conférence des ministres des affaires étrangères, 10-12 décembre 1994), elle
« réaffirme la nécessité pour les Etats membres d’accroître leurs consultations et leur
coordination en matière de droits de l’Homme, en particulier au niveau de l’Assemblée
20
Au même moment, la Déclaration de Bangkok des pays d’Asie sur les droits de l’Homme souligne également
l’importance des particularismes nationaux, régionaux, historiques, culturels et religieux et la prééminence de
l’harmonie sociale sur l’épanouissement individuel. Voir Gérard FELLOUS, op. cit., pp. 26-36.
La Déclaration et le programme d’action de Vienne issue de la Conférence mondiale des Nations-unies sur les
droits de l’Homme, tenue à Vienne du 14 au 25 juin 1993, indique dans son point 5 que « tous les droits de
l’Homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés (…). S’il convient de ne pas perdre
de vue l’importance des particularismes nationaux et régionaux et la diversité historique, culturelle et religieuse,
il est du devoir des Etats, quel qu’en soit le système politique, économique et culturel, de promouvoir et de
protéger tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales ». Voir le texte de la Déclaration,
RUDH 1994, pp. 227-240.

7
générale des Nations-Unies, du Conseil économique et social, de la Commission des droits de
l’Homme et des autres organes concernés par cette question » (point 2) et « invite à faire
preuve de précaution et de prudence face à la fausse interprétation et aux offenses dirigées
contre la charia islamique et contenues dans les rapports rédigés par certains rapporteurs des
instances internationales » (point 4). Trois jours plus tard, cette fois-ci à l’issue du septième
Sommet (13-15 décembre 1994) et à l’occasion de la vingt-cinquième année de l’OCI, une
Déclaration solennelle est publiée. On lit dans le préambule de cette Déclaration, appelée
Déclaration de Casablanca, que les Etats membres sont « déterminés à contribuer avec le
reste de la communauté internationale à l’avènement d’un nouvel ordre international fondé
sur la justice, l’équité, la paix et la légalité internationale » (§ 4) et qu’ils sont « attachés aux
libertés fondamentales et aux droits de l’Homme pour tous les peuples de la planète21 ainsi
qu’à la sauvegarde de la dignité des musulmans (…) » (§ 5). Or, le communiqué final publié
en même temps, réitère « la nécessité d’une consultation et d’une coordination plus régulières
entre les Etats membres dans le domaine des droits de l’Homme, notamment aux Nations-
Unies » (point 120). Cela sous-entend que le domaine des droits de l’Homme est perçu
comme un domaine où il y a des rapports de force et qu’il y a donc des intérêts particuliers à
défendre pour les Etats musulmans face aux autres. C’est le sens même de la « coordination »
voulue avec insistance. La contribution « avec le reste de la communauté internationale » perd
alors de toute sa sincérité. Autre exemple : la résolution 50/25-P de 1998 reconnaît « les
obligations et les efforts des Etats membres dans la promotion et la protection des droits de
l’Homme internationalement reconnus, tout en prenant en compte leurs particularités
confessionnelles, nationales et régionales ainsi que leurs différentes caractéristiques
historiques et culturelles, conformément à la Déclaration du Caire sur les droits de l’Homme
en Islam ». La résolution 56/25-P sur la contribution de l’OCI à la commémoration du
cinquantenaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme est de la même trempe :
« a) La communauté internationale doit traiter les droits de l’Homme d’une façon juste et
égalitaire. A cette fin, la signification des particularités nationales et régionales ainsi que les
différents contextes historiques, culturels et religieux doivent être respectés ». La formulation
n’ayant pas de cohérence interne, elle se fait inéluctablement sibylline : « f) La
reconnaissance et le respect total des principaux systèmes juridiques du monde, notamment de
la jurisprudence islamique, sont essentiels pour promouvoir la perception globale de
l’universalité de la DUDH ».

21
C’est nous qui soulignons.

8
Ces prises de position contradictoires ont inévitablement attiré les dénonciations des
organisations non-gouvernementales. Dans une résolution-manifeste de 2000 (62/9-P IS),
l’OCI a entendu répondre aux « campagnes hostiles » mais elle a brouillé encore plus sa
position. Elle réaffirme le droit des Etats à préserver leurs spécificités (point 3) mais va plus
loin et « rappelle le droit des Etats à émettre, en cas de besoin, des réserves sur les traités,
chartes et conventions internationaux dont ils sont partis ; ceci relevant de leur droit de
souveraineté » (point 5). Ce rappel ne l’empêche pas de préconiser, au point 6,
« d’appréhender les droits de l’Homme dans leur acception globale (…) dans le cadre de la
coopération et de la solidarité internationales » et « d’aborder la question des droits de
l’Homme d’une manière objective (…) » (point 8). Un pas en avant, deux pas en arrière…

En réalité, la question de l’universalité apparaît d’emblée comme une fausse question car
l’OCI s’inspire d’une religion précise pour développer sa conception de l’Homme et donc des
droits de celui-ci.

B) Le fondement : la théorie de l’Homme et donc des droits de l’Homme dans l’islam

Le débat entre l’universalisme et le relativisme n’a de sens que si on se place dans un cadre
objectif. Il s’avère que l’OCI n’a pas vocation à élaborer un texte pour l’Homme en général
mais pour l’Homme musulman. Il est donc naturel qu’elle puise dans ses ressources
conceptuelles pour définir son approche.

« L’universalité tient à ce que partout est perçue cette exigence fondamentale que quelque
chose est dû à l’être humain parce qu’il est un être humain »22. L’idée d’universalité apparaît
comme le seuil minimal en deçà duquel, l’argument de la spécificité cache d’autres soucis que
la seule volonté de réclamer une marge d’appréciation dans la garantie des droits de
l’Homme. Pour Gérard Cohen-Jonathan, « l’universalisme ne signifie pas l’uniformité
absolue », ce n’est pas « un impérialisme culturel », il doit « s’accommoder du pluralisme de
la civilisation ». On peut donc concevoir des spécificités à condition de respecter le « principe
premier et impératif de la dignité humaine »23 duquel découlent, par exemple, l’interdiction
des discriminations sexuelle, raciale, religieuse, l’interdiction de la torture, le droit à la vie, la
non-rétroactivité des lois pénales, l’interdiction de l’esclavage, le droit à un procès équitable,

22
Frédéric SUDRE, op. cit., n° 22, p. 43.
23
Gérard COHEN-JONATHAN, « Universalité et singularité des droits de l’Homme », op. cit., p. 11.

9
le droit à la liberté et à la sûreté. Ce socle respecté, on peut parler d’une conception
particulière des droits de l’Homme24. En revanche, il est clair que, le plus souvent, on
n’invoque pas sa spécificité pour rehausser le niveau de protection mais au contraire pour le
réduire et parfois l’amener au bord même de « l’irréductible humain ». La méfiance
s’installe : les universalistes apparaissent comme des particularistes (« l’universel peut être
utilisé comme véhicule d’un particularisme qui entend dominer et exclure les autres
particularismes »25) et les particularistes comme des bourreaux en herbe. « Le relativisme
culturel est un courant de pensée d’origine anthropologique, repris par l’ethnologie et la
sociologie : les cultures sont équivalentes et aucune ne peut s’arroger le droit de définir les
valeurs d’une autre, ni la juger (…). Mais cette approche a quitté le champ de l’anthropologie
et de la sociologie pour investir celui des valeurs et de la morale, puis de la politique, en
servant de « contestation scientifique » à l’universalité, particulièrement dans le domaine des
droits de l’homme »26.

Il s’avère que l’OCI, c’est l’Afrique, l’Asie et le monde arabe ; c’est-à-dire la plate-forme
des relativistes. Certes, les documents de l’OCI font assidûment référence à la DUDH mais
elle apparaît plus comme une clause de style que comme un attachement sincère. Dans le
projet de déclaration sur les droits de l’Homme élaboré en 1981, on trouve, dans le
préambule, une référence aux « efforts déployés par l’humanité pour faire valoir les droits de
l’homme dans les temps modernes, notamment la proclamation et les conventions adoptées
par l’Assemblée générale des Nations Unies, aux fins de protéger l’homme contre les forces
brutales et d’affirmer sa liberté et ses droits dans la vie ». Dans la déclaration de Dacca de
24
Voir, par exemple, Roger Magloire Koussetogue KOUDE, « Peut-on, à bon droit, parler d’une conception
africaine des droits de l’Homme ? », RTDH, n° 62, avril 2005, pp. 539-561. L’auteur répond par l’affirmative en
élaborant une classification tripartite : les « valeurs fondatrices » de la culture africaine, les « valeurs
régulatrices » et les « valeurs donatrices de sens ». Toutes les ramifications qui s’ensuivent permettent
d’embrasser l’ensemble des droits et libertés qui sont universellement consacrés. D’ailleurs, la Charte africaine
des droits de l’Homme et des peuples de 1981 évoque clairement la prise en compte « des vertus de leurs
traditions historiques et des valeurs de civilisation africaine qui doivent inspirer et caractériser leurs réflexion sur
la conception des droits de l’Homme et des peuples ». Voir également Jean-Claude KAMDEM, « Personne,
culture et droits en Afrique noire », Henri PALLARD et Stamatios TZITZIS (dir.), op. cit., pp. 95-117.
En réalité, les tendances relativistes existent même dans l’espace considéré comme le plus développé, l’Europe.
Par exemple, au niveau de la Cour européenne des droits de l’Homme, la lecture des opinions dissidentes montre
des divergences profondes entre les juges. En outre, la « marge nationale d’appréciation » est souvent invoquée
dans les affaires importantes. Le juge De Meyer avait critiqué cette notion dans son opinion partiellement
dissidente à l’arrêt Z. c/ Finlande (25/02/1997, Recueil 1997, p. 357) : « il est grand temps de la bannir de nos
raisonnements : nous avons déjà trop tardé à nous débarrasser de cette rengaine et à abjurer le relativisme qu’elle
implique (…). Lorsqu’il s’agit des droits de l’homme, il n’y a pas de place pour une marge d’appréciation qui
permettrait aux Etats de déterminer ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas (…) ».
25
Abdelfattah AMOR, Rapport introductif, Les droits fondamentaux, Jacques-Yvan MORIN (dir.), Actes des
1ères journées scientifiques du Réseau Droits fondamentaux de l’AUPELF-UREF tenues à Tunis du 9 au 12
octobre 1996, Bruxelles, Bruylant, 1997, pp. 31-40 : p. 38.
26
Gérard FELLOUS, op. cit., p. 22.

10
1983 et dans le texte définitif de 1990, cette mention est remplacée par le désir de « contribuer
aux efforts de l’humanité visant à garantir les droits de l’homme, à le protéger de
l’exploitation et de la persécution, à affirmer sa liberté et son droit à une vie digne en accord
avec la Loi islamique »27. Paradoxalement, la Déclaration du Caire commence par affirmer
que la Oumma est « la meilleure communauté que Dieu ait créée »28 et ancre les droits de
l’Homme dans le dogme musulman ; « leur protection est [donc] un acte d’adoration, (…)
toute agression contre eux est déniée par la religion et (…) tout homme en est responsable, la
Communauté islamique en étant responsable par association ».

Il devient alors essentiel de situer l’Homme dans l’islam afin de comprendre ce que cette
religion entend par « droits de l’Homme ». L’appellation, d’emblée, est une indication
instructive : islâm signifie littéralement « soumission » et musulman « celui qui est soumis »,
sous-entendu, à Dieu29. Par conséquent, la place de l’Homme se détermine nécessairement par
rapport à sa situation intrinsèque de « soumis ». C’est toute la difficulté de pouvoir dégager
une théorie des droits de l’Homme. En réalité, ce n’est pas tant l’islam tel que pratiqué
aujourd’hui qu’il faut analyser mais ses lectures historiques, celles qui rivalisent depuis des
siècles pour imposer leur conception de l’Homme et par ricochet des droits de l’Homme. Il
s’avère que l’islam d’aujourd’hui est l’islam asharite. Avec la défaite du mutazilisme au IXè
siècle, c’est la conception traditionaliste qui l’emporte, celle qui postule qu’il n’y a pas de
nature des choses ; la création est permanente. Or, « la condition théorique de possibilité
d’une philosophie des droits de l’Homme est celle d’une reconnaissance de l’existence d’une
nature des choses et donc de l’homme et de l’aptitude de la raison humaine à la découvrir »30.

27
A titre de comparaison, on note que dans la Charte arabe des droits de l’Homme de 1994 et dans celle révisée
en 2004, les Etats arabes réaffirment leur attachement à la Déclaration universelle des droits de l’homme, aux
Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et à la Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en
Islam.
28
La Charte arabe des droits de l’homme magnifie de son côté la Nation arabe qui a été honorée par Dieu en
faisant d’elle « le berceau des religions et des civilisations dont les nobles valeurs ont consacré le droit de
l'homme à une vie digne fondée sur la liberté, la justice et l'égalité ».
29
Les références coraniques sont légion : par exemple, sourate 2, verset 128 : « Seigneur, rends-nous soumis
[muslimûn] à Toi, et de notre descendance, fais un peuple soumis [umma muslima] à Toi » ; sourate 7, verset
126 : « Seigneur, arme-nous de patience et fais-nous mourir entièrement soumis à Toi [muslimûn] ». D’ailleurs,
l’Homme n’est-il pas qualifié d’ « abd », serviteur, esclave. Donc « créé par Dieu à son image, l’homme est
virtuellement parfait et appelé, à ce titre, à être son représentant sur terre. Sans doute. Mais formé à partir de
l’argile, il est par essence humble et voué à la servitude » : Mohammad Ali AMIR-MOEZZI (dir.), Dictionnaire
du Coran, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2007, p. 398. Voir à titre de comparaison Eric GEOFFROY, L’islam
sera spirituel ou ne sera plus, Paris, éditions du Seuil, 2009, pp. 22-23 : « Aslama, d’où provient le nom islâm,
est en effet une forme dérivée de la racine SLM, qui induit une démarche active, assumée, responsable (…). En
aucun cas, le terme islâm ne saurait donc signifier une sorte de « soumission » passive, comme celle de l’esclave
envers son maître ».
30
Slim LAGHMANI, « Islam et droits de l’Homme », Gérard CONAC et Abdelfattah AMOR (dir.), op. cit., pp.
42-56 : p. 48.

11
Le traditionalisme se focalise sur la volonté divine, le texte à proprement parler, refusant de
chercher un objectif, un sens, une fin aux prescriptions de Dieu. Celles-ci forment alors un
système compact destiné à un Homme abstrait, qui n’est situé ni dans le temps ni dans
l’espace. Un système théorique, en somme, où l’Homme fait figure de destinataire totalement
passif, sans aspiration et sans intellect31. La conclusion s’impose d’elle-même : « de cet Islam
là, aucune théorie des droits de l’Homme ne peut dériver, pour la simple raison que l’Homme
en est absent »32 alors même que « l’émergence de la personne représentait l’essence même de
l’Islam primitif »33. La dénaturation s’épaissit davantage lorsqu’on se focalise sur la nature du
droit musulman, censé contenir la volonté divine. Il ne résulte pas uniquement du Coran et de
la Sunna ; il est également « marqué par les coutumes et les droits locaux sur lesquels les
jurisconsultes ont travaillé »34. « Le droit est donc bien, en réalité, l’expression d’un groupe
qui a pris le pouvoir et on le qualifie ensuite de droit religieux, de droit sacré »35. La
construction islamique des droits de l’Homme est donc faussée dès l’origine : un choix
idéologique opéré au IXè siècle et édifié sur une base inauthentique ; le traditionalisme a
voulu écarter le facteur humain, or, il s’avère que le dogme islamique est une construction
humaine.

Du coup, l’islam s’est fourvoyé dans une culture de l’interdit alors qu’il consacre, avant tout,
la responsabilité individuelle36. L’OCI est restée fidèle à la lecture traditionnelle37.

§ 2 : Les manifestations d’une approche particulariste

31
Voir l’analyse de Yadh BEN ACHOUR, « Nature, raison et révélation dans la philosophie du droit des auteurs
sunnites », Jacques-Yvan MORIN (dir.), op. cit., pp. 163-179 : p. 175 : les mutazilites sont favorables à la raison
législatrice (alors que les acharites optent pour la raison instrumentale) c’est-à-dire « les lois immuables dans
l’ordre même de l’univers. Pour eux, c’est une sorte d’obligation de rationalité à l’extérieur de l’être humain ; il
s’agit de la rationalité de Dieu lui-même, rejaillissant sur l’ordre de l’univers, qui rejaillit lui-même sur l’ordre
des Lois ».
32
Slim LAGHMANI, « Islam et droits de l’Homme », op. cit., p. 55.
33
Marcel A. BOISARD, « Les droits de l’Homme en Islam », Islam et les droits de l’Homme, Marc AGI (dir.),
Des Idées et des Hommes, coll. La Librairie des Libertés, 2007, pp. 65-102 : p. 66.
34
Mohammed ARKOUN, « Pratique et garanties des droits de l’Homme dans le monde islamique », Marc AGI
(dir.), op. cit., pp. 49-56 : p. 53.
35
Ibid., p. 55.
36
Coran 74, 38 : « Chaque âme est l’otage de ce qu’elle aura accompli » ; 31, 33 : « Redoutez le jour où le père
ne sera plus d’aucune utilité à son fils ni le nouveau-né à son père » ; 2, 256 : « Pas de contrainte en religion »,
etc.
37
Lecture traditionnelle qui avait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme ; dans son arrêt
Refah Partisi c. Turquie du 13 février 2003, la Grande chambre dit partager l’analyse effectuée par la Chambre
dans son arrêt du 31 juillet 2001 : « Il est difficile à la fois de se déclarer respectueux de la démocratie et des
droits de l’homme et de soutenir un régime fondé sur la charia, qui se démarque nettement des valeurs de la
Convention, notamment eu égard à ses règles de droit pénal et de procédure pénale, à la place qu’il réserve aux
femmes dans l’ordre juridique et à son intervention dans tous les domaines de la vie privée et publique
conformément aux normes religieuses » (§ 72 de l’arrêt de 2001 et § 123 de l’arrêt de 2003).

12
Alors même que le corpus islamique originel fait grand cas des droits de l’Homme (A), la
Déclaration du Caire a préféré s’attacher à l’approche traditionaliste dans la formulation de
certains droits garantis (B).

A) Panorama rapide sur les droits de l’Homme dans le corpus islamique originel

Il est clair que le message islamique, placé dans son contexte, a consacré la dignité humaine
et apporté des améliorations par rapport aux conditions de l’époque38. Le Sermon d’Adieu du
Prophète39, prononcé en 632 peu avant sa mort, est considéré comme un véritable manifeste
en faveur des droits de l’Homme notamment s’agissant de la mention des droits de la femme,
de la protection des biens, et de la proclamation de l’égalité entre les êtres humains.
L’Homme est consacré créature suprême de Dieu40, l’esclavage n’est pas supprimé mais il est
destiné à disparaître progressivement par le biais de son régime d’accès et de sortie, les non-
musulmans bénéficient du droit à la vie, au respect de leurs biens, à la liberté de conscience 41.
L’homme et la femme ont une égale dignité mais il y a des « différences dues à la condition
physique de la femme d’une façon générale et à son rôle qui n’est pas toujours le même, dans
n’importe quelle société, d’une façon particulière »42. La mère est exaltée, la femme devient
héritière, le nombre d’épouses qu’un homme peut prendre est limité à quatre, la femme peut,
sous certaines conditions, demander le divorce, elle peut refuser d’allaiter l’enfant, le régime
matrimonial est la séparation des biens, etc.43. « L’enseignement du Coran et l’exemple du
Prophète s’adressaient à une population primitive, dont les coutumes ancestrales ne pouvaient
être supprimées sans transition. Par la lettre et par l’esprit, la législation coranique apportait
une amélioration considérable au statut de la femme de l’Arabie préislamique »44.

38
Ihsan Hamid AL-MAFREGY, « L’Islam et les droits de l’Homme », Marc AGI (dir.), op. cit., pp. 115-153.
Voir également Ali MERAD, « Le concept de ‘droits de l’Homme’ en Islam », pp. 223-241 : p. 226 : « Si le
discours islamique actuel fait de larges références au concept de droit de l’Homme, ce n’est pas par pure
concession à l’esprit de l’époque, mais en vertu d’une exigence propre à la tradition religieuse et culturelle de
l’Islam. (…). On peut aisément montrer qu’au niveau sémantique aussi bien qu’au niveau doctrinal, la notion de
« droits inhérents à la personne humaine » est inscrite dans la conscience islamique depuis les origines ».
39
Voir le texte dans Marc AGI (dir.), op. cit., pp. 325-328.
40
Coran 5, 35 : « (…) Celui qui aura tué un homme sans que celui-ci ait commis un meurtre, ou exercé des
brigandages dans le pays, sera regardé comme le meurtrier du genre humain ; et celui qui aura rendu la vie à un
homme sera regardé comme s’il avait rendu la vie à tout le genre humain ».
41
Le Coran est on ne peut plus clair : 109, 6 : « A vous votre religion et à moi, ma religion » ; 2, 256 : « Pas de
contrainte en religion » ; 10, 99 : « Est-ce à toi de contraindre les gens à être croyants ? » ; 5, 48 : « (…) si Dieu
avait voulu, certes Il aurait fait de vous une seule communauté (…) ».
42
Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au développement du droit international des droits de
l’Homme, op. cit., p. 103.
43
Ibid., pp. 72-157.
44
Marcel A. BOISARD, « Les droits de l’Homme en Islam », op. cit., p. 75.

13
Mais la théorie est une chose, sa pratique en est une autre. Il est clair que « dans les trois
traditions, nous trouvons effectivement un enseignement sur la personne humaine créée à
l’image de Dieu, précieuse, éminente, à défendre et à garantir par-dessus tout. Mais cet
enseignement est resté, en général, à un niveau idéal et n’a pas reçu, dans les différentes
sociétés – juives, chrétiennes ou musulmanes – une traduction effective dans un droit vécu »45.
Comme nous l’avons vu plus haut, cet héritage a été enchâssé dans l’idéologie asharite, les
canons divins se sont fossilisés, le bonheur terrestre est devenu un souci secondaire par
rapport à la béatitude éternelle ; ainsi, les « diktats de l’esprit religieux intégral produisent
leurs effets dans un certain nombre de secteurs névralgiques : le statut de la femme, le droit
pénal, la tolérance religieuse, la rigueur morale »46. C’est ce que nous allons voir à travers la
Déclaration du Caire.

B) La coloration traditionaliste dans la garantie de certains droits

La Déclaration du Caire contient des droits qu’on retrouve dans d’autres déclarations et qui
sont religieusement neutres. Ainsi, l’égalité entre les êtres humains et l’égale dignité (art. 1 et
4)47 ; la protection de la vie humaine : le droit à la vie (art. 2 a), l’interdiction de « recourir à
des moyens qui pourraient conduire à un génocide » (art. 2 b), la garantie de l’intégrité
physique (art. 2 d) ; le droit humanitaire : l’article 3 s’attarde sur la protection des civils, des
blessés, des malades, des prisonniers de guerre en cas de conflits armés et prévoit qu’il « est
interdit de couper des arbres, de détruire des moissons ou du bétail, ou les installations et les
bâtiments civils de l’ennemi par des bombardements, à l’aide d’explosifs ou par tout autre
moyen », l’article 12 consacre le droit d’asile ; la liberté individuelle (art. 11 a), la sûreté (art.
18 a), l’interdiction de la torture, des expériences médicales ou scientifiques forcées et des
arrestations arbitraires (art. 20), les droits procéduraux tels que l’égalité devant la loi, le droit
de recourir à la justice, le principe de légalité des délits et des peines et la présomption

45
Mohammed ARKOUN, « Pratique et garanties des droits de l’Homme dans le monde islamique », op. cit., p.
49.
46
Yadh BEN ACHOUR, « Les droits fondamentaux entre l’universalité et les spécificités culturelles et
religieuses », op. cit., p. 91.
47
La Déclaration de Lahore adoptée lors du deuxième sommet en 1974 indiquait que « la solidarité des peuples
islamiques ne repose pas sur une hostilité à l’égard d’aucune autre communauté humaine ni sur des distinctions
de race et de culture, mais sur des préceptes positifs et éternels d’égalité, de fraternité et de dignité de l’homme,
d’affranchissement du joug de la discrimination et de l’exploitation, de la lutte contre l’oppression et l’injustice »
(II-1). Voir, pour une analyse du concept de dignité en général, Béatrice MAURER, « Essai de définition
théologique et philosophique de la dignité humaine », Les droits fondamentaux, Jacques-Yvan MORIN (dir.),
op. cit., pp. 223-252.

14
d’innocence (art. 19) ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels que nous
étudierons ultérieurement.

Il y a surtout des droits qui revêtent un cachet islamique :


L’article 2 a) précise qu’il est « interdit d’enlever la vie sans raison légale ». La « raison
légale » permet donc d’ôter la vie ; c’est une référence à la possibilité d’appliquer la peine de
mort48.
L’article 2 c) dispose que « la continuité de l’existence humaine, jusqu’à ce que Dieu en
décide autrement, est un devoir légal ». C’est une interdiction claire du suicide.
L’article 7 a) dit que « la mère et le fœtus recevront protection et un traitement spécial ». La
question de l’avortement (intervention volontaire de grossesse) n’a pas reçu une réponse
uniforme ; le Coran est muet, le Prophète aurait signalé que l’être humain ne reçoit l’âme dans
le ventre de sa mère que 120 jours après la conception ; les théologiens ont émis des avis
différents mais quoiqu’il en soit, l’avortement thérapeutique n’est possible que s’il y a un
danger de mort ou de maladie permanente pour la mère donc ni lorsqu’il y a un risque de
malformation du fœtus ni lorsque la grossesse résulte d’un viol ou d’un adultère 49. Le projet
de 1979 prévoyait dans son article 7 que « l’avortement et l’infanticide sont absolument
prohibés » ; l’article 2 b) du projet de 1981 est moins catégorique : « il est également interdit
de pratiquer l’avortement sans nécessité médicale ». Etrangement, la résolution 16/22-C
(1994) portant « Déclaration sur les droits et la protection de l’enfant dans le monde
islamique » revient à une position rigoureuse. Dans la rubrique « les droits du fœtus », le texte
indique que l’islam reconnaît « un droit absolu à la vie en interdisant l’avortement ». Le
Covenant de 2005 sur les droits de l’enfant en Islam interdit l’avortement sauf s’il y a intérêt
de la mère, de l’enfant ou des deux.
L’article 2 d) dispose qu’on peut porter atteinte à l’intégrité physique pour raison légale. Les
châtiments corporels sont expressément prévus dans le corpus islamique ; cent coups de fouet
en cas d’adultère (Coran 24, 2) ou lapidation (tradition prophétique)50, 80 coups de fouet en
48
La Charte arabe de 2004 est beaucoup plus précise : « Article 6 : La peine de mort ne peut être prononcée que
pour les crimes les plus graves conformément aux lois en vigueur au moment où le crime est commis et en vertu
d'un jugement définitif rendu par un tribunal compétent. Toute personne condamnée à la peine de mort a le droit
de solliciter la grâce ou l'allégement de sa peine. Article 7 : a) La peine de mort ne peut être prononcée contre
des personnes âgées de moins de 18 ans sauf disposition contraire de la législation en vigueur au moment de
l'infraction [dans la version de 1994, la peine de mort est interdite pour les personnes âgées de moins de 18 ans
sans dérogation possible]; b) La peine de mort ne peut être exécutée sur la personne d'une femme enceinte tant
qu'elle n'a pas accouché ou d'une mère qui allaite que deux années après l'accouchement, dans tous les cas
l'intérêt du nourrisson prime ».
49
Voir Sami Awad ALDEEB ABU-SALIEH, Les musulmans face aux droits de l’Homme. Religion et droit et
politique. Etude et documents, Bochum, Winkler, 1994, pp. 44-48.
50
Ibid., p. 62.

15
cas de fausse accusation d’adultère, amputation de la main en cas de vol (Coran 5, 38),
amputation de la main droite et du pied gauche en cas de brigandage et d’insurrection armée
(Coran 5, 33-34).
L’article 5 a) consacre le droit au mariage des hommes et des femmes et précise qu’
« aucune restriction quant à la race, la couleur, ou la nationalité ne les empêchera d’exercer
ce droit ». La religion n’est pas mentionnée puisque la femme ne peut épouser un non-
musulman51. Le projet de 1979 était plus explicite ; l’article 9 disposait : « on tiendra compte
du fait que la foi en Dieu est une condition requise (chez la partenaire) pour le mariage du
Musulman et que l’unité de religion (avec le partenaire) est la condition requise pour le
mariage de la musulmane ». Le projet de 1981 supprime cette explication de texte. En outre,
la question du consentement des époux est passée sous silence dans le texte de 1990 alors
qu’elle figurait expressément dans les projets de 1979 (art. 9) et de 1981 (art. 3). L’âge du
mariage n’apparaît pas non plus dans la Déclaration du Caire. Enfin, l’article 6 b) rappelle que
« le mari a la charge de l’entretien de la famille et la responsabilité de sa protection »52.
La vie privée est également protégée53 mais encore une fois conformément aux valeurs
islamiques. Ainsi, l’article 18 prévoit que « b) tout individu a droit à l’indépendance dans les
affaires de sa vie privée : son domicile, sa famille, ses biens et ses relations. Il n’est pas
permis de l’espionner, de le contrôler ou de porter atteinte à sa réputation. Il doit être protégé
contre toute intervention arbitraire. c) Le domicile privé est inviolable dans tous les cas.
(…) ». Aujourd’hui, la liberté sexuelle c’est-à-dire le loisir d’avoir des relations sexuelles
entre adultes consentants est considérée comme un élément de la vie privée54. Or, dans la
résolution 16/22-C (1994) portant « Déclaration sur les droits et la protection de l’enfant dans
le monde islamique », cette extension est condamnée : « L’islam a magnifié les valeurs de la
chasteté et de la pudeur chez l’homme comme chez la femme et limité les relations sexuelles
51
Le Coran prévoit une interdiction identique pour l’homme et la femme de ne pas épouser des polythéistes (2,
221) mais en se fondant sur un dit du Prophète selon lequel « l’Islam domine et ne saurait être dominé », les
théologiens ont estimé que la femme ne pouvait se marier avec des gens du Livre non plus.
52
L’article 16 de la DUDH dispose quant à lui : « 1) A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune
restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont
des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. 2) Le mariage ne peut être
conclu qu’avec le libre et plein consentement des futurs époux ». Lors du vote de cet article, le Pakistan, l’Iraq et
la Syrie ont voté contre, l’Afghanistan, l’Arabie Saoudite, l’Iran et le Liban se sont abstenus. La Charte arabe
reste, ici, traditionaliste : article 33 a) « (…) le droit de se marier et de fonder une famille selon les règles et les
conditions régissant le mariage, est reconnu à l'homme et à la femme dès qu'ils sont en âge de contracter un
mariage. Il ne peut y avoir de mariage sans le plein et libre consentement des deux parties. La législation en
vigueur réglemente les droits et les devoirs de l'homme et de la femme au regard du mariage, durant le mariage
et lors de sa dissolution ».
53
La protection de la vie privée fait l’objet d’une sollicitude toute particulière ; voir Mashood A. BADERIN.,
International human rights and Islamic law, Oxford University Press, 2003, pp. 116-117.
54
Voir l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, Dudgeon c. Royaume-Uni (22/10/1981) et l’arrêt de
la Cour suprême des Etats-Unis, Lawrence et Al. v. Texas (26/06/2003).

16
entre l’homme et la femme dans le cadre unique à savoir celui du mariage légal. Il a interdit
de façon catégorique le « zina » (le péché de la chair), le concubinage et la déviation sexuelle
aussi bien à l’homme qu’à la femme » (I- La famille).
Le statut général de la femme fait également partie de la spécificité islamique. L’article 6 a)
énonce que « la femme est l’égale de l’homme dans la dignité humaine ; ses droits sont
équivalents à ses devoirs. Elle a la personnalité civile, sa responsabilité financière
indépendante, et le droit de conserver son nom patronymique et ses liens de famille ». On note
que les femmes et les hommes ne sont égaux qu’en dignité et non en droits. En effet, l’islam
assigne à chaque sexe une fonction particulière : le père subvient aux besoins de la famille,
choisit l’éducation des enfants et la mère s’occupe du foyer et de l’entretien quotidien de la
famille. Il ne s’agit là ni d’un mépris ni d’une infériorité intrinsèque mais le résultat d’un
partage des rôles55. L’homme et la femme sont d’une égale dignité, il est donc plus idoine de
parler d’équivalence que d’égalité. « L’Islam effectue ainsi une distribution fonctionnelle des
responsabilités entre les sexes et les générations »56. Cette configuration justifie l’inégalité
successorale57 qui apparaît alors comme une mesure d’équité en faveur de l’homme qui porte
seul le poids des charges financières. S’agissant de la répudiation, le mari peut
unilatéralement et discrétionnairement mettre fin au lien conjugal mais cette faculté est
justifiée par le versement d’une dot à la femme dès la formation du mariage. S’agissant du
témoignage, il faut noter que le Coran ne mentionne l’équivalence d’un homme à deux
femmes pour les seules transactions commerciales (2, 282), domaine où les femmes ne sont
pas forcément compétentes à cette époque. Cette équivalence n’apparaît pas dans les versets
qui concernent le témoignage en matière d’adultère et de divorce. D’ailleurs, à y lire le verset
282 de plus près, on comprend que la seconde femme est exigée « de sorte que si l'une oublie
un détail, l'autre sera là pour le lui rappeler » ; in fine, il n’y a donc qu’une seule femme qui
témoigne, l’autre n’intervenant que subsidiairement. Enfin, s’agissant du travail des femmes

55
Le Coran indique que « les hommes ont autorité sur les femmes, en vertu de la préférence que Dieu leur a
accordé sur elles, et à cause des dépenses qu’ils font pour assurer leur entretien » (4, 34). Le projet de 1981 était
quelque peu brutal : article 4 : « (…) l’homme doit avoir le dernier mot et être le chef de la famille ». La
Déclaration islamique universelle des droits de l’homme, proclamée à Paris le 19 septembre 1981 par le Conseil
islamique pour l’Europe, prévoit dans son article 19 h) qu’ « au sein de la famille, les hommes et les femmes
doivent se partager leurs obligations et leurs responsabilités selon leur sexe, leurs dons, talents et inclinations
naturels (…) ». L’article 3 c) de la Charte arabe de 2004 dispose quant à lui : « L'homme et la femme sont égaux
sur le plan de la dignité humaine, des droits et des devoirs dans le cadre de la discrimination positive instituée au
profit de la femme par la charia islamique et les autres lois divines et par les législations et les instruments
internationaux. En conséquence, chaque Etat partie à la présente Charte s'engage à prendre toutes les mesures
nécessaires pour garantir la parité des chances et l'égalité effective entre l'homme et la femme dans l'exercice de
tous les droits énoncés dans la présente Charte ».
56
Robert SANTUCCI, « Le regard de l’Islam », Islam et les droits de l’Homme, Marc AGI (dir.), op. cit., pp.
155-172 : p. 163.
57
Coran 4, 11-13.

17
et de leur investissement dans la vie politique, l’article 13 indique que le travailleur « a droit,
sans aucune distinction entre les hommes et les femmes, à un salaire équitable pour son travail
(…) » et l’article 23 b) que « tout individu a le droit de participer, directement ou
indirectement, à l’administration des affaires publiques de son pays. Il a aussi le droit
d’occuper des fonctions publiques conformément aux dispositions de la Loi islamique ». La
pusillanimité est plutôt évidente dans le dernier cas puisque c’est la Loi islamique qui reste
l’étalon. En outre, dans le préambule de la Charte de l’OCI révisée en 2008, les Etats
membres se disent déterminés « à préserver et à promouvoir les droits des femmes et à
favoriser leur participation effective dans tous les domaines de la vie, conformément aux lois
et législations des Etats membres ». Autant dire, une disposition vide de sens puisque la
législation nationale prime. D’ailleurs, dans la déclaration de Dakar adoptée lors du sixième
Sommet en décembre 1991, l’OCI réaffirme « l’importance du rôle de la femme dans le
processus de développement de la société musulmane appelant instamment à une plus grande
participation de la femme aux activités de développement économique et social » (point IX du
3è paragraphe) mais pas politique… La résolution 16/21-C (1993) intitulée « sur le rôle de la
femme dans la société musulmane » réaffirme, elle, « sa profonde considération pour le rôle
de la femme dans l’édification et le développement de la société musulmane dans tous les
domaines » (point 1)58.
L’article 12 consacre la liberté d’aller et de venir mais l’inscrit dans le cadre de la Loi
islamique ; lors de la discussion de l’article 13 de la DUDH concernant le droit de circuler
librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat, l’Arabie saoudite s’y était opposée
au motif que les non-musulmans ne peuvent pénétrer à La Mecque ni au Hedjaz. Or, la
Déclaration du Caire ne concernant que les musulmans, la référence à la Loi islamique semble
concerner les restrictions qui entourent le déplacement de la femme.
La liberté religieuse est une autre pierre d’achoppement ; l’article 10 prévoit que « l’islam
est la religion naturelle de l’homme. Il n’est pas permis de soumettre ce dernier à une
quelconque forme de pression ou de profiter de sa pauvreté ou de son ignorance pour le
convertir à une autre religion ou à l’athéisme ». Cet article peut se combiner à l’article 18 a)
qui dispose que « tout individu a droit à la sécurité de (…) sa religion (…) ». On ne retrouve

58
Les résolutions-proclamations sont nombreuses et quasiment après chaque conférence, une mention aseptisée
rappelle que « nous sommes pleinement conscients de la vocation véritable de l’Islam qui est de promouvoir la
dignité des femmes et d’en renforcer le rôle social. Aussi, nos politiques et nos actions devront-elles tendre à en
réaffirmer les droits, le statut social et la dignité comme nous l’enjoint notre religion » ( Déclaration de Putrajaya
sur le savoir et la moralité pour l’unité, la dignité et le progrès de la Oummah, adoptée lors du dixième sommet
en 2003). La résolution 2/37-ORG (2010) crée une organisation spécialisée pour la promotion de la femme au
sein de l’OCI.

18
pas la formulation classique « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de
religion »59. On comprend, de prime abord, que seule la pression pour convertir le musulman
est interdite ; en apparence, le texte n’interdit pas les tentatives qui se font sans provocation,
mais cette ouverture est contrariée dès le départ puisque l’article commence par affirmer que
l’islam est la religion naturelle de l’homme. En réalité, ce n’est pas la conversion par la
pression qui est interdite, c’est la conversion tout court. Le droit musulman classique nous
enseigne que c’est la faculté de changer de religion qui est, en réalité, visée. L’Arabie
Saoudite mena une fronde lors des discussions sur les articles pertinents de la DUDH et du
PIDCP60. L’article 29 du projet de 1979 indiquait clairement que « le musulman a l’obligation
personnelle de demeurer fidèle à l’Islam dès lors qu’il y a adhéré en toute liberté », position
reprise en 1981 : article 12 : « le musulman qui a été guidé à l’Islam ne doit pas se convertir à
une autre religion ». L’enseignement classique nous apprend que l’apostat doit être mis à mort
non pas en vertu du Coran mais d’un dit du Prophète qui aurait incité ses fidèles à tuer celui
qui change de religion61. Ce n’est donc pas le souci de protéger les « droits et libertés
d’autrui » qui guide l’esprit de l’article, c’est plutôt celui de préserver l’ordre public compris
dans le sens de l’article 22 c) : « (…) il est de même interdit de faire ce qui viole les valeurs
éthiques, provoque la désintégration et la corruption de la société, lui porte préjudice, ou sape
la croyance ». En outre, le texte de l’OCI ne prévoit rien sur les manifestations extérieures de
la croyance religieuse alors que c’est l’enjeu même de la liberté religieuse qui doit pouvoir se
déployer dans les prières, les pèlerinages, les cérémonies ou l’enseignement. En revanche, les
sentiments religieux sont bien protégés puisque l’article 22 c) interdit de « s’attaquer aux
choses sacrées et à la dignité des Prophètes ». On sait que dans son arrêt très discuté Otto-
Preminger-Institut du 20 septembre 1994, la Cour européenne avait estimé qu’on pouvait
« juger nécessaire (…) de sanctionner, voire de prévenir, des attaques injurieuses contre des
objets de vénération religieuse » (§ 49). Dans les deux cas, c’est le mot « attaque » qui est
employé c’est-à-dire qu’au-delà de la simple critique, il faut une offense. Mais cette
conception restrictive peut ne pas être celle de l’OCI.
Enfin, il faut relever que la liberté d’expression est également soumise à des limitations.
L’article 22 reconnaît le droit d’exprimer librement son opinion mais « d’une manière non
contraire aux principes de la Loi islamique », l’importance de l’information pour la société

59
Formulation qu’on retrouve à l’article 18 de la DUDH, à l’article 18-1 du PIDCP, à l’article 9 de la CEDH et à
l’article 30 a) de la Charte arabe de 2004.
60
Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au développement du droit international des droits de
l’Homme, op. cit., p. 189 et p. 226.
61
Les versets coraniques se contentent de promettre à l’apostat un châtiment douloureux ici-bas et dans l’au-delà
(2, 217 ; 3, 87 ; 3, 177 ; 9, 74).

19
mais indique les restrictions susmentionnées sur les valeurs religieuses et interdit l’incitation à
la haine raciale ou religieuse62. D’ailleurs, article 1 de la Charte révisée de l’OCI lui assigne
comme objectif de « lutter contre la diffamation de l’Islam » (point 12)63.
En réalité, les articles font souvent référence à la Loi islamique mais une restriction générale
est également prévue dans les deux derniers articles de la Déclaration. L’article 24 dispose
que « tous les droits et libertés énoncés dans ce document sont subordonnés aux dispositions
de la Loi islamique » et l’article 25, « La Loi islamique est la seule source de référence pour
interpréter ou clarifier tout article de cette Déclaration ». C’est donc la charia qui innerve
chaque pan de ce texte quand bien même l’article n’y comporte aucune référence directe. Il
faut, enfin, noter qu’il n’y a qu’un droit intangible formulé dans l’article 20 sur l’interdiction
de la torture, des traitements inhumains, humiliants et brutaux et des expériences scientifiques
non consenties ; l’article dispose, in fine, qu’il « n’est pas permis de promulguer des lois
exceptionnelles qui permettent aux autorités exécutives de recourir à de tels traitements »64.
On peut surtout estimer que l’intangibilité d’autres dispositions ne pourrait être déduite que
des provisions de la charia qui, elle seule, régit toute la Déclaration65.

L’étude de l’aspect religieux ne doit pas faire perdre de vue le fait que les Etats membres de
l’OCI ont également des caractéristiques communes sur le plan de leur positionnement
62
A cet égard, l’article 32 de la Charte arabe de 2004 est plus complet, il garantit « le droit à l'information et la
liberté d'opinion et d'expression et le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations par tout
moyen, sans considération de frontières géographiques » mais dans la rubrique des restrictions, en plus des
restrictions classiques comme les droits et la réputation d’autrui, la sauvegarde de la sécurité nationale, de
l’ordre, de la santé ou de la moralité publics, il est précisé que cette liberté doit s’exercer « dans le cadre des
principes fondamentaux de la société ».
63
L’OCI avait condamné la publication des Versets sataniques dès 1989, et a derechef condamné la publication
des caricatures sur le Prophète et le film de Geert Wilders dans la déclaration finale du sommet de Dakar en
2008.
64
Voir pour une comparaison entre les différents textes relatifs aux droits de l’homme, Catherine MAIA, « De la
signification des clauses de non-dérogation en matière d’identification des droits de l’Homme impératifs », Les
droits de l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim
LAGHMANI (dir.), Actes du colloque des 17, 18 et 19 avril 2008, VIIIè rencontre internationale de la Faculté
des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, Paris, PEDONE, 2008, pp. 39-61. Voir également Chérif
BASSIOUNI, « Les états d’urgence et d’exception : les violations des droits de l’Homme et l’impunité sous
couvert de droit », Droits intangibles et états d’exception, Daniel PREMONT, Christian STENERSEN et
Isabelle OSEREDCZUK, Bruxelles, Bruylant, 1996, pp. 107-123 et Matar DIOP, « La Charte africaine des
droits de l’Homme et des peuples et l’intangibilité des droits fondamentaux », ibid., pp. 413-420.
65
Voir Osman EL-HAJJE : « La Déclaration du Caire des droits de l’Homme en Islam et les droits non
susceptibles de dérogation », Droits intangibles et états d’exception, Daniel PREMONT, Christian
STENERSEN et Isabelle OSEREDCZUK, op. cit., pp. 429-437. L’auteur range dans la catégorie des droits
intangibles en se fondant sur la charia, l’égalité devant la loi (« l’égalité est le principe juridique non susceptible
de dérogation le plus important en islam », p. 433), le droit de recours devant la justice, le principe de la légalité
des délits et des peines et la participation des citoyens aux affaires publiques en se fondant sur l’obligation
coranique de se consulter pour les affaires de la communauté (3, 159 ; 42, 36-38). En revanche, il ne considère
pas que l’interdiction de la torture ou des traitements inhumains fait partie de cette catégorie puisque la charia
prévoit des châtiments corporels pas plus que le droit à la vie, la charia prévoyant des cas où il est possible d’ôter
la vie d’une personne.

20
politique ; leur vision des droits de l’Homme est donc également empreinte d’idéologie
politique.

Section 2 : Une conception politique des droits de l’Homme


Elle se manifeste à travers l’attention accordée au droit des peuples (§ 1) et surtout à travers
le ralliement aux « trois générations » des droits de l’Homme (§ 2).

§ 1 : Une attention particulière pour le droit des peuples


Les circonstances de la création de l’OCI font qu’elle a érigé en credo identitaire, la lutte
contre le sionisme et le racisme (A) et la défense des minorités musulmanes dispersées çà et là
dans le monde entier (B).

A) Le combat « existentiel » contre le sionisme et le racisme

La création de l’OCI répond à l’incendie de la mosquée Al-Aqsa certes, mais elle apparaît
aussi comme l’aboutissement d’une colère accumulée contre les agissements de l’Etat
d’Israël. L’incident combiné à la frustration des Etats arabes va faire de la lutte contre le
racisme et le colonialisme le cheval de bataille de l’OCI. L’article 11 b) de la Déclaration du
Caire dispose que « le colonialisme, sous toutes ses formes, qui constitue la forme la plus
pernicieuse de l’asservissement, est totalement interdit. Les peuples souffrant du colonialisme
ont pleinement droit à la liberté et à l’autodétermination. Il est du devoir de tous les Etats et de
tous les peuples de soutenir ce combat pour la liquidation de toutes les formes de colonialisme
et d’occupation. Tous les peuples ont le droit de préserver leur identité indépendante et
d’exploiter leurs richesses et leurs ressources naturelles ». Déjà dans la Charte de l’OCI de
1972, l’un des buts de l’organisation était « d’œuvrer à éliminer la discrimination raciale et le
colonialisme sous toutes ses formes » (art. II, A-3) et de « coordonner l’action pour
sauvegarder les Lieux Saints, soutenir la lutte du peuple palestinien et l’aider à recouvrer ses
droits et à libérer ses territoires » (art. II, A-5). La Charte révisée de 2008 multiplie les
références : « soutenir les justes causes des Etats Membres » (art. 1-2), « respecter le droit à
l’autodétermination (…) » (art. 1-3), « soutenir la restauration de la souveraineté complète et
l’intégrité territoriale d’un Etat membre sous occupation étrangère par suite d’une agression
(…) » (art. 1-4), « réaffirmer le soutien aux droits des peuples tels que stipulés par la Charte
des Nations Unies et par le droit international » (art. 1-7), « soutenir le peuple palestinien et

21
lui donner les moyens d’exercer son droit à l’autodétermination et à créer son Etat souverain,
avec pour capitale al-Qods al-Charif, tout en préservant le caractère historique et islamique
ainsi que les Lieux Saints de cette ville » (art. 1-8)66.

L’OCI ne s’est pas contentée de graver cette préoccupation sur le marbre de ses textes
fondateurs mais a saisi chaque occasion pour adopter des résolutions réaffirmant son soutien à
la cause palestinienne. Il faut noter que le ton est devenu, au fil des ans, moins belliqueux. La
Déclaration de Rabat, issue du tout premier Sommet de 1969, dénonçait l’occupation militaire
israélienne d’Al-Qods (et accessoirement des territoires arabes) et soulignait « la ferme
intention [des musulmans] de lutter pour sa libération ». La conférence de Jeddah en 1970
qualifie le sionisme de « mouvement raciste et expansionniste, allant à l’encontre des nobles
objectifs et idéaux de l’humanité et constituent une menace permanente à la paix mondiale »67
et proclame le 21 août (jour de l’incendie), journée de solidarité avec la lutte du peuple
palestinien. En 1972, la troisième conférence appelle à des mesures de rétorsion politique et
économique et en 1973, le ton monte d’un cran : l’OCI demande de « créer dans les Etats
islamiques, des centres de recrutement pour les volontaires désireux de participer au djihad
pour la libération des Lieux Saints » (rés. 1/4, point 3). Un fonds du Djihad est créé. A la suite
de l’annexion d’al-Qods par Israël et de sa décision de faire de Jérusalem sa capitale éternelle
et unifiée, l’OCI tient une session extraordinaire en 1980 et proclame « son adhésion totale au
Djihad sacré, y compris les vastes implications que cela suppose en terme humain,
considérant qu’il s’agit là d’une résistance à l’ennemi sioniste et d’une lutte contre lui sur tous
les plans militaire, politique, économique, culturel et d’informations »68. Un « bureau
66
Lors des discussions sur les deux pactes de 1966, tous les Etats islamiques (sauf la Turquie) ont soutenu
l’incorporation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ; les deux pactes ont un article premier commun qui
rappelle ce droit. La Charte arabe de 2004 y fait également référence : article 2 : « a) Tous les peuples ont le
droit de disposer d'eux-mêmes et d'être maîtres de leurs richesses et leurs ressources, et le droit de choisir
librement leur système politique et de poursuivre librement leur développement économique, social et culturel;
b) Tous les peuples ont le droit de vivre à l'ombre de la souveraineté nationale et de l'unité territoriale; c) Toutes
les formes de racisme, le sionisme, l'occupation et la domination étrangères constituent une entrave à la dignité
de l'homme et un obstacle majeur à l'exercice des droits fondamentaux des peuples; il est impératif de
condamner leur pratique sous toutes ses formes et de veiller à leur élimination; d) Tous les peuples ont le droit de
résister à l'occupation étrangère ».
Voir pour plus de détails notamment les résolutions de l’assemblée générale des Nations-Unies, Rafaâ BEN
ACHOUR, « Les droits de l’Homme et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », Les droits de l’Homme.
Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), op. cit.,
pp. 11-37.
67
En 1975, c’est au tour de l’Assemblée générale des Nations Unies d’assimiler le sionisme au racisme
(résolution 3379). En 1991, l’OCI exprime son inquiétude face à la tentative d’abroger cette résolution
(résolution 6/6-P IS). Elle sera néanmoins abrogée une semaine plus tard, le 16 décembre 1991.
68
Le Roi Hassan II, président du Comité Al-Qods, précise la notion de djihad pour éviter les aventures : « le
djihad n’est pas le recours aux guerres de religion ou à des croisades mais une action militaire, stratégique et
politique et une guerre psychologique », Rachid Ben El Hassan ALAOUI, op. cit., p. 206. Voir également,
Hadijetou Demba CAMARA, L’Organisation de la conférence islamique : une organisation originale de

22
islamique de boycottage d’Israël » et un « bureau de coordination militaire avec la Palestine »
sont créés au sein du secrétariat en 1981 (résolutions 14/12-P et 15/12-P)69. En 1991, elle
appuie « l’intifada béni du peuple palestinien » (rés. 3/20-P). La Déclaration de Casablanca
adoptée en 1994 rappelle que la cause palestinienne est la « cause première de tous les
musulmans » et engage une rhétorique beaucoup plus apaisée que d’ordinaire ; l’OCI déclare
prendre acte « avec satisfaction du processus de paix en cours au Moyen-Orient », accepte le
principe de « l’échange de la terre contre la paix » et affirme son soutien aux résolutions 242,
338 et 425 du Conseil de sécurité. La référence au djihad disparaît des textes.

Le concept des droits de l’Homme qui, bizarrement, n’apparaissait que sporadiquement


dans les résolutions, est toujours invoqué lorsqu’il s’agit de défendre la cause palestinienne.
« Il ne serait pas exagéré de dire que l’invocation des droits de l’Homme, dans les pays du
Sud en général et les pays arabes en particulier, est liée à la résistance contre la colonisation et
à la revendication de l’indépendance »70. Nous voyons cette conception politique dans les
résolutions qui soutiennent les minorités musulmanes.

B) La problématique de la défense des minorités musulmanes

La Charte de 1972 prévoit, dans ses objectifs, de « consolider la lutte de tous les peuples
musulmans pour la sauvegarde de leur dignité, leur indépendance et leurs droits nationaux »
(art. II A-6). La formulation de la Charte de 2008 est moins révolutionnaire : « préserver les
droits, la dignité et l’identité religieuse et culturelle des communautés et minorités
musulmanes dans les Etats non membres » (art. 1-16). En même temps, la charte de 1972
pose comme principe de respecter « la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale
de chaque Etat membre » (art. II B-3) et celle de 2008 classe cette exigence non seulement
dans la rubrique « objectifs » (art. 1-3) mais également dans la partie « principes » (art. 2-4).
Ce souci de ne pas porter atteinte à l’intégrité territoriale d’un Etat membre tranchait crûment

coopération transcontinentale, thèse Paris Sud XI, 1998, pp. 238-245.


69
A cet égard, il faut rappeler que l’OCI condamne le terrorisme sous toutes ses formes mais elle le distingue de
la « lutte des peuples pour les causes justes et la libération de leurs territoires » (rés. 20/5-P IS).
70
Ahmad MAHIOU, « La réforme de la protection des droits de l’Homme dans le monde arabe », La réforme
des institutions internationales de protection des droits de l’Homme, Premier colloque international sur les droits
de l’Homme, La Laguna, Ténérife, 1er-4 novembre 1992, Bruxelles, Bruylant, 1993, pp. 321-339 : p. 323. Voir
également Mashood A. BADERIN, op. cit., p. 57 : “Apart from colonial contexts, Muslim States strongly abhor
the invocation of the right of self-determination by minority groups as a basis for independence or secession.
The classical Islamic politico-legal notion of a single Islamic political empire that transcends ethnic, tribal,
racial, or territorial distinctions disfavours any claim to secession on the basis of the right to self-determination
within the Islamic State”.

23
avec celui de défendre « l’indépendance » des minorités musulmanes dans les autres Etats.
C’est sans doute la raison pour laquelle la Charte actualisée en 2008 a supprimé cette
vocation. Il n’en reste pas moins que l’OCI défend toujours le droit à l’autodétermination.
Rachid Ben El Hassan Alaoui note que cette défense de l’autodétermination visait
spécifiquement la minorité Moro aux Philippines et la communauté turque de Chypre ; « en
dehors de ces situations, l’OCI est restée fermement attachée au respect de la souveraineté et
de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des Etats membres mais aussi des Etats où
vivent les minorités musulmanes »71. En 1993, elle précise que « le droit à l’autodétermination
s’applique aux peuples sous domination étrangère ou coloniale ou sous occupation étrangère,
et ne devrait pas servir pour porter atteinte à l’intégrité territoriale, à la souveraineté nationale
et à l’indépendance politique des Etats » (rés. 41/21-P, point 10)72.

Plusieurs comités ont été mis sur pied pour suivre les difficultés que rencontrent les
minorités musulmanes dans le monde ; ainsi, le Comité Al-Qods (1975), le Comité des Six
pour les musulmans du Sud des Philippines (1973)73, le Comité pour l’Afrique du Sud et la
Namibie (1987), le Comité de solidarité avec les peuples du Sahel (1981), le Comité ad hoc
sur l’Afghanistan après l’invasion soviétique, etc. L’OCI a réagi différemment dans d’autres
cas : en 1972, elle condamne l’agression israélienne contre la Syrie et le Liban ; en 1973, elle
condamne l’agression portugaise contre la Guinée et le Sénégal (rés. 9/4), appuie « la lutte
légitime » de l’Erythrée contre l’Ethiopie (rés. 7/4) ; en 1974, elle soutient la décolonisation
du Sahara par l’Espagne (rés. 5/5-P) ; en 1976, elle dit soutenir « les efforts de la communauté
turque de Chypre » (rés. 16/7-P) sans aller jusqu’à reconnaître la République turque de
Chypre du Nord proclamée en 1983 ; en 1980, elle condamne l’intervention soviétique et la
menace ou le recours à la force contre l’Iran ; pour le Cachemire, elle propose, en 1990, une
mission de bons offices ; en 1992, une session extraordinaire des ministres des affaires
étrangères rappelle le droit à l’autodétermination du Cachemire alors que pour le conflit du
Haut-Karabakh, elle préfère se référer à l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan ; la même
année, une autre session extraordinaire condamne « la violation massive et flagrante des droits
71
Rachid Ben El Hassan ALAOUI, op. cit., p. 44.
72
Pour une comparaison avec l’appréhension africaine, voir Mutoy MUBIALA, « Les droits des peuples en
Afrique », RTDH, n° 60, 2004, pp. 985-1000 et d’une manière générale, Antoine MEKINDA BENG, « Le droit
des peuples à disposer d'eux-mêmes dans la conjoncture institutionnelle actuelle des Etats du tiers-monde en
mutation », RTDH, n° 58, 2004, pp. 503-526.
73
La résolution 4/4 déplore « les conditions de vie des Musulmans aux Philippines et les mesures de répression
et de génocide dont ils sont victimes, en violation de la Déclaration universelle des droits de l’Homme adoptée
par les Nations Unies et la Charte de cette Organisation ». Voir également, Georges FISCHER, « Une tentative
de protection internationale d’une minorité : la Conférence islamique et les musulmans philippins », A.F.D.I
1977, pp. 325-341.

24
humains du peuple bosniaque » et qualifie la pratique serbe de « nettoyage ethnique et de
déportation des Musulmans et des Croates, de politique de génocide et de crime contre
l’humanité » ; en 1994, elle demande la préservation de la souveraineté, de l’intégrité
territoriale et de l’indépendance politique de la Bosnie-Herzégovine et condamne
« l’agression serbe ainsi que l’embargo sur les armes imposé à la Bosnie par le Conseil de
sécurité » ; en 2000, assez étrangement, elle fait part de sa préoccupation pour la crise
tragique et les pertes en vies humaines en Tchétchénie mais réaffirme son respect pour
l’intégrité et la souveraineté territoriales de la Fédération de Russie (rés. 23/27-P) ; en 2001,
après les attentats du 11 septembre, une session extraordinaire reconnaît qu’il faut lutter
contre les actes terroristes mais se dit préoccupée par le fait que « la lutte contre le terrorisme
pourrait faire des victimes parmi les innocentes populations civiles en Afghanistan »,
réaffirme « la nécessité de garantir l’intégrité territoriale de ce pays et de préserver son
identité islamique » ; enfin, en 2003, la Déclaration de Téhéran se prononce contre la guerre
d’Iraq et exprime sa « préoccupation concernant la tendance croissante à faire fi du droit
international et aux objectifs et principes de la Charte des Nations Unies ».

Il nous faut, dès à présent, analyser cet autre choix politique que fait sien l’OCI :
l’indivisibilité des droits de l’Homme.

§ 2 : Une approche globale dans la promotion des droits de l’Homme


L’OCI est une structure qui regroupe des Etats du Tiers-monde, peu développés, peu
démocratiques mais qui souhaitent en même temps dépasser les querelles de prééminence en
matière de droits civils et politiques et de droits économiques, sociaux et culturels (A) et qui,
peu à peu, a incorporé dans sa conception des droits de l’Homme, les droits dits de « la
troisième génération » (B).

A) L’adoption du principe de l’indivisibilité des droits civils et politiques/droits


économiques, sociaux et culturels

S’il y a bien une spécificité islamique en matière des droits de l’Homme, c’est celle de
l’inséparabilité des deux blocs traditionnellement conçus : celui des droits civils et politiques
et celui des droits économiques, sociaux et culturels. La Déclaration universelle des droits de
l’Homme avait eu pour mérite de croiser les deux ; mais les Etats occidentaux et le bloc
soviétique étaient revenus à la charge en 1966 quand il s’est agi d’accorder une portée

25
juridique aux droits proclamés. La DUDH a pris corps dans deux textes différents : le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et le Pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), tous deux ouverts à la signature en 1966
et entrés en vigueur avec deux mois d’écart en 1976. L’approche soviétique consistait à
dénoncer les droits civils et politiques comme des « libertés formelles » sans utilité pratique
alors que les droits économiques apparaissaient comme des « libertés réelles » censées
permettre la mise en place d’un système où, à terme, les droits civils et politiques pourraient
également se déployer. Les Etats islamiques, quant à eux, voulaient éviter qu’il y ait deux
pactes séparés74. La Proclamation de Téhéran de 1968 sous l’égide de l’ONU rappela que
« les droits de l’Homme et les libertés fondamentales étant indivisibles, la jouissance
complète des droits civils et politiques est impossible, sans celle des droits économiques,
sociaux et culturels (…) » (§ 13).

L’OCI s’est toujours prononcée pour une approche globale. Par exemple, la résolution
41/21-P (1993) qui avait pour but de présenter la position officielle de l’OCI à l’approche de
la Conférence de Vienne, réitérait « l’interdépendance et le caractère inséparable des droits
économiques, sociaux, culturels, civils et politiques et le lien existant entre le développement,
la démocratie et la jouissance universelle des droits de l’Homme et de la justice sociale, qui
doivent être traités de manière globale et équilibrée ». Ainsi, dans la Déclaration du Caire, on
trouve le droit au travail et à la garantie sociale (art. 13) : l’individu (homme ou femme) a
droit à un salaire équitable, à des « congés, allocations et promotions qu’il mérite » mais il
doit être « loyal et méticuleux dans son travail » ; les droits d’autrui sont sauvegardés : « tout
individu a le droit de gagner légitimement sa vie sans monopoliser, tromper ou causer du tort
à lui-même ou à autrui. L’usure est explicitement interdite » (art. 14). En revanche le droit de
fonder des syndicats et le droit de grève ne sont pas explicitement reconnus : « Si les ouvriers
et les employeurs sont en désaccord, l’Etat interviendra pour aplanir le différend, faire réparer
les torts, affirmer le droit et faire respecter la justice sans parti pris » (art. 13 in fine). En outre,
« l’Etat garantit le droit de tout individu à une vie digne, qui lui assure ses besoins ainsi que
ceux dont il a la charge. Ces besoins englobent la nourriture, les vêtements, le logement,
l’éducation, les soins médicaux, ainsi que tous les besoins essentiels » (art. 17 c)75. Le droit de

74
Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au développement du droit international des droits de
l’Homme, op. cit., p. 230.
75
La Déclaration consacre ainsi un droit à la sécurité sociale ; en effet, la « zakat » est un des cinq piliers de
l’islam (Coran, 9, 103 ; 9, 60) ; le Calife Omar avait décidé de subvenir aux besoins des nécessiteux, des sans
emplois, des malades, des veuves, des orphelins, des vieillards et des anciens combattants par le biais du Trésor.
Mais le principe reste le travail : « The individual is urged to work to earn a living whenever he can, rather than

26
propriété est également garanti mais la jouissance doit se faire « sans préjudice pour lui-
même, pour autrui ou pour la société » (art. 15). C’est la transcription de la vision classique
selon laquelle tout appartient à Dieu, l’homme est « usufruitier » et doit donc utiliser ses biens
dans l’intérêt de tous. L’article 16 consacre, quant à lui, le droit de propriété intellectuelle,
l’homme « a le droit de sauvegarder les intérêts moraux et financiers qui en découlent, à
condition que sa production ne soit pas contraire aux normes de la Loi islamique » ce qui
restreint considérablement la portée d’un tel droit dans les sociétés musulmanes où la libre
imagination tombe souvent dans les mailles du conformisme76. Enfin, les droits de l’enfant
font l’objet d’une attention particulière : l’article 7 dispose que « dès la naissance, chaque
enfant a des droits à faire valoir sur ses parents, la société et l’Etat, en ce qui concerne sa
garde, son éducation et sa prise en charge sur le plan matériel, sanitaire et moral (…) » et
poursuit : « Les pères et leurs remplaçants ont le droit de choisir l’éducation de leurs enfants,
à condition de sauvegarder les intérêts et l’avenir de ces derniers, à la lumière des valeurs
morales et des normes de la Loi islamique ». Cet article doit se combiner avec l’article 9
relatif à l’enseignement ; celui-ci est un « devoir de l’Etat et de la société »77 ; l’éducation doit
permettre de « connaître la religion islamique, découvrir les réalités de l’univers et soumettre
ces dernières au bien de l’humanité ». Il s’agit donc plus de poser des jalons que de consacrer
l’épanouissement individuel ; les jeunes esprits doivent être orientés afin d’acquérir « une
depend totally on benefits from the State. Islam discourages any form of parasitical or indolent way of life for
the fit and able. The upper hand (that is, the giving hand) according to the Prophet, is always better than the
lower hand (that is, the receiving hand) » : Mashood A.BADERIN, op. cit., p. 192.
Pour plus d’explications sur le « droit au développement de l’être humain » et la question de l’extrême pauvreté,
notamment au regard des provisions de la CEDH, voir Michel LEVINET, « Recherche sur les fondements du
‘droit au développement de l’être humain’ à partir de l’exemple de la CEDH », Les droits fondamentaux,
Jacques-Yvan MORIN (dir.), op. cit., pp. 43-71 et Alain Didier OLINGA, « Le droit à des conditions matérielles
d’existence minimales en tant qu’élément de la dignité humaine (articles 2 et 3 de la CEDH) », ibid., pp. 91-103.
Cet auteur estime que l’article 2 (droit à la vie) peut servir de fondement au droit à des conditions dignes
d’existence : « Les choses paraissent fort simples : ou l’on est vivant, et son droit à la vie n’est pas violé, ou l’on
a été tué, et son droit à la vie a déjà été violé. En somme, la violation du droit à la vie ne se concrétiserait que par
la privation de la vie. Il faut pourtant sortir de cette opposition facile, qui diminue réellement la portée du droit à
la vie (quelle est cette violation d’un droit individuel dont la victime ne pourrait, elle-même, poursuivre l’auteur
devant le juge ?), et admettre qu’entre le blanc de la vie et le noir de le mort, il y a des stades critiques, des vies
qui n’en sont plus vraiment, des morts ambulantes qui ne veulent pas véritablement s’assumer ou que l’on
s’ingénie (par cynisme ou par indifférence) à ne pas voir » (p. 93).
76
Néji BACCOUCHE, « Les droits de l’Homme à travers la Déclaration des droits de l’Homme de
l’Organisation de la Conférence islamique », Cahiers de l’Institut du droit européen et des droits de l’Homme,
Montpellier, n° 5, 1996, pp. 13-32 : p. 26 : « Et l’on peut légitimement se poser la question de savoir si une
danseuse ou le producteur d’un film comportant des scènes érotiques pourrait bénéficier de ces droits. Il ne s’agit
pas d’une simple hypothèse d’école puisque des œuvres littéraires ou artistiques sont considérés par certains
comme étant contraires à la religion parce qu’elles heurtent la morale ou les règles de la charia. On se souvient
que Nagib Mahfouz a été agressé pour ses idées jugées contraires à la charia ».
77
Les références religieuses abondent pour souligner l’importance de l’instruction : on rappelle souvent que le
premier verset révélé commençait par « Lis au nom de ton Seigneur (…) » (96,1) ; en outre, ces propos du
Prophète sont souvent invoqués : « Faites pour ce monde d’ici-bas comme si vous devriez vivre éternellement et
faites pour votre éternité comme si vous deviez mourir demain » ; « l’encre des savants est plus précieuse que le
sang des martyrs » ; « l’instruction est un devoir pour tout musulman et toute musulmane ».

27
éducation religieuse et profane complète et équilibrée permettant le développement de la
personnalité, la fortification de la foi en Dieu et le renforcement du respect et de la sauvegarde
des droits et des obligations ». La Convention relative aux droits de l’enfant de 1990 à
laquelle tous les Etats islamiques de l’OCI sont parties, consacre, pourtant, le droit de l’enfant
à la liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 14). L’OCI a quant même eu le besoin
d’adopter une Déclaration sur les droits et la protection de l’enfant dans le monde islamique
en 1994 et un Covenant des droits de l’enfant en Islam en 2005. Pourtant, elle avait demandé
à ses Etats membres, à l’issue du sixième Sommet en 1991, d’ « envisager de devenir parties à
la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant en tenant compte de la Déclaration
des droits de l’Homme en Islam » (rés. 2/6-C IS). En 1993, elle va encore plus loin et
demande de « prendre les mesures nécessaires pour que leurs Constitution, lois et pratiques
soient conformes aux provisions de la Convention sur les droits de l’enfant » (rés. 15/21-C).
Cette insistance ne l’a pas empêché d’adopter la Déclaration de 1994 et de rappeler dans son
paragraphe VIII que « tout en garantissant la liberté de l’homme d’embrasser librement et en
dehors de toute contrainte, la religion de son choix, l’Islam interdit au musulman d’abjurer sa
religion qui est le sceau de toutes les révélations célestes. En conséquence, la société
musulmane s’engage à sauvegarder la pérennité de la « Fitra » (disposition naturelle
immaculée) et de la Foi de ses enfants et à protéger ceux-ci contre les tentatives visant à les
faire renier leur Religion musulmane ». Le Covenant de 2005 prévoit dans ses objectifs
d’assurer « la formation de générations d’enfants musulmans qui croient en Dieu, s’attachent
à leur foi, sont dévoués à leur patrie, se conforment aux principes du droit et du bien (…) »
(art. 2-2). Il consacre leur liberté d’expression mais « sans incompatibilité avec les préceptes
de la charia et les règles de conduite » ou encore le droit au respect de leur vie privée sauf
« contrôle islamique raisonnable » des parents (art. 9), enfin envisage un « droit de se revêtir
de vêtements conformes à sa croyance, en observant en cela la charia, les bonnes mœurs et la
pudeur » (art. 12)78.

Abolissant, dès l’origine, la dichotomie entre droits civils et politiques/droits économiques,


sociaux et culturels, l’OCI va s’intéresser progressivement aux droits de la troisième
génération.

78
Pour plus d’explications, voir Mohamed Amin AL-MIDANI, « La protection des droits de l’enfant au sein de
l’Organisation de la Conférence islamique », in Vingt ans de l’IDHL. Parcours et réflexions, Cahier spécial,
Institut des droits de l’Homme de Lyon, Université catholique de Lyon, 2007, pp. 121-135 et sur
www.acihl.org/articles.htm?article_id=14#

28
B) La promotion des droits de la troisième génération79

La Déclaration de 1991 reste muette sur l’environnement 80, elle ne fait référence qu’au droit
de vivre « dans un environnement sans vices et fléaux moraux » (art. 17 a), référence qui ne
concerne pas l’environnement stricto sensu. Il est seulement interdit de couper les arbres, de
détruire des moissons ou du bétail en temps de guerre (art. 3 b). En revanche, cette
préoccupation va progressivement se retrouver dans les résolutions81 jusqu’à être consacrée
par la Charte révisée de 2008. Dans le préambule, les Etats se disent déterminés « à préserver
et promouvoir tous les aspects relatifs à l’environnement humain pour les générations
actuelles et futures » alors que l’article 2 pose comme principe pour les Etats membres de
veiller « à la protection et à la sauvegarde de l’environnement » (art. 2-8).

79
Un débat existe sur l’existence même des droits dits de solidarité tels que la paix, le développement,
l’environnement. Frédéric Sudre parle d’ « impossible identification » en citant les réserves de Jean Rivero :
« aux nouveaux droits, en effet, font défaut certains des caractères que la notion même de droit implique
nécessairement : tout droit doit avoir un titulaire certain, un objet précis et possible, et doit être opposable à une
ou plusieurs personnes déterminées tenues de les respecter » : Frédéric SUDRE, op. cit., pp. 106-107.
80
La Conférence de Stockholm de 1972 pose comme principe : « l’homme a un droit fondamental (…) à des
conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement qui lui permette de vivre dans la dignité et le bien être »
et consacre « le devoir solennel de protéger et d’améliorer l’environnement pour les générations présentes et
futures ». Petit à petit, les textes régionaux de protection des droits de l’Homme vont incorporer ce droit : art. 24
de la Charte africaine, art. 11 du Protocole de San Salvador du 17 novembre 1988 à la Convention inter-
américaine, art. 38 de la Charte arabe de 2004, la CEDH ne contient pas d’article précis mais la jurisprudence l’a
pris en compte. Pour plus de précisions, voir Stéphane DOUMBE-BILLE, « Droits de l’Homme, environnement
et développement durable », Les droits de l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa
BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), op. cit., pp. 137-145.
81
Par exemple, la résolution 1/18-E (1989) qualifie « le droit de tous les êtres humains à un environnement sain
et non pollué comme droit fondamental de l’homme » et rappelle « avec fierté que le patrimoine islamique a été
précurseur dans la perception des problèmes de l’environnement et dans la définition des principes devant régir
les droits et devoirs de manière à concilier la liberté individuelle avec les intérêts de la collectivité ». Il faut noter
qu’elle attire l’attention « sur le fait que tout examen de la question de l’environnement doit prendre en
considération la disparité des niveaux de développement et des degrés de responsabilité des Etats dans la
détérioration de l’environnement qui exige des pays développés qu’ils remplissent leurs devoirs en la matière ».
Dans la Déclaration de Dakar en 1991, les Etats membres s’engagent à « prendre une part active aux travaux de
la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement prévue en juin 1992 à Rio de
Janeiro » (point IX, II). En 1993, la résolution 17/21-E demande aux Etats de signer l’Accord de Bâle sur les
déchets dangereux et « relève la menace potentielle que constitue la montée du niveau de la mer ».

29
Le droit au développement apparaît également dans la Charte de 2008. Sur le plan
international, ce droit apparaît dans la Proclamation de Téhéran en 1968 mais surtout dans la
résolution 32/130 de l’Assemblée générale des Nations Unies (16/12/1977) et la Déclaration
sur le droit au développement du 4 décembre 1986 (rés. 41/128 de l’AGNU)82. Le préambule
de la Charte de 2008 parle d’assurer « le développement durable, le progrès et la prospérité
des peuples des Etats membres » et l’article 1 fixe comme objectif de « s’efforcer de
promouvoir un développement humain intégral et durable et le bien-être économique des
Etats membres » (art. 1-10). En réalité, la résolution 37/20-P de 1991 sur la Déclaration du
Caire établissait déjà un lien entre droits de l’Homme et développement : l’OCI s’était dite
« convaincue de l’impact direct de cette question sur l’accélération du développement, du
progrès et de la stabilité dans les divers domaines économique, social et politique » avant
d’affirmer dans la résolution 56/25-P de 1998 (sur la coopération de l’OCI à la
commémoration du cinquantenaire de la DUDH) que « le droit au développement et à une vie
décente est un droit universel et inaliénable et fait partie intégrante des droits fondamentaux
de la personne (…) »83.

Enfin, les notions de démocratie, de bonne gouvernance, d’Etat de droit font également leur
entrée dans la Charte de 2008. Au niveau international, le rapprochement entre bonne
gouvernance et droits de l’Homme « n’a lieu qu’au début des années 2000 »84. Le préambule
fait référence à la promotion des « droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de la

82
Voir Olivier de FROUVILLE, La Charte des Nations-Unies. Commentaire article par article, Jean-Pierre
COT, Alain PELLET et Mathias FORTEAU, op. cit., pp. 361-378 et Alain PELLET, pp. 1451-1480, tome II.
Voir également Claude-Albert COLLIARD, « L’adoption par l’assemblée générale de la Déclaration sur le droit
au développement (4/12/1986) », A.F.D.I, 1987, pp. 614-627. Le point 10 de la Déclaration de Vienne consacre
également le droit au développement en tant que « droit universel et inaliénable qui fait partie intégrante des
droits fondamentaux de la personne humaine ».
83
Le lien entre le droit au développement et le droit à une vie décente permet en réalité d’élargir le sens de ce
droit et de ne pas le penser strictement par rapport aux groupes mais également et sans doute principalement par
rapport à l’Homme. Voir l’analyse percutante de Kéba M’BAYE à ce sujet : « Le droit au développement
comme un droit de l’Homme », RDH, 1972, pp. 503-534 : « Il ne viendrait à l’idée de personne de dire que M.
Dupont est un homme développé. Mais pour apprécier l’état de développement de la France, la situation
personnelle de M. Dupont ne peut pas être indifférente dans la détermination de la croissance, dans un pays où la
productivité, la consommation et l’épargne de chaque citoyen entrent en ligne de compte » (p. 508).
84
Olivier de FROUVILLE, « Droits de l’Homme et droit international du développement », Les droits de
l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI
(dir.), op. cit., pp. 99-109 : p. 103. Le « Consensus de Monterrey » constate qu’ « un bon gouvernement est la
condition sine qua non d’un développement durable. Des politiques rationnelles et des institutions démocratiques
solides répondant aux besoins de la population et des infrastructures améliorées sont indispensables pour
maintenir la croissance économique, réduire la pauvreté et créer des emplois. La liberté, la paix et la sécurité, la
stabilité intérieure, le respect des droits de l’Homme, y compris le droit au développement, et de l’état de droit,
l’égalité entre les sexes, des politiques fondées sur l’économie de marché et la volonté générale de créer des
sociétés justes et démocratiques sont également nécessaires et synergiques » (§ 11).

30
bonne gouvernance, l’Etat de droit, la démocratie et la responsabilité dans les Etats
membres » mais ajoute « conformément à leurs systèmes constitutionnels et juridiques » et
l’article 2 établit comme principe le soutien et la promotion « aux niveaux national et
international, [de] la bonne gouvernance, [de] la démocratie, [d]es droits humains, [d]es
libertés fondamentales et [de] l’Etat de droit ». La Déclaration d’Istanbul de 2004 reflète un
des rares moments de sincère détermination, les Etats membres déclarent : « Nous sommes
des nations souveraines qui oeuvrent pour le progrès politique, économique, social et culturel.
Nous demeurons attachés à la liberté et à l’égalité de nos citoyens. Nous oeuvrons ensemble
pour le renforcement du caractère représentatif et des pratiques démocratiques de nos
gouvernements (…) » (point 11)85. La Déclaration du Caire effleure le sujet ; l’article 23
dispose que « a) Gouverner est une mission de confiance, il est absolument interdit de
l'exercer avec abus et arbitraire, afin de garantir les droits fondamentaux de la personne
humaine. b) Tout homme a le droit de participer directement ou indirectement à la gestion des
affaires publiques de son pays. Il a également le droit d'assumer des fonctions publiques
conformément aux dispositions de la Charia ». Or, certaines des Constitutions des pays
islamiques prévoient expressément que le Chef de l’Etat doit être musulman et surtout, l’accès
des femmes aux responsabilités politiques n’est pas encore pleinement possible86. L’on ne
trouve aucune mention sur les élections libres, périodiques et honnêtes ; à titre de
comparaison, la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, adoptée
à Addis-Abeba le 30 janvier 2007 se réfère à des notions tels que « respect et suprématie de la
Constitution et de l’ordre constitutionnel », « tenue régulière d’élections transparentes, libres
et justes », « changements démocratiques de gouvernement », « promotion de la pratique et de
85
La Déclaration de Putrajaya de 2003 affirmait que « c’est seulement par l’effort concerté, la bonne
gouvernance, une unité et une solidarité accrues, le développement économique et le progrès social que nous
serons capable d’améliorer notre statut, de gagner le respect des autres et de rehausser notre prestige et notre
crédibilité aux yeux de la communauté internationale ». On comprend que le but est d’épater la communauté
internationale ; les avancées vont, in fine, bénéficier aux populations de ces Etats mais elles sont appréhendées
dans un souci d’image par rapport aux autres et non de bienfait pour ces populations.
86
Des arguments aussi bien en faveur qu’en défaveur de la participation des femmes peuvent être dégagés du
corpus islamique : ainsi, le prophète aurait dit que « jamais une nation qui confie ses affaires à une femme ne
connaîtra le succès » ou que « les femmes sont moins intelligentes » alors que le Coran affirme que « les
croyants et les croyantes ordonnent ce qui est convenable et interdisent ce qui est blâmable » (9, 71). On sait
également que la femme du Prophète, Aïcha, avait conduit une armée contre Ali et que le calife Omar avait
confié la hisbah à une femme.
L’article 24 de la Charte arabe de 2004 est, sur ce plan, beaucoup plus en avance : « c) Tout citoyen a le droit de
se porter candidat ou de choisir ses représentants dans des élections libres et régulières et dans des conditions
d'égalité entre tous les citoyens assurant la libre expression de sa volonté; d) Tout citoyen a le droit de bénéficier
de la possibilité d'accéder dans des conditions d'égalité avec les autres aux fonctions publiques de son pays dans
le respect de la parité des chances ».
Voir sur le déficit démocratique des pays arabes, Nidhal MEKKI et Sarra MAAOUIA, « Les droits de l’Homme
dans le monde arabe entre régionalisme et universalisme », Les droits de l’Homme. Une nouvelle cohérence
pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), op. cit., pp. 201-228 : pp. 217-
220.

31
la culture démocratique (…), inculcation du pluralisme et de la tolérance politique »,
« l’obligation de rendre compte de la gestion des affaires publiques », etc.87.

Or, « c’est dans l’organisation du « pouvoir » que se trouve la principale garantie des droits de
l’Homme »88. C’est l’existence d’une société démocratique, d’un réflexe démocratique qui
aboutit à la mise en place de toute une mécanique institutionnelle qui rend possible la
participation de la société civile, la possibilité de nouer un dialogue sans craindre des
représailles. L’inexistence d’un tel état d’esprit dans les Etats membres rejaillit sur le système
de protection de l’OCI qui reste largement défaillant et qui donne l’image d’une organisation
qui refuse délibérément de se doter des moyens de ses ambitions. L’OCI promeut les droits de
l’Homme (et ce, partialement), mais elle ne les protège pas. La différence est que la protection
« fera surtout appel à la technique judiciaire alors que la fonction de promotion emploiera
toutes les techniques législatives : études, recherches, rapports, rédaction de textes »89.

87
Voir également William SCHABAS, « L’Observation générale du Comité des droits de l’Homme au sujet de
l’Article 25 du Pacte international sur les droits civils et politiques », Les droits fondamentaux, Jacques-Yvan
MORIN (dir.), op. cit., pp. 285-295. Voir également Slim LAGHMANI, « Vers une légitimité démocratique ? »,
Les nouveaux aspects du droit international, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), Pédone, 1994,
pp. 249-278.
88
Jean-Marie BECET et Karel VASAK, « La réforme des institutions de protection des droits de l’Homme.
Rapport général d’introduction », La réforme des institutions internationales de protection des droits de
l’Homme, Premier colloque international sur les droits de l’Homme, La Laguna, Ténérife, 1 er-4 novembre 1992,
Bruxelles, Bruylant, 1993, pp. 43-62 : p. 53.
89
Karel VASAK, « Vers la création de commissions régionales des droits de l’Homme », Mélanges René
Cassin, Amicorum discipulorumque liber, tome I. Problèmes de protection internationale des droits de
l’Homme, Paris, Pedone, 1969, pp. 467-478 : p. 470.

32
Chapitre II : La protection ineffective des droits de l’Homme

L’OCI s’est arrêtée au premier stade ; les réticences des Etats membres sclérosent toute
évolution dynamique en phase avec les exigences du temps. Un embryon de surveillance du
respect des droits de l’Homme ne suffit malheureusement pas à parler d’un système de
protection en bonne et due forme. Cette lacune institutionnelle (section 1) se double d’un
manque d’investissement de l’OCI sur la question des droits de l’Homme au niveau
international (section 2).

Section 1 : Les faiblesses institutionnelles


La réforme récente de la Charte de l’OCI a été l’occasion pour elle de réfléchir à la mise en
place d’un système de « protection » des droits de l’Homme (§ 1). Mais cette légère
« secousse » ne doit pas faire oublier que le véritable principe qui forme l’armature de
l’organisation, c’est avant tout le principe de non-ingérence (§ 2).

§ 1 : L’émergence de mécanismes de protection ?


La promotion des droits de l’Homme sans leur protection effective n’a aucun sens (A). Ce
simple bon sens a poussé l’OCI à renouveler son approche mais celle-ci manque d’ambition
(B).

A) L’importance de la justiciabilité des droits garantis

La Déclaration du Caire de 1991 s’adressait aux Etats membres ; elle n’était pas destinée à
être invoquée par les habitants de ces Etats. Le préambule de la Déclaration précise, ainsi,
qu’elle « constitue des directives générales aux Etats membres en matière de droits de
l’homme ». En revanche, elle reconnaît que le but est de « contribuer aux efforts de
l’humanité visant à garantir les droits de l’homme, à le protéger de l’exploitation et de la

33
persécution, à affirmer sa liberté et son droit à une vie digne (…) » et pose clairement que
« leur protection est un acte d’adoration ». L’OCI a donc délégué la protection des droits de
l’Homme aux Etats, se fiant aux systèmes internes de protection90. Or, les principales
conventions régionales ont prévu des mécanismes de protection régionaux. Pour qu’il y ait
système régional, il faut au préalable une intégration régionale car « les éléments
supranationaux [comme le droit de recours individuel et le caractère obligatoire des arrêts] ne
résisteraient pas longtemps dans un ensemble organique qui serait purement
intergouvernemental »91. Il en existe plusieurs types : des comités chargés d’étudier des
rapports étatiques (Charte arabe), des comités chargés d’étudier des rapports étatiques mais
également des communications individuelles ou étatiques (le Comité des droits de
l’Homme92) ou des organes judiciaires, les cours de droits de l’Homme qui rendent des
décisions revêtues de l’autorité de la chose jugée (Charte africaine, Convention inter-
américaine et Convention européenne). Nous prendrons l’exemple de la Ligue des Etats
arabes et de l’Union africaine, deux organisations dont les membres sont pour la plupart
également membres de l’OCI.

L’article 45 de la Charte arabe des droits de l’Homme de 2004 institue un « Comité arabe
des droits de l’homme » composé de sept membres élus pour quatre ans au scrutin secret par
les Etats parties à la Charte et « ayant une grande expérience et compétence dans le domaine
d’activité du Comité ». Ils exercent à titre personnel, en toute indépendance et impartialité. Ils
sont rééligibles une fois mais il est « tenu compte du principe de l’alternance ». Les membres
du Comité peuvent déclarer, à l’unanimité, qu’un membre a cessé « de remplir ses fonctions
pour toute cause autre qu’une absence de caractère temporaire » ; le Secrétaire général de la
Ligue déclare alors son siège vacant. Le Comité élit son Président, fixe la périodicité de ses
réunions et établit son statut et son règlement intérieur. L’article 47 prend soin de demander
aux Etats de s'engager « à assurer aux membres du Comité les immunités nécessaires pour les
protéger contre toute forme d'entrave, de pression morale ou matérielle ou de poursuites
judiciaires du fait des positions qu'ils prennent ou des déclarations qu'ils font dans l'exercice

90
Il existe, depuis 1994 au sein de l’OCI, un groupe d’experts gouvernementaux chargé d’assurer le suivi de la
Déclaration du Caire mais nous n’avons pas pu nous procurer ses rapports. Mashood BADERIN relève que “the
establishment of such a regional enforcement organ is not unkown under Islamic law. Classical books on
Islamic jurisprudence document the existence of an institution called Wilâyah al-Mazâlim from the very early
periods of the Islamic State. This was a sort of complaints or grievances tribunal with inter-provincial
jurisdiction throughout the Islamic Empire to redress any alleged violation of individual rights by State
officials”, op. cit., p. 229.
91
Karel VASAK, « Vers la création de commissions régionales des droits de l’Homme », op. cit., p. 468.
92
Voir pour plus de détails, Frédéric SUDRE, op. cit., n° 355 à 374, pp. 706-727.

34
de leurs fonctions en tant que membres du Comité ». Concernant la mission de ce Comité,
l’article 48 demande aux Etats de présenter un rapport tous les trois ans sur le respect des
droits et libertés garantis par la Charte mais ce rapport est adressé au Secrétaire général qui le
transmet ensuite au Comité. L’article 48 poursuit : « c) Le Comité étudie en séance publique
les rapports (…), en présence et avec la participation au débat du représentant de l'État
concerné; d) Le Comité examine le rapport, fait des observations et formule les
recommandations requises conformément aux objectifs de la Charte; e) Le Comité présente
un rapport annuel contenant ses observations et ses recommandations au Conseil de la Ligue
par l'intermédiaire du Secrétaire général; f) Les rapports, les observations finales et les
recommandations du Comité sont des documents publics auxquels le Comité assure une large
diffusion ».

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 et entrée
en vigueur le 21 octobre 1986, prévoit la création d’une commission africaine des droits de
l’homme et des peuples, composée de onze membres hautement qualifiés, élus pour un
mandat de six ans renouvelable au scrutin secret par la Conférence des Chefs d’Etat et de
Gouvernement et qui siègent à titre individuel. La Commission élit son Président et établit son
règlement intérieur. L’article 45 précise ses compétences : la promotion des droits de
l’homme (par le biais d’études, de colloques, de recommandations, de formulation de modèles
de textes législatifs, etc.), leur protection et l’interprétation de la Charte. Elle peut recourir « à
toute méthode d’investigation appropriée » (art. 46), elle peut se prononcer sur les
communications étatiques dirigées contre un autre Etat par le biais d’un rapport (art. 52) ainsi
que sur des communications individuelles (art. 56) mais lorsqu’elle constate des violations
graves ou massives des droits de l’homme et des peuples, elle doit, pour approfondir ses
recherches, demander l’autorisation de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement.
En outre, les décisions prises restent confidentielles jusqu’à ce que la Conférence en décide
autrement. La Commission reçoit également les rapports étatiques tous les deux ans (art. 62).
Enfin, les articles 60 et 61 stipulent que la Commission s’inspire du droit international des
droits de l’homme et des peuples (« notamment » la Charte des Nations Unies, la Déclaration
universelle des droits de l’homme, des instruments internationaux)93 et prend en compte les

93
« Cette perméabilité semble commencer à être exploitée par la commission qui, en s’inspirant des systèmes
européens et inter-américains de garantie des droits de l’Homme, affine le champ des valeurs prônées par la
charte en mettant en exergue les valeurs de liberté, de démocratie, d’Etat de droit et d’épanouissement total de la
personne humaine », Chahrazed BEN HAMIDA et Khaled MEJRI, « L’Union africaine : d’une association
d’Etats à une communauté de valeurs ? », Les droits de l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit
international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), op. cit., pp. 229-248 : p. 235.

35
autres conventions internationales générales ou spéciales, les pratiques africaines, « les
coutumes généralement acceptées comme étant le droit, les principes généraux de droit
reconnus par les nations africaines ainsi que la jurisprudence et la doctrine ».
A côté de cette Commission qui « s’est progressivement dotée d’une compétence
« juridictionnelle » au gré des affaires dont elle a été saisie »94, un protocole signé le 9 juin
1988 et entré en vigueur le 25 janvier 2004, a établi une Cour africaine des droits de l’homme
et des peuples, composée de onze juges, élus pour un mandat de six ans renouvelable. Elle
« complète les fonctions de protection » conférées à la Commission (art. 2). Ne peuvent saisir
la Cour que « la Commission, l’Etat partie qui a saisi la Commission, l’Etat partie contre
lequel une plainte a été introduite, l'Etat partie dont le ressortissant est victime d'une violation
des droits de l'homme, les organisations intergouvernementales africaines » (art. 5-1) mais la
Cour « peut permettre aux individus ainsi qu'aux organisations non gouvernementales (ONG)
dotées du statut d'observateur auprès de la Commission d'introduire des requêtes directement
devant elle, conformément à l'article 34(6) de ce Protocole » (art. 5-3) c’est-à-dire lorsque
l’Etat a fait une déclaration d’acceptation de la compétence de la Cour95. La Cour applique
« les dispositions de la Charte ainsi que tout autre instrument pertinent relatif aux droits de
l'homme et ratifié par l'Etat concerné » (art. 7).

L’expérience de certaines organisations96 montre donc que la promotion finit par être soutenue
par un mécanisme de promotion. L’OCI en est, pour l’instant, à la création d’un organe de
surveillance.

B) Les évolutions récentes vers une surveillance du respect des droits de l’Homme

A l’issue de la troisième session extraordinaire de la Conférence au Sommet en 2005, le


communiqué final a appelé à « étudier la possibilité de créer un organe indépendant
permanent en vue de renforcer les droits de l’homme dans les Etats membres et d’examiner la
possibilité d’adopter une convention des droits de l’homme en Islam, conformément aux
dispositions de la Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en Islam ». C’est à
l’occasion de la révision de la Charte que ce souhait va se concrétiser. La Charte révisée de
94
Roger Magloire Koussetogue KOUDE, op. cit., pp. 555-559.
95
Les cours européenne et inter-américaine ont, elles, une compétence obligatoire.
96
Voir pour l’exemple de l’ancienne Commission des droits de l’Homme, Claudio ZANGHI, « De la
Commission au Conseil des droits de l’Homme des Nations-Unies, une réforme réalisée », Les droits de
l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI
(dir.), op. cit., pp. 149-181.

36
2008 consacre son chapitre X à la « commission permanente indépendante des droits
humains ». Celle-ci « favorise les droits civiques, politiques, sociaux et économiques
consacrés par les conventions et déclarations de l’Organisation, ainsi que par les autres
instruments universellement reconnus, en conformité avec les valeurs islamiques »97. Il s’agit
donc de favoriser et non de protéger ; en outre, elle favorise des droits reconnus également par
les instruments internationaux mais conformément aux valeurs islamiques. Et l’article ne dit
rien sur l’organisation et le fonctionnement de cette commission. Dans la résolution 3/36-LEG
de 2009, la Conférence se dit « consciente de la nécessité de doter l’OCI d’un mécanisme
pour la promotion et la protection des droits de l’homme au sein des Etats membres » et
remercie les efforts du groupe intergouvernemental d’experts sur la création de cette
commission mais rien de concret n’émerge. A la réunion de consultation entre l’OCI et le
Haut Commissariat des Nations Unies pour les droits de l’homme qui s’est déroulée le 25
janvier 2010, le Secrétaire général de l’OCI, Ekmeleddin Ihsanoğlu, a rappelé que cette
commission doit « être considérée comme un événement marquant et un développement des
plus positifs dans les quatre décennies d’histoire de l’OCI » car sa création « introduira un
changement de paradigme au sein de l’OCI dans la voie universelle des droits de l’homme »98.
Lors de la deuxième réunion du groupe intergouvernemental d’experts chargé de la création
de la commission permanente, le 15 février 2010, le Secrétaire général a appelé à parachever
l’examen du statut de la commission et a indiqué que le projet devrait être présenté à la 37è
Conférence des ministres des affaires étrangères en mai 2010. On apprend à cette occasion
que « la plupart des articles qui concernent la nature, les principes, le nombre des experts, les
fonctions et réunions, le mécanisme d’adoption des recommandations et la création d’un
secrétariat pour aider au fonctionnement de l’organe, sont déjà adoptés »99. Or, la réunion des
97
Etrangement, les droits culturels ne sont pas mentionnés ; en outre, la traduction française parle de « droits
civiques » alors que la version arabe fait référence à « al-huqûq al-madâniyya » et la version anglaise à « civil
rights ». M. Midani relève également que le terme employé dans la version arabe est « chartes » alors que les
versions anglaise et française parlent d’ « instruments ». Or, l’instrument est une catégorie plus large qui peut
contenir des « textes avec force obligatoire et d’autres dépourvus de force obligatoire. Dès lors, l’utilisation du
mot « instrument » est généralement plus signifiante » : Mohamed Amin AL-MIDANI, « Le Sommet islamique
de Dakar et les droits humains », 21 mars 2008, http://oumma.com/Le-Sommet-islamique-de-Dakar-et
98
Bulletin d’information de l’OCI, n° 5, 15 mars 2010 : www.oic-oci.org/newsletter.asp
99
En revanche, les déclarations relatives à l’esprit de cette commission font craindre une « guerre des
conceptions » ; le Secrétaire général a déclaré, en effet, que « le monde islamique a plus que jamais besoin de se
mettre au diapason du courant mondial dans le domaine des droits de l’homme en créant un organe indépendant
qui s’en occupe pour une meilleure sensibilisation et pour mieux prendre en charge ces droits et les questions y
afférentes à l’intérieur du monde islamique, au lieu de laisser la porte ouverte aux autres organisations
internationales et étrangères pour intervenir dans ces questions en l’absence d’un organe islamique qui s’en
occupe. Il a exprimé son espoir que la création de cet organe renforcera la crédibilité de l’OCI et améliorera son
image à travers le monde en vue de lui permettre de bénéficier d’une plus grande confiance et d’un soutien pour
faire face aux grands défis auxquels le monde islamique se trouve confronté dans ce domaine, et en vue de
disposer d’un instrument dissuasif qui lui permettra de défendre les positions des Etats membres dans ce
domaine face aux accusations des autres ». Les passages en italique sont soulignés par nous. Bulletin

37
ministres des affaires étrangères qui s’est tenue du 18 au 20 mai 2010 à Douchanbe au
Tadjikistan, n’a pas permis d’avancer sur ce dossier. Le rapport de la réunion a simplement
indiqué que « le Conseil a revu le projet de résolution sur la création d’une commission
indépendante permanente des droits de l’homme et, prenant en compte le paragraphe 13 du
rapport de la réunion des Hauts fonctionnaires préparatoire à la 37 è CMAE, a décidé de
reporter l’adoption du projet de résolution sur ladite commission (…) »100. Nous ignorons
donc à ce jour, les règles les plus élémentaires relatives à la composition et au fonctionnement
qui régissent cette Commission.

Le Sommet de Dakar de 2008 a appelé à la rédaction du « covenant islamique sur les droits
de l’Homme » et du « covenant sur les droits de la femme en Islam ». Cette volonté d’élaborer
une convention sur les droits de l’Homme peut injecter une conception renouvelée des
organes de protection. On peut penser que pour mettre sur pied une protection des droits de
l’Homme, il faut d’abord achever l’échafaudage normatif car on ne peut protéger que ce qui a
été préalablement et juridiquement défini. Or, en matière de droits de l’Homme en général,
l’OCI ne dispose que d’une simple déclaration, pas d’une convention. L’adoption d’un texte
obligatoire conduirait naturellement à prévoir le respect des droits ainsi garantis101.

Enfin, on apprend du communiqué du Sommet de Dakar de 2008, que « la Conférence a


accueilli favorablement la proposition de créer un poste de haut commissaire de l’OCI pour
les droits de l’Homme102 et a instruit au secrétaire général de préparer le projet des termes de
référence relatifs à ce poste ainsi que ses implications financières et à les présenter à la
prochaine session de la Conférence islamique des ministres des affaires étrangères ». Mais
aucune résolution ultérieure n’a fait référence à ce projet.

En réalité, les Etats arabes en particulier ont une tradition de réserve vis-à-vis de ces comités ;
par exemple, le premier protocole additionnel au PIDCP n’a été ratifié que par l’Algérie,

d’information n° 7, 17 février 2010.


100
OIC/CFM-37/2010/REP, point 11.
101
Quoique le Covenant des droits de l’enfant en Islam ne prévoit dans son article 24 qu’une commission
islamique des droits de l’enfant, composée de représentants de tous les Etats parties et qui est chargée
d’examiner tous les deux ans les progrès réalisés.
102
Voir pour le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Hamid GAHAM, « L’évolution
des structures du Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l’homme depuis 10 ans », Les Nations-
Unies et les droits de l’Homme. Enjeux et défis d’une réforme, Emmanuel DECAUX (dir.), Paris, Pedone, 2006,
pp. 53-61.

38
Djibouti, la Libye et la Somalie103. Il reste qu’un tel repli demeure incompréhensible dans le
cadre régional puisque « dans un système régional, les points de vue entre les Etats sont plus
rapprochés, ce qui pourrait éluder les problèmes qui se constatent aujourd’hui au plan
universel et qui découlent des inquiétudes de certains Etats face au militantisme actif d’un
organe dont le contrôle de l’activité leur échappe plus facilement que dans un cadre régional
restreint »104. L’approche « cachottière » l’a finalement emporté dans le cadre de l’OCI dont
l’obsession première reste la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats membres.

§ 2 : Le soubassement idéologique : le principe de non-ingérence


Il nous faut présenter ce principe (A) avant de relever qu’il demeure saugrenu dans une
organisation qui se fonde sur l’idée de communauté qui commande le bien et interdit le mal
(B).

A) L’exposé du principe

Les références au principe de non-ingérence sont si nombreuses et diffuses qu’il y a comme


une redondance suspecte. Dans le préambule de la Charte de 2008, les Etats se disent
déterminés « à respecter le droit à l’autodétermination et la non-ingérence dans les affaires
intérieures (…) », « à soutenir les buts et principes de la présente Charte, de la Charte des
Nations Unies, du Droit international et du droit humanitaire international, tout en respectant
strictement le principe de non-ingérence dans les affaires relevant essentiellement de la
juridiction interne des Etats », « à œuvrer à la réalisation de la bonne gouvernance au niveau
international et à la démocratisation des relations internationales sur la base des principes
d’égalité, de respect mutuel entre les Etats et de non ingérence dans les affaires relevant
essentiellement de leur juridiction interne ». L’article 1-3 pose comme objectif de
l’Organisation de « respecter (…) la non-ingérence dans les affaires intérieures » alors que
l’article 2, qui se rapporte aux principes qui régissent l’OCI, est beaucoup plus prolixe :
l’article 2-4 dispose que « tous les Etats membres (…) s’abstiennent de s’immiscer dans leurs
[les autres Etats membres] affaires intérieures », l’article 2-5 redemande aux Etats de
s’engager « à s’abstenir de toute ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats
membres, comme le soulignent la présente Charte, la Charte des Nations Unies, le Droit
International et le droit humanitaire international », l’article 2-6 insiste une dernière fois :
103
Consultation le 6 juillet 2010 : http://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-
5&chapter=4&lang=en
104
Nidhal MEKKI et Sarra MAAOUIA, op. cit., p. 228.

39
« Comme il a été mentionné à la Charte des Nations Unies, aucune disposition de la présente
charte n’autorise l’Organisation ni ses organes à intervenir dans des affaires qui relèvent
essentiellement de la compétence nationale d’un Etat ou s’y rattachent »105. La Charte de 1972
ne se référait à ce principe qu’une seule fois et ce, dans la rubrique « principes » ; il est
étrange d’ériger le respect de cette règle comme un « objectif » de l’Organisation alors qu’il
s’agit au plus d’un « principe » de fonctionnement.

Au niveau international, le devoir de non-ingérence peut être passé outre grâce aux
autorisations du Conseil de sécurité sur la base du Chapitre VII de la Charte. En outre, en
2005, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une déclaration sur la responsabilité
de protéger contre les génocides, crimes de guerre, nettoyages ethniques et crimes contre
l’humanité106. En réalité, le principe de non-ingérence remet en cause le caractère erga omnes
des obligations car ce caractère implique une garantie collective, qui elle-même implique un
droit de regard des autres Etats et de la communauté internationale en général107. Les Etats
islamiques ont été si longtemps privés de gérer leurs « affaires internes » qu’ils restent très
susceptibles sur la question de la souveraineté et de la non-ingérence dans les affaires
intérieures. Ainsi tout concept de « droit » voire de « devoir d’ingérence » ne trouve aucun
écho dans les textes ; l’article 1-19 de la Charte de 2008 se contente de pousser les Etats
membres à « travailler en collaboration et en coordination dans les situations d’urgence
105
L’article 2 paragraphe 7 de la Charte des Nations Unies indique, en effet, qu’ « aucune disposition de la
présente Charte n’autorise les Nations Unies à intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la
compétence nationale d’un Etat ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de
règlement aux termes de la présente Charte (…) ». La question est de savoir si les droits de l’Homme font partie
de ces « affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un Etat ». La Cour permanente de
justice internationale avait estimé, dans l’affaire des décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc
(7/02/1923) que « les mots « compétence exclusive » semblent (…) envisager certaines matières qui, bien que
pouvant toucher de très près aux intérêts de plus d’un Etat, ne sont pas, en principe, réglées par le droit
international » (CPJI, Série B, n° 4, pp. 23-24). Or, le respect des droits de l’Homme résulte de normes
coutumières et surtout des articles 55 et 56 de la Charte des Nations Unies.
106
Voir Rahim KHERAD, « Du droit d’ingérence à la responsabilité de protéger », Les droits de l’Homme. Une
nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI (dir.), op. cit., pp.
297-308. Voir l’approche originale de Moncef KDHIR, « Pour le respect des droits de l’Homme sans droit
d’ingérence », RTDH, n° 52, 2002, pp. 901-923.
Voir également le célèbre discours d’ouverture de Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général des Nations Unies,
à la Conférence mondiale sur les droits de l’Homme, à Vienne, le 14 juin 1993 : « Je suis tenté de dire que, par
leur nature, les droits de l’homme abolissent la distinction traditionnelle entre l’ordre interne et l’ordre
international. Ils sont créateurs d’une perméabilité juridique nouvelle. Il s’agit donc de ne les considérer, ni sous
l’angle de la souveraineté absolue, ni sous celui de l’ingérence politique (…). C’est à l’Etat que la communauté
internationale devrait, à titre principal, déléguer le soin d’assurer la protection des individus. Mais la question de
l’action internationale doit se poser lorsque les Etats se révèlent indignes de cette mission, lorsqu’ils
contreviennent aux principes fondamentaux de la Charte et lorsque, loin d’être les protecteurs de la personne
humaine, ils en deviennent les bourreaux ». Cité dans Emmanuel DECAUX, Droit international public, Dalloz,
4è éd., 2004, pp. 198-199.
107
Il nous faut citer la formule de François Mitterrand : « aucun Etat ne peut être tenu pour propriétaire des
souffrances qu’il engendre ou qu’il abrite », citée par Gérard FELLOUS, op. cit., p. 174.

40
humanitaire telles que les catastrophes naturelles ». Les résolutions adoptées à l’issue des
conférences se réfèrent mécaniquement au principe de non-ingérence ; par exemple, la
résolution 62/9-P (IS) de 2000 intitulée « sur les campagnes hostiles menées par certaines
ONG contre des Etats membres pour porter atteinte à la charia sous couvert de la protection
des droits de l’Homme », appelle à « s’abstenir de se servir de l’universalité des droits de
l’Homme comme prétexte pour s’immiscer dans les affaires intérieures des Etats et porter
atteinte à leur souveraineté nationale » (point 7). La référence se fait parfois assez
maladroitement : par exemple, l’article 3 relatif aux principes du Covenant des droits de
l’enfant en Islam contient la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats alors qu’il
mentionne déjà le respect des objectifs et principes de l’OCI.

L’invocation persistante de la non-ingérence dénote un syndrome de l’affolement, la panique


de celui qui a quelque chose à se reprocher. Or la philosophie même de l’OCI qui repose sur
l’idée d’oumma justifie, à l’inverse, l’immixtion du « frère » pour pointer et redresser les torts
de son prochain.

B) Les critiques

M. Al-Midani, s’appuyant sur l’article 4 de la Charte de 1972 qui dispose que la Conférence
des Rois et Chefs d’Etat et de Gouvernement examine « les questions d’importance
primordiale pour le monde musulman », en infère un fondement textuel qui justifierait les
ingérences dans les questions relatives aux droits de l’Homme. « Les liens de solidarité, de
fraternité et de l’unité qui lient les peuples musulmans, constituent, à notre avis, une raison
valable et majeure qui autorise la Conférence des Rois et Chefs d’Etat d’examiner toute
question concernant les droits de l’homme dans les Etats membres et de prendre les décisions
appropriées. Le principe de non-ingérence ne doit pas être un obstacle aux interventions de
l’OCI chaque fois que l’intégrité et la dignité de l’être humain, ainsi que ses droits
élémentaires font l’objet des violations et des atteintes »108.

M. Alaoui relève, quant à lui, que dans les textes de l’OCI, le concept d’oumma renvoie non
pas à « la communauté musulmane mais à la communauté des Etats musulmans »109 ; il y a
donc un écran entre l’OCI et la « vraie » oumma, ce qui explique cet appui permanent à la
108
Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au développement du droit international des droits de
l’Homme, op. cit., p. 358.
109
Rachid Ben El Hassan ALAOUI, op. cit., p. 410.

41
non-ingérence. « L’action, la crédibilité de l’OCI souffrent de l’ambiguïté des concepts
qu’elle manipule »110. L’OCI n’étant pas une organisation d’intégration, ses organes sont
tributaires de la ligne que seuls ses Etats membres fixent111.

L’OCI évoque souvent l’oumma, la communauté des musulmans, « la meilleure


communauté que Dieu ait créée » et qui doit, affirme le préambule de la Déclaration du Caire,
« guider l’humanité plongée dans la confusion (…) ». Elle tire sa pertinence du seul lien
religieux qu’elle postule ; l’ethnicité, l’appartenance tribale ou toute autre affiliation sont
reléguées au second plan, la fraternité de religion prime112. L’idée de communauté génère le
rapprochement, l’affection, la prévenance vis-à-vis de son « frère ». C’est donc à travers un
autre principe cardinal de l’islam qu’elle prend sens, celui de « la commanderie du bien et
l’interdiction du mal ». Le Coran l’affirme : « Vous êtes la meilleure communauté qui ait été
produite pour les hommes : vous ordonnez le bien, interdisez le mal et vous croyez en Dieu »
(3, 110). Il s’agit là d’une obligation communautaire et à défaut, d’un devoir personnel de
chaque musulman ; cette règle implique donc l’intervention légale dans les affaires des autres.
D’ailleurs le Prophète aurait lui-même incité à intervenir : « Que celui d’entre vous qui voit
une chose répréhensible la corrige de sa main ! S’il ne le peut pas de sa main, qu’il la corrige
avec sa langue ! S’il ne le peut avec sa langue que ce soit avec son cœur et c’est là le degré le
plus faible de la foi ».

Mais force est de constater que jaloux de leurs « intérieurs », les Etats membres se sont
abstenus de renvoyer à cette règle fondamentale. Cette volonté de faire profil bas se manifeste
également par l’indolence au niveau de l’action internationale.

Section 2 : Les faiblesses fonctionnelles


L’OCI a eu la prétention de « guider l’humanité plongée dans la confusion » mais cet
éminent dessein s’est concrétisé en une praxis largement apathique. L’Organisation n’a jamais
eu, en réalité, ni pour fonction originelle ni pour orientation principale, la protection des droits
de l’Homme. Du coup, sur la scène internationale, elle se veut sélective, refusant de se laisser

110
Ibid., p. 413.
111
Hadijetou Demba CAMARA, op. cit., p. 14 : « L’Organisation de la Conférence islamique est une
organisation de coopération sur une base de solidarité islamique car elle ne vise pas l’intégration des Etats
membres (…). De ce fait, l’Organisation de la Conférence islamique se limite à organiser la concertation entre
les Etats islamiques et ses décisions sont fondées sur le consentement unanime de ses Etats membres ».
112
Coran 49, 10 : « Les croyants ne sont que des frères. Etablissez la concorde entre vos frères (…) ».

42
entraîner par une homogénéisation qui lui paraît suspecte (§ 1). Au vu des ressources
intellectuelles dont dispose aujourd’hui le monde islamique et des désirs d’évolution qui se
font jour ici où là, nous verrons s’il est possible d’espérer un éventuel changement de cap (§
2).

§ 1 : Une préoccupation sélective des droits de l’Homme sur la scène internationale


Contrairement à d’autres organisations internationales, l’OCI n’a pas d’ambition affichée en
matière de protection des droits de l’Homme (A) ; à l’inverse, elle joue plutôt le rôle ingrat de
celle qui freine l’ardeur des autres (B).

A) La carence d’une politique des droits de l’Homme en matière de politique


extérieure113

L’OCI n’est pas une organisation créée, à l’origine, pour contribuer à la défense généralisée
des droits de l’Homme à l’image du Conseil de l’Europe par exemple ; elle a certes entamé sa
mue depuis, mais il reste que la question des droits de l’Homme ne relève pas de son identité
profonde. Il est donc compréhensible qu’elle ne l’érige pas en pilier de sa politique extérieure.
L’OCI se contente d’assurer un service minimum.

Ainsi, comme nous le verrons ultérieurement, ses engagements dans les enceintes
internationales sont biaisés, position qui contraste, par exemple, avec celle de l’Union
européenne. Celle-ci a joué un rôle au niveau de l’ancienne Commission des droits de
l’Homme ou de la Troisième Commission de l’Assemblée générale des Nations Unies « pour
promouvoir l’abolition de la peine de mort, la garantie de la liberté d’expression, la protection
des droits de la femme ainsi que celle des défenseurs des droits de l’Homme »114. A l’issue du
Sommet de Dakar de 2008, le communiqué précise que l’OCI « a exhorté les Etats islamiques
à prendre des initiatives à l’intérieur du système onusien, à l’instar de l’initiative marocaine
entérinée en 2007 par le Conseil des droits de l’Homme, relatif à la Déclaration des Nations
Unies sur l’éducation et la formation dans le domaine des droits de l’Homme » après avoir
113
En revanche, pour les questions humanitaires, l’OCI reste active et adopte une conception large de la notion
de réfugié (celui qui échappe à une guerre civile, à une occupation étrangère ou à une calamité naturelle). Elle
collabore ainsi avec le Haut Commissariat pour les réfugiés et aide les pays islamiques qui accueillent des
réfugiés par le biais du Fonds de solidarité islamique ou la Banque islamique de développement. Pour plus de
précisions, voir Hadijetou Demba CAMARA, op. cit., pp. 279-283.
114
Imed FRIKHA et Amine THABET, « Les droits de l’Homme et l’action extérieure de l’UE », Les droits de
l’Homme. Une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Rafâa BEN ACHOUR et Slim LAGHMANI
(dir.), op. cit., pp. 267-294 : p. 274.

43
« prié tous les Etats islamiques de saisir l’occasion de la célébration du soixantième
anniversaire de la DUDH pour faire connaître et mettre en relief le concept des droits de
l’Homme selon la vision islamique » (point 106).

En outre, l’Union européenne « conditionne ses relations extérieures par le respect des
droits de l’Homme » notamment pour les « accords internationaux conclus avec les pays
tiers » et les « instruments d’aide et d’assistance »115. L’OCI n’adopte pas un tel schème ni
pour les pays tiers ni pour les pays candidats : la Charte de 2008 prévoit que « tout Etat,
membre des Nations Unies, disposant d’une majorité musulmane, qui soumet une demande
pour devenir membre peut adhérer à l’Organisation si sa demande est approuvée par
consensus seulement par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères sur la base des
critères arrêtés, et adoptés par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères ». Les critères
retenus ne sont donc déterminés que par les résolutions du Conseil des Ministres des Affaires
étrangères, la Charte ne contient aucune orientation générale sur ce point. La référence à la
qualité de « membre des Nations Unies » ne donne aucune indication puisque celle-ci n’est
pas liée, dans les faits, à des conditions de respect des droits de l’Homme. En 1993, à
l’approche de la Conférence de Vienne, elle s’oppose clairement à « la non utilisation des
droits de l’Homme comme moyen de pression politique ou économique » (rés. 41/21-P). Elle
refuse, en fait, toute prise en compte du niveau de protection des droits de l’Homme ou du
degré de violation de ceux-ci dans l’admission des candidats, l’établissement des liens ou le
renforcement des coopérations.

Le seul domaine où l’OCI se manifeste vaillamment est celui de l’appui aux mouvements de
libération en Afrique et de la lutte contre « la pratique haineuse » de l’apartheid. Ainsi, dès sa
création, elle condamne la discrimination raciale en Afrique du Sud, en Rhodésie et en
Namibie et considère que « les actes d’agression et l’injustice sociale dont les peuples
africains font l’objet constituent une violation des plus simples droits de l’homme à la liberté
et à la dignité » (rés. 6/4 de 1973)116. Elle s’appuie, pour ce faire, sur le fondement de la

115
Ibid., p. 275. Les auteurs relèvent, cependant, que cette conditionnalité peut varier en fonction des
partenaires : ainsi, alors que les accords de coopération avec les pays méditerranéens dans le cadre du processus
de Barcelone (1995) et les accords de Cotonou (2000) sur la coopération avec les pays d’Afrique font des
références aux droits de l’Homme, les accords avec les pays du Moyen-Orient ou avec la Chine en sont
exemptés.
116
Voir également la résolution 6/6-P (1975) intitulé « Ségrégation et discrimination raciales en Afrique du Sud,
en Rhodésie, en Namibie et en Palestine occupée ».

44
conception islamique, la dignité et l’égalité des êtres humains quelles que soient leur race,
leur ethnie ou leur religion.

On comprend donc que la question des droits de l’Homme est loin d’aiguillonner l’OCI. Mais
cette paresse se transforme soudain en zèle lorsqu’il y a danger pour ses positions les plus
conservatrices et les plus critiquables.

B) Les tentatives d’instrumentalisation des droits de l’Homme

L’OCI affirme souvent, dans ses résolutions, la nécessité d’accroître les consultations et la
coordination des Etats membres en matière des droits de l’Homme, au niveau de l’Assemblée
générale des Nations Unies, du Conseil économique et social, du Conseil des droits de
l’Homme et des autres organes concernés par cette question117. Cette mise au point d’une
stratégie commune a pour but d’empêcher la consécration de droits qui sont contraires à la
conception islamique des droits de l’Homme.

Ainsi, l’OCI ne cesse de dénoncer, à juste titre, l’islamophobie 118 ; elle a d’ailleurs mis en
place un Observatoire de l’islamophobie et a insisté pour qu’une résolution des Nations Unies
condamne ce sentiment d’aversion. Mais elle a franchi un pas très contestable lorsqu’elle a
demandé que la lutte contre l’islamophobie soit envisagée sous la bannière de la lutte contre la
diffamation des religions. La résolution 26/33-P de 2006 sur « la lutte contre la haine et les
préjugés à l’encontre de l’Islam » fournit un bon exemple de la position de l’OCI sur cette
question ; elle souligne que la liberté d’expression peut être restreinte pour des motifs liés à la
sécurité nationale, au maintien de l’ordre public, au respect des droits d’autrui mais ajoute
« au respect des religions et des croyances » (point 5). Il s’ensuit qu’elle « souscrit au travail
accompli par le groupe de l’OCI à Genève sur le projet de résolution à soumettre au Conseil
des droits de l’Homme nouvellement créé pour, entre autres, obtenir la nomination d’un
rapporteur spécial avec un mandat spécifique en vue de rendre compte au Conseil des actes de
diffamation et dénigrement à l’encontre des religions (…) » (point 9) et invite même le
Conseil à « élaborer un instrument international universellement exécutoire pour le respect

117
Par exemple, la résolution 37/20-P (1991) invite les Etats membres à coordonner leurs positions en vue de la
Conférence des Nations Unies sur les droits de l’Homme de 1993.
118
Les représentants permanents des Etats membres de l’OCI réunis le 31 janvier 2010 à Djeddah ont qualifié
« l’interdiction des minarets en Suisse » d’ « acte d’islamophobie qui est en totale contradiction avec les
obligations internationales de la Suisse en matière de droits humains, et notamment la liberté d’expression, de
conscience et de religion » (communiqué final, point 2).

45
des religions » (point 14). Finalement l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une
résolution en date du 18 décembre 2008 sur la lutte contre le dénigrement des religions 119 en
associant subrepticement dénigrement des religions et incitation à la haine religieuse. Depuis
1999, l’OCI fait passer la même résolution au niveau de la Commission et aujourd’hui du
Conseil des droits de l’Homme. La dernière résolution en date remonte au 25 mars 2010
(A/HCR/13/L.1) : vingt pays120 se sont prononcés pour, dix-sept121 contre et huit122 se sont
abstenus. L’ambassadeur français, représentant l’Union européenne, a estimé que le concept
de diffamation des religions n’est pas pertinent dans un débat sur les droits de l’Homme et
qu’il faut protéger les personnes, non « les systèmes de croyances ». Déjà la résolution 7/36
du Conseil des droits de l’Homme en date du 28 mars 2008 avait particulièrement choquée
puisqu’elle demandait au rapporteur spécial sur la liberté d’expression de « faire rapport sur
les cas dans lesquels l’atteinte au droit à la liberté d’expression constitue un acte de
discrimination raciale ou religieuse »123. Autrement dit, l’expert devait également traquer les
abus de la liberté d’expression c’est-à-dire se soucier non pas de la violation de la liberté
d’expression seulement mais également de la violation d’autres droits par la liberté
d’expression, en l’occurrence l’incitation à la haine raciale ou religieuse ; or, l’incitation à la
haine raciale ou religieuse relevait déjà du rapporteur spécial sur le racisme, la xénophobie et
l’intolérance. Le poids de l’OCI avait clairement transparu dans la résolution du Conseil des
droits de l’Homme en date du 30 mai 2007 ; le Conseil « rappelant (…) le communiqué final
de la troisième session extraordinaire de la Conférence islamique au Sommet, tenue à La
Mecque (Arabie Saoudite) les 7 et 8 décembre 2005, dans lequel la Conférence a exprimé sa
profonde préoccupation face à la montée de la discrimination à l’égard des musulmans »,
« insiste sur le droit de chacun à la liberté d’expression, qui devrait s’exercer de façon
responsable et peut donc être soumis à des restrictions, prescrites par la loi et nécessaires pour
le respect des droits ou de la réputation d’autrui, la protection de la sécurité nationale ou
l’ordre public, de la santé ou de la morale publiques, et le respect des religions et des
convictions »124.

119
http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N08/481/06/PDF/N0848106.pdf?OpenElement
120
Afrique du Sud, Arabie Saoudite, Bahreïn, Bangladesh, Bolivie, Burkina Faso, Chine, Cuba, Djibouti, Egypte,
Indonésie, Jordanie, Kirghizistan, Nicaragua, Nigeria, Pakistan, Philippines, Qatar, Russie et Sénégal.
121
Argentine, Belgique, Chili, Etats-Unis, France, Hongrie, Italie, Mexique, Norvège, Pays-Bas, République de
Corée, Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie, Ukraine, Uruguay et Zambie.
122
Bosnie, Brésil, Cameroun, Ghana, Inde, Japon, Madagascar et Maurice.
123
A/HRC/RES/7/36, point 4-d)
124
A/HRC/RES/4/9, point 10. Souligné par nous.

46
Autre point de discorde entre l’OCI et les pays occidentaux, la stigmatisation d’Israël.
L’OCI a fait un point d’honneur d’obtenir, à chaque session, une condamnation d’Israël. La
résolution du 24 mars 2010 adoptée par le Conseil des droits de l’Homme, condamne Israël
sur les violations graves des droits de l’homme commises dans le territoire palestinien occupé,
y compris Jérusalem-Est. L’ambassadeur français, au nom de l’Union européenne, a déploré
que le texte ne fasse pas référence aux tirs des roquettes sur le territoire israélien 125. A
l’occasion de la quatorzième session ordinaire du Conseil des droits de l’Homme (31 mai-18
juin 2010), l’activisme du Pakistan agissant au nom de l’OCI aboutit à l’adoption d’une
résolution, le 2 juin 2010, condamnant Israël pour l’attaque de la flottille humanitaire se
dirigeant vers Gaza et la mise en place d’une mission internationale 126. Au même moment, les
violences interethniques au Kirghizistan n’attirent l’attention du Conseil que le dernier jour ;
le 18 juin 2010, une résolution appelle à une enquête « transparente » et non « internationale »
comme pour Israël127. Enfin, il faut relever que sur les treize sessions extraordinaires, six ont
été consacrées à la question palestinienne et au conflit israélo-libanais.

Lors de la Conférence Durban II sur le racisme tenue du 20 au 24 avril 2009 à Genève,


l’OCI avait dû lâcher du lest sur la diffamation des religions et la stigmatisation d’Israël afin
d’éviter l’absence des principaux pays occidentaux dont les Etats-Unis, la France et l’Italie
qui avaient menacé de boycotter la réunion. Mais la Conférence s’est ouverte avec le discours
du président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, qui a dénoncé Israël et réitéré sa position sur la
Shoah ; « cette déclaration [a été] saluée par les applaudissements des pays de l’OCI et de
pays asiatiques (…) »128.

L’OCI sert également de point d’appui aux puissances amies comme la Chine. Ainsi en mai
2009, la Chine « s’est alliée à l’Inde et au Pakistan pour obtenir du Conseil des droits de
l’Homme une résolution louant le Sri Lanka pour ses efforts en faveur des droits de l’homme
(sic), alors que l’armée de Colombo venait de faire des milliers de victimes civiles tamoules
sécessionnistes »129. Elle s’était également alliée à Cuba et à la Chine pour s’opposer aux
mandats géographiques censés avoir « un caractère sélectif, discriminatoire et politique » ; le
Pakistan, s’exprimant au nom des Etats membres de l’OCI, avait « fait observer que si les

125
A/HRC/13/L.29 : pour : 31 ; contre : 9 (Etats-Unis et les pays européens) et abstention : 7
126
A/HRC/RES/14/1 : les Etats-Unis, l’Italie et les Pays-Bas ont voté contre alors que la France, le Royaume-
Uni, la Belgique et la Slovaquie ont fait partie des abstentionnistes.
127
A/HRC/RES/14/14.
128
Gérard FELLOUS, op. cit., p. 111.
129
Ibid., p. 32.

47
Etats membres de l’OCI soutiennent pleinement les mécanismes thématiques et sont disposés
à coopérer avec eux, il n’en va pas de même en ce qui concerne les titulaires d’un mandat au
titre des procédures spéciales »130. Du coup, les raisons qui avaient amené la Commission des
droits de l’Homme à être de plus en plus discréditée131 et finalement remplacée par le Conseil
des droits de l’Homme n’ont pas disparu. « On a voulu dépasser la logique des blocs
régionaux pour aboutir à faire de l’Organisation de la Conférence islamique le chef
d’orchestre du nouveau Conseil »132.

Il manque une approche sincère, en réalité ; un intérêt pour cette question, une mentalité
disposée à s’investir pour contribuer à rehausser le standard international en matière de
protection des droits de l’Homme. Or l’OCI se veut le porte-voix d’une communauté qui,
contrairement à elle, n’est pas complètement inféconde dans le domaine des droits de
l’Homme. Les discussions, les propositions voire les remises en cause sont légion. Peut-on
espérer, à long terme, une amélioration sinon un revirement sur cette question ?

§ 2 : Les perspectives d’évolution


Le changement peut venir soit de l’ijtihad à laquelle l’OCI est attachée (A) soit d’un
remuement de ses Etats membres tant ils forment une assemblée aux fidélités hétéroclites (B).

A) La référence à l’ijtihad

Il est clair que la Déclaration du Caire « ne constitue pas une relecture de l’Islam »133.
L’OCI a opté pour la vision traditionnelle, la plus consensuelle pour l’instant. Or, la notion
d’ijtihad, l’effort d’interprétation, est primordiale dans la pensée musulmane. Il faut
cependant noter que « l’ijtihad a été conçu comme l’instrument de découvrement des statuts
sharaïques, non pas comme celui de leur mise à jour. La seule idée que les normes sharaïques
aient à s’adapter à l’histoire était tout simplement absente de l’esprit des artisans du concept
130
Olivier de FROUVILLE, « Les organes subsidiaires de la commission », Rapport général, Les Nations-Unies
et les droits de l’Homme. Enjeux et défis d’une réforme, Emmanuel DECAUX (dir.), op. cit., pp. 171-199 : note
64, p. 192.
131
La politisation de la Commission « se manifeste par des doubles standards évidents s’agissant des grandes
puissances qui échappent à toute condamnation, par le poids des solidarités de bloc, notamment de la part des
Etats du Tiers monde, mais aussi de la part de la Russie (…) et par l’abus de la procédure de « non action » ou la
paralysie des sessions extraordinaires, se traduisant au bout du compte, par une impuissance coupable à faire
face à des violations massives des droits de l’homme qui sont au cœur de l’actualité », Emmanuel DECAUX,
Rapport général, Les Nations-Unies et les droits de l’Homme. Enjeux et défis d’une réforme, Emmanuel
DECAUX (dir.), op. cit., pp. 29-44 : pp. 30-31.
132
Emmanuel DECAUX, cité par Gérard FELLOUS, op. cit., p. 108.
133
Néji BACCOUCHE, op. cit., p. 19.

48
d’ijtihad »134. Dans la Déclaration de La Mecque de 1981, les Etats membres ont confirmé
leur volonté d’ « encourager la recherche et l’Ijtihad parmi les scientifiques et les penseurs
musulmans » et ont adopté une résolution qui crée une « association mondiale de théologie »
afin d’ « étudier les problèmes de la vie moderne de la manière la plus authentique et la plus
efficace, dans le but de présenter des solutions provenant du patrimoine islamique et ouvertes
à l’évolution de la pensée de l’homme vis-à-vis de ses problèmes » (rés. 8/3-C IS). Le concept
adopté par l’OCI est donc plus ambitieux que la définition classique de l’ijtihad. En 1994,
l’Organisation justifie son désir de restaurer l’ijtihad, « fondée sur les principes généraux de
la Charia islamique », par sa détermination à « protéger une image réelle de l’Islam » ternie
par le terrorisme et le fondamentalisme (rés. 37/22-P). En 2003, une résolution 45/10-POL
(IS) fait l’éloge du « chemin de la modération éclairée » et demande la création d’une
commission afin d’ « élaborer une stratégie et un plan d’action afin de permettre à la Oummah
de relever les défis du 21è siècle ; élaborer un plan global visant à promouvoir au plan
universel et en particulier parmi les sociétés islamiques des politiques et programmes destinés
à encourager la modération éclairée en symbiose avec les commandements de l’Islam et ses
préceptes de tolérance, d’émancipation et d’exaltation de l’humanité ». Plus la dérive
fondamentaliste s’accroît, plus les résolutions de l’OCI rappellent que l’islam est la religion
du juste milieu, de la tolérance et du dialogue.

L’OCI a institué en son sein, une Académie du fiqh chargée de délivrer des avis religieux à
l’aune des conditions de vie contemporaines. Elle confrontera « les données de l’évolution de
la vie moderne et ses problèmes grâce à un effort s’inspirant de l’Ijtihad, de la foi conciliante
et de la noble Sunnah du Prophète afin de trouver des solutions islamiques originales issues
des préceptes spirituels éternels de l’Islam » (rés. 16/12-C de 1981). Elle constitue donc un
instrument officiel qui pourrait servir l’adaptation voire le renouvellement du dogme. Il faut,
cependant, relever que cette institution s’apparente plus à un cénacle où se réunissent les
savants pour bavarder sur des détails qu’à un centre de réflexion poussée. Elle a pris des
résolutions sur la fécondation in vitro, la greffe, la location-vente, la vente à tempérament, la
fiscalité, etc. mais rien sur les grandes problématiques qui se posent au monde musulman
aujourd’hui135. En outre, une Cour islamique internationale de justice a vu le jour en 1987 ;

134
Eric CHAUMONT dans Dictionnaire du Coran, Mohammad Ali AMIR-MOEZZI (dir.), op. cit., p. 826. Voir
également Eric CHAUMONT, « Quelques réflexions sur l’actualité de la question de l’ijtihâd », Lectures
contemporaines du droit islamique, Franck FREGOSI (dir.), Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg,
2004, pp. 71-79.
135
La résolution 7/32-C de 2005 « se félicite (…) des travaux d’exégèse sur des questions nouvelles dans tous les
domaines de développement de la vie économique et sociale, en tenant compte des changements exigés par notre

49
l’article 14 de la Charte de 2008 prévoit qu’elle « deviendra l’organe judiciaire principal de
l’Organisation, à compter de la date d’entrée en vigueur de ses statuts ». La Cour aura pour
tâche de régler les différends entre les Etats membres et d’interpréter les Conventions de
l’OCI ; or, celle-ci envisage de rédiger des conventions sur les droits de l’Homme ce qui
permettra à l’organe judiciaire de se prononcer éventuellement sur les droits garantis.

Il existe, pourtant, un fond très riche à la disposition des savants. Pendant des siècles,
l’islam a accumulé des réflexions et des opinions dissidentes qui lui ont permis d’édifier un
« dogme parallèle », historiquement mis à l’écart, mais défendu obstinément par une minorité
grandissante. Nous l’avons vu, l’islam d’aujourd’hui est le résultat d’une lutte idéologique
remportée par les asharites. Or la qualité de la pensée islamique contemporaine, les
aspirations du peuple musulman et sans doute la volonté de redorer une image incessamment
écornée par les agissements de la frange la plus radicale peuvent conduire à un changement de
paradigme136.

Le concept même de droits de l’Homme, longtemps perçu comme de facture impérialiste,


retrouve ses racines dans l’islam originel137. Les penseurs modernes mettent en avant le
« contexte »138, retrouvent l’esprit des règles révélées, et ainsi surmontent l’approche
traditionnelle de la communauté, de la famille, du clan, bref du collectif pour souligner
l’importance de la responsabilité individuelle et appeler à des sociétés où l’individu ose
définir un cheminement personnel qui le mènera au bonheur. Il s’agit, en somme, de
époque et dans le respect de l’esprit de la sublime charia islamique ». Si les termes ont un sens, il s’agit là d’une
grande ouverture : « vie économique et sociale », changements « exigés par notre époque », « l’esprit » de la
charia. Rappelons que la Cour européenne des droits de l’Homme estime également que la Convention est « un
instrument vivant » qui « doit s’interpréter à la lumière des conditions d’aujourd’hui » (Marckx, 13/06/1979, §
58). Mais le cadre reste, ici, limité : il s’agit de « questions nouvelles », pas de vieilles questions qui fâchent…
136
Exercice certes difficile car la mentalité islamique reste convaincue que l’islam vécu aujourd’hui est celui de
la Révélation et s’obstine à ne pas y voir un islam qu’on pourrait qualifier de « sédimentaire » c’est-à-dire œuvre
du temps et surtout de l’idéologie du temps. Par exemple, en 1952, lors de l’examen du projet de convention sur
les droits politiques de la femme devant la Troisième commission de l’Assemblée générale des Nations Unies, la
représentante de l’Iraq, Mme Afnan, pouvait dire : « L’état de recluse de la femme musulmane n’est pas le fait
des traditions ni des lois de l’Islam qui, adoptées il y a 1300 ans, étaient beaucoup plus libérales que les lois
romaines ou autres », cité par Mohamed Amin AL-MIDANI, Les apports islamiques au développement du droit
international des droits de l’Homme, op. cit., p. 203.
137
Voir pour une approche à contre-courant qui estime que l’islam n’a pas amélioré la situation des femmes mais
au contraire qu’il « dégrada » la femme, Mansour FAHMY, La condition de la femme dans l’islam, Paris,
éditions Allia, 2007, p. 25 (thèse soutenue à la Sorbonne en 1913).
138
Gilles LEBRETON, « L’islam devant la Cour européenne des droits de l’Homme », RDP, n° 5, 2002, pp.
1493-1510 : la lecture humaniste « consiste à essayer de dégager ce qui, au sein du Coran et de la sunna,
constitue l’essence éternelle du message divin. Ses partisans pensent en effet que Dieu dans sa miséricorde a
utilisé un langage accessible aux hommes du VIIè siècle, mais qui n’est évidemment plus adapté à ceux
d’aujourd’hui » (p. 1504). Ainsi, s’agissant du droit pénal, « Dieu ne l’aurait donc pas conçue comme un
aboutissement à respecter de toute éternité, mais comme une simple étape sur le chemin menant les hommes de
leur barbarie primitive à une civilisation chaleureuse et fraternelle » (p. 1505).

50
promouvoir une approche qui « installe » l’Homme sur terre et d’éviter d’en faire seulement
un « regardeur du Ciel ». La vie devient un « bien en soi » et non plus un « moment à passer »
ou « un séjour entre deux portes ». La cité terrestre est réhabilitée. Il s’ensuit que les règles
venues d’en haut doivent être interprétées en fonction de cet impératif : le bonheur céleste
mais également terrestre de l’Homme139. Mohammed Arkoun appelle à « une critique
anthropologique et non plus seulement philologique, historiciste de toute l’axiologie
coranique ; tous les outils conceptuels, toutes les procédures déductives utilisées par la pensée
médiévale pour construire ses légitimités sémantiques, herméneutiques, historiographiques,
logocentristes, théologiques, morales, juridiques, philosophiques sont des constructions
socioculturelles précaires »140. D’autres, comme Mojtahed Shabestari, adoptent une démarche
téléologique de la charia et estiment qu’elle n’a pas un « effet cliquet » mais qu’elle consacre
« un cheminement de l’injustice vers la justice »141. C’est donc à l’aune des principes qu’il
faut déduire les règles plus précises concernant la situation des femmes, le droit pénal et toute
autre question qui ne saurait demeurer coincée dans l’étroite conception du VIIè siècle142.

Il n’en reste pas moins que l’OCI est une structure multicolore, elle regroupe plusieurs types
d’Etats, chacun étant déjà engagé dans les liens d’autres conventions.

B) Une Organisation à double vitesse

L’OCI regroupe toute sorte d’Etats : des Républiques islamiques, des Etats laïques, des
nomocraties, des Etats qui font partie des pays les moins avancés, d’autres qui comptent
parmi les plus riches, des régimes pour la plupart autoritaires, etc. En outre, l’OCI est une
139
En comparaison, la loi juive est expressément rigide : Deutéronome 13, 1 : « Tout ce que je vous ordonne,
vous le garderez et le pratiquerez, sans y ajouter ni en retrancher » ; Lévitique 23, 14 : « C’est une loi perpétuelle
pour vos descendants, où que vous habitiez ».
140
Mohammed ARKOUN, « Repenser la question du califat », La question du califat, Les Annales de l’Autre
Islam, N° 2, Publication de l’ERISM, INALCO, 1994, pp. 13-23 : p. 21.
141
Cité par Azadeh KIAN-THIEBAUT, « L’islam, les femmes et la citoyenneté », Pouvoirs, n° 104, Islam et
démocratie, janvier 2003, pp. 71-84.
142
Nous ne pouvons citer, ici, les différentes doctrines prônées au nom du réformisme ; voir pour plus
d’explications, Hervé BLEUCHOT, « Le droit musulman en langue française dans les librairies islamiques en
France », Lectures contemporaines du droit islamique, Franck FREGOSI (dir.), op. cit., pp. 81-98 (l’auteur fait
une liste des auteurs traditionalistes, réformistes, modernistes et islamistes). Voir également Vida
AMIRMOKRI, L’islam et les droits de l’homme : l’islamisme, le droit international et le modernisme islamique,
Presses de l'Université Laval, Distribution de livres Univers, coll. Dikè, 2004, pp. 125-161 (l’auteure analyse les
approches du Soudanais Abdullah Ahmet An-Naïm et de l’Iranien Mohammad Mojtahed Shabestari).

51
organisation grosse de plusieurs organisations. Elle englobe aussi bien l’Organisation des
Nations Unies et les pactes de 1966143, le Conseil de l’Europe et la Convention européenne
des droits de l’Homme144 que l’Union africaine et la Charte africaine des droits de l’homme145
et des peuples et la Ligue des Etats arabes et la Charte arabe des droits de l’Homme146 mais
également l’Association des Nations de l’Asie du Sud-est147. La plupart des Etats sont donc
déjà au-dessus du seuil de protection que l’OCI peine à mettre en place, ils sont engagés par
d’autres conventions plus protectrices148. En outre, beaucoup de pays membres ont des
législations qui vont largement au-delà de ce que prévoit le corpus de l’OCI en matière des
droits de l’Homme. C’est le défaut principal de l’Organisation, les Etats membres n’ont pas
une communauté de vues sur cette question. Par exemple, si l’OCI avait un système de
protection, le citoyen turc se tournerait plus volontiers vers la Cour européenne des droits de
l’Homme et bouderait l’organe islamique qui lui paraîtrait largement archaïque alors que le
citoyen saoudien se réjouirait d’une telle protection même si elle s’avère objectivement
insuffisante. La Déclaration apparaît alors comme un plafond pour certains alors qu’elle n’est
même pas un plancher pour d’autres. L’avancée ne concerne donc que ceux qui sont
franchement en retard soit les pays du Golfe, d’Asie centrale et d’Asie du sud-est149.

143
Ratification du PIDCP (consultation le 14 juillet 2010) : Afghanistan, Albanie, Algérie, Azerbaïdjan, Bahreïn,
Bangladesh, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Djibouti, Egypte, Gabon, Gambie, Guinée, Guyana,
Indonésie, Iran, Iraq, Libye, Jordanie, Kazakhstan, Kirghizistan, Koweït, Liban, Maldives, Mali, Maroc,
Mauritanie, Mozambique, Niger, Nigeria, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Sénégal, Sierra Leone, Somalie,
Soudan, Suriname, Syrie, Tadjikistan, Tchad, Togo, Tunisie, Turkménistan, Turquie, Yémen.
Ratification du PIDESC : Afghanistan, Albanie, Algérie, Azerbaïdjan, Bahreïn, Bangladesh, Bénin, Burkina
Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Djibouti, Egypte, Gabon, Gambie, Guinée, Guinée Bissau, Guyana, Indonésie,
Iran, Iraq, Libye, Jordanie, Kazakhstan, Kirghizistan, Koweït, Liban, Maldives, Mali, Maroc, Mauritanie, Niger,
Nigeria, Ouganda, Ouzbékistan, Pakistan, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Suriname, Syrie, Tadjikistan,
Tchad, Togo, Tunisie, Turkménistan, Turquie, Yémen.
144
Ratifiée par : Albanie, Azerbaïdjan et Turquie.
145
Ratifiée par : Algérie, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Comores, Côte d’Ivoire, Djibouti, Egypte, Gabon,
Gambie, Guinée, Guinée Bissau, Libye, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Nigeria, Ouganda, Sénégal,
Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tchad, Togo, Tunisie.
146
Ratifiée par : Algérie, Bahreïn, Emirats arabes Unis, Jordanie, Libye, Palestine, Syrie.
147
Récemment, « une commission intergouvernementale des droits de l’homme (AICHR) a été inaugurée par les
dirigeants de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-est (Asean) lors du sommet qui s’est tenu fin octobre
[2009] à Hua Hin, en Thaïlande. Ce nouvel organe s’inscrit dans une démarche régionale prévue par la Charte de
l’Asean, l’idée étant d’utiliser la Déclaration universelle des droits de l’homme comme référence », La
Chronique, Le Mensuel d’Amnesty International France, n° 277, déc. 2009, p. 3. Cet organe comprend dix
membres, examine seulement les rapports étatiques et non les requêtes individuelles. Les Etats membres de
l’Asean sont, en ce qui nous concerne, le Brunei, l’Indonésie et la Malaisie.
148
En ce sens, la remarque d’Ahmed Mahiou est juste : « ce serait une erreur méthodologique ou un a priori
idéologique que de postuler l’existence d’une conception islamique ou d’une conception arabe des droits de
l’homme », Ahmad MAHIOU, « La réforme de la protection des droits de l’Homme dans le monde arabe », op.
cit., p. 322.
149
Ne sont liés par aucun autre système régional des droits de l’Homme : Afghanistan, Arabie Saoudite,
Bangladesh, Guyana, Iran, Iraq, Kazakhstan, Kirghizistan, Koweït, Liban, Maldives, Maroc, Oman,
Ouzbékistan, Pakistan, Qatar, Suriname, Tadjikistan, Turkménistan, Yémen.
N’ont pas ratifié les deux pactes de 1966 : Arabie Saoudite, Brunei, Comores, Emirats arabes Unis, Guinée
Bissau, Malaisie, Mozambique (a ratifié seulement le PIDESC), Oman, Palestine, Qatar.

52
Par exemple, les pays du Maghreb ont mis en œuvre des réformes récentes en droit de la
famille150 : la répudiation est de plus en plus encadrée, la femme obtient le droit de demander
la séparation, la polygamie est réglementée et liée à des conditions (existence d’une
justification objective et exceptionnelle, par exemple). L’Albanie, l’Azerbaïdjan et la Turquie
ont déjà un droit soumis aux dispositions de la CEDH. Les dispositions du droit pénal
islamiques ne sont plus appliquées dans la majorité des pays musulmans ; si une évolution est
permise dans ce cas, pourquoi ne pas l’admettre dans d’autres domaines ? Pourquoi arguer de
l’immuabilité du droit de la famille, par exemple, et pas du droit pénal alors que « le juriste se
substituant au Faqih est venu avec ses nouvelles majuscules (la Loi, le Souverain, l’Etat, les
Droits de l’Homme) et ses nouveaux concepts de justice horizontale, de liberté, de droit
positif, de constitution »151 ?

Il y a des difficultés concernant le droit de vote et surtout d’éligibilité des femmes mais il
s’avère que les femmes sont beaucoup plus diplômées que les hommes. Les mentalités
changent. Les esprits des futurs générations sont façonnées par des mères éduquées,
conscientes de leur situation et des remèdes à y apporter. Le changement ne peut se faire que
par une révolution de l’entendement car si le fiqh est « marginal au plan juridique », il est
« hégémonique au plan culturel »152. Le droit musulman tel qu’il est, est perçu comme faisant
partie de la conviction religieuse ; Yadh Ben Achour donne l’exemple de la femme marocaine
qui s’oppose à la réforme de la Mudawanah alors que cette dernière lui octroie plus de droits :
« La femme répudiée, soumise, perdant la garde de ses enfants en cas de remariage, disposant
de la moitié de la succession revenant à son frère, n’étant qu’un demi d’homme dans le
témoignage, sait pertinemment qu’il lui manque une dimension immense du bonheur terrestre,
celui d’être femme, femme libre, femme égale au frère, à l’époux, au cousin. Si elle milite
pour ce statut qui est une forme de servitude, c’est que ce statut n’est pas isolé, mais qu’il
s’inscrit dans une philosophie de la vie (pour elle, l’illusoire vie terrestre et la véridique vie

D’une manière générale, les pays arabes ratifient les conventions spécifiques telles que la Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes, convention contre la torture ou la
convention sur les droits de l’enfant mais émettent des réserves.
150
Taïeb KHAISSIDI, « Le renforcement des pouvoirs juridiques de la femme au Maroc », Revue franco-
maghrébine de droit, Islam et droit, n° 12, Presses universitaires de Perpignan, Presses de l’Université des
sciences sociales de Toulouse, 2004, pp. 343-379.
151
Yadh BEN ACHOUR, « Islam et laïcité. Propos sur la recomposition d’un système de normativité »,
Pouvoirs n° 62, 1992, pp. 15-30 : p. 29.
152
Slim LAGHMANI, « Les écoles juridiques du sunnisme », Pouvoirs, n° 104, Islam et démocratie, janvier
2003, pp. 21-31.

53
céleste). Elle ne défend pas sa servitude, cela serait incompréhensible, mais le mystère divin
qui est derrière, la métaphysique qui la justifie »153.

Tous ces efforts mettent en lumière un paradoxe contrariant : le contingent, le circonstanciel


et surtout l’héritage préislamique qu’était la réglementation juridique dans le Coran est perçu
aujourd’hui comme la livrée de l’essence islamique. On comprend alors toute la pertinence de
ces initiatives et ces appels à l’authenticité qui se font entendre continuellement. Ce sentiment
de gâchis, de dévoiement grossier de l’islam explique le grognement parfois le fiel des
« réformateurs » et corrélativement, la méfiance et le repli des traditionalistes. L’OCI est,
aujourd’hui, aux mains de ces derniers ; elle se tient fermement à son port d’attache mais ne
perd pas une occasion de rappeler à qui veut bien l’entendre, qu’elle fait résolument route vers
l’horizon. L’OCI demeure, on l’a compris, « le plus grand parti islamiste au monde »154.

CONCLUSION GENERALE

153
Yadh BEN ACHOUR, « L’articulation du droit musulman et du droit étatique dans le monde arabe actuel »,
Lectures contemporaines du droit islamique, Franck FREGOSI (dir.), op. cit., pp. 101-120 : p. 103.
S’agissant de la culture africaine, Kéba M’Baye rappelait que « le procès, dans la coutume africaine, est non une
discussion suivant les règles d’un jeu, mais une dispute dont il faut sortir vainqueur. La notion de recours
objectif n’y existe donc pas, et le citoyen, en attaquant une décision qui viole ses droits a le sentiment d’attaquer
l’autorité qui en est l’auteur. Il n’est d’ailleurs pas exclu que cette autorité se considère comme personnellement
visée, ce qui n’encourage guère les plaideurs à agir, redoutant la colère du Ministre ou de l’Administrateur », cité
par Karel VASAK, « Vers la création de commissions régionales des droits de l’Homme », op. cit., p. 472. Voir
également Gérard NIYUNGEKO, « La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples : défis et
perspectives », RTDH, n° 79, juillet 2009, pp. 731-738 (l’auteur évoque le problème de l’ « opérationnalisation »
de la protection du fait de l’inaccessibilité de la Cour, du manque d’information et surtout de l’absence
d’acceptation de la compétence de la Cour).
154
Yadh BEN ACHOUR, Le rôle des civilisations dans le système international (droit et relations
internationales), Bruxelles, Bruylant, 2003, p. 278.

54
En 1970, Maurice Flory écrivait : « Il est à craindre que la Conférence islamique ait grand
peine à survivre »155. Elle a bien survécu. Elle a quarante ans. Elle s’est transformée en
mastodonte, s’est ramifiée (trop, peut-être), s’est déployée. L’OCI a su s’adapter à la
sémantique qu’imposait l’air du temps en matière de droits de l’Homme mais il y a loin de la
coupe aux lèvres. Tant qu’une sincère mise à jour, une réelle relecture, une « rénovation de
l’entendement » n’est pas opérée au sein de l’OCI, il nous semble impossible de parler de
promotion et de protection des droits de l’Homme. Elle maintient encore trop jalousement des
positions qui vont à contre-courant de l’universalité, principe pourtant cardinal en la
matière156.

Pour autant, l’insistance des « Occidentaux » n’est pas de nature à faire évoluer les Etats
membres de l’OCI dans la voie de la réforme ; bien au contraire, elle crispe les conservateurs,
et ce qui devait être considéré comme une exigence humaine devient un diktat de l’Occident.
« Pour l’occidental, il ne fait aucun doute que les droits de l’homme constituent l’essentiel de
sa contribution à la civilisation universelle, ce que, politiquement, le moderniste musulman ne
peut admettre sans prêter le flanc à l’argument radical des islamistes qui verront dans cet
acquiescement la preuve de ce que la théorie des droits de l’homme est une invention
occidentale, étrangère à l’Islam et dirigée contre lui (…) »157. On se perd alors dans les
anathèmes et on escamote la problématique initiale : le respect de l’Homme et de ses droits
fondamentaux.

Il nous semble qu’au-delà de cette sclérose, c’est le degré d’intégration des Etats membres à
l’OCI qui pose problème. Celle-ci prend les allures d’une structure de soutien moral et
diplomatique aux Etats en difficulté ; tel Etat sollicite l’Organisation pour qu’il l’épaule dans
sa lutte (la Turquie pour Chypre ; l’Azerbaïdjan pour le Haut-karabakh, le Pakistan pour le
Cachemire), tel autre s’y rapproche pour obtenir un soutien financier158, tant d’autres restent
155
Maurice FLORY, « Les conférences islamiques », A.F.D.I 1970, pp. 233-243 : p. 242.
156
Abdelfattah Amor a raison lorsqu’il rappelle que « les progrès en matière de droits de l’Homme proviennent
de sédimentations successives, l’épaisseur de chaque couche de sédiments variant en fonction des circonstances
historiques particulières qui l’ont engendrée. C’est dire, aussi, que les droits de l’homme ne peuvent pas ne pas
être conjugués dans le temps, ne pas composer avec lui. Ils constituent un phénomène qui obéit à une logique
processuelle », Abdelfattah AMOR, Rapport introductif, Les droits fondamentaux, Jacques-Yvan MORIN (dir.),
op. cit, pp. 31-40 : p. 33. Mais, ici, le temps s’est figé ; il s’est même retourné puisque l’islam a connu la
Renaissance avant le Moyen-Age…
157
Slim LAGHMANI, « Islam et droits de l’Homme », op. cit., p. 43.
158
Le Président de l’Albanie, Sali Berisha, avait justifié l’adhésion de son Etat à l’OCI par le souci de trouver
des fonds nécessaires au développement du pays. Voir Odile DANIEL, « La situation de l’islam albanais dans le
nouveau contexte politique », Islam et laïcité, Approches globales et régionales, Michel BOZDEMIR (dir.),
L’Harmattan, 1996, pp. 121-135 : « Berisha souligna qu’il fallait considérer la réalité que le pays était
majoritairement musulman, ce qui, en conséquence, le conduisait à ne pas négliger l’aide susceptible d’être

55
concentrés sur le seul problème palestinien, etc. En outre, elle est traversée par les blocs
ordinaires entre les pays d’Afrique, d’Asie ou les pays arabes, les Etats riches et les Etats
pauvres. Chacun vient à la porte de l’OCI avec son lot de désolations et d’espérances. On est
donc fondé à s’interroger sur la pertinence du défi de la promotion et de la protection des
droits de l’Homme.

Déjà en 1984, Guy Feuer soulignait les deux options possibles qui se présentaient à l’OCI :
« centrée sur elle-même et soucieuse des seuls intérêts du monde musulman ou l’orientation
de cette communauté vers le service des intérêts de l’humanité tout entière, à la paix et à la
prospérité de laquelle les nations musulmanes, de concert avec les autres nations de bonne
volonté, apporteraient la leçon de leur grande et noble tradition et accepteraient de recevoir
celle d’autrui »159. Il nous semble que, s’agissant des droits de l’Homme, la question reste
posée.

apporté par des pays musulmans disposant d’un potentiel important de ressources financières » (p. 130).
D’ailleurs, l’OCI, par le biais de la Banque islamique de développement, « octroie aux Albanais des crédits
avantageux sur vingt ans dans le domaine de l’éducation, de l’agriculture et des transports » (p. 131).
159
Guy FEUER, « L’organisation de la conférence islamique », L’Islam et les relations internationales, Actes du
IVè colloque franco-pakistanais, Paris, mai 1984, EDISUD, Aix-en-Provence, 1986, p. 16.

56
ANNEXES

A) Liste des pays membres et des observateurs (p. 59)

B) Extraits de la Charte de 1972 (p. 61)

C) Charte de 2008 (p. 64)

D) Projet de déclaration de 1979 (p. 79)

E) Projet de déclaration de 1981 (p. 85)

F) Déclaration de Dacca de 1983 (p. 92)

G) Déclaration du Caire de 1990 (p. 94)

H) Covenant des droits de l’enfant en Islam (p. 101)

57
ANNEXE A

Les Etats Membres

Afghanistan Albanie Algérie


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1992 Membre Depuis 1969

Arabie Saoudite Azerbaïdjan Bahreïn


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1992 Membre Depuis 1972

Bangladesh Bénin Brunei Darussalam


Membre Depuis 1974 Membre Depuis 1983 Membre Depuis 1984

Burkina Faso Cameroun Côte-d'Ivoire


Membre Depuis 1974 Membre Depuis 1974 Membre Depuis 2001

Djibouti Egypte Emirats Arabes Unis


Membre Depuis 1978 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1972

Gabon Gambie Guinée


Membre Depuis 1974 Membre Depuis 1974 Membre Depuis 1969

Guinée Bissau Guyana Indonésie


Membre Depuis 1974 Membre Depuis 1998 Membre Depuis 1969

Irak Iran Jordanie


Membre Depuis 1975 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969

Kazakhstan Kirghizistan Koweït


Membre Depuis 1995 Membre Depuis 1992 Membre Depuis 1969

Liban Libye Malaisie


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969

Maldives Mali Maroc


Membre Depuis 1976 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969

Mauritanie Mozambique Niger


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1994 Membre Depuis 1969

Nigeria Oman Ouganda


Membre Depuis 1986 Membre Depuis 1972 Membre Depuis 1974

Ouzbékistan Pakistan Palestine


Membre Depuis 1996 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969

58
Qatar Sénégal Sierra Léone
Membre Depuis 1972 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1972

Somalie Soudan Suriname


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1996

Syrie Tadjikistan Tchad


Membre Depuis 1972 Membre Depuis 1992 Membre Depuis 1969

Togo Tunisie Turkménistan


Membre Depuis 1997 Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1992

Turquie Union des Comores Yémen


Membre Depuis 1969 Membre Depuis 1976 Membre Depuis 1969

Observateurs
Date
Etats
d'adhésion

1 Bosnie-Herzégovine 1994

2 Centrafrique 1996

3 Chypre du Nord 1979

4 Russie 2005

5 Thaïlande 1998

Communautés musulmanes

1 Front National de Libération Moro 1977

Organisations internationales et régionales

59
1 Ligue des Etats Arabes 1975

2 Mouvement des Non-alignés 1977

3 Organisation de la Coopération Economique 1995

4 Organisation des Nations Unies 1976

1977
5 Union Africaine

2001
Union Parlementaire des Etats membres de
6
l'Organisation de la Conférence islamique.

ANNEXE B
CHARTE DE L’OCI (1972)
(extraits)

Au nom de Dieu Clément et Miséricordieux,

Les représentants (…),

Convaincus que leur foi commune constitue un puissant facteur de rapprochement et de


solidarité entre les peuples islamiques ;

Résolus à préserver les valeurs spirituelles, morales et socio-économiques de l’Islam qui


demeurent un des facteurs importants pour la réalisation du progrès de l’humanité ;

Réaffirmant leur adhésion à la Charte des Nations unies et aux droits fondamentaux de
l’homme dont les buts et principes constituent la base d’une coopération fructueuse entre tous
les peuples ;

60
Déterminés à resserrer les liens d’amitié fraternelle et spirituelle qui existent entre leurs
peuples et à préserver leur liberté et le patrimoine de leur civilisation commune fondée
notamment sur les principes de justice, de tolérance et de non discrimination ;

Veillant à promouvoir partout dans le monde la prospérité, le progrès et la liberté de


l’humanité, et décidés à unir leurs efforts pour établir une paix universelle propre à assurer la
sécurité, la liberté et la justice pour leurs peuples et tous les peuples du monde ;

Ont adopté la présente Charte de la Conférence Islamique.

Article I
Les états membres établissent « l’Organisation de la Conférence Islamique ».

Article II
Buts et principes

A- Les buts :
Les buts de la conférence Islamique sont les suivants :
1. Consolider la solidarité Islamique entre les Etats membres ;
2. Renforcer la coopération entre les Etats membres dans les domaines économiques,
sociaux, culturels, scientifiques ainsi que dans les autres domaines d’importance vitale
et procéder à davantage de consultations entre les pays membres au sein des
organisations internationales ;
3. Œuvrer à éliminer la discrimination raciale, et le colonialisme sous toutes ses formes ;
4. Prendre les mesures nécessaires pour consolider la paix et la sécurité mondiale fondée
sur la justice ;
5. Coordonner l’action pour sauvegarder les Lieux Saints, soutenir la lutte du peuple
palestinien et l’aider à recouvrer ses droits et à libérer ses territoires ;
6. Consolider la lutte de tous les peuples musulmans pour la sauvegarde de leur dignité,
leur indépendance et leurs droits nationaux ;
7. Créer l’atmosphère propre à promouvoir la coopération et compréhension entre les
Etats membres et les autres pays.

61
B- Les Principes :
Les Etats membres décident et s’engagent, en vue de réaliser les objectifs de la Charte, à
s’inspirer des principes suivants :
1. L’égalité complète entre les Etats membres ;
2. Le respect du droit à l’autodétermination et la non-ingérence dans les affaires
intérieures des Etats membres ;
3. Le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de chaque
Etat Membre ;
4. Le règlement de tout conflit qui pourrait surgir entre les pays membres par les moyens
pacifiques tels que les négociations, la médiation, la conciliation ou l’arbitrage ;
5. L’engagement de s’abstenir dans les relations entre les Etats membres de recourir à la
force ou de menacer d’un recours à la force contre l’unité et l’intégrité territoriale ou
l’indépendance politique de l’un d’eux.

Article III
Organes de la Conférence

La Conférence Islamique comprend :


1. La Conférence des Rois et Chefs d’Etats et de Gouvernement ;
2. La Conférence des Ministres des Affaires Etrangères ;
3. Le Secrétariat Général et ses organes subsidiaires.

(…)

Source : AL-MIDANI Mohamed Amin, Les apports islamiques au développement du droit


international des droits de l’Homme, thèse Strasbourg, 1987, pp. 466-474.

62
ANNEXE C

CHARTE DE L’OCI (2008)

Au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux

Nous, Etats membres de l’Organisation de la Conférence islamique ;

Rappelant la Conférence des Rois et Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats Membres,
tenue à Rabat, du 9 au 12 Rajab 1389 H (du 22 au 25 Septembre 1969) ainsi que la
Conférence des Ministres des Affaires étrangères, tenue à Djeddah, du 14 au 18 Moharram
1392 H (du 29 Février au 4 Mars 1972) ;

Guidés par les nobles valeurs islamiques d’unité et de fraternité, affirmant le caractère
essentiel de la promotion et du renforcement de l’unité et de la solidarité entre les Etats
Membres pour garantir leurs intérêts communs sur la scène internationale ;

Réaffirmant notre attachement aux principes de la Charte des Nations Unies, de la présente
Charte et du Droit International ;

Sommes déterminés :

À préserver et à promouvoir les hautes valeurs islamiques de paix, de compassion, de


tolérance, d’égalité, de justice et de dignité humaine ;

63
À oeuvrer à dynamiser le rôle d’avant-garde de l’Islam dans le monde, tout en assurant le
développement durable, le progrès et la prospérité des peuples des Etats Membres ;

À renforcer et à resserrer les liens d’unité et de solidarité entre les peuples musulmans et les
Etats Membres ;

À respecter, à sauvegarder et à défendre la souveraineté nationale, l’indépendance et


l’intégrité territoriale de tous les Etats membres ;

À contribuer à l’instauration de la paix et de la sécurité internationales, de l’entente et du


dialogue entre les civilisations, les cultures et les religions et à promouvoir et encourager les
relations d’amitié et de bon voisinage, ainsi que le respect mutuel et la coopération ;

À promouvoir les droits de l’Homme et les libertés fondamentales, la bonne gouvernance,


l’Etat de droit, la démocratie et la responsabilité dans les Etats membres, conformément à
leurs systèmes constitutionnels et juridiques ;

À promouvoir la confiance et à encourager les relations d’amitié, de respect mutuel et de


coopération entre les Etats Membres et les autres Etats ;

À promouvoir les valeurs islamiques de modération, de tolérance, de respect de la diversité,


de sauvegarde des symboles et du patrimoine commun de l’Islam et à défendre l’universalité
de la religion islamique ;

À promouvoir l’acquisition et la démocratisation du savoir conformément aux nobles idéaux


de l’Islam afin d’accéder à l’excellence intellectuelle ;

À promouvoir la coopération entre les Etats membres afin de garantir le développement


socioéconomique durable à même d’assurer leur intégration effective dans l’économie
mondiale, conformément aux principes du partenariat et de l’égalité ;

À préserver et promouvoir tous les aspects relatifs à l’environnement humain pour les
générations actuelles et futures ;

A respecter le droit à l’autodétermination et la non-ingérence dans les affaires intérieures et à


respecter la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de chaque Etat membre ;

A soutenir la lutte du peuple palestinien actuellement sous occupation étrangère, et à lui


donner les moyens de recouvrer ses droits inaliénables y compris le droit à
l’autodétermination et le droit de créer son Etat souverain avec pour capitale al-Qods al-
Charif, tout en préservant le caractère historique et islamique et les lieux saints de cette ville ;

À préserver et à promouvoir les droits des femmes et à favoriser leur participation effective
dans tous les domaines de la vie, conformément aux lois et législations des Etats Membres ;

À créer les conditions favorables à une éducation adéquate des enfants et des jeunes
musulmans et à leur inculquer les valeurs islamiques au moyen de l’éducation, de manière à
consolider leurs valeurs culturelles, sociales, morales et éthiques ;

64
À aider les minorités et communautés musulmanes vivant à l’extérieur des Etats membres à
préserver leur dignité et leur identité culturelle et religieuse ;

À soutenir les buts et principes de la présente Charte, de la Charte des Nations Unies, du Droit
International et du droit humanitaire international, tout en respectant strictement le principe de
non-ingérence dans les affaires relevant essentiellement de la juridiction interne des Etats ;

À oeuvrer à la réalisation de la bonne gouvernance au niveau international et à la


démocratisation des relations internationales sur la base des principes d'égalité, de respect
mutuel entre les Etats et de non ingérence dans les affaires relevant essentiellement de leur
juridiction interne ;

Avons résolu de coopérer en vue de la réalisation de ces objectifs, et d’adhérer à la présente


Charte modifiée.

CHAPITRE I

Objectifs Et Principes

Article 1

Les objectifs de l’Organisation de la Conférence islamique sont les suivants :

1. Améliorer et consolider les liens de fraternité et de solidarité entre les Etats Membres ;

2. Sauvegarder et protéger les intérêts communs et soutenir les justes causes des Etats
Membres, et coordonner et unifier les efforts des Etats membres face aux défis auxquels se
trouvent confrontés le monde islamique en particulier et la communauté internationale en
général ;

3. Respecter le droit à l’autodétermination et la non-ingérence dans les affaires intérieures et


respecter la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de chaque Etat membre ;

4. Soutenir la restauration de la souveraineté complète et l'intégrité territoriale d'un Etat


membre sous occupation étrangère par suite d'une agression, sur la base du Droit International
et de la coopération avec les organisations internationales et régionales compétentes ;

5. Assurer une participation active des Etats Membres au processus mondial de prise de
décision dans les domaines politique, économique et social, afin de garantir leurs intérêts
communs ;

6. Promouvoir des relations inter-étatiques basées sur la justice, le respect mutuel et le bon
voisinage en vue de garantir la paix, la sécurité et l’harmonie dans le monde ;

65
7. Réaffirmer le soutien aux droits des peuples tels que stipulés par la Charte des Nations
Unies et par le droit international ;

8. Soutenir le peuple palestinien et lui donner les moyens d’exercer son droit à
l’autodétermination et à créer son Etat souverain, avec pour capitale al-Qods al-Charif, tout en
préservant le caractère historique et islamique ainsi que les Lieux Saints de cette ville ;

9. Renforcer la coopération économique et commerciale intra islamique, en vue de réaliser


une intégration économique devant aboutir à la création d’un Marché Commun Islamique ;

10. S’efforcer de promouvoir un développement humain intégral et durable et le bien-être


économique des Etats membres ;

11. Propager, promouvoir et préserver les enseignements et les valeurs Islamiques fondés sur
la modération et la tolérance, promouvoir la culture islamique et sauvegarder le patrimoine
islamique ;

12. Protéger et défendre la véritable image de l’Islam, lutter contre la diffamation de l’Islam et
encourager le dialogue entre les civilisations et les religions ;

13. Promouvoir et développer la science et la technologie et encourager la recherche et la


coopération entre les Etats membres dans ces domaines ;

14. Promouvoir et protéger les droits humains et les libertés fondamentales, y compris les
droits des femmes, des enfants, des jeunes, des personnes âgées et des personnes à besoins
spécifiques, et veiller à la sauvegarde des valeurs inhérentes à la famille islamique ;

15. Réaffirmer, protéger et promouvoir le rôle de la famille en tant que cellule naturelle et
fondamentale de la société ;

16. Préserver les droits, la dignité et l’identité religieuse et culturelle des communautés et
minorités musulmanes dans les Etats non Membres ;

17. Promouvoir et défendre des positions unifiées sur les questions d’intérêt commun dans les
forums internationaux ;

18. Coopérer à la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, le crime
organisé, le trafic illicite des drogues, la corruption, le blanchiment d’argent et la traite des
êtres humains ;

19. Travailler en collaboration et en coordination dans les situations d’urgence humanitaire


telles que les catastrophes naturelles ;

20. Promouvoir la coopération entre les Etats Membres dans les domaines social, culturel et
de l’information.

Article 2

66
Les Etats membres, dans la poursuite des objectifs énoncés à l’article 1, doivent être guidés et
inspirés par les nobles enseignements et valeurs de l’Islam et agir conformément aux
principes ci-après :

1. Tous les Etats membres s'engagent à respecter les buts et principes de la Charte des Nations
unies ;

2. Les Etats membres sont souverains, indépendants et égaux en droits et obligations ;

3. Tous les Etats membres règlent leurs différends par des moyens pacifiques et s’abstiennent
de tout recours ou menace de recours à la force dans leurs relations ;

4. Tous les Etats membres s’engagent à respecter la souveraineté nationale, l’indépendance et


l’intégrité territoriale des autres Etats membres et s’abstiennent de s’immiscer dans leurs
affaires intérieures ;

5. Tous les Etats membres s’engagent à participer au maintien de la paix et de la sécurité


internationales et à s'abstenir de toute ingérence dans les Affaires intérieures des autres Etats
membres, comme le soulignent la présente charte, la Charte de Nations unies, le Droit
International et le droit humanitaire international ;

6. Comme il a été mentionné à la Charte des Nations unies, aucune disposition de la présente
charte n’autorise l’Organisation ni ses organes à intervenir dans des affaires qui relèvent
essentiellement de la compétence nationale d’un Etat ou s’y rattachent.

7. Les Etats membres soutiennent et favorisent, aux niveaux national et international, la bonne
gouvernance, la démocratie, les droits humains, les libertés fondamentales et l’Etat de droit ;

8. Les Etats membres veillent à la protection et à la sauvegarde de l’environnement.

CHAPITRE II

QUALITE DE MEMBRE

Article 3

1. L’Organisation se compose des 57 Etats membres de l’Organisation de la Conférence


islamique et des autres Etats qui peuvent adhérer à la présente Charte conformément au
paragraphe 2 de l'article 3.

2. Tout Etat, membre des Nations Unies, disposant d’une majorité musulmane qui soumet une
demande pour devenir membre peut adhérer à l’Organisation si sa demande est approuvée par
consensus seulement par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères sur la base des
critères arrêtés, et adoptés par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

3. Aucune disposition de la présente Charte ne peut mettre en cause les droits et privilèges des
Etats membres actuels, particulièrement leur qualité de membre.

Article 4

67
1. L’octroi du statut d’observateur à un Etat, membre des Nations Unies, est décidé par le
Conseil des Ministres des Affaires étrangères par consensus seulement et sur la base des
critères agréés par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

2. L’octroi du statut d’observateur à une organisation internationale est décidé par le Conseil
des Ministres des Affaires étrangères par consensus seulement et sur la base des critères
agréés par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

CHAPITRE III

ORGANES

Article 5

L’Organisation de la Conférence islamique comprend les organes suivants :

1. Le Sommet islamique.
2. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.
3. Les Comités permanents.
4. Le Comité exécutif.
5. La Cour islamique internationale de Justice.
6. La Commission permanente indépendante des Droits de l’Homme.
7. Le Comité des Représentants permanents.
8. Le Secrétariat général.
9. Les Organes subsidiaires.
10. Les Institutions spécialisées.
11. Les Institutions affiliées.

CHAPITRE IV

SOMMET ISLAMIQUE

Article 6

Le Sommet islamique, composé des Souverains et Chefs d’Etat et de Gouvernement des Etats
membres, est l’instance suprême de l’Organisation.

Article 7

Le Sommet islamique délibère, prend les décisions politiques et apporte des conseils sur
toutes les questions relatives à la réalisation des objectifs énoncés dans la Charte et examine
les autres questions d’intérêt commun pour les Etats Membres et pour la Oummah.

Article 8

1. Le Sommet islamique se réunit une fois tous les trois ans dans l’un des Etats membres.

68
2. La préparation de l’Ordre du Jour et toutes les dispositions requises pour la convocation du
Sommet seront assurées par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères avec l’assistance
du Secrétariat Général.

Article 9

Des sessions extraordinaires se tiendront, lorsque les intérêts des Etats membres l’exigent, en
vue d’examiner les questions d’importance vitale pour la Oummah et de coordonner en
conséquence la politique de l’Organisation. Une session extraordinaire peut se tenir sur
recommandation du Conseil des Ministres des Affaires étrangères, ou à l’initiative d’un Etat
membre ou du Secrétaire général, sous réserve d’obtenir l’approbation de la majorité simple
des Etats membres.

CHAPITRE V

LE CONSEIL DES MINISTRES DES AFFAIRES ETRANGERES

Article 10

1. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères se réunit une fois par an dans l’un des
Etats Membres.

2. Une session extraordinaire du Conseil des Ministres des Affaires étrangères peut se tenir à
l’initiative de tout Etat membre ou du Secrétaire général, sous réserve de l’approbation de la
majorité simple des Etats membres.

3. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères peut recommander la convocation d’autres
réunions ministérielles sectorielles afin d’examiner des questions spécifiques qui interpellent
la Oummah. Ces réunions soumettent leurs rapports au Sommet Islamique et au Conseil des
Ministres des Affaires étrangères.

4. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères examine les voies et moyens de mettre en
oeuvre la politique générale de l’Organisation et plus particulièrement :
a. Adopter des décisions et résolutions sur des questions d’intérêt commun relatives à la
réalisation des objectifs et de la politique générale de l’Organisation ;
b. Assurer le suivi de l’évolution du processus de mise en oeuvre des décisions et résolutions
adoptées par les sessions antérieures du Sommet et du Conseil des Ministres des Affaires
étrangères ;
c. Examiner et approuver le programme, le budget et les autres rapports financiers et
administratifs du Secrétariat général et des organes subsidiaires ;

69
d. Examiner toute question affectant un ou plusieurs Etats membres, chaque fois qu’une
demande est formulée à cet effet par l’Etat Membre concerné, en vue de prendre les mesures
appropriées ;
e. Recommander la création éventuelle de tout nouvel organe ou nouveau comité ;
f. Elire le Secrétaire général et nommer les Secrétaires généraux Adjoints conformément aux
Articles 16 et 18 de la Charte, respectivement ;
g. Examiner, le cas échéant, toutes autres questions pendantes.

CHAPITRE VI

COMITES PERMANENTS

Article 11

1. Dans le souci de réaliser des progrès sur les questions d’importance capitale pour
l’Organisation et ses Etats membres, l’Organisation a créé les Comités permanents ci-après :

i) Le Comité Al-Qods.
ii) Le Comité permanent pour l’Information et les Affaires culturelles (COMIAC).
iii) Le Comité permanent pour la Coopération économique et commerciale (COMCEC).
iv) Le Comité permanent pour la Coopération scientifique et technologique (COMSTECH).

2. Les Comités permanents sont présidés par les Souverains et les Chefs d’Etat et de
Gouvernement et sont créés conformément aux décisions du Sommet ou sur recommandation
du Conseil des Ministres des Affaires étrangères, y compris la désignation des membres
desdits comités.

CHAPITRE VII

COMITE EXECUTIF

Article 12

Le Comité exécutif est composé des Présidents des sessions actuelle, précédente, et prochaine
du Sommet islamique et du Conseil des Ministres des Affaires étrangères, du pays hôte du
siège du Secrétariat général et du Secrétaire général à titre de membre ex officio. Les réunions
du Comité exécutif sont conduites conformément à ses Règles de Procédure.

CHAPITRE VIII

COMITE DES REPRESENTANTS PERMANENTS

Article 13

Les attributions et les modalités de fonctionnement du Comité des Représentants permanents


seront définies par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

70
CHAPITRE IX

COUR ISLAMIQUE INTERNATIONALE DE JUSTICE

Article 14

La Cour islamique internationale de Justice, fondée au Koweït en 1987, deviendra l’organe


judiciaire principal de l’Organisation, à compter de la date d’entrée en vigueur de ses statuts.

CHAPITRE X

COMMISSION PERMANENTE INDEPENDANTE DES DROITS


HUMAINS

Article 15

La Commission permanente indépendante des Droits humains favorise les droits civiques,
politiques, sociaux et économiques consacrés par les conventions et déclarations de
l’Organisation, ainsi que par les autres instruments universellement reconnus, en conformité
avec les valeurs Islamiques.
CHAPITRE XI

SECRETARIAT GENERAL

Article 16

Le Secrétariat général comprend un Secrétaire général qui est le premier responsable


administratif de l’Organisation et le personnel requis par l’Organisation. Le Secrétaire général
est élu par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères pour un mandat de cinq ans,
renouvelable une fois. Le Secrétaire général est élu parmi les citoyens des Etats membres
conformément aux principes de la répartition géographique équitable, de la rotation et de
l’égalité des chances pour tous les Etats membres et en tenant dûment compte des critères de
compétence, d’intégrité et d’expérience.

Article 17

Le Secrétaire général assume les responsabilités suivantes :

a. Il peut attirer l’attention des organes compétents de l’Organisation sur toute affaire qui, à
son avis, pourrait servir les objectifs de l’Organisation, ou lui porter préjudice ;

b. Il assure le suivi de la mise en oeuvre des décisions, résolutions et recommandations du


Sommet islamique, du Conseil des Ministres des Affaires étrangères et des autres réunions
ministérielles ;

71
c. Il fait parvenir aux membres les notes et documents de travail par les voies appropriées,
dans le cadre de la mise en oeuvre des décisions, résolutions et recommandations du Sommet
islamique et du Conseil des Ministres des Affaires étrangères ;

d. Il coordonne et harmonise l’action des organes pertinents de l’Organisation ;

e. Il élabore le programme et le budget du Secrétariat général ;

f. Il oeuvre à promouvoir la communication entre les Etats membres et à faciliter les


consultations et échanges de vues ainsi que la diffusion des informations revêtant un intérêt
pour ces Etats ;

g. Il assume toute autre fonction que lui confie le Sommet islamique ou le Conseil des
Ministres des Affaires étrangères ;

h. Il soumet un rapport annuel au Conseil des Ministres des Affaires étrangères sur les travaux
de l’Organisation.

Article 18

1. Le Secrétaire général soumet les candidatures des Secrétaires généraux adjoints au Conseil
des Ministres des Affaires étrangères qui les nomme pour un mandat de 5 ans, conformément
aux principes de la répartition géographique équitable et en tenant dûment compte des critères
de compétence, d’intégrité et de dévouement aux objectifs de la Charte. Un poste de
Secrétaire général adjoint sera réservé à la cause d’Al-Qods Al-Charif et de la Palestine, étant
entendu que l’Etat de Palestine désigne son propre candidat.

2. Le Secrétaire général peut, pour les besoins de mise en oeuvre des résolutions et décisions
des Sommets islamiques et du Conseil des Ministres des Affaires étrangères, nommer des
Représentants Spéciaux. Ces nominations de même que les mandats des Représentants
Spéciaux se feront avec l’approbation du Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

3. Le Secrétaire général nomme le personnel du Secrétariat général parmi les ressortissants


des Etats membres en tenant dûment compte des critères de compétence, d’éligibilité,
d’intégrité et du genre conformément au principe de la répartition géographique équitable. Le
Secrétaire général peut recruter des experts et des consultants sur une base temporaire.

Article 19

Dans l’accomplissement de leurs missions, le Secrétaire général, les Secrétaires généraux


adjoints et le personnel ne solliciteront, ni n’accepteront d’instructions d’aucun
gouvernement, ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation. Ils s’abstiendront de toute
action susceptible de porter atteinte à leur statut de fonctionnaires internationaux responsables
uniquement devant l’Organisation. Les Etats membres sont tenus de respecter exclusivement
ce caractère international des fonctions du Secrétaire général et du personnel et de ne pas
chercher à les influencer de quelque façon que ce soit dans l’accomplissement de leurs tâches.

Article 20

72
Le Secrétariat général prépare les sessions du Sommet islamique et du Conseil des Ministres
des Affaires étrangères en étroite collaboration avec le pays hôte pour tout ce qui a trait aux
questions administratives et organisationnelles.

Article 21

Le siège du Secrétariat général est fixé à Djeddah en attendant la libération d’Al-Qods Al-
Charif qui deviendra siège permanent de l’Organisation.

CHAPITRE XII

Organes subsidiaires

Article 22

L’Organisation peut créer des organes subsidiaires et des institutions spécialisées et octroyer
le statut d’organe affilié, après accord du Conseil des Ministres des Affaires étrangères et
conformément à sa Charte.

Article 23

Les organes subsidiaires sont créés dans le cadre de l’Organisation conformément aux
décisions prises par le Sommet islamique ou le Conseil des Ministres des Affaires étrangères
et leur budget sera approuvé par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.
CHAPITRE XIII

Institutions spécialisées

Article 24

Des institutions spécialisées sont créées dans le cadre de l’Organisation conformément aux
décisions prises par le Sommet islamique ou le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.
L’adhésion aux institutions spécialisées est facultative et ouverte pour tout Etat membre de
l’Organisation. Leurs budgets sont indépendants et sont approuvés par leurs organes
législatifs respectifs conformément à leurs statuts.

Les institutions affiliées

Article 25

Les institutions affiliées sont des entités ou organes dont les objectifs sont conformes à ceux
de la présente Charte et qui sont reconnus en tant qu’institutions affiliées par le Conseil des
Ministres des Affaires étrangères. L’adhésion aux institutions affiliées est facultative et
ouverte pour les organes et institutions des Etats membres de l’Organisation. Leurs budgets
sont indépendants de ceux du Secrétariat général, des organes subsidiaires et des institutions
spécialisées. Les institutions affiliées peuvent bénéficier du statut d’Observateur en vertu
d’une résolution du Conseil des Ministres des Affaires étrangères. Elles peuvent obtenir une

73
assistance volontaire de la part des organes subsidiaires ou des institutions spécialisées ainsi
que des Etats membres.

CHAPITRE XIV

Coopération avec les autres organisations islamiques et non islamiques

Article 26

Les Etats membres s’engagent à promouvoir la coopération avec les organisations islamiques
et autres en poursuivant les objectifs consacrés par la présente Charte.

CHAPITRE XV

Règlement pacifique des différends

Article 27

Les Etats membres, parties à tout différend dont la persistance peut porter atteinte aux intérêts
de la Oummah islamique ou mettre en danger la paix et la sécurité internationale, doivent en
rechercher la solution par la voie des bons offices, de négociation, d’enquête, de médiation, de
conciliation, d’arbitrage, de règlement judiciaire ou par d’autres moyens pacifiques de leurs
choix. Dans ce contexte, les bons offices pourraient inclure une consultation avec le Comité
exécutif et le Secrétaire général.
Article 28

L’Organisation peut coopérer avec les autres organisations internationales et régionales dans
le but de préserver la paix et la sécurité internationales, à travers le règlement des différends
par les moyens pacifiques.

CHAPITRE XVI

Budget et finances

Article 29

1. Les budgets du Secrétariat général et des organes subsidiaires sont financés par les Etats
membres en fonction de leurs revenus nationaux.

2. L’Organisation peut, avec l’accord du Sommet islamique ou du Conseil des Ministres des
Affaires étrangères, créer des fonds spéciaux et des waqfs alimentés par des contributions
volontaires des Etats membres, d’individus et d’organisations. Ces Fonds et Awqaf sont
assujettis au système financier de l’organisation et audités annuellement par l’organe de
contrôle financier.

Article 30

74
Le Secrétariat général et les organes subsidiaires gèrent leurs opérations financières
conformément aux règles et procédures financières approuvées par le Conseil des Ministres
des Affaires étrangères.

Article 31

1. Une Commission permanente des Finances est créée par le Conseil des Ministres des
Affaires étrangères et composée des représentants accrédités des Etats membres participants.
Elle se réunit au siège de l’Organisation pour finaliser le programme et le budget du
Secrétariat général et de ses organes subsidiaires conformément aux règlements approuvés par
le Conseil des Ministres des Affaires étrangères.

2. La Commission permanente des Finances soumet un rapport annuel au Conseil des


Ministres des Affaires étrangères qui examine et approuve le programme et le budget.

3. L’Organe de contrôle financier composé d’experts en finances/audit comptable des Etats


membres, procède à la vérification des comptes du Secrétariat général et de ses organes
subsidiaires conformément à ses règles et à son règlement interne.

CHAPITRE XVII

Règles de procédure et vote

Article 32

1. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères adopte ses propres règles de procédure.

2. Le Conseil des Ministres des Affaires étrangères recommande les règles de procédure du
Sommet islamique.

3. Les Comités permanents établissent leurs propres règles de procédure.

Article 33

1. Les deux tiers des Etats membres constituent le quorum des réunions de l’Organisation de
la Conférence islamique.

2. Les décisions sont prises par consensus. A défaut, les décisions sont prises à la majorité des
deux tiers des membres présents et votants à moins qu’une autre procédure ne soit stipulée
dans cette Charte.

75
CHAPITRE XVIII

Dispositions finales
Privilèges et immunités

Article 34

1. L’Organisation jouit dans les Etats membres, des privilèges et immunités nécessaires à
l’accomplissement de sa mission et à la réalisation de ses objectifs.

2. Les représentants des Etats membres et les responsables de l’Organisation jouissent des
privilèges et immunités énoncés par l’accord de 1976 sur les privilèges et immunités.

3. Les personnels du Secrétariat général, des organes subsidiaires et des institutions


spécialisées jouissent des privilèges et immunités nécessaires à l’exercice de leurs fonctions
conformément à ce qui pourra être convenu entre l’Organisation et les pays hôtes.

4. Tout Etat membre qui accumule des arriérés dans le règlement de ses contributions
financières à l’Organisation est privé du droit de vote lors du Conseil des Ministres des
Affaires étrangères si le montant de ses arriérés est égal ou supérieur au montant de ses
contributions dues pour les deux années écoulées. L’Assemblée peut, néanmoins, autoriser ce
membre à voter si elle établit que le défaut de paiement est dû à des circonstances
indépendantes de sa volonté.

Retrait

Article 35

1. Tout Etat membre peut se retirer de l’Organisation en adressant une notification écrite dans
ce sens au Secrétaire général une année avant le retrait. Une telle notification sera
communiquée à tous les Etats membres.

2. L’Etat ayant demandé son retrait, est tenu de s’acquitter de ses obligations financières
jusqu’à la fin de l’année budgétaire au cours de laquelle la demande de retrait a été déposée. Il
s’acquittera, en outre, de toute autre obligation financière due à l’Organisation.

Amendements

Article 36

Les amendements à la présente Charte ont lieu conformément à la procédure ci-après :

a- Tout Etat membre peut proposer des amendements à la présente charte au Conseil des
Ministres.

76
b- Les amendements à la présente Charte entreront en vigueur une fois approuvés par le
Conseil des Ministres des Affaires étrangères et ratifiés à la majorité des deux tiers des Etats
membres.

Interprétation

Article 37

1. Tout différend qui pourrait naître de l’interprétation, de l’application, ou de l’exécution de


toute disposition de la présente Charte sera réglé à l’amiable par la voie de la consultation, de
la négociation, de la réconciliation ou de l’arbitrage.

2. Les dispositions de la présente Charte seront mises en oeuvre par les Etats membres
conformément à leurs exigences constitutionnelles.

Langues

Article 38

Les langues de l’Organisation sont l’arabe, l’anglais et le français.

Dispositions transitoires

RATIFICATION ET ENTREE EN VIGUEUR

Article 39

1) La présente Charte sera adoptée par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères à la
majorité des deux tiers et ouverte à la signature et à la ratification des Etats membres selon les
procédures constitutionnelles de chaque Etat membre.

2) Les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de


l’Organisation.

3) La présente Charte remplace la Charte de l’Organisation de la Conférence islamique


enregistrée, le 1er février 1974, conformément aux dispositions de l’Article 102 de la Charte
des Nations Unies.

Fait à Dakar, République du Sénégal, le sept Rabia al awwal mille quatre cent vingt neuf de
l’Hégire correspondant au quatorze mars deux mille huit.
Charter-final-2008

77
78
ANNEXE D

Projet de Déclaration sur les droits de l’Homme


(1979)

Au nom de Dieu, Gloire à Dieu et que le salut et la bénédiction soient sur l’envoyé de Dieu !

Les Etats membres de l’Organisation de la Conférence Islamique,


- forts de leur foi en Dieu – qu’il soit loué et exalté ! – lui qui est le vrai et l’omniscient,
le créateur de toutes choses, celui qui a constitué l’homme comme étant son vicaire
(khalifah) sur la terre pour qu’il la mette en valeur et y assure toute réforme, et qui a
mis à son service (taskhir) tout ce qui se trouve dans les cieux et sur terre,
- partant des principes éternels de l’Islam, qui proclament la dignité de l’homme sans
aucune discrimination, affirment l’unité de la famille humaine et invitent à la
connaissance réciproque ainsi qu’à la collaboration mutuelle entre les peuples en tout
ce qui peut tourner à leur avantage, comme aussi à exalter tout bien supérieur et à le
protéger,
- reconnaissant que les droits et les obligations de l’homme en Islam sont régis par des
textes impératifs qu’a fournis le créateur, lui qui est le législateur suprême, si bien que
l’homme ne saurait jamais y porter atteinte, ni feindre de les oublier ni même y
renoncer, et reconnaissant donc que tout homme en est responsable,

proclament ce qui suit :

Art.1 – L’homme est la plus noble des créatures de l’univers. Tous les hommes sont égaux
entre eux quant à leur dignité humaine. Ils se doivent donc d’assumer la responsabilité de la
protéger, envers et contre tout.

Art.2 – La famille humaine est une. Tous ses membres sont égaux entre eux quant aux droits
et aux obligations de base ; ils ont donc la responsabilité de réaliser et d’appliquer cette
égalité entre eux, dans un esprit de fraternité, d’amour et de paix. Nul d’entre eux ne saurait

79
être supérieur à un autre, sinon par les œuvres de bien qu’il accomplit au service des intérêts,
du progrès et de la sécurité de cette famille humaine elle-même.

Art.3 – Tout peuple a le droit de protéger ses particularités spécifiques et ses caractères
distinctifs à l’intérieur de cette même et unique famille humaine. Il a le droit de décider, en
toute liberté, de son destin sur la terre même qui lui sert de patrie, d’y adopter le régime
politique de son choix et d’y orienter sa croissance économique, culturelle et sociale comme il
l’entend.

Art. 4 – Sans jamais porter atteinte au droit qu’ont les générations futures aux richesses et aux
ressources de la nature, chaque peuple a le droit d’utiliser en toute liberté ses richesses et ses
ressources naturelles, conformément à ses besoins et d’une manière qui renforce les liens de la
connaissance réciproque et de la collaboration mutuelle entre les peuples. Nul n’est autorisé à
prétendre s’approprier les richesses et les ressources naturelles d’un autre peuple : celui-ci a
toujours le droit de les défendre par tous les moyens possibles.

Art. 5 – La famille humaine a, mutuellement et solidairement, la responsabilité de réaliser


partout la justice et l’équité, tout comme de respecter les droits fondamentaux de l’homme.
Les hommes ont donc le droit – individuellement ou en groupe – d’utiliser tous les moyens
qui leur assurent la garantie et la protection de ces mêmes droits.

Art. 6 – Tous les hommes sont égaux devant la loi quant aux droits et aux obligations, sans
aucune discrimination entre eux.

Art. 7 – La permanence de l’espèce humaine dans l’existence est un devoir sacré qui incombe
à l’humanité tout entière. Nul n’est donc autorisé à recourir à quelque moyen que ce soit qui
s’opposerait, d’une manière définitive, au mariage, à la fécondité ou aux naissances ;
l’avortement et l’infanticide sont absolument prohibés.

Art. 8 – La famille est l’unité naturelle et la pierre d’angle de la société. L’Etat et la société
sont donc dans l’obligation d’en prendre soin et de la protéger.

Art. 9 – Tout homme et toute femme, dès lors qu’ils ont atteint l’âge du mariage, ont le droit
de se marier et de fonder un foyer. La jouissance de ce droit ne saurait leur être interdite par

80
des mesures restrictives qui seraient fondées sur la race, la couleur ou la nationalité. Le
mariage n’est parfaitement conclu que par le consentement des deux parties, mais on tiendra
compte du fait que la foi en Dieu est une condition requise (chez la partenaire) pour le
mariage du Musulman et que l’unité de religion (avec le partenaire) est la condition requise
pour le mariage de la musulmane. Chacun des conjoints jouit, en pleine indépendance, de sa
responsabilité personnelle quant à la gestion des biens dont il dispose.

Art. 10 – Tout homme a le droit de se voir assurer par l’Etat ou la société les soins de santé,
l’aide sociale, la garantie de sa sécurité et l’usage légitime de tous les services publics, dans la
limite des possibilités existantes, ainsi que l’accomplissement aisé de toutes ses entreprises
d’homme libre et digne, et l’aide nécessaire pour fonder une famille. La mère et l’enfant ont
droit à des soins particuliers. Tous les enfants, qu’ils soient légitimes ou illégitimes, ont le
droit de bénéficier de la même protection des services sociaux.

Art. 11 – L’enfant a le droit à la garde (hadanah) et à l’éducation (tarbiyah). La mère est la


femme la plus digne de lui assurer la garde, tant pendant la durée du mariage qu’après sa
rupture, dans la mesure où cela ne saurait nuire à l’enfant. Le père est l’homme le plus digne
de lui assurer son éducation.

Art. 12 – L’enseignement est à la fois un droit et une obligation. L’Etat ou la société se


doivent d’en garantir les voies et les moyens, ainsi que la diversification en fonction même de
l’intérêt commun de la société. L’homme est en droit d’avoir accès à la connaissance des
réalités de l’univers et de la mettre au service de l’humanité et de son bien-être.
L’enseignement est gratuit, de même qu’il est aussi obligatoire, au moins pendant la première
étape de la vie humaine.

Art. 13 – Les divers relais de l’éducation qu’il s’agisse de la famille, de l’école, de


l’information ou du milieu social, ont l’obligation de viser à une éducation morale et physique
de l’être humain qui soit équilibrée et adaptée, de manière à développer sa personnalité, à
renforcer la conscience qu’il a de ses droits et ses obligations – les respecter et les défendre –
et à promouvoir enfin la paix et la collaboration mutuelle entre les peuples.

Art. 14 – Le travail est à la fois un droit et une obligation : l’Etat ou la société se doivent d’en
garantir l’exercice à toute personne qui en est capable. Tout homme a le droit d’y exprimer

81
son libre choix, de manière à travailler en même temps pour le bien commun de la société. Le
travailleur a droit à toutes les garanties requises, ainsi qu’à percevoir un salaire proportionnel
et juste, sans que nul retard n’y soit jamais apporté.

Art. 15 – Chaque peuple a le droit absolu de décider pleinement du régime qui est le sien,
comme aussi de choisir et de contrôler ceux qui le gouvernent. Tout homme a le droit de
participer à la gestion des affaires publiques de son pays, directement ou indirectement, tout
comme il a le droit d’y assumer les fonctions publiques, conformément aux conditions
d’aptitude requises, et cela en application même des conditions prévues en la matière.

Art. 16 – Le rattachement de tout être humain à son père et à sa nation est un droit que
personne ne saurait dénier ou abandonner.

Art. 17 – Tout homme a le droit d’avoir une nationalité : l’origine en est la naissance ou
l’allégeance à l’Etat. Nul n’est autorisé, de manière abusive, à priver un homme quelconque
de sa nationalité.

Art. 18 – Tout homme a le droit de se réfugier en un autre pays pour fuir la persécution. Le
pays où il se réfugie a le devoir de lui accorder le droit d’asile jusqu’à ce qu’il le fasse enfin
parvenir là où il sera finalement en sécurité. Ne saurait bénéficier d’un tel droit quelconque a
commis un crime pour lequel l’obligation d’extradition existe.

Art. 19 – Tout homme a le droit de se déplacer librement et de choisir de plein gré le lieu de
sa résidence, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays où il vit, sans porter atteinte pour
autant aux règlements qui en organisent l’usage en chaque pays.

Art. 20 – Personne n’est jamais autorisé à abandonner, totalement ou partiellement, son droit à
la vie, à la liberté, à la dignité de son comportement et à l’équilibre physique et moral de sa
personnalité, tout comme personne n’est autorisé à exploiter un être humain quelconque, ou à
le réduire en servitude ou en esclavage.

Art. 21 – Tout être humain a le droit, dès lors qu’il existe à l’état de fœtus et où qu’il existe,
de voir respecter sa personnalité juridique quant à sa capacité d’être sujet de droits et
d’obligations.

82
Art. 22 – Tout homme a le droit de s’approprier des biens par les moyens reconnus légitimes
– individuellement ou en association avec d’autres – tout comme il lui appartient de bénéficier
des droits de la propriété, dans la mesure où nul dommage ne vient affecter les intérêts des
autres personnes ou ceux de la société. Nul n’est autorisé à exproprier quelqu’un, sauf pour
motif d’intérêt public et contre une juste compensation.

Art. 23 – Tout homme un droit d’usage vis-à-vis de la production scientifique, culturelle,


technique ou artistique. Toute personne qui participe à cette production a le droit de voir
protégés par la loi les intérêts moraux et matériels qui en découlent pour elle.

Art. 24 – La société a un droit limité et reconnu sur la propriété des individus, qu’elle exerce
en fonction de l’intérêt général.

Art. 25 – Tous les hommes ont le droit de se voir garantir l’exercice d’une justice équitable :
tous sont égaux devant la justice.

Art. 26 – Nul n’est autorisé à arrêter un humain quelconque, à limiter sa liberté, à le


condamner à l’exil ou à tout autre châtiment, sans preuve juridiquement établie. Nul n’est
autorisé à le soumettre à la torture ou à des traitements cruels et inhumains qui vont à
l’encontre de la dignité humaine.

Art. 27 – Tout accusé est innocent tant qu’on n’a pas fait preuve de sa culpabilité par un juste
procès qui lui assure toutes les garanties d’une légitime défense. Le doute tourne toujours à
son avantage.

Art. 28 – Le droit de tout être humain à ce que personne ne s’immisce indûment dans les
affaires de sa vie privée – maison, famille, biens, relations sociales – est à préserver en toute
circonstance : il s’ensuit qu’on doit le protéger par tous les moyens de défense prévus par la
Loi religieuse.

Art. 29 – Tout homme a le droit de penser, d’écouter et de voir comme il le veut : il bénéficie
du droit d’opinion, d’expression et de religion. Ce droit embrasse aussi l’emploi de tous les
moyens qui garantissent l’exercice de cette liberté et la suppression de tous les obstacles qui

83
s’y opposent. Toutefois le musulman a l’obligation personnelle de demeurer fidèle à l’Islam
dès lors qu’il y a adhéré en toute liberté.

Art. 30 – L’Etat et la société garantissent à tout homme, après sa mort, le caractère inviolable
de sa dépouille mortelle et de sa sépulture, l’exécution de ses dernières volontés
testamentaires et le respect de sa réputation.

Art. 31 – Tous les droits et toutes les obligations qui sont proclamés en la présente
Déclaration se voient limités par le principe qu’on ne saurait, par là, causer du tort à autrui,
directement ou en retour (d’un premier tort causé par lui).

84
ANNEXE E

Projet de Déclaration sur les droits de l’Homme


(1981)
Louange à Dieu ! Prière et paix sur son Prophète !

Les Etats membres de l’Organisation de la Conférence Islamique,

Croyant en Dieu, Seigneur de l’univers, créateur de toute chose, donateur de tous les
bienfaits ; Dieu qui a créé l’homme à son image, lui ayant donné comme devoir de le peupler,
de le mettre en valeur et d’être garant et fidèle aux obligations divines, lui permettant de
disposer de tout ce qu’il a créé dans les cieux comme sur la terre ;

Reconnaissant le message de Mahomet (sur lui la prière et la paix de Dieu) envoyé par le
Tout-Puissant pour révéler aux hommes le message éternel de la vérité et de la sagesse
divines, sauver le monde, affranchir les gens assujettis, détruire les idoles et les tyrans,
annoncer l’égalité entre tous les êtres humains (le plus digne d’estime parmi eux est le plus
pieux), ainsi que pour annuler les distinctions de race, de couleur ou de classe et tout ce qui
sème la discorde ou alimente la haine entre les gens que Dieu a créés d’un seul être ;

Dans l’esprit de l’unicité, idée majeure de l’Islam qui a appelé l’humanité entière à n’adorer
que Dieu, à ne point lui associer et à se créer des dieux ; ainsi, cette religion a-t-elle établi la
base réelle de la liberté et de la dignité des êtres humains et a-t-elle annoncé
l’affranchissement de l’homme de l’asservissement de l’homme ;

En vue de réaliser les enseignements spécifiques de la shari’ah islamique éternelle qui appelle
à sauvegarder la foi, la vie, la raison, l’honneur, les biens, la descendance, qui a le mérite
d’être universelle, médiane et modérée dans toutes ses positions et ses dispositions, en
unissant le spirituel et le matériel, en faisant fraterniser le rationnel et le sentimental, en
joignant l’idéalisme au réalisme, en équilibrant les droits et les devoirs, en harmonisant la
liberté de l’individu avec l’intérêt de la communauté et en établissant un traitement équitable
entre les parties opposées sans tyrannie ni préjudice ;

85
Réaffirmant le rôle culturel et historique de la Nation islamique, que Dieu a fait une nation
médiane, la rendant ainsi qualifiée à témoigner devant les hommes et à les diriger dans le
sentier droit ; laquelle Nation a légué à l’humanité une civilisation mondiale équilibrée, liant
la terre au ciel et l’ici-bas à l’au-delà, joignant la science à la foi, laquelle Nation est qualifiée
aujourd’hui pour guider l’humanité perplexe entre les courants et les idéologies compétitifs et
pour proposer les solutions islamiques aptes à résoudre les problèmes anachroniques de la
civilisation matérielle ;

En vue d’accomplir les efforts déployés par l’humanité pour faire valoir les droits de l’homme
dans les temps modernes, notamment la proclamation et les conventions adoptées par
l’Assemblée générale des Nations Unies, aux fins de protéger l’homme contre les forces
brutales et d’affirmer sa liberté et ses droits dans la vie ;

Conscients que l’humanité, qui atteint un grand degré de progrès dans le domaine de la
science matérielle, a besoin d’un appui religieux à sa civilisation et d’un auto-frein qui
protège ses droits ;

Croyant que les droits et les libertés dans l’Islam font partie de la religion des musulmans et
que personne n’est en droit de les entraver totalement ou partiellement, de les violer ou de les
ignorer, parce qu’ils sont des dispositions divines à suivre ; lesquels droits et libertés nous
sont parvenus par le dernier livre révélé ainsi que par l’envoyé de Dieu pour accomplir les
précédents messages révélés ; que leur protection est un acte d’adoration, que toute agression
contre eux est déniées par la religion, et que tout homme en est responsable, la Nation en étant
responsable par association ;

Proclament ce qui suit :

Art. 1 – L’humanité dans tous les pays constitue une seule famille unie par son adoration au
Tout-Puissant et sa reconnaissance d’Adam comme père de tous les êtres humains ; tous les
gens sont donc égaux dans la dignité humaine, dans l’accomplissement des devoirs et des
responsabilités, sans condition de race, de couleur, de langue, de région, de sexe, de croyance,
d’appartenance politique, de situation sociale ou d’autres considérations ; l’individu le plus
méritoire auprès de Dieu est le plus pieux.

86
Art. 2 – a) Tout individu a droit à la vie ; les individus, les communautés et les Etats se
doivent de protéger ce droit contre toute agression.
b) La continuité de l’existence humaine, jusqu’à ce que Dieu en décide autrement, est un
devoir sacré ; nul n’a le droit d’empêcher les mariages, la fécondité ou les naissances de façon
continue ; il est également interdit de pratiquer l’avortement sans nécessité médicale.

Art. 3 – La famille est l’élément de base dans la construction de la société ; le mariage est le
fondement de sa constitution.
a) A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race,
la couleur ou la nationalité, ont le droit de se marier.
b) La société et l’Etat doivent lever tout obstacle devant le mariage et faciliter celui-ci
par tous les moyens.
c) Le mariage ne peut être contracté qu’avec le consentement des futurs époux ; le
divorce se fait selon les dispositions qui le régissent.

Art. 4 – La femme est la sœur de l’homme, égale à lui sur le plan humain ; ses droits sont
équivalents à ses devoirs ; l’homme doit avoir le dernier mot et être le chef de la famille,
tandis que la femme conserve sa personnalité civile, ainsi que ses biens financiers, son nom
patronyme et ses liens de famille.

Art. 5 – Dès sa naissance, chaque enfant a des droits à faire valoir sur ses parents, la société et
l’Etat, en ce qui concerne sa garde, son éducation et sa prise en charge sur le double plan
moral et financier. La maternité doit être protégée en lui accordant un soin spécial. Le père a
droit à choisir l’éducation de son enfant, à condition de sauvegarder l’intérêt de l’enfant ainsi
que son avenir, à la lumière des valeurs morales et des dispositions de la shari’ah.

Art. 6 – L’appartenance de l’individu à son père et à ses parents est un droit incontestable et
incessible.

Art. 7 – Tout individu a le droit d’avoir une nationalité. Nul ne peut être privé de sa
nationalité.

Art. 8 – Tout individu a droit à voir reconnaître sa personnalité légitime, sur le plan de son
habilité à assumer des responsabilités et d’en charger autrui.

87
Art. 9 – a) Tout individu a droit à la liberté d’opinion et à la liberté d’expression dans les
limites des principes et valeurs en vigueur et par tout moyen légitime
b) Tout individu a droit à appeler pour le bien, à ordonner le juste et empêcher le mal ; il peut
participer avec d’autres individus ou groupes à l’exercice de ce droit ; l’Etat et la société
doivent l’y aider et lui assurer la protection nécessaire.

Art. 10 – L’éducation est un droit et un devoir dont l’Etat ou la société doivent assurer les
moyens et les voies, garantir la diversité, de façon à assurer l’intérêt de la religion, permettant
à l’individu de connaître la religion de Dieu, les réalisations de l’univers pour l’intérêt et le
bien de l’humanité. L’enseignement doit être gratuit, dans les premiers cycles au moins.

Art. 11 – Les divers organes d’éducation et d’orientation, à savoir la famille, l’école,


l’université, les moyens d’information et autres, doivent viser une éducation intégrale et
équilibrée pour préparer l’individu à la vie d’ici-bas et à celle de l’au-delà. Cette éducation
doit assurer le plein épanouissement de la personnalité de l’individu, le renforcement de sa foi
en Dieu, le respect et la défense de ses droits et de ses devoirs.

Art. 12 – Tout individu a le droit à la liberté des rites en suivant sa spontanéité divine ; il n’est
pas permis d’exercer n’importe quelle sorte de contrainte ou de pression contre lui pour se
convertir à une autre religion ou pour devenir athée ; il n’est également pas permis de profiter
de sa pauvreté, de sa faiblesse ou de son ignorance pour le convertir à une autre religion ; le
musulman qui a été guidé à l’Islam ne doit pas se convertir à une autre religion.

Art. 13 – L’individu est né libre ; pas de servitude sauf à Dieu le Tout-Puissant ; nul n’a le
droit de l’humilier, de l’opprimer ou de l’exploiter.

Art. 14 – Tout individu a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur


comme à l’extérieur de son pays, en respectant les modalités qui régissent ce domaine dans un
pays. Devant la persécution, tout individu a le droit de chercher asile dans tout autre pays. Le
pays qui lui accorde asile doit le garder jusqu’à ce qu’il puisse retrouver un lieu sûr.

Art. 15 – Le travail est un droit que l’Etat ou la société doit assurer aux individus aptes. Tout
individu a droit au libre choix de son travail, dans le cadre de son intérêt et de celui de la
société. Le travailleur a droit à toutes les garanties relatives à l’immunité contre les dangers. Il

88
n’est pas permis de le surcharger, de l’exploiter ou de lui faire du mal. Il doit jouir des congés,
des indemnités et des promotions. Il doit percevoir sans retard un salaire suffisant et équitable
en contrepartie de son travail. Il doit être loyal et, en cas de différend entre les travailleurs et
les patrons, l’Etat doit intervenir pour rendre la justice et faire régner le droit sans parti pris.

Art. 16 – Tout individu a droit au commerce légitime ; il ne doit pas monopoliser, tromper ou
porter préjudice au consommateur.

Art. 17- Tout individu, aussi bien seul qu’en collectivité, a droit à la propriété, dans le respect
des intérêts d’autrui et de la société ; l’expropriation est interdite, sauf dans l’intérêt public et
moyennant une indemnisation équitable.

Art. 18 – Tout individu a le droit de bénéficier des avantages de la production scientifique,


littéraire, technique ou technologique. Tout individu ayant contribué à cette production a droit
à la protection de ses intérêts moraux et matériels découlant de cette production. Celle-ci ne
doit pas être contraire aux préceptes de la shari’ah, aux valeurs ou à la morale.

Art. 19 – a) La société ou l’Etat doivent assurer à tout individu le droit aux soins médicaux et
sociaux. Ils doivent le faire bénéficier de toutes les aides publiques, dans les limites des
ressources disponibles. Ils doivent l’aider à se libérer de la peur et à vivre en sûreté, aussi bien
pour sa personne que pour sa famille, son honneur et ses biens.
b) Tout individu a droit à une vie digne, qui lui asses besoins ainsi que ceux dont il a la
charge. Ces besoins englobent la nourriture, les vêtements, le logement, l’éducation, les soins
médicaux, ainsi que tous les besoins essentiels qui correspondent à sa situation. L’Etat doit
assurer à l’individu se trouvant en état d’incapacité ce dont il a besoin, de ses propres
ressources et en raison du droit exigible par les pauvres sur les biens des riches.

Art. 20 – Tout individu a droit à l’indépendance dans les affaires de sa vie privée : son
domicile, sa famille, ses biens et ses relations. Il n’est pas permis de l’espionner ou de porter
atteinte à sa réputation. Elle doit être protégée contre toute intervention arbitraire.

Art. 21 – Tout individu a le droit de participer au choix de ses gouvernants, de les contrôler,
de les juger et de les instruire conformément aux ordres du Tout-Puissant. Tout individu a le

89
droit de participer à la gestion des affaires publiques de son pays, soit directement soit
indirectement. Il a le droit d’occuper les postes publics selon les conditions en vigueur.

Art. 22 – a) Les individus sont égaux devant la loi ; le chef de l’Etat et l’individu sont ainsi
égaux devant la loi ;
b) Le droit de recourir à la justice est assuré à tous les individus ;
c) La responsabilité est, dans son fondement, individuelle. Pas de crime et pas de peine sans
dispositions légales ou sans une règle établies à ce sujet.

Art. 23 – Nul ne peut arrêter un individu, restreindre sa liberté, l’exiler ou lui infliger une
peine, sans impératif légitime. Nul ne peut l’exposer à la torture physique ou morale ou à tout
autre traitement humiliant, brutal ou contraire à la dignité humaine. Il n’est pas permis de
promulguer des lois exceptionnelles qui permettent aux autorités exécutives de recourir à de
tels traitements.

Art. 24 – Tout individu est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, à la
suite d’un jugement équitable, lui assurant toutes les garanties nécessaires à sa défense. Le
doute est interprété dans l’intérêt de l’accusé.

Art. 25 – Dans le cas de guerre, il n’est pas permis de tuer les femmes, les enfants et les
vieillards parmi ceux qui ne participent pas à la guerre. Il n’est également pas permis de
couper les arbres ou de détruire les bâtiments civils de l’ennemi. Le blessé a droit à la
nourriture et à l’asile. Le corps du mort doit être sauvegardé.

Art. 26 – Tout individu doit être sauvegardé après sa mort : l’Etat ou la société se doivent de
le protéger, d’enterrer son corps, d’exécuter ses recommandations, conformément aux
dispositions de la religion, et de sauvegarder sa renommée.

Art. 27 – Aucun des droits et libertés prévus dans ce document ne doit nuire ni porter
préjudice lors de son exercice. Ils sont soumis aux dispositions de la shari’ah islamique ainsi
qu’aux objectifs de celle-ci.

90
Art. 28 – La shari’ah islamique, dans ses sources essentielles et accréditées, est la seule
référence pour expliquer ou éclaircir tout article de ce document en cas de différend dans
l’interprétation ; la seule référence est celle des experts en la matière.

Source : ALAOUI Rachid Ben El Hassan, L’Organisation de la conférence islamique. Etude


d’une organisation internationale spécifique, thèse Bordeaux IV, 2001, pp. 462-464 et pp.
465-467.

91
ANNEXE F
Déclaration de Dacca sur les droits de l’homme en
Islam (1983)

Les Etats membres de l'Organisation de la Conférence islamique,

Affirmant leur foi en Dieu, Seigneur des Mondes, Créateur de l'Univers, Source de tous les
dons, Qui a créé l'homme dans le meilleur des moules, l'a élevé à une place d'honneur, en a
fait Son homme de confiance dans le monde pour qu'il l'améliore; lui a confié des tâches et
mis à Sa disposition tout ce qui est sur la terre et dans les cieux;

Affirment leur foi en le message du Prophète, SALLA'LLAHU ALEYHI WA SALLAM,


envoyé par le Dieu Tout-Puissant pour tracer la voie et révéler la Religion, symbole de la
Miséricorde divine pour émanciper l'opprimé, proclamer l'égalité des hommes, la seule
supériorité reconnue étant celle de la piété, et abolir la discrimination et la haine du coeur des
hommes que Dieu a dotés de la même âme;

Partagent la même foi en l'unicité de Dieu, ceci étant l'essence même de l'Islam qui enjoint à
tous les hommes de n'adorer que Dieu et de ne lui assigner aucun partenaire, qui a jeté les
fondations réelles de la liberté de l'homme et de sa dignité, et proclamé son émancipation de
l'assujettissement à un autre homme;

Honorent les injonctions de l'immuable Charria islamique qui appelle à la protection de la


religion de l'homme, de son âme, de son esprit, de son honneur et de sa descendance;
universelle dans son application, caractérisée par la modération de ses principes et de ses
dispositions, qui allie l'esprit à la matière, assure un équilibre entre l'émotivité, l'idéalisme
avec la réalité, garantit la justice aux adversaires, sans pour autant susciter répression ou
frustration;

Réaffirment le rôle culturel et historique de la Oumma islamique que Dieu a privilégiée en en


faisant "la meilleure Oumma", qui a donné à l'Univers une civilisation équilibrée qui est une
synthèse de l'infini et du temporel, fusionne dans le même creuset science et foi pour réaliser
les aspirations de cette Oumma, guider l'humanité qui vit dans la confusion, tiraillée par des
croyances et des idéologies incompatibles; fournir des solutions à tous les maux chroniques de
cette civilisation matérialiste, et contribuer aux efforts déployés par l'humanité pour affirmer
les droits de l'homme et le protéger contre l'exploitation et la persécution, et lui assurer la
liberté et le droit de vivre dans la dignité, conformément à la Charria islamique;

Convaincus que les libertés et droits fondamentaux, conformément à la Charria, sont parties
intégrantes de l'Islam, que nul n'a le droit d'abolir ces libertés et droits, soit partiellement ou
entièrement, ni de les violer ou de les ignorer, car il s'agit d'injonctions divines, énoncées dans
Ses Livres Révélés, transmises par le Dernier de Ses Prophètes, qui a révélé les dernières
injonctions. L'obédience à ces injonctions est un acte de foi dont la négligence ou la violation

92
est un péché, et pour lesquelles la Oumma entière est responsable, individuellement et
collectivement;

Convaincus que l'Humanité constitue une seule et même famille dont les membres se
retrouvent dans leur soumission à Dieu et, étant la descendance d'Adam, tous les hommes
partagent la même dignité et les mêmes responsabilités et droits fondamentaux, sans
distinction aucune de race, de couleur, de langue, de religion, de sexe, d'opinion politique, de
statut social ou de toute autre considération;

Que tous les hommes sont les serviteurs de Dieu et que ceux qui lui sont les plus chers sont
ceux qui sont au service de leurs frères, la seule supériorité reconnue étant celle de la piété;

Ces principes ci-dessus seront connus sous le nom de la Déclaration de Dacca sur les
Droits de l'Homme en Islam.

Source : http://www.aidh.org/Biblio/Txt_Arabe/inst_org-decla83.htm

93
ANNEXE G
RESOLUTION No. 49/19-P
SUR LA DECLARATION DU CAIRE DES
DROITS DE L'HOMME EN ISLAM
La dix-neuvième Conférence islamique des ministres des Affaires étrangères, (session de la
paix, de l'interdépendance et du développement), réunie au Caire, République Arabe d'Egypte,
du 9 au 14 Muharram 1411 H (31 juillet -5 août 1990)

Consciente de la place de l'homme dans I'Islam en tant que représentant de Dieu sur terre;

Reconnaissant l'importance qu’il y a à émettre un document portant sur les droits de l'homme
en Islam et auquel les Etats Membres se référeront dans tous les domaines de la vie
quotidienne;

Ayant pris connaissance du processus de mise en forme du projet de document, ainsi que du
rapport pertinent présenté par le Secrétaire général à ce sujet,

Ayant pris connaissance du rapport émanant du comité d'experts juridiques réunis à Téhéran
du 26 au 28 décembre 1989,

APPROUVE la publication d'une "Déclaration du Caire sur les droits de l'homme en Islam"
destinée à servir de référence aux Etats Membres dans le domaine des droits de l'Homme.

DECLARATION DU CAIRE SUR LE DROT DE L'HOMME EN ISLAM

Les Etats membres de l'Organisation de la Conférence Islamique,

Réaffirmant le rôle civilisateur et historique de la Oummah islamique, dont Dieu a fait la


meilleure Communauté; qui a légué à l'humanité une civilisation universelle et équilibrée,
conciliant la vie ici-bas et l'Au-delà, la Science et la Foi; une communauté dont on attend
aujourd'hui qu'elle éclaire la voie de l'humanité, tiraillée entre tant de courants de pensées et
d'idéologies antagonistes, et apporte des solutions aux problèmes chroniques de la civilisation
matérialiste;

Soucieux de contribuer aux efforts déployés par l'humanité pour faire valoir les Droits de
l'Homme dans le but de le protéger contre l'exploitation et la persécution, et d'affirmer sa
1iberté et son droit à une vie digne, conforme à la Charia;

Conscients que l'Humanité, qui a réalisé d'immenses progrès sur le plan matériel, éprouve et
éprouvera le besoin pressant d'une profonde conviction religieuse pour soutenir sa civilisation,
et d'une barrière pour protéger ses droits;

Convaincus que, dans l'Islam, les droits fondamentaux et les libertés publiques font partie
intégrante de la Foi islamique, et que nul n'a, par principe, le droit de les entraver, totalement

94
ou partiellement, de les violer ou de les ignorer, car ces droits sont des commandements
divins exécutoires, que Dieu a dictés dans Ses Livres révélés et qui constituent l'objet du
message dont il a investi le dernier de Ses Prophètes en vue de parachever les messages
célestes, de telle sorte que l'observance de ces commandements soit un signe de dévotion; leur
négation, ou violation constitue un acte condamnable au regard de la religion; et que tout
homme en soit responsable individuellement, et la communauté collectivement;

Se fondant sur ce qui précède, déclarent ce qui suit :

ARTICLE PREMIER:

a)-Tous les êtres humains constituent une même famille dont les membres sont unis par leur
soumission à Dieu et leur appartenance à la postérité d'Adam. Tous les hommes, sans
distinction de race, de couleur, de langue, de religion, de sexe, d'appartenance politique, de
situation sociale ou de tout autre considération, sont égaux en dignité, en devoir et en
responsabilité. La vraie foi, qui permet à l'homme de s'accomplir, est la garantie de la
consolidation de cette dignité.

b)-Les hommes sont tous sujets de Dieu, le plus digne de Sa bénédiction étant celui qui se
rend le plus utile à son prochain. Nul n'a de mérite sur un autre que par la piété et la bonne
action.

ARTICLE DEUX:

a)-La vie est un don de Dieu, garanti à tout homme. Les individus, les sociétés et les Etats
doivent protéger ce droit contre toute atteinte. Il est défendu d'ôter la vie sans motif légitime.

b)-Le recours des moyens conduisant à l'extermination de l'espère humaine est prohibé.

c)-La préservation de la continuité de l'espèce humaine jusqu'au terme qui lui est fixé par
Dieu est un devoir sacré.

d)-L'intégrité du corps humain est garantie; celui-ci ne saurait être l'objet d'agression ou
d'atteinte sans motif légitime. L'Etat est garant du respect de cette inviolabilité.

ARTICLE TROIS :

a)-Il est interdit, en cas de recours à la force ou de conflits armés, de tuer les personnes qui ne
participent pas aux combats, tels les vieillards, les femmes et les enfants. Le blessé et le
malade ont le droit d'être soignés; le prisonnier d'être nourri, hébergé et habillé. Il est défendu
de mutiler les morts. L'échange de prisonniers, ainsi que la réunion des familles séparées par
les hostilités constituent une obligation.

b)-L'abattage des arbres, la destruction des cultures ou du cheptel, et la démolition des


bâtiments et des installations civiles de l'ennemi par bombardement, dynamitage ou tout autre
moyen, sont interdit.

95
ARTICLE QUATRE :

Tout homme a droit à ce que sa dignité et son honneur soient sauvegardés de son vivant et
après sa mort. L'Etat et la société se doivent de protéger sa dépouille mortelle et le lieu de son
inhumation.

ARTICLE CINQ :

a)-La famille est le fondement de l'édification de la société. Elle est basée sur le mariage. Les
hommes et les femmes ont le droit de se marier. Aucune entrave relevant de la race, de la
couleur ou de la nationalité ne doit les empêcher de jouir de ce droit.

b)-La société et l'Etat ont le devoir d'éliminer les obstacles au mariage, de le faciliter, de
protéger la famille et de l'entourer de l'attention requise.

ARTICLE SIX :

a)-La femme est l'égale de l'homme au plan de la dignité humaine. Elle a autant de droits que
de devoirs. Elle jouit de sa personnalité civile et de l'autonomie financière, ainsi que du droit
de conserver son prénom et son patronyme.

b)-La charge d'entretenir la famille et la responsabilité de veiller sur elle incombent au mari.

1ARTICLE SEPT :

a)-Tout enfant a, au regard de ses parents, de la société et de l'Etat, le droit d'être élevé,
éduquer, et protégé sur les plans matériel, moral et sanitaire. La mère et le fœtus doivent
également être protégés et faire l'objet d'une attention particulière.

b)-Les parents et les tuteurs légaux ont le droit de choisir le type d'éducation qu'ils veulent
donner leurs enfants, tout en ayant l'obligation de tenir compte des intérêts et de l'avenir de
leurs progénitures, conformément aux valeurs morales et aux dispositions de la Charia.

c)-Conformément aux dispositions de la Charia, les parents ont des droits sur leurs enfants;
les proches ont des droits sur les leurs.

ARTICLE HUIT:

Tout homme jouit de la capacité légale conformément à la Charia, avec toutes les obligations
et les responsabilités qui en découlent. Si il devient totalement ou partiellement incapable, son
tuteur se substitue à lui.

ARTICLE NEUF :

a)-La quête du savoir est une obligation. L'enseignement est un devoir qui incombe à la
société et à l'Etat. Ceux-ci sont tenus d'en assurer les voies et moyens et d'en garantir la
diversité dans l'intérêt de la société et de façon à permettre à l'homme de connaître la religion
islamique et de découvrir les réalités de l'univers, en vue de les mettre au service de
l'Humanité

96
b)-Tout homme a droit à une éducation cohérente et équilibrée, au plan religieux et de la
connaissance de la matière, qui doit lui être assurée par les diverses structures d'éducation et
d'orientation , tels que la famille, l'école, l'université, les médias, etc. Cette éducation doit
développer la personnalité de l'homme, consolider sa foi en Dieu, cultiver en lui le sens des
droits et des devoirs et lui apprendre à les respecter et à les défendre.

ARTICLE DIX :

L'Islam est la religion de l'innéité. Aucune forme de contrainte ne doit être exercée sur
l'homme pour l'obliger à renoncer à sa religion pour une autre ou pour l'athéisme ; il est
également défendu d'exploiter à cette fin sa pauvreté ou son ignorance.

ARTICLE ONZE :

a)-L'Homme naît libre. Nul n'a le droit de l'asservir, de l'humilier, de l'opprimer, ou de


l'exploiter. Il n'est de servitude qu'à l'égard de Dieu.

b)-La colonisation, sous toutes ses formes, est strictement prohibée en tant qu'une des pires
formes d'asservissement. Les peuples qui en sont victimes ont le droit absolu de s'en
affranchir et de rétablir leur autodétermination. Tous les Etats et peuples ont le devoir de les
soutenir dans leur lutte pour l'élimination de toutes les formes de colonisation et d'occupation.
Tous les peuples ont le droit de conserver leur identité propre et de disposer de leurs richesses
et de leurs ressources naturelles.

ARTICLE DOUZE :

Tout Homme a droit, dans le cadre de la Charia, à la liberté de circuler et de choisir son lieu
de résidence à l'intérieur ou à l'extérieur de son pays. S'il est persécuté, il a le droit de se
réfugier dans un autre pays. Le pays d'accueil se doit de lui accorder asile et d'assurer sa
sécurité, sauf si son exil est motivé par un crime qu'il aurait commis en infraction aux
dispositions de la Charia.

ARTICLE TREIZE :

Le travail est un droit garanti par l'Etat et la société à tous ceux qui y sont aptes. Tout individu
a la liberté de choisir le travail qui lui convient et qui lui permet d'assurer son intérêt et celui
de la société. Le travailleur a droit à la sécurité et à la protection, ainsi qu'à toutes les autres
garanties sociales. Il n'est pas permis de le charger d'une tâche qui soit au-dessus de ses
capacités, de l'y contraindre, de l'exploiter ou de lui causer un quelconque préjudice.

Le travailleur, sans distinction de sexe, a droit à une rémunération juste et sans retard de son
labeur. Il a droit également aux congés, indemnités et promotions qu'il mérite. Il est tenu
d'être loyal et soigneux dans son travail. En cas de litige entre employés et employeurs, l'Etat
doit intervenir pour le trancher, consacrer le bon droit et rendre justice de manière impartiale.

ARTICLE QUATORZE :

Tout Homme a le droit de rechercher le gain licite, sans spéculation ni fraude, ni préjudice
pour lui-même et pour les autres; l'usure (Riba) est expressément prohibée.

97
ARTICLE QUINZE:

a)-Tout Homme a droit à la propriété acquise par des moyens licites. Il lui est permis de jouir
des droits de propriété, à condition de ne porter préjudice ni à lui-même, ni à autrui, ou à la
société. L'expropriation n'est permise que pour une cause d'utilité publique et moyennant une
indemnisation immédiate et juste.

b)-La confiscation ou la saisie des avoirs est prohibée, sauf disposition légale.

ARTICLE SEIZE

Tout Homme a le droit de jouir du fruit de toute oeuvre scientifique, littéraire, artistique ou
technique dont il est l'auteur. Il a également droit à la protection des intérêts moraux et
matériels attachés à cette oeuvre, sous réserve que celle-ci ne soit pas contraire aux préceptes
de la Loi islamique.

ARTICLE DIX-SEPT :

a)-Tout Homme a le droit de vivre dans un environnement sain, à l'abri de toute corruption et
de toute dépravation, de lui permettre de s'épanouir. Il appartient à la société et à l'Etat de lui
garantir ce droit.

b)-L'Etat et la société doivent garantir à chaque Homme la protection sanitaire et sociale, ainsi
que tous les services publics dont il a besoin, dans la limite des possibilités existantes.

c) L'Etat garantit à tout Homme le droit à une vie décente lui permettant de subvenir à ses
besoins et ceux des personnes à sa charge, pour l'alimentation, l'habillement, le logement,
l'enseignement, les soins médicaux et tous autres besoins fondamentaux.

ARTICLE DIX-HUIT :

a)-Tout homme a le droit de vivre protégé dans son existence, sa religion, sa famille, son
honneur et ses biens.

b)-Tout homme a droit à l'indépendance dans la conduite de sa vie privée, dans son domicile,
parmi les siens, dans ses relations avec autrui et dans la gestion de ses biens. Il n' est pas
permis de l'espionner, de le surveiller ou de nuire à sa réputation. Tout homme doit être
protégé contre toute intervention arbitraire.

c)-Le domicile est inviolable en toutes circonstances. Nul ne peut y pénétrer sans
l'autorisation de ses occupants ou de manière illégale. Il n'est pas permis de le détruire, de le
confisquer ou d'en expulser les occupants.

ARTICLE DIX-NEUF :

a)-Tous les individus, gouvernants et gouvernés, sont égaux devant la loi.

b)-Le droit de recours à la justice est garanti pour tous.

c)-La responsabilité est, par essence, personnelle.

98
d)-Il ne peut y avoir ni délit, ni peine, en l'absence de dispositions prévues par la Charia.

e)-Le prévenu est présumé innocent tant que sa culpabilité n'est pas établie par un procès
équitable lui assurant toutes les garanties pour sa défense.

ARTICLE VINGT :

Il n'est pas permis, sans motif légal, d'arrêter une personne, de restreindre sa liberté, de
l'exiler ou de la sanctionner. Il n'est pas permis non plus, de lui faire subir une torture
physique ou morale ou une quelconque autre forme de traitement humiliant, cruel ou contraire
à la dignité humaine. Il n'est pas permis de soumettre quiconque à des expériences médicales
ou scientifiques, sauf avec son consentement et à condition de ne pas mettre en péril sa santé
ou sa vie. Il n'est pas permis d'établir des lois d'exception donnant une telle possibilité aux
autorités exécutives.

ARTICLE VINGT-ET-UN :

Il est formellement interdit de prendre une personne en otage sous quelque forme, et pour
quelque objectif que ce soit.

ARTICLE VINGT-DEUX :

a)-Tout Homme a le droit d'exprimer librement son opinion pourvu qu'elle ne soit pas en
contradiction avec les principes de la Charia.

b)-Tout Homme a le droit d'ordonner le bien et de proscrire le mal, conformément aux


préceptes de la Charia.

c)-L'information est un impératif vital pour la société. Il est prohibé de l'utiliser ou de


l'exploiter pour porter atteinte au Sacré et à la dignité des prophètes ou à des fins pouvant
nuire aux valeurs morales et susceptibles d'exposer la société à la désunion, à la désintégration
ou à l'affaiblissement de la foi.

d)-Il est interdit d'inciter à la haine ethnique ou sectaire ou de se livrer à un quelconque acte
de nature à inciter à la discrimination raciale, sous toutes ses formes.

ARTICLE VINGT-TROIS :

a)-Gouverner est une mission de confiance, il est absolument interdit de l'exercer avec abus et
arbitraire, afin de garantir les droits fondamentaux de la personne humaine.

b)-Tout homme a le droit de participer directement ou indirectement à la gestion des affaires


publiques de son pays. Il a également le droit d'assumer des fonctions publiques
conformément aux dispositions de la Charia.

ARTICLE VINGT-QUATRE :

Tous les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration sont soumis aux dispositions
de la Charia.

99
ARTICLE VINGT-CINQ :

La Charia est l'unique référence pour l'explication ou l'interprétation de l'un quelconque des
articles contenus dans la présente Déclaration.

Le Caire, le 14 Muharram 1411 H


5 Août 1990

Source : http://www.oic-oci.org/french/conf/fm/19/19%20icfm-pol-fr.htm#RESOLUTION
No. 49/19-P

100
ANNEXE H

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104
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106
107
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110
BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages généraux

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