Objectifs
Déterminer la quantité minimale d’élément chlore à introduire dans un échantillon d’eau pour
que celui-ci se trouve sous forme de chlore libre.
Comprendre ainsi le principe du traitement par chloration d’une eau de piscine en connaissance des
normes pour assurer une désinfection efficace : pour une eau de piscine, le traitement se caractérise
par l’absence de chloramines et une teneur en chlore libre contrôlée entre 1 et 2 mg.L -1.
Par souci de simplification pour la lecture de ce document, le terme « chlore » désigne l’élément
chlore ; le terme « azote » désigne l’élément azote.
Présentation de la démarche
L’élément chlore1 est largement utilisé dans le traitement des eaux de consommation et des eaux de
piscine car c’est un produit bon marché, aisément disponible et facile à manipuler, sous forme d’ions
hypochlorite, ClO-. Grâce à son pouvoir oxydant, utilisé en quantité convenable, il détruit les
microorganismes, permet d’éliminer de nombreux polluants et empêche l’eutrophisation ; il assure
ainsi une stérilisation efficace.
H3 C CH2
N NH2
H3 C CH2
La DPD réagit avec le chlore libre pour former un composé rose dont l’intensité de la coloration est
proportionnelle à la teneur en chlore libre.
1 Les différentes formes sous lesquelles le chlore peut être introduit pour désinfecter les eaux sont précisées
dans « Commentaires et compléments » ; la molécule active est toujours l’acide hypochloreux (le pH des eaux de
piscine étant contrôlé entre 7,2 et 7,6).
2 En raison de l’objectif de la manipulation, qui est le traitement de l’eau, il n’est pas tenu compte, ici, du chlore
sous forme d’ions chlorure, Cl-, bien qu’il soit présent également sous cette forme.
S’il n’y a aucune coloration avec la DPD, l’addition d’ions iodure permet de caractériser le chlore
combiné ; les monochloramines et dichloramines réagissent à leur tour et donnent la coloration rose.
Cette technique est peu sensible à la présence d’autres espèces et permet donc de déterminer la
teneur en chlore libre et en chlore combiné pour une eau donnée.
Démarche
Lors du traitement d’une eau de piscine la réglementation impose la présence en permanence de
chlore libre en quantité contrôlée (1 à 2 mg.L -1). Il est proposé une démarche, utilisant la méthode à la
DPD et la spectrophotométrie en vue de déterminer la teneur en chlore introduit permettant d’assurer
une désinfection conforme aux normes.
Pratiquement, on prépare des échantillons d’eau pour lesquels la teneur en azote est constante et la
teneur en chlore variable. L’élément azote, présent ici uniquement sous forme ammoniac, représente
les matières organiques apportées par les baigneurs ; la désinfection a pour objectif de détruire ces
matières organiques.
En utilisant la méthode à la DPD, on se propose de déterminer qualitativement (par l’observation de la
coloration des solutions) sous quelle forme le chlore se trouve (chlore libre ou chlore combiné) dans
ces différents échantillons.
L’analyse des observations, complétée par une mesure d’absorbance pour deux échantillons
judicieusement choisis, permettent de déterminer quantitativement la concentration minimum en
chlore introduit à partir de laquelle les matières organiques sont pratiquement détruites et où le chlore
« résiduel3 » se trouve sous forme de chlore libre dans l’échantillon d’eau (ce point est appelé point de
rupture). En connaissance de cette valeur, il est alors possible de déterminer la quantité de chlore à
introduire pour assurer une désinfection efficace en tenant compte des normes imposées.
Prolongements possible
La manipulation s’arrête à ce stade ; il est recommandé de la prolonger soit par un exercice soit par le
titrage de l’eau de Javel (TP C06) qui propose une application pratique. Il est également possible de
commencer par le titrage de l’eau de Javel, ayant servi à préparer les échantillons d’eau.
Il peut être intéressant aussi de donner aux élèves une fiche de contrôle de la qualité d’une eau de
piscine et de la leur faire étudier.
Protocole
Matériel et produits
Burette de 25 mL
Éprouvettes graduées de 10 mL
12 tubes à essai
Spectrophotomètre et cuves (1 appareil pour le groupe)
Iodure de potassium
Solution de DPD de concentration massique 1,1 g.L -1, tamponnée à pH = 6,5 à utiliser dès sa
préparation
Échantillons d’eau numérotés de 1 à 12 contenant 0,5 mg.L-1 d’élément azote apporté sous forme de
chlorure d’ammonium, NH4Cl, et des quantités croissantes de chlore, de 0 à 12 mg.L -1 apporté sous
forme d’eau de Javel :
Échantillon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
azote (mg.L-1) 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5
chlore (mg.L-1) 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 12
L’eau utilisée pour fabriquer les solutions ne doit pas contenir d’acide hypochloreux.
La préparation des solutions est indiquée en fin de document.
Mode opératoire
3 On parle de chlore « résiduel » ou de chlore « disponible » parce que une partie a été consommée par les
chloramines.
1. Suivi colorimétrique qualitatif de l’évolution de la quantité de chlore combiné et de
chlore libre en fonction de la quantité de chlore introduit
Dans chacun des tubes numérotés de 1 à 12 :
- introduire 1 mL de solution de DPD (tamponnée à pH = 6,5) dès sa préparation à l’aide d’une
burette ;
- puis dans l’ordre, du tube n°1 au tube n°12, ajouter 10 mL de chacun des échantillons d’eau
(échantillons 1 à 12) à l’aide d’une éprouvette de 10 mL. Agiter.
Si une coloration rose apparaît, il y a présence de chlore libre ; noter les numéros des tubes où
cette coloration apparaît.
Dans les tubes où aucune coloration rose n’apparaît, ajouter, à l’aide d’une spatule, quelques
cristaux d’iodure de potassium et agiter :
- si aucune coloration rose n’apparaît, il y a absence de chlore qu’il soit libre ou combiné ;
- si une coloration rose apparaît, il y a présence de chlore combiné (sous forme de
chloramines) ; noter les numéros des tubes où cette coloration apparaît.
Ranger les tubes dans l’ordre croissant de la quantité de chlore ajoutée (et donc de la numérotation
des tubes) et vérifier qualitativement que l’intensité de la coloration augmente, passe par un
maximum, diminue, passe par un minimum, puis augmente à nouveau.
Question
Interpréter ces observations à l’aide des informations données dans l’explicitation de la méthode au
DPD et de l’objectif recherché dans le traitement (destruction des matières organiques apportées par
les baigneurs).
Éléments de réponse
Tube n°1 : Quand il n’y pas de chlore présent dans l’échantillon d’eau la solution reste incolore après
ajout du réactif DPD et des ions iodure résultant de la dissolution des cristaux d’iodure de potassium.
Tubes n°2 à 7 : L’intensité de la coloration augmente et passe par un maximum, correspondant à un
maximum de chlore combiné sous forme de chloramines. Après être passé par un maximum,
l’intensité de la coloration diminue, ce qui correspond à la destruction des chloramines formées (sous
forme de diazote ou d’ions nitrate selon le rapport massique chlore/azote.). Au minimum (au voisinage
d’un point appelé point de rupture), il n’y a plus de chlore combiné dans l’échantillon d’eau (les
chloramines précédemment formées sont détruites) et la teneur en chlore libre est alors minimum.
Tubes n°8 à 12 : L’intensité de la coloration croit à nouveau. La teneur en chlore libre augmente de
façon linéaire avec la quantité de chlore introduit. La courbe correspondante est donnée dans
« commentaires et compléments »4.
Questions
4 L’enseignant peut préférer donner la courbe aux élèves et faire interpréter les observations au vu de la courbe.
5 Le spectre d’absorption des solutions obtenues présente deux maxima, l’un proche de 510 nm, l’autre proche
de 550 nm.
6 La couleur des solutions évoluant dans le temps, les mesures doivent être effectuées rapidement.
La courbe de la concentration massique de chlore en solution en fonction de la concentration
massique de chlore introduit est une droite. Justifier. Préciser sous quelle forme (libre ou
combinée) le chlore est présent en solution.
Que peut-on dire du coefficient directeur de cette droite ? Était-il nécessaire de faire plusieurs
mesure de l’absorbance ? Justifier.
Connaissant la valeur de la concentration massique de chlore introduit correspondant au point
de rupture, est-il possible de déterminer la quantité de chlore à utiliser pour la chloration d’une eau
de piscine (la composition de l’eau, la taille de la piscine et les normes de chloration étant
connues) ?
Éléments de réponse
C’est une droite puisque la concentration massique de chlore libre varie linéairement avec la
concentration massique de chlore introduit. Le chlore présent en solution est entièrement sous forme
libre. Le coefficient directeur de la droite est donc égal à 1.
Il est possible, en connaissance de la valeur de la concentration massique en chlore libre, au point de
rupture de déterminer la quantité de chlore à utiliser pour la chloration d’une eau de piscine (voir TP
C06).
La quantité de dichlore en solution et des formes acide ou basique de l’acide hypochloreux est
fonction du pH de la solution. Ainsi, à 20°C, les proportions de ces espèces en fonction du pH sont
données par les courbes de la figure 1.
50
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
pH
L’examen des courbes montre que pour un pH inférieur à 2 presque tout l’élément chlore est sous
forme de dichlore, sous forme d’acide hypochloreux pour un pH inférieur à 6, et que pour un pH
supérieur à 10 le « chlore » est sous forme d’ions hypochlorite. Les études bactériologiques montrent
que l’espèce HClO est la plus active 7. C’est pourquoi il est nécessaire de contrôler aussi le pH d’une
eau à désinfecter pour des raisons de stabilité (risques de dégagement de dichlore), d’efficacité de
stérilisation, de confort des nageurs (pH convenable pour la peau, les yeux, etc.).
Il y a probablement aussi formation de trichloramine, NCl3, volatiles qui s’éliminent par aération de
l’eau.
6
Chlore résiduel (mg.L -1)
3
point de
2 zone rupture zone du
1 des chloramines chlore libre
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Chlore introduit (mg.L-1)
Une première zone correspond à la formation des chloramines ; tout le chlore introduit est sous forme
de chlore combiné. Puis vient l’oxydation des chloramines par le chlore ; la quantité de chlore combiné
diminue et il n’y a pas encore de chlore libre. Quand toutes les chloramines sont détruites, la courbe
passe par un minimum. Ce point est appelé le point de rupture. Au-delà de ce point, la quantité de
chlore introduite se trouve sous forme de chlore libre dans l’eau, une partie ayant été consommée par
les chloramines, c’est pourquoi on parle de chlore « résiduel » ou de chlore « disponible »8. La
désinfection est assurée et la quantité de chlore libre doit être contrôlée.
Le point de rupture est atteint théoriquement pour un rapport massique chlore/azote égal à 7,6.
Toutefois ce rapport dépend dans une certaine mesure du pH.
La quantité de chlore à introduire dans le traitement d’une eau (de piscine) est donc fonction de la
contamination, ou grossièrement du taux de matières organiques (apportées par les baigneurs). La
quantité de chlore introduite doit être suffisante pour détruire les chloramines formées par action de
l’acide hypochloreux sur les matières organiques (quantité de chlore introduite telle que l’on se situe
7 On attribue, en grande partie, le pouvoir bactéricide d’un réactif à son pouvoir oxydant. Or, il n’y a pas en
solution aqueuse de corrélation entre les deux : les ions iodate, de fort pouvoir oxydant, ne sont pas bactéricides
alors que le bleu de méthylène, de faible pouvoir oxydant, l’est. En fait le pouvoir oxydant ne suffit pas, il faut
aussi que le réactif puisse traverser les membranes biologiques pour agir. En conséquence les espèces neutres
(ClOH) sont plus efficaces que les espèces chargées (ClO-).
8 A ne pas confondre avec le chlore actif. Le chlore actif désigne le chlore de l’hypochlorite qui est effectivement
actif mais aussi le chlore inactif comme oxydant présent sous forme d’ions chlorure ; l’expression chlore actif est
donc, malgré son utilisation généralisée en Europe, impropre (pour plus d’informations, voir TP C06 : eau de
Javel commerciale).
au-delà du point de rupture) et la quantité de chlore libre doit être contrôlée pour ne pas dépasser la
norme autorisée (concentration comprise entre 1 et 2 mg.L -1) ; une trop grande quantité de chlore libre
présente des inconvénients pour l’organisme humain.
Sous quelle forme le chlore est introduit pour la désinfection ? En quelle quantité ?
Pour la chloration des eaux de piscines privées, on utilise l’eau de Javel, l’hypochlorite de calcium ou
des dérivés chloro-cyanuriques ; dans tous les cas, la molécule active est l’acide hypochloreux ; le pH
d’une eau de piscine doit être compris entre 7,2 et 7,6. L’addition régulière du réactif générateur de
« l’hypochlorite » doit maintenir le chlore libre en permanence entre 1 et 2 mg.L -1. Les irritations des
yeux que l’on peut ressentir sont surtout dues aux chloramines, composés organochlorés résultant de
l’action de l’acide hypochloreux sur les matières organiques apportées par les baigneurs.
La désinfection par le dioxyde de chlore, très efficace, sans odeur ni irritation demande des dispositifs
de sécurité et un personnel qualifié qui la réservent aux installations importantes. Elle a l’avantage de
ne pas produire de chloramines.
- Dans une fiole jaugée de 1 litre, placer 10 mL de la solution 2 et des volumes de 0 à 120 mL de la
solution 1 ; on dispose ainsi d’échantillons contenant 0,5 mg.L -1 d’azote (sous forme d’ammoniac NH3)
et des quantités croissantes de chlore, de 0 à 12 mg.L -1
Échantillon 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Solution 2 (mL) 10 10 10 10 10 0,5 10 10 10 10 10 10
Solution 1 (mL) 0 10 2O 30 40 50 60 70 80 90 100 120
9 Il existe dans le commerce des « pastilles » de DPD prêtes à l’emploi ; se renseigner auprès des pisciniers (par
exemple Macherey-Nagel ou la Compagnie industrielle de filtration et d’équipement chimique (CIFEC).
L’absorbance obtenue pour cette solution, à la longueur d’onde de 510 nm, est équivalente à celle que
l’on obtiendrait à partir d’une solution de chlore à 2 mg.L -1, le diiode réagissant avec la DPD comme le
chlore libre.
Ces solutions doivent être utilisées dès leur préparation ; c’est pourquoi il est proposé de
réaliser immédiatement l’étalonnage par l’enseignant.
Référence bibliographique
De larges extraits de la publication citée ci-dessous sont reproduits ou adaptés dans la rédaction de
ce document.
DURLIAT G., VIGNES J.-L., JOFFIN J.-N., L’eau de Javel : sa chimie et son action biochimique. BUP
n°792, Vol. 91, mars 1997, p. 451-471.