28 l/100 km.
Commercialisée en 1970, la Range
CHANTIER NAVAL EN BRETAGNE UN BELGE LAISSE ÉCLATER SON TALENT
Le Boréal, conçu pour les contrées difficiles
E ntre Liège et la Bretagne, Jean-
François Delvoye a fait un dé-
tour par le Brésil et la Patagonie
pour peaufiner l’ébauche de ce qui
devient le voilier de voyage par ex-
cellence. Fort de son expérience de
six ans de voyage et de ses carnets
de note, il décide de s’installer à Tre-
guier pour lancer un chantier naval
de construction de bateaux en alu-
minium. Bien qu’il n’ait aucune for-
mation en architecture navale, il
imagine, dessine et construit un ba-
teau de grande croisière de 50 pieds
(15,5 mètres). Il travaille sans pres-
sion pour sa première unité car…
elle lui est normalement destinée !
Il « sent » les défauts de son bateau
précédent et découvre les solutions
adaptées quant au comportement
en mer, à la stabilité de route, au
confort… Plan de carène, dérives, er-
gonomie de vie à bord, tout est ana-
lysé à travers le prisme de la naviga-
tion familiale qu’il vient de vivre. Et
aussi une foule d’astuces que seul
un vrai marin peut découvrir. Bien
sûr, l’ensemble est vérifié ensuite
par les bureaux de contrôle et de
certification CE…
Le jeune chantier ne craint pas la
crise. Les 10 personnes qui y travail-
lent sortent deux bateaux par an.
L’objectif est, à terme, de monter à
quatre mais l’entreprise fonctionne
déjà actuellement. La structure est
légère et le marché est très pointu.
Pour la plupart des clients, le Boréal
est le deuxième, voire le troisième
bateau de leur vie. Ils ont eu le
temps d’y réfléchir. Ce n’est d’ail-
leurs pas le type de voilier qui moi-
sira dans un port : le plus souvent le
Les motos furent les plus rapides maha et BMW en catégorie moto, nique des motos « vertes » et des différents des paysages africains
trie automobile, ce système infor-
matisé est unique dans le monde
des chantiers naval de plaisance.
On ne voit jamais personne avec un
mètre en main se promener dans le
chantier. Les tôles sont découpées à
l’avance, l’ébénisterie est réalisée à
l’extérieur de la coque et montée
tout assemblée.
Alors que bon nombre de chantiers
navals souffrent et ferment leurs
portes, il est rassurant de voir cette
réussite ! Le rythme de construc-
tion est bon et le carnet de com-
mande bien rempli… Les raisons du
Photo Doc
succès sont indéniablement liées à
son créateur. Il est rare de voir un
bateau forgé par autant d’expé-
programme de croisière et de vie à tentiels. Il se noue entre le concep- UN BATEAU FORGÉ rience en mer et de réflexions « en
bord est tourné vers le grand Nord teur-constructeur et ses clients un PAR L’EXPÉRIENCE situation ».
où le grand Sud. Jean-François Del- vrai dialogue de marins avertis qui Avant la construction du premier Mais surtout, le concepteur est au
voye part dans quelques jours en connaissent les plaisirs mais aussi Boréal, Jean-François Delvoye a tout moins aussi compétent que ses ou-
Écosse pour faire essayer le premier les contraintes des croisières dans modélisé en 3D sur son ordinateur. vriers dans les principaux métiers
voilier construit à deux clients po- des contrées difficiles. Tout ! S’il est classique dans l’indus- qui composent l’art de construire
des bateaux. Soudure, menuiserie,
« Ne faites pas de rêves médiocres, ce sont les plus difficiles à réaliser » ébénisterie n’ont pas de secrets
pour lui, et, quand il dessine une
Originaire de Remouchamps, Jean-François Delvoye commence par des études de kiné mais développe aussi une pièce, il imagine déjà sa réalisation
passion pour l’ébénisterie.Tout bascule en 1988 lorsqu’il monte une menuiserie dont le principal client est la RTBF technique.
Liège pour laquelle il construit les décors des studios et les isolations phoniques. En 1997, il vend tout et monte sur le Il en résulte une ambiance de res-
bateau que la famille a patiemment construit dans le jardin liégeois. Ils n’ont aucune expérience de la mer et partent pect mutuel et… de franche camara-
faire le tour du monde… qui commence par les canaux ! Ils traversent la France pour sortir en Méditerranée.Aux îles derie dans le chantier ! La « famille
Canaries ils découvrent que même ceux qui quittent tout pour aller au bout de leurs rêves nautiques ont parfois l’ins- Boréal » comme ils l’appellent !
tinct grégaire ! « On ne peut tout de même pas aller vers les Antilles avec eux », s’exclame-t-il ! Le cap est modifié Comme la cerise sur le gâteau, ses
est c’est vers le Cap Vert et le Brésil que la famille se dirige. Le voyage est très lent et ponctué de longues escales deux fils sont prêts à continuer
pour visiter, prendre le temps de rencontrer les gens et leur culture et pour refaire la maigre caisse de bord… En- l’œuvre du père quand celui-ci
suite, c’est l’arrivée en Patagonie et le vrai coup de cœur pour cette région sauvage et vraie. Ils y passeront deux ans. s’élancera — prochainement —
Et feront même du charter voile — randonnée pour emmener les touristes émerveillés naviguer autour du mythique pour retrouver les océans. Aussi
cap Horn. C’est là qu’ils rencontrent Nicole van de Kerkhove, notre célèbre compatriote.Après six ans de voyage, il beau soit le chantier, on n’enchaîne
est temps de rentrer… pour les enfants. Le projet de chantier naval et l’amitié pour Nicole poussent la famille à venir pas un marin ! r
s’installer en Bretagne, dans les Côtes d’Armor. « On ne s’impose pas en Bretagne, il faut s’y faire accepter. » Jean-
François force l’admiration de ses nouveaux voisins en construisant lui-même sa maison, de ses propres mains ! r Alexis Guillaume
www.sailaway.be
aussi. r Philippe de Barsy
Le double réveillon ?
Phileas Fogg, le fameux héros de Ju-
les Verne ne savait pas, en se pré-
sentant à son club londonien, qu’il
avait remporté son défi de tourner
autour du globe en 80 jours.Tout
s’était joué de l’autre côté du
monde. En effectuant un tour du
monde d’Ouest en Est, il avait en fait
gagné une journée par rapport à son
horloge personnelle.
C’est Magellan qui, lors de sa pre-
mière circumnavigation, consigna
quotidiennement ses observations.
Aussi quand l’équipage rentra en
Espagne, il eut la stupeur de consta-
ter qu’il avait un jour de décalage
avec les compatriotes restés au
pays. Le problème, bien que parfai-
tement compréhensible au vu des
connaissances de l’époque, n’en
provoqua pas moins des débats so-
phistiqués. Au point d’envoyer une
délégation de l’expédition se justi-
fier auprès du Pape.
Pour résoudre définitivement ces
problèmes il a fallu adopter un méri-
dien de ligne de changement de
date. Si Greenwich constituait le
temps de référence universel, il fal-
lait donc que le méridien 180° vers
l’Est ou vers l’Ouest, devienne la li-
gne imaginaire de changement de
date. Imaginons le concurrent du
Vendée Globe se souhaitant deux
fois la bonne année !
Pour ceux qui résident dans les pa-
rages, les géographes n’ont pas hé-
sité à distordre l’antiméridien et à
prendre quelques libertés avec la ri-
gueur de la ligne droite : le méridien
180° laisse ainsi Nouvelle-Zélande
et îles Fidji à l’Ouest et fait basculer
les îles Aléoutiennes dépendant des
Etats-Unis dans son Est. On imagine
sinon la vie d’un habitant de l’anti-
méridien qui pourrait, au gré d’al-
lées venues entre son domicile et
son travail, changer de journée plu-
sieurs fois par vingt-quatre heures.
C’est cette situation absurde
qu’avait d’ailleurs mise en scène
Umberto Eco dans son roman, L’Île
du jour d’avant. r
Alexis Guillaume
Photo Samatha Davies/Roxy