DE LA NATURE
Paraphrase de la physique d'Aristote livre 2 chap IV.
Il nous semble que nous avons puis le nombre des
causes ; mais, parfois, on compte parmi les causes le
hasard, la spontanit ; et l'on dit de bien des choses
qu'elles sont produites d'une manire spontane et fortuite,
qu'elles sont causes par le hasard. Nous allons examiner
s'il est possible de comprendre , parmi les causes que nous
avons numres, le hasard et la spontanit, et surtout ce
que c'est que la spontanit et le hasard, et si ce sont des
choses identiques ou diffrentes.
D'abord il faut remarquer qu'il y a des philosophes qui nient
le hasard, et qui soutiennent que le hasard ne produit
jamais rien. Toutes les choses qu'on attribue au hasard,
disent-ils, ont une cause dtermine ; seulement, on ne la
voit pas. Ainsi quelqu'un va au march, et il y fait par
hasard la rencontre d'une personne qu'il ne s'attendait pas
du tout y trouver. On dit qu'il l'y a rencontre par
hasard ; mais la cause de ce prtendu hasard, remarquent
nos philosophes, c'est la volont d'aller au march pour y
faire quelque emplette ; et cette volont tait parfaitement
rflchie ; elle n'avait rien de fortuit. Il en est de mme,
ajoutent-ils, pour tous les cas attribus au hasard ; et, en y
regardant de prs, on dcouvre toujours une cause, qui
n'est pas du tout le hasard qu'on suppose. Les philosophes
ajoutent encore que si le hasard tait aussi rellement
cause qu'on le dit, il y aurait lieu de s'tonner qu'aucun des
anciens sages qui out tudi si profondment les causes de
la gnration et de la destruction des choses, n'en aient pas
dit un seul mot ; et l'on en conclut que ces sages n'ont pas
admis que le hasard ft une cause, et que rien pt, jamais
venir du hasard.
J'avoue que ce silence mme des anciens sages est fait
pour tonner ; et tout moment on parle dans le langage
ordinaire de choses qui se produisent et qui existent par