Anda di halaman 1dari 36

Retour à l’île charmant

Combien peut changer dans un clignement des yeux ? Juste il y a


onze mois quand j’ai dernièrement atterri à l’aérogare Taoyuan à
Taipei monsieur Chen Sui-bien vivait au palais présidentiel et
maintenant le meneur déchu se trouve écroué dans une taule et
inculpé de la corruption, la fourberie, le détournement des fonds
étatiques, le népotisme rampant et la conspiration contre la
République. Il a comparu plusieurs fois au cours d’assises mais
l’investigation en méandre du procureur persiste et il risque encore
d’écoper une sentence de vie. La déchéance de confiance et
d’autres abus de pouvoir ne sont pas exceptionnels mais est plutôt
une maille dans l’étoffe de la vie publique. On ne fait que bâiller
aux délits et crimes si communs à ceux y étirés comme vautours à
la carogne et qui s’enhardissent par l’indifférence supposée.
Surement d’autres au pouvoir avaient faits pire sans encourir le
moindre opprobre. Ce qui choque et titille le peuple n’est pas
l’envergure des fraudes ni sa chute de la grâce après huit années
de l’incurie, l’incompétence et les bourdes sérielles car les gens
sont longtemps dubitatifs et cyniques vis-à-vis à l’acabit avide de
leurs doyens politiques soit du Parti Nationaliste (Kouo-Min-Tang)
soit de son rival le Parti démocratique progressif mais plutôt la
veulerie et la grossièreté du pillage au trésor d’état. Extorquer des
magasins pour obtenir certains coupons d’achats, demander aux
bijoutiers des cadeaux en diamant et platine et empocher des bons
de caisse ? Sûrement ces trucs rebattus sont trop au-dessous de la
dignité due à l’office auquel la vénalité habituelle doit être
déguisée avec plus d’aplomb. Sûrement on peut observer du
décorum de vol, pantoufler et pistonner ses gosses et copains,
extraire des ristournes aux contrats étatiques ? Ces jour ce martyre
se professée a la cause de l’indépendance taïwanaise ne cesse pas
de chanter comme un serin afin d’impliquer et blâme sa mariée
confinée au fauteuil roulant, ses enfants, ses proches en quenouille
et voire son ancien mentor et président en retraite Lee Teng-Hui ;
et encore cet avocat scélérat (une tautologie ?) ne divulgue
pourtant où le butin coté à centaine de millions d’euros. On entend
qu’une portion du pognon soit arrimée dans ces comptes étrangers
et déjà une banque suisse a dépistée certaines transactions
soupçonneuses afin de s’en absoudre et plaire au nouveau
gouvernement de Ma Ying-k’eou. Ces détails sordides néanmoins
fournissent aux gens adonnés des feuilletons une kyrielle
inépuisable de ragots et d’amusement loin supérieurs à ceux des
guignols parmi les vedettes de télévision. Esther même s’esclaffe
aux cabrioles surtout de madame Chen qui feint la maladie et se
pâme afin d’éviter ces entrevues policières, disant comment cette
dame censément frêle et estropiée d’une attaque par l’ennemie de
son mari dans les années 1970 pourrait en fait déambuler et son
handicap n’est qu’une ruse pour provoquer la sympathie. C’est
ainsi comment Chen vient de s’exposer aux gémonies moins
vraiment pour le crime de pillage et plus pour celui de l’hypocrisie
car il s’était assumé le rôle et avait embrassé le mandat du
nettoyeur de la corruption accablante qui avait affligée le Taiwan.
Notre groupe comprend 32 personnes, quatre garçons qui sont
cousins germains, une paire de jumeaux, James et Antony, âgés de
dix ans ; un bébé ; deux poupées, filles de cinq ans et de sept ans,

1
la puînée est Stéphanie et l’autre Nathalie, une métisse portugaise
chinoise, mignonne en nattes, joufflue et toujours enjouée. Nous
joindre est Alex, guide de l’agence qui fout l’itinéraire, gère les
logistiques et nous introduit son partenaire taïwanais Yuan Wei
dont le métier était principal d’un lycée mais est maintenant en
pension prématurée (licenciement ?) et est docte à l’histoire, la
culture et les politiques de sa patrie, quelqu’un ardent à la cause
de sécession et pourtant qui nous abordent sans broncher malgré
notre indifférence collective apparente, sinon antipathie, vers le but
auquel il ne fatigue pas d’épouser. Le professeur qui avait trouvé
dur de se recaser avant d’avoir décroché ce boulot réalise bientôt
que nous, les nomades, ne commandons assez bien du mandarin
érudit (et il en parle avec un accent lourdement et brusquement
min nan) et que notre connaissance ne s’épand pas à l’usage banal
et quotidien à l’instar de palabre avec les sujets plus sublimes et
abstraits presque nous perdus autant à son chagrin. Pis encore est
sa tendance de ce cuistre de faire ces allusions obscures classiques
et littéraires qui nous sommes gênés d’avouer notre ignorance et
contre lesquelles certains de nous se rebiffent et narguent, même
badinent, si seulement du à notre embarras à la veulerie de notre
éducation. Personne ne s’y radine pour entendre quiconque
prêcheur car la visée d’une telle virée lors des vacances de noël est
invariablement de fuir la cocotte-minute qui fait fichus ceux de
Hongkong et de s’égayer dans la compagnie des mouflets culottés
avec la puissance de rajeunir et pourtant énerver leurs parents.
Chanceux sont les enfants qui n’ont pas besoin de rebiquer et
payer l’attention polie aux paroles d’un intellectuel manqué ni de
masquer leur envie de jouer sans apologie ni excuse. Ils sont
affranchis de s’acoquiner sans aucun restreint social. Qu’est cette
belle étape qui ne semble que s’écourter trop tôt ? Je suis certain
que cet ennui s’y renouvelle avec les jeunes versus les vieux eux-
mêmes pas certains soit persuader leurs mioches d’entendre et
d’apprendre ou soit les laisser gambader.
La première escale inévitable est le Musée national de faste
où les trésors recelés du continent sont étalés en grandes vitrines,
en somme les objets traçants l’évolution d’une civilisation qui
perdure 45 ou plus de siècles qui assortit la grandeur chez les
pharaons. Durant notre visite dernière une portion du lieu était
fermée pour l’aménagement qui est actuellement complet. Les
Chinois s’enorgueillissent de leur lignage ancien. Au perron et
encore aux seuils du Musée érigé en imitation à l’échelle réduite
(mais encore énorme) de la Citée pourpre impériale à Pékin, le plus
vaste enclos d’artifice puisque l’aube de temps, le professeur, en
brandissant un microphone portable, nous sermonne encore de la
gloire chinoise à laquelle son Taiwan est réservoir et hériter qui
cependant lui justifie le divorce de l’île au pays digne de son
hommage. On ne comprend pas son train de logique qui peine à
concilier ces paradoxes. Trapu et camard cinquantenaire lui
donnant un air de bravache, qui est à dire d’une apparence typique
aux descendants qui y migrèrent de la province de Fujian, Yuan
semble justement fier du patrimoine si riche et pourtant honteux
d’avoir subi l’humiliation et voire l’asservissement sous la férule
des Nationalistes boutés du continent et acculés à l’exil sur l’autre
rivage du détroit en 1949. Il décrie à la brutalité indéniable des
purges et surtout à comment l’armée inepte dans la lutte contre les

2
communistes eut recruté, bien, enlevé son puis adolescent futur
beau-père pour la protection de la citadelle, le bastion et la dernier
redoute des forces encore fidèles au généralissime Tchang Kaï-
Chek, un « pantin » des marchands et des Américains. Il nous
déplore en voix de stentor l’oppression étatique et la brimade,
même l’humiliation, quotidienne endurée des natifs aux mains du
régime transplanté de la Chine. En nous ébruitant ses opinions si
librement, il ne peut que faillir de convaincre une audience toujours
circonspecte à quiconque trop féru de se lui épancher. Je tourne à
ma femme pour glousser et gloser comment cette armée damnée,
cette racaille masquée dans la guise militaire qui mon grand-père
eut appui avec les fonds dressés au Canada ne réussit jamais à
gagner chaque bataille sauf celle contre ses civils, un outil de
suppression des émeutes urbaines mais ne pas de conquête ni
d’autodéfense, différente à celle des communistes déjà s’aguerris
dans les montagnes et déserts durant la résistance patriotique
contre les Japonais. Cette force fut aussi une avenue pour soudoyer
et recueillir des pots-de-vin avec les généraux piteux qui
paressèrent, s’engraissèrent et se mélangèrent des patriciens aux
clubs plutôt que bouffer de popotes aux réfectoires côte à côte aux
bidasses quand son adversaire prôna comment emporter on dut
devenir « le poisson nageant dans la mer du peuple ». Quant aux
enfants facilement tannés et expressifs de leur ennui, y compris ma
gamine, ils préfèrent s’engager en jeux que grever leurs cerveaux
avec paroles sur items de legs. Voire moi, je suis ahuri au manque
de coordination de l’étalage chez musée qui ne suit guère à chaque
ordre chronologique. Esther aime seulement ces pièces en
porcelaine – aiguières, figurines de faïence et bien sûr celles du
motif de dragon – car elle barbotait en poterie avant son mariage.
Elle m’avait emmené à son studio et m’avait monté l’art à glaiser
seulement de voir que j’avais esquivé le sujet et raté le moindre
intérêt dans l’artisanat et le bricolage puisque ce qui m’intrigue
n’est aucune vaisselle mais juste sa teneur. Suis-je au cœur un
béotien sous ce vernis plutôt maigre de sophistication cérébrale
quoique je puisse feindre le périodique intérêt et maîtriser le
baragouin nécessaire ?
Franklin, mon beau frère, s’évertue d’infuser ses gosses avec
un sens de culture, héritage et art quand la paire n’en est pas
imbue. Encore il persiste en les forçant d’endurer les frimas en
Chine central, à Xi’an, pour observer les fouilles archéologiques au
tumulus du premier empereur, plus renommées desquelles sont les
soldats de terre cuite déployés en formation militaire afin d’y
garder (en vain) pour l’éternité. On doit se souvenir d’un proverbe
qui dit « un pâtre peut guider son bétail à l’auge mais il ne peut pas
le faire boire. » Nous sommes affrontés avec le même problème
malgré la prétention de la fille de Franklin, Didi, à démontrer
l’appréciation des narrations souvent sibyllines et des sujets
obscurs pour plaire à ses parents, et cela est vraiment la pléthore
de distractions sociales et médiatiques grâce à la technologie
informatique. Enfilant des jeans étriqués et des chemises fines
d’une penderie chique auprès de Vogue, narguant ces coutumes
démodées, Yo-yo toute branchée ne nous amène aucun espoir dans
cet égard et ne va jamais quelque part sans son I-touche d’Apple
qui lui fournit l’accès d’Internet et escamote ces efforts de
l’empreindre des influences estimées d’être critiques à sa

3
formation actuelle. Ces essaies faits par les enseignants, eux-
mêmes ambivalents à la vraie valeur des classiques, de lui seriner
l’importance en connaissance du passé éloigné n’aboutissent pas
au but ciblé et qui ne s’avèrent pas qu’une source de crispation et
les plaintes. Esther croit qu’il faille m’incomber ce fardeau et
pourtant comment est-il possible d’épater une adolescente de
chaque chose macabre, d’une cabale ourdie pour saisir le règne en
antiquité, de ces luttes titaniques d’ambition ou quelque
événement qui advint dans un contexte entièrement étranger aux
épreuves contemporaines et semblent maintenant creux, mort. Un
jour ils, les enfants, pourraient entamer et voire s’acharner à leur
découverte à leur volonté mais cela est un voyage de soi laissé
meilleur au futur. Maintenant on ne discerne pas de lueur dans les
prunelles de ceux dont les yeux sont tirés aux étincelles et vétilles
comme ces pies. Nous sommes, la famille Fong, au moins à Taipei
où la température demeure tiède, douce, et le vent n’apporte pas
ces poussières et sables du désert Gobi essuyant le talus d’un
tertre sur lequel un tyran eut ordonné la construction de sa
sépulture la plus opulente pour être enfoui avec ses trésors,
concubines et servants, oh ces hères à sa vanité. « Ce qui s’agit,
cette histoire, et pourquoi on doit avoir le savoir de ces contes
inutiles ? » se rembrunit-elle, une fille égoïste qui pense que le
monde amorçait prendre la pertinence le 13, vendredi, novembre
1992, et qui n’escompte pas ces palabres contraires de son
« dada ».
Nous sommes soulagés d’y avoir sortis, un musée qui se
ressemble au mausolée manquant toute de la vibrance de ceux
nous avions visités à New York, Sydney et Melbourne. Je m’appelle
comment j’avais fui de la cohue effarante qui pullule toujours au
Louvre et à l’Orsay lors du voyage à Paris et au Muséum national à
Londres, sachant leurs œuvres sont accessibles dans les livres et
même aux disques et en ligne avec un accès d’aise et gratuit.
L’occasion ici n’est pas totalement perdue pour le beau temps me
permet de capter des images d’une pièce d’architecture
ridiculement grandiose viabilisée afin d’éprouver que le régime
Tchang d’escarpes, d’escrocs, de butineurs et de traîtres était
capable de gérer ces trophées en voies qu’il eut échoué de faire le
même du pays perdu aux communistes. On n’a pas de tort d’y voir
un ciboire géant qui tient ne pas juste des hosties mais aussi la fois
et le leurre d’un leader jamais réconcilié à son débâcle et ses
défaillances, quelqu’un insistant sur la reconstitution d’un
parlement vermoulé en exil où assis furent ces représentants des
provinces, eux-mêmes installés au Taiwan comme rouleaux,
sculptures et artefacts pillés et emballées en pailles et cageots
sous les nez et les canons de l’armée rouge à la veille de la
déroute. Le spectacle du triomphalisme inspire moins et attriste
plus ceux conscients de son triste et futile histoire. Cette farce
s’était miséricordieusement désemparée quand ces marionnettes
politiques clamsaient l’une après l’autre en rapide succession et
lorsque Lee Teng-Hui, le mentor de Chen et transfuge (traitre
disent d’autres) du Kouo-Min-Tang (KMT), avait aboli ce système
pour promouvoir le mouvement en incrément vers l’indépendance.
Je ne suis pas prôneur de chacune cause égarée et bientôt la
pénombre va poindre, une métaphore apte pour cette affaire qui
obnubila trop les générations du siècle dernier dont échos sont si

4
fanés et vagues, sinon totalement assourdis, aux oreilles des
jeunes comme Yo-yo. Suis-je parmi ceux peu tels attentifs quand je
suis déjà un d’une minorité courant dans le Toisanais, la langue
natale de mes aïeuls et moi-même ? Esther n’a pas tort de croire
que je devienne en chair dans la façon d’un article préservé dans le
musée, totalement impertinent à la présence.

L’édifice et testament à une aspiration ratée

Peu citadins osent de rêver que leur capitale rivalise Hongkong


comme centre financier, un prospect saugrenu s’ils persistent dans
leur prétention de s’avoir une nation soit comme la Chine en exil
soit comme un pays distinct. Les meneurs à Pékin ont stipulé en loi
déjà entérinée par leur congres d’écraser brusquement et
brutalement chaque essaie taïwanais en sécession claire. On ne
leur en doute cette résolution très populaire. Voire les Américains
ne soutiennent pas chaque quête envers l’indépendance de facto
qui risque de les tirer dans un bourbier militaire face-à-face aux
forces chinoises dotées des armes nucléaires, spatiales et
technologiques et ayant forgées-elles une alliance informelle avec
les Russes. Ces Etats-Unis qui ne peuvent pas dompter l’Irak et
l’Afghanistan manquent les moyens, fiscaux et musclés, et la
ténacité de contrer un pays dont voit Taiwan comme sa terre
sacrée. L’autre facteur crucial est que le complexe politique et
industrielle qui règne l’empire américain n’envie aucune grande
bataille et préfère une série de mineures campagnes pour enrichir
ces marchands de mort et avancer les carrières de certains
généraux dans leur emploie, sinon maintenant, puis après des
temps servis au Pentagone. Observer Taipei, on n’évite pas la
conclusion que cette ville, cependant raffinée avec ses librairies et
universités, galeries et boutiques, demeure provinciale malgré une
population métropolitaine de cinq millions qui se vante d’avoir un
taux de diplômes le plus élevé en Asie, un endroit qui ne déguise
guère sa convoitise de reconnaissance. Quelqu’un qui s’arrive
d’une place comme Tokyo, Shanghai, Singapour ou Hongkong
remarque d’emblée cette carence des buildings imposants qui
attestent à l’énergie et l’entreprenariat. Nulle part dans une société
si riche et moderne qu’il n’existe pas un centre de commerce en
pleine vigueur mais d’ici tout semble plutôt assoupi.
Ce sens d’inadéquation était vraiment le frai à l’idée de la Tour
101 chez district (arrondissement) Xinyi pimpant qui maintenant
surgit et surplombe Taipei à l’étendue de l’Eiffel sur Paris. Mais
initialement la notion avait engendrée un débat et un tollé avec
tracas exprimés quant aux hasards d’une zone sismiquement telle
active et telle vulnérable des ouragans les plus sévères ; et aux
esthétiques parce que le design était si frimeur. L’équipe
audacieuse d’architectes, C.Y. Lee et partenaires, ne s’en était pas
pliée dans sa conviction lorsqu’au début du nouveau siècle elle
avait commencé le projet visant d’atteindre une hauteur inouïe de
106 étages, cinq desquels sous la terre, ensemble avec un pinacle
qui en somme rapetissait tout dans son voisinage. Les investisseurs
plus audacieux et astucieux voulaient se prodiguer sur l’entreprise
avec l’espoir, l’espérance, que la tenure (et la folie) de Chen se
déroule sans nuire aux prospects de finance. Les experts lui
avaient décerné le prix d’Emporis en 2004 quand l’édifice s’était

5
ouverte et aujourd’hui la tour est le phare et point de repère
indiscutable de Taipei, quoique son statut comme le plus haut
building soit bientôt éclipsé par le Burdj Dubaï. Ce qui lui qui nous
appelle est qu’il reste un splendide rendez-vous puisque personne
ne rate d’y achopper. Quand on dit via téléphone, laissons-nous
rencontrer à 101, l’entrée de l’est, ou laissons-nous manger chaque
chose aux concours de restaurants, on est certain d’en succéder et
d’y bambocher. Plus surprenant pour Yo-yo et moi est de trébucher
sur un supermarché, the Market Place IGA, identique à ceux à
Vancouver et à Whistler, donc un goût de notre demeure, voila
l’hommage via une bribe de nostalgie. Quant à ma femme, elle
arpente l’endroit et compare les prix pour mesurer la cherté qui
s’avère moins exorbitante que celle à Hongkong. Satisfaite par
bravade est-elle que Taipei soit éventuellement vivable avec bonne
cuisine, les maraîchères qui aiment plus de ragot que de
commerce, l’abondance de magasins, épiceries et superettes,
chaque chose occidentale pourtant orientale, un mélange presque
parfait. C’est censé croire que Taipei demeure inferieur à Hongkong
dans les aires financières, créatives et commerciales, pourtant ces
villes sont jumelles en étant ethniquement chinoises mais
distinctes et moins polluées que celles en Chine continentale.
On n’oublie jamais que Taipei est une enclave fermement
fidele aux Nationalistes voire quand Chen était son maire rusé
avant son ascension présidentielle, une grimpe au pouvoir grâce à
la connivence de Lee. Ceci était vraiment manifeste aux élections
législatives conduites en janvier 2008 desquelles Esther et moi
avions observées qui avait pu tourner la marée contre le Parti
démocratique progressif dont la conséquence était le regain des
Nationalistes et la victoire présidentielle accablante de Ma en mars.
Il y avait un audible soupir de soulagement parmi la classe plus
raffinée en voyant le dénuement au cauchemar et aux embarras
d’huit années sous ce qu’elle appelle « le roquet » Chen et sa
racaille dont la base était le sud encore agrarien avec ces gens qui
tracent leur patrimoine à la province de Fujian, parleurs du dialecte
Min nan incompréhensible à ceux de mandarin et cantonais. En
militant contre la clique méridionale, ceux plus éduqués et lotis,
ayant vu se volatiliser une portion de leurs fortunes (certains
ruinés dus à la gourance de Chen), voulaient exercer à nouveau
leur contrôle une fois usurpé. Ce camouflet livré aux PDP et cette
assertion des KMT constituaient une ressaisie d’une influence qui
avait moulée la société taïwanaise plus plaisante à ma femme,
snobinarde dans sa croyance à la suprématie des citadins et la
sagacité de leurs voies. L’aura culturelle, artistique et littéraire lui
justifie la gouvernance des Nationalistes et pas moins est l’air
glamoureux et cultivé, l’aversion aux laïus et histrioniques, du beau
président Ma, diplômé en jurisprudence de Harvard qui sait
réfléchir au futur et compromettre des tactiques sans trahir ses
principes, un gentilhomme confucéen dans un mot. Je jauge sa
modération et stance d’être un cas de frilosité mais puis Esther est
convaincue qu’il soit meilleur en caution qu’en drame et hâte. D’ici
l’on n’hésite pas arborer ses politiques sur la manche qui
épouvante, sinon écœure, ceux, comme nous, Chinois canadiens
toujours plus réticents en étalant nos vues politiques en frayeur de
controverse.

6
Hier soir, après la virée au Musée, on est allé heureusement au
bazar si seulement de s’affranchir de pourtant l’autre marche aux
magasins pour acheter des pacotilles à ristourne et profiter aux
guides de guelte qui était en fait le premier arrêt du tour à la
chalandise. C’était agréable de se secouer de la compagnie du
professeur, d’explorer cette facette dynamique de la vie
quotidienne à Taipei, de rôder et causer et chicaner les vendeurs
en mandarin plutôt cru et cocasse. Il nous fallait, Esther, Yo-yo et
moi, nous faufiler en travers une mer de piétons pour accéder des
étals et échoppes flanquant ces ruelles du dédale effarant et
excitant de trafic. L’entrain de la masse agit comme une pile
géante électrique dans le milieu des néons, enseignes et placards
si criants en surchargeant ceux qui s’y attiraient. La verve
contagieuse s’apparentait à celle chez stade lors d’un match sportif
avec les gradins vibrants aux branles, hurlements, huées et
chansons des spectateurs. On ne stoppe plus de se lamenter à la
dégringolade boursière et la crise au chômage ou l’oisiveté
(nominalement embauché et peu payé) mais ici rien d’une disette
ne semblait évident. L’achat des soldes et l’immersion dans la
gaieté sont formes de thérapie, n’est-ce pas ? Ce serait pleutre de
moi à penser que les pertes ne soient pas pénibles mais puis la
pénurie n’empêche pas ces gens de s’en y réjouir dès le coucher
pour amortir les écueils économiques et hisser leur esprit du
miasme. Le comportement qui dit qu’on ne s’en fiche, cette
récession, est-il fataliste ou réaliste ? Esther m’a déclaré, étonnée-
elle, comment les colporteurs au Taiwan ne trichent pas en lui
donnant le change précis quoiqu’elle ne puisse compter bien la
monnaie locale, un bon signe. Mauvais cependant, dégoûtants
voire, était une flopée de victuailles rances et affreuses comme le
tofu fermenté et l’aspic de sang porcin sans le moindre
camouflage. (Les Français en contraste ont au moins le sens de
leur fournir des nommes élégants pour déguiser leur bouffe tel foie
gras, escargot, truffe ou camembert.) Elle a graillé en saveur ces
délicatesses qui m’étaient nauséabondes afin de me taquiner et
narguer mon appétit doux, bourgeois. Quant à notre dîneur, Yo-yo
et moi, nous avons mangé du bifteck et pâtes, comment
conventionnel, qui nous ont assouvis. Je confesse qu’étant guindé
je ressens mal à l’aise côté-à-côté à ceux jeunes qui s’attifent aux
nippes moulantes ridicules et bien sûr c’étaient les gens grouillants
au marché de nuit, moi, en effroi de voir ma gosse s’en accoutrer
et avec un fort souhait de brider son excès d’habillement
adolescent. « Mon parage est mon affaire unique » est toujours son
refrain à ma lamentation qu’elle semble pratiquement débraillée en
frusques et dépeignée aussi comme quelque clocharde ; et il était
clair d’hier comment ce code à la mode est universel. En tenue
féminine comme en alimentation, je penche lourdement et
fatidiquement sur le conservatisme, sinon catholicisme, et rien ne
me fait y bouger. Mais puis ici je suis, piège d’entre l’incartade
culinaire et l’escapade coutière de mon épouse et ma gamine,
frustré.
Notre éclaireur habile (même maquereau si requis) ou plutôt
rusé au Japon Merlin était expert en encensant les dames à
l’étendue de les nimber avec charme et sagacité lorsque rien n’en
prouvaient leur existence afin d’accroître ses ventes. Alex
cependant n’aime pas bonimenter (il est presque invisible en étant

7
moins versé sur Taiwan) et Yuan qui est méprisant de toute la
bamboula ne rien nous demande que notre attention à ses
racontars épiques mais encore nous sommes requis de nous
soumettre aux bimbeloteries, le même hier et le même aujourd’hui.
Personne ne demande autant aux guides, le premier est paresseux
et le second volubile en arguant mordicus des points d’arcane.
L’acte de parader aux magasins est exactement que de
somnambulisme. Quoique l’on ne braille guère, on est juste d’être
malade et las du ramassis de babioles qui ma femme s’en est
préparée de fourrer une valise vide y apportée expressivement
pour ce but. Encore à toute convenance, il fait le plaisir au groupe
d’éluder Yuan qui le peine quand le dit professeur ne pause pas de
fulminer, vitupérer et calomnier les politiques et politiciens au
Taiwan dont magouilles et forfaitures ne touchent pas ceux de
Hongkong. Ces harangues sont longues mais anodines a cause de
leur répétition, un cas de déjà entendu. C’est certainement crispant
pour lui, un intellectuel dissident qui une fois s’est appartenu à la
coulisse du pouvoir sous Chen. Le plus simple fait est que l’ethnie
chinoise, soit Singapourienne, soit Hongkongaise, dehors de l’orbite
Pékin-Taipei et la dispute nationaliste versus communiste ne
voudrait pas s’en empêtrer car les causes profondément encadrées
en histoire et idéologie du 20ième siècle ne signifie rien aux jeunes
dont vision et attitude englobent l’entièreté de la planète. Yo-yo
s’inquiète plus des gaz produits à l’effet de serre, la fonte des
calottes glaciales, l’extinction des espèces, les calamités naturelles
provoquées par la spoliation de l’environ. Dans ce sens elle et ses
consœurs ont raison parce que le défi qui les affronte, les ahurit et
les effare est d’une ampleur pourtant plus énorme que ces
querelles de l’autre ère longtemps écoulée pour il implique le sort
de l’humanité. Les modernistes qui s’identifient à la majorité
aiment débarrasser leur milieu de ces questions épineuses de
souveraineté, de justesse abstraite et de rivalité. Je leur en
concours, cette renonciation au passé qui grève ceux d’un fardeau
sans valeur à l’existence actuelle et ses exigences, sachant le
chagrin qu’il cause aux mémoires de mon grand-père, Lloyd,
affalant-lui de la tendance ailleurs d’oublier. Ces jeunes ont le droit
et la raison de se détourner, sinon détaler, des problèmes qui
auparavant obsédaient leurs ancêtres afin de s’avancer avec leur
boussole et carte si seulement parce que les aînés leur avaient
légué une pagaille minable et impardonnable. Qui professe l’amour
à ses descendants peut tel se dévergonder à la gestion des
ressources du monde sans apparaître cagot et calleux ? On prie en
pénitence d’être expié de ces crimes a la merci des futures
générations s’il n’y aucune.
Nous allons ce matin, gris, frisquet et venteux, d’un hôtel, qui
se vante d’avoir installé un jacuzzi dans chaque chambre, à la
banlieue de Tanshui au centre-ville. Après l’hommage obligatoire à
101, avec les voyageurs déjà emmitouflés grelottants dans le
noroît déboulant du continent durant la nuit, le groupe s’égaille
pour fouiller ses points d’intérêt sans froisser Yuan et sans troubler
Alex. Ceci signifie pour Esther et moi une visite bise à la grande
librairie d’Eslite dont rangée de produits divers et insolites
(chandails de football italien, chopes d’étain, écharpes de soies
grèges, cuissards dignes de la Tour de France, toges et sarraus
plutôt théâtraux, café de Vietnam et une cantine souterraine), ne

8
pas seulement ces étagères lourdes de livres, nous avait étourdie.
Esther m’avait déjà instruit d’y emmener notre gamine pour la
mariner dans une atmosphère plutôt plus raffinée que chez
journaux et Internet où fleurissent la superficialité, la banalité. La
chaîne d’Eslite (fondée en 1989) n’a besoin de se claironner car elle
est une institution au Taiwan, un but qui découlait d’une décision
sociétale d’élever le standard éducatif du peuple prisant autant les
diplômes. Ceci campagne qui persiste est une tentative de braver
telles villes comme Singapour et Hongkong qui n’échouent pas de
se mésallier à la valeur de vraie formation pour agrandir le cerveau
versus la fausse pour engendrer degrés universitaires pratiques de
servir le business, alimenter « les ressources humaines », entraîner
des professionnels et recruter de personnelle gouvernementale.
L’anti-intellectualisme y vit mais ne pas à Taipei d’où l’on rencontre
une légion d’érudits formés outre-mer aux meilleures universités
et, aux pénates, aiment propager l’éducation pure et dispenser
d’avis sur chaque facette de la vie. Une fois dans la dictature du
généralissime la presse qui osa la défier fut bâillonnée et les
libéraux harcelés, traqués, arrêtés, tenaillés, expulsés,
emprisonnés, condamnés par contumace si déjà en exil,
assassinés. Or ces formes de persécution n’émoussèrent mais
aiguisèrent et affûtèrent l’envie d’épandre et promouvoir les
libertés, donc la formation démocratique. Ce procès aboutit à
l’universalité de formation avec la fin de la dynastie Tchang, elle-
même toujours en collusion avec la pègre de caïds et brutes
fascistes dans un système moins démocratique mais épousant
comment un leader doit être-lui un parangon de vertu. Yo-yo n’est
pas la moins impressionnée avec ces tomes et plus plutôt avec ces
items de solde, deux magasins d’ordinateur et d’accès à wifi pour
son gadget. Cependant tant qu’on lui martèle la puissance
rédemptrice d’apprentissage, l’essaie ne réussite jamais, encore à
l’instar du proverbe vis-à-vis à l’auge débordante et au bétel
refusant de s’en y abreuver. Mater l’instinct indocile prend plus de
temps et de maturité qu’en possède-t-elle, une jeune innocente
encore doucement bébête au cœur. Cela elle nous rechigne ne
prouve aucun manque de curiosité mais celui d’obéissance à la
phase lors d’adolescents s’insurgent contre des autorités et
exercent leur identité. J’étais rebiffé aux demandes parentales en
jeunesse, une rebuffade née d’une résistance aux forces d’ordre
qui cherchait de me brider, m’apprivoiser, moi puis effréné avec
mes élucubrations de grandeur encore enfantines. Ma gosse qui
dérive un peu et qui ne m’écoute plus ces jours est encore en train
de muer pour se munir de connaissance suffisante au haut niveau
et pourrait déclencher un trait suivi d’inquisiteur lors qu’elle se
mute à l’université. Eventuellement cette fille pourra penser ces
sujets maintenant mornes envoûtants, durcir son jugement
critique, affiner sa capacité intellectuelle, cribler l’édifiant de la
tripe, et se renseigner aux professeurs sur explications plus
complexes et nuancées plutôt que simplistes et caricaturiste.
L’allégresse fait irruption que les guides nous annoncent
notre escale prochaine, le hameau de K’eoufan au bout de la
province presque le port de Keelung, dont charmes sont certes
contés dans un film mélancolique, « La ville tragique » (avec beaux
acteurs et belles actrices) duquel Esther fait le panégyrique et
duquel je rate de le regarder, étant adverse au genre ringard. Mon

9
espoir est qu’elle ne clopine trop après d’avoir eue presque une
année de thérapie depuis ses boitements au Taiwan. Alex nous a
déjà informé qu’il resquille pour nous donner des arrêts dehors de
l’itinéraire stipulé puisque nous soient familiers avec des sites car
personne n’y est étrangère, cette île de Taiwan. Yuan étaie-lui cette
improvisation afin d’ajouter sans sourciller plus des sites afférents
à ses intérêts, maintenant comprenant l’artistique et le littéraire
car il a la tendance de nous réciter des poèmes et chanter des
rengaines chères aux paysans, aux rustres de son île, mais
inscrutables à ceux plus moulés dans la matrice de la Chine
continentale. Il est ardent de protéger et accentuer ces traditions
rurales qui risquant à l’effritement, une cause de restauration
enhardie par Chen et ses confrères pour avancer le nationalisme
taïwanais, un but dubitatif et manipulateur des griefs légitimes
contre le régime Tchang en déchirant les tissus sociaux et
ethniques de cette province, culminant outrancièrement dans un
massacre des civils en février 1947 avec un bilan qui chiffre à
dizaines de milles. C’était explicable que la nouvelle intendance
(2000-2008) voulait une lustration radicale pour purger les
influences imposées par le KMT mais heureusement la campagne
ne résulte pas à effacer toutes des traces d’une ère importante,
soit juste, soit injuste. (Encore certaines coutumes s’affaiblissent et
se flétrissent comme ces tristes fanes d’automne lors de saison
célèbre la culture pop et la technologie, lors de jeunes urbaines
n’aiment que rompre avec le passé et larguer ce qui semble
démodé, vieillot, gênant sans éloges extravagants ni apologies
forcées. Partout ceci est la même ritournelle, n’est-ce pas ?) Mais
encore cette excursion est infiniment préférable à l’autre visite de
quelconque temple pour voir des pèlerins se prosterner et
s’agenouiller à l’autel ou le reliquaire avec encens allumés et
murmures de supplication pour obtenir des faveurs célestielles
rarement livrées.
Parvenir au lieu éloigné à la lisière de la métropole n’est pas
un trajet facile, surtout dans l’orage, sur route tordue, labile, et, à
l’entrée raide au village, cicatricielle de frayées et bouchonnée – et
en besoin d’un bon éclairage car ici semble toujours misérable et
minable. (Ce coin maritime et montagneux de l’île ne voit pas de
soleil un jour sur dix. « Le paradis pleut en deuil et le cœur se brise
à la douleur, » rimaille-t-il, Yuan, hochant sa tête.) L’embouteillage
est tel terrible que rien ne bouge et les véhicules forment une
longue queue serpentine. Bien voici une portion de l’itinéraire
rédigé va s’ébouler due à la météo. On débarque finalement au
rendez-vous de 7-11, une chaîne de superettes à l’ubiquité,
seulement de se mettre aux foules pesantes en entassement et en
bousculade sous des rebords du toit pour gagner un peu de gîte de
la pluie et le vent, chaque personne apparaît désolée, esseulée,
mouillée comme une épave. Tout de ceci n’est pas juste chaotique
mais dangereux. On risque d’être fait borgne due à la profusion de
pébrocs ou pitonné sous cette messe de fâcheuse humanité réduite
au troupeau de bétail. La mairie ne dépêche pas de police pour
réglementer cet afflux ni assez du service d’éboueurs de nettoyer
ces déchets s’en y amoncelant. Etait-on en cherche des scènes du
film, on serait déçu puisque rien n’est visible sauf la grisaille et ces
allées bondées de visiteurs, étals, échoppes, troquets et gargotes.
Yo-yo grogne d’un estomac creux, disant comment elle n’a pas de

10
morceau depuis le départ de Taipei mais une miche de pain
partagée avec les trois de nous. C’est vrai que le petit-déjeuner à
l’hôtel n’a pas suffi de retenir la faim aux aboies et que ma gamine
devienne gourmande lors d’un voyage, elle qui ne s’habitue à
retarder, beaucoup moins à louper. Ce qui mitige la tristesse
profuse est l’arôme de cuisine fleurant des venelles aux pavés
ronds si seulement on pourrait avoir la patience d’attendre pour
une table partagée et le pouvoir de repousser la cohue. Quant à la
photographie, tout rate car on écoute mais ne mire pas de mer
dans la pluie et les embrumes engloutissant le paysage entier, une
déception mitigée cependant par la réalisation qu’on ne soit pas
seul d’être déçu. La misère a la pleine compagnie. L’alimentation
est bon marché et délicieuse, surtout la girolle grillée et enduite en
caramel ou miel, mais puis en faim chaque morceau est délectable.
Une fois en détresse, Yo-yo demeure maintenant muette et sourde,
ses railleries et plaintes en halte, pour déguster ces saveurs
jusqu’elle est totalement rassasie longue après que sa mama et
son dada sont repus car son appétit est plus énorme. Elle nous
demande pour plus de son partage et est satisfaite avec sa
gloutonnerie en riant. Seulement avec la satiation complète qu’elle
soit d’accord à flâner mais toujours sous les auvents. On peut
comprendre pourquoi l’équipe de film l’avait choisi pour son
tournage parce que tout semble si lugubre afin de portraiturer un
amour damné dans l’ère de carnage et répression autoritaire en
1947.
La trombe tourne en crachin lorsque le bus sort des montagnes
côtières qui attrapant la moiteur y conduite de la mer de Chine
méridionale lorsqu’on cesse d’y caboter et regagner l’autoroute.
Notre wagon fonce et est aspergé par une flotte de camions et
fourgons également, chacun féru d’échapper aux ravines mais
nous ne revenons à Taipei dont pâtés de bâtiments nous veillons
dans une distance. Nous nous contentons de voir fin à la bévue
d’un arrêt gaspillé et sommes convaincus (et encore nous nous
taisons poliment) que nos guides sachent comment ils ont
bousillés. On doit apprendre, compatir et témoigner à la réalité du
business de voyage en groupe. Cet itinéraire ne vise plus juste de
nous servir, les clients, mais aussi l’agence toujours obligée
d’apaiser des marchands à la chalandise dotés d’un contrat qui
nous requiert de franchir leurs seuils. Certains des visiteurs n’y
quittent jamais bredouilles si seulement pour les souvenirs. Notre
préalable visite quand nous étions seuls, juste ma femme et moi,
nous n’avions pas de choix que tâtonner et pourtant nous étions
plus heureux avec nos découvertes quand nous nous étions
paumés de temps en temps. Maintenant on n’a pas de peur à
l’égarement et pourtant on n’explore guère les merveilles et
surprises, bonnes ou mauvaises, du Taiwan. Je suis plus prêt
qu’Esther d’endurer l’incertitude, la bourde et l’irritation d’une
virée plus aventureuse, si désorganisée et impromptue, afin de
fouiller et trébucher sur ces accidents chanceux pour lesquels il y a
un mot anglais sans égal exact en français : la « serendipity ».

11
Trois heures et demie passent. On arrive dans la pénombre à
la frange de la ville, Taichung, mais on n’y entre pas et grimpe sur
dix kilomètres de chemin campagnard, sillonnant des rizières en
friche brève d’hiver avec mottes et chaumes, pour atteindre une
ancienne gare vieillotte rurale de train dans une zone peuplée de
l’ethnie hakka. Il fait encore frisquet et venteux au coin reculé et
désolé. Ces pistes ferroviaires (maintenant presque herbeuses avec
planches moussues suggérant la déréliction) sont pratiquement
abandonnées mais encore l’endroit retient sa valeur comme phare
de tourisme. Sur l’autre côté du rail, construit sous la gouvernance
japonaise en 1908, penchant sur terrasse, y situe un restaurant
élégant construit de planches foncées d’acajou sous une ligne de
lampions, un milieu romantique et pourtant incongru. Les feuilles
bruissent et ainsi nos dents à la froideur, la température
s’abaissante à dix degrés durant notre marche de deux kilomètres
sur une venelle, ayant débarqués du bus parqué à la marge du site.
Voire un clebs noir galeux et piteux frémit en se couchant près d’un
arbuste et d’une rangée de vélos sur béquilles, totalement
insouciant à ces visiteurs avec rien de lui offrir sauf cette stupide
roucoulade. Notre groupe pose pour les photos au guichet vide, les
pistes et l’obélisque qui fête l’inauguration d’un système
maintenant désuet après le lancement de l’équivalent taïwanais du
TGV dont caténaires sont un symbole de triomphe en transport. (Ce
système permet aussi à Taipei d’étendre ses tentacules et
d’écraser, bien au moins, éroder le dur régionalisme, la resistance
à la capitale.) Tout reste est cause de nostalgie qui aguiche aussi
ces fanas du vieux rail que les Japonais furent tels ardents de
construire pour prouver aux gens assujettis de leur prouesse du
génie civile. Les ténèbres sont presque absolues voire sous la faible
lumière du réverbère car ceci, le 21 décembre, est au solstice
d’hiver ou peut-être ne pas parce que le 2008 est année bissextile.
Esther a emballée notre gamine en écharpe faite d’une longue
chemise et je l’ai chaussée en chaussettes lorsque ses socquettes
étaient faites mouillées. La gosse se ressemble à la poupée si
mignonne malgré ayant atteinte 16 ans en mi-novembre.

12
Les seules d’y se réjouir sont les mineures, Nathalie et
Stéphanie, (peut-être Yo-yo) qui aiment encore la toupie, la
comptine et toujours, toujours, la glace que les adultes n’hésitent
pas leur gratifier – mais a une telle baisse de température ? La
chaleur aggrave notre faim. Nous nous leurrons de croire nos
guides que le dîneur hakka authentique soit une ripaille
incroyablement délectable, surtout nous avons concédés de payer
frais supplémentaires. On reconnaît cette cuisine qui à Hongkong
veut invariablement le poulet succulent rôti au sel et soupe au tofu,
légumes verts émincés et morceaux de poisson. Ce qui nous servit
cependant ne se ressemble guère à notre espérance. Chaque plat,
voire l’assiette, nous vient froid sauf ces boules de riz dont marmite
d’électrique est près au grill du charbon qui joue le rôle d’un
réchauffeur, ensemble engendrant l’effet d’un étuve et y attire les
enfants citadins fascinés aux braises jamais vues non plus dans
leurs villes modernes, un feu lent au-dessus ils tournent leurs
petites mains, un truc qui intrigue même notre Yo-yo. Je jeûne
exceptant le riz et des œufs brouillés, acceptant que je
m’assouvisse au marché nocturne qui est promis au retour à
Taichung. Le groupe ressent triché lorsqu’il y quitter, une gargote
construite de bambou et était une fois une baraque avant son
aménagement et conversion pour arnaquer les touristes. Mais puis,
sachant que cet itinéraire donc mauvaisement ourdi et pire exécuté
apparaisse de plus en plus brouillon, Alex va aussitôt aborder notre
grief et édulcorer l’amère humeur en nous offrant d’apologie et de
ne pas faire payer l’extra pour la tambouille nous présentée avec
un tel tralala. Je seul survole ces affiches et coupures de presse qui
fait explication pour l’attrait – un rail ayant enduré les affreux
déluges, sévères séismes et épiques cyclones (typhons) pour lier
cette région reculé au reste de l’île. Une telle persévérance ne
brave cependant le changement des temps et des avancements en
transport. Le trafic s’amenuisait de plus en plus ne pas du
seulement au TGV taïwanais mais aussi à la prospérité qui
permettait à la classe moyenne d’acheter ses voitures ou de
fréquenter le bus en donc creusant la demande du système dont
l’appel est strictement nostalgique.

13
Ma gamine me saisit le bras avec tendresse pour m’emprunter
la chaleur et l’assurance dans l’obscurité silencieuse et menaçante
avec Esther nous talonne comme toujours. Savoir qu’on soit
toujours aimé réchauffer sinon le corps, sûrement le cœur. Nous
hâtons nos pas et distendrons nos pas pour parvenir à notre wagon
afin d’échapper au centre de civilisation et de savourer ces
victuailles bizarres indéniablement plus délicieux à la bouffe chez
hakka (faux ?) qui a assené et lésé notre palais plus délicat.
Quelqu’un dans notre parti qui se professe d’être hakka récuse
avec indignation la revendication que le désastre cuit s’est
approché la vraie chose. « Trop aigre, trop graisseux, trop
détrempé, trop mesquin » gronde-t-il, grimaçant d’embarras. On ne
peut que concourir. Certains s’interrompent pour saluer un
colporteur et déguster ses pépins de citrouille vendus d’une large
claie. Cette gâterie est une délicatesse locale qui allège les plaintes
des estomacs, les escales desquels sont crachées et faites
jonchées partout. « Ceci est une habitude vile », Esther grogne a
laquelle vient la réponse de notre gosse, « mais tout est organique
et, dans la décomposition, peut fertiliser la terre. » L’embarras
possède aussi Alex qui nous a aiguisé notre appétit avec sa
description gonflée à la bombance du hameau. Yuan ne peut pas
s’empêcher de prendre l’occasion pour exalter l’héroïsme du hakka
d’avoir contrarié les efforts nationalistes de l’intégrer à la société
générale et enfouir sa culture. Il est politique tout du temps en
militant en faveur des opprimés dans la poigne du KMT méprisant,
en imputant chaque sorte de crime au régime écoulé avec une telle
rancune suraiguë jamais amoindrie après un tel longtemps.
S’engluer dans l’autre époque et ses calvaires est un triste malaise
lorsqu’on n’en change rien. Quant à moi, je ne désire rien qu’y
détaler sans encombre car j’affale d’humer une vague odeur d’une
sorte de gnole traditionnelle ou saké émise du chauffeur et une
lenteur plus prononcée de cigarette utilisée peut-être de masquer
l’autre. On doit être alerte, voire dément dans cette insistance, à la
sobriété durant cette saison festive – lorsque même les Chinois
fêtent le solstice hivernal. (Certains Chinois aiment aussi
s’abreuver de leur alcool aromatique distillé du riz mais peu se
grisent au poivrot, différents-eux des Japonais.) C’est meilleur
d’être sauf que désolé, oui ? Etant parent, ne lui requiert
qu’exprimer ses soucis et qu’ébaucher chaque sorte de scénario
effroyable car cela est la nature d’un amour le plus viscéral,
congénital, constant et absolu, un impératif biologique. Quant à
Esther, elle l’apitoie, le pilote, clairement ennuyé et manquant à
réveillonner aux siens. Marrante-elle, je pense, car lors d’elle à
maintes chances de montrer la moindre sympathie envers ses
bonnes plutôt que leur tancer à la moindre justification, elle leur
refuse cette mineure posture, pourquoi, pourquoi est-elle si
distinctement biaisée contre ces Philippines ? Je soupçonne le
racisme moult fois, surtout quand elle, chiche à l’égard d’elles et
en fière, m’accuse de les dorloter avec mes cadeaux contre
lesquels elle brait en disant comment ce sont trop généreux, un
lecteur portable de DVD et une montre japonaise ?

14
Certains parmi le groupe s’y vautrent dans le carrosse,
soudainement silencieux, voire maussades, ne faisant aucun effort
de répondre au laïus de Yuan, ardent-lui de nous raconter ces
charmes de cette région, un éclairage qui sied au nom d’une rue
dans ce voisinage. « Jin Ming » implique la clarté dans le sens
figuratif et littéral. Le wagon arrive à la destination illuminée de
néons et enseignes très criantes où grouillent foules en cherche
d’aubaines aux étals et achoppes – partout la scène de chalandise
reste le même, fringues, mercerie. Nous rejoignons l’affluence, moi
notifiant que les trottoirs semblent nettoyés et les gravats balayés
avec un standard de santé supérieure a celle à Taipei et Hongkong,
une qualité qui lui dote d’une accolade, « Singapourienne » en
tribut à l’Eden équatoriale obnubilée par l’hygiène. Il ne surprend
personne que Taichung rafle ces éloges aux maints commentaires
de presse pour sa qualité de vie. Esther réussite en me convaincant
d’acheter une parka étanche à la couleur grise de galuchat,
capuche cachée dans une doublure, d’une vendeuse mais faille en
lésinant duquel j’ai interdit, ressassant comment froid il pourra être
demain quand on errera au haut terrain et parcourra le plus grand
lac au Taiwan. Yo-yo commande paire d’écouteurs pour replacer
ceux dont fils sont coupés et une tranche de gâteau au chocolat et,
après d’avoir peloté un chiot husky dans un magasin, et moi des
brochettes de crevettes pour étancher enfin la faim ensuite d’un
mauvais repas au village. Nous sommes satisfaits et repus lorsque
les guides nous rameutent au coin d’une rue très hectique à
laquelle les véhicules, surtout ces motos et scooters pullulant
viennent tout rasibus en vacarme et essaim avant ils rayonnent
tous azimuts.
A la chambre de l’hôtel Esther tente d’assécher ces
chaussettes trempées et ravauder une chemise prisée (par elle)
déchirée. Ma femme redoute cette sorte de travail domestique
mais déteste voire plus le relent qui envahirait le bagage si ces
vêtements pourraient Elle habitue à exiger ceci et cela en
claquant ses doigts et hurler des commandes. On ne sait comment
elle et ses consœurs gâtées survivent l’absence de bonnes et
larbins. Mais voici est la preuve qu’elles se soignent et manier des
tâches quand laissées avec pas de choix que s’en débrouiller. Ce
qui manquent-elles n’est pas la capacité mais la volonté à durcir,
improviser et travailler aux besognes vues comme par-dessous de
leur dignité, un vernis qui s’amincit et se ternit. En contraste et en
revanche, cependant, je suis plus adaptable, ayant su cuire,
fignoler, bricoler, dépanner et vivoter depuis ma jeunesse et, dans
ce sens, je me ressens actuellement plus privilégié que celles-là les
pimbêches et princesses faisant la moue et la grimace lorsque le
monde stoppait de les axer, de remplir leur caprice et de suivre
leur marotte du jour. Parfois je crois qu’Esther me traite de servant
avec le mépris tranché enregistré dans sa voix, un manque de
comportement duquel elle ne semble pas consciente. Même sonne
des lèvres de son frère cadet Franklin mais puis ce dédain ne me
contre guère, plutôt c’est juste une manière réflexive et
pardonnable de la classe aisée. On ne devrait non plus bercer
l’illusion que ceux bien-lotis, abrités ou même amortis des chocs
économiques condamnés à la majorité vivant et vivotant à la
précarité peuvent vraiment comprendre et compatir.

15
Je rencontre cette horde de touristes de la Chine continentale,
une expérience qu’on ne s’épreuve mas sinon pour la détente,
sinon le rapprochement, avec le Taiwan. Le Président actuel Cela
Ma a opté d’assouplir son rapport a l’ennemi jadis et d’affirmer
ensuite l’unité chinoise d’abstrait malgré le tollé et la forte houle de
résistance, y compris des majeures manifestations menées par les
partisans sécessionnistes de Chen, c’est fait tout réduire le risque
du conflit militaire et attirer des investissements à une société en
face à l’effluence de capital, la défaillance de confiance et le sens
de malaise – surtout les déboires parmi des jeunes éduqués. Esther
remarque comment similaires et compatibles sont ces rivaux
d’antan qui s’abordent dans un même langage en dépit du gouffre
en accent. Ceux les Chinois, surtout les Pékinois, aiment grasseyer
en roulant leurs langues (comme certains Parisiens en français) et
ceux les Taïwanais, surtout les citadins de Taipei, ne se brusquent
pas en énonçant chaque syllabe (comme certains Bordelais). Leur
manière diffère avec le comportement des premiers étant plus
direct et celui des autres étant plus subtile, gracieuse, qui pourrait
être expliquée dans le contexte de leur rapport, les continentaux
étant les clients et les insulaires étant les serveurs. On a raison de
croire qu’il y aura aucun problème dans la réunification entre les
deux. Les Hongkongais sont cependant totalement incongrus et
saugrenus dont le mandarin appris à l’école est brut, coriace et
utilitaire (comme les aboiements d’un chien, ils étant les
équivalents des Québécois) et dont conduites sont beaucoup plus
occidentales dues à longue période de colonisation britannique. Les
continentaux et Taïwanais ont-eux le consensus que les
Hongkongais sont cocasses, gênants, vantards, tempétueux et
toujours dans l’hâte. « Pourquoi vous ne ralentissez jamais, » sonne
un refrain d’autres envers les Hongkongais en traitant ces gens de
jouvenceaux perpétués. Confier de savoir que ceux continentaux
provenus de Fujian sont aussi courants de Min nan, le dialecte
souvent écouté dans le sud de l’ile, le bastion des séparatistes.

16
Notre destination du jour est le lac Sinyat (ou littéralement
lac solaire et lunaire) au centre du Taiwan et dans l’ombre de la
montagne Jade. Mais d’abord on doit encore faire un arrêt
obligatoire d’apaiser des marchands, cette fois cependant à une
pâtisserie qui convient ceux qui raffolent des galettes cuites sans
levure. Pour nos guides, la seule demande est nous faire s’y
radiner. Nous Saluant à l’entrée de l’endroit à la frange de Taichung
est la propriétaire qui nous annonce que nous sommes tous
conviés (oui, nous payons) et nous servant est une équipe de
mitrons, chacun arborant un sourire et un tablier impeccablement
blanc de faire suggère l’hygiène impeccable. Notre marmaille
demeure toute béante à la foison et bâfre ces offrandes gratuites
car le truc est de séduire les enfants qui en tournure. Moi-même, je
concède hautainement à l’entame d’un gâteau dans la forme d’une
brique fourrée de ces pépites d’amande, bien, de dragée et bardée
d’un glaçage au chocolat, sûrement une concoction occidentale.
Les Chinois sont vraiment adaptables culinairement et sont
éhontés en improvisation – donc une concoction dont le cœur est
indigène mais dont la croûte est importée. Le résultat du mélange,
délicieux, mais seulement si l’on ignore le surcroît de calories et le
risque de carie qui évidemment est la tendance du groupe friand à
la collation. En fait ces gloutons ne cessent pas de ronger des
victuailles – viandes sèches plus dures que lanières, pépins d’une
gamme de melons et citrouilles, biscuits, oublies, arachides noires
(une délicatesse locale), etc. Chaque carton émaillé semble
s’estampiller en proéminence de cette marque de fierté, « fabriqué
au Taiwan, la République de Chine », de l’assurer à l’écoulement
rapide car cela se fait synonyme de haute qualité. D’ici ces
locustes humaines se ravitaillent pour la virée qui dure d’autours
deux heures. L’appétit d’Esther pour ces morceaux est
insatiablement alarmant et or elle déplore comment elle s’étoffe
ses nippes et perd sa forme, quel choix, d’être jolie ou d’être repue
aux branchies ? Ma femme m’accuse de manquer du tact puisque
je n’aime flatter personne lorsqu’elle s’en avère cette carence de
contrôle de soi. Je ne suis pas sympa, vrai, et j’en ai également
marre de ses excuses déployées de justifier la ribote parce que je
m’ai depuis longtemps désabusé de la fausse notion comment elle
veut s’améliorer en vigueur. Amaigrir n’est pas simplement pour la
vanité mais plus pour la santé, surtout en guérissant ses joints au
risque d’atrophie qui font boiter, voire chanceler, une dame une
fois sûre à la démarche. C’est juste que la gloutonnerie s’arrange
comme un péché cardinal chrétien car si le corps était faible, donc
même serait le cerveau.

Le soleil et la lune

17
Nous reprenons le trimard dès la fin de l’arrêt chez la pâtisserie. En
route au lac, le bus gravit une série de collines avec des
montagnes aux pics nets et bleus dans la distance et avec le ciel
limpide d’azur. Chaque niveau du terrain atténue plus l’épaisseur
atmosphérique, alourdit l’haleine d’air et allège la tête, créant en
effet qui émécher les passagers. Ces versants sont terrassés pour
l’agriculture d’intense pour la terre est précieuse et chaque lopin
alloué aux paysans n’est pas laissé en jachère ni en guéret pour un
long temps. Les récoltes sont aussi d’une zone tempérée plutôt que
subtropicale avec ces treillis de vigne, rangées de fraises
mûrissantes et pommiers qui produisent des fruits géants et
succulents en vente au centre-ville de Taipei. Cette cocagne fait
fleurer le paysage qui adoucit la disposition. Yo-yo ne semble la
moindre intéressée car elle s’assoupit, lasse-elle du jeu qui est de
courir son I-Touche d’Apple pour attraper quelconque sonde
d’Internet ou de radio et pour se prouver à la prouesse vantée de
technologie au Taiwan, une fois la berce des ordinateurs peu
coûteux. Yuan brise la chaine de rêverie en nous rendant pourtant
l’autre soliloque sur l’héroïsme des paysans juxtaposé à la perfidie
des Nationalistes issus du continent. Alex nous épargne de sermon
et même de flagornerie mais pleinement nous informe de
l’itinéraire après le parcours et déjeuner au lac d’être tout couronné
avec audience au parc de thème pour les aborigènes dont
présentation centrale sera un type de farandole – et, oui, sans
oubli, ces danseuses sont toujours très nubiles ! Bien, cependant
las est-on et si rien ailleurs, le propos d’une frasque (burlesque
sauvage sur l’herbe?) avec belles à la virevolte et au
déhanchement va tantôt amadouer l’esprit voyeur. Ceci l’on peut
facilement voire pourquoi en toisant leurs épouses, voire quand
une d’elles, de cinquantaine, préfère flirter et s’accoutrer en
chemise (toujours en pastel) décolletée de laquelle sa torse étoffe
et boudine, même pantalon moulant à l’entre-jambes. « C’est tout
gênant et grotesque quand personne notre âge étale son cul
comme de salope, » murmure-t-elle, l’autre membre du groupe en
minaudant et elle a raison. On le dit franchement et on n’est pas de
misogyne, non, contrairement, galant toujours dans la candeur du
jour. Quant aux dames, elles convoitent la vue des danseurs râblés
et athlétiques en contraste à leurs hommes clairement mous et
veules qui n’aiment qu’attiger de leurs affaires (maintenant leurs
infortunes), moi l’exception, au moins je me crois.

18
Ce lac profond, auquel des ruisseaux affluent et avec une berge
échancrée, y attire ouailles de pèlerins bouddhistes dévots en
cherche de paix aux temples sur sa rive sous les ombres de pins,
cèdres et pics. Mais cette paix fut plus élusive quand l’occupation
japonaise (1895-1945) militarisa la zone et interdit l’accès public
pour y ériger ses casernes et armurerie, pensant qu’elle fut une
forteresse imprenable. Quand l’armée nationaliste déroutée et
boutée du continent y arriva, elle reconnut sa valeur militaire et,
avec peu aménagements, la préserva comme une redoute, encore
exclusive, boutant ensuite plus des riverains. On soupçonne les
militaires eurent largués des douilles, munition usée et détritus
dangereux dans le lac à cause des avaries. Dans les décades
écoulées, cependant, les autorités réalisèrent la folie d’un district
aussi difficile d’atteindre et d’approvisionner – et plutôt vulnérable
aux missiles déployés par les forces communistes – et, également
important, le potentiel en développement du tourisme. Ces jours
l’aire reste exclusive mais dans l’autre sens après les engins de
guerre sont désemparés, les obus désamorcés et les troupes
déménagées. Les voitures ne peuvent pas y parquer sans un
macaron spécial et ces nouveaux bâtiments qui surgissent ne sont
pas privés. Donc ce sont des clubs, stations d’entreprises et hôtels.
On voit partout néanmoins ces chantiers saturés de grues et
attirails de construction en train de se viabiliser dont visée est d’y
étirer la ruée de visiteurs continentaux avec ouvertes poches. Le
progrès des travaux ne ralentit pas malgré une économie en berne.
Les dialectes qui trillent sont min nan et hakka desquels je ne
comprends pas un seul mot. Ils sont les gens qui le président actuel
compte de lui allier et est ainsi féru d’apaiser avec ce programme
en bénéfice de ceux souvent bafoués par l’élite du KMT comme des
rustres et butors. Le paysage pittoresque riverain nous accable et
nous rappelle du même en Corée nord de Pusan, proche de
Kwangju qui est de la même taille et qui est aussi un bassin pour
les montagnes. Malgré l’hyperbole d’Alex qui nous a induit
d’acheter une parka hier soir, il ne fait pas froid, pas voire frais,
pour tout apparaît calme avec les rayons perçants une mince
couche de nuage en train d’y dériver. Le front frisquet s’y est passé
durant la nuit et il nous faut de paresser à l’embellie car à une telle
altitude la météo s’avérait mercuriale.
Yuan s’obstine de continuer son monologue dans la face
d’apathie d’un groupe qui s’en va chercher pour des photos et
vidéos au lac et ses alentours sans la moindre conscience ni soin à
l’histoire et à l’épopée qu’il essaie de leur en raconteur. Je ressens
soudainement honte et embarras à l’insouciance si frustrante pour
quiconque érudit. L’intellectualisme se fait une poursuite solitaire
qui contre la tendance étendue de superficialité. On voit ici l’attrait
mais on n’y étire guère une pensée de substance, aucune
connaissance, rien qu’un vide sauf enregistrement d’une date au-
dessous de métrage ou de cliché. J’observe l’eau clapoter au môle
d’où amarrés la flotte d’esquifs, de chaloupes, de cotres convertis à
l’usage civil et de dogres et le lent mouvement de plusieurs
radeaux gréées de mailles, guindeaux et, aux bords, chacun un
parterre de fleurs et herbes. Yuan souligne comment ces vaisseaux
bizarres incombés d’appareils sont au service de la limnologie
puisque le Taiwan se targue d’avoir une forte force de science. Tels
bateaux draguent la couche du lac et recueillent des échantillons

19
de flore et de faune aquatique pour fouiller de connaissance et
assurer la santé de l’écologie chez une région regardée comme
trésor public. Nonobstant ces bateaux, l’aire est relativement
calme, libre de l’amerrissage des hydravions et le trafic bruyant et
vrombissant des hors-bord, skis jets et skis nautiques qui afflige
beaucoup de stations riveraines. Les passagers s’embarquent un
croiseur à carène en plastique et commencent le parcours. Notre
pilote barre son bateau en cabotant pour nous donner la plus claire
vue de la berge. Ils pausent au palier pour grimper un sentier afin
d’accéder au temple sur colline et sont harcelés et accostés par
une phalange d’apôtres de la secte Fa Long Gong. Ces partisans les
prennent erronément pour membres du Parti communiste
condamné à cause de leur persécution en Chine continentale. Je
contourne ces manifestants sans moins broncher qui ne posent pas
de menace, plutôt juste une nuisance parfaitement acceptable
dans une démocratie comme Taiwan. Encore on n’a pas de raison
de s’en y empêtrer et laisser la politique tacher une bonne occasion
d’arpentage et d’appréciation du milieu. Notre pilote dirige
l’embarcation au centre du lac et nous dépose sur une planche qui
forme la ceinture et barrière d’un îlot factrice. C’est étonnant
qu’une telle pièce de construction – un tertre flottant sur un tas de
roches retenu en place par plantes – soit nécessaire. Mais essentiel
c’était pour la fierté et le sens esthétique des Taïwanais.
Originalement il y avait déjà un îlot formé par la nature mais puis
ceci s’était écroulé et avait puis sombré sous les vagues dès le
séisme de mai 1998. La disparition nuisait à la fierté, l’esthétique
et l’équilibre de l’ordre selon la géomancie. Ceci avait provoqué un
tel tollé que le gouvernement, déjà accusé de l’incompétence aux
secours après le sinistre avec un bilan de 2 500 morts, était indu à
restaurer le symbole d’harmonie au lac et panser une des plaies,
géologiques et psychologiques, avec une entreprise plutôt
étrangère et pas critique.
Le déjeuner suit à la terrasse d’un restaurant rustique sur le
quai mais seulement parmi ceux de nous qui ont opté de payer le
rabiot pour le parcours. Les potaches de notre groupe ne nous
rejoignent pas, eux avec leurs jeux desquels ils ne cessent pas
d’inventer pour passer le temps. Manger dans le plein air est
toujours un plaisir surtout quand la température est douce – un
redoux certainement dans une zone montagneuse et en décembre
– et ces rayons de soleil sont feutrés par une mince couche de
nuage en train d’y reculer, étant acculée à l’est par la mousson
continental qui de la Chine. Il n’y aucun essaim de tipules,
moustiques, mouches et tels punaises dans la belle saison. Nous
nous attablons, entamant notre repas avec le thé local dont
flagrance est tiède, lénifiante et parfaite pour siroter, savourant
tout le palais comme un bon vin. Même nous picorons des petits
hors-d’œuvre des abatis préservés pour aiguiser l’appétit. Après le
désastre culinaire hakka, c’est sûr que l’expectation s’abaisse qui
nous prépare aussi pour une bonne surprise. Sur le menu sont :
soupe de lentille, jarret de porc mitonné dans une sauce presque
béchamel dans son épaisseur, une sorte de mil à la texture lisse
jamais vendue en rendement commercial, vandoises frites, deux
types de légumes sauvages se ressemblants aux fougères en forme
et texture avec un goût aux choux et épinards, une assiette de
vermicelles en gingembre et échalote légèrement avec bœuf sauté,

20
un plat requis de tofu qui est l’équivalent chinois, japonais et
coréen au fromage, et aussi ces petits œufs tiquetés cuits de caille
qui fondent dans la bouche. Cet agréable gueuleton succulent
ravive un peu notre fois dans la cuisine rurale de Taiwan pour au
moins ces morceaux sont chauds et pas trop graisseux. Yo-yo, plus
que d’autres, graille avec délice, loupant seulement le porc sans
parage, ses joints et tendons clairement visibles. Partageant tout à
mes pieds est un minou d’un pelage noir et blanc qui me frotte et
miaule pour gagner mon attention et ma pitié, qui me quitte
lorsque quelqu’un de l’autre table l’allèche avec voire plus des
bribes juteuses. Je préfère, moi, un toutou autant plus fidele
comme le husky qui m’a mendié ne pas pour un rebut mais pour un
peu d’affection.
Nous n’atermoyons pas au village sauf brièvement une
pause pour la photographie d’un point d’avantage commandant un
panorama. Le wagon descend au vallon des palmiers qui foisonne
dans une grande plantation. Voici est le cœur à la cocagne
taïwanaise mais voici est vu comme le havre des pécores, la classe
paysanne souvent bafouée d’où le peuple han et les aborigènes
cohabitent et se métissent. « Il n’y aucune, bien presque aucune,
pureté de race dans cette part, » siffle Yuan, « l’autochtone sans
une goutte de sang han est tout mais éteint. » J’ai entendu le
même conte vis-à-vis aux Hawaiiens débusqués de leur terre
ancestrale dont ces jours l’identité est plus de choix et de
patrimoine. Donc ils sont ceux bougres des yeux gris et cheveux
blonds qui sont patriotiquement Hawaiiens voulant restaurer le
royaume perdu quoiqu’ils soient évidemment blancs dans chaque
définition sensible. Ne pas seulement ces gens des clans hakkas et
min nans qui se mélangent aux natifs mais voire ces soldats, oui,
blédards, de l’armée nationaliste déployée ici, lointains de leurs
dulcinées à Taipei et facilement alléchés par des nymphes aux
éclaircies. Les officiers n’ont pas de honte en retenant une épouse
han dans la ville et entretenant une concubine native dans le
village. Cet arrangement ne provoque pas d’esclandre si l’homme
possède assez de moyens de leur lotir. La capacité de prodiguer les
femmes est preuve de virilité et de fortune qu’une personne aime
frimer et arborer comme de badge d’honneur. Mon arrière-grand-
père eut-lui une paire et le grand-père d’Esther s’en vanta d’avoir
eu un harem de six. Ceux de leur trempe existent encore mais avec
plus de subterfuge et camouflage. On ne pardonne pas cette
pratique dans la rigide monogamie qui parfois fait cagots de ceux
forcés de cacher leurs liaisons illicites. Les hommes de notre
groupe grimacent de penser qu’ils doivent feindre la fidélité aux
femmes quand dans leurs cœurs ils convoitent et s’entichent aux
jeunes belles bien pomponnées, séductrices et ayant une tenue
élégante. Ils lorgnent, non, guignent ces figures de rêves avec un
regard de regret. Triste vraiment que certains flirtent et fricotent
au service de papotage commercial de sexe car ils sont si
dépourvus d’une tendresse longtemps sapée et drainée de leurs
vies conjugales déjà longtemps moribondes. On doit déteste parfois
cette façade de respectabilité étayée par la société hypocrite.
Du bas, cependant, le bus vire plus à l’est et fait encore
l’autre montée pour le parc d’amusement s’y situe sur le versant
de l’autre montagne. On voit le changement clairement quand les
frondés donnent leur place aux pinèdes. Nous sommes arrivés à

21
l’entrée en passant sous la grande embrasure de un tréteau
construit des troncs ciselés et engravés aux motifs censément
maya et sûrement ersatz. Comment peut-on accoler la culture
perdue de l’Amérique à celle des tribus taïwanaises en pastiche est
mystifiant et saugrenu. Outre surgit un carnaval des appareils des
jeux, un carrousel, une balançoire mécanique dans la forme d’un
caracal, un étang avec des nacelles, une piste de train miniature,
voilà une version de Disney qui attise les enfants. Mais cela sera
pour après la performance. Nous approchons la station du monte-
charge pour la grimpe, passant encore l’autre attrait, un ascenseur
géant qui hisse les passagers lentement au top et qui puis les
laisse tomber en vitesse foudroyante, quelle horreur, quel
excitation. Yo-yo contemple et opte de l’éviter malgré la forte
tentation car, en enfance, elle n’en aurait pas hésité cette chance,
une audace bien tempérée en adolescence. Nous sont divisés en
groupes de six pour entrer la capsule. Partageant la notre est le
Professeur qui ne semble pas content en voyant comment
personne ne souhaite encore entendre son élucidation, chacune
étant plus occupée avec son fourbi à la photographie et ses
denrées. Voire la politesse montrée plus en avance à la narration
érudite vient de rétrécir, de s’atténuer. La feinte d’intérêt ne
perturbe pas. Yo-yo est la plus candide et niaise en ne masquant
guère son regard d’insouciance totale, disant avec moue et sourcils
renfrognés, « Quand reprendra l’amusement ! J’ai l’ennui! » – une
raillerie qui provoque un chorus des (autres) enfants cruels en
franchise. Sensible au moindre signe de camouflet, Yuan est atterré
en faillant fendre voire maintenant l’inerte collective lorsque
partout dans cette région s’écrie avec un conte lyrique, ouais, ici,
d’où les aborigènes s’évertuèrent de résister en vain la pousse des
colons du continent et dont les descendants sont condamnés de
gagner la vie pour égayer ces visiteurs calleux sans la moindre
sympathie. Je surveille l’andain de gazon qui forme un ruban entre
les rangs de pins et engage le Professeur esseulé en conversation
ou plutôt en radotage à l’histoire des tribus qui eurent fuies l’afflux
han. Il me dit que la souche des natifs est devenue brouillée dans
cette région du au mélange ethnique et ce qui compte est
comment tout le monde doit se considérée simplement un
Taiwanais. Esther touche mon coude pour me notifier d’un glissoir
d’eau, non, deux en fait qui doivent sûrement susciter notre garçon
manqué dévote aux gambades.
La frime se déroule sur une étape au bas d’un amphithéâtre
enclose par une douve sur laquelle est un appareil de cordes et
cheval d’arçon pour ces culbutes. Nous nous asseyons sur gradins
au béton. La farandole commence au bruitage tonnant. Les
danseurs s’affublent en costumes bariolées de toile, plume,
paillettes et d’autres bijoux diaprés, une tenue est plutôt plus
moderne qu’authentique, surtout le maquillage plus hollywoodien
que taïwanais. La troupe brandille et se darde ceci voie et cela aux
rythmes des tambours enregistrés sur disque disponible pour la
solde. Dans la mire de mon œilleton (je n’en utilise guère la « live-
view ») sont ces belles, comme averties, et ces gars qui sont
cependant nus sinon pour leurs pagnes qui se ressemble aux
couches de bébé et qui font s’esclaffer les gamins et gamines, Yo-
yo incluse, elle plus bébête que voire Stéphanie, à la moitie de son
âge. Ces branles et cabrioles ne feraient visiblement pas de sens

22
sinon pour l’explication d’une narratrice qui discourt sur les
légendes et folklores intégraux à la survie tribale. Notre fille
minaude aux bobards affabulés sans conscience que ces contes
servent comme la colle communale peu différents aux mythes des
Etats-Unis d’une terre promise pour les puritains et les pionniers
chargés d’une mission d’éclairer, christianiser et élever ces
sauvages de leur débauches païennes. Je pense souvent de jouer
l’anthropologue en recherche des montagnes appalachiennes aux
déserts en Californie, utilisant la méthodologie appliquée aux cultes
et peuples sous la surveillance dans le nom de science. C’est une
habitude surannée et arrogante de certains occidentaux de
s’arroger le droit exclusif de passer le jugement sur le reste du
monde. Soudainement un vent glaçant dégringole du pic, essuie
l’endroit et diminue la température ambiante – une chute qui
donne les frémissements à ma femme portante déjà une écharpe
en laine, quelqu’une particulièrement frileuse en voies plus qu’une
– voire sous un ciel d’azur. Mais rien n’affecte pas Yo-yo qui lèche
sa glace molle avec un tel délice.
Les foules se dispersent après le show durant exactement 32
minutes. Les mouflets étouffés clament pour dévaler d’emblée au
parc de thème pour leur jouissance – et enfin. Yo-yo se débat soit
aller aux glissoires d’eau qui apparaissent périlleux, donc excitants,
m’exigeant de l’accompagner, se souvenant cependant de sa
quinte de peur, de vertige, en 1998 chez Aventure de Californie
(California Adventure) mitoyenne à Disney d’Anaheim. Qu’est-on
censé en faire d’une adolescente qui peine à grandir? C’est certes
accepter qu’elle est entrée une phase floue, à mi-chemin entre une
adulte et une gosse, à laquelle la personne ne s’acquitte bien, ses
instincts s’en trompant constamment. En outre je redoute
maintenant, moi-même, ces montagnes russes et je subis aussi de
la haute pression sanguine qui me fournit l’excuse convenable pour
échapper des machins de risque et d’adrénaline, ceci, la dernière
est une assuétude approximative à la dépendance de drogues.
Dans l’enfance, on plonge sans broncher parce qu’on ne
comprenne pas l’hasard qui entraîne; mais dans cette phase, on ne
réfléchit que sur l’aléa, cependant éloigné. Ouais et comment se
ressentir barbouillé ces jours en regardant le bas d’une chute avec
la tétanie qui conjure la rationalité et qui fait délicat l’estomac ?
J’aurais aussi achoppé entre impulsions en conflit dans mon
adolescence mais vraiment je n’en me rappelle non plus, aspects
de ma mémoire s’estompant avec le passage du temps et avec
mes observations de ma gamine et ses comportements hilaires. La
question posée est soit Yo-yo est comme moi ou n’est pas ; et la
réponse la plus crédible est, ben, non, elle s’est unique. La vue
d’Esther est qu’elle, notre fille, convoite l’attention en faisant ainsi
cette esclandre pour nous tracasser et nous susciter. Si vrai, elle en
réussite encore, décrochant chaque gramme de notre souci et
saisissant nos cœurs battant la chamade. Yo-yo essaie d’abord le
mini train inoffensif qui court la frange du par cet puis la
balançoire. Son courage avivé, elle va braver le seul danger
d’éclaboussements, pas une seule fois, mais encore et encore aux
glissoires, elle-même drapée de imperméable et, après la première
grimace, un sourire. C’est pour elle la même ritournelle : Une
frousse, des gazouillis de nerfs et, après le triomphe contre le trac,

23
un sens cathartique, sentiment d’achèvement, le bluff et la
bravade.
Enfin il n’y a bourde en passant un après-midi au parc. Les
enfants n’aiment pas galvauder sans but dans leurs yeux. Bridés et
confinés au soin du groupe, ils ne peuvent pas pinailler, moins
protester, ces arrêts décrétés par l’itinéraire visant augmenter leur
horizon, sauf notre fille spontanée qui ne cache pas son reproche et
qui s’en rebiffe aussitôt. Mais trois heures aux ébats les apaisent
mais jamais les épuiser, chacun gloussant et riant avec un tel
délice, chacun oublieux du grief qui a passé auparavant. Dans
notre carrosse encore, ces vifs polissons maintenant au hauteur de
leur verve tourne en chorale pour rendre des chansons de noël.
Voire ceux adultes perclus de formalité ne peuvent pas s’empêcher
de trépigner, claquer leurs doigts au rythme et joindre la ribambelle
badine musicale. Peu important qu’ils, parents et enfants, no se
souviennent à chaque mot des paroles un fois gravées dans leurs
mémoires puériles. (Parlant de ce qui puérile, je m’aperçois et
apprécie la figure callipyge de ma femme voluptueuse juxtaposée à
celles d’autres dames dans notre groupe, femmes lambdas qui ne
s’en comportent pas de grâce en démarche, elles avec leurs
croupes roulées mais sans la moindre courbe bien ciselée d’étoffer
la taille de leurs atours tous rendant boudinés. Toast cela au
popotin de Venus. Je me tente d’admettre qu’il était plus de sa
forme que son intellect qui m’y alléchait au début. La poisse est
que le regard ne s’assortit pas à la personnalité qui demeure dans
le corps.)
On n’a trop de faire en route imparable à l’autre débouché
obligatoire pour s’emparer des babioles touristiques sauf de lamper
des boissons, le thé et l’eau minérale, et survoler des journaux. Le
bus parvient au centre géographique de Taiwan à la boutique dont
spécialité est le miel sauvage. C’est digne de répéter pour
souligner la coutume. On ne doit pas rabrouer ni gêner les guides,
cependant fatigué le passager voulant juste achever la station
thermale où chaque client a réservé une cabane, où le bain public
avec la buée jaillissante de la terre guérit, détend et lénifie meilleur
qu’un massage. Ce tact s’agit le respect ou la face. Le faubourg où
nous nous trouvons s’appelle Shuili dans la préfecture éponyme. A
l’entrée de nous accueillir est une équipe de gonzelles se grimant à
la blancheur de Yo-yo, accoutrées en costumes bariolées,
chaussées d’escarpins brodés à toile accentuant le regard de leurs
délicates chevilles et petits pieds (toujours un trait de séduction) et
murmurantes des mots de salutation de leur dialecte tribal. (La
pose d’une mauviette tentante amollit le cœur d’un homme. Ceci,
une feinte de vulnérabilité, est critique à l’art de coquetterie
orientale dans la face de la réalité que les femmes de l’est grèvent
le fardeau de travail outre l’accouchement, le soin des enfants et
les devoirs au ménage dans leurs sociétés.) Le miel vendu n’est
pas seulement la sécrétion des abeilles mais aussi des voix
féminines qui chatouillent l’imagination, la convoitise, de quiconque
homme pas mort. Esther dit que les Taiwanaises sont des mégères
les plus grincheuses, sûrement une calomnie à l’encontre ces
aguiches provocatrices de l’envie et de la jalousie. La magie du
moment se dégonfle cependant lorsqu’elles nous introduisent un
médicament local, censément puissant – le fœtus momifié et tout
se recroquevillé d’un faon dont petits os encore visibles. Ceci

24
grotesquerie qui dégoûte et affole Yo-yo était obtenue d’un
avortement administré à une biche.
En route à la station au crépuscule, le bus traverse une
étendue de villages et bourgades, y compris celles assoupies et
poussiéreuses (vaseuses si dans la pluie) dans les ravins d’où Yuan
et l’ancien leader déchu Chen avaient grandis et étaient inspirés
d’un désir à quitter ce marigot pour les installer dans les grandes
villes et ambitionner du suces élusif. Il n’y aucun parage de
sophistication, nul, plutôt juste ces pâtés de baraques,
pratiquement huttes, leurs murs chaulés, avec poulaillers, potagers
et bocages mitoyens dont produits supplémentent le revenu ou la
diète. On repère dans une distance ces volutes de fume qui planent
les toits signifiantes comment le feu de l’âtre n’est pas alimenté de
gaz et d’électricité parce que les gens brûlent de charbon afin de
s’en épargner l’argent. Le milieu parle de la frugalité et aussi de la
dignité en suffisance de soi. C’est facile de voir pourquoi ces
campagnards et bourgeois songent d’une sortie de leurs vies
falotes et pourquoi les classes aisées citadines les dédaignent,
ceux les parvenus dont accent rauque min nan trahit leur origine
modeste et leurs racines rurales. Ceux avec la motivation et les
méninges s’inscrivent aux universités qui leur servent le tremplin
social et géographique de la misère épandue, social à l’autre
échelon et géographique à Taipei. On n’est pas si naïf de croire que
le fossé régional, culturel et économique n’existe plus mais on ne
cesse pas d’être sidéré à l’écart qui demeure tel évasé.
Soudainement je comprends l’antipathie de Yuan et la corruption
de Chen, eux d’un peuple plus bafoué qu’opprimé avec l’odeur de
la contrée sur sa peau et la crasse du sol sous ses ongles. Prouver
comment ils ne sont pas butors et rustres, ceux comme le
Professeur et le président, ces individus doivent se vouer à
l’éducation qui sert de les en rincer et muer afin qu’ils mutent aux
positions d’influence et d’argent. En s’emboîtant aux érudits jadis,
Yuan avec ses références constantes à la littérature, ses récitations
des anciens vers et ses mémoires éléphantines d’histoire veut
autant de s’emparer au respect – spécialement celui de l’élite
snobe niché à Taipei, les nababs habitués à inscrire leurs enfants
aux internats et universités américaines, établir leurs résidences
secondaires ailleurs et investir sur le continent sans la moindre
fidélité au Taiwan, donc traîtres et profiteurs. « Nous sommes les
vrais fils de cette terre car nos âmes et nos corps sont toujours
présents, » siffle-t-il.
Le dîner se servit hic et nunc au réfectoire qui se passe pour
un restaurant et ce qui l’on fourre à la bouche est juste de
malbouffe. Mais lorsqu’on ait la faim et sans l’alternance mais
l’étancher, on gobe quelconque boustifaille avec juste un seul
regret – cela d’avoir ratée la chance de s’en rapprovisionne des
vivres à la superette 7-11. Alex nous a déjà averti comment les
hôtels régionaux ne cèdent rien pour plaisir aux clients pas
réguliers, sachant que notre type n’y vienne jamais et qu’un
groupe piégé dans un patelin reculé n’ait pas de choix mais avaler
sa fierté et ces morceaux froids. Assouvi de quantité, pas qualité,
principalement ces boules de riz (au moins chaudes), je file à la
boutique adjacente qui vend les vétilles – et ces pépins rôtis de
citrouilles pour satisfaire le palais. Nous nous retirons à nos cabines
en bois. Esther et Yo-yo s’y apprêtent pour tremper dans la piscine

25
thermale et, moi, je me vautre dans le lit pour savourer ma
collation et scanner des brochures. Mais en ennui, et dépourvu d’un
ordinateur de passer mon temps, on fixe toujours ses yeux sur le
téléviseur, étonnant à la pléthore de chaînes au câble émettant en
langues de mandarin, min nan, hakka, cantonais, japonais et
anglais. La population actuelle, cependant atomisée, n’en mérite
pas d’un tel Babel parce qu’il ne soit pas viable financièrement
mais ethniquement et culturellement, oui, ceci est juste.
D’innombrable sont ceux qui jugent les médias avec le loupe d’un
comptable plutôt que celui d’un sociologue. Bien sûr les langues
mineures se focalisent sur leurs feuilletons qui sont relativement
moins coûteux de se produire ; quant au mandarin, la variété est
diverse, surtout en ces actualités et nouvelles sur les escapades de
Chen et son clan et aussi ces documents interprétés des émissions
américaines comme la Discovery Channel et la National Geographic
au haut standard. Avant la douche, Esther et Yo-yo encore
absentes pour leur sudation et immersion, je m’aventure au dehors
portant une paire de galoches provenues de l’hôtel et, sous la
lumière jaune et veule des faibles lampes dans la fraîcheur du soir
pendant la flânerie, je discerne rangs de pierres sculptées se
ressemblantes aux figures de mythologie – et ce seront mes objets
d’être scrutés lorsque je me réveillerai.

La vista divine

S’acheminer à la chaîne centrale qui est l’épine de l’île requiert une


certaine bravoure car la route étroite de lacet doit traverser ces
ravins aux escarpements des versants pleins de signes de coulées.
On ne gagne pas d’assurance en voyant ces éboulis qui sont chus
aux rivières, maintenant sèches et dignes du mot « oued », lors de
la saison de mousson ce sont torrents rageants. Les gorges,
cependant accablantes, furent les barrières en préservant la
sainteté du sanctuaire, un havre pour les tribus jusqu’à la brèche
du siècle dernier quand les génies japonais accablèrent le blocus
naturel et imposèrent leur volonté sur cette colonie avec une telle
efficacité nette et brutale. En frayant une voie et pénétrant à
l’intérieure, ils manièrent de terrasser chaque forme de resistance
native et de lier les communautés isolées à l’entièreté de Taiwan
sous leur gouvernance. Sinon pour la défaite aux mains des
Américains durant la Seconde guerre mondiale, ces fonctionnaires
de l’empereur auraient eus le suces total en leur campagne de
japonisation dans la même façon qu’ils eurent prévalus en
Okinawa, une fois aussi une île pacifique qui appartint aux Chinois.
On repere encore ces petits champs collants aux pentes sur
lesquels sont plantées ces vignes verticillées aux treillis en
défiance de la menace qui surplombe et en testament à la carence
de terre arable, à la ténacité de ceux dédiés à son exploitation
intense et à l’esprit d’entreprise. Le bus freine après il a sillonné un
pont enjambant un goulet. Alex nous énonce qu’il doive faire volte-
face et naviguer l’autre voie en détour parce que l’une sur laquelle
nous avons déjà croisée est bloquée du pourtant à l’autre glissage.
Cette péripétie nous éveille de notre atonie et approfondir un sens
d’anxiété. L’air est maintenant lourd avec l’odeur de bouse, une
forme d’engrais encore préférable pour l’agriculture organique et à
la haute altitude, produits en commande d’une prime. Ceci signifie

26
que l’on perde une heure déjà passée depuis le départ de la station
thermale mais, en voyant une grange en presque collapsus, une
passerelle enlisée et plusieurs épaves, le risque est apparent dans
cette zone sinistrée du séisme et de l’orage.
Notre nouvelle voie nous emmène vers une vue rare et claire
du sommet à l’adret de la montagne Jade, « Yushan », (une
hauteur de 3952 mètres), ayant le plus majestueux des pics, et est
dorénavant traitée de révérence quasi-religieuse approximative à
celle réservée pour Fuji au Japon. La route se coude. Soudainement
on sent un certain vertige quand le wagon grimpe plus haut et lui
rend une perception du canyon au-dessous auquel on était mais 20
de minutes il y a. Les versants tournent rouges parmi le vert avec
d’abord un andain de poinsettias, une fleur à l’origine hawaïenne
en pleine surabondance, et puis jaunes dus à la floraison de
marguerites dont genèse est hollandaise. Personne ne nous
explique pourquoi ces plantes estrangers s’y éparpillent dans une
telle foison. Mais il n’importe pourquoi et comment cette flore avait
envahie l’étendue montagneuse car le paysage d’ici est bien
enjolivé en se transformant à la vibrance plus bigarrée et
éblouissante qu’au début quand l’hiver s’habilla d’un manteau plus
sombre en contraste à la verdure estivale feutrée. Nous pausons à
la vigie en face directe à la plus haute crête pour nous soulager
dans le buisson et pour nous donner la chance de capter des
images de Yushan perçant des nuées bientôt de s’y ouvrir et laisser
aboutir à ce jour glorieux et ensoleillé pour accueillir la fête de
noël. Quelqu’un de notre groupe, le gros père de Nathalie, bafouille
d’excitation en voyant le pic émerger de sa gaze grise. Ce qui suit
doit l’éberluer voire plus – cela d’une paire géante de cyprès, leurs
troncs lis et leurs intérieurs carbonisés et creusés, mais encore
debout en défiance à l’incendie qui avait abattus les moindres
arbres.
L’autre 45 minutes en route nous dirige au village alpin
d’Alishan, un sommet moins imposant que Jade mais plus
accessible. Mais Alishan n’est pas en fait un seul pic mais une
rangée de crêtes dont la plus haute cime est à l’altitude de 2663
mètres formée par une convergence des montagnes dorsales
(Dawu, Jian, Zhu et Ta) de Taiwan. On voit dans la montée au
hameau ces cascades et ruisseaux qui coulent des futaies d’où
fouissent ces troupes de singes. Yuan nous avertit d’éviter à
toucher et alimenter ces animaux qui rabiotent sans la moindre
inhibition des visiteurs et qui pourraient même mordre lorsqu’ils
s’en affolent. On y vient pour observer l’aube, le coucher et la
brume qui s’avère parfois une traque en vain à cause de la météo
mercuriale. Au restaurant nous mangeons des morceaux
régionaux, légumes sauvages, porc étuvé au ragoût, carpe bouillie,
compote de poire et airelle, mais rapidement les serveurs nous y
expulsons en hâte au dehors dans le soleil pour accueillir d’autres.
La courtoise ne compte plus que le commerce. La température est
tiède à 13 C, moins frisquette que prédite et idylle pour une
randonnée du parc au top.
Deux fourgons retrouvent les passagers pour un trajet de 15
minutes sur route pareille au rail à l’arrêt qui est un hôtel d’où
commence l’escalade à pied dont fin est l’entrée au parc et une
sente. Un septante dans notre groupe sentant vertigineux et
titubant demeure pour s’aérer, incapable d’endurer la pénurie

27
d’oxygène, à l’avis de sa fille. Voire certains des jeunes s’en
essoufflent. La route nous apporte à l’éclaircie des bois naturels à
la zone tempérée. Difficile vraiment croire qu’Alishan est sur le
tropique de cancer quand on peut l’imaginer d’être quelque part en
Californie du nord. Une fois ces forêts contirent géants à rivaliser
les séquoias qui cependant subirent de la fringale japonaise pour
les grands projets ferroviaires. Les boucherons locaux embauchés
les scièrent et récoltèrent sans soin à l’écologie résultant dans
l’érosion de terrain, laissant juste une lande de fougères, genêts,
bruyères et chicots pourris. Le train qui court la ceinture d’Alishan
est une relique de l’ère et le seul monstre d’avoir été épargné fut
un cèdre estimé d’avoir atteint l’âge du sage Confucius vénéré
aussi par les Japonais. Cet arbre survivait jusqu’aux années 1980
lors d’un cyclone l’avait bouleversé. Le retour de l’intendance
chinoise restaura la santé des bois puisque le régime Tchang
mandata un programme de reforestation. Les pousses nouvelles
ont dès rajeunies ces acres dans lesquelles fleurissent maintenant
ces plantes natives et existe ce jardin avec une arche créée d’un
tronc mort et un pavillon dans le milieu d’une mare lié au layon par
un pont à bois de refend. Je suppose que le paysage si composé
conforme au standard de géomancie. Le généralissime eut joint sa
femme éduquée aux Etats-Unis, Song Mei-Ling, en conversion à la
chrétienté pour apaiser ses alliés occidentaux, surtout les
Américains, mais sa fidélité esthétique resta toujours chinoise.
Descendant de plusieurs cents de mètres, nous arrivons au
terminus du rail et, là-bas, nous paressons de 35 minutes exactes
pour embarquer l’autorail dans la fraîcheur de l’air montagneux tel
vivifiant et dans le silence sinon pour ces cris périodiques des
mioches.
Le tortillard est d’un type vieillot, sinon démodé, datant peut-
être à l’époque coloniale japonaise qui lui fournit une touche de
nostalgie. Ce qui compte est qu’il est propre et ses installations
d’airain peaufinées à la patine. Tout le monde lui pose pour des
photos, surtout Yo-yo jamais personne de masquer son
enthousiasme en s’élançant d’un siège à l’autre comme un grillon.
Le voyage ne dure que huit minutes exactes en traversant la futaie
et présente aux gens une vista inoubliable des montagnes à
l’opposite en contour net, les crêtes juxtaposées contre un ciel bleu
avec juste plusieurs traces de nuage pour encadrer meilleures ces
images. On doit aimer comment les lumières atténuées de l’après-
midi diaprent les bois et font danser ces sombres des aiguilles de
pin et ces branches presque nues des trembles en ébranle. Je me
souviens des îlots de Matsushima au Japon et leurs pinastres
biscornus courbés par le vent ; et, avec une telle magnificence de
m’adoucir, je mordille un morceau sec de porc, une délicatesse
faite d’une espèces de cochon noir unique dressée seulement ici
dans la haute contrée de Taiwan, l’une achetée d’une échoppe à la
fin de la randonnée. Raffoler d’une friandise dépend parfois sur la
situation actuelle. Pour moi, c’est vraiment la combinaison du goût
et du lieu qui sont joints avec cette victuaille. Je peux attester
comment le chardonnay siroté au restaurant de Nantes en
décembre 2005 était plus délectable que la même marque dégusté
au Club à Hongkong du au changement d’ambiance.
Au terminus moderne de train est une terrasse sur laquelle
s’étalent trois sculptures en bois légèrement vernis. Les artistes

28
comme leur forte observent plutôt qu’oblitérer ces formes
naturelles. La beauté n’en est pas de la texture lisse mais des
bousins et moignons gravés par le grandissement irrégulier et par
les changements de météo, chacun rendu dynamiquement en
tableau et en tribut aux forces qui ne cessent pas d’affecter,
mouler, corroder et ciseler le paysage. On bée aux merveilles car
ce sont une manifestation aussi de l’imagination des artistes
d’interpréter et d’accentuer leur environnement en travers des
matériels abandonnés comme des déchets mais dont puissance
attend toujours d’être taraudée, gemmée et faite manifeste.
Parfaites aussi sont les lumières obliques qui illuminent ces défauts
et crevasses dans la même façon captivante au photographe des
nus intrigué par les reflets. Cette exposition se ressemble à l’œuvre
de Georgia O’keeffe, une Américaine, qui maitrisa l’usage des
détritus, parmi d’autres, de sa contrée adoptée – les arroyos et les
mesas de Nouveau Mexique – dont résultats hantent et ahurissent
le spectateur. C’est assurant et gratifiant de savoir comment les
arts s’y épanouissent voire dans un piège touristique en contraste
à leur absence à Hongkong, à Singapour et en Chine continentale
d’où ces sites prennent chaque chance d’arnaquer les visiteurs. S’il
y avait quelque part qui montre la facette artistique chinoise,
sûrement voici serait l’endroit – une splendeur de l’esprit
esthétique assortissant celui du paysage.
Nous dévalons du haut terrain à telle vitesse que nos
tympans se serrent, une sensation sentie typiquement pendant
l’atterrissage d’un avion. Les montagnes étalent leurs nuances de
palette en couches de bistre, de bleu et de gris quand l’après-midi
cède aux ténèbres, quand la brume du soir surgit et quand nos
paupières ont le poids de plomb après les yeux ont louchés
longtemps au soleil. Bientôt on entre la zone des plantations de thé
s’en y penchantes précairement sur pentes. Dire que cette région
est la capitale du thé oriental ne fait pas d’exagération car les
experts lui décernent régulièrement les plus effusifs éloges et
nous, les clients, les prisons en payant un surcroît. Je repousse
l’offre des autres lorsque j’y aie un choix et j’opte m’humecter ma
gorge avec le thé vert (parfois rouge au « Woulongcha ») de
Taiwan lorsque je m’entraîne au gymnase. Ce thé est mon cadeau
pour mon clan à Vancouver et chez nous le rituel au décantage est
observé. On entend se plaindre le novice comment un tel thé n’est
qu’une bibine mais puis une telle personne n’apprend pourtant
d’apprécier les saveurs sublimes. Supérieur c’est pas de doute au
goût trop sucré de Coca-Cola qui s’évente sinon lampé quand le
thé enrichit lentement sa flaveur texturée. On sait que certains
occidentaux mélangent le thé avec d’autres ingrédients – menthe,
romarin, cannelle, miel, gingembre, etc. – pour concocter une sorte
de tisane mais cela est un acte abominable, une hérésie. Alex nous
mène au salon de thé au palier des montagnes et là-bas les
serveurs et vendeurs nous introduisent d’une pléthore incroyable
des boissons auxquelles nous nous adonnons dans la même façon
que les Allemands sont dévots à leurs bières. Ce qui me surprend
n’est pas la suprématie du thé taiwanais mais plutôt un drapeau
chinois (communiste) qui festonne la paroi du hall qui fait bien sûr
l’appel aux visiteurs du continent mais qui aurait été condamné
comme un geste de trahison. Mais ici cependant il semble apparent
que l’argent surpasse l’idéologie. Peut-être ne pas puisque ces

29
jours les deux côtes s’en emboîtent à la conviction partagée dans
le capitalisme. Encore j’essaie de jongler l’idée de la détente entre
les rivaux et penser d’un futur d’une Chine réunie, oui, mais dans
les termes de quelle ? Lloyd, mon grand-père, et partisan de KMT, il
aurait été atterré et écœuré aux compromis. C’est compréhensible,
pas appréhensible, que cette génération des Taiwanais veuillent
s’affranchir des épreuves de leurs ancêtres et œuvrer d’ouvrir ces
conduits pour raisons commerciales et personnelles. Ce
pragmatisme est la source de l’espoir pour un meilleur futur.
Tainan est la ville adoptée de Yuan qui s’était inscrit à
l’université, un bastion des adeptes au parti de Chen et un creuset
pour le nationalisme taiwanais. Il nous raconte de ses exploits en
s’insurgeant au gouvernement pourri de Tchang père et fils, Kaï-
Chek et Ching-Kuo, et le guignol que furent ces vauriens de la
dynastie royale et son népotisme quand telles actions subversives
courtisèrent persécution. Yuan ne fait pas d’apologie pour son
idéalisme de s’emparer le contrôle des bravaches et kleptocrates
dont seule justification pour leur pouvoir fut leur commande de
l’armée et leur soutien des Etats-Unis durant les années 1940
jusqu’à celles 1990. Ces leaders et leurs sbires régentèrent sans,
dans son mot, légitimation. Il est juste d’être fier ne jamais
acclamer la dictature ni ne jamais lécher son cul comme des
sycophantes, lâches et laquais afin d’avancer sa carrière. Yuan a
raison de pester ; la renier pour ses exactions et pillage ; et s’écrier
à l’injustice mais or ces jérémiades sont la seule puissance des
veules. Ces fascistes comme leurs ennemis, les communistes,
supprimèrent l’opposition avec brutalité d’extrême, y compris les
massacres et purges. Mais nous ne le joignons pas en nostalgie
seulement en faim qui est en train d’être étanchée à son
restaurant favori. La gargote se vante d’avoir plus que ces plats
(nouilles et hachis pigmenté) mais une ambiance distincte – un
endroit orné du décor populaire et contemporain au jeune rocker
Elvis Presley. C’est en fait le grenier d’un ancien atelier. On y
trouve ces vielles fiches et un téléphone noir mat au cadran avec
un combiné lourd et fils.
Du balcon s’étend la cité dont boulevards semblent s’y
convergent à la confluence de la voirie, à la mairie et «la plaza »
qui tout avoisine. On vient d’entendre sonner des klaxons et tinter
des chansons de noël. Les gars sont les premiers de se ruer aux
fenêtres pour chercher la commotion, disant avec étonnement qu’il
y a maintenant une parade des hommes en guises de St. Nicolas
sur une longue remorque chamarrée d’oripeaux les plus clinquants,
d’ampoules étincelantes et de paillettes les plus pétillantes. Dans
une ville avec peu festons de marquer la veille de la fête, cette
plateforme ambulatoire chatoie, étirant les enfants et leur élicitant
ces sourires. Mais le dîneur modeste ne constitue pas de festin et
donc nous suivrons la direction du marché de nuit à laquelle
l’estrade mobile de noël est revenue, les morceaux sont divers et
l’ambiance est toute bonasse. Je n’ai jamais eu ce type de noël
passé entièrement « al fresco » pendant un soir frais et pourtant
festif en ébranle avec une cohue pesante sur les étals et mangeant
quelconque bizarre au bazar. C’est vraiment une foire, non, une
kermesse dans le sens du mot original de Wallonie. Cette nuit n’est
pas calme comme évoquée dans la chanson mais elle est une
émeute de couleurs, lumières, visages, bruits, odeurs et goûts pour

30
marquer un noël plus spontanément joyeux que ces réveillons chez
nous à Vancouver si froids et mornes desquels je redoute. Ceci sont
coutumes longtemps croupies tolérables juste pour nous graver
depuis nous sommes athées incorrigibles. Yo-yo aussi, elle s’en
marre ici en côtoyant ces étrangers indifférents à la signification de
noël mais qui le fête néanmoins car chaque soir est digne d’une
célébration à laquelle quelqu’un est toujours convie et fait accueilli.
Il y a ceux, les jeunes rauques noctambules, qui hurlent jusqu’à la
pointe d’aphonie en extase à la musique rauque et sonore. C’est le
rock de noël dont visée n’est pas observer l’occasion chrétienne
mais générer du commerce pour les camelots, bien exactement
pareil à l’économie occidentale en solde pour laquelle Jésus est un
agent de marketing, voilà le sacrilège. Pour un cadeau
d’impromptu, elle reçoit de sa mère un tas de chaussettes
branchées et bigarrées à l’aubaine et de son père une paire de
bisous sur ses jolies joues.
On ne s’y attarde à Tainan car il n’a rien fait d’y traînasser dans
une ville d’où fourmillent les scooters, ceux doués avec petits
engins peuvent légalement rôder sur les trottoirs, leurs motards
portants ces casques comme calebasses bariolées. Dans la sortie
de la ville je repère des dépôts aux déchets et rebuts qui Yo-yo s’en
trompe pour des antiques prêts pour d’enchère. On doit lui dire que
l’erreur soit juste car en essence les ordures auraient de mérite et
auraient cotées. Mon jeune cousin Calvin m’avait informé durant
mon séjour estival à Vancouver comment il et ses copains mégoter
ces jours en trouvant, dépanner et nettoyer ces anciens portables
d’Apple pour la vente sur EBay pratiquement aux prix des
nouveaux. « La valeur se mesure en sentimentalité, » était son
évaluation. L’art à la débrouillardise s’était encore manifesté dans
ma cherche d’acheter un bidule d’accessoire pour le Nintendo. La
ruée était telle que gens auraient étés joints des queues qui puis
revendraient en ligne à la prime, un commerce auquel je m’étais
soumis afin d’apaiser ma fille. Ceci est l’état de vie actuelle à
Vancouver et, je soupçonne, ailleurs aussi lorsque les citadins
doivent vivoter de nouer les deux bouts. La distance qui cale les
villes jumelles de Tainan et Kaohsiung ne compte plus qu’un cent
de kilomètres entre leurs aérogares. On ne notifie guère qu’il existe
un tel écart car leurs banlieues semblent déjà s’imbriquent. Mais
encore Yuan nous assure comment et combien les habitants
s’enorgueillissent de leur appartenance à ceci ou celui lieu pour
lequel l’identité est viscérale.
Kaohsiung se vante d’avoir la meilleure rade que celle-là du
nord, dans le couloir de Taipei et Keelung, malgré sa tendance de
s’ensabler, requérant donc le service régulier de dragage.
Aujourd’hui la mer est à la bonace dans le sillage d’un orage et,
sans la moindre brise, il fait déjà 22 Celsius à midi. Kaohsiung est la
première place d’avoir été urbanisée au Taiwan car les officiels de
la cour Ming eurent établi dans le 17ieme siècle un môle, un fortin
et un contrôle de douanier pour régulier le trafic marin au temps
quand les caravelles portugaises parcoururent ces eaux. Mais
ultimement les Hollandais plutôt que leurs rivaux ibériens qui y
atterrirent en 1624 et l’appelèrent Fort Zeelandia, ayant conquis
les tribus des pêcheurs locaux dont nom pour la place fut « Takao »
(le bosquet de bambou) dans le dialecte de la région et rime avec
le terme « battre le chien ». La mouvance néerlandaise atténua et

31
puis effaça, laissant peu testaments à la présence jadis de ces
« barbes rouges » (« hungmao », un euphémisme pour les
barbares). En essence ces colons blancs, étant pragmatistes
farouchement avides, se confinèrent aux ports d’escales soit dans
le nord à Taipei ou le sud à Kaohsiung plutôt qu’infiltrer l’intérieur
pour des coudées franches et dépecer l’île dans zones
administratives car leur intérêt fut le revenu conjoncturel et ne pas
la gestion de longue durée, fut dans le service de Mammon et ne
pas de Dieu. (Ce fut sage d’eux d’avoir désavouée la folie à
l’intendance aux dépens de finance qui aurait impliquée une
garnison de taille. La stratégie n’érafla guère la surface culturelle
au Taiwan et la seule empreinte aurait été génétique avec certains
métis accouchés du mélange aux Néerlandais.) La dernier cause, la
divine, fut la poursuite des Portugais qui eurent fondée leur mission
dans l’enclave de Macao durant cette époque mais au gré de
l’empereur chinois voulant restreindre et contenir l’influence de ces
Chrétiens tels tenaces à la frange du royaume d’où leurs jésuites
ne purent gêner autant le trône du dragon.
Takao profita de la négligence des occidentaux et de la
dynastie Qing dont origine fut en Manchourie et dans dont pensées
le Taiwan était éloigné et impertinent. Le design sur l’île fut
cependant apparent chez les Japonais qui la convoitèrent d’être
une étendue naturelle de leur archipel. Les forces de Meiji
vainquirent celles de Qing en 1895 et lui imposa le traité de
Shimonoseki qui céda aux Japonais le Taiwan. Mais ces nouveaux
maîtres grattèrent au nom Takao qui sonna trop vulgaire aux
oreilles japonais qui puis le changèrent à Kaohsiung (le haut héro)
en le plus élégant mandarin duquel certains d’eux parlèrent dans la
même façon que les ecclésiastiques catholiques en Europe
retiennent encore la messe latine. Pendant l’interlude d’entre les
règnes flous des Hollandais, le Qing et enfin le Japonais, la
surpuissance maritime britannique eut fixer aussi un œil sur le prix,
ayant déjà saisis les territoires du détroit malais et Hongkong. En
conformité au pattern de conquête d’abord par les moyens de
commerce – telles la Compagnie de l’Inde orientale et les firmes de
Jardine et Swire – les Britanniques, surtout les Ecossais – s’en y
emparèrent à Takao une redoute au top d’un rocher côtier sur
lequel d’ériger le manoir de briques, mortier et caillasses. Après un
aménagement, le fortin s’assuma le but d’un consulat en surplomb
à la Baie Sizih de Gushan. D’ici la vue de la mer est mirifique sous
un ciel clair avec les vagues clapotantes les étocs et le large. Mais
l’accalmie ou plutôt l’embellie hivernale masque la furie des
tempêtes éboulées de la mer, y compris l’ouragan Thelma en 1977
qui avait sabordé des navires et fait écrouler le toit et un pan de
cet édifice dans l’architecture victorienne. Le bâtiment est
maintenant converti en musée et, à la terrasse au-dessus la cité et
l’embouchure de la rade via le fleuve d’Amour (Ai Hé), chez le
quartier de Lin Yuan. Esther s’étonne comment ces Britanniques
eurent toujours décrochés les plus prisées et avantageuses des
propriétés. Ma réponse : « C’est une habitude nationale,
considérant qu’ils gagnèrent par ruse, vol et parfois violence dans
le cours de deux siècles un empire étendant de l’Irlande aux
Malvinas, saisissant en route l’Amérique, le Canada, l’Inde, la
colonie de Cap et ta ville natale, Hongkong, etc. » Marrant aussi
que son ancêtre fut bénéficière d’un pactole comme paiements

32
pour sa collaboration avec les Britanniques. Ces colons
n’épargnèrent jamais en discernant et soudoyant ceux sans honte
en trahison leurs gens. Je ne peux pas résister à narguer son
façade d’ignorance et de naïveté.
Je m’abreuve d’un verre de thé sur glace pour me rafraîchir et
m’apprêter à décrocher des images plus épatantes du lieu. La cité
se déferle sous un ciel et devant une mer de cobalt bleu, une
perception parfaitement encadrée du feuillage de tamariniers. Un
cargo comblé de cargaisons tôt après l’arraisonnement au quai
proche glisse en silence, un silence à l’instar d’une lame sur glace.
Je n’y repère aucun sillage ni de fumée des cheminées ; et,
tournant à ma fille, je veille à remarquer ses expressions, soit
d’intérêt, soit d’ennui, soit d’insouciance. Depuis enfance cette
gamine ne réagit jamais au paysage, cependant magnifique. Je
crois qu’il soit une poisse, même une honte, qu’un enfant ne se
laisse être sensibilisé aux tableaux de nature et donc à l’essence
de l’âme humaine. Ne pas seulement humaine ( !) pour, auprès
d’un zoologue, un chimpanzé alfa était espionné d’avoir filé seul de
son troupe des nuits afin d’aller à une falaise, s’y accroupir et
observer la pleine lune, le jungle et les chutes Victoria. Ainsi un
simien censément dépourvu du sens d’émerveillement serait ému,
pourquoi pas une personne, pourquoi un tel vacuum j’ai dernier vu
parmi certains de mes proches. On retient ces montages pour
engranger ces résidus des moments écoulés et chéris dans la
conviction que ces photos soient toujours poignantes et évocatrices
si seulement d’assouvir une mémoire parfois poreuse et souvent
inexacte.
Le groupe s’empresse d’y quitter pour son déjeuner, l’autre qui
s’avère fade, un des maints repas adéquats juste à étancher la
faim, rien de plus. Assez repus néanmoins, nous nous baladons à la
promenade du fleuve d’amour, Ai Hé, duquel rien ne semble le
moindre affriandant ou romantique relatif au rivage de la Tamise
ou la Seine. Il y a des banquettes et pelouses pour convenir des
couples en cherche de l’intimité sous ces ombres de banians et
eucalyptus. Mais qui sont les couples assez désespérés de se
peloter ou voire se courtiser quand ces câlins seraient visibles aux
condominiums avec leurs fenêtres commandantes une vue de l’aire
et ses alentours. Cette carence de l’espace privée bémolise voire
ces manifestations d’affection des couples mariés. Les Taiwanais,
étant Chinois, sont généralement plus timorées et conservateurs
de s’exposer à une galerie de voyeurs, différents aux
exhibitionnistes européens qui se pavanent et se prélassent
pratiquement nus aux calanques méditerranéennes comme
baleines sablées. On doit sûrement aimer moult ces flâneries de
tonifier les muscles et régler l’estomac. Yo-yo, méchante, rigole à
la vue d’un peloton de pupilles qui n’a pas de congé pour fêter le
noël, oublieuse comment le Taiwan demeure majoritairement
bouddhiste. Ne pas loin du fleuve est notre arrêt de chalandise, un
magasin qui nous offrit le plaisir douteux de « hiao zhu », non, pas
« manger du porc » mais « de perle » car les prononciations en
mandarin propre des mots pour la bidoche et la nacre sont
pratiquement identiques. Esther s’amuse avec le boniment animé
et hilare (incroyable aussi) d’une vendeuse vedette dont peau est
blanche, lisse et luxuriante malgré son age confessé de 65 ans,
dont prouesse à la danse demeure formidable après une blessure

33
due à une chute et dont physique est digne d’une trentaine, tout à
cause de la puissance curative de la perle – l’élixir. Ce fétiche pour
les biens médicinaux de ce fleuron n’est qu’une excroissance de
l’ostréicole et de la bijouterie au Taiwan dont anses sont égales à
celles-là au Japon pour maintenir ces aculs. Ma préférence est pour
la chair de l’huitre et jamais la graine y plantée afin de l’irriter et
expédier la formation d’une perle d’artifice, une formation faite en
fait de sa salive. Nous, Yo-yo et moi, laissons à Esther le plaisir de
cribler et lésiner sur ces balles beiges (certaines sont noires, très
chères, et encore d’autres sont rosées) pour quitter le salon et
rincer nos bouches encore amères au goût de la poussière de
perle. Sur les murs sont festonnées ces photos en promotion de
l’industrie de nacre : images de Madame Tchang portant un collier
(on est tenté de dire « collet »), des plongeuses étalant leurs
cloyères de leur récolte et des larges spécimens.
La municipalité de Kaohsiung a bien enjôlé un réservoir, Tang
Qing, adjacent au terrain de golf, pour le présenter comme un lac
urbain avec pavillons, herbes, arbres et une piste en ais qui
l’entoure son rivage endigué au maçonnage pour atteindre une
bonne apparence et empêcher l’affouillement induit des
inondations lors de mois houleux. L’ambiance ainsi créée est
gentille plutôt celle de Central Park au cœur vert de Manhattan.
Tant pis comment la pêche est interdite car il n’y aucun plaisir
meilleur qu’appâter des fretins en grouillant et lire de livre, peut-
être du polar haletant plutôt que ces escapades d’Harry Potter.
Rien plus qu’une telle détente ne remédier si doucement l’esprit
dans ces temps d’inquiétude quand autant du monde semble
foutu, triste et confus à cause des malaises économiques, d’abord
l’inflation, puis la dégringolade boursière et enfin la dépression,
chacun sous la gourance de George W. Bush, l’imbécile en chef. Ce
qui nous, les visiteurs, pêchons sont ces images afin de nous
rasséréner. Mais alors la paix se brise à cause des gars de notre
groupe qui ne s’assagissent jamais et qui tentent de lapider ces
petits poissons, trop à l’exaspération de leurs parents et, pire, moi,
les galets donc décochés risquant de frapper d’autres baladeurs, y
compris un couple de badernes légèrement courbées et galeuses
avec cannes. S’il y avait chaque moment que l’on soit
reconnaissant avoir une fille et ne pas un fiston, surement il serait
maintenant. J’ai effroi qu’un jour ma Yo-yo emmène un garçon a
notre maison et que je le déteste.
Le dernier arrêt avant le départ du Taiwan est au grand Mail
de rêves, un complexe si vaste qu’il rivalise celui du Mail d’ouest à
Edmonton. D’une distance on peut déjà voir son toit sur lequel
tournoie une roue Ferris, l’attrait de signature au parc de thème,
Hello Kitty (bonjour, minou), un équivalent japonais à Disney et un
réceptacle aux enfants de Kaohsiung. Le mien feint l’insouciance,
laissant à la marmaille plus jeune de clamer le plain délice et
d’exiger une visite tout de suite. « Je l’évite. C’est tel bébête et
stupide, » minaude-t-elle, voulant s’y débiner et jouer de lèche-
vitrines chez boutiques. Mais avec la défaillance financière et le
chômage sévère dû aux prospects industriels diminués, un tel lieu
est devenu la terre promise d’emploi tertiaire. Même si l’on ne bute
pas sur un clochard sans-abri au Taiwan urbain à cause des efforts
gouvernementaux de masquer la pauvreté et projeter l’air nanti, la
pénurie existe et est en train de s’y empirer dans la face des

34
rétrécis globaux. Un mail essaie d’effacer comme son rôle chaque
trace de malheur car il est une manifestation de plénitude et
d’ultra-modernité auxquelles cette société aspire. Yuan dit que la
taule agit comme l’éponge aux victimes de la mouise et le sens de
vergogne règne pour prévenir ceux dans la déche de s’y révéler au
monde. « Il y a gens avec boulots et diplômes qui ont eu à mégoter
pour leur survie, eux vivants leurs vies sans la dignité ni sécurité,
mais ne sont pas enregistrés d’être en besoin d’aide. L’intendance
n’a abaissé plus le seuil de pauvreté afin de se prouver avec un tel
leurre que le problème est sous le contrôle. Pour beaucoup
l’espérance d’un avenir s’est longtemps volatilisée. Et personne
avec la moitie d’une tête en fonction ne croit plus dans ce caduc
truc de chiffres, » martèle-t-il, le Professeur, « personne est tout le
monde sauf ces ministres fous et fonctionnaires dotés de
sinécures. » N’est-ce pas le design de la classe actuelle dirigeante
à hébéter les gens pour meilleur les manipuler ? Suffit-il d’y
constater comment le gouvernement au Taiwan encourage plus de
ses citoyens de penser en contraste à beaucoup ne souhaitant
qu’atteler les leurs aux poursuites superflues afin de les abêtir et
les dominer. On n’oublie pas du quoi dit l’aphorisme aux pains et
cirques.
Le groupe a eu les deux, leurs pains et leurs cirques, au mail.
Dans le final geste de signification, Alex nous requiert de rendre
aux guides un pourboire obligatoire par personne de 400$HK (40
d’euros) afin de leur supplémenter les salaires. Je leur baille une
somme de 1800$ pour les trois de nous à laquelle Esther bée et se
fronce les sourcils. En dépit des aggravations envers cette paire, on
ne doit pas être d’harpagon durant une telle saison festive, sachant
et compatissant qu’Alex et Yuan aient besoin de l’argent pour
défrayer la perte aux mains de leur agence toujours en train de
serrer leurs employés avec le prétexte : « Les temps durs nous
demandent à sacrifier de revenu personnel en échange pour le
maintien des positions ! » C’est toujours donc, ceux des bravaches
au top menacent ceux des veules au bas. Le wagon parvient
l’aérogare. Chacun des voyageurs a acheté un tas de remplir au
débordement son bagage. La consommation acharnée est
l’habitude, sinon le rite religieux, des Hongkongais. Esther me
professe de son affection pour le Taiwan, surtout Taipei, qui est
distinct et pourtant assez similaire à Hongkong, me demandant
dans la même haleine de planifier l’autre retour – préférablement
au littoral oriental. « Il y a un film tourné là, Le Cap, numéro 7, qui
dépeint si glorieusement ses plages et vagues d’un paysage
absolument ahurissant, » chuchote-t-elle dans une voix affétée
d’une coquette, « et il sera splendide de retracer les pas des
acteurs. » « Si tu l’avais déjà vu, tu n’aurais pas de raison pour une
reprise, » rétorque ce cynique. « Ce n’est pas le même. Un film est
un simulacre. Une visite, bien, elle fait vraie l’expérience ! »

35
36

Anda mungkin juga menyukai