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Economie

Même froissée, la friperie habille toujours


En dépit du regard de haut que certains jettent sur la friperie, elle a encore de beaux
jours devant elle.

Par Kadje Kamga

Le marché Mboppi, en plein centre de Douala, capitale économique du Cameroun. Il


est réputé être le plus grand marché d’Afrique centrale. Parmi les centaines de
comptoirs, on dénombre une longue file de boutiques/magasins de vente en gros de
friperie. Chaque jour, les opérateurs de ce secteur viennent acheter des ballots qui, à
bord de camions, prennent diverses directions : les autres villes du Cameroun,
comme les pays de la sous-région ; RCA, Gabon, Guinée Equatoriale et Congo.
D’après Gérard Philippe Kuissu, consultant en la matière, la friperie « est une activité
très florissante basée sur l’importation de vêtements, de chaussures, de rideaux, de
literies, de tapisserie de seconde main. »

Les différents acteurs

Le commerce de la friperie est une activité qui fait intervenir plusieurs acteurs.
Il y a d’abord l’exportateur, de qui vient la marchandise. Généralement de l’Europe
centrale, il est Belge ou Hollandais. Pour N.A., qui exerce dans la friperie au marché
Mboppi, « Ce sont les Arabes d’Europe qui rassemblent les vêtements et nous les
envoient. » Ils collectent donc les vêtements qui sont ensuite nettoyés, parfumés
avant conditionnement en ballots. GP Kuissu note avec amertume que « parfois, c’est
des articles volés dans les industries textiles, des articles présentant des défauts, des
fins de séries, ou qui ne peuvent être écoulés sur leur marché naturel. » Ce à quoi
N.A. répond : « Nous avons le premier, deuxième et le troisième choix…On ne peut
comparer un vêtement neuf avec un autre qui est usé… » A regarder de près, les
exportateurs doivent être nombreux, comme l’atteste cette annonce sur
internet : « Friperie, Afrique, Pays de l’Est – Attention des fripiers, revendeurs,
magasins, importateurs – Vente de vêtements d’occasion, chaussures, accessoires
(H/F/E)- Grand choix, plusieurs qualités, toutes quantités, disponible en balles, ou
sacs, ou par container de 20 à 40- En très bon état. » De telle annonces abondent
sur la toile, et qui témoignent du dynamisme dans la filière.

Le regard de l’Etat

L’Etat est le deuxième intervenant dans la chaîne de la friperie. Au départ, l’activité


avait été interdite. La contrebande aidant, le commerce a prospéré dans le maquis.
C’est finalement un arrêté du ministère de développement industriel et commercial
du 18 mars 1992 qui est venu légaliser l’importation et la vente de la friperie au
Cameroun. Astreignant cependant « les importateurs à payer à l’administration
douanière un droit d’entrée correspondant à 65 % du prix d’achat des vêtements à
l’étranger, la taxe phytosanitaire d’un montant de 50 F cfa, de frais de
débarquement d’une valeur de 1386 F cfa et une taxe municipale qui s’élève à 180 F
cfa par tonne de friperie importée. » Par ailleurs, l’Etat perçoit des dividendes selon
le poids de l’opérateur : 40 000 F cfa par an du grossiste qui les verse au service des
contributions directes de sa localité, 8000 F cfa par trimestre à titre d’impôt
libératoire, et 300 F cfa de taxe d’emplacement pour les commerçants ambulants.
Aux yeux de l’Etat, la friperie est une activité commerciale comme les autres. M.
Ename, Chef du Service Commerce à la Délégation du Commerce pour le Littoral
(Douala) confirme : « Il n’y a pas de réglementation précise. La friperie entre dans
le domaine du commerce général, c’est de l’informel, et ce dernier ne nécessite pas
une disposition précise. Tout ce que l’on demande c’est le respect de ce qu’exige la loi
sur le commerce. » Plus simplement dit, tout ce que la loi demande c’est que
l’opérateur se constitue « en entreprise agrée au commerce extérieur par le
Ministère du Commerce. » L’autorisation d’exercer dans la friperie est venue comme
une mesure pour lutter contre la récession économique, le pouvoir d’achat des
camerounais ayant chuté avec les baisses de salaires du début des années 90. Comme
le soutient M. Ename : « Avec la crise économique, l’Etat a fermé les yeux sur la
friperie, qui est à la portée de tout le monde. » Dans cet exercice, il faut rappeler que
la douane rapporte plus de 2 milliards dans les caisses de l’Etat.

Le noyau principal

Les importateurs du secteur de la friperie, selon M. Kuissu, sont des commerçants qui
«font de gros bénéfices sur l’irresponsabilité des pouvoirs publics et du faible
pouvoir d’achat des populations. » Quoiqu’il en soit, c’est parfois de hautes
personnalités que l’ont ne soupçonnent pas, qui confient la gestion du business aux
proches parents. Les fripiers ont formé un regroupement qui tient lieu de Syndicat. Si
le manque de solidarité entre eux est à l’origine de cette malheureuse situation, ce
rassemblement sert néanmoins à quelque chose. « Ce n’est pas un syndicat en tant
que tel. C’est un regroupement de patrons qui interviennent quand la marchandise
a des difficultés avec la douane », explique N.A. de Mboppi, avant de lâcher : « les
fripiers ne sont pas solidaires ! » Et les Chinois dans tout cela ? Il y a deux ans, ils
constituaient une véritable menace pour le secteur. Aujourd’hui, « les clients savent
faire le choix. » Pour N.A., il n’y a pas lieu de craindre pour le textile camerounais,
« Nous mettons la barre à la portée de tous, et les ménages nous font confiance. » A
voir le monde qui grouille au marché Mboppi au « secteur friperie », on peut dire que
les affaires marchent. Des millions se brassent tous les jours dans la filière :
dépendant du choix (1er, 2e, ou 3e choix), et du type de vêtements (hommes, femmes
enfants, culottes, tee-shirts…), le ballot peut varier entre 50 000 et 1 million de F cfa,
ou plus.
Et le roi de la friperie ? N.A. pense qu’il existe mais qu’il ne sera pas facile de le
connaître, « C’est difficile de savoir qui il est, parce qu’aucun fripier ne viendra vous
dévoiler son chiffre d’affaires. »
Gérard Philippe Kuissu pour sa part pense que la friperie est un ennemi d’Etat qu’il
faut simplement éradiquer, à cause de son : « caractère anti-patriotique, négatif et
impropre au développement d’un pays comme le nôtre et même tout le continent. »
Il semble parler pour lui-même, parce que même froissée, la friperie continue
d’habiller d’Afrique.
KK

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