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Réforme du système éducatif : les raisons de l’échec

Par : D.Messaoudi, PES syndiqué au CNAPEST

Le taux de réussite ascendant au Bac, annoncé chaque année avec fanfare par le MEN et ce depuis
son engagement dans l’actuelle réforme scolaire, ne peut nous tromper : l’école algérienne n’avance
pas ; elle est entrain de patauger dans d’énormes problèmes. À quoi l’échec des réformes de
Benbouzid et son équipe est-il dû ? Ci-après quelques éléments de réponse à la question.

Tout d’abord, avant d’entamer toute réforme dans un secteur aussi sensible que l’Éducation, il
faudrait ouvrir un débat national public [1] afin de sensibiliser la société et la préparer au changement
à venir. Chose qui n’a jamais été faite à notre connaissance, ni sur les médias lourds très influents ni
sur la presse, à l’exception de quelques articles éparses parus dans quelques quotidiens
indépendants. Ensuite, il faudrait dresser un état des lieux exhaustif et fondé sur des missions de
terrain pour constater de visu les conditions dans lesquelles se pratiqueront les nouvelles
orientations et auditionner les divers acteurs et utilisateurs de ces orientations [2]. Chose qui semble
avoir été faite partiellement ; c'est-à-dire en se limitant aux zones urbaines. D’ailleurs, même dans la
phase expérimentale, on n’a lancé des classes dites pilotes que dans certains établissements situés
en ville. Le MEN et son équipe ignorent-ils à ce point qu’on ne peut concevoir des programmes
nationaux réussis en se basant uniquement sur des données recueillies dans un espace restreint, la
ville, plus favorable à l’enseignement / l’apprentissage en raison de la disponibilité des infrastructures
(librairies, bibliothèques, salles d’informatique, Internet, etc.) ?

Donc, ayant négligé certains aspects de cette première phase très importante dans l’opération de
réforme du système éducatif, Benbouzid et son équipe ne peuvent avoir qu’une vague idée des
problèmes et des besoins de l’école algérienne et de sa capacité d’adaptation à la nouvelle
approche. Autrement dit, le diagnostic étant partiel, le remède ne peut être qu’erroné.

La réalité du terrain :
Une simple enquête à l’échelle d’une daïra de l’intérieur du pays nous révélera qu’il y a déjà un
manque assez sensible en établissements scolaires [3], tous paliers confondus. Et un simple coup
d’œil à l’intérieur des établissements existants nous fera découvrir qu’en raison du manque d’écoles,
les classes sont surchargées (+40 é/c dans certaines écoles) et que les moyens pédagogiques et les
infrastructures (bibliothèque scolaire, laboratoires des sciences / langues, salle d’informatique,
réseau Intranet / Internet, etc.) y font affreusement défaut. Ajoutons à cela le fait que l’enseignant n’a
jamais été sérieusement préparé pour enseigner avec la nouvelle méthode basée sur l’approche par
compétences ; il y avait certes eu des stages dits de perfectionnement à une certaine époque, mais
que peut apprendre un enseignant d’un collègue-formateur du même niveau que lui ? Même les
conférences et les journées dites d’études / de formation organisées par les inspecteurs de matières
ne sont enfin de compte d’aucune utilité, car la réalité du terrain telle qu’on l’a décrite supra rend
leurs directives, basés uniquement sur la théorie, irréalisables.

L’approche par compétences repose sur l'idée que l’élève possède déjà des prérequis et il suffit qu’il
les mobilise, avec l'aide de l'enseignant si nécessaire, pour résoudre les problèmes auxquels il fera
face dans les diverses situations d’apprentissage. Cela peut être vrai, et bien que dans une certaine
mesure, si l'étudiant vit dans une société ouverte et instruite et elle-même évoluant dans un
environnement où infrastructures et technologies modernes ne font pas défaut. Car, dans ce cas,
entouré de gens instruites et s’entraînant à une variété d'activités aussi pleines de défis les unes que
les autres, l’apprenant aura acquis certaines compétences de base qui peuvent être alors activées et
perfectionnées par l’enseignant en classe en plaçant l'élève dans des circonstances semblables à
celles vécues au quotidien. D’ailleurs, pour toutes ces considérations, les thèmes proposés dans les
nouveaux manuels sont tous liés à la vie quotidienne des apprenants et l'enseignant est tenu de
conclure chaque unité pédagogique par un projet que les élèves réalisent sur la base de données
réelles, collectées sur le terrain en utilisant des techniques et des équipements utilisés dans la vie
moderne. Il est clair que l'enseignant et l'élève qui ont la chance de vivre en milieu urbain ne peuvent
qu’être satisfaits de leur travail avec cette nouvelle méthode. Mais qu'en est-il de l'élève et de
l'enseignant, qui vivent dans des régions éloignées, comme c'est le cas dans certaines régions
kabyles ou dans le sud de l'Algérie, où les conditions sont comparables au "désert culturel" ? [4]

Dépourvues d’un nombre suffisant d’établissements scolaires, certaines régions du pays sont
contraintes d’entasser une quarantaine, voir une cinquantaine d’élèves dans chaque classe. Pis
encore, les établissements fonctionnent avec des moyens rudimentaires ; i.e. juste avec un tableau
noir et un bout de craie. Dans de telles conditions, aucun enseignant, puisse-t-il être ultra-motivé et
ultra-compétent, ne sera en mesure d’exécuter avec satisfaction les nouveaux programmes avec la
nouvelle méthodologie. C’est que, surchargée, la classe empêche toute mobilité, d’où l’impossibilité
de constituer des groupes de travail tel que exigé actuellement. Et si l’on ajoute l’indisponibilité à
l’intérieur des établissements des moyens pédagogiques modernes, comme Internet, ou la difficulté
d’accès à celle-ci à l’extérieur pour les filles (et celles-ci forment plus de la moitié de chaque classe)
en raison des considérations culturelles, l’on ne peut que s’accorder sur l’inévitabilité d’échec qui
guette chaque jour en classe et l’enseignant et l’apprenant. Naturellement, l’enseignant essaiera
toujours de limiter les dégâts en recourant à la vieille démarche dite transmissive, mais ce sera à son
propre péril, car les directives des inspecteurs sont catégoriques : ne plus jamais transmettre le
savoir à l’élève ; celui-ci est là pour améliorer ses compétences !

Avec la multiplicité des classes à gérer par chaque enseignant, la surcharge des classes est
également une entrave pour l’évaluation dite continue [5]. Normalement, pour le suivi de chaque
élève, l’enseignant doit ouvrir un portfolio individuel contenant des grilles d’évaluation et de suivi.
Mais comment cela sera-t-il possible lorsqu’un enseignant se voit confié jusqu’à sept classes dont
chacune dépasse largement une trentaine d’éléments ? Ce n’est donc pas étonnant que beaucoup
d’enseignants, la plupart osera-t-on dire, pour remplir la colonne réservée sur le bulletin à la note de
l’évaluation continue, n’utilisent en fait qu’une seule note ; celle qui se rapporte à un seul aspect
facilement observable chez l’élève en classe : le comportement.

Et comme si tout cela ne suffisait pas, l’on emprisonne l’élève dans un emploi du temps quotidien
hermétiquement fermée de 8 heures jusqu’à 17 heures. À l’exception des deux jours du week-end
qu’il devrait consacrer en partie pour se délasser et en partie pour réviser, l’élève ne possède
presque aucun temps libre pendant la semaine pour effectuer des recherches pour ses projets dans
chaque matière. Là encore, ce n’est pas étonnant que ces travaux de recherche soient bâclés ; très
souvent, ils ne sont qu’une photocopiée du même travail réalisé par un élève fortuné ou même par le
gérant d’un cybercafé ! D’où l’impossibilité pour l’enseignant d’évaluer le travail sérieusement et lui
attribuer une note sérieuse.

Pour finir, l’introduction de l’approche par compétences dans l’enseignement algérien est un travail
d’envergure dans lequel des groupes de travail composés d’enseignants, de responsables
ministériels et de collaborateurs scientifiques étrangers auraient dû être engagés. Les travaux
auraient dû être coordonnés par un service de coordination de la recherche et de l’innovation
pédagogiques et technologiques du MEN, et ils auraient dû bénéficier de l’accompagnement
d’instituts étrangers ayant une grande expérience dans la mise en œuvre de cette approche. Mais
puisque rien de cela n’a été fait et que le terrain n’a pas été préparé, la nouvelle approche
d’enseignement / d’apprentissage introduite précipitamment et presque à l’insu des concernés, au
point qu’elle a mis les éducateurs dans un total désarroi, ne peut qu’échouer en Algérie,
hypothéquant par conséquent l’avenir de toute une génération d’apprenants.

_____________________________

[1] « Une réforme doit impliquer tous les acteurs concernés, à savoir les enseignants, les parents d’élèves et les syndicats. Chez nous
c’est ce manque de concertation et de dialogue qui a engendré l’échec total de toutes les réformes du système éducatif », explique
Mohamed Cherif Belkacem, DG de l’Ecole supérieure de gestion (ESG), dans un des rares forums organisés autour du
thème de l’éducation dans les journaux nationaux. (in El Watan, édition du 14 juillet 2009).
[2] Certes, en mai 2000, il y a eu l’installation de la Commission nationale de réforme du système éducatif (CNRSE)
présidée par Benzaghou ; commission dite composée d’universitaires, de pédagogues, et de représentants de différents
secteurs d’activité ou de la société civile. Malheureusement, le rapport final basé sur les données de terrain recueillies
par la Commission nationale des programmes (CNP) dont dépendent les Groupes spécialisés de disciplines (GSD), n’a
jamais vu ses recommandations appliquées ; c’est un rapport jeté tout simplement aux oubliettes en raison, paraît-il, de
sa nature jugée trop moderniste par les gardiens du temple de l’obscurantisme.
[3] Le nombre d’écoles (18770), de collèges (4137) et de lycées (1541) à l’échelle nationale est certes considérable,
surtout pour les deux premiers paliers, mais trompeur. Trompeur, car si l’on considère la capacité d’accueil de nos
établissements, l’on découvre que le nombre de classes / de groupes pédagogiques y est, pour la plupart, très réduit, ce
qui augmente le nombre d’élèves par classe.
[4] L’approche par compétences fait davantage appel à un haut niveau de culture générale et de maîtrise
du langage que l’approche traditionnelle, ce qui ne manquera pas de favoriser les enfants issus des
familles aisées et / ou des zones urbaines.
[5] Pour être vraiment utile, l’évaluation ne doit pas se contenter d’une note chiffrée sur le bulletin. Elle doit tout
d’abord documenter la progression de l’élève et sa façon d’apprendre (évaluation formative), ensuite elle doit mesurer les
acquis de l’élève à des moments donnés (évaluation certificative). Ce n’est qu’ainsi que l’enseignant pourra posséder des
données fiables sur les forces et les faiblesses de son élève afin de mieux informer et celui-ci et ses parents.

Bibliographie :

- Baillargeon, N., 2006. La réforme québécoise de l’éducation : une faillite philosophique. Possibles,
Vol. 30 (N° 1).

- Boutin, G. & Julien, L., 2000. L'obsession des compétences. Son impact sur l'école et la formation des
enseignants. Editions Nouvelles., Montréal.

- Crahay, M., 2006. Dangers, incertitudes et incomplétude de la logique de la compétence en éducation.


Revue française de pédagogie, (154), 97-110.

- Houston, W.R. & Howsam, R.B., 1972. Competency-based teacher education: progress, problems, and
prospects, Science Research Associates.

Gerard, F. et al., 1993. Concevoir et évaluer des manuels scolaires, Bruxelles : De Boeck.

- Lemaître, D. & Hatano, M., 2007. Usages de la notion de compétence en éducation et formation,
Editions L'Harmattan.

- Letor, C. & Vandenberghe, V., 2003. L'accès aux compétences est-il plus (ini)équitable que l'accès
aux savoirs traditionnels ? Cahier de recherche du GIRSEF, (n°25).

- Parlement européen, 2006. Les compétences clés pour l'éducation et la formation tout au long de la
vie.

- Rey, B. et al., 2007. Les compétences à l'école, De Boeck Education.

- Ropé, F. & Tanguy, L., 2003. Savoirs et compétences, Editions L'Harmattan.

- Scallon, G., 2004. L'évaluation des apprentissages dans une approche par compétences, De Boeck
Université.

- Schmieder, A.A., 1973. Competency-Based Education: The State of the Scene, Washington: American
Association of Colleges for Teacher Education.

- Thélot, C., 2004. Pour la réussite de tous les élèves. Rapport de la Commission du débat national
sur l'avenir de l'École., Paris: la Documentation française.

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