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Réf.

: J6008 V1

Production d’antibiotiques
Date de publication :
10 septembre 2003 par biotechnologies
Date de dernière validation :
01 septembre 2016

Cet article est issu de : Archives

par Stéphane DELAUNAY, Emmanuel RONDAGS,


Pierre GERMAIN

Résumé Après une introduction sur les antibiotiques et les souches productrices, cet
article présente les caractéristiques générales de la physiologie des souches et quelques
types de programmes d’amélioration ciblée par modification des souches. Enfin il détaille
les étapes de la mise en oeuvre industrielle, afin d'obtenir une production de biomasse
efficace, c'est-à-dire rapide et propre à la synthèse d'antibiotique pendant le plus
longtemps possible.

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Production d’antibiotiques
par biotechnologies
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par Stéphane DELAUNAY


Maître de Conférences
Institut national polytechnique de Lorraine
Emmanuel RONDAGS
Maître de Conférences
Institut national polytechnique de Lorraine
et Pierre GERMAIN
Professeur
Institut national polytechnique de Lorraine

1. Différents antibiotiques et micro-organismes producteurs ........ J 6 008 – 2


1.1 Antibiotiques et métabolites secondaires ................................................. — 2
1.2 Classes d’antibiotiques ............................................................................... — 3
1.3 Micro-organismes producteurs .................................................................. — 3
2. Physiologie des souches productrices............................................... — 4
2.1 Différenciation morphologique .................................................................. — 4
2.2 Différenciation physiologique..................................................................... — 5
3. Amélioration par modification des souches .................................... — 6
3.1 Amélioration par mutagenèse aléatoire .................................................... — 7
3.2 Amélioration par génie métabolique ......................................................... — 8
3.3 Autres approches de l’amélioration de souches ....................................... — 9
4. Mise en œuvre industrielle.................................................................... — 10
4.1 Préparation de l’inoculum........................................................................... — 10
4.2 Mise en œuvre de la culture de production .............................................. — 10
4.3 Extraction et purification............................................................................. — 11
Références bibliographiques ......................................................................... — 12

epuis plus de 50 ans, l’antibiothérapie est le moyen de défense majeur con-


D tre les infections microbiennes. Parmi les fermentations industrielles, la
production d’antibiotiques est l’un des secteurs les plus importants. Le criblage
de souches productrices d’antibiotiques naturels a conduit à la production des
antibiotiques dits de première génération. Ces micro-organismes (champignons
et bactéries) se caractérisent généralement par une production qui ne se passe
qu’après la croissance active, pendant des phases de stress, phases correspon-
dant à une différenciation morphologique et à une différenciation physiologique.
Soumise à un contrôle très strict, la production par des micro-organismes non
génétiquement modifiés est toujours très faible. Très tôt, des programmes
d’amélioration de la production par modification des souches ont été mis en
œuvre. Ces programmes ont fait d’abord appel à la mutagenèse aléatoire. De
nombreux progrès ont été réalisés : élucidation des voies métaboliques de
synthèse des antibiotiques et des régulations de ces voies, étude des gènes
impliqués, compréhension des mécanismes de résistance des souches aux anti-
biotiques qu’elles produisent. Avec le développement du génie métabolique et

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du génie génétique, ces progrès permettent actuellement des modifications


génétiques mieux ciblées. Les techniques d’évolution moléculaire dirigée
permettent même d’envisager la production de nouveaux antibiotiques
hybrides par recombinaison de gènes entre diverses souches productrices.
Cet article se propose, après quelques généralités sur les antibiotiques et les
souches productrices, de développer les caractéristiques générales de la physio-
logie des souches, connaissances essentielles pour les programmes d’améliora-

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tion ciblée des souches et pour la conduite des procédés de production. La
production de l’antibiotique désiré sous forme purifiée nécessiterait un examen
des techniques d’extraction et de purification, mais ce point a été développé
dans l’article [J 6 470] avec l’exemple de la pénicilline ; il ne sera donc que briè-
vement rappelé.
Au début des années 2000, la plupart des antibiotiques utilisés sont des
dérivés semi-synthétiques. Ces antibiotiques dits de deuxième ou de troisième
générations sont produits à partir des antibiotiques naturels, par modifications
chimiques qui tiennent compte des études de la relation structure-activité. L’objectif
est d’améliorer la posologie, d’étendre le spectre d’activité, de lutter contre les
résistances acquises des micro-organismes cibles à éradiquer. Cette partie
chimique de la production d’antibiotiques ne sera pas développée ici.

Glossaire
Notations et symboles
Auxotrophie Exigence vis-à-vis de certains facteurs de
croissance ou d’acides aminés que la souche ne
Symbole Désignations peut naturellement pas synthétiser, ou qu’elle a
perdu la capacité de synthétiser par
modification génétique
ADP Adénosine diphosphate Eucaryote Organisme dont l’information génétique des
cellules portée par des chromosomes est
incluse dans un noyau vrai, entouré d’une
AMP Adénosine monophosphate membrane nucléaire (animaux, végétaux,
moisissures…)
ATP Adénosine triphosphate Gram Coloration permettant de caractériser les
bactéries en deux groupes, selon la nature de
leur paroi cellulaire : bactéries Gram + bleues,
CoA Coenzyme A bactéries Gram – roses
Haploïde Organisme ne comportant l’information
NAD Nicotinamide adénine dinucléotide génétique qu’à un seul exemplaire
(n chromosomes). Dans le cas des bactéries, n
égale 1
NADP Nicotinamide adénine dinucléotide phosphate Phénotype Caractère exprimé par une information
génétique portée par un gène
ppGpp Guanosine 3′- et 5′-diphosphate Pléiotropie Expression de plusieurs caractères différents à
partir de l’information portée par un seul gène
23S Coefficient de sédimentation en unités Procaryote Organisme dont les cellules possèdent une
Svedberg S (avec S = 10−13 s) information non incluse dans un noyau
(bactéries)

1. Différents antibiotiques lors de la phase appelée idiophase par opposition à la phase de


croissance active appelée trophophase. La production des méta-
et micro-organismes bolites secondaires n’est liée ni aux besoins de croissance, ni aux
besoins énergétiques des organismes producteurs. Les différences
producteurs essentielles entre métabolites primaires et secondaires sont
résumées dans le tableau 1.
Pour les définitions, le lecteur se reportera au tableau en fin
d’introduction. Nous restreindrons la définition des antibiotiques à l’ensem-
ble des métabolites secondaires produits par des micro-orga-
nismes, métabolites secondaires qui ont le pouvoir d’inhiber ou
1.1 Antibiotiques et métabolites de détruire d’autres micro-organismes.
secondaires
Les métabolites secondaires sont des molécules généralement Cette définition restrictive limite les antibiotiques aux seules
produites par des organismes après la phase active de croissance, actions antibactériennes et/ou antifongiques. Il est toutefois possi-

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ble d’assimiler aux antibiotiques des métabolites secondaires à


actions antivirales et antiparasitaires.
Tableau 1 – Principales différences entre les métabolites primaire et secondaire
Métabolite primaire Métabolite secondaire
Synthétisé pendant la trophophase (phase de croissance cellulaire) et Synthétisé lors de l’idiophase (phase de ralentissement et station-
présence tout au long du cycle cellulaire naire), apparition à un moment du cycle
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Nécessaire à la croissance Inutile pour la croissance


Rôle physiologique connu Rôle physiologique mal connu
« Turn-over » élevé « Turn-over » pratiquement nul
Produit dans des conditions de culture diverses Produit dans des conditions de culture bien définies
Ubiquitaire Spécifique
Enzymes à spécificité étroite Enzymes à spécificité large
Voies de synthèse simples et courtes Synthèse longue et complexe
Synthèse d’un produit parfaitement défini Synthèse d’un mélange de produits
Structure chimique généralement simple Structure chimique souvent complexe
Concentration élevée Concentration faible

Sont appelées également antibiotiques, les molécules produi- Divers antibiotiques (7 %)


tes à partir d’antibiotiques naturels par modifications chimiques dont chloramphénicol (0,1 %)
(antibiotiques de semi-synthèse ou d’hémisynthèse), ainsi que Aminoglycosides (2 %) Macrolides (24 %)
les antibiotiques hybrides produits par des souches recombi- Céphalosporines (27 %)
nées.

Fluoroquinolones (9 %)

1.2 Classes d’antibiotiques Tétracyclines (4 %)


Pénicillines à spectre large et moyen (27 %)

Parmi les dizaines de milliers de molécules à activité antibiotique Figure 1 – Les différentes classes d’antibiotiques en chiffre
découvertes et étudiées, une centaine seulement est utilisée en thé- d’affaires [données 1996 ; source IMS (International Marketing
rapie humaine et animale. La classification des antibiotiques tient Service]
compte de leur nature chimique, de leur origine, de leur spectre
d’action, des mécanismes moléculaires de leurs actions, des
mécanismes de résistance, des effets secondaires. Parmi les nom- protéique), le métabolisme respiratoire, le métabolisme intermé-
breux ouvrages présentant cette classification, nous en retiendrons diaire.
deux. L’un présente, sous ces divers aspects de classification, les
antibiotiques naturels [1]. L’autre développe, en outre, des exemples Exemple : les antibiotiques polyéniques se lient aux stérols mem-
d’antibiotiques de semi-synthèse [2]. branaires, perturbant la perméabilité des cellules eucaryotes. Très
actifs contre les levures et moisissures, leur usage thérapeutique est
La figure 1 présente le chiffre d’affaires relatif des différentes clas- limité à cause de leur nocivité sur les cellules animales et humaines,
ses d’antibiotiques. d’où la recherche active d’antibiotiques antifongiques non polyéniques.

■ Leur nature chimique est très variée et plus ou moins complexe.


Dans la structure de ces molécules cycliques apparaissent des grou- 1.3 Micro-organismes producteurs
pements de nature osidique, protéique, lipidique.
Exemple : la bacitracine correspond à un polypeptide ; les antibioti-
ques polyéniques sont de nature lipidique ; les macrolides tels que La grande majorité des antibiotiques est produite par des micro-
l’érythromycine sont constitués d’un cycle d’origine lipidique sur lequel organismes. Signalons cependant, sans nous y arrêter, l’intérêt
se greffent des dérivés osidiques. qu’offrent les plantes supérieures dans cette production. Parmi les
micro-organismes, les bactéries sont responsables d’environ 80 %
de la production, les champignons de 20 %.
■ Les spectres d’action sont plus ou moins étroits.
■ Les bactéries productrices appartiennent généralement à des
Exemple : le chloramphénicol est un antibactérien actif contre les genres soumis à différenciation.
bactéries Gram+ et Gram− ; l’érythromycine est antibactérien
● La classe des actinomycètes représente actuellement le groupe
(anti Gram+) et antiviral ; la mytomycine C est à la fois antibactérien
(anti Gram+ et Gram−), antitumoral, antiviral. responsable de la majeure partie des antibiotiques produits indus-
triellement. Ce sont des bactéries rencontrées sur tous les substrats
organiques. Les sols en sont le réservoir principal. Elles sont à Gram
■ Les sites d’action sont caractéristiques de chaque famille d’anti- positif et de morphologie très variée. Les souches productrices
biotiques. Bien que pas toujours connus avec certitude, six niveaux d’antibiotiques sont aérobies et de formes mycéliennes. Leur coeffi-
d’action sur les cellules cibles sont recensés : la paroi, la membrane, cient de Chargaff (G+C) est généralement compris entre 60 et 75 %.
le génome (perturbation de la réplication et de la transcription de Nota : le coefficient de Chargaff indique un rapport molaire (en pourcentage) : somme
l’ADN), la traduction de l’ARN messager (perturbation de la synthèse des bases guanine + cytosine, sur somme de l’ensemble des bases de l’ADN

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(adénine + cytosine + guanine + thymine). Ce coefficient caractérise une espèce d’orga-


nisme donnée.

Tableau 2 – Exemples d’antibiotiques produits par le genre Streptomyces


Classification Antibiotique Organisme producteur Cible et spectre d’activité
Streptomycine S. griseus
Aminoglycosides Spectinomycine S. spectabilis Synthèse protéique ; spectre large, inactifs sur les

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streptocoques et anaérobies stricts
Néomycine B S. fradiae
Chlortétracycline S. aureofaciens Synthèse protéique ; large spectre, mycobactéries,
Tétracyclines mycoplasmes
Oxytétracycline S. rimosus
Nystatine S. noursei Membrane cytoplasmique ; fongicides : levures,
Polyènes
Amphotéricine S. nodosus champignons

Spiramycine S. ambofaciens
Érythromycine S. erythreus
Rapamycine S. hygroscopicus
Synthèse protéique ; spectre étroit, bacilles Gram+
Macrolides Natamycine S. natalensis
et −, anaérobies stricts
Avermectine S. avermitilis
Tylosine S. fradiae
Oléandomycine S. hygroscopicus
Pristinamycine S. pristinaespiralis
Streptogramines Synthèse protéique ; Gram+, staphylocoques
Virginiamycine S. virginiae
Glycopeptides Vancomycine S. orientalis Synthèse pariétale ; Gram+, mycobactéries

Lincosamides Lincomycine S. lincolnensis Synthèse protéique ; Gram+ (staphylocoques, an-


aérobies)
Synthèse protéique ; utilisé contre la fièvre
Autres Chloramphénicol S. venezuela typhoïde, les méningites cérébro-spinales (Neisse-
ria meningitidis)

Les actinomycètes ont la capacité d’excréter de nombreuses enzy- dizaine d’organismes fongiques est exploitée industriellement. Ils
mes hydrolytiques (protéases, lipases, amylases, cellulases), et ainsi appartiennent aux genres Aspergillus, Penicillium, Cephalosporium,
de se développer à partir de substrats complexes polymérisés. Helminthosporium, Fusidium. Ce sont des champignons imparfaits
La classification des actinomycètes se fait à partir de critères mor- qui se reproduisent végétativement en formant des spores exogè-
phologiques et biochimiques. Dans ce groupe bactérien, le genre nes bourgeonnées (ou conidies). Selon les genres, ces conidies peu-
Streptomyces est le plus abondant et il est responsable de la vent être isolées, disposées en chaînettes ou en glomérules.
majeure partie de la production actuelle des antibiotiques. Le
tableau 2 illustre quelques exemples d’antibiotiques produits par
les Streptomyces avec cibles et spectres d’action. De nombreuses
recherches se sont récemment développées en vue de trouver de 2. Physiologie
nouveaux antibiotiques produits par des actinomycètes « rares »,
n’appartenant pas au genre Streptomyces. des souches productrices
● En dehors des actinomycètes, des bactéries du genre Bacillus
produisent des antibiotiques de nature essentiellement peptidique.
Ces bactéries à Gram positif, mobiles, aérobies, anaérobies ou aéro- Ce paragraphe concerne la presque totalité des souches produc-
anaérobies, se caractérisent par une différenciation prononcée, et trices, à l’exception des Pseudomonas. L’accent sera essentielle-
leur production d’antibiotiques est en relation avec cette différencia- ment mis sur les Streptomyces. S. coelicolor est considéré comme
tion. Leurs spores sont extrêmement résistantes aux conditions un modèle d’études pour la différenciation morphologique et phy-
défavorables. siologique [3] [4].
● Il convient cependant de signaler que certains Pseudomonas,
bactéries à Gram négatif, aérobies strictes, non filamenteuses, non
sporogènes, sans différenciation significative, produisent quelques 2.1 Différenciation morphologique
antibiotiques. Les Pseudomonas producteurs, comme les Bacillus et
les actinomycètes, se caractérisent par l’excrétion d’enzymes exo-
cellulaires hydrolytiques. 2.1.1 Cycles de développement
■ Les champignons ont été à l’origine de la découverte et de la pro-
duction industrielle d’antibiotiques. Le lecteur se reportera à ■ Sur milieu solide, le cycle de développement des actinomycètes
l’article « Pénicilline » de cette revue [J 6 470] (référence [16]). Plu- est très similaire à celui des champignons, à la différence essentielle
sieurs milliers d’antibiotiques produits par ces organismes sont que ces bactéries demeurent haploïdes durant tout le cycle. Sur
connus, mais un petit nombre seulement est commercialisé. Une milieu nutritif, la germination d’une spore à partir de laquelle croît

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Développement du
mycélium basal

18 h 30 h
Germination
10 h
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2 jours

Spore

Sporulation 3 jours Développement


du mycélium aérien

5 à 10 jours

Figure 2 – Cycle de développement de Streptomyces sur milieu solide

un tube germinatif constitue le point de départ du cycle. De ce tube Certains des gènes bld contrôlent la synthèse d’une protéine
se développe un réseau constitué d’hyphes qui se ramifient, for- extracellulaire associée à la surface du mycélium aérien et aux spo-
mant un mycélium primaire qui s’étend sur et dans le milieu. À par- res. Chez les mutants défectifs, l’ajout de cette protéine aux cultures
tir de ce mycélium primaire s’élève par croissance apicale un restaure le mycélium aérien, mais pas la production d’antibiotique.
mycélium secondaire aérien de forme variable selon les genres bac-
tériens. Suivent un cloisonnement des hyphes aériens, un épaissis- À ce réseau de régulation génétique complexe peut s’ajouter une
sement des cloisons et, finalement, la libération de spores régulation par les sources d’énergie des milieux. Chez certains des
(figure 2). Ces formes cellulaires permettent la survie dans des mutants bld, le phénotype défectif ne s’exprime que sur milieu con-
conditions défavorables à la croissance végétative. tenant une source d’énergie rapidement métabolisable (glucose,
par exemple), mais pas avec des sources d’énergie plus lentement
■ En conditions de culture immergée (milieu liquide), la différencia- métabolisées.
tion morphologique est moins caractéristique. On observe des fila-
ments mycéliens libres et plus ou moins ramifiés, des Les effets des mutations bld sont généralement pléiotropes. Les
enchevêtrements de filaments et des pelotes de mycélium d’aspect mutants sont affectés à la fois dans la synthèse de mycélium aérien,
divers. Le type de morphologie est fonction de nombreux paramè- d’antibiotique et de polymères de réserve (absence d’accumulation
tres tels que le titre de l’inoculum, l’oxygénation du milieu, les con- intracellulaire de tréhalose et de glycogène).
traintes de cisaillement, la composition du milieu de culture, le type
de fermenteur, etc. La sporulation est un phénomène rarement ■ Les mutants whi ne montrent leur phénotype qu’après la crois-
observé en milieu liquide. Des techniques utilisant la microscopie à sance du mycélium aérien. Ces mutants ne sont affectés que dans
épifluorescence et l’analyse d’images ont permis de corréler pro- les étapes tardives de la morphogenèse. Les effets ne sont pas
duction d’antibiotiques et modifications morphologiques dans les pléiotropes : ils produisent des antibiotiques et un mycélium végé-
conditions industrielles en cultures immergées [5] [6]. tatif intact. Actuellement, neuf gènes sont connus pour être impli-
qués dans cette étape tardive de sporulation.

2.1.2 Génétique de la différenciation


morphologique
2.2 Différenciation physiologique
Différents mutants de S. coelicolor bloqués dans la différenciation
morphologique ont été isolés : les mutants bld (bald ou chauve), ne
produisant pas de mycélium aérien sur milieu solide, et les mutants
whi dépigmentés (white ou blanc), ne produisant pas de spores Nous nous limiterons au seul aspect de la différenciation physio-
et/ou le pigment gris associé aux spores matures. logique liée à la production d’antibiotiques.

■ Les mutants bld forment des colonies d’aspect lisse. On En milieu liquide, la production des antibiotiques est générale-
connaît une douzaine de gènes bld contrôlant ce phénotype. En ment dissociée de la croissance rapide. Elle commence lorsque le
outre, chez S. coelicolor, d’autres gènes sont impliqués dans taux de croissance est faible et peut se poursuivre un certain temps
ce phénotype : des mutants bloqués dans la synthèse de ppGpp à taux de croissance nul. Elle nécessite la synthèse d’enzymes spé-
sont de phénotype bald sur un milieu limité en azote. Chez S. cifiques au métabolisme secondaire, synthèse correspondant à la
griseus, des mutants défectifs pour la production du facteur A ne différenciation physiologique. La compréhension de la régulation de
produisent ni mycélium aérien ni métabolites secondaires. l’expression des gènes du métabolisme secondaire est importante,
Nota : le facteur A est une petite molécule diffusible (une butyrolactone) qui agit comme tout comme la compréhension de la régulation de l’activité de ces
signal intercellulaire. enzymes par les constituants du milieu.

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2.2.1 Organisation et expression des gènes


de biosynthèse Butyrolactone

Les gènes de biosynthèse des enzymes du métabolisme secon- Gènes régulateurs Carences
daire sont de deux types : des gènes régulateurs pléiotropes contrô- pléiotropes nutritionnelle
lant à la fois la différenciation morphologique et la différenciation Stress
physiologique, et des gènes régulateurs spécifiques, contrôlant spé- ppGpp
cifiquement l’expression des gènes de biosynthèse. Gènes régulateurs

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Les gènes de biosynthèse, chez les Streptomyces, sont générale- spécifiques
ment regroupés sur le chromosome sous forme de « clusters » ou
groupes de gènes. Dans la plupart des cas, ces gènes sont situés à
Répression et/ou
proximité des gènes de résistance aux antibiotiques produits, et des Gènes de
inhibition
gènes régulateurs spécifiques. Chez S. ambofaciens, par exemple, biosynthèse
nutritionnelle
les gènes de biosynthèse de spiramycine (srmG) ainsi que le gène
de résistance (srmB) et le gène de régulation spécifique (srmR) sont
regroupés dans une région chromosomique d’environ 40 kilobases. Production
d'antibiotiques
■ Parmi les gènes régulateurs pléiotropes, les gènes bld ont déjà
été mentionnés. S’y ajoutent les gènes contrôlant la production de
molécules-signal endogènes diffusibles telles que le facteur A (buty- Figure 3 – Facteurs potentiels du déclenchement de la biosynthèse
rolactone), ou d’effecteurs nucléotidiques phosphorylés, comme le des antibiotiques chez les Streptomyces
nucléotide ppGpp. Butyrolactone et ppGpp ne sont significative-
ment produits que pendant les phases de croissance limitée par des
déficiences nutritionnelles. ■ Régulation par le phosphate
■ Les gènes régulateurs spécifiques dont l’expression est contrôlée La synthèse de nombreuses familles d’antibiotiques est suppri-
par les gènes régulateurs pléiotropes agissent en activant la trans- mée en présence de fortes concentrations en phosphate. Le phos-
cription des gènes de biosynthèse. phate réprime directement la biosynthèse des enzymes du
Ces régulations complexes sont schématisées sur la figure 3. métabolisme secondaire. Il contrôle également la concentration en
adénylates intracellulaires (AMP, ADP, ATP).
Exemple : la synthèse de macrolides nécessite un fort abaisse-
2.2.2 Régulation de la biosynthèse ment de la concentration totale en adénylates.
par les constituants du milieu

La composition du milieu peut réguler la production en réprimant 2.2.3 Mécanismes de résistance des souches
les gènes de biosynthèse des enzymes du métabolisme secondaire productrices
et/ou en inhibant leur activité. Les milieux doivent permettre de
fournir sans limitation les précurseurs nécessaires aux synthèses
La production d’antibiotiques implique que le micro-organisme
des antibiotiques, substrats dérivant du métabolisme primaire, tout
possède un mécanisme de résistance à ces métabolites. Les gènes
en évitant ces phénomènes de répression et/ou d’inhibition.
de résistance et les gènes de biosynthèse, situés dans le même
■ Régulation catabolique par la source carbonée « cluster », sont transcrits simultanément, ce qui permet au micro-
organisme de se protéger lorsqu’il produit l’antibiotique.
Les fortes concentrations de glucose ou d’autres sources carbo-
nées rapidement catabolisables sont généralement défavorables à Différents mécanismes de résistance ont été décrits. Chez les
la production. Par contre, des sources d’énergie lentement cataboli- Streptomyces producteurs de macrolides, le gène de résistance
sables, faisant intervenir les amylases exocellulaires, sont favora- code pour la synthèse d’une enzyme modifiant, par une méthyla-
bles (dextrines, amidon, par exemple). tion, l’ARN ribosomal 23S, cible de l’antibiotique [7].
■ Régulation par les acides gras La résistance peut aussi être due à une modification de la perméa-
bilité membranaire. Certains gènes de résistance codent pour la
Dans l’exemple de la synthèse de macrolides, les enzymes du
synthèse de protéines de transport permettant l’excrétion active de
métabolisme secondaire utilisent les acyl-CoA comme précurseurs
l’antibiotique.
du cycle lactonique (acétyl-CoA, propionyl-CoA, butyryl-CoA). Les
huiles végétales constituent une excellente source d’acides gras, De nombreux micro-organismes synthétisent aussi des enzymes
sans répression catabolique. Le potentiel des lipases exocellulaires qui inactivent les antibiotiques par phosphorylation, acétylation,
est utilisé. adénylation ou glycosylation.
La stimulation par les acides gras est aussi associée à une modifi-
cation de la composition lipidique des membranes cellulaires qui
favorise l’assimilation d’autres précurseurs d’intérêt tels que les aci-
des aminés. 3. Amélioration
■ Régulation par la source azotée par modification
Les fortes concentrations des milieux en ammonium ou en com-
posés azotés rapidement métabolisés suppriment la biosynthèse de des souches
nombreux antibiotiques. Les ions ammonium imposent un taux de
croissance élevé, répriment les gènes de biosynthèse de nombreu-
ses enzymes impliquées dans la dégradation des acides aminés, Les stratégies d’amélioration visent à accroître la concentration
inhibent certaines de leurs activités. Lors des phases de production, finale en produit, à réduire la production de cométabolites indésira-
les ions ammonium doivent être à concentration limitante ou rem- bles. Des considérations telles que le mode d’utilisation des souches
placés par des sources d’azote lentement métabolisées. productrices sont aussi prises en compte. Deux grandes catégories

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Amélioration de la Micro-organismes
production d'antibiotiques producteurs

Mutagenèse aléatoire Mutagenèse


Génie métabolique
et criblage

Manipulation des
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gènes de structure
Sélection des mutants
Production Enrichissement
Manipulation du hyperproducteurs
métabolisme primaire

Manipulation des Culture Isolement


gènes de régulation des mutants

Figure 4 – Les deux principales approches pour l’amélioration


Figure 5 – Principales étapes d’une stratégie d’amélioration
de la production d’antibiotiques d’après [10]
de souches par mutagenèse aléatoire

d’approches sont utilisées pour l’amélioration : la mutagenèse aléa-


Lorsqu’une mutagenèse est envisagée, il est nécessaire d’établir
toire et le génie métabolique (figure 4).
la concentration, le temps d’exposition ainsi que les conditions de
La mutagenèse aléatoire ne nécessite pas de connaissance préa- traitement à utiliser qui permettent d’obtenir la plus forte proportion
lable, ni du génome ni de la physiologie des souches traitées. La du type de mutants recherchés parmi les cellules ayant survécu à la
mutagenèse induit des modifications génétiques au sein du mutagenèse. Ces paramètres sont généralement ceux qui permet-
génome sans que la localisation de ces dernières puisse a priori être tent d’obtenir une mutation unique par cellule. À nombre de muta-
connue. tions par cellule supérieur, dans la majorité des cas vont apparaître
des mutations qui annuleront les effets bénéfiques qu’aurait pu
Le génie métabolique peut être défini comme l’amélioration des avoir une mutation simple [1]. Il n’existe malheureusement pas de
potentialités d’une cellule par la manipulation de fonctions enzyma- moyens autres que l’expérience pour prévoir ces paramètres de
tiques bien ciblées, grâce à l’emploi de la technologie de l’ADN mutagenèse. Il est généralement admis qu’un couple temps
recombiné [8] ; il repose sur une connaissance précise des fonctions d’action/dose conduisant à une mortalité de 90 à 99 % est favorable
cellulaires à modifier ainsi que des gènes qui leur sont associés. à l’apparition de mutants intéressants parmi les cellules survivantes.
Bien que le génie métabolique ait tendance à être considéré
comme la méthodologie de pointe, la mutagenèse aléatoire, qui a ■ Fusion de protoplastes
permis à ce jour l’obtention de la quasi-totalité des améliorations de
la production industrielle des antibiotiques, continue à être utilisée Un protoplaste est une cellule dont la paroi a été éliminée par trai-
dans les laboratoires de développement des procédés. tement enzymatique. En présence d’agent tel que le polyéthylène-
glycol, les protoplastes peuvent fusionner transitoirement. Lors de
cette étape, les génomes peuvent se rassembler et subir des recom-
binaisons génétiques. L’étape de fusion est suivie d’une régénéra-
3.1 Amélioration par mutagenèse tion des cellules viables (reconstitution de la paroi), étape la plus
délicate de l’ensemble de la manipulation.
aléatoire
Les fusions de protoplastes peuvent être intra ou interspécifiques,
voire intergénériques, ce qui permet un brassage de gènes impor-
L’un des exemples les plus significatifs de l’apport de cette métho- tant et la possibilité de transférer une variété importante de gènes
dologie est l’amélioration de la production de pénicilline, passée potentiellement intéressants. Cette méthode est utilisée avec les
progressivement de quelques milligrammes à 40 grammes par litre micro-organismes procaryotes (Bacillus, Streptomyces) ainsi
(cf. article [J 6 470], référence [10]). L’amélioration comporte plu- qu’avec les champignons producteurs mais, chez les eucaryotes,
sieurs étapes (figure 5). elle est plus délicate à réaliser à cause du noyau protégeant le
génome.

3.1.1 Mutagenèse Pour plus de détails, se reporter à la référence [9].

L’introduction des mutations au sein du génome des micro-orga-


nismes d’intérêt se réalise le plus souvent par action d’agents muta- 3.1.2 Enrichissement
gènes de nature chimique ou physique, mais aussi parfois en
réalisant un brassage génétique entre souches présentant un poten-
La réalisation ou non d’une étape d’enrichissement en mutants
tiel génétique différent, notamment grâce à la technique de fusion
dépend des propriétés recherchées chez ces derniers. Cette étape
des protoplastes. Pour plus de détails, consulter la référence [9].
consiste à jouer sur les conditions environnementales du milieu
■ Utilisation d’agents mutagènes dans lequel les cellules mutagenisées sont introduites, de façon à
favoriser les mutants recherchés ou, inversement, à défavoriser les
De très nombreux agents physiques ou chimiques, dont l’action cellules ne présentant pas le phénotype désiré. Le choix d’un crible
sur le génome diffère, sont utilisables (rayonnements UV, gamma, de sélection facilement utilisable est primordial.
X, N-méthyl-N′-nitro-N-nitrosoguanidine ...) [9]. Ils peuvent être
utilisés avec succès sur une grande variété d’organismes : cellules Parmi les enrichissements en mutants qui peuvent conduire à
bactériennes, protoplastes de cellules procaryotes ou eucaryotes, l’amélioration de souches productrices d’antibiotiques, citons les
spores [10]. deux exemples suivants :

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— la recherche de mutants présentant une résistance accrue vis- 3.2.1 Différentes cibles de modification
à-vis de l’antibiotique produit ; du métabolisme
— la recherche de mutants présentant un facteur d’auxotrophie
s’avérant bénéfique pour la production de certains antibiotiques. La première étape consiste à identifier dans le réseau métaboli-
Ainsi, des mutants de S. griseus auxotrophes pour la vitamine B12 que la (ou les) étape(s) enzymatique(s) à modifier pour espérer
sont-ils hyperproducteurs de streptomycine [11]. atteindre le but recherché. En ce qui concerne la production d’anti-
Dans le premier exemple, l’enrichissement en mutants sera sim- biotiques, les cibles visées sont rapportées figure 7.
plement réalisé en plaçant les micro-organismes ayant subi la muta- ■ Voie de biosynthèse de l’antibiotique

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genèse en présence de concentrations croissantes d’antibiotique.
Dans le second exemple, une grande proportion des cellules pourra Il est possible d’amplifier un gène de biosynthèse si l’étape qu’il
être éliminée en plaçant les cellules mutagenisées dans un milieu contrôle est jugée limitante, voire tout le cluster portant les gènes de
minimal (milieu dans lequel les cellules auxotrophes ne pourront biosynthèse. Une seconde approche consiste à éliminer les voies de
pas se développer), en présence d’un antibiotique détruisant uni- biosynthèse annexes à celle du métabolite dont on désire favoriser
quement les cellules en croissance, donc les non auxotrophes. la production, voies nuisibles dans la mesure où elles détournent
L’antibiotique permettant cette sélection sera une pénicilline dans le des précurseurs de la voie voulue et où elles peuvent conduire à des
cas des bactéries, la nystatine dans le cas des champignons. productions de molécules indésirables compliquant les étapes ulté-
rieures d’extraction et de purification.
Lorsqu’il est réalisable, l’enrichissement permet d’accroître consi-
dérablement la proportion en mutants désirés parmi la population ■ Métabolisme primaire
microbienne venant de subir la mutagenèse. Certains précurseurs de l’antibiotique, issus du métabolisme pri-
maire, peuvent s’avérer être en concentration limitante pour une
bonne production. Aussi peut-il être judicieux d’accroître leur titre
3.1.3 Sélection des mutants hyperproducteurs intracellulaire en modifiant certaines activités enzymatiques du
métabolisme primaire qui produisent ces précurseurs ou qui les uti-
Cette dernière phase intervient après une étape d’isolement des lisent.
différents clones obtenus après mutagenèse et enrichissement. Les La biosynthèse d’antibiotique nécessite également des cofacteurs
différents clones doivent pouvoir être testés individuellement afin (NAD, NADP...) dont la concentration peut aussi se révéler limitante.
d’identifier ceux qui présentent les caractères recherchés. Cette Des modifications conduisant à une augmentation de leur concen-
étape de caractérisation peut s’effectuer « manuellement », clone tration peuvent être bénéfiques.
par clone, ou bien être automatisée. D’un coût d’investissement
relativement élevé, l’automatisation de toutes les opérations de ■ Régulation de la voie de biosynthèse
repiquage individuel des clones, de transfert de clones entre les dif- On recherchera à introduire des copies supplémentaires du gène
férents milieux nécessaires à la caractérisation, d’extraction et de d’un régulateur positif ou à éliminer un gène d’un régulateur négatif.
dosage de l’antibiotique produit, est cependant beaucoup plus
rapide que les opérations manuelles. ■ Résistance contre l’antibiotique
En accroissant la concentration intracellulaire de l’enzyme res-
Dans le cadre d’une procédure d’amélioration de souche, plu-
ponsable de cette résistance, la souche supportera des concentra-
sieurs cycles de mutagenèse-sélection sont généralement réalisés
tions intracellulaires plus élevées de l’antibiotique, ce qui
en faisant varier la nature de l’agent mutagène utilisé. En effet, aux
augmentera la production.
divers types de mutagènes sont associés différents dommages dans
le génome, donc de modifications phénotypiques potentiellement Exemple : méthylase des Streptomyces modifiant la cible aux
variées. macrolides des ARN ribosomaux 23S.
■ Excrétion de l’antibiotique
Certains antibiotiques sont excrétés hors de la cellule grâce à des
3.2 Amélioration par génie métabolique protéines membranaires de transport. Une amplification des gènes
codant pour ces protéines peut conduire à une amélioration de la
production de l’antibiotique.
Cette procédure peut être décomposée en plusieurs étapes
(figure 6).
3.2.2 Techniques de modification génétique
Avant d’envisager toute modification, il est nécessaire de s’assu-
rer que le gène des enzymes que l’on désire modifier est disponible.
Modification des Des banques de données répertorient les gènes isolés et identifiés.
capacités de la cellule Les projets de séquençage de génomes ont récemment permis une
augmentation considérable de ces banques.
Modification du Si le gène de la souche à modifier est indisponible, il faut envisa-
métabolisme cellulaire ger soit une étape de clonage de ce gène, soit l’utilisation d’un gène
répertorié codant pour la même activité, mais provenant d’une
espèce proche, le résultat de cette seconde stratégie étant plus aléa-
toire.
Recombinaisons
Production Base de données ■ Amplification d’une activité enzymatique
génétiques
L’amplification peut être réalisée soit en augmentant le nombre de
copies du gène de l’enzyme, soit en substituant au promoteur natu-
(Modèle
métabolique) rel du gène un promoteur « fort » qui permettra un accroissement
de la transcription du gène, donc, généralement une augmentation
de la quantité d’enzyme. Les amplifications s’avèrent plus stables
Figure 6 – Principales étapes d’une stratégie d’amélioration lorsque les copies surnuméraires du gène d’intérêt sont intégrées
de souches par génie métabolique (d’après [12]) dans le chromosome.

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Accroître la synthèse des Accroître l'efficacité du


précurseurs issus du système de résistance à
métabolisme primaire l'antibiotique produit

Métabolisme
primaire Métabolisme Système de
secondaire résistance à
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l'antibiotique produit
I

I P1 I I I A D

I P2 D

I
D

Membrane

A
Accroître l'activité d'une, voire Augmenter la Éliminer les étapes
de la totalité des enzymes vitesse d'excrétion enzymatiques entraînant
intervenant dans la voie de de l'antibiotique une dégradation de
biosynthèse de l'antibiotique l'antibiotique

I intermédiaires
Px précurseurs issus du métabolisme primaire
A antibiotique
D produits de dégradation

Figure 7 – Différentes cibles d’une stratégie d’amélioration de souche par génie métabolique

■ Élimination des voies annexes 3.3 Autres approches de l’amélioration


Pour éliminer une voie de biosynthèse annexe à celle que l’on de souches
souhaite favoriser, il suffit d’inactiver la première enzyme de cette
voie, soit en enlevant une partie ou la totalité de son gène, soit en
intégrant dans ce gène un fragment d’ADN exogène, ce qui bloquera 3.3.1 Évolution moléculaire dirigée
la synthèse de l’enzyme.
Cette technique récente se positionne entre le génie métabolique
Le lecteur pourra se reporter à la référence [13] pour appliquer les et la mutagenèse aléatoire. L’introduction de recombinaisons est
protocoles nécessaires à ces manipulations. effectuée de manière aléatoire grâce à une technique de PCR (Poly-
merase Chain Reaction) [19]. Les recombinaisons ont lieu non plus
Après ces modifications génétiques, il est nécessaire de vérifier si au niveau du génome dans sa globalité, mais au sein d’un seul
elles conduisent à une amélioration de la production. Si oui, la nou- gène, voire entre plusieurs gènes issus de divers organismes, mais
velle souche pourra être utilisée en production. Sinon, les données codant pour la même activité enzymatique. Après transformation
physiologiques fournies par la souche transformée pourront guider des cellules avec les nouveaux gènes ainsi obtenus, il faut effectuer
une nouvelle stratégie de modification génétique (cf. figure 6). une recherche et une sélection des mutants présentant le caractère
phénotypique désiré.
Cette technique est à l’origine de plusieurs applications quant à
l’amélioration de la production d’antibiotiques.
3.2.3 Apport des modèles métaboliques
Exemple : accroissement de la résistance du producteur à son anti-
biotique, par modification des gènes codant pour la synthèse d’enzy-
Dans le cas où l’amplification de la voie de biosynthèse d’un anti- mes de résistance. Ainsi, une β-lactamase d’Escherichia coli modifiée
biotique est recherchée, il est utile d’identifier, en préalable à la a permis de multiplier par 32 000 la concentration minimale inhibitrice
modification génétique, l’étape la plus limitante de la voie de bio- à la céfataxime [14].
synthèse. L’étape limitante est la réaction enzymatique qui va impo-
ser sa propre cinétique à l’ensemble de la biosynthèse, le flux global Il est également possible de modifier les caractéristiques d’enzymes
de biosynthèse étant égal à celui imposé par l’étape présentant le de biosynthèse des antibiotiques afin de synthétiser de nouveaux
plus faible flux. produits qui pourront éventuellement présenter une activité antibio-
tique.
Les modèles métaboliques établis en intégrant les paramètres
extracellulaires de croissance, de consommation de substrats,
d’excrétion de produits et les paramètres intracellulaires de 3.3.2 Synthèse de nouveaux antibiotiques
régulation connus permettent d’estimer les flux intracellulaires au
niveau de chaque étape d’une voie de biosynthèse, donc d’identifier Dès les années 1960, des mutants présentant une interruption de
l’étape limitante de cette voie. la voie de biosynthèse d’un métabolite secondaire par inactivation

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d’une étape enzymatique ont été obtenus par mutagenèse aléatoire. sieurs années. Ces techniques, impliquant d’importants refroidisse-
Ces mutants sont incapables de produire ce métabolite sauf s’ils ments ou un vide poussé, induisent une forte mortalité. Pour limiter
trouvent dans le milieu de culture le précurseur qu’ils ne peuvent ces effets, l’utilisation de cryoprotecteurs tels que le lait écrémé, le
plus synthétiser. En faisant varier la nature du précurseur ajouté glycérol ou le DMSO (diméthylsulfoxyde) est recommandée.
dans le milieu, de nouveaux antibiotiques ont été obtenus. Ce pro-
cédé de synthèse de nouveaux antibiotiques, reposant sur une spé- Pratiquement, il faut partir d’une culture en milieu liquide en
cificité assez lâche des enzymes de biosynthèse, est appelé phase exponentielle de croissance, y ajouter une solution stérile du
mutasynthèse [1]. cryoprotecteur (10 à 20 % en volume). La suspension homogénéisée
est répartie dans des récipients identiques utilisés pour la congéla-

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La biosynthèse combinatoire consiste à regrouper des activités tion ou la lyophilisation. Une variante peut être la remise en suspen-
enzymatiques issues de micro-organismes différents dans une seule sion dans la solution stérile de cryoprotecteur (10 à 20 % en volume)
cellule. Cette approche permet d’envisager la production de nou- des cellules présentes à la surface d’une gélose nutritive avec
veaux antibiotiques. Elle a été utilisée avec succès pour produire de ensuite même répartition dans plusieurs récipients à traiter comme
nouveaux polycétides [15]. précédemment.
L’évolution moléculaire dirigée utilisée conjointement à la biosyn-
thèse combinatoire permet d’envisager une extension considérable ■ Conservation sous forme de spores
des possibilités de créer des antibiotiques originaux. Ces techniques
s’ajoutent aux techniques chimiques de production d’antibiotiques La plupart des souches utilisées peuvent sporuler sur milieux soli-
d’hémisynthèse. des. Cette forme de résistance accrue des cellules doit être utilisée
pour la conservation, sous forme de stocks congelés, de ces spores.
Après sporulation sur un milieu solide adéquat, les spores et le
mycélium peuvent être décrochés de la gélose par une solution sté-
4. Mise en œuvre industrielle rile d’eau physiologique. La suspension est filtrée sur coton cardé
pour éliminer le mycélium, additionnée de cryoprotecteur puis
répartie dans plusieurs flacons et traitée de la même façon que les
Les performances d’une culture en vue de la production indus- cellules végétatives.
trielle d’antibiotiques tiennent dans la capacité technologique à
atteindre les trois objectifs majeurs suivants :
— obtenir une croissance efficace aboutissant à une quantité 4.1.2 Propagation
importante de biomasse dans un état physiologique compatible
avec la production. Dans certains cas, une très bonne croissance
peut aboutir à la production d’une biomasse impropre à la synthèse Il ne faut pas utiliser des cellules ayant déjà atteint l’idiophase,
d’antibiotique ; mais recourir aux stocks en dormance et assurer, pendant toutes les
— maintenir pendant une période la plus longue possible la bio- phases conduisant à l’inoculum final, des croissances actives. La
masse dans des conditions de production optimales ; propagation consiste en une série de cultures appelées précultures
— faire en sorte que ces phases de croissance, de production, dans des milieux de volume croissant. Les volumes d’inoculum de
ainsi que les étapes d’extraction et de purification soient les moins chaque nouvelle culture représentent généralement entre 2 et 10 %
coûteuses possibles. du nouveau volume réactionnel. Des « accidents » de propagation
sont fréquents (contaminations, croissance anormale). Pour éviter
les retards dus à ces accidents, les cultures de faibles volumes sont
souvent dédoublées.
4.1 Préparation de l’inoculum
Outre l’objectif de croissance rapide et de production de biomasse
importante, un des buts de la propagation est d’amener les cellules
dans un état physiologique propice à une bonne production, même
L’inoculum se définit comme l’ensemble de la biomasse si l’on évite la production d’antibiotique pendant ces phases. Pour
nécessaire pour ensemencer un fermenteur de production de réaliser ce « placement » physiologique des cellules, il n’est pas rare
grande capacité. d’observer une succession de précultures ayant lieu dans des
milieux différents, convergeant progressivement vers la composi-
tion du milieu de production.
Sa préparation est basée sur la mise en culture de souches géné-
tiquement modifiées dont il convient d’assurer la stabilité, prélevées
à partir d’un stock, dans des volumes de culture croissants. Il con-
vient donc de bien conserver les souches et de bien les propager. 4.2 Mise en œuvre de la culture
de production
4.1.1 Conservation des souches
4.2.1 Mode de culture
De nombreux organismes producteurs d’antibiotiques sont géné-
tiquement très instables. Par exemple, les Streptomyces présentent
des taux de mutation pour certains gènes oscillant entre 0,1 et 1 %. Les procédés de production font appel au mode de culture discon-
Il est donc totalement exclu de recourir aux repiquages successifs tinu ou au mode semi-continu (cf. article [J 6 606], référence [17]).
sur milieux nutritifs pour conserver les souches. Les techniques uti- En mode discontinu, la production se poursuit jusqu’à épuisement
lisées doivent permettre des conservations stables à long terme, du milieu en précurseurs de biosynthèse ou jusqu’à l’apparition de
sans multiplication cellulaire. conditions physiologiques défavorables. En mode semi-continu, la
production peut se poursuivre par apport progressif de ces sources
■ Conservation de cellules végétatives de précurseurs. L’apport en mode semi-continu d’éléments dont il
Les procédés de lyophilisation et de congélation à basse (jusqu’à faut rigoureusement contrôler la concentration peut permettre aussi
− 70 ˚C) ou très basse température (jusqu’à − 196 ˚C) permettent de d’éviter des phénomènes de répression et/ou d’inhibition de pro-
conserver des échantillons dont la durée de vie peut excéder plu- duction.

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4.2.2 Composition et préparation du milieu La formulation d’un milieu de culture optimal pour la production
n’est donc pas simple. En s’appuyant sur des critères physiologi-
ques et économiques, la formulation d’un milieu de production fera
Le milieu de production doit d’abord permettre d’assurer une appel à une procédure d’optimisation mettant en œuvre la planifica-
importante croissance pour conduire à une concentration élevée en tion expérimentale [18] [20].
cellules au moment de la production. Il doit permettre ensuite
d’assurer la maintenance de la vitalité des cellules et la production La stérilité des milieux de préculture et de production est un impé-
optimisée de l’antibiotique. Un tel milieu doit donc fournir des sour- ratif absolu dans ce type de fermentation (se reporter à
ces d’énergie, de carbone, d’azote, de phosphate, des minéraux, des l’article [J 6 006].
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vitamines, des oligoéléments, et assurer les conditions physico-


chimiques désirées (pH, température, oxygénation, potentiel
redox).
4.3 Extraction et purification
Le coût de la production est lié pour 15 à 25 % aux constituants du
milieu de culture. La production industrielle va donc chercher à utili-
ser des substrats complexes et bon marché, tout en veillant au maxi- À l’issue de la fermentation, l’antibiotique est présent à des con-
mum à la constance de la qualité de ces substrats. En effet, selon centrations relativement faibles dans un mélange polyphasique
l’origine des mêmes matières premières, la production avec une complexe comprenant les cellules, des éléments du milieu et de
même souche, dans les mêmes conditions opératoires, peut varier nombreux métabolites. Les étapes d’extraction et de purification
de 20 %. représentent une part importante du coût du procédé. Devant la
Nous ne pouvons pas être exhaustif sur ce point ; seuls quelques diversité des organismes producteurs, des milieux de production,
constituants vont être analysés en regard des caractéristiques phy- des propriétés physico-chimiques des antibiotiques, il est impossi-
siologiques développées précédemment. ble de définir un protocole standard d’extraction-purification. Ne
sera présentée qu’une méthodologie générale permettant de définir
■ Les oses, les polyholosides, les acides gras, les triglycérides et, une succession d’étapes efficace. Un exemple a été développé dans
dans une moindre mesure, les protides fournissent les sources de la référence [16].
carbone et d’énergie. Lors de la phase de croissance initiale, il est Il conviendra, après chaque étape, de quantifier l’antibiotique et
possible d’ajouter des sources d’énergie rapidement catabolisables de déterminer son activité pour apprécier le rendement de l’étape et
assurant une croissance rapide, telles que le glucose, mais il faudra la dégradation du produit.
veiller à ce que ce substrat soit totalement utilisé avant la phase de
production pour éviter les phénomènes de répression catabolique
de production. Pendant cette phase, les cellules utiliseront des sour- 4.3.1 Séparation solide/liquide
ces d’énergie et de carbone lentement catabolisables (lactose, par
exemple, pour la production de pénicilline, dextrines ou amidon
pour la production de macrolides...). Les acides gras et leurs dérivés Cette étape de séparation des cellules et du moût, par
sont souvent apportés par les huiles, sous forme de triglycérides. décantation, filtration ou surtout centrifugation, n’est pas obliga-
Les huiles les plus utilisées sont les huiles de soja, d’arachide, de toire, mais elle est souvent pratiquée. Une quantité élevée d’antibio-
maïs, de colza. Outre leur rôle de source d’énergie et de précurseurs tique est associée aux cellules, d’autant plus que sa concentration
éventuels (pour les macrolides, les polyènes), les acides gras exer- est élevée. Ainsi, l’antibiotique pourra être extrait des fractions
cent des actions physico-chimiques appréciées : formation d’émul- liquide et solide obtenues.
sions, réduction des mousses, modification de la perméabilité
membranaire.
4.3.2 Extraction primaire
■ L’ammonium est sans doute la meilleure source d’azote pour
assurer une croissance rapide. Comme pour le glucose, il peut être À partir de la culture, s’il n’y a pas eu séparation préalable (ou des
avantageux d’ajouter des sels d’ammonium pour favoriser cette phases solide ou liquide), une extraction par un solvant approprié
phase mais, pour éviter des baisses de production liées souvent à est effectuée, après traitement par un acide ou une base, afin d’obte-
une concentration trop élevée en ions ammonium, il faut surveiller nir une forme ionique de l’antibiotique. Il s’agit donc d’une extrac-
attentivement cette concentration lors de la phase de production. Si tion solide/liquide ou liquide/liquide. Le solvant est choisi pour :
l’on choisit de poursuivre l’alimentation par des sels d’ammonium,
— sa capacité à solubiliser l’antibiotique (bon coefficient de par-
ils seront apportés en mode semi-continu. Généralement, l’azote
tage entre l’eau et le solvant) ;
pour la production sera apporté sous forme de sources complexes,
telles des farines de soja ou d’arachide, riches en protéines. — sa neutralité chimique vis-à-vis du produit (faible
dégradation) ;
■ Une attention toute particulière doit être portée à l’apport de — un bon degré de sélectivité (moindre extraction d’impuretés) ;
phosphate, dont le rôle régulateur sur la production a été précédem- — un coût modéré ;
ment souligné. — des propriétés physiques facilitant son élimination ou sa
réutilisation.
■ L’apport de bases azotées ou d’acides organiques pour réguler le
Pour l’extraction liquide/liquide, le solvant ne doit pas être misci-
pH doit être mûrement réfléchi, dans la mesure où il peut conduire
ble à l’eau. Cette étape est donc difficilement applicable à des molé-
à une accumulation d’ammonium ou d’éléments exerçant des
cules très hydrophiles. Dans ce cas, il peut être préférable
répressions cataboliques. L’emploi de bases minérales non azotées
d’envisager directement les étapes de purification.
ou d’acides minéraux est souvent préférable.

■ Le contrôle de l’oxygénation a été développé dans


l’article [J 6 006] « Fermenteurs industriels » [17]. 4.3.3 Purification
Ces sources complexes remplissent de multiples fonctions.
Elle fait appel à des techniques plus raffinées que pour l’extrac-
Exemple : si les farines de soja servent essentiellement de sources tion, de façon à éliminer spécifiquement les impuretés en jouant sur
d’azote, elles apportent en même temps des acides nucléiques, des leurs propriétés comparées à celles de l’antibiotique. Cette étape
vitamines, des oligoéléments, des lipides, des sucres, du soufre et du représente une part importante du coût de production. Pour cette
phosphore. raison, le degré de pureté recherché dépendra de l’application.

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PRODUCTION D’ANTIBIOTIQUES PAR BIOTECHNOLOGIES ______________________________________________________________________________________

Pour des applications de type vétérinaire, ou lorsque les proprié- sentes dans le mélange, à partir d’une dimension seuil exprimée le
tés de l’antibiotique s’y prêtent, on peut recourir à nouveau à plus souvent en masse moléculaire et parfois en diamètre de par-
l’extraction liquide/liquide, en utilisant différents solvants et en ticules.
jouant sur le pH initial des solutions. Les coûts sont alors relative-
ment modiques. Si la purification ne peut pas être obtenue par les techniques pré-
Lorsque cette méthode d’extraction ne peut pas être employée, la cédentes, il faut recourir aux séparations chromatographiques. Ces
purification peut se faire à l’aide des procédés à membrane de type méthodes conduisent à des degrés de pureté compatibles avec des
ultra ou nanofiltration, ou encore de gel-filtration. Ces procédés utilisations médicales, mais les étapes de chromatographie sont

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