Dictionnaire de droit canonique et des sciences en connexion avec le droit canon, ou Le dictionnaire de Mgr André et de l'abbé Condis. 1901.
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DE
DROIT
CANONIQUE
I
IMPRIMERIE
GÉNÉRALE — AIMÉPICHAT.
DE CHATILLON-SUR-SEINE.
DICTIONNAIRE
DE
DROIT
CANONIQUE
ET DES
TROISIÈME ÉDITION
TOME PREMIER
A-D
PARIS
HIPPOLYTE WALZER, LIBRAIRE-ÉDITEUR
7, RUE DE MÉZIÈRES,7
1901
AVERTISSEMENT
L'auteur a fait de louables efforts pour ne suivre que la saine doctrine ; mais
C'est cette révision que nous avons entreprise à la suite de M. l'abbé Con-
dis. Nous avons eu soin d'éliminer et de remplacer tout ce qui n'était pas en
ajoutés dans le corps de l'ouvrage et dans notre Supplément, nous avons cons-
exposé les différentes opinions et les arguments qu'elles invoquent, mais nous
avons indiqué aussi l'opinion qui nous paraissait la plus fondée. Enfin, pour
la partie historique et critique, nous avons tenu compte des découvertes et des
résultats désormais acquis à la science et nous les avons consignés soit à leur
pourra, nous l'espérons, servir de guide pratique au prêtre et lui donner cette
science des saints canons plus indispensable que jamais à une époque où les
plus sacrés.
J. WAGNER.
SYLLABUS SYLLABUSl
COMPLECTENS PRAECIPUOS NOSTRAE AETATIS ERRORESRENFERMANT LES PRINCIPALES ERREURS DE NOTRE,
QUINOTANTUR IN ALLOCUTIONIBUS, IN ENCYCLICIS TEMPS, QUISONT SIGNALÉES DANS LESALLOCUTIONS
ALIISQUE APOSTOLICIS LITTERISDOMINI NOSTRI PII CONSISTORIALES, ENCYCLIQUES ETAUTRES LETTRES
PAPAE IX. APOSTOLIQUES DEN. S. P. LEPAPEPIE IX2.
N.B.—Voirauxnotesdutextelatinl'indication desallocutions,
encycliqueset lettresdanslesquelles
chacunedeserreurscontenues
dansceSYLLABUS ontétécondamnées.
§I §I
Pantheismus, Naturalismus et Rationalismus Panthéisme, Naturalisme et Rationalisme absolu.
absolutus.
I. Nullum supremum, sapientissimum, providen- I. Il n'existe aucun Etre divin, suprême, parfait
tissimumque Numen divinum exsistit ab hac rerum dans sa sagesse et sa providence,qui soit distinct do
universitate distinctum, et Deus idem est ac rerum l'universalité des choses, et Dieu est identique à la
natura, et iccirco immutationibusobnoxius; Deusque nature des choses et par conséquent assujetti aux
reapse fit in homine et mundo, atque omnia Deus changements; Dieu, par cela même, se fait dans
sunt et ipsissimam Dei habent substantiam ; ac una l'hommeet dans le monde, et tous les êtres sont Dieu
eademqueres est Deus cum mundo, et proindespiri- et ont la propre substancede Dieu.Dieu est ainsi une
tus cummateria, nécessitascum libertate, verum cum seuleet même choseavec le monde, et par conséquent
falso, bonum cum malo, et justum cum injusto 1. l'esprit avec la matière, la nécessitéavec la liberté,
le vrai avec le faux, le bien avec le mal, et le juste
avec l'injuste.
II. Neganda est omnis Dei actio in homines et II. On doit nier toute action de Dieu sur les hom-
mundum2. mes et sur le monde.
III. Humana ratio, nullo prorsus Dei rospoctuha- III. La raison humaine, considérée sans aucun
bita, unicus est veri et falsi, boni et mali arbiter, rapport à Dieu, est l'unique arbitre du vrai et du
sibi ipsi est lex, et naturalibus suis viribus ad ho- faux, du bien et du mal; elle est à elle-même sa loi,
minum ac populorum bonum curandum sufficit 3. elle suffit par ses forces naturelles pour procurer le
bien des hommes et dos peuples.
IV. Omnes religionis veritates ex nativa humanae IV. Toutes les vérités de la religion découlent de
rationis vi derivant, hinc ratio est princeps norma la forcenative de la raison humaine; d'où il suit que
qua homo cognitionemomnium cujuscumquegeneris la raison est la règle souveraine d'après laquelle
veritatum assequi possit ac debeat 4. l'homme peut et doit acquérir la connaissance de
toutes les vérités de toute espèce.
V. Divina revelatio est imperfecta et iccircosub- V. La révélation divine est imparfaite, et par con-
jecta continuo et indefinitoprogressui qui humanae séquent sujette à un progrès continuelet indéfiniqui
rationis progressioni respondeat 5. réponde au développementde la raison humaine.
VI. Christi fides humanaerefragatur rationi; divi- VI. La foi du Christ est en opposition avec la rai-
son humaine, et la révélation divine non seulement
1. Alloc.Maxima quidem,9junii1862.
2.Alloc.Maximaquidem, 9junii1862.*
3.Alloc.Maximaquidem, 9 junii1862. 1. LemotSyllabus veutdireabrégé,résumé,catalogue.
4. Epist.encycl.Quipluribus,
9 novembris1846.— Epist.en- 2.Parmilesréfutations deserreurscondamnéesdansle Sylla
cycl.Singulariquidem,17 martii1856.—Alloc.Maxima qui- bus.nousciterons : Le SyllabuspontificalouRéfutation
deser
dem,9junii1862. reursquiy sontcondamnées parl'abbéFALCONI,bénéficier
duVa-
5. Epist.encycl.Quipluribus,
9 novembris —
1846. Alloc.Ma- tican, traduitdel'italienpar E.F. MATERNE, curé de Flostoy.
ximaquidem, 9junii1862. Paris,Palmé,1 vol.in 12.
IV SYLLABUS
naquerevelationonsolum nihil prodest, verum etiam ne sert à rien, mais elle nuit à la perfection de
nocethominis perfectioni 1. l'homme.
VII. Prophetiaeet miracula in sacris Litteris expo- VII. Les prophéties et les miracles exposéset ra-
sita et narrata sunt poetarum commenta,et christia- contésdans les Saintes Ecritures sont des fictionsdo
nae fidei mysteria philosophicaruminvestigationum poètes, et les mystères de la foi chrétienne sont le
summa; et utriusque Testamenti libris mythica con- résumé d'investigations philosophiques; dans les
tinentur inventa; ipseque Jesus Christus est mythica livres des deux Testaments sont contenues des in-
fictio2. ventionsmythiques,et Jésus-Christ lui-mêmeest une
SU fictionmythique.
Bationalismus moderatus. § II
VIII. Quum ratio humana ipsi religioni aequipare- Rationalisme modéré.
tur, iccirco theoligicaedisciplinaeperinde ac philoso- VIII. Commela raison humaine est égale à la re-
phicaetractandaesunt 3. ligion elle-même, les sciences théologiques doivent
IX. Omnia indiscriminatim dogmata religionis être traitées commeles sciencesphilosophiques.
christianaesunt objectum naturalis scientiaeseu phi- IX. Tous les dogmesde la religion chrétienne sans
losophiae; et humana ratio historice tantum exculta distinction sont l'objet de la science naturelle ou
potest ex suis naturalibus viribus et principiis ad philosophie; et la raison humaine n'ayant qu'une
veram de omnibusetiam reconditioribusdogmatibus culture purement historique, peut, en vertu de ses
scientiam pervenire, modohaecdogmata ipsi rationi principes et par ses forces naturelles, parvenir à une
tanquam objectumproposita fuerint 4. vraie connaissancede tous les dogmes, même les
X. Quum aliud sit philosophus,aliud philosophia, plus cachés, pourvu que ces dogmesaient été propo-
ille jus et officiumhabet se submittendi auctoritati, sés à la raison commeobjet.
quam veram ipse probaverit; at philosophia neque X. Comme autre chose est le philosophe et autre
potest, neque debet ulli sese submittereauctoritati 5. chose la philosophie, celui-là a le droit et le devoir
XI. Ecclesia non solum non debetin philosophiam de se soumettre à une autorité qu'il a reconnuelui-
unquam animadvertere, verum etiam debet ipsius même être vraie; mais la philosophie ne peut ni ne
philosophiaetolerare errores, eique relinquere ut ipsa doit se soumettre à aucune autorité.
se corrigat s. XI. L'Eglise non seulement ne doit, dans aucun
XII. ApostolicaeSedis, RomanarumqueCongrega- cas, sévir contrela philosophie,mais elle doit tolérer
tionum decreta liberum scientiaeprogressum impe- les erreurs de la philosophieetlui abandonnerle soin
diunt 7. de se corriger elle-même.
XIII. Methoduset principia, quibus antiqui docto- XII. Les décrets du Siège apostolique et des Con-
res scholastici Theologiam excoluerunt, temporum grégations romaines empêchentle libre progrès dola
nostrorumnecessitatibus scientiarumqueprogressui science.
minime congruunt8. XIII. La méthodeet les principes d'après lesquels
XIV. Philosophia tractanda est, nulla supernatu- les anciens docteurs scolastiquesont cultivé la théo-
ralis revelationis habita ratione 9. logie, ne conviennent plus aux nécessités de notre
N. B. Cum rationalismi systemate cohaerentmaxi- temps et au progrès des sciences.
mam partem errores Antonii Günther, qui damnan- XIV. On doit étudierla philosophie,sans tenir au-
tur in Epist. ad Card.Archiep.ColoniensemEximiam cun comptede la révélationsurnaturelle.
tuam, 15junii 1857,et in Epist. ad Episc. Wratisla- N. B. Au système du rationalisme se rapportent
ViensemDolorehaud mediocri,30 aprilis 1860. pour la majeure partie les erreurs d'Antoine Gün-
§ III ther, qui sont condamnéesdans la lettre au cardinal
Indifferentismus, Latitudinarismus. archevèquede CologneEximiamtuam,du15juin 1857,
et dans la lettre à de Breslau Dolorehaud
XV. Liberum cuique homini est eam amplecti ac mediocri,du 30avrill'évéque 1800.
profiterireligionem,quam rationis lumine quis duc-
tus veram putaverit 10. § III
1. Epist.encycl.Quipluribus,9 novembris 1846.—Alloc.Ma- Indifférentisme, Latitudinarisme.
ximaquidem, 9junii1862. XV. Il est libre à chaque hommed'embrasser et ae
2. Epist.encycl.Quipluribus,9 novembris 1846.—Alloc.Ma- professer la religion qu'il s'est persuadé être vraie
ximaquidem, 9junii1862. d'après la lumière de la raison.
3.Alloc.Singulariquadam perfusi,9decembris 1851.
4. Epist.adArchiep.Frising.Gravissimas, 11 decembris
1862.
Epist.adeumdem Tuaslibenter, 21decembris 1863.
5. Epist.ad Archiep.Frising.Gravissimas,11 decembris
1862.
Epist.adeumdem Tuaslibenter, 21decembris 1863.
6. Epist.adArchiep.Frising.Gravissimas,11decembris1862.
7. Epist.adArchiep.Frising.Tuaslibenter,21decembris1863.
8. Epist.ad Archiep.Frising.Tuaslibenter,21decembris
1833.
9. Epist.adArchiep. Frising.Tuaslibenter,
21decembris1803.
10.Litt.Apost. inter,10junii1851.—Alloc.
Mulliptices Maxima
quidm,9 junii1862.
SYLLABUS V
XVI. Homines in cujusvis religionis cultu viam XVI. Les hommes peuvent trouver le chemindu
aeternaesalutis reperire aeternamquesalutem assequi salut éternel et obtenir le salut éternel dans le culte
possunt 1. de n'importe quelle religion.
XVII. Saltem bene sperandum est de aeoeterna illo- XVII. Au moins doit-onbien espérer du salut éter-
rum omniumsalute, qui in vera Christi Ecclesia ne- nel de tous ceux qui sont totalement étrangers à la
quaquam versantur 2. véritable Eglise du Christ.
XVIII. Protestantismus non aliud est quamdivorsa XVIII. Le protestantisme n'est pas autre chose
versa ejusdem christianae religionis forma, in qua qu'une forme diverse de la mêmevraie religion chré-
aequeac in EcclesiacatholicaDeo placera datum est 3. tienne, forme dans laquelle on peut être agréable à
§ IV Dieu aussi bien que dans l'Eglise catholique.
Socialismus, Communismus, Societates clandes- §IV
tins, Societates biblicae, Societates clerico-libe- Socialisme. Communisme, Sociétés secrètes, So-
rales. ciétés bibliques, Sociétés clérico-libérales.
Ejusmodi pestes saepe gravissimisque verborum Ces sortes de pestes sont à plusieurs reprises frap-
formulis reprobantur in Epist. encycl. Quipluribus, pées de sentencesformulées dans les termes les plus
9 novemb.1846;in Alloc. Quibusquantisque,20 april. graves par l'Encyclique Qui pluribus, du 9 novem-
1849;in Epist. encycl. Nostiset Nobiscum,8 dec. 1849; bre 1846, par l'Allocution Quibusquantisque,du 20
in Alloc. Singulariquadam, 9 decemb. 1854;in Epist. avril 1849, par l'Encyclique Nostis et Nobiscum,du
encycl. Quantoconficiamurmoerore,10 augusti 1863. 8 décembre 1849,par l'Allocution Singulari quadam,
§V du 9 décembro1854,par l'EncycliqueQuantoconficia-
mur moerore,du 10août 18631.
Errores de Ecclesia ejusque juribus.
XIX. Ecclesia non est vera perfectaque societas §V
plane libera, nec pollet suis propriis et constantibus Erreurs relatives à l'Eglise et à ses droits.
juribus sibi a divino suo Fundatore collatis, sedcivi- XIX. L'Eglise n'est pas une vraie et parfaite société
lis potestatis est definire quaesint Ecclesiaejura ac pleinementlibre; elle no jouit pas de ses droits pro-
limites, intra quos eadem jura exercere queat 4. pres et constants que lui a conférésson divin Fonda-
XX. Ecclesiasticapotestas suam auctoritatem exer- teur, mais c'est au pouvoircivil de définir quels sont
cere non debet absque civilis gubernii venia et as- les droits de l'Eglise et les limites dans lesquellesello
sensu 5. peut les exercer.
XXI. Ecclesianon habet potestatemdogmaticodefi- XX. La puissance ecclésiastiquene doit pas exercer
niendi, religionem catholicaeEcclesiaeesse unice ve- son autorité sans la permission et l'assentiment du
ram religionem6. gouvernementcivil.
XXII. Obligatio,qua catholicimagistri et scriptores XXI. L'Eglise n'a pas le pouvoir de définir dog-
omnino adstringuntur, coarctatur in iis tantum quae matiquementquela religion de l'Egliso catholiqueest
ab infallibili Ecclesiaejudicio veluti fidei dogmata uniquementla vraie religion.
ab omnibus credenda proponuntur 1. XXII. L'obligation à laquelle sont astreints les
XXIII. Romani Pontifices et Conciliaoecumenicaa maîtres et les écrivains catholiquesse borne aux cho-
limitibus su» potestatis recesserunt, jura principum ses qui ont été définiespar le jugement infaillible de
usurparunt, atque etiam in rebus fidei et morumdefi- l'Eglise, commedes dogmes de foi qui doivent êtro
niendis errarunt 8. crus par tous.
XXIV. Ecclesia vis inferendaepotestatem non ha- XXIII. Les Pontifes Romains et les Concilesoecu-
bet, neque potestatem ullam temporalem directam méniques se sont écartés des limites de leur pouvoir;
vel indirectam 9. ils ont usurpé les droits des princes et ils ont même
XXV. Praeter potestatem episcopatui inhaerentem, erré dans les définitions relatives à la foi et aux
alia est attributa temporalis potestas a civili imperio moeurs.
vel expresse vel tacite concessa,revocandapropterea, XXIV. L'Eglise n'a pas le droit d'employer la
cum libuerit, a civili imperio 10. force; elle n'a aucun pouvoir temporel direct ou in-
1. Epist.encycl.Quipluribus, 9novembris 1846.—Alloc.Ubi direct.
primum, 17decembris 1847.—Epist.encycl.Singulariquidem, XXV.Outrele pouvoir inhérent à l'épiscopat, il y
17martii1856. a un pouvoirtemporelqui lui a été concédéou expres-
2. Alloc.Singulariquadam,9decembris —
1854. Epist.encycl. sément ou tacitement par l'autorité civile, révocable
Quanto 10augusti1863.
conficiamur, par conséquent à volonté par cette même autorité
3. Epist.encycl.
Nostiset Nobiscum, 8decembris1849.
4.Alloc.Singulari quadam, 9 decembris1854.—Alloc.Mullis civile.
ravibusque, 17 decembris 1860.— Alloc.Maximaquidem, 9
junii1862.
5. Alloc.Meminit unusquisqne,30septembris 1861.
6.Litt.Apost.Multiplicesinter,10junii1851.
7. Epist.adArchiep. Frising.Tuaslibenter,21decembris
1863.
8.Litt.Apost.Multiplicesinter,10junii1851.
9.Litt. Apost.AdApostolicae,22augusti1851. 1. Voir,aprèsla constitution
ApostolicaeSedis,le décretdu21
10.Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851. janvier1870quicondamne la sociétédesFénians.
VI SYLLABUS
XXVI. Ecclosia non habet nativum ac legitimum XXVI. L'Eglise n'a pas le droit naturel et légitima
jus acquirendi ac possidendi1. d'acquérir et de posséder.
XXVII. Sacri Ecclesiaeministri RomanusquePon- XXVII. Les ministres sacrés de l'Eglise et le Pon-
tifex ab omni rerum temporalium cura ac dominio tife Romain doivent être exclus de toute gestion et
sunt omninoexcludendi2. autorité sur les choses temporelles.
XXVIII. Episcopis, sine gubernii venia, fas non XXVIII. Il n'est pas permis aux Evêques de pu-
est vel ipsas apostolicas litteras promulgare 3. blier même les Lettres apostoliquessans ta permis-
XXIX. Gratiaea RomanoPontificeconcessaeexisti- sion du Gouvernement.
mari debent tamquam irrita}, nisi per gubernium XXIX. Les gràces accordéespar le PontifeRomain
'uerint imploratae4. doivent être regardées comme nulles, si elles n'ont
XXX. Ecclesiaeet personarum ecclesiasticarumim- pas été demandéespar l'entremise du Gouvernement.
munitas a jure civili ortum habuit 5. XXX. L'immunité de l'Eglise et des personnesec-
XXXI. Ecclesiasticumforum pro temporalibuscle- clésiastiques tire son origine du droit civil.
ricorum causis sive civilibus sive criminalibus om- XXXI. Le for ecclésiastiquepour les procèstempo-
nino de medio tollendum est etiam inconsulta et rels des clercs, soit au civil, soit au criminel, doit
reclamante ApostolicaSede6. absolumentêtre aboli, même sans consulterle Siège
XXXII. Absque ulla naturalis juris et aequitatis apostoliqueet sans tenir compte de ses réclamations.
violatione potest abrogari personalis immunitas qua XXXII. L'immunitépersonnelleenvertu delaquelle
clerici ab onere subeundaeexercendaequemilitiaeexi- les clercs sont exemptsde la milice, peut être abrogée
muntur; hanc vero abrogationempostulat civilis pro- sans aucune violation de l'équité et du droit naturel.
gressus, maxime in societate ad formam liberioris Le progrès civil demande cette abrogation, surtout
regiminis constituta 7. dans une société constituée d'après une législation
XXXIII. Non portinet unice ad ecclesiasticamju- libérale.
risdictonis potestatemproprio ac nativo jure dirigere XXXIII. Il n'appartient pas uniquement par droit
theologicarumrerum doctrinam 8. propre et inné à la juridictionecclésiastiquede diriger
XXXIV.Doctrina comparantiumRomanumPonti- l'enseignementdes choses théologiques.
ficem Principi libero et agenti in universa Ecclesia, XXXIV.La doctrine de ceux qui comparentle Pon-
doctrina est quaemedio sevopraevaluit 9. tife Romain à un prince libre et exerçant son pouvoir
XXXV. Nihil vetat, alicujus Conciliigeneralis sen- dans l'Eglise universelle, est une doctrine qui a pré-
tentia aut universorum populorum facto, summum valu au moyen âge.
Pontificatum ab Romano Episcopo atque Urbe ad XXXV. Rien n'empêche que par un décret d'un
alium Episcopumaliamque civitatem transferri 10. Concilegénéral ou par le fait de tous les peuples le
XXXVI.Nationalis Conciliidefinitionullam aliam souverainpontificatsoit transféré de l'Evêqueromain
admittit disputationem, civilisque administratio rem et de la ville de Rome à un autre Evèque et à une
ad hosceterminore exigere potest 11. autre ville.
XXXVII. Institui possunt nationales Ecclesiaeab XXXVI.La définitiond'un Concilenationaln'admet
auctoritate RomaniPontificis subductoeplaneque di- pas d'autre discussion, et l'administration civile peut
visae12. traiter toute affaire dans ces limites.
XXXVIII. Divisioni Ecclesiaein orientalem atque XXXVII.On peut instituer des Eglises nationales
occidentalemnimia RomanorumPontificumarbitria soustraites à l'autorité du Pontife Romain et pleine-
contulerunt 13. mont séparéesde lui.
XXXVIII. Trop d'actes arbitraires de la part des
§ VI PontifesRomainsont pousséà la division de l'Eglise
Errores de societate civili tum in se, tum in suis en orientale et occidentale.
ad Ecclesiam relationibus spectata.
VI
XXXIX. Reipublicaestatus, utpoto omniumjurium Erreurs relatives a la §société civile, considérée
1.Alloc.Nunquam fore,15decembris1856.—Epist.encycl.
In- soit en elle-même, soit dans ses rapports aveo
17septembris
credibili, 1863. l'Eglise.
2.Alloc.Maxima quidem,9junii1862. XXXIX. L'Etat, commeétant l'origine et la source
3.Alloc.Nunquam fore,1 5decembris1856.
4. Alloc.Nunquam fore,15decembris 1856.
5.Litt.Apost.Multiplices
inter,10junii1851.
6.Alloc.Acerbissimum,27septembris 1852.—Alloc.Nunquam
fore,15decembris 1856.
7. Epist.ad Episc.Montisregal. 29sep-
SingularisNobisque,
tembris1863.
8. Epist.adArchiep.Frising.Tuaslibenter,
21decembris1863.
9. Litt. Ad 22
Apost. Apostolicae,augusti1851.
10.Litt.Apost.AdApostolicae,22augusti1851.
11.Litt.Apost.AdApostolicae,22augusti1851.
12.AllocMullis 17decembris
gravibusque, 1800.—Alloc.Jam-
udumcernimus, 18martii1861.
13.Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851.
SYLLABUS VII
origo et fons, jure quodampollet nullis circumscripto de tous les droits, jouit d'un droit qui n'est ciroons-
limitibus 1. crit par aucune limite.
XL. CatholicaeEcclesiaedoctrina humanaesocieta- XL. La doctrine de l'Eglise catholique est opposée
tis bono et commodisadversatur 2. au bien et aux intérêts de la sociétéhumaine.
XLI. Civili potestati vel ab infideli imperante exer- XLI. La puissance civile, même quand elle est
citae competit potestas indirecta negativa in sacra; exercéepar un prince infidèle, possède un pouvoir in-
eidem proinde competit nedum jus quod vocant exe- direct négatif sur les choses sacrées. Elle a par consé-
quatur, sed etiam jus appellationis,quam nuncupant quent non seulement le droit qu'on appelle d'exequa-
ab abusu 3. tur. mais encorele droit qu'on nomme d'appelcomme
XLII. In conflictu legum utriusque potestatis, jus d'abus.
civile preavalet4. XLII. En cas do conflit entre les deus pouvoirs, le
XLIII. Laica potestas auctoritatem habet rescin- droit civil prévaut.
dendi, declarandi ac faciendi irritas solemnes con- XLIII. La puissance laïque a le pouvoir de casser,
ventiones (vulgo concordata) super usu jurium ad dedéclarer et rendrenulles lesconventionssolennelles
ecclesiasticam immunitatem pertinentium cum Sede (concordats)conclues avec le Siègeapostolique, rela-
Apostolica initas, sine hujus consensu, immo et ea tivement à l'usage desdroits qui appartiennent à l'im-
reclamante 5. munité ecclésiastique,sans le consentementdeceSiège
XLIV. Civilis auctoritas potest se immiscererebus et malgré ses réclamations.
quaead religionem, mores et regimen spirituale per- XLIV. L'autorité civile peut s'immiscer dans les
tinent. Hinc potest de instructionibus judicare, quas choses qui regardent la religion, les moeurset le ré-
Ecclesiaepastores ad conscientiarum normam pro suo gime spirituel. D'où il suit qu'elle peut juger des
munere edunt, quin etiam potest de divinorum sacra- instructions que les pasteurs de l'Eglise publient,
mentorum administratione et dispositionibus ad ea d'après leur charge, pour la règle des consciences;
suscipienda necessariis decernere 6. elle peut même décider sur l'administration des sa-
XLV. Totum scholarum publicarum regimen, in crements et les dispositions nécessaires pour les re-
quibus juventus christianaealicujus Reipublicaeinsti- cevoir.
tuitur, episcopalibus dumtaxat seminariis aliqua ra- XLV. Toute la direction des écoles publiques dans
tione exceptis, potest ac debet attribui auctoritati lesquelles la jeunesse d'un Etat chrétien est élevée, si
civili, et ita quidem attribui, ut nullum alii cuicum- l'on en exceptedans une certaine mesure les séminai-
que auctoritati recognoscatur jus immiscendise in res épiscopaux,peut et doit être attribuée à l'autorité
disciplina scholarum, in regimine studiorum, in gra- civile, et cela de telle manière qu'il ne soit reconnu à
duum collatione, in delectu aut approbatione magis- aucune autre autorité le droit de s'immiscer dans la
trorum 7. discipline des écoles, dans le régime des études, dans
XLVI. Immo in ipsis clericorum seminariis metho- la collation des grades, dans le choix ou l'approbation
dus studiorum adhibenda civiliauctoritati subjicitur8. des maîtres.
XLVII. Postulat optima civilis societatis ratio, ut XLVI. Bien plus, même dans les séminaires des
populares seholae,quae patent omnibus cujusque e clercs, la méthodeà suivre dans les études est sou-
populo classis pueris, ac publica universim Instituta, mise à l'autorité civile.
quaelitteris severioribusque disciplinis tradendis et XLVII. La bonne constitution de la sociétécivile
educationi juventutis curanda sunt destinata, exi- demandeque les écoles populaires, qui sont ouvertes
mantur ab omni Ecclesiaeauctoritate, moderatrice vi à tous les enfants de chaque classe du peuple, et en
et ingerentia, plenoquecivilis ac politicaeauctoritatis général que les institutions publiques destinées aux
arbitrio subjiciantur, ad imperantium placita et ad lettres, à une instruction supérieure et à une éduca-
communiumaetafis opinionum amussin 9. tion plus élevée de la jeunesse, soient affranchiesde
XLVIII. Catholicis viris probari potest ea juven- toute autorité de l'Eglise, de toute influencemodem-
tutis instituendaeratio, quae sit a catholicafideet ab trice et de toute ingérencede sa part, et qu'elles soient
Ecclesiaepotestate sejuncta, quaequererum dumtaxat pleinement soumisesà la volonté de l'autorité civile
naturalium scientiam ac terrenae socialis vitae fines et politique, suivant le désir des gouvernants et le
tantum modo vel saltem primario spectet 10. niveau des opinionsgénéralesde l'époque.
9 junii1862. XLVIII. Des catholiques peuvent approuver un
1.Alloc,Maxima quidem,
2. Epist.encycl.Quipluribus, 9 novembris1846.—Alloc.Qui- système d'éducation en dehors de la foi catholique et
busquantisque, 20 aprilis1849. de l'autorité de l'Eglise, et qui n'ait pour but, ou du
3. Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851. moins pour but principal, que la connaissance des
4. Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851. choses purement naturelles et la vie socialesur cette
1 novembris
5.Alloc.In consistoriali, 1850.—Alloc.Multisgra- terre.
vibusque, 17decembris 1860.
6.Alloc.In consistoriali,1novembris — Alloc.Maxima
1850.
quidem, 9 junii1862.
7.Alloc.In consistoriali,
1novembris 1850.— Alloc.Quibus
luc-
5 septembris
tuosissimis, 1851.
8.Alloc. Nunquam fore,15decembris 1856.
9.Epist.adArchiep. Friburg.Quum nonsine,14julii1864.
10.Epist.adArchiep. Friburg.Quum nonsine,14julii1864.
VIII SYLLABUS
XLIX,Civilis auctoritas potestimpedire quominus XLIX. L'autorité séculière peut empêcher les
sacrorum Antistites et fideles populi cum Romano Evêques et les fidèles do communiquer librement
Pontifice libero ac mutuo communicent1. entre eux et avec le Pontife Romain.
L. Laica auctoritas habet per se jus praesentandi L. L'autorité laïque a par elle-mêmele droit de
Episcopos, et potest ab illis exigere ut ineant dioe- présenter les Evêques, et peut exiger d'eux qu'ils
cesium procurationem, antequam ipsi canonicam a prennent en main l'administration de leurs diocè-
S. Sede institutionem et apostolicas litteras acci- ses avant qu'ils aient reçu du Saint-Siège l'institu-
piant 2. tion canonique et les lettres apostoliques.
LI. Immo laicum gubernium habet jus deponendi Ll. Bien plus le gouvernementlaïque a le droit
ab exercitio pastorali ministerii Episcopos, neque d'interdire aux Evèques l'exercice du ministère
tenetur obedire RomanoPontifici in iis quai cpisco- pastoral, et il n'est pas tenu d'obéir au Pontife Ro-
patuum et Episcoporum respiciunt institutionem 3, main en ce qui concernel'institution des évêchés et
LII. Gubernium potest suo jure immutare aetatem des Evêques.
ab Ecclesia praescriptam pro religiosa tam mulie- LII. Le Gouvernementpeut, do son propre droit,
rum quam virorum professione, omnibusque reli- changer l'àge prescrit pour la professionreligieuse,
giosis familiis indicore, ut neminem sine suo per- tant des femmesque des hommes, et enjoindre aux
missu ad. solemniavota nuncupanda admittant 4. communautés religieuses de n'admettre personne à
LIII. Abrogandaesunt leges quae ad religiosarum prononcer des voeuxsolennels sans sa permission.
familiarum statum tutandum, earumque jura et of- LIII. Ondoit abroger leslois qui protègent l'exis-
ficia pertinent ; immo potest civile gubernium iis tence des familles religieuses, leurs droits et leurs
omnibusauxilium praestare, qui a suscepto religiosae fonctions ; bien plus, le gouvernement civil peut
vitae instituto deficere ac solemnia vota frangere prêter appui à tous ceux qui voudraient quitter l'é-
velint ; pariterque potest religiosas easdem familias tat religieux qu'ils avaient embrassé et enfreindre
perinde ac collegiatas Ecclesias et beneficiasimpli- leurs voeuxsolennels, il peut aussi supprimer com-
cia etiam juris patronatus penitus extinguere, illo- plètementcesmêmescommunautésreligieuses,aussi
rumque bona et reditus civilis potestatis adminis- bien que les églises collégiales et les bénéficessim-
trationi et arbitrio subjicere et vindicare 5. ples, même de droit de patronage, attribuer et sou-
L1V.Roges et Principes non solum ab Ecclesiaeju- mettre leurs biens et revenus à l'administration et
risdictione eximuntur, verum etiam in qutestionibus à la disposition de l'autorité civile.
jurisdictionis dirimendis superiores sunt Ecclesia6. LIV. Les rois et les princes, non seulement sont
LV. Ecclesia a Statu, Statusque ab Ecclesia se- exempts de la juridiction de l'Eglise, mais même
jungendus est 7. ils sont supérieurs à l'Eglise quand il s'agit de
§ VII trancher les questions de juridiction.
Errores de Ethica naturall et Christiana. LV. L'Eglise doit être séparée do l'Etat, et l'Etat
séparé de l'Eglise.
LVI. Morum leges divina haud egent sanctione.
minimequeopus est ut humanaeleges ad naturaejus § VII
conformentur aut obligandi vim a Deo accipiant 8. Erreurs concernant la morale naturelle et chré
LVII. Philosophicarum rerum morumque scien- tienne.
tia, itemque civiles logespossunt et debent a divina LVI. Les lois de la morale n'ont pas besoin dela
et ecclesiastica auctoritate declinare ». sanction divine, et il n'est pas du tout nécessaire
LVIII. Aliaevires non sunt agnoscendaenisi illae que leslois humaines se conformentau droit natu-
quae in materia positaesunt, et omnis morum dis- rel ou reçoivent de Dieu leur force obligatoire.
ciplina honestaque collocari debet in cumulandiset LVII. La sciencedes choses philosophiqueset mo-
augendis quovis modo divitiis ac in voluptatibus rales, do même que les lois civiles, peuvent et doi-
explendis 10. vents'affranchirde l'autorité divineet ecclésiastique.
LIX. Jus in materiali facto consistit, et omnia LVIII. Il ne faut reconnaître d'autres forces que
hominum officia sunt nomen inane, et omnia hu- celles qui résident dans la matière, et tout système
mana facta juris vim habent 11. de morale, toute honnêteté doit consister à accu-
1. Alloc.Maxima quidem, 9junii1862. muler cl augmenter ses richesses n'importe par
2. Alloc.Nunquam fore,15decembre 1856. quel moyen, et à satisfaire ses passions.
3. Litt. Apost.
Muttiplices —
inter,10junii1851. Alloc.Acer- LIX. Le droit consiste dans le fait matériel; tous
bissimum,27septembris1852. les devoirs des hommes sont un mot vide do sens,
4. Alloc.Nunquam fore,15decembris 1856.
5. Alloc.Acerbissimum,
27 septembris 1852.— Alloc.Probeme- et tous les faits humains ont forcedo droit
mineruis,22januaru1855.—Alloc.Cumsaepe, 26julii1853.
6. Lit.Apost.Multiplices
inter,10junii1851.
7. Alloc. 27septembre
Acerbissimum, 1852.
8. Alloc.
Maxima quidem, 9junii1862.
9. Alloc.
Maxima quidem, 9 junii1892.
10.Alloc.Maxima quidem, 9 junii1862.—Epistencycl.Quanto
10
conficiamur,augusti 1863.
11.Alloc.
Maxima quidem,9 junii1862.
SYLLABUS IX
LX. Auctoritas nihil anua est nisi numeri et ma- LX. L'autorité n'est autre chose que la somme du
terialium virium summa 1. nombre et des forces matérielles.
LXI. Fortunata facti injustitia nullum juris sanc- LXI. Une injustice de fait couronnée de succès ne
titati dotrinentum affert 2. préjudicie nullement à la sainteté du droit.
LXII. Proclamandum est et obsorvandum princi- LXII. On doit proclamer et observer le principe
pium quod vocant de non-interventu3. de non-intervention.
LXIII. Legitimis principibus obedientiamdetrec- LXIII. Il est permis de refuser l'obéissance aux
tare, immo et rebellaro licet s. princes légitimes et méme dose révolter contre eux.
LXIV. Tum cujusque sanctissimi juramenti viola- LXIV. La violation d'un serment, quelque saint
tio, tum quaelibetscelesta flagitiosaque actio sempi- qu'il soit, et toute action criminelle et honteuse op-
ternae legi repugnans, non solum haud est impro- posée à la loi éternelle, non seulement no doit pas
banda, vorumetiam omninolicita, summisque laudi- être blâmée, mais elle est tout à fait licite et digne
bus offerenda,quando id pro patriae amoro agatur 5. des plus grands éloges, quand elle est inspirée par
l'amour de la patrie.
§ VIII
Errores de matrimonio christiano. § VIII
LXV.Huila ratione ferri potest, Christum eroxis- Erreurs concernant le mariage chrétien.
se matrimoniuin ad dignitatem sucramenti 6. LXV. On ne peut établir par aucune preuve que le
LXVI. Matrimonii sacramentum nonest nisi quod Christ a élevé le mariage à la dignité de sacrement.
contractui accessorium ab coque separabile, ipsum- LXVI. Le sacrement do mariage n'est qu'un ac-
que sacramentum in una tactum nuptiala benedic- cessoire du contrat et peut en être sépare, et le sa-
tione situm est 7. crement lui-mémene consiste que dans la seule bé-
LXVII. Jure naturae matrimonii vinculam non nédiction nuptiale.
est indissolubile, et in variis casibus divortium pro- LXVII. De droit naturel, le lien du mariage n'est
prie dictum auctoritato civili sanciri potest 8. pas indissoluble, et dans différentscas le divorce pro-
LXVIII. Ecclesia non habet potestatem impedi- prement dit peut être sanctionné par l'autorité civile.
menta matrimonium dirimentia inducendi, sed ea LXVIII. L'Eglise n'a pas le pouvoir d'apporter
potestas civili auctoritati competit, a qua impedi- des empêchements dirimants au mariage ; mais ce
menta existentia tollenda sunt 9. pouvoir appartient à l'autorité séculière, par laquelle
LXIX. Ecclesia sequioribus saeculis dirimentia les empèchements existants peuvent être levés.
impedimenta inducere coepit,non jure proprio, sed LXIX. L'Eglise, dans le cours dos siècles, a com-
illo jure usa, quod a civili potestate mutuata erat 10. mencé à introduire les empêchements dirimants,
LXX.Tridontinicanonesquianathematis censuram non par son droit propre, mais en usant du droit
illis inferunt qui facultatom impedimenta dirimentia qu'elle avait emprunté au pouvoir civil.
inducendiEcclesiaenegare audeant, vel nonsunt dog- LXX. Les canons du Concile do Trente qui pro-
matici vel do hac mutuata potestate intelligendi noncent l'anathème contre ceux qui osent nier le
sunt 11. pouvoir qu'a l'Eglise d'opposer des empêchements
LXXI. Tridentini forma sub infirmitatis poena dirimants, ne sunt pas dogmatiques ou doivent s'en-
non obligat,ubi lex civilis aliam formam praestituat, tendre de ce pouvoir emprunté.
et velit hac nova forma interveniente matrimoniuin LXXI. La forme prescrite par le ConciledoTrente
valere 12. n'oblige pas sous peine de nullité, quand la loi ci-
LXXII. Bonifacius VIII votum castitatis in or- vile détermine une autre forme à suivre et veut
dinatione emissum nuptias nullas roddero primus qu'au moyen do cette forme le mariage soit valide.
asseruit 13. LXXII. BonifacaVIII a le premier déclaré que le
LXXIII. Vi contractus mere civilis potest inter voeu do chasteté prononcé dans l'ordination rend le
christianos constare veri nominis matrimoniuim; mariage nul.
falsumqueest, aut contractum matrimonii inter chris- LXXIII. Par la force du contrat purement civil,
1.Alloc. Maximaquidem, 9 junii1862. un vrai mariage peut exister entre chrétiens; et il
2. Alloc. Jamdudum cernimus, 18martii1861. est faux, ou quele contrat de mariage entrechrétiens
3.Alloc. 1860.
Novoset aute,28septembris
4. Epist. Quipluribus,
encyel. 9 novembre1846.—Alloc.
Quisque
vestrum, —
1847. Epist.
4 octobris et
encycl.Nostis Nobiscum,8 de-
cembris 1849—Litt.Apost.Cumcatholica, 26 martii
1860.
5.Alloc.Quibus 20aprilis1849.
quantisque,
AdApostolicae,
6. Litt.Apost. 22augusti1351.
7. Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851.
8. Litt.Apost.
AdApostolicae, 22 augusti1851,— Alloc.
Aser-
bissimum, 1852.
27septembris
inter,10junii1851.
9.Litt.Apost.Multiplices
10.Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851.
11.litt. Apost.AdApostolicae,22augusti1851.
12.Litt.Apost.AdApostolicae, 22augusti1851.
AdApostolicae,
13.Litt.Apost. 22augusti1851.
X SYLLABUS
tianos semper esse sacramentum, aut nullum esse soit toujours un sacremont, ou que ce contrat soit
contractum, si sacramentum excludatur 1. nul si le sacrement en est exclu.
LXXIV. Causaematrimoniales et sponsalia suapte LXXIV. Les causes matrimoniales et les fiançail-
natura ad forumcivile pertinent 2. les, par leur nature propre, appartiennent à la juri-
N. B. — Huc facore possunt duo alii errores : de diction civile.
clericorum coelibatuabolendo et de statu matrimonii N. B. — Ici peuvent se placer deux autres erreurs:
statui virginitatis anteferendo.Confodiuntur,prior in l'abolition du célibat ecclésiastiqueet la préférence
Epist. Encycl. Quipluribus, 9 novembris 1846,poste- due à l'état do mariage sur l'état de virginité. Elles
rior in Litteris Apost. Multiplicesinter, 10junii 1851. sont condamnées,la première dans la Lettre Encycli-
§ IX que Quipluribus,du 9 novembre1846,la secondedans
la Lettre ApostoliqueMultiplicesinter, du 10juin 1851.
Errores de civili Romani Pontificis principatu.
LXXV. Do temporalis regni cum spirituali compa- § IX
tibilitate disputant inter se christianaeet catholicae Erreurs sur le principat civil du Pontife Romain.
Ecclesiaefilii 3. LXXV.Les fils de l'Eglise chrétienneet catholique
LXXVI. Abrogatio civilis imperii, quo Apostolica disputent entre eux sur la compatibilitéde la royauté
Sodes potitur, ad Ecclesiaelibertatem felicitatemque temporelle avec le pouvoir spirituel.
vel maxime conduceret 4- LXXVI. L'abrogation de la souverainetécivile dont
N. B. — Praeter hos errores explicite notatos, alii le Saint-Siègeest en possession,servirait, mêmebeau-
complures implicite reprobantur proposita et asserta coup, à la liberté et au bonheur de l'Eglise.
doctrina, quam catholici omnes firmissime retinere H. B. Outre ces erreurs explicitementnotées, plu-
debeant, docivili Romani Pontificisprincipatu. Ejus- sieurs autres sont implicitementcondamnéespar la
modi doctrina luculenter traditur in Alloc. Quibus doctrinequi a été exposéeet soutenuesur le principat
quantisque,20 april. 1840;in Alloc. Si semperantea, civil du Pontife Romain, que tous les catholiques
20 maii 1850;in Litt.Apost. Cum catholicaEcclesia, doivent fermementprofesser. Celte doctrine est clai-
26 mart. 1800:in Alloc. Novos,28 sept. 1860;in Alloc. rement enseignéedans l'Allocution Quibusquantisque,
Jamdudum, 18martii 1801;in Alloc.Maximaquidem, du 20 avril 1849;dans l'Allocution Si semperantea,
9 junii 1802. du 20mai 1850;dans la Lettre ApostoliqueCumca-
§X tholica Ecclesia,du 26mars 1860;dans l'Allocution
Errores qui ad liberalismum hodiernum Novos,du 28 septembre 1860;dans l'AllocutionJam-
referuntur. dudum, du 18 mars 1861; dans l'Allocution Maxima
du 9 juin 1862.
LXXVII. AEtatehac nostra non amplius expedit quidem,
religionumcatholicamhaberi tamquamunicam status §X
religionem,coteris quibuscumquecultibus exclusis 5. Erreurs qui se rapportent au libéralisme
LXXVIII. Hinc laudabiliter in quibusdamcatholici moderne.
nominis regionibus lege cautum est, ut hominibus LXXVII. A notre époque il n'est plus utile que la
illuc immigrantibus liceat publicumproprii cujusque religion catholique soit considérée comme l'unique
cultus exercitium habere 6. religion de l'Etat, à l'exclusion de tous les autres
LXXIX. Enimvero falsum est, civilem cujusque cultes.
cultus libertatem, itemque plenam potestatem omni- LXXVIII. Aussi c'est avec raison que, dans que-
bus attributam quaslibet opiniones cogitationesque ques pays catholiques, la loi a pourvu à ce que les
palam publicequemanifestandi,conduceread populo- étrangers qui s'y rendent y jouissent de l'exercice
rum mores animosque facilius corrumpendos,ac in- public de leurs cultes particuliers.
differentismipestem propagandam7. LXXIX. Il est faux, en effet,que la liberté civile
LXXX.Romanus Ponlifexpotest ac debetcum pro- de tous les cultes, et que le plein pouvoir laissé à
gressu, cum liberalismoet cum recenti civilitate sese tous de manifesterouvertementet publiquementtou-
reconciliareet componere8. tes leurs pensées et toutesleurs opinions,jettent plus
1.Litt.Apost.AdApostolicae,22augusti1851.— LetteradiS. facilementles peuples dans la corruption des moeurs
S.PIOIX,al RediSardegna, 19settembre1852.—Alloc.
Acerbis- et de l'esprit, et propagent la peste de l'Indifféren-
simum, 27septembris 1852.—Alloc.Multisgravibusque, 17de- tisme.
cembris 1860. LXXX. Le Pontife Romainpeut et doit se réconci-
22augusti1851.—Alloc.Acer- lier et transiger avec le progrès, le libéralisme et la
2. Litt.Agost.Ad Apostolicae,
bissimum, 27septembris
1852. civilisaiion moderne.
3.Litt.Apost.AdApostolicae,22augusti1851.
4.Alloc.Quibusquantisque,20aprilis1849.
5. Alloc.Nemovestrum, 26julii1855.
6. Alloc.Arerbissimum,
27septembris 1852.
7. Alloc.Nunquam fore,15decembris 1856.
8.Alloc. Jamdudum cernimus,18martii1861.
C0NSTITUTIO SANCTISSIMI DOMINI NOSTRI
PII
CONSTITUTIONS
DÉCRÉTÉE
DANS LA IVe SESSION DU CONCILE DU VATICAN
VENERABILIBUS
FRATRIBUS ATOUSNOSVÉNÉRABLESFRÈRES
PATRIARCHIS ARCHIEPISCOPIS
PRIMATIBUS LESPATRIARCHES, ARCHEVÊQUES
PRIMATS,
AETEPISCOPIS
CATHOLICIORBISUNIVERSIS ET ÉVÊQUES
DUMONDE CATHOLIQUE
GRATIAMET COMMUNIONEM ENORACEET COMMUNION
CUMAPOSTOLICASEDEHABENTIBUS AVECLESIÊGEAPOSTOLIQUE
LEO PP. XIII LÉON XIII, PAPE
Venerabilesfratres, VenérablesFrères,
Salutemet ApostolicamBenedictionem. Salut et BénédictionApostolique.
S I. Bienfaitsde l'Egliseenversla société.
I. — 1. Immortale Dei miserentis opus, quod est 1. OEuvreimmortelle du Dieu de miséricorde, l'E-
Ecclesia, quamquam per se et natura sua salutem glise, bien qu'en soi et de sa nature elle ait pour but
spectat animorum adipiscendamquein coelis felici- le salut des âmes et la félicité éternelle, est cepen-
tatem, tamen in ipso etiam rerum mortalium genere dant, dans la sphère même des choses humaines, la
tot ac tantas ultro parit utilitates, ut plures majo- source de tant et de tels avantages, qu'elle n'en
resve non posset, si in primis et maxime esset ad pourrait procurer de plus nombreux et de plus
tuendam hujus vitaB,quae in terris agitur, prospe- grands, lors même qu'elle eût été fondée surtout et
ritatem institutum. directementen vue d'assurer la félicité de cette vie.
2. Rêvera quacumque Ecclesia vestigium posuit, 2. Partout, en effet, où l'Eglise a pénétré, elle a
continuorerumfaciemimmutavit, popularesquemores immédiatementchangéla face des choses et impré-
sicut virtutibus antea ignotis, ita et nova urbanitate gné les moeurs publiques non seulement de vertus
imbuit : quam quotquot accepere populi, mansuetu- inconnues jusqu'alors, mais encore d'une civilisa-
dine, aequitate,rerum gestarum gloria excelluerunt. tion toute nouvelle. Tous les peuples qui l'ont ac-
cueillie, se sont distingués par la douceur, l'équité
et la gloire des entreprises.
3. Sed vêtus tamen illa est atque antiqua vitupe- 3. Et toutefois c'est une accusation déjà bien an-
ratio, quod Ecclesiam aiunt esse cum rationibus cienne que l'Eglise, dit-on, est contraire aux intérêts
reipublicae dissidentem, nec quicquam posse ad ea de la sociétécivile, et incapable d'assurer les con-
vel commodavel ornamenta conferre, qu» suo jure ditions de bien-être et de gloire que réclame à bon
suaque sponte omnis bene constituta civitas appétit. droit et par une aspiration naturelle toute société
bien constituée.
i. Sub ipsis Ecclesiae primordiis non dissimili 4. Dès les premiers jours de l'Eglise, nous le sa-
opinionis iniquitate agitari christianos, et in odium vons, les chrétiens ont été inquiétés par suite d'in-
invidiamque vocari solitos hac etiam de causa acce- justes préjugés de cette sorte, et mis en butte à la
pimus, quod hostes imperii dicerentur : quotempore haine et au ressentiment, sous prétexte qu'ils étaient
malorum culpam, quibus esset perculsa respublica, les ennemis de l'empire. A cette époque, l'opinion
vulgo libebat in christianum conferre nomen, cum publique mettait volontiers à la charge du nom
rêvera ultor scelerum Deus poenasa sontibus justas chrétien les maux qui assaillaient la société, tandis
exigeret. que c'était Dieu, le vengeur des crimes, qui infligeait
de justes peines aux coupables.
S. Ejus atrocitas calumniae non sine causa inge- 5. Cette odieuse calomnie indigna à bon droit le
nium armavit stilumque acuit Augustini : qui pras- génie de S. Augustin et aiguisa son style. C'est
sertim in CivitateDeivirtutem christianaesapientias, surtout dans son livre de la Cité de Dieu qu'il mit
qua parte necessitudinem habet cum re publica, en lumière la vertu de la sagesse chrétiennedans ses
tanto in lumine collocavit, ut non tam pro christia- rapports avec la chose publique, si bien qu'il sem-
nis sui temporis dixisse causam, quam de crimini- ble moins avoir plaidé la cause des chrétiens de
bus falsis perpetuum triumphum egisse videatur. son temps, que remporté un triomphe perpétuel sur
de si fausses accusations.
Immortale
1. L'encyclique Deiest unrésamésubstantiel
etlumineux del'enseignement traditionnel
duSaint-Siège
surledroitpublic.
Pourla correspondance et pourfaciliter
dutextelatinet dela traduction, l'éludedecet important nousaronsnuméroté
document, les
pensées,oomme l'afaitl'illustre duSéminaire
professeur Romain, MgrCavagnia, danssonouvrage Notionsde droitpublicnaturelet
Encmtre,nousavonsmis,danslatraduotiou
ecclésiastique. destitresà chaque
française, paragraphe.
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEJl XXXIII
6. Similium tamen querelarum atque insimula- 6. Toutefois,le penchant funeste à ces plaintes et
tionumfunesta libido non quievit, ac permultissane à ces griefs ne cessa pas et beaucoup se sont plu à
placuit civilem Vivendi disciplinam aliunde petere, chercher la règle de la vie sociale en dehors des
quam ex doctrinis, qua Ecclesia catholica probat. doctrinesde l'Eglis; catholique. Et mêmedésormais
Immo postremo hoc tempore novum,ut appellant, le droit nouveau, commeon l'appelle, et qu'on pré-
jus, quod inquiunt esse velut quoddam adulti jam tend être le fruit d'un âge adulte et le produit d'une
saeculiincrementum,progrediente libertate partum, liberté progressive,commenceà prévaloir et à domi-
valere ac dominari passim coepit. ner partout.
7. Sed quantumvis multa multi periclitati sunt, 7. Mais, en dépit de tant d'essais, il est de fait
constat, repertam numquam esse praestantiorem qu'on n'a jamais trouvé, pour constituer et régir
constituendte temperandasque civitatis rationem, l'Etat, de systèmepréférable à celui qui est l'épa-
quam quasab evangelica doctrina sponte etflorescit. nouissementspontané de la doctrine évangélique.
8. Maximi igitur momenti atque admodum mu- 8. Nous croyons donc qu'il est d'une importance
neri Nostro apostolico consentaneum esse arbitra- souveraine,et conformeà Notre ChargeApostolique,
mur, novas de re publica opiniones cum doctrina de confronterles nouvellesthéories sociales avecla
christiana conferre: quo modoerroris dubitationis- doctrinechrétienne.Do celte sorte. Nous avons la
que causas ereptum iri, émergente veritate, confidi- confianceque la vérité dissipera, par son seul éclat,
mus, ita ut videre quisque facile queat summa illa toute cause d'erreur et de doute, si bien que chacun
prasceptaviventi, quaesequi et quibus parère debeat. pourra facilement voir ces régies suprêmes de con-
duite qu'il doit suivre et observer.
§ II. — Principesfondamentauxdela sociétéd'aprèsla
doctrinechrétienne.
II. 9. — Non est magninegotiistatuere, qualemsit 9. Il n'est pas bien difficiled'établir quel aspect
speciem formamque habitura civitas, gubernante et quelle forme aura la société, si la philosophie
christiana philosophiarem publicam. chrétienne gouvernela chose publique.
10. Insitum homininatura est, ut in civili socie- 10.L'hommeest né pour vivre en société, car ne
tate vivat : is enim necessariumvitaecultum et pa- pouvant dans l'isolement ni se procurer ce qui est
ratum, itemque ingenii atque animi perfectionem nécessaireet utile à la vie, ni acquérir la perfection
cumin solitudine adipisci non possit, provisum di- de l'esprit et du coeur, la Providence l'a fait pour
vinitus est, ut ad conjunctionemcongregationemque s'unir à ses semblablesen une société tant domes-
hominum nasceretur cum domesticam, tum etiam tique que civile, seule capable do fournir ce qu'il
civilem,quassuppeditare vitsesufficientiamperfectam faut à la perfectionde l'existence.Mais commenulle
sola potest. Quoniamvero non potest societas ulla société ne saurait exister sans un chef suprême et
consistere,nisi si aliquis omnibus praesit, efficaci qu'elle imprime à chacunune mémo impulsion effi-
similique movens singulos ad commune propositum cace vers un but commun,il on résulte qu'une au-
impulsione, efficitur, civili hominum communitati torité est nécessaireaux hommes constitués en so-
necessariamesse auctoritatem, qua regatur : quae, ciété pour les régir ; autorité qui, aussi bien que la
non secusac societas, a natura proptereaque a Deo société,procèdede la nature, et par suite a Dieu
ipso oriatur auctore. pour autour.
11.Ex quo illud consequitur,potestatempublicam H. Il en résulte encore que le pouvoir public ne
per se ipsam non esse nisi a Deo. Solus enim Deus peut venir que de Dieu. Dieu seul, en effet, est le
est verissimus maximusque rerum dominus, cui vrai et souverain Maître des choses : toutes, quelles
subesseet servire omnia, quaecumquesunt, necesso qu'elles soient, doiventnécessairementlui être sou-
est : ita ut quicumquejus imperandi habent, non id mises et lui obéir; de telle sorte que quiconquea le
aliunde accipiant, nisi ab illo summo omnium prin- droit de commander,ne tient ce droit que de Dieu,
cipe Deo.Nonest potestasnisia Deo1. Chef suprême de tous. Toutpouvoirvientde Dieu 1.
12.Jus autem imperii per se non est cumulla rei- 12. Du reste la souveraineté n'est en soi nécessai-
publicaeformanecessario copulatum: aliam sibi vel rementliée à aucuneforme politique : elle peut fort
aliam assumererecte potest, modoutilitatis boniquo bien s'adapter à celle-ciou à celle-là,pourvu qu'elle
communisreapse efficientem. soit de fait apte à l'utilité et au bien commun.
13.Sed in quolibet generereipublicaeomninoprin- 13.Mais quelle que soit la formede gouvernement,
cipes debent summum mundi gubernatorem Deum tous les chefs d'Etat doivent absolument avoir le
intueri, eumque sibimetipsis in administranda civi- regard fixé sur Dieu, Souverain modérateur -Au.
tate tamquam exemplumlegemqueproponere. Deus monde, et dans l'accomplissementdeleur mandat le
enim, sicut in rébus, quas sunt quaequecernuntur, prendre pour modèleet régie. Do même, en effet,quo
causas genuit secundarias,in quibus perspici aliqua dans l'ordre des choses visibles. Dieu a créé des
ratione posset natura actioque divina, quaequead causes secondes,en qui se reflètenten quelquefaçon
eum finem,quo haecrerum spectat universitas, con- la nature et l'action divines, et qui concourentà me-
ducerenf:ita in societatecivili voluit esse principa- ner au but où tend cet univers; ainsi a-t-il vouluque
tum, quem qui gérèrent,ii imaginemquamdamdivi- dans la sociétécivile il y eût une autorité dont les
1.Rom.XIII,i. 1.Rom.XIII,I.
I. e
XXXIV ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
naein genus humanum potestatis divinaequeprovi- dépositaires fussent commeune image de la puis-
dentiaereferrent. Débetigitur imperium justum esse, sance que Dieu a sur le genrehumain en mémotemps
neque herile, sed quasipaternum, quia Dei justissima que de sa providence. Le commandement doit donc
in homines potestas est et cum paterna bonitate con- être juste, c'est moins le gouvernementd'un maître
juncta ; gerendumvero est ad utilitatem civium, quia que d'un père, car l'autorité de Dieu sur les hommes
qui-praesuntceteris, hac una de causa praesunt, ut est très juste et se trouve unie à une paternelle
civilatis utilitatem tueantur. Neque ullo pacto com- bonté. Il doit d'ailleurs s'exercer pour l'avantage des
mitteudum, unius ut, vel paucorum commodoserviat citoyens, parce que ceux qui ont autorité sur les au-
civilis auctoritas, cum ad commune emnium bonum tres en sont exclusivement investis pour assurer le
constituta sit. Quod si, qui proesunt, delabantur in bien public. L'autorité civile ne doit servir, sous
dominatum injustum, si importunitate superbiave aucun prétexte, à l'avantage d'un seul ou de quel-
peccaverint, si maie populo consuluerint, sciant sibi ques-uns, puisqu'elle a été constituée pour le bien
rationem aliquando Deoesse reddendam,idque tanto commun. Si les chefsd'Etat se laissaient entraîner
severius, quanto vel sanctiore in munereversati sint, à une dominationinjuste, s'ils péchaientpar abus de
vel gradum dignitatis altiorem obtinuerint. Patentes pouvoir ou par orgueil, s'ils ne pourvoyaientpas au
potenter tormentapatientur 1. bien du peuple, qu'ils le sachent, ils auront un jour à
rendre compte à Dieu, et ce compte sera d'autant
plus sévère que plus sainte est la fonction qu'ils
exercent et plus élevé le degré de la dignité dont ils
sont revêtus. Lespuissants serontpuissammentpunis 1.
14.Ita sane majestatem imperii reverentia civium 14. De cette manière la suprématie du commande-
honesta et libens comitabitur. Etenim cum semel in ment entraînera l'hommagevolontaire du respect des
animum induxerint, pollene,qui imperant,auctoritate sujets. En effet, si ceux-ci sontune fois bien convain-
a Deo data, illa quidem officia justa ac débita esse cus que l'autorité des souverains vient de Dieu, ils
sentient, dicto audientes esse principibus, eisdemque se sentiront obligés en justice à accueillir docilement
obsequium ac fidem praestare cum quadam similitu- les ordres des princes et à leur prêter obéissance et
dine pietatis,quas liberorum est erga parentes. Omnis fidélité par un sentiment semblable à la piété qu'ont
animapotestatibussublimioribus subditasit 2.—Spernere les enfants envers les parents. Quetoute âmesoitsou-
quippe potestatemlegitimam, quavis eam in persona miseaux puissancesplus élevées2. — Car il n'est pas
esse constiterit, non magislicet, quam divinaevolun- plus permis de mépriser le pouvoir légitime, quelle
tatiresistere: cui si qui résistant, in interitum ruunt que soit la personne en qui il réside, que de résister
voluntarium. Qui resistitpotestati, Dei ordinationiré- à la volonté de Dieu : or, ceux qui lui résistent cou-
sistif ;qui autem resistunt,ipsi sibi damnationemacqui- rent d'eux mêmes à leur perte. Quirésisteau pouvoir,
runl 3. Quapropter obedientiam abjicere, et, per vim résisteà l'ordreétabli par Dieu; et ceux qui lui résis-
multititudinis, rem ad seditionemvocareest crimen tent s'attirent à eux-mêmesla damnation3.Ainsi donc
majestatis, neque humanaetantum, sed etiam divinae. secouer l'obéissance, et révolutionnerla société par
le moyen de la sédition, c'est un crime de lèse-ma-
jesté non seulement humaine, mais divine.
| III. — Dela sociétépolitiqueenversDieu.
III. — 15. Hac ratione constitutam civitatem, 13. La société politique étant fondée sur ces prin-
perspicuum est, omnino debere plurimis maximisque cipes, il est évident qu'elle doit sans faillir accom-
officiis,quae ipsam jungunt Deo, religione publica plir par un culte public les nombreux et importants
satisfacere. — Natura et ratio, quae jubet singulos devoirs qui l'unissent à Dieu. — Si la nature et la rai-
sancte religiosequeDeum colere,quod in ejus potes- son imposent à chacun l'obligation d'honorer Dieu
tete sumus, et quod ab eo profecti ad eumdem re- d'un culte saint et sacré, parce que nous dépendons
verti debemus,eademlege adstringit civilemcommu- do sa puissance, et que issus de Lui, nous devons
nitatem. Homines enim communi societateconjuncti retourner à Lui, elles astreignent à la même loi la
nihilo sunt minus in Dei potestate, quam singuli: société civile. Les hommes en effet, unis par les
neque minorem, quam singuli, gratiam Deosocietas liens d'une société commune, ne dépendent pas
débet, quo auctore coaluit, cujus nutu conservatur, moins de Dieu, que pris isolément; autant au moins
cujus beneficio innumerabilem bonorum, quibus af- que l'individu, la société doit rendre grâce à
fluit, copiam accepit. Quapropter sicut nemini licet Dieu dont elle tient l'existence, la conservationet
sua adversus Deum officia negligere, officiumqueest la multitude innombrable de ses biens. C'est pour-
maximum amplecti et animo et moribus religionem, quoi, de même qu'il n'est permis à personne de né-
nec quam qùisqùe maluerit, sed quam Deus jusserit, gliger ses devoirs envers Dieu, et que le plus grand
quamque certis minimeque dubitandis indiciis unam de tous les devoirs est d'embrasser d'esprit et de
ex omnibus veram esse constiterit : eodem modo ci- coeur la religion, non pas celle que chacun préfère
vitates non possunt, citra scelus, gerere se tamquam mais celle que Dieu a prescrite, et que des preuves
1. Sap.VI,.7. 1.Sap.VI,7.
2. Rom.XIII,2. 2. Rom.XIII,1.
3. Ibid.V,2. 3. Ibid.V,2.
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI XXXV
si Deus omninonon esset, aut curam religionis velut certaines et indubitables établissent comme la seule
alienam nihilque profuturam abjicere, aut asciscere vraie entre toutes : ainsi les sociétés politiques ne
de pluribus generibus indifferenter quod libeat : om- peuvent sans crime se conduire comme si Dieu
ninoquedebent eum in colendonumine morem usur- n'existait en aucune manière, ouse passer de la reli-
pare modumque,quolcoli se Deus ipse demonstravit gion commeétrangère et inutile, ou en admettre une
velle. indifféremment,selon leur bon plaisir. En honorant
la Divinité, elles doivent suivre strictement les ré-
gies et le mode suivant lesquels Dieu lui-même a
déclarévouloir être honoré.
16. Sanctum igitur oportet apud principes esse Dei 16. Les chefs d'Etat doivent donc tenir pour saint
nomen; ponendumque,in prsecipuis illorum officiis le nom de Dieu et mettre au nombre de leurs princi-
religionemgratia complecti,benevolentia tueri, auc- paux devoirs, celui de favoriser la religion, de la
toritate nutuque legum tegere, nec quippiam insti- protéger de leur bienveillance,de la couvrir de l'au-
tuere aut decernere, quod sit ejus incolumitati con- torité tutélaire des lois, et ne rien statuer ou décider
trarium. Id et civibus debent, quibus prassunt. Nati qui soit contraire à son intégrité. Et cela ils le doi-
enim susceptique omnes homines sumus ad summum vent aux citoyens dont ils sont les chefs. Tous, tant
quoddam et ultimum bonorum, quo sunt omnia con- que nous sommes, en effet, nous sommes nés et éle-
silia referendaextra hac fragilitatem brevitatemque vés en vue d'un bien suprême et final auquel il faut
vitaBin coeliscollocatum.Quoniamautem hinc pendet tout rapporter, placé qu'il est aux cieux, au-delà do
hominum undique expleta ac perfecta felicitas, id- cette fragile et courteexistence. Puisque c'est de cela
circo assequi eum, qui commemoratus est, finem que dépend la complète et parfaite félicité des hom-
tanti interest singulorum, ut pluris interesse non mes, il est de l'intérêt suprêmede chacun d'atteindre
possit. Civilem igitur societatem, communi utili- cette fin. Commedonc la société civile a été établie
tati natam, in tuenda prosperitate reipublicae ne- pour l'utilité de tous, elle doit, en favorisant la
cesse est sic consulere civibus, ut obtinendo adipis- prospérité publique, pourvoir au bien des citoyens,
cendoquesummo illi atque incommutabilibono quod de façon non seulement à ne mettre aucun obstacle,
sponte appetunt, non modo nihil importet unquam mais à assurer toutes les facilités possibles à la pour-
incommodi,sed omnes quascumque possit, opportu- suite et à l'acquisition de ce bien suprême et immua-
nitates afferrat. Quarum praecipuaest, ut detur opera ble auquel ils aspirent eux-mêmes.La première de
religioni sancte inviolateque servandae, cujus officia toutes consiste à faire respecter la sainte et inviola-
hominemDeo conjungunt. ble observance de la religion, dont les devoirs unis-
sent l'hommeà Dieu.
§ IV. — Devoirsde l'Etat enversla religion catholique.
Constitution,droits, but de l'Église.Son indépendance
de tout pouvoircivil.Pouvoirtemporeldu Pape.
IV. — 17. Vera autem religio quae sit, non diffi- 17. Quant à décider quelle religion est la vraie,
culter videt qui judicium prudens sincerumqueadhi- cela n'est pas difficile à quiconque voudra en juger
buerit : argumentis enim permultis atque illustribus, avec prudence et sincérité. En effet, des preuves
veritate nimirum vaticiniorum,prodigiorumfrequen- très nombreuses et éclatantes, la vérité des prophé-
tia, celerrimafidei vel per medios hostes ac maxima ties, la multitude des miracles, la prodigieuse célé-
impedimenta propagatione, martyrum testimonio, rité de la propagationde la foi, mêmeparmi ses en-
aliisque similibus liquet, eam esse unice veram, nemis, et en dépit des plus grands obstacles, le té-
quam Jésus Christus et instituit ipsemet et Ecclesiae moignagedes martyrs, et d'autres arguments sem-
suastuendam propagandamquedemandavit. blables, prouvent clairement que la seule vraie
religion est celle que Jésus-Christ a instituée lui-
même, et qu'il a donné mission à son Eglise de
garder et de propager.
18.Nam unigenitus Dei filius societatem in terris 18. Car le Fils unique de Dieu a établi sur la terre
constituit, quae Ecclesia dicitur, cui excelsumdivi- une société qu'on appelle l'Eglise, et il l'a chargée
numque munus in omnes saeculorumestâtes conti- de continuer à travers tous les âges la mission su-
nuandum transmisit, quod Ipse a Patre acceperat. blime et divine, que Lui-même avait reçue de son
Sicutmisitme Pater, et egomitto vos 1. — Ecceego vo- Père. Commemon père m'a envoyé,moije vous en-
biscumsum omnibusdiebus usque ad consummationem voie. 1 — Voiciqueje suisavecvousjusqu'à la consom-
sseculi2. — Igitur sicut Jesus Christus in terras venit mation des siècles2. De même donc que Jésus-Cbrist
ut homines vitam habeant et abundantius habeant 3, est venu sur la terre afin que les hommes eussentla
eodem modo Ecclesia propositum habet, tamquam vieet l'eussentplus abondamment3, ainsi l'Eglise se
finem,salutem animorum sempiternam : ob eamque propose comme fin le salut éternel des âmes; et
rem talis est natura sua, ut porrigat sese ad totius dans ce but, telle est sa constitution qu'elle em-
1.Joan.XX,21. 1.Jean.XX,81.
2.Matth.XXVIII, 20. 2.Matth.XXVIH, 20.
3.Joan.X,10. 3.Jean.X, 10.
XXXVI ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI
complexum gentis humante, nullis nec locorum nec brasse dans son extensionl'humanité tout entière,
temporumlimitibus circumscripta. PredicateEvange- et n'est circonscrite par aucune limite, ni de temps,
lium omnicrealurx 1. ni de lieu. Prêchez,l'Evangileà toutecréature 1.
19.Tam ingenti hominum multitudini Deus ipse 19. A cette immense multitude d'hommes. Dieu
magistratus assignavit,qui cum potestate praeessent: lui-mêmea donné des chefs avec le pouvoir de les
unumque omnium principem, et maximum certissi- gouverner.A leur tête il en a préposéun seul,dont il
mumque veritatis magistrum esse voluit, cui claves a voulu faire le plus grand et le plus sur maître de
regni coelorumcommisit. Tibi dabo clavesregni coelo- vérité,età qui il a confiéles clefsdu royaumedes cieux.
ntm 2. — Pasce agnos pasce oves3; — egorogavi Je le donnerailesclefsdu royaumedesCieux2. — Pais
pro le, ut non deficiatfidestua 4. mesagneaux...pais mes brebis 3. — J'ai prié pour toi,
afin que ta foi ne défaillepas 4.
20. Hasesocietas, quamvis ex hominibus constat, 20. Bien que composéed'hommes, comme la so-
non secus ac civilis communitas, tamen propter ciété civile, cette société de l'Eglise, soit pour la fin
finem sibi constilututu, atque instrumenta, quibus qui lui est assignée,soit pour les moyens qui lui ser-
ad finem contendit, supernaturis est et spiritualis : vent à l'atteindre, est surnaturelle et spirituelle. Elle
atque ideirco distinguitur ac differt a societate ci- se distingue donc et diffère de la 1société civile. En
vili : et, quodplurimutu intorest, societas est génère outre, et ceciest de la plus grande importance, elle
et juré perfeela, cum adjumenta ad incolumitatem constitueune sociétéjuridiquementparfaite dans son
actionemque suam necossaria, voluntate beneflcio- genre, parce que, de l'expresse volonté et par la
que condiloris sui, omnia in se et per se ipsa possi- grâce de son fondateur, elle possède en soi et par
deat. elle-même toutes les ressources qui sont nécessaires
à son action.
21. Sicut finis, quo tendit Ecclesia, longe nobilis- 21. Comme la fin à laquelle tend l'Eglise est de
sinuis est, ila ejus potestas est omnium praestantis- beaucoupla plus noble de toutes, de mêmeson pou-
sima, nequeimperiocivili potest haberi inferior, aut voir l'emporte sur tous les autres, et ne peut en au-
cidem esse ullo modoobnoxia. cune façon être inférieur ni assujetti au pouvoir ci-
vil.
22. Ilevera Jésus Christus Apostolis suis libera 22. En effet, Jésus-Christ a donné plein pouvoir à
inandalà dedit in sacra, adjuncta tum ferendarutn ses Apôtres dans la sphère des choses sacrées, en y
legum veri nominis facultatc, tum gemina, quaehinc joignant tant la faculté de faire de véritables lois,
consequitur, judicandi puniendique potestate. " Data que le double pouvoir qui en découlede juger et de
» est mihi omnispotestas in coeloet in terra : cunles punir. « Toutepuissancem'a été donnéeau ciel et sur
n ergo doecteomnesgénies... docentes eos servareom- » la terre, allez donc,enseigneztoutesles nations...ap-
it nia quxeumque mandavi vobis» 5. Et alibi : « Si » prenez-leurà observertout ce que je vousai pres-
» non audicrit eos, die Ecclesise» G. Atquo iterum : »crit 3. „ Et ailleurs. «S'il nelesécoutepas, dites-leà
« In proinpluItabenlesulcisciomitemin obedientiam» 1. » l'Eglise6. Et encore: Ayezsoin de punir toutedéso-
« Pviirsus: « Duriusmjam secundumpotestatemquam » béissancei.» De plus : « Je seraiplus sévèreen vertu
» Dominusdcdil mihi in wdificalionemet non in des- » du pouvoirque le Seigneurm'a donné pour Fédifica-
» truclionem» 8. ltaqtio dtix hominibus esse ad coe- » lion el non pour la ruine 8. » C'est donc à l'Eglise,
lestia, non civitas sed Ecclesia débet : eidemque non à l'Etat, qu'il appartient de guider les hommes
hoc est munus assignattiui a Deo, ut de iis, quas re- vers les choses célestes, et c'est à elle que Dieu a
ligionem altingunl, videat ipsa et statuât : ut do- donné le mandat de connaître et de décider de tout
certt omnes gentes : ut christiani nominis fines, ce qui louche à la religion ; d'enseigner toutes les
quoadpotesl, laie proférât; brevi, ut rem christianam nations, d'étendre aussi loin que possible les fron-
libère expeditequejudicio suo administre. tières du nom chrétien ; bref, d'administrer libre-
ment et tout à sa guise les intérêts chrétiens.
23. Hanc vero auctoritatem in se ipsa absolutam 23.Cette autorité parfaite en soi, et ne relevant
planequo sui juris, quoe ab assentatrice principum que d'elle-même,depuis longtemps battue en brèche
philosophiajamdiu oppugnatur, Ecclesia sibi asse- par une philosophie adulatrice des princes, l'Eglise
rcre ilemquepubliée oxercere numquam desiit, pri- n'a jamais cessé, ni de la revendiquer, ni de l'exer-
mis omnium pro ea propugnantibus Apostolis, qui cer publiquement. Les premiers de tous ces cham-
cum disseminareEvangeliuma principibus Synagogas pions ont été les Apôtres, qui, empêchés par les
prohibcrenlur.constanterrespondebant,obedireoporlet princes de la synagoguede répandre l'Evangile, ré-
Deomagis,quam hominibus9. Eamdem sancti Eccle- pondaient avec fermeté : « Il faut obéir à Dieu plu-
1.Marc.XVI,15.
2. Matth.XVI,19. 1.Marc. XVI,15.
3.Joan.XXI,16-17. 2.Mallh.XIV,19.
4.Luc.XXII, 32. 3.Jean.XXI,16-17
5.Matth. XXVIII,18-19-20, 4.Luc.XXII, 32.
6. Matth.XVIII,17. 5. Matth.XXVIII, 16,19,<0L
7.IICor.X,6. 6.Matth.XVIII, 17.
8. II Cor.XIII,10. 7. II,Cor.X,6.
9. Act.V.26. 8.Ibid.XIII.13.
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEl XXXVII
siaePatres rationum momentis tueri pro opportuni- tôt qu'aux hommes1. » C'est elle que les Pères de
tate studuerunt: Romanique Pontificesinvicta animi l'Eglise se sont appliqués à défendrepar de solides
constantia adversus oppugnatores vindicare num- raisons, quand ils en ont eu l'occasion, et que les
quam praetermiserunt. Pontifes Romains n'ont jamais manqué de revendi-
quer avec une constance invincible contre ses agres-
seurs.
24. Quin etiam et opinione et re eamdemprobarunt 24. Bien plus, elle a eu pour elle, en principe et en
ipsi viri principes rerumque publicarum gubernato- fait, l'assentiment des princes et des chefs d'Etat,
res, ut qui paciscendo, transigendis negotiis, mit- qui, dans leurs transactions, en envoyant et en rece-
tendis vicissimqueaccipiendislegatis, atque aliorum vant des ambassades, et par l'échange d'autres bons
mutatione officiorum, agere cum Ecclesia tamquam offices, ont constamment agi avec l'Eglise comme
cum suprema potestate légitima consueverunt. avec une puissance souveraineet légitime.
25. Neque profecto sine singulari providentis Dei 25. Aussi n'est-ce pas sans une dispositionparticu-
consiliofactumesse censendumest, ut haec ipsa po- lière de la Providence de Dieu, que cette autorité a
testas principatu civili, velut optima libertatis suas été munie d'un principat civil commede la meilleure
tutela, muniretur. sauvegarde de son indépendance.
§ V. — Le gouvernementdu genre humain a été divisé
par Dieuentre la puissanceecclésiastique et la puis-
sancecivile.Souverainetéet relation des deux puis-
sances.
V.—26.Itaque Deushumanigeneris proeurationem 26.Dieu a doncdiviséle gouvernementdu genre hu-
inter duas potestates partitus est, scilicetecclesiasti- main entre deux puissances : la puissance ecclésias-
cam et civilem, alteram quidem divinis, alteram hu- tique et la puissance civile; celle-là préposée aux
manis rébus prsepositam.Utraque est in suo génère chosesdivines, celles-ci aux choses humaines. Cha-
maxima : habet utraque certos, quibus contineatur, cuned'elles en son genre est souveraine,chacuneest
terminos , eosque sua cujusque natura causaque renferméedans les limites parfaitementdéterminéeset
proxima definito; unde aliquis velut orbis circums- tracées en conformitéde sa nature et de son but spé-
cribitur, in quo sua cujusque actio jure proprio ver- cial. Il y a donc commeune sphère circonscrite dans
setur. laquelle chacuneexerceson action,jure proprio.
27.Sed quia utriusque imperium ost in eosdem, 27. Toutefois,leur autorité s'exerçant sur les marnes
cumusuvenire possit, ut res una atque eadem,quam- sujets, il peut arriver qu'une seule et même chose,
quam aliter atque aliter, sed tamen eadem res ad bien qu'à un titre différent,mais pourtant une seule
utriusque jus judiciumquepertineat, débet providen- et même chose, ressortisse à la juridiction et au ju-
tissimus Deus, a quo sunt ambae constitutae,utrius- gement de l'une et de l'autre puissance. Il était donc
que itinera recte atque ordine composuisse.Queeau- digne de la sage providence de Dieu, qui les a éta-
temsunt a Deo ordinatsesunt i. Quod ni ita esset, blies toutes les deux, de leur tracer leur voieet leurs
funestarum saepe contentionum concertationumque rapports entre elles. Les puissancesqui sont, ont été
causa} nascerentur ; nec raro sollicitus animi, velut disposéespar Dieu 2. S'il en était autrement, il naî-
in via ancipiti haerere homo deberet, anxius quid trait souvent des causes de funestes contentions et
facto opus esset, contraria jubentibus binis potes- de conflits, et souvent l'homme devrait hésiter, per-
tatibus, quarum recusare imperium, salvo officio, plexe comme en face d'une double voie, ne sachant
non potest. Atqui maxime istud répugnât de sapien- que faire, par suite des ordres contraires de deux
tia cogitare et bonitate Dei, qui vel in rébus physi- puissances dont il ne peut en consciencesecouer le
cis, quamquam sunt longe inferioris ordinis, tamen joug. Il répugnerait souverainement de rendre res-
naturales vires causasque invicem conciliavit mo- ponsable de ce désordre la sagesse et la bonté de
derata ratione et quodam velut concentu mirabili, Dieu, qui dans le gouvernementdu monde physique,
ita ut nulla earum impediat ceteras, cunctaequesi- pourtant d'un ordre bien inférieur, a si bien tempéré
mul illuc, quo mundus spectat, convenienter aptissi- les unes par les autres les forces et les causes natu-
mequeconspirent. relles, et les a fait s'accorder d'une façon si admira-
ble, qu'aucune d'elles ne gêne les autres, et que tou-
tes dans un parfait ensemble conspirent au but au-
quel tend l'univers.
28. Itaque inter utramque potestatem quaedamin- 28. Il est donc nécessaire qu'il y ait entre les deux
tercédât necesseet ordinata colligatio; quaequidem puissances un système de rapports, bien ordonné,
conjunctioni non immerito comparatur, per quam non sans analogie avec celui qui dans l'hommecons-
anima et corpus in homine copulantur. Qualis autem titue l'union de l'âme et du corps. On ne peut se
et quanta ea sit, aliter judicari non potest, nisi res- faire une juste idée de la nature et de la forcede ces
piciendo,uti diximus, ad utriusque naturam, haben- rapports, qu'en considérant,commenous l'avons dit,
daque ratione excellentiaeet nobilitatis causarum ; la nature de chacune des deux puissances, et en te-
cum alteri proxime maxiineqne propositum sit re- nant compte de l'excellenceet dela noblesse de leur
1. Act.V,89.
1.Rom.Xlll,1. 5.Rom.XIII,
XXXVIII ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI
rura moftalium curare commoda, alteri coelestiaac but, puisque l'une a pour fin prochaine et spéciale
sempiterna bona comparare. de s'occuper des intérêts terrestres, et l'autre de pro-
curer les biens célesteset éternels.
29. Quidquid igitur est in rébus humanis quoquo 29. Ainsi tout ce qui dans les choseshumainesest
modo sacrum, quidquid ad salutem animarum cul- sacré à un titre quelconque,tout ce qui toucheau sa-
tumve Dei pertinet, sive taie illud sit natura sua, lut des âmes et au culte de Dieu, soit par sa nature,
sive rursus taie intelligatur propter causam ad soit par rapport à son but, tout cela est du ressort
quam refertur, id est omne in potestate arbitrioque de l'autorité de l'Eglise. Quant aux autres choses
Ecclesiae: cetera vero, quaecivile et politicumgenus qu'embrasse l'ordre civile et politique, il est juste
complectitur, rectum est civili auctoritati esse sub- qu'elles soient soumisesà l'autorité civile, puisque
jecta, cum Jesus Christus, jusserit, quas Caesaris Jésus-Christ a commandéde rendre à César ce qui
sint, reddi Caèsari,quaeDei, Deo. est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu.
30.Incidunt autem quandoquetempora,cum alius 30. Des temps arrivent parfois où prévaut un au-
quoque concordiaemodus ad tranquillam libertatem tre moded'assurer la concordeet de garantir la paix
valet, nimirum si qui principes rerum publicarumet et la liberté, c'est quand les chefsd'Etat et les Sou-
PontifexRomanusde re aliqua separata in idem pla- verains Pontifes se sont mis d'accord par un traité
citum consenserint. QuibusEcclesiatemporibus ma- sur quelquepoint particulier. Dans de telles circons-
ternas,pietatis eximia documentapraebet,cumfacili- tances l'Eglise donne des preuves éclatantes de sa
tais indulgentiaequetantum adhibere soleat, quan- charité maternelle en poussant aussi loin que possi-
tum maxime potest. ble l'indulgenceet la condescendance.
§ VI. —Ladoctrinecatholiquesur l'indépendance et les
rapportsdes deux puissancessauvegardeles droits et
lesdevoirsde chacune.
VI. — 31. Ejusmodi est, quam summatim attigi- 31. Telle est, d'après l'esquisse sommaire que nous
mus, civilis hominum societatischristiana tempera- en avons tracée, l'organisation chrétienne de la so-
tio, et haecnontemere neque ad libidinem ficta, sed ciété civile, et cette théorie n'est ni téméraire ni ar-
ex maximis ducta verissimisqueprincipiis,quaeipsa bitraire, mais elle se déduit des principes les plus
naturali ratione confirmantur. élevés et les plus certains, confirméspar la raison
Talis autem conformatio reipublicaenihil habet, naturelle elle-même.Cette constitutionde la société
quod possit aut minus videri dignnm amplitudine politique n'a rien qui puisse paraître peu digne ou
principum, aut parum décorum: tantumque abest, malséant à la dignité des princes. Loin de rien ôter
ut jura majestatis imminuatut potius stabiliora at- aux droit de la majesté, elle les rend au contraire
que augustiora faciat. Immo, si altius consideretur, plus stables et plus augustes. Bien plus, si l'on y
habet illa conformatio perfectionemquamdam ma- regarde de plus près, on reconnaîtra à cetteconsti-
gnam, qua carent ccteri rerum publicarum modi : ex tution une grande perfectionqui fait défaut aux au-
eaque fructus essent sane excellenteset varii conse- tres systèmespolitiques, et elle produirait certaine-
euturi, si modo suutn partes singulaegradum tene- ment des fruits excellents et variés, si seulement
rent, atque illud integre efficerent,cui unaquaeque chaquepouvoir demeurait dans ses attributions, et
prasposita est, officiumet munus. mettait tous ses soins à remplir l'office et la tâche
qui lui ont été déterminés.
32.Révéra in ea, quam ante diximus, constitutione 32.En effet, dans la constitution de l'Etat, telle
reipublicae,sunt quidem divina atque humanacon- que nous venons de l'exposer, le divin et l'humain
venienti ordine partita : incolumia civium jura, sont délimités dans un ordre convenable, les droits
eademque divinarum, naturalium, humanarumque des citoyens sont assurés et placés sous la protection
legum patrocinio defensa : officiorum singulorum des mêmeslois divines, naturelles et humaines; les
cum sapienter constituta descriptio, tum opportune devoirs de chacun sont aussi sagement tracés que
sancita custodia. Singuli homines in hoc ad sempi- leur observanceest prudemmentsauvegardée. Tous
ternam illam civitatemdubio laboriosoquecurriculo les hommes, dans cet acheminementincertain et pé-
sibi sciunt prosstoesse, quos tuto sequantur ad in- nible vers la cité éternelle, savent qu'ils ont à leur
grediendumduces, ad perveniendumadjutores : pa- service des guides sûrs pour les conduireau but, et
riterque intelligunt, sibi alios essead securitatem, ad des auxiliaires pour l'atteindre. Ils savent de même
fortunas, ad commodacetera, quibus communishase que d'autres chefsleur ont été donnés pour obtenir
vita constat, vel parienda vel conservandadatos. et conserver la sécurité, les biens et les autres avan-
tages de cette vie.
33. Societasdomesticaeam, quam par est, firmi- 33.La sociétédomestiquetrouve sa solidité néces-
tudinemadipiscitur ex unius atque individui sancli- saire dans la sainteté du lien conjugalun et indisso-
tate conjugii : jura officiaqueinter conjugessapienti luble ; les droits et les devoirsdes époux sont réglés
Justifia et sequitatereguntur : debitum conservatur en toute justice et équité ; l'honneur dû à la femme
mulieri decus : auctoritas viri ad exemplumest auc- est sauvegardé: l'autorité du mari se modèle sur
toritatis Dei conformata: temperata patria potestas l'autorité de Dieu : le pouvoir paternel est tempéré
convenienterdignitati uxoris prolisque : denique li- par les égards dus à l'épouse et aux enfants ; enfin.
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI XXXIX
beroruui tuitioni, commodis,institutioni optime con- il est parfaitement pourvu à la protection, au bien-
sulitur. être et à l'éducation de ces derniers.
34. In genere rerum politico et civili, leges spec- 34. Dans l'ordre politique et civil, les lois ont pour
tant commune bonum, neque voluntate judicioque but le bien commun, dictéesnon par la volonté et le
fallaci multitudinis, sed veritate justitiaque dirigun- jugement trompeur de la foule, mais par la vérité et
tur : auctoritas principum sanctitudinem quamdam la justice. L'autorité des princes revêt une sorte de
induit humana majorem, contineturque ne declinet a caractère sacré plus qu'humain, et elle est contenue
justitia, neu modum in imperando transiliat : obe- de manière à ne pas s'écarter de la justice, ni excé-
dientia civium habet honestatem dignitatemque co- der sonpouvoir.L'obéissancedes sujets va de pair avec
mitem, quia non est hominis ad hominem servitus, l'honneur et la dignité,parcequ'elle n'est pas un assu-
sed obtemperatio voluntati Dei, regnum per homines jettissement d'hommeà homme, mais une soumission
exercentis. Quo cognitoac persuaso, omninoad justi- à la volonté de Dieu régnant par des hommes. Une
tiam pertinere illa intelliguntur, vereri majestatem fois cela reconnu et accepté, il en résulte clairement
principum, subesse constanter et fideliter potestati que c'est un devoir de justice de respecter la majesté
publicae,nihil seditiose facere, sanctam servare dis- des princes, d'être soumis avec une constante fidé-
ciplinantcivitatis. lité à la puissance politique, d'éviter les séditions, et
d'observer religieusement la constitution de l'Etat.
35.Similiter ponitur in officiiscaritas mutua, be- 35. Pareillement, dans cette série des devoirs se
nignitas, liberalitas : non distrahitur in contrarias place la charité mutuelle, la bonté, la libéralité.
partes, pugnantibus inter se praeceptis,civis idem et L'homme qui est à la fois citoyen et chrétien, n'est
christianus : deniqueamplissima bona, quibus mor- plus déchiré en deux par des obligations contradic-
talem quoquehominumvitam christiana religio sua toires. Enfin les biens considérables dont la religion
sponte explet, communitati societatique civili omnia chrétienneenrichit spontanémentmêmela vie terres-
quaeruntur: ita ut illud appareat verissime dictum, tre des individus, sont acquis à la communautéet à
« pendet a religione, qua Deus colitur, rei publicae la sociétécivile: d'où ressort l'évidence de ces paro-
» status : multaque inter hune et illam cognatioet les : « Le sort de l'Etat dépenddu culte que l'on rend
,» familiaritas inlercedit t. » » à Dieu : et il y a entre l'un et l'autre de nombreux
» liens de parenté et d'étroite amitié 1.»
VII. — Biens gui résulteraientde l'applicationet du-
maintiendes doctrineschrétiennes.
VII. —36.Eorumvim bonorum mirabiliter, uti so- 36. En plusieurs passages, saint Augustin a admi-
let, persecutus est Augustinuspluribus locis, maxime rablement relevé, selon sa coutume, la valeur de ces
vero ubi Ecclesiam Catholicam appellat iis verbis : biens, surtout quand il interpelle l'Église catholique'
«Tu pueriliter pueros, fortiter juvenes, quiete senes, en ces termes : « Tu conduis et instruis les enfants
» prout cujusque non corporis tantum, sed et animi » avec tendresse, les jeunes gens avec force,les vieil-
» setas est, exerces ac doces. Tu feminas viris suis " lards avec calme, comme le comportel'âge nonseu-
» non ad explendam libidinem, sed ad propagândam " lement du corps, mais encorede l'âme. Tu soumets
» prolem, et ad rei familiaris societatem, casta et » les femmesà leurs maris par une chaste et fidèle
» fideliobedientia subjicis. Tu viros conjugibus,non » obéissance, non pour assouvir la passion mais
» ad illudendum imbecillioremsexum, sed sinceri » pour propagerl'espèce et constituer la société de la
» amoris legibus praeficis.Tu parentibus filios libéra » famille. Tu donnes autorité aux maris sur leurs
» quadam servitute subjungis, parentes filiis pia do- » femmes, non pour se jouer de la faiblesse du sexe,
» minatione praeponis Tu cives civibus, tu gentes » mais pour suivre les lois d'un sincère amour. Tu
» gentibus, et prorsus homines primorum parentum » subordonnesles enfants aux parents par une sorte
» recordatione, non societate tantum, sed quadam » de libre servitude ; et tu préposes les parents aux
» etiamfraternitate conjungis. Doces regesprospicere » enfants par une tendre autorité. Tu unis non seu-
» populis, mones populos se subdere regibus. Quibus « lement en société, mais dans une sorte de frater-
» honor debeatur, quibus affectus, quibus reveren- » nité les citoyens aux citoyens, les nations aux na-
» tia, quibus timor, quibus consolatio, quibus admo- » tions et les hommesentre eux par le souvenir des
» nitio, quibus cohortatio, quibus disciplina, quibus » premiers parents. Tu apprends aux rois à veiller
» objurgatio,quibus supplicium, sedulo doces; os- » sur les peuples, et tu prescris aux peuples de se
» tendens quemadmodum et non omnibus omnia, et » soumettre aux rois. Tu enseignes avec soin à qui
» omnibus caritas, et nulli debeatur injuria 2. » — » est dû l'honneur, à qui l'affection, à qui le respect,
Idemque alio loco maie sapientes reprehendenspoli- » à qui la crainte, à qui la consolation, à qui l'aver-
ticos philosophos : « Qui doctrinam Christi adver- » tissement, à qui l'encouragement, à qui la correc-
» sam dicunt esse reipublicae,dent exercitum talem, » tion, à qui la réprimande, à qui le châtiment : et
» quales doctrina Christi esse milites jussit, dent » tu fais savoir comment,si toutes ces chosesne sont
» taies provinciales, taies maritos, taies conjuges, » pas dues â tous, à tous est due la charité, et à
» personne l'injustice 2. » — Ailleurs le même Doc-
1.Saor.Imp.adCyrillum Alexand.et Episcopos —Cfr.
metrop. 1.Sacr.ImperadCyrillum Alexand.et episcoposMetrop.(Cf.
Labbeum Collect.
Conc.T.III. Labbeum Collect. T.
Conc, III.)
8. Demoribus Eccl.Cap.XXX, n.63. I 2. SaintAugustin.—Desmoeurs del'Eglisecath.eh.30,N.63.
XL ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
» taies parentes, taies filios, taies dominos, taies ser- teur reprend en ces termes la fausse sagesse des po-
» vos, taies reges, taies judicos, taies denique debi- litiques philosophes : « Ceux qui disent que la doc-
» torum ipsius fisci redditores et exactores, quales » trine du Christ est contraire au bien de l'Etat,
» esse praecipit doctrina christiana, et audeant eam » qu'ils nous donnent une armée de soldats tels que
» dicere adversam esse reipublicae, immo vero non » les fait la doctrine du Christ, qu'ils nous donnent
» dubitent eam confiteri magnam, si obtemperetur, » de tels gouverneurs de province, de tels maris, de
» salutem esse reipublicae 1. » » telles épouses, de tels parents, de tels enfants, de
» tels maîtres, de tels serviteurs, de tels rois, de tels
» juges, de tels tributaires enfin, et dos percepteurs
» du fisc tels que les veut la doctrine chrétienne! Et
» qu'ils osent encoredire qu'elle est contraire à l'E-
» tat ! Mais que bien plutôt ils n'hésistent pas à
» avouer qu'elle est une grande sauvegarde pour
» l'Etat, quand on la suit 1. »
§ VIII. La sociétéau moyenâge. — Bienfaits de la sa-
gessechrétienneet de sa divinevertu.
VIII. — 37. Fuit aliquando tempus, cum evange- 37. Il fut un temps où la philosophie de l'Evangile
lica philosophia gubernaret civitates : quo tempore gouvernait les Etats. A cette époque, l'influence de
christianae sapientias vis illa et divina virtus in le- la sagesse chrétienne et sa divine vertu pénétraient
ges, instituta, mores populorum, in omnes reipublicas les lois, les institutions, les moeurs des peuples,
ordines rationesque penetraverat : cum religio per tous les rangs et tous les rapports de la société ci-
Jesum Christum instituta in eo, quo sequum erat, vile. Alors la religion instituée par Jésus-Christ, so-
dignitatis gradu firmitér collocata, gratia principum lidement établie dans le degré de dignité qui lui est
legitimaquemagistratuum tutelaubique floreret: cum dû, était partout florissante, grâce à la faveur des
sacerdotium atque imperium concordia et arnica offl- princes et à la. protection légitime des magistrats.
ciorum vicissitudo auspicato conjungeret. Eoque Alors le sacerdoceet l'empire étaient liés entre eux
modo composita civitas fructus tulit omni opinione par une heureuse concorde et l'amical échange de
majores, quorum viget memoria et vigebit innumera- bons offices. Organisée de la sorte, la société civile
bilibus rerum gestarum consignata monumentis, donna des fruits supérieurs à toute attente, dont la
quas nulla adversariorum arte corrumpi aut obscu- mémoire subsiste et subsistera, consignéequ'elle est
rari possunt. dans d'innombrables documents, que nul artifice des
adversaires ne pourra corrompre ou obscurcir.
38. Quod Europa christiana barbaras gentes edo- 38. Si l'Europe chrétienne a dompté les nations
muit, easque a feritate ad mansuetudinem, a su- barbares, et les a fait passer de la férocité à la man-
perstitione ad veritatem traduxit : quod Maometha- suétude, de la superstition à la vérité ; si elle a re-
norum incursiones victrix propulsavit : quod civilis poussé victorieusement les invasions musulmanes ;
cultus principatum retinuit, et ad omne decus hu- si elle a gardé la suprématie de la civilisation, et, si
manitatis ducem se magistramque praebere ceteris en tout ce qui a fait honneur à l'humanité, elle s'est
consuevit : quod germanam libertatem eamque mul- constamment et partout montrée guide et maîtresse;
tiplicem gratificata populis est : quod complura ad si elle a gratifié les peuples de la vraie liberté sous
miseriarum solatium sapientissimo instituit, sine ses diverses formes ; si elle a très sagement fondé
controversia magnam débet gratiam religioni, quam une foule d'oeuvrespour le soulagementdes misères,
ad tantas res suscipiendas habuit auspicem ad per- il est hors de doute qu'elle en est grandement rede-
ficiendas adjutricem. vable à la religion, sous l'inspiration et avec l'aide
de laquelle elle a entrepris et accompli de si grandes
choses.
39. Mansissent profecto eadem bona, si utriusque 39. Tous ces biens dureraient encore, si l'accord
potestatis concordia mansisset: majoraque oxpectari des deux puissances avait persévéré, et il y avait
jure poterant, si auctoritati, si magisterio, si consi- lieu d'en espérer de plus grands encore, si l'autorité,
liis Ecclesiaemajore esset cum fide perseverantiaque si l'enseignement, si les avis de l'Eglise avaient ren-
obtemperatum. Illud enim perpétuaslegis instar ha- contré une docilité plus fidèleet plus constante.Car
bendum est, quod Ivo Carnutensis ad Paschalem II il faudrait tenir comme loi imprescriptible, ce qu'Y-
Pontificem maximum perscripsit, « cum regnum et ves de Chartres écrivit au Pape Pascal II : « Quand
» sacerdotium inter se conveniunt, bene regitur >>l'empire et le sacerdoce vivent en bonne harmo-
» mundus, floret et fructificat Ecclesia. Cum vero in- » nie, le monde est bien gouverné, l'Eglise est flo-
» ter se discordant, non tantum parvae res non cres- » rissante et féconde.Mais quand la discorde se met
» cunt, sed etiam magnas res miserabiliter dilabun- » entre eux, non seulement les petites choses ne
» tur 1. » » grandissent pas, mais les grandes elles-mêmes
» dépérissent misérablement i. »
1.Epist.CXXXVIII(al5)adMarcellinum,Cap.II, n.15. 1. SaintAugustin.Lettre138,à Marcellin.C.II. n.15
t. Ep.CCXXXVIII. 2.Lettre238.
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI XLI
S IX. — Perturbation socialeapportéepar la réforme
protestante et par ses doctrinestubversibes.— Le
prétendu droit nouveau.
IX. 40.Sed perniciosa illa ac deplorandarerum no- 40. Mais ce pernicieux et déplorablegoût de nou-
varum studia, quae saeculoXVI excitata sunt, cum veautés que vit naître le XVIesiècle, après avoir
primum religionem christianam miscuissent, mox d'abord bouleversé la religion chrétienne, bientôt
naturali quodam itinere ad philosophiam, a philoso- par une pente naturelle passa à la philosophie, et de
phia ad omnes civilis communitatis ordines perve- la philosophie à tous les degrés de la sociétécivile.
nerunt. Ex hoc velut fonte repetenda illa recentiora C'està cette source qu'il faut faire remonter cesprin-
effrenataelibertatis capita, nimirum in maximis per- cipes modernes de liberté effrénée,rêvés et promul-
turbationibus superiore saeculoexcogitata in medio- gués parmi les grandes perturbations du siècle der-
queproposita,perinde ac principia etfundamenta novi nier, comme les principes et les fondements d'un
juris, quod et fuit antea ignotum, et a jure non so- droit nouveau,inconnu jusqu'alors, et sur plus d'un
lum christiano, sed etiam naturali plus una ex parte point en désaccordnon seulementavecle droit chré-
discrepat. tien, mais avec le droit naturel.
41. Eorum principiorum illud est maximum, om- 41. Voici le premier de tous ces principes : tous les
nes homines, quemadmodumfgenerenaturaque simi- hommes, dés lors qu'ils sont de môme race et de
les intelliguntur, ita reapse esse in actionevitae in- même nature, sont semblables, et, par le fait, égaux
ter se pares : unumquemqueita esse sui juris, ut entre eux dans la pratique de la vie : chacun re-
nullo modosit alterius auctoritati obnoxius: cogitare lève si bien de lui seul, qu'il n'est d'aucune façon
de re qualibet quae velit, agere quod lubeat, libère soumis à l'autorité d'autrui : il peut en toute liberté
posse : imperandi aliis jus esse in nemine. His in- penser sur toute chosece qu'il veut, faire ce qui lui
formata disciplinis societate, principatus non est plaît : personne n'a le droit de commander aux
nisi populi voluntas, qui, ut in sui ipsius unice est autres. Dans une société fondée sur ces principes,
potestate, ita sibimetipsi solus imperat : deligit au- l'autorité publique n'est que la volonté du peuple,
tem, quibus se committat, ita tamen ut imperii non lequel, ne dépendantque de lui-même, est aussi le
tam jus, quam munus in eos transferat, idque suo seul à se commander.Il choisitses mandataires, mais
nomine exercendum. de telle sorte qu'il leur délègue moins le droit que
la fonction du pouvoir, pour l'exercer en son nom.
42.In silentio jacet dominatio divina, non secusac 42.La souveraineté de Dieu est passée sous si-
vel Deus aut nullus esset, aut humani generis so- lence, exactement commesi Dieu n'existait pas, ou
cietatemnihil curaret ; vel homines sive singuli sive ne s'occupait en rien de la société du genre humain :
sociati nihil Deo deberent, vel principatus cogitari ou bien comme si les hommes, soit en particulier,
posset ullus, cujus non in Deo ipso causa et vis et soit en société, ne devaient rien à Dieu, ou qu'on
auctoritas tota resideat. Quo modo, ut perspicitur, pût. imaginerune puissancequelconquedont la cause,
est respublica nihil aliud nisi magistra et guberna- la force et l'autorité ne résidât pas tout entière en
trix sui multitudo : cumquepopulus omniumjurium Dieu même. De cette sorte, on le voit, l'Etat n'est
omnisque potestatis fontem in se ipse continere di- autre chose qne la multitude maîtresse et se gouver-
catur, consequenserit, ut nulla ratione officiiobli- nant elle-même, et dès lors que le peuple est censé
gatam Deo se civitas putet; ut religionem publice la source de tout droit et de tout pouvoir, il s'en-
profiteatur nullam; nec debeat ex pluribus quas vera suit que l'Etat ne se croit lié à aucune obligation
sola sit, quaerere,nec unam quamdam ceteris ante- envers Dieu, ne professe officiellementaucune reli-
ponere, nec uni maxime favore, sed singulis generi- gion, n'est pas tenu de rechercher quelle est la seule
bus oequalitatemjuris tribuere ad eum finem, dum vraie entre toutes, ni d'en préférer une aux autres,
disciplina reipublicaene quid ab illis detrimenti ca- ni d'en favoriser une principalement; mais qu'il doit
piat. Consentaneumerit, judicio singulorum permit- leur attribuer à toutes l'égalité en droit, à cette fin
tere omnem de religione quasstionem; licere cuique seulement de les empêcher de troubler l'ordre pu-
aut sequi quam ipse malit, aut omnino nullam, si blic. Par conséquent chacun sera libre de se faire
nullam probet. Hinc profecto illa nascuntur ; exlex juge de toute question religieuse, chacun sera libre
uniuscujusque conscicntiae judicium; liberrimaB de d'embrasser la religion qu'il préfère, ou de n'en sui-
Deocolendo,de non colendo, sententiae; infinita tum vre aucune, si aucune ne lui agrée. De là découlent
cogitandi, tum cogitatapublicandi licentia. nécessairement la liberté absolue d'adorer ou de ne
pas adorer Dieu, la licence sans bornes et de penser
et de publier ses pensées.
§ X. Pénibleconditionfaite à l'Eglise dans les Etats
modernes par le prétendu droit nouveau.Envahis-
sementdes droits de l'Eglise; perturbationsociale.
X. — 43. His autem positis, quaemaxime proban- 43. Etant donné que l'Etat repose sur ces principes
tur hoc tempore,fundamentis reipublicas,facile appa- aujourd'hui en grande faveur, il est aisé de voir à
ret, quem in locum quamque iniquum compellatur quelle place on relègue injustement l'Eglise. — Là,
Ecclesia. — Nam ubi cum ejusmodi doctrinis actio en effet, où la pratique est d'accord avec de telles
XLII ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
rerum consentiat, nomini catholico par cum societa- doctrines, la religion catholique est mise dans l'Etat
tibus ab eo alienis vel etiam inferior locus in civi- sur le pied d'égalité, ou môme d'infériorité avec des
tate tribuitur : legum ecclesiasticarum nulla habetur sociétés qui lui sont étrangères, Il n'est tenu nul
ratio : Ecclesia, quasjussu mandatoque Jesu Christi comptedes lois ecclésiastiques ; l'Eglise qui a reçu de
docereomnes gentes debet, publicam populi institu- Jésus-Christ ordre et mission d'enseigner toutes les
tionem jubetur nihil attingere. — De ipsis rébus, nations se voit interdire toute ingérence dans l'ins-
quas sunt mixti juris, per se statuunt gubernatores truction publique. — Dans les matières qui sont de
rei civilis arbitratu suo, in eoque genere sanctissi- droit mixte, les Chefs d'Etat portent d'eux-mêmes
mas Ecclesiaeleges superbe comtcmnunt. Quare ad des décrets arbitraires, et sur ces points affichentun
jurisdictionem suam trahunt matrimonia christiano- superbe mépris des saintes lois de l'Eglise. Ainsi ils
rum, decernendo etiam de maritali ivinculo, de uni- font ressortir à leur juridiction les mariages des
tate, de stabilitate conjugii: movent possessiones chrétiens ; portent des lois sur le lien conjugal, son
clericorum, quod res suas Ecclesiam tenere posse unité, sa stabilité ; mettent la main sur les biens des
negant. Ad summam, sic agunt 'cum Ecclesia, ut so- clercs, et dénient à l'Eglise le droit de posséder. En
cietatis perfecta? génère et juribus opinione detrac- somme, ils traitent l'Eglise comme si elle n'avait ni
tis, plane similem habeant ceterarum communitatum, le caractère ni les droits d'une société parfaite, et
quas respublica continet : ob eamque rem si quid qu'elle fût simplement une association semblable
illa juris, si quid possidet facultatis ad agendum lé- aux autres qui existent dans l'Etat. Aussi tout ce
gitimas,possidere dicitur concessubeneficioqueprin- qu'elle a de droits, de puissance légitime d'action,
cipum civitatis. ils le font dépendre de la concession et de la faveur
des gouvernements.
44. Si qua vero in republica suum Ecclesia jus, 44. Dans les Etats où la législation civile laisse à
ipsis civilibus legibus probantibus, teneat, publice- l'Eglise son autonomie, et où un concordatpublic est
quo inter utramque potestatem pactio aliqua facta intervenu entre les deux puissances, d'abord on crie
sit, principio clamant, dissociari Ecclesiasrationesa qu'il faut séparer les affaires de l'Eglise des affaires
reipublicaerationibus oporlere ; idque eo consilio, ut de l'Etat, et cela dans le but de pouvoir agir impu-
facere contra inlerpositam fidem impune liceat, om- nément contre la foi jurée et se faire arbitre de tout,
niumque rerum habere, remotis impedimentis, ar- en écartant tous les obstacles. — Mais commel'E-
bitrium. — Id vero cum patienter ferre Ecclesia non glisene peut le souffrir patiemment, car ce serait pour
possit, neque enim potest officiadesorere sanctissima elle déserter les plus grands et les plus sacrés des
et maxima,omninoquepostulet, ut obligatasibi fides devoirs, et qu'elle réclame absolument le religieux
intègre religioseque solvalur, saepe sacram inter ac accomplissement de la foi qu'on lui a jurée, il naît
civilem potestatem dimicaliones nascuntur, quarum souvent entre la puissance spirituelle et le pouvoir
ille ferme est exittis, alteram, ut quae minus est civil des conflits dont l'issue presque inévitable est
opibus humanis valida, alteri ut validiori succum- d'assujettir cellequi est le moins pourvue de moyens
bere. humains à celui qui en est mieux pourvu.
45. Jta Ecclesiam, in hoc rerum publicarum statu, 45. Ainsi, dans cette situation politique que plu-
qui nunc a plerisquo adamatur, mos et voluntas est sieurs favorisent aujourd'hui, il y a une tendance
aut prorsus de medio pellere, aut vinctam adstric- des idées et des volontés à chasser tout à fait l'Eglise
tamquo imperio tenere. Quae publiée aguntur, eo de la société ou à la tenir assujettie et enchaînéeà
consiliomagnampartem aguntur. Leges, administra- l'Etat. La plupart des mesures prises par les gouver-
tiocivitatum.expers religionis adolescentium institu- nements s'inspirent de ce dessein. Los lois, l'admi-
tio, spolialio excidiumque ordinum religiosorum nistration publique, l'éducationsans religion, la spo-
eversio principatus civilis Pontificum Romanorum, liation et la destruction des Ordres religieux, la sup-
hue spectant omnia, incidere nervos institutorum, pression du pouvoir temporel des Pontifes Romains,
christianorum, Ecclesiasquecatholicaset libertatem tout tond à ce but : frapper au coeurles institutions
in angustum deducere, et jura cetera comminuere. chrétiennes, réduire à rien la liberté de l'Eglise ca-
tholique et à néant ses autres droits.
§XI. —Tristesconséquences pour la sociétéde l'applica-
tion du prétendu droit nouveau.— Fausseté de ces
théories.—La souverainetédupeuple.—L'indifférence
en matière religieuse.—La pleine libertéde penseret
d'écrire.
- XI. — 46. Ejusmodi de regenda civitate sententias 46. La simple raison naturelle démontre combien
ipsa naturalis ratio convincit, a veritate dissidere cette façon d'entendre le gouvernementcivil s'éloigne
plurimum. — Quidquid enim potestatis usquam est, de la vérité.— Son témoignage,en effet, suffit à éta-
a Deo tamquam maximo augustissimoquefonte pro- blir que tout ce qu'il y a d'autorité parmi les hommes
ficisci, ipsa natura testatur. Imperium autem popu- procède de Dieu, commed'une source auguste et su-
lare, quod, nullo ad Deum respectu, in multitudine prême. Quant à la souveraineté du peuple, que sans
inesse natura dicitur, si praeclare ad suppeditandum tenir aucun compte de Dieu, l'on dit résider de droit
valet blandimenta et flammas multarum cupidita- naturel dans le peuple, si elle est éminemmentpropre
ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI XLIII
tum, nulla quidem nititur ratione probabili, neque à flatter et à enflammer une foule de passions, elle
satis habere virium potest ad securitatem publicam ne repose sur aucun fondementsolide, et ne saurait
quietamque ordinis constantiam. Rêvera his doctri- avoir assez de force pour garantir la sécurité publi-
nis res inclinavere usque eo, ut hasea pluribus tam- que, et le maintien paisible de l'ordre. En effet,sous
quam lex in civili prudentia sanciatur, seditiones l'empire de ces doctrines, les principes ont fléchi à
posse jure conflari.Valet enim opinio, nihilo princi- ce point que, pour beaucoup, c'est une loi impres-
pes pluris esse, quam delectos quosdam, qui volun- criptible en droit politique, que de pouvoir légitime-
tatem popularem exequantur : ex quo fit, quod ne- ment soulever des séditions. Car l'opinion prévaut
cesse est, ut omnia sint pariter cum populi arbitrio que les chefs du gouvernement nesont plus que des
mutabilia, et timor aliquis turbarum semper impen- déléguéschargés d'exécuter la volonté du peuple :
deat. d'où cette conséquencenécessaire,que tout peut éga-
lement changer au gré du peuplent qu'il y a toujours
à craindre des troubles.
47. De religione autem putare, nihil inter formas 47.Relativement à la religion, penser qu'il est in-
dispares et contrarias interesse, hune plane habet différent qu'elle ait des formes disparates et contrai-
exitum, nolle ullam probare judicio, nolle usu. At- res équivaut simplement à n'en vouloir ni choisir ni
qui istud ab atheismo, si nomine aliquid differt, re suivre aucune. C'est l'athéisme moins le nom. Qui-
nihil differt.Quibus enim Deum esse persuasum est, conque,en effet, croit en Dieu, s'il est conséquent et
ii, modo constare sibi nec esse perabsurdi velint, ne veut pas tomber dans l'absurde, doit nécessaire-
necessario intelligunt, usitatas in cultu divino ratio- ment admettre que les divers cultes en usage entre
nes, quarum tanta est differentia maximisque etiam lesquels il y a tant de différence,de disparité et d'op-
de rébus dissimilitudo et pugna, aequeprobabiles, position, même sur les points les plus importants,
ssquebonas,aequeDeo accepta esse omnes non posse. ne sauraient être tous également vrais, également
bons, égalementagréables à Dieu.
48. Sic illa quidlibet sentiendi litterarumque for- 48. De même la liberté de penser et de publier ses
mis quidlibet exprimendi facultas, omni moderatione pensées, soustraite à toute règle, n'est pas de soi un
posthabita, non quoddamest propria vi sua bonum, bien dont la société ait à se féliciter ; mais c'est plu-
quo societas humana jure laetetur: sed multorum ma- tôt la source et l'origine de beaucoup de maux. —
lorumfons et origo. —Libertas, ut quae virtus est La liberté, cet élément de perfectionpour l'homme,
hominemperficiens,debet in eo quod verum sit, quod- doit s'appliquer à ce qui est vrai et à ce qui est bon.
que bonam, versari : boni autem verique ratio mu- Or, l'essence du bien et de la vérité ne peut changer
tari ad hominisarbitrium non potest, sed manetsem- au gré de l'homme, mais elle demeure toujours la
per eadem, neque minus est, quam ipsa rerum na- même, et, non moins que la nature des choses, elle
tura, incommutabilis. Si mens adsentiatur opinioni- est immuable. Si l'intelligence adhère à des opinions
bus falsis, si malum voluntas adsumat et ad id se fausses, si la volonté choisit le mal et s'y attache,
applicet, perfectionem sui neutra consequitur, sed ni l'une ni l'autre n'atteint sa perfection, toutes deux
excidunt dignitate naturali et in corruptelam ambae déchoient de leur dignité native et se corrompent. Il
delabuntur. Quaecumquesunt igitur virtuti veritati- n'est donc pas permis de mettre au jour et d'exposer
que contraria, ea in luce atque in oculis hominum aux yeux des hommes ce qui est contraire à la vertu
ponere non est sequum : gratia tutelave legum defen- et à la vérité, et bien moins encorede placer cette
dere, multo minus. Solabene acta vita via est in coe- licence sous la tutelle etla protection des lois. Il n'y
lum, quo tendimus universi : ob eamque rem aber- a qu'une voie pour arriver au ciel vers lequel nous
rat civitas a régula et prasscriptione naturae, si li- tendons tous : c'est une bonne vie. L'Etat s'écarte
eeitiam opiniorumpraveque factorumin tantum las- donc des règles et des prescriptions de la nature, s'il
civire sinat, ut impune liceat mentes a veritate, ani- favorise à ce point la licence des opinions et des ac-
mos a virtute deducere. tions coupables que l'on puisse impunément détour-
ner les esprits de la vérité et les âmes de la vertu.
49.Ecclesiamvero, quam Deus ipse constituit, ab 49. Quant à l'Eglise, que Dieu lui-même a établie,
actionevitaeexcladere, a legibus, ab institutione ado- l'exclure de la vie publique, des lois, de l'éducation
loscentium,a societate domestica, magnus et perni- de la jeunesse, de la société domestique, c'est une
ciosus est error. Bene morata civitas esse, sublata grande et pernicieuse erreur. Une société sans reli-
religione, non potest : jamque plus fortasse, quam gion ne saurait être bien réglée; et déjà, plus peut-
oporteret, est cognitum, qualis in se sit et quorsum être qu'il ne faudrait, l'on voit ce que vaut en soi et
pertineat illa de vita et moribus philosophia, quam dans ses conséquencescette soi-disant morale civile.
civilemnominant. Vera est magistra virtutis et cus- La vraie maltresse de la vertu et la gardienne des
tos morum Ecclesia Christi : ea est, quas incolumia moeursest l'Eglise du Christ. C'est elle qui conserve
tuetur principia, uude officiaducuntur, propositisque en leur intégrité les principes d'où découlentles de-
causis ad honeste vivendum efficacissimis,jubet non voirs, et qui, suggérant les plus nobles motifs de
solum fugere prave facta, sed regere motus animi bien vivre, ordonne non seulement de fuir les mau-
rationi contrarios etiam sine effectu. vaises actions, mais de dompter les mouvementsde
l'âme contraires à la raison, quand mêmeils ne se
traduisent pas en acte.
XLIV ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
50. Ecclesiam vero in suorum officiorum munere 50. Prétendre assujettir l'Eglise au pouvoir civil
potestati civili velle esse subjectam, magna quidem dans l'exercice de son ministère, c'est à la fois une
injuria, magna temeritas est. Hoc facto porturbatur grande injustice et une grande témérité. Par le fait
ordo, quia quas naturalia sunt praeponunturiis, quas même on trouble l'ordre, car on donne le pas aux
sunt supra naturam : tollitur aut certe magnopere choses naturelles sur les choses surnaturelles ; on
minuitur frequentia bonorum, quibus si nulla re im- tarit, ou certainement ondiminue beaucoupl'affluence
pediretur, communemvitam Ecclesia compleret:prae- des biens dont l'Eglise, si elle était sans entraves,
tereaque via ad inimicitias munitur et certamina, comblerait la société; et, de plus, on ouvre la voieà
quaequanlam utrique reipublicaeperniciem afferrant, des haines et à des luttes dont de trop fréquentes ex-
nimis saape eventus demonstravit. périences ont démontré la grande et funeste influence
sur l'une et l'autre société.
S XII. Les papes ont toujoursréprouvéet réprouventles
doctrinesde ce prétendu droit nouveau.
XII.— 51. Hujusmodi doctrinas, quaenec humanae 51. Ces doctrines que la raison humaine réprouve,
rationi probantur, et plurimum habent in civilem et qui ont une influence si considérable sur la mar-
disciplinam mominti, Romani Pontifices decessores che des choses publiques, les Pontifes Romains, Nos
Nostri, cum probe intelligerent quid a se postularet prédécesseurs, dans la pleine conscience de ce que
apostolicum munus., impuno abire nequaquam passi réclamait d'eux la charge Apostolique, n'ont jamais
sunt. Sic Grogorius XVI per Encyclicas litteras hoc souffert qu'elles fussent impunément émises. C'est
initio MirariVosdie XV Augustianno MDCCCXXXII, ainsi que dans sa Lettre Encyclique Mirari Vos du
magna sententiarum gravitate ea perculit, quaejam 15 août 1832,Grégoire XVI avec une grande autorité
prasdieabantur, in cnltu divino nullum adhibere de- doctrinale a repoussé ce que l'on avançait dès lors :
lectum oportero : intogrum singulis esse, quod ma- qu'en fait de religion, il n'y a pas de choix à faire
lint, do religione judicare: solam cuique suam esse que chacun est maître d'en juger à son aise : que
cmscicntiam judicem : proelerea edere quae quisque chacun ne relève que de sa conscience, et peut, en
scnserit, itomquo res moliri novas in civitate licere. outre, publier cequ'il pense étourdir des révolutions
Do rationibus rei sacrap reique civilis distrahendis dans l'Etat. Au sujet de la séparation de l'Eglise et
sic idem Pontifex : « Neque laetiora et religioni et de l'Etat, ce Pontife s'exprime en ces termes: «Nous
» principatui ominari possemus ex eorum votis, qui » ne pouvons pas attendre pour l'Eglise et l'Etat des
» Ecclesiam a regno separari, mutuainque imperii » résultats meilleurs des tendances de ceux qui pré-
» cum sacerdotio concordiam abrumpi discupiunt. » tendent séparer l'Eglise de l'Etat, et rompre la con-
» Constat quippe, pertimosci ab impudentissimaeli: » corde mutuelle entre le sacerdoceet l'empire. C'est
» bertalis amaloribus concordiam illam.quae semper » qu'en effetles fauteurs d'uneliberté effrénéeredou-
» rei et sacras et civili fausta extitit et salutaris. »— » tent cette concorde, qui a toujours été si favora-
Non absimili modo Pins IX, ut sese opportunitas » ble et salutaire aux intérêts religieux et civils .» —
dédit, ex opinionibus falsis, quae maxime valere coe- De la même manière, Pie IX, chaque fois que l'occa-
pissent, plures notavit, easdemque postea in unum sion s'en présenta, a condamné les fausses opinions
cogi jussit, ut scilicet in tanta errorum colluvione les plus en vogue, et ensuite il en fit faire un recueil,
haberent catholici homines, quod sine offensionese- afin que dans un tel déluge d'erreurs les catholiques
querentur i. eussent une direction sûre 1.
§ XIII Résumédesdécisionsdes papes relativement
à la constitutionet au gouvernementdes Etats. Nou-
vellecondamnationdesdoctrinesdu droit nouveau.
XIII. — 52. Ex iis autem Pontificum praescriptis 52.De ces décisions des Souverains Pontifes il faut
illa omnino intelligi necesse est, ortum publicaepo- absolument admettre que l'origine de la puissance
testatis a Deoipso, non amultitudinerepelioportere: publique doit s'attribuer à Dieu et non à la multi-
seditionum licentiam cum ratione pugnare : officia tude: que le droit à l'émeute répugne à la raison;
1.Earumnonnullas indicaresufflciat. 1.Ilsuffitd'enciterquelques-unes.— Prop.XIX.—L'Eglise n'e t
—
Prop.XIX Ecclesia nonestvera perfectaque societasplane pasunesociété : ellene jouitpas <le
vraie,parfaite,indépendante
libers,necpolletsuispropriiset constantibus juribussibia divino droitspropreset constants queluia conféréssondivinFondateur:
suoFundatorecollatis, sedcivilispotestatis qutesint maisilappartient
est definire au pouvoircivildedéfinirquelssontlesdroits
Ecclesisejura ac limites,intraquoseademjuraexercerequeat. dol'Egliseet dansquelleslimitesellepeutlesexercer
Prop.XXXIX — Reipublicae status,utpoteomnium juriumorigo Prop.XXXIX. — L'Etat,commeorigineet sourcedetous les
et fons,jurequodampolletnulliscircumscriplo limitibus. droits,jouitd'undroitillimité.
—
Prop.LV Ecclesia a statu,Slatusque abEcclesia sejungendus Prop.LV.—Il fautséparerl'Eglisede l'Etatetl'Etatdel'E-
est. glise.
Prop.LXXIX — ... falsumest,civilem cujusque cultusliberla- Prop.LXXIX. —.. . il estfauxquelalibertéciviledesculteset
tem,itemqne plenampotestatem omnibus attribulamquaslibetopi- la pleinefacultédonnéeà chacundemanifester ouvertement etpu-
nionescogitationesque palampubllceque manifestandi,conducere bliquement n'importequellesopinionsoupensées, ait pour consé-
ad populorum moresanimosque faciliuscorrumpendos, aoindiffe- quencede corrompre plusfacilementles esprit»etlesnau etde
rentismi pestempropagandam. propager lapestedel'indifférence.
ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI XLV
religionisnullo loco numerare, vel uno modoesse in que ne tenir aucun compte des devoirs de la religion,
disparibus generibus affectos, nefas esse privatis ou traiter de la même manière les différentesreli-
hominibus,nefascivitatibus : immoderatamsentiendi gions, n'est permis ni aux individus ni aux sociétés:
sensusqt e palam jactandi potestatem non esse in que la liberté illimitée de penser et d'émettre en pu-
civium juribus neque in rébus gratia patrocinioque blic ses pensées ne doit nullement être rangée parmi
dignis ulla ratione ponendam. — Similiter intelligi les droits des citoyens, ni parmi les choses dignes
débet, Ecclesiam societatem esse, non minus quam de faveur et de protection. — De même il faut ad-
ipsam civitatem, genere et jure perfectam : neque mettre que l'Eglise, non moins que l'Etat, de sa na-
debere, qui summam imperii teneant, committereut ture et de plein droit, est une société parfaite, que
sibi servire aut subesse Ecclesiam cogant, aut les dépositaires du pouvoir ne doivent pas prétendre
minus esse sinant ad suas res agendas liberam, aut asservir et subjuguer l'Eglise, ni diminuer sa liberté
quicquam de ceteris juribus detrahant, quae in ipsam d'action dans sa sphère, ni lui enlever n'importe le-
a Jesu Christo collata sunt. — In negotiis autem quel des droits qui lui ont été conférés par Jésus-
mixti juris, maximeesse secundumnaturam itemque Christ. — Dans les questions de droit mixte, il est
secundumDei consilia non secessionemalterius po- pleinementconforme à la nature ainsi qu'aux des-
testatis ab altéra, multoqueminus contentionem,sed seins de Dieu, non de séparer une puissance de l'au-
plane concordiam,eamquecum causis proximis con- tre, moins encore de les mettre en lutte, mais bien
gruentem, quae causas utramque societatem genue- d'établir entre elles cette concordequi est en harmo-
runt. nie avec les attributs spéciaux que chaque société
Hase quidem sunt, quas de constituendis tempe- tient de sa nature.
randisque civitatibus ab Ecclesia catholica praeci- Telles sont les règles tracées par l'Eglise catholi-
Diuntur. que relativement à la constitution et au gouverne-
ment des Etats.
53. Quibus tamen dictis decretisque si recte diju- 53. Ces principes et ces décrets, si l'on veut en ju-
dicari velit, nulla per se reprehenditur ex variis rei- ger sainement, ne réprouvent en soi aucune des dif-
publicaeformis, ut quaenihil habent, quod doctrines férentesformes de gouvernement,attendu que celles-
catholicaerepugnet, eaedemquepossunt, si sapienter ci n'ont rien qui répugne à la doctrine catholique, et
adhibeantur et juste, in optimo statu tueri civitatem. que si elles sont appliquées avec sagesse et justice,
54.Immo nequeillud per se reprehenditur, partici- elles peuvont toutes garantir la prospérité publique.
peraplus minus esse populum rei publicas: quod ip- 54. Bien plus, on ne réprouve pas en soi que le
sum certis in temporibus certisque legibus potest peuple ait sa part plus ou moins grande au gouver-
non solum ad utilitatem, sed etiam ad officiumper- nement; cela même en certains temps et sous certai-
tinere civium. nes lois, peut devenir non seulement un avantage,
mais un devoir pour les citoyens.
55. Insuper neque causa justa nascitur, cur Eccle- 55. De plus, il n'y a pour personne de juste motif
siam quisquam criminetur, aut esse in lenitate faci- d'accuser l'Eglise d'être l'ennemie soit d'une juste
litateque plus aequorestrictam, aut ei, quas germana tolérance, soit d'une saine et légitimeliberté. — Ea
et légitima sit, libertati inimicam.— Revera sidivini effet, si l'Eglise juge qu'il n'est pas permis de met-
cultus varia generaeodemjure esse, quo veram reli- tre les divers cultes sur le même pied légal que la
gionem,Ecclesia judicat non licere, non ideo tamen vraie religion, elle ne condamne pas pour cela les
eos damnat rerum publicarum moderatores, qui ma- chefs d'Etats qui, en vue d'un bien à atteindre, ou
gni alicujus aut adipiscendi boni, aut prohibendi d'un mal à empêcher, tolèrent dans la pratique que
causa mali, moribus atque usu patienter ferunt, ut ces divers cultes aient chacun leur place dans l'E-
ea habeant singula in civitate locum. tat.
56. Atque illud quoque magnoperecavere Ecclesia 56. C'est d'ailleurs la coutume de l'Eglise de veil-
solet ut ad amplexandam fidemcatholicamnemo in- ler avec le plus grand soin à ce que personne ne soit
vitus cogatur, quia, quod sapienter Augustinus mo- forcé d'embrasser la foi catholique contre son gré,
net, crederenonpotest homonisi volens1. car, ainsi que l'observe sagement saint Augustin,
l'hommenepeut croirequede pleingré 1.
57.Simili ratione nec potest Ecclesia libertatem 57.Par la même raison, l'Eglise ne peut approu-
probare eam, quae fastidium gignat sanctissimarum ver une liberté qui engendre le dégoût des plus sain-
Dei legum, debitamque potestati legitimas obedien- tes 'ois de Dieu et secouel'obéissance qui est due à
tiam exuat. Est enim licentia verius, quam lïbertas; l'autorité légitime. C'est là plutôt une licence qu'une
rectissimeque ab Augustino libertas perdilionis 2, a liberté, et saint Augustin l'appelle très justement,
Petro Apostolo velamenmalitise3 appellatur ; immo, une libertédeperdition 2 et l'Apôtre Saint Pierre, un
cum sit praeterrationem, vera servitus est : qui, enim voilede méchanceté3. Bien plus, cette prétendue li-
facitpeccalum, servuset peccati *. Contra illa ger- berté étant opposéeà la raison est une véritable ser-
mana est atque expetenda libertas, quaesi privatisai vitude. Celuiqui commetle péchéest l'esclavedu péché1.
1.Tract.XXVIinJoan.,n.2. 1.Traité26surSaintJean,n.8.
2. Epist.CV,addonatistas, cap.II,n, 9, 2. Epist.105,auxDonat.ch.2,n.9.
3. t. Petr.II, 16. 3. 1S.PetriII,16.
4.JoanVIII,34. 4.Jean,VllI.M.
XLVI ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
spectetur, rroribus et oupiditatibus, teterrimis do- Celle-là, au contraire, est la liberté vraie et dési-
minis, homiaem servir» non sinit : si publice, civi- rable qui dans l'ordre individuel ne laisse l'homme
bus sapienter proeest, facultatem augendorum com- esclave ni dès erreurs ni des passions qui sont ses
modorum large ministrat : remque publicam ab pires tyrans ; et dans l'ordre public trace de sages
alieno arbitrio defendit. règles aux citoyens, facilite largement l'accroisse-
ment du bien-être, et préserve de l'arbitraire d'au-
trui la chose publique.
38. Atqui honestam hanc et homine dignam liber- 58. Cette liberté honnête et digne de l'homme, l'E-
tatem, Ecclesia probat omnium maxime, eamque ut glise l'appreuve au plus haut point, et, pour en ga-
tueretur in populis flrmam atque integram, eniti et rantir au peuple la ferme et intégrale jouissance, elle
contendere numquam destitit. n'a jamais cessé de lutter et de combattre.
59. Revera quae res in civitate plurimum ad com- 59. Oui, en vérité, tout ce qu'il peut y avoir de sa-
munem salutem possunt : quas sunt contra licentiam lutaire au bien général dans l'Etat, tout ce qui est
principum populo maie consulentium utiliter insti- utile à protéger le peuple contre la licence des prin-
tntus : quas summam rempublicam vetant in munici- ces qui ne pourvoient pas à son bien, tout ce qui em-
palem, vel domesticam rem importunius invadere : pêche les empiétements injustes de l'Etat sur la com-
quae valent ad decus, ad personam hominis, ad mune ou la famille ; tout ce qui intéresse l'honneur,
oequabilitatemjuris in singulis civibus conservan- la personnalité humaine, et la sauvegarde des droits
dam, earum rerum omnium Ecclesiam catholicam égaux de chacun, tout cela l'Eglise catholique en a
vel inventricem, velauspicem, vel custodem semper toujours pris soit le patronage, soit la protection,
fuisse, superiorum aetatum monumenta testantur. comme l'attestent les monuments des âges précé-
Sibi igitur perpetuo consentiens, si ex altéra parte dents. Toujours conséquente avec elle-même, si,
libertatem respuit immodicam, quas et privatis et d'une part, elle repousse une liberté immodérée, qui
populis in licentiam vel in servitutem cadit, ex al- pour les individus et les peuples dégénère en li-
tera volens et libens amplectitur res meliores, quas cence ou en servitude, de l'autre, elle embrasse de
dies afferat, si vere prosperitatem contineant hujus grand coeur les progrès que chaque jour fait naître,
vit», quae quoddam est velut stadium ad alteram si vraiment ils contribuent à la prospérité de cette
eamque perpetuo mansuram. vie, qui est comme un acheminement vers la vie fu-
ture et durable à jamais.
§ XIV. — L'Eglise, en répudiant les fausses doctrines
des mauvais systèmespolitiques et les opinionsmal-
saines, ne repoussepas lesdécouvertesscientifiquesdu
géniecontemporain.Elle encouragelesarts et l'indus-
trie en les dirigeant vers un but honnête et salutaire,
XIV. — 60. Ergo quod inquiunt, Ecclesiam recen- 60. Ainsi donc, dire que l'Eglise voit de mauvais
tiori civitatum invidere disciplinas, et quaeeirmque oeilles formes plus modernes des systèmes politiques
horum temporumingenium peperit, omnia promiscue et repousse en bloc toutes les découvertes du génie
repndiare, inanis est et jejuna calumnia. Insaniam contemporain, c'est une calomnie vaine et sans fon-
quidem repudiat opinionum : improbat nefaria sedi- dement. Sans doute, elle répudie les opinions mal-
tionum studia, illumque nominatim habitum animo- saines, elle réprouve le pernicieux penchant à la ré-
rum, in quo initia perspiciuntur voluntarii disces- volte, et tout particulièrement cette prédisposition
sus a Deo : sed quia omne, quod verum est a Deo des esprits où perce déjà la volonté de s'éloigner de
proficisci necesse est, quidquid, indagando, veri at- Dieu ; mais commetout ce qui est vrai ne peut pro-
tingatur, agnoscit Ecclesia velut quoddam divinae céder que de Dieu, en tout ce que les recherches de
mentis vestigium. Cumque nihil sit in rerum natura l'esprit humain découvrent de vérité, l'Eglise re-
veri, quod doetrinis divinitus traditis fidemabroget, connaît commeune trace de l'intelligence divine ; et
multa quaeadrogent, omnisque possit inventio veri comme il n'y a aucune vérité naturelle qui infirme la
ad Deum ipsum vel cognoscendum vel laudandum foi aux vérités divinement révélées, que beaucoup la
impellere, idcirco quidquid accédât ad scientiarum confirment, et que toute découverte de la vérité
fines proferendos, gaudente et libenle Ecclesia sem- peut porter à connaître et à louer Dieu lui-même,
per accedet : eademque studiose, ut solet, sicut alias l'Eglise accueillera toujours volontiers et avec joie
disciplinas, ita illas etiam fovebit ac provehet, quae tout ce qui contribuera à élargir la sphère des
positas sunt in explicatione natures. Quibus in stu- sciences ; et ainsi qu'elle l'a toujours fait pour les
diis, non adversatur Ecclesia si quid mens repererit autres sciences, elle favorisera et encouragera celles
novi : non repugnat quin plara quaerantur ad decus qui ont pour objet l'étude de la nature. En ce genre d'é-
commoditatemque vitas : immo inertiae desidiaeque tudes, l'Eglise ne s'oppose à aucundécouvertede l'es-
inimiea, magnopere vult ut hominum ingenia uberes prit ; elle voit sans déplaisir tant de recherches qui
ferant exercitatione et cultura fructus : incitamenta ont pour but l'agrément et le bien-être ; et même, en-
praebet ad omne genus artium atque operum : omnia- nemie née de l'inertie et de la paresse, elle souhaite
que harum rerum studia ad honestatem salutemque grandement que l'exercice et la culture fassent por-
virtute sua dirigens, impedire nititur, quominus a ter au génie de l'homme des fruits abondants. Elle
ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI XLVII
Deo bonisque coelestibus sua hominem intelligentia a des encouragements pour toute espèce d'arts et
atque industria deflectat. d'industries, et en dirigeant par sa vertu toutes ces
recherches vers un but honnête et salutaire, elle
s'applique à empêcherque l'intelligence et l'industrie
de l'homme ne le détournent de Dieu et des biens
célestes.
61. Sed haec,tametsi plena rationis et consilii, mi- 61. C'est cette manière d'agir pourtant si raisonna-
nus probantur hoc tempore, cum civitates non modo ble et si sage, qui est discréditée en ces temps où les
recusant sese ad christianae sapientiss referre for- Etats non seulement refusent de se conformer aux
mam, sed etiam videntur quotidielongius ab ea velle principes dela philosopiechrétienne, mais paraissent
discedere. — Nihilominusquia ine lucem prolata Ve- vouloir s'en éloigner chaque jour davantage. Néan-
ritas solet sua sponte late fluere, hominumquemen- moins, le propre de la lumière étant de rayonner
tes sensimpervadere, idcircoNos conscientiamaximi d'elle-même au loin, et de pénétrer peu à peu les
sanctissimiqueofficii, hoc est Apostolica, qua fungi- esprits des hommes, mus comme Nous sommes par
mur ad gentes universas, legatione permoti, ea quae la consciencedes très hautes et très saintes obliga-
vera sunt, libere, ut debemus, eloquimur : non quod tions de la mission apostolique dont Nous sommes
non perspectam habeamus rationem temporum, aut investi envers tous les peuples. Nous proclamons li-
repudianda aetatis nostraehonesta atque utilia incre- brement, selon notre devoir, la vérité. Non.pas que
menta putemus, sed quod rerum publicarum tutiora nous ne tenions aucun compte des temps, ou que
ab offensionibusitinera ac firmiora fundamenta vel- nous estimions devoir proscrire les honnêtes et utiles
lemus: idque incolumi populorum germana liber- progrès de notre âge; mais parce que Nous vou-
tate; in hominibus enim mater et custos optimali- drions voir les affaires publiques suivre des voies
bertatis veritas est : veritasliberabitvos1. moins périlleuses et reposer sur de plus solides fon-
dements : et cela en laissant intacte la liberté légi-
time des peuples, cette liberté dont la vérité est
parmi les hommes la source et la meilleure sauve-
garde : La véritévonsdélivrera 1.
§ XV. — Devoirsdes catholiquesclansles conjonctures
difficilesde notre époque.— 1° En théorie.
XV. — 62. Itaque in tam difficili rerum cursu, 62.Si donc dans ces conjonctures difficiles les ca-
catholici homines, si Nos, ut oportet, audierint, fa- tholiques Nous écoutent, comme c'est leur devoir,
cile videbunt quaesua cujusque sint tam in opinioni- ils sauront exactement quels sont les devoirs do
bus, quam in factis officia.— Et in opinando quidem, chacun tant en théoriequ'en pratique. — En théorie
quaecumquePontifices romani tradiderint vel tradi- d'abord il est nécessaire de s'en tenir avec une adhé-
turi sunt, singula necesse est et tenere judicio sta- sion inébranlable à tout ce que les Pontifes Romains
bili comprehensa,et palam, quoties res postulaverit, ont enseigné ou enseigneront; et, toutes les fois que
profiteri. Ac nominatimde iis, quas libertatesvocant les circonstancesl'exigeront.d'on faire professionpu-
novissimotempore quassitas,oportet ApostolicasSe- blique. Particulièrement en ce qui toucheaux libertés
dis stare judicio, et quod ipsa senserit, 'idem sen- modernes,commeonles appelle,chacundoit s'en tenir
tire singulos. Cavendum, ne quem fallat honesta il- au jugement du SiègeApostolique, et se conformerà
larum species : cogitandumquequibus ortaeinitiis, et ses décisions. Il faut prendre garde de se laisser
quibus passim sustentontur atque alanlur studiis. tromper par la spécieuse honnêteté de ces libertés,
Satis jam est experiendocognitum, quarum illaere- et se rappeler de quelles sources elles émanent et
rum effectrices sint in civitate : eos quippe passim par quel esprit elles se propagent et se soutiennent.
genuere fructus, quorum probos viros et sapientes L'expérience a déjà fait suffisammentconnaître les
jure poeniteat. résultats qu'elles ont eus pour la société, et combien
les fruits qu'elles ont portés inspirent à bondroit de
regrets aux hommeshonnêteset sages.
63. Si talis alicubi aut reapse sit, aut fingatur co- 63. S'il existe quelquepart, ou si l'on imaginepar
gitatione civitas, quaechristianum nomen insectetur la pensée un Etat qui persécute effrontément et ty-
proterve et tyrannice, cum eaque conferatur genus id ranniquement le nom chrétien, et qu'on le confronte
reipublicaerecens, de quo loquimur, poterit hoc vi- au genre de gouvernement moderne dont Nous par-
deri tolerabilius. Principia tamen, quibus nititur, lons, ce dernier pourrait sembler plus tolérable. As-
sunt profecto ejusmodi, sicut ante diximus, ut per surément les principes sur lesquels se base ce der-
se ipsa probari nemini debeant. nier sont de telle nature, ainsi que nous l'avons dit,
qu'en eux-mêmes ils ne doivent être approuvés par
personne.
§ XVI.Devoirsdes catholiques—2° dans la pratique.
XVI. — 64. Potest tamen aut in privatis domesti- 64. En pratique, l'action peut s'exercer soit dans
cisque rébus, aut in publicis actio versari. — Priva- les affaires privées et domestiques, soit dans les
1.Joan.VIII,32. 1.Jean.VIII,34.
XLVIII ENCYCLIQUE IMMORTALE DEI
tim quidem primum offlcium est, praeceptisevange- affaires publiques. — Dans l'ordre privé, le premier
licis diligentissime conformare vitam et mores, nec devoir de chacun est de conformer très exactement
recusare si quid christiana virtus exigat ad patien- sa vie et ses moeurs aux préceptes de l'Evangile, et
dum tolerandumque paulo difficilius. Debent praete- de ne pas reculer devant ce que la vertu chrétienne
rea singuli Ecclesiam sic diligere, ut communem impose de quelque peu difficile à souffrir et à endu-
matrem : ejusque et servare obedienter leges, et ho- rer. Tous doivent, en outre, aimer l'Eglise comme
nori servire, et jura salva velle : conarique, ut ab iis, leur mère commune, obéir à ses lois, pouvoir à son
in quos quisque aliquid auctoritate potest, pari pie- honneur, sauvegarder ses droits, et prendre soin
tate colatur atque ametur. que ceux sur lesquels ils exercent quelque autorité,
la respectent et l'aiment avec la même piété filiale.
65. Illud etiam publicaesalutis interest, ad rerum 65. Il importe encore au salut public que les ca-
urbanarum administrationem conferre sapienter ope- tholiques prêtent sagement leur concours à l'admi-
ram : in eaque studere maxime et efficere, ut ado- nistration des affaires municipales, et s'appliquent
Iescentibus ad religionem, ad probos mores infor- surtout à faire en sorte qne l'autorité publique pour-
mandis ea ratione, qua aequumest christianis, pu- voie à l'éducation religieuse et moralede la jeunesse,
bliée consultum sit : quibus ex rebus magnopere pen- comme il convient à des chrétiens : de là dépendle
dent singularum salus civitatum. salut de la société.
66. Item catholicorum hominum operam ex hoc 66. Il sera généralement utile et louable que les
tamquam angustiore campolongius excurrere, ipsam- catholiques étendent leur action au-delà des limites
que summam rempublieamcomplecti,generatimutile de ce champ trop restreint, et abordent les grandes
st atque honestum. charges de l'Etat.
67. Generatimeo dicimus, quia haseprasceptaNos- 67. Généralement,disons-Nous, car ici Nos conseils
tra gentes universas attingunt. Ceterum potest ali- s'adressent à toutes les nations. Du reste, il peut ar-
cubi accidere, ut, maximie justissimisque de causis, river quelque part que pour les motifs les plus gra-
rempublieam capessere, in muneribusque politicis ves et les plus justes, il ne soit nullement expédient
Versari,nequaquam expediat. Sed generatim, ut di- de participer aux affaires politiques et d'accepter les
ximus, mullam velle rerum publicarum partem at- fonctions de l'Etat.
tingere tam esset in vitio, quam nihil ad communem Mais, généralement, comme Nous l'avons dit, re-
utilitatem afferre studii, nihil operae: eo vel magis fuser de ne prendre aucune part aux affaires publi-
quod catholici homines ipsius, quam profitentur, ad- ques serait aussi répréhensible que de n'apporter à
monitions doctrines, ad rem integre et ex fide geren- l'utilité communeni soin ni concours; d'autant plus
dam impelluntur. Contra, ipsis otiosis, facile habe- que les catholiques, en vertu même de la doctrine
nas accepturi sunt ii, quorum opinionesspem salutis qu'ils professent, sont obligés de remplir ce devoir
haud sane magnam altérant. Idque esset etiam cum en toute intégrité et conscience.D'ailleurs, eux s'abs-
pernicie conjunctum christiani nominis : propterea tenant, les rênes du gouvernement passeront sans
quod plurimum possent qui male essent in Eccle- conteste aux mains de ceux dont les opinions n'of-
siam animati; minimum, qui bene. Quamobrem frent certes pas grand espoir de salut pour l'Etat. Ce
perspicuum est, ad rempublieam adeundi causam serait, de plus, pernicieux aux intérêts chrétiens,
esse justam catholicis: non enim adeunt, neque adire parce que les ennemis de l'Eglise auraient tout pou-
debent ob eam causam, ut probent quod est hoc voir et ses défenseursaucun. Il est donc évident que
tempore in rerum publicarum rationibus non hones- les ennemis de l'Eglise auraient tout pouvoir et ses
tum ; sed ut has ipsas rationes, quoad fieri potest, in défenseurs aucun. Il est donc évident que les catho-
bonum publicum transferant sincerum atque verum, liques ont de justes motifsd'aborder la vie politique;
destinatum animo habentes, sapientiam virtutemque car ils le font et doivent le faire non pour approuver
catholicas religionis, tamquam saluberrimum suc- ce qu'il peut y avoir de blâmable présentementdans
cum ac sanguinem, in omnes reipublicaevenas indu- les institutions politiques, mais pour tirer de ces ins-
cere. titutions mêmes, autant que faire se peut, le bien
public sincère et vrai, en se proposant d'infuser dans
dans toutes les veines de l'Etat, comme une sève et
un sang réparateur, la vertu et l'influence de la re-
ligion catholique.
S XVII. — Exemple des premiers âges de l'Eglise. Il
faut lessuivre dans la lutte actuelle.
XVII. — 68. Haud aliter actum in primis Ecclesias 68.Ainsi fut-il fait aux premiers âges de l'Eglise.
astatibus. Mores enim et studia ethnicorum quam Rien n'était plus éloigné des maximes et des moeurs
longissime a studiis abhorrebant moribusque evan- de l'Evangile, que les maximes et les moeurs dos
gelicis : christianos tamen cernere erat in media su- païens; on voyait toutefois les chrétiens incorrupti-
perstitione incorruptos semperque sui similes ani- bles en pleine superstition et toujours semblables à
mose, quacumque daretur aditus, inferre sese. Fide- eux-mêmes, entrer courageusementpartout où s'ou-
les in exemplum principibus, obedientesque,quoad vrait un accès. D'une fidélité exemplaire envers les
(as esset, imperio legum, fundebant mirificum splen- princes, et d'une obéissance aux lois de l'Etat aussi
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI XLIX
dorem sanctitatis usquequaquo; prodesse studebant parfaite qu'il leur était permis, ils jetaient de toute
fratrtbus, vocareceteros ad sapientiam Christi, ce- part un merveilleux éclat de sainteté; s'efforçaient
dere tamenloco atque emori fortiter parati, si ho- d'être utiles à leurs frères, et d'attirer les autres à
nores, si magistratus, si imperia retinere, incolumi suivre Notre Seigneur,disposéscependant à céder la
virtute, nequivissent. Qua ratione celeriter instituta place et à mourir courageusements'ils n'avaient pu,
christiana non modo in privatas domos, sed in cas- sans blesser leur conscience,garder les honneurs, les
tra, in curiam, in ipsam regiam invexere.«Hesterni magistratures et les charges militaires. De la sorte,
» sumus, et vestra omniaimplevimus,urbes, insulas, ils introduisirent rapidement les institutions chré-
» castella, municipia, conciliabula, castra ipsa, tri- tiennes non seulement dans les foyers domestiques,
» bus, decurias, palatium, senatum, forum 1 : » ita mais dansles camps, la curie et jusqu'au palais im-
» ut fideschristiana, cum Evangeliumpublics profi- périal. « Nous ne sommesque d'hier, et nous rem-
» teri legelicuit, nonin cunis vagiens, sed adulta et » plissons tout ce qui est à vous, vos villes, vos
» jam satis firma in magna civitatum parte appa- » îles, vos forteresses; vos municipes,vos concilia-
» ruerit. , » bules, vos camps eux-mêmes,les tribus, les décu-
» ries, les palais, le sénat, le forum 1. » Aussi lors-
qu'il fut permis de professer publiquement l'Evan-
gile, la foi chrétienneapparut dans un grand nombre
de villes, non vagissante encore, mais forte et déjà
pleine de vigueur.
69. Jamvero his temporibus consentaneum est, 69. Dans les temps oùnous sommes,il y atout lieu
haecmajorum exempla ronovari. — Catholicosqui- de renouveler ces exemples de nos pères. — Avant
dem,quotquotdigni suuteo nomine,primum omnium tout, il est nécessaire que tous les catholiquesdignes
necesseest amantissimos Ecclesiasfilios et esse et do ce nom se déterminentà être et à se montrer les
videri velle : quae res nequeant cum hac laude con- fils très dévouésde l'Eglise; qu'ils repoussent sans
sistere, eas sine cunctationerespuere : institutis po- hésiter tout ce qui serait incompatible avec cette
pulorum,quantum honeste fieri potest, ad veritatis profession,qu'ils se servent des institutions publi
justitiaequepatrociniumuti : elaborare, ut constitu- ques, autant qu'ils le pourront faire en conscience,
tum natures Deiquelege modum libertas agendi ne au profit de la vérité et de la justice ; qu'ils travail-
transiliat : dare operam ut ad eam, quam diximus, lent à ce que la liberté ne dépasse pas la limite po-
christianam similitudinem et formamomnis respu- sée par la loi naturelle et divine ; qu'ils prennent à
blica traducatur. tâche de ramener toute constitution publique à cette
forme chrétienne que Nousavons proposéepour mo-
dèle.
70. Harum rerum adipiscendarum ratio constitui 70. Ce n'est pas chose aisée que de déterminer un
uno certoquemodohaud commodepotest cum debeat mode unique et certain pour réaliser ces données,
singulis locis temporibusque,quae sunt multum in- attendu qu'il doit convenir à des lieux et à des
ter se disparia, convenire. Nihilominus conservanda temps fort disparates entre eux. Néanmoinsil faut
in primis est voluntatum concordia, quaerendaque avant tout conserver la concorde des volontés et
agendorumsimilitudo. Atque optime utrumque im- tendre à l'uniformité de l'action. On obtiendra sûre-
petrabitur, si praescriptaSedis Apostolica}legemvitss ment ce double résultat, si chacun prend pour règle
singulipulent, atque Episcopis obtemperent, quos de conduiteles prescriptions du SiègeApostoliqueet
Spiritussanctusposuit regereEcclesiamDei 2, l'obéissance aux Evéques que l'Esprit Saint a établis
pour régir l'Eglisede Dieu2.
§ XVIII. Ce queréclamela défense du nom chrétien,
en l'état actuelde la société.
XVIII. — 71. Defensio quidem catholici nominis 71. La défensedu nom chrétien réclame impérieu-
necessariopostulat ut in profitendis doctrinis, quas sement que l'assentiment aux doctrines enseignées
ab Ecclesiatraduntur, una sit omnium sententia, et par l'Eglise soit de la part de tous unanime et cons-
summa constantia, et hac ex parte cavendum ne tant, et de ce côté il faut se garder oud'être en quoi
quis opinionibusfalsis aut ullo modo conniveat, aut que ce soit de connivenceavec les fausses opinions,
mollius resistat, quam veritas patiatur. De iis quas ou de les combattre plus mollement que ne le com-
sunt opinabilia, licebit cum moderatione studioque porte la vérité. Pour les choses sur lesquelles on
indagandasveritatis disputare, procul tamen suspi- peut discuter librement, il sera permis de discuter
cionibus injuriosis, criminationibusque mutuis. avec modérationet dans le but de rechercher la vé-
rité, mais en mettant de côté les soupçons injustes
et les accusations réciproques.
72. Quam ad rem, ne animorum conjunctio crimi- 72. A cette fin, de peur que l'union des esprits ne
nandi temeritate dirimatur, sic intelligant universi : soit détruite par de téméraires accusations, voici ce
integritatemprofessionis catholicaeconsisteronequa- que tous doivent admettre : la professionintègre de
1. Tertull.,
Apol.I. n.37. 1.Tertul.Apologet.,
N.37.
t. Act.XX,28. 2. Act.XX,28.
I. d.
L ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI
quam posse cum opinionibus ad naluralismumvel la foi catholique, absolument incompatibleavec les
rationalismumaccedentibus, quarum summa est tôl- opinionsqui se rapprochent du rationalismeet durca-
ière funditus instituta christiana, hominisque stabi iuralisme,etdont le but capital est de détruire de fond
lire in societate principatum, posthabito Deo. en comble les institutions chrétiennes et d'établir
dans la société l'autorité de l'hommeà la place de
celle de Dieu.
73. Pariter nonlicere aliam officii formam priva- 73.Il n'est pas permis non plus d'avoir deux ma-
tim sequi, aliam publiee, ita scililot ut Ecclesiae nières de se conduire, l'une en particulier, l'autre en
auctoritas in vita privata observetur, in publica public, de façonà respecter l'autorité de l'Eglise
respuatur. Hoc enim esset honesta et turpia conjun- dans sa vie privée, et à la rejeter dans sa vie publi-
gero, hominemquesecum facere digladiantem, cum que ; ce serait là allier ensemblele bien et le mal,
contra debeat sibi semper conslare, neque ullo jure et mettre l'hommeon lutte avec lui-même,quand au
ullove in genere viteea virlute christiana delicere. 1contraireil doit toujours être conséquentet ne s'écar-
ter en aucun genre de vie ou d'affaires de la vertu
chrétienne.
§ IV. — Règlesà suivre pour les écrivainset surtout
pour lesjournalistes.
XIX. — 74.Verum si qnaeraturde rationibus more 74.Mais s'il s'agit de questions purement politi-
politicis, de optimo genere reipublicae,de ordinandis ques,du meilleurgenre de gouvernement,de tel outel
itlia ratione civitatibus, utique de his reluis potest systèmed'administration civile, desdivergenceshon-
honesta esse dissensio. Quorum igitur cognila cote- nêtes sont permises. La justice ne souffre donc pas
roqui pietas est, animusque decrela Sedis Aposto- que l'on fasse un crime à des hommes dont la piété
licae obedientoraccipere paratus, iis vitio verti dis- est d'ailleurs connue,et l'esprit tout disposé à ac-
sentaneamderebus, quas diximus,sententiamjustitia cepter docilementles décisionsdu Saint-Siège,de ce
non patitur : multoque est major injuria, si in cri- qu'ils sont d'un avis différentsur les points en ques-
men violataesuspcctaevefideicalholicae,quod non se- tion. Ce serait encoreune injustice bien plus grande
înel factum dolemus,adducantur. de suspecter leur foi ou de les accuser de la trahir»
ainsi que Nous l'avons regretté plus d'une fois.
75. Omninoqueistud proecpptumteneant qui cogi- 75. Que ce soit là une loi imprescriptiblepour les
tationes suas soient mandare litteris, maximeque écrivains et surtout par les journalistes. Dans une,
ephemeridumauctores. In hac quidem de rebus ma- lutte où les plus grands intérêts sont en jeu, il ne
ximis contentiononihil est inteslinis concertationi- faut laisser aucune place aux dissensions intestines
bus, vel partitun studiis rolinquendumloci, sedeons- ou à l'esprit de parti ; mais dans un accordunanime
piranlibus animis sludiisque id debent universi con- des esprits et des coeurs,tous doivent poursuivre le
tendere, quod est commune omnium propositum, but commun,qui est desauver les grands intérêts de
religionemremquepublicamconservaro.Si quid igi- la religion et dela société. Si doncpar le passé quel-
tur dissidiorumantea fuit, oportet votuutaria quadam ques dissentiments ont eu lieu, il faut les ensevelir
oblivione conterere: si quid lemere, si quid injuria dans un sincèreoubli: si quelque témérité, si quelque
actum, ad quoscumque demum ea culpa pertineat, injusticea été commise,quel que soit le coupable,il
compensjndumest caritato mutua, et prrecipuoquo- faut tout réparer par une charité réciproque et tout
dam omniumin ApostolicamSedem obsequio redi- racheter parun communassaut de déférenceenversle
mendum. — Hac via duas res prasclarissimas ca- Saint-Siège.—De la sorteles catholiquesobtiendront
tliolici consecuturisunt, alteram, ut adjutores sese deux avantagestrès importants, celui d'aider l'Eglise
imperliant Ecclesiaein conservanda propagandaque à conserver et à propager la doctrine chrétienne,
sapientia christiana : alteram ut benefteiomaximo et celui de rendre le service le plus signalé à la so-
afficiantsocietatem civilem, cujus, malarum doctri- ciété dont le salut est fortementcompromispar les
narum cupiditatumque causa, magnopere periclita- manvaises passions.
tur salus.
76.Haecquidem, Venerabiles Fratres, habuimus, 76. C'est là. VénérablesFrères, ce que Nousavons
quae universis catliolici orbis gentibus traderemus cru devoir enseigner à toutes les nations du monde
de civitatum constitutione christiana, officiisqueci- catholiquesur la constitution chrétienne des Etats,
vium singulorum. et les devoirs privés des sujets.
Ceterum implorare summis precibus oportet cas- Il nous reste à implorer par d'ardentes prières le
leste pressidium,orandusque Deus, ut haec, quaead secours céleste, et à conjurer Dieu de faire lui-même
ipsius gloriamcommunemquehumani generis salu- aboutir au terme désiré tous Nos désirsettous Nos
tem cupimus et conamur, optatos ad exitus idem effortspoursa gloire et le salut du genrehumain.Lui
Ipse perducat, cujus est illustrare hominummentes, qui peut seul éclairerles esprits et toucherles coeurs
permovore voluntates. — Divinorum autem benofi- des hommes.Commegage des bénédictionsdivineset
ciorum auspicem, et paternesbonevolentiaeNostrae en témoignagedeNotrepaternelle bienveillance,Nous
testem vobis, Venerabiles Fratres, et Clero popu- vous donnonsdans la charité du Seigneur,Vénérable
loque universo vestroefidei vigilantiaequecommisso Frères, à vous, ainsi qu'au clergé et au peuple entier
ENCYCLIQUE IMMORTALEDEI LI
Apostolicam Benedictionomperamanter in Domino confiéà votre garde et à votre vigilance, la Bénédic-
impertimus. tion Apostolique.
Datum Romasapud S. Petrum die I MDCCCLXXXV.Donnéà Rome près de Saint-Pierre, le premier no-
Pontificatus Nostri Anno octavo. vembre 1885,la huitième année de Notre Pontificat.
LEO PP. XIII. LÉON XIII, PAPE.
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
FRATRIBU8
VENERABILIBOS A NOSVÉNÉRABLES
FRÈRES
PMMATIBUS,
PATRIARCHIS, ARCH1EPISOOPIS, LESPATRIARCHES, ARCHEVÊQUES
PRIMATS,
ETEPISCOPIS ORBIS
CATHOLICI
UNIVERSIS ET EVÉQUESDUMONDE CATHOLIQUE
GRATIAM SEDE
CUMAPOSTOLICA
ET COMMUNIONEM ENGRACE ETCOMMUNION
HABENTIBUS AVECLE SIÈGEAPOSTOLIQUE
LEO PP. XIII LÉON XIII, PAPE
Venerabilesfratres Vénérablesfrères.
salutemet apostolicambenediclionem. Salut et bénédictionapostolique
Rerum novarum semel excitata cupidine, quaediu La soif d'innovations qui depuis longtemps s'est
quidem commovetcivitates, illud erat consecuturum emparée des sociétés et les tient dans une agitation
ut commulationutn studia a rationibus politicis in fiévreuse devait, tôt ou tard, passer des régions de
oeconomicarumcognatumgenusaliquando defluerent. la politique dans la sphère voisine de l'économieso-
— Rêvera nova industriesincrementa novisque eun- ciale. — Et, en effet, ces progrès incessants de l'in-
tes itineribus artes : mutât» dominorum et mercena- dustrie, ces routes nouvelles que les arts se sont ou-
riorum rationes mutuae : divitiarum in exiguo nu- vertes, l'altération des rapports entre les ouvriers et
méro affluentia, in multitudine inopia : opificumcum les patrons, l'affluencede la richesse dans les mains
de se confidentia major, tum inter se nccessitudo du petit nombre à côtéde l'indigencede la multitude,
conjunctior, praetereaversi in détériora mores, elï'e- l'opinion enfin plus grande que les ouvriers ont con-
cere, ut certamen erumperet. In quo quanta rerum çue d'eux-mêmes, et leur union plus compacte,tout
momenta vertantur, ex hoc apparet, quod animos cela, sans parler de la corruption des moeurs, a eu
habet acri expectationesuspensos : idemqueingénia pour résultat final un redoutableconflit. Partout les
exercet doctorum,concilia prudentum, concionespo- esprits sont en suspens et dans une anxieuse attente,
puli, legumlatorum judicium, concilia principum, ut ce qui suffità lui seul pour prouver combiende gra-
jam caussa nulla reperiatur tanta, qivoeteneat homi- ves intérêts sont ici engagés, cotte situation préoc-
num studia vehementius. — Itaque, proposita Nobis cupe et exerce à la fois le génie des doctes, la pru-
Ecclesiaecaussa et salute communi, quod alias con- dence des sages, les délibérations des réunions po-
suevimus, Venerabiles Fratres, datis ad vos Litteris pulaires, la perspicacité des législateurs et lesconseils
de imperiopolitico, delibertate humana, decivitalutn des gouvernants, et il n'est pas de cause qui saisisse,
constitutione christiana, aliisque non dissimili gé- en ce moment, l'esprit humain avec autant de véhé-
nère, quaead refutandas opinionum fallacias oppor- mence. —C'est pourquoi, VénérablesFrères, ce quo,
tuna videbantur, idem nunc faciendum de condilione pour le bien de l'Eglise et le salut commun des hom-
opificumiisdemde caussis duximus. — Genus hoc ar- mes, Nous avons fait ailleurs par Nos Lettres sur la
gumenti non semel jam per occasionemattigimus : souverainetépolitique, la liberté humaine, la consti-
in his tamen litteris totam data opéra tractare quaes- tution chrétiennedes Etats et sur d'autres sujets ana-
tionem apostolici munerisconscientiamonet, ut prin- logues, afin do réfuter, selon qu'il Nous semblait
cipia emineant, quorum ope, uti veritas atque aequi- opportun, les opinions erronées et fallacieuses. Nous
tas postulant, dimicatio dirimatur. Gaussa est ad jugeons devoir le réitérer aujourd'hui et pour les
expediendumdiflicilis, nec vacua periculo. Ardutim mémos motifs, en vous entretenant do la condition
siquidem metiri jura et officia,quibus locupletes et desouvriers.Ce sujet, Nous l'avons, suivant l'occa-
proletarios, eos qui rem, et eos qui operam conforant, sion, effleuré plusieurs fois; mais la consciencede
inter se oportet contineri. Periculosa vero contentio, Noire charge apostolique Nous fait un devoir de le
quippe quaeab hominibus turbulentis et callidis ad traiter dans ces Lettres plus explicitementet avec
pervertendum judicium veri concitandamque sedi- plus d'ampleur, afin de mettreen évidence les princi-
ïiose multitudinem passim detorquetur. Utcumque pes d'une solution conformeà la justice et à l'équité.
sit, plane videmus,quod consentiuntuniversi, infimae Le problème n'est pas aisé à résoudre, ni exempt
sortis hominibusceleriter esse atque opportune con- de péril. Il est difficile,en effet,de préciser avec jus-
sulendum, cum pars maxima in misera calamitosa- tesse les droits et les devoirs qui doivent lier réci-
que fortuna indigne versentur. Nam veteribus artifi- proquement à la fois la richesse et le prolétariat, le
sum collegiissuperiore sasculo deletis, nulloque in capilal et le travail. D'autre part, le problèmen'est
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LUI
eorum locum suffecto praesidio, cum ipsa instituta pas sans danger, parceque trop souvent, des hommes
legesquepublicaeavitam religionemexuissent, sensim turbulents et astucieux cherchent à en dénaturer le
factumest ut opificesinhumanitati dominorumeffre- sens et en profitent pour exciter les multitudes et
nataequecompetitorumcupiditati solitarios atque in- fomenterdes troubles. Quoi qu'il en soit, Nous som-
defensos tempus tradiderit. — Malum auxit usura mes persuadé, et tout le monde en convient, qu'il
vorax, quae non semel Ecclesias judicio damnata, faut, par des mesures promptes et efficaces,venir en
tamen ab hominibus avidis et quaestuosis per aliam aide aux hommes des classes inférieures, attendu
speciemexercetur eadem : hue accedunt et conductio qu'ils sont pour la plupart dans une situation d'in-
operum et rerum omnium commerciafere in pauco- fortune et de misère imméritée.
rum redactapotestatem, ita ut opulenti ac proedivites Le dernier siècle a détruit, sans rien leur substi-
perpauci prope servile jugum infinitésproletariorum tuer, les corporations anciennes,qui étaient pour eux
multitudiniimposuerint. une protection; tout principe et tout sentiment reli-
gieux ont disparu des lois et des institutions publi-
ques, et ainsi, peu à peu, les travailleurs isolés et
sans défense se sont vus avec le temps livrés à la
merci de maîtres inhumains et à la cupidité d'une
concurrenceeffrénée.— Une usure vorace est venue
ajouter encore au mal. Condamnée à plusieurs re-
prises par le jugement de l'Eglise, elle n'a cesséd'être
pratiquée sous une autre forme par des hommes avi-
des de gain, et d'une insatiable cupidité. A tout cola,
il faut ajouter le monopole du travail et des effets
de commerce,devenu le partage d'un petit nombre de
riches et d'opulents,qui imposent ainsi un joug pres-
que servile à l'infinie multitude des prolétaires.
Adhnjus sanatfonemmali Socialistsequidem, solli- Les socialistes,pour guérir ce mal, poussent à la
citata egentium in locupletesinvidia, evertere priva- haino jalouse des pauvres contre ceux qui possèdent,
tas bohorum possessiones contendunt oportere, ea- et prétendent que toute propriété de biens piivés
rumque loco communia universis singulorum bona doit être supprimée, que les biens d'un chacun doi-
facere, procurantibus viris qui aut municipioprae- vent être communs à tous et que leur administration
sint, aut totam rempublieamgérant. Ejusmodi trans- doit reveniraux municipalitésou à l'Etat. Moyennant
latione bonorum a privatis ad commune,mederise cette translation des propriétés et cette égale répar-
posse praesenti malo arbitrantur, res et commoda tition entre les citoyens des richesseset de leurs com-
inter cives asquabiliterpartiendo. Sed est adeo eorum modités, ils se flattent de porter un remèdeefficace
ratio ad contentionemdirimendam inepta, ut ipsum aux maux présents. Mais pareille théorie, loin d'être
opificumgenus afficiat incommodo: eademqueprae- capable de mettre fin au conflit, ferait tort à l'ouvrier
terea est valde injusta, quia vim possessoribus legi- si elle était mise en pratique. D'ailleurs, elle est sou-
timis affert, pervertit officiareipublicae,penitusque verainement injuste, en ce qu'elle viole les droits
misentcivitates. légitimes des propriétaires, qu'elle dénature les fonc-
tions de l'Etat et tend à bouleverserde fond en com-
ble l'édifice social.
Sane,quod facile est pervidere, ipsius opérée,quam De fait, comme il est facile de le comprendre, la
suscipiunt qui in arte aliqua qusestuosaversantur, raison intrinsèque du travail entrepris par quiconque
haec per se caussa est, atque hic finis quo proxime exerce un art lucratif, le but immédiatvisé par le
spectat artifex, rom sibi queerere privatoque jure travailleur, c'est de conquérir un bien qu'il possédera
possidere uti suam ac propriam. Is enim si vires, si en propre et commelui appartenant ; car s'il met à la
industriam suam alteri commodat,hanc ob caussam disposition d'autrui ses forces et son industrie, ce
commodatut res adipiscatur ad victum cultumque n'est pas évidemment pour un motif autre, sinon
necessarias: ideoque ex opéra data jus verum perfec- pour obtenir de quoi pourvoir à son entretien et aux
tumquesibi quasrit nonmodoexigendaemercedis, sed besoins de la vie, et il attend de son travail non seu-
et collocandasuti velit. Ergo si tenuitate sumptuum lement le droit au salaire, mais encoreun droit strict
quicquam ipse comparsit, fructumque parcimonies et rigoureux d'en user comme bon lui semblera. Si
sues, quo tutior esse custodia possit, in praediocol- donc, en réduisant ses dépenses, il est arrivé à faire
locavit, profecto praediumistiusmodi nihil est aliud quelques épargnes, et si pot r s'en assurer la conser-
quam merces ipsa aliam induta speciem : propterea- vation, il les a par exempleréalisées dans un champ,
que coemptus sic opifici fundus tam est in ejus po- il est de toute évidenceque ce champ n'est pas autre
testate futures, quam partalabore merces. Sedin hoc chosequele salaire transformé : le fondsainsi acquis
plane, ut facile intelligitur, rerum dominium vel sera la propriété de l'artisan au même titre que la
moventium vel solidarum consistit. In eo igitur rémunération même de son travail. Mais qui ne voit
quod bona privatorum transferre Socialistsead com- que c'est précisémenten cela que consistele droit de
mune nituntur, omniummercenariorum faciunt con- propriété mobilièreet immobilière? Ainsi, cette con-
'ditionem deteriorem, quipnequos, collocandaemerce- version de la propriété privée en propriété collée-
LIV ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
dis libertate sublata, hoc ipso augendaerei familiaris tive, tant préconisée par le socialisme, n'aurait d'au-
utilitatumque sibi comparandarum spe et facultate tre effet que de rendre la situation des ouvriers plus
despoliant. précaire, en leur retirant la libre disposition de leur
salaire et en leur enlevant par le fait même tout es-
poir et toute possibilité d'agrandir leur patrimoine et
d'améliorer leur situation.
Verum, quod majus est, remodium proponunt cum Mais, et ceci paraît plus grave encore, le remèdd
justitia aperte pugnans, quia possidere res privalim proposé est en opposition flagrante avec la justice,
ut suas, jus est homini a nalura datum. — Rêvera car la propriété privée et personnelleest pour l'homme
hac etiam in re maxime inter hominemet genus inle- de droit naturel. Il y a, en effet, sous ce rapport, une
rest animanlium ccterarum.Non enim se ipste rejunl 1rs grande différenceentre l'hommeet les animaux
bellua},sed regun'.ur gubernanttirque dupliei natures dénués de raison. Ceux-ci ne se gouvernentpas eux-
instinctu : qui tum cnstodiunt cxperrcclnmin ois fa- mêmes; ils sont dirigés et gouvernés par la nature,
c tltalem agendi, viresque oporliiue evolvunt, tum moyennant un double instinct qui, d'une part, lient
etiam singulos earum motus exsuscitant iidom et leur activité constammenten éveil et en développeles
déterminant. Allero instinctu ad se vitamque luen- forces; de l'autre, provoque tout à la fois et circons-
ilam, allero ad conservalionemgeneris ducuntur sui" crit chacunde leurs mouvements.Un premier instinct
Utrumque vero commodeassequtintur earum rerum les porte à la conservation et à la défensede leur
usu quoe adsunt, quacque pressentes sunt : nec vie propre, un second à la propagation de l'espèce ;
sane progredi longius possent, quia solo sensu et ce double résultat, ils l'obtiennent aisément par
moventur rebusque singularibus sensu perceptis. l'usage des choses présentes et mises à leur portée.
Ils seraient d'ailleurs incapables de tendre au delà,
puisqu'ils ne sont mus que par les sens et par cha-
alia hominis natura. Inest in eo tota.simul que objet particulier que les sens perçoivent.
Longe Bien autre est la nature humaine. En l'homme,d'a-
ac perfecta vis natura}animanlis, ideoqua tributum bord, réside dans la perfection toute la vertu de la
ex hac parte homini est, certe non minus quam ge- nature sensilive et dès lors il lui revient, non moins
neri animanlium omni, ut rerum corporearum frua- qu'à celle-ci,de jouir des objets
tur bo!tis. Sed natura auitnans quantumvis cumulate Mais la vie sensitive, mêmepossédée physiqueset corporels.
dans toute sa
possessa, tantum abest ut naturam circnmscriliathu-
ut niulto sit humana natura et ad plénitude, non seulementn'embrasse pas toute la na-
manam, inferior, ture humaine, mais lui est bien inférieure et faite
parendum huic obsdiendumqtic nata. Quod eminet lui obéir et lui être assujettie. Ce qui excelleen
pour
atque excellit in nobis, quod homini Iribuit ut homo nous, qui nous fait hommeset nous distingue essen-
sit, et a belluis différât génère toto, mens seu ratio tiellementde la bête, c'est la raison ou l'intelligence,
est. Et ob hanc caussam quod solum hocanimal est et en vertu de cette prérogative, il faut reconnaître à
rationis particeps, bona homini tribuere necesseest l'homme nonseulementla faculté générale d'user des
non uten.la solum, quod est omnium animantium choses extérieures mais en plus le droit stable et
commune, sed stabili perpetuoque jure possidenda, perpétuel de les posséder, tant celles qui se consu-
neque ea dumtaxat quaeusu consumuntur, sed etiam. ment par l'usage que celles qui demeurentaprès nous
quae, nobis utentibus, permanent. avoir servi.
Quod magis etiam apparet, si hominumin se na- Une considération plus profonde de la nature hu-
—
tura altius specletur. Homo enim cum innumera- maine va faire ressortir mieux encore cette vérité.
bilia ralioue comprehendat, rebusque praesentibus L'homme embrasse par son intelligence une infi-
adjtmgat alqus annectat futuras, cumquoactiomim nité d'objets, et aux choses présentes, il ajoute et
suarum sit ipse dominus,propterea sub lege aeterna. rattache les choses futures; il est d'ailleurs le maître
sub potestate omnia proviJentissime gubernantis de ses actions; aussi, sous la directionde la loi éter-
Dei, se ipse gubernat providentia consilii sui : quam- nelle et sous le gouvernementuniversel de la Provi-
obrem in ejus est potestate res eligere quas nd con- dencedivine, est-il en quelque sorte à lui-mêmeet sa
sulendum sibi non modo in pnesens, sed etiam in loi et sa providence. C'est pourquoi il a le droit de
reltquum tempus, maxime judicet idoneas. Ex quo choisir les choses qu'il estime les plus aptes non
consequitur, ut in hommeesse non modoferrenorum seulement à pourvoir au présent, mais encoreau fu-
fructuum, sed ipsius terras d'ominatumoporteat, quia tur. D'où il suit qu'il doit avoir sous sa domination
e terrae fétu sibi res suppeditari videt ad futurum non seulementles produits de la terre, mais encore
tempus necessarias. Habetit cujusque hominis néces- la terre elle-mêmequ'il voit appelée à être par sa fé-
sitâtes velut perpetuos reditus, ita ut hodie expletae, condité sa pourvoyeuse del'avenir. Les nécessités de
in craslinum nova imperent. Igitur rem quamdam l'homme ont de perpétuels retours : satisfaites au-
débet homini natura dédisse stabilem perpetuoque jourd'hui, elles renaissent demain avec de nouvelles
mansuram, unde perennitas subsidii expectari pos- exigences. Il a donc fallu, pour qu'il pût y faire droit
set. Atqui istiusmodi perennitatem nulla res prees- en tout temps, que la nature mît à sa disposition un
tare, nisi cum ubertatibus suis terra, potest. élémentstable et permanent, capable de lui en fournir
perpétuellementles moyens.Or,cet élémentne pouvait
être que la terre avecses ressourcestoujours fécondes.
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LV
Neque est, cur providentia introducatur reipu- Et qu'on n'en appellepas à la providencede l'Etat,
blicae : est enim homo, quam respublica, senior : car l'Etat est postérieur à l'homme, et avant qu'il
quocircajus ille suum ad vitam corpusque tuendum put se former, l'homme déjà avait reçu de la nature
habere natura ante debuit quam civitas ulla coisset. le droit de vivre et de protéger son existence. Qu'on
— Quodvero terram Deus universo generi hominum n'oppose pas non plus à la légitimité de la propriéte
utendam, fruendam dederit, id quidem non potest privée le fait que Dieua donné la terre ou jouissance
ullo paeto privatis possessionibus obesse. Deuscnim au genre humain tout entier, car Dieu ne l'a pas li-
generi hominum donavisse terram in commune dici- vrée aux hommes pour qu'ils la dominassentconfu-
tur, non quod ejus promiscuum apud omnes domina- sément tous ensemble. Tel n'est pas le sens de cette
tum voluerit, sed quia partem nullam cuiqueassigna- vérité. Elle signifie uniquementque Dieu n'a assigné
vit possidendam, industries hominum institutisque do part à aucun homme en particulier, mais a voulu
pjpulorum permissa privatarum possessionum des- abandonner la délimitation des propriétés à l'indus-
criplione. — Ceterum utcuinquo inter privatos dis- trie humain? et aux institutions des peuple?. — Au
tributa, inservire coinmuni omnium utilitati terra reste, quoique divisée en propriétés privées, la terre
non cessât, quoniam nemo est mortalium, quin alatttr ne laisse pas de servir à la communeutilité de tous;
eo, quod agri efferunt. Qui re carent supplent opéra : attendu qu'il n'est personne parmi les mortels qui te
ita ut vere afiirmari possit, universam comparandi se nourrisse du produit des champs. Qui en manque
victus cultusque rationem in labore consister!?,qucni y supplée par le travail, de telle sorte que l'on peut
quis vel in fundo insumat suo, vel in arte aliqua affirmer,en toute vérité, que le travail est le moyen
opèrosa, cujus merces tandem non aliunde, quant a universel de pourvoir aux besoins de la vie, soit
multiplici terrasfétu ducitur, cum eoquepermutatur. qu'on l'exercedans un fondspropre, ou dans quelque
art lucratif dont la rémunération ne se tire que des
produits multiples de la terre avec lesquels elle s'é-
change.
Qua ex re rursus efficitur, privatas possessions De tout cela il ressort, une fois de plus, que la pro-
plane esse secundumnaturam. Res enim eas, quaead priété privée est pleinement conforme à la nature.
conservandam vitam maximoque ad perficiendum La terre, sans doute, fournit à l'homme avec abon-
requiruntur, terra quidem cum magna largitate fnn- danceles choses nécessaires à la conservation do sa
dit, sed fundere ex se sine hominum cultu et cura- vie et plus encoreà son perfectionnement,mais elle
tïone non posset. Jamvero cum in parandis naturas ne le pourrait d'elle-mêmesans la culture et les soins
bonis industriam mentis viresque corporis homo de l'homme.Or celui-ci que fait-il en consumant les
insumat, hoc ipso applicat ad sese eam natures cor- ressourcesde son esprit et les forcesde son corps pour
poreaepartem, quam ipse percoluit, in qua velut for- se procurer ces biens de la nature? Il s'applique pour
mant quamdam personas suesimpressam reliqtiit; ut ainsi dire à lui-mêmela portion de la nature corpo-
omninorectum esse oporteat, eam partem ab eo pos- relle qu'il cultive,et y laisse commeune certaine em-
sideri uti suam, nec ullo modojus ipsius violare cui- preinte de sa personne, au point qu'en toute justice
quam licere. ce bien sera possédé dorénavant commesien, et qu'il
Horutn tam perspicu'a vis est argumentorum, ut ne sera licite à personne de violer son droit en n'im-
mirabilo videatur, dissentire quosdam exoletarum porte quelle manière. La forcede ces raisonnements
opinionumrestitutores : qui usum quidem soli, va- est d'une évidencetelle, qu'il est permis de s'étonner
riosque prosdiorum fructus homini privato conce- commentcertains tenants d'opinions surannées peu-
dunt : at possideri ab eo ut domino vel solum, in vent encore y contredire, en accordant sans doute à
quo asdificavit,vel prasdiumquod excoluit, plane jus l'homme privé l'usage du solet les fruits des champs,
esse negant. Quod cum negant, fraudatum iri partis mais en lui refusant le droit de posséder en qualité
suo labore rébus hominem,non vident. Agorquippe de propriétaire cesol oùil a bâti, cetteportion de terre
cultoris manu atque arte subactus babitum longe qu'il a cultivée. Ils ne voient doncpas qu'ils dépouil-
mutât : e silvestri frugifer, ex infecundoferax effici- lent par là cethommedu fruit de son labeur; car enfin
tur. Quibus autem rébus est melior factus, illessic ce champ remué avec art par la main du cultivateur
solo inhasrent miscenturque penitus, ut maximam a changé complètementde nature : il était sauvage,
partem nullo pacto sint separabiles a solo. Atqui id le voilà défriché; d'infécond, il est devenu fertile;
quemquam potiri illoqueperfrui, in quo alius desu- ce qui l'a rendu meilleur est inhérent au sol et se
davit utrumnejustitia patiatur? Quomodoeffectasres confondtellement avec lui, qu'il serait en grande
caussam sequuntur a qua effectas sunt, sic opères partie impossiblede l'en séparer. Or, la justice tolère-
fructum ad eos ipsos qui operam dederint, rectum est ratt-elle qu'un étranger vint alors s'attribuer cette
pertinere. Merito igitur universitas generis humani, terre arrosée des sueurs de celui qui l'a cultivée? De
dissentientibus paucorum opinionibus nihil admoT même que l'effetsuit la cause, ainsi est-il juste que
dum mota, studioseque naturam intuens, in ipsius le fruit du travail soit au travailleur. C'est donc avec
lege natures fuudamentum reperit partitionis bono- raison que l'universalité du genre humain, sans s'é-
rum, possessionesqueprivatas, ut quascumhominum mouvoir des opinions contraires d'un petit groupe,
natura pacatoqueet tranquillo convictumaxime con- reconnaît,en considérant attentivementla nature, que
gruant, omniumsasculorumusu consecravit. — Leges dans ses lois réside le premier fondement de la ré-
autem civiles, quae,cum justea sunt, virtutem suam partition des biens et des propriétés privées ; c'est
I.VI ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
ab ipsi naturali loge dacunt, id jus, de quo loqui- avec raison quela coutumedetous les sièclesa sanc-
nur, confirmantne vi eliam adhibenda tuentur. — tionné une situation si conforme à la nature de
I demdivinarum legunt sanxit auctorilas, qure vel l'hommeet à la vie calme et paisible des sociétés. —
appelere alienum gravissiine vêtant. Nonconcupisers De leur côté, les lois civiles qui tirent leur valeur,
axoremproximi lui : nondomum,non ayrum, non an- quand elles sont justes, de la loi naturelle,confirment
cillam, non boeem,non asinum,cl ttniversaqmeillius ce même droit et le protègentpar la force. — Enfin,
sunt 1. l'autorité des lois divines vient y apposer son sceau,
en défendant, sous une peine très grave, jusqu'au
désir même du bien d'autrui. Tu ne convoiteraspas
la femmede Ionprochain,ni sa maison,ni son champ,
ni sa servante,ni son boeuf,ni son âne, ni rien de ce
qui est à lui.
Cependant ces droits, qui sont innés à chaque
Jura vero istiusmodi, quaein hominibusinsunt sin- hommepris isolément, apparaissent plus rigoureux
gulis, multo validiora inlelligiintiir esse si cum ofli- encore quand on les considèredans leurs relations et
ciis hominumin convictudomesticoapla et conuoxa leur connexitéavec les devoirsde la vie domestique.
spoctentur. — lu deligendogénère vitte non est du- — Nul doute que dans le choixd'un genre de vie il
bium, quin in potustatesitai bitrioque singuloriun al- ne soit loisible à chacunou de suivre le conseil de
terulruin malle, aut Jesu Christisectaride virginitale Jésus-Christ sur la virginité, ou de contracter un
consilium, aut maritali se vinclo oblignre. Jus cim- lien conjugal. Aucuneloi humainene saurait enlever
jugii naturale ac jirimigeuumhomini adimere, cans- d'aucune façon le droit naturel et primordial de tout
samve nuptiarum praecipuam,Dei auctoritate inilio homme au mariage, ni circonscrire la fin princi-
constittttam, qujquo modo circumscribcrelex homi- pale pour laquelleil a été établi par Dieu dès l'ori-
num nulia potest. Cresciteet mulliplicamini2. En gine. Croissezet muilipliez-vous. Voilàdoncla famille,
igitur familia, seu societas domeslica. perparva illa c'est-à-direla sociétédomestique, sociététrès petite,
quidem, sed vera societas, oademque omni civilate sans doute, mais réelle et antérieure à toute société
anli.juior; cui propterea sua quaedamjura ofiicia'que civile à laquelle dès lors il faudra, de toute néces-
esse necosseest, que minime pendeant a republica. sité, attribuer certains droits et certains devoirs
Quod igitur demonstravimus, jus dominii personis absolument indépendants de l'Etat. Ainsi, ce droit
singularibus natura tributum, id transferri in homi- de propriété que nous avons, au nom même de la
tiem, qua caput est familia}oportet : immo tanto jus nature, revendiquépour l'individu, il le faut main-
est illud validius, qttantopcrsonahuinana in conviclu tenant transférer à l'homme, constituéen chef de la
domestico plura compleclitur. Sanetissima naturae famille. Rien plus, en passant dans la société do-
lex est, ut victu omniuuecttltu paterfainiliustuealur, mestique, ce droit y acquiert d'autant plus de force
quos ipse procréaiit ; i,Ionique illu a natura ipsa que la personne humaine y reçoit plus d'extension.
deducitur, ut velit libsris suis, quippequi paternam La nature impose au père de famille le devoir sacré
refsrunt et quolam modo producuut personam, an- de nourrir et d'entretenir ses enfants ; elle va plus
quirere et parai", unde se honcsle possint in ancipiti loin. Commeles enfants reflètentla physionomiede
vita; cursu a misera fortuna defeudere. Id vero effi- leur père et sontune sorte de prolongementde sa per-
cere non alia "/atiuii; potest, nisi fructuosarum pos- sonne, la nature lui inspire de se préoccuperde leur
sessiono rerum, quas ad liberos herodilate trans- avenir et de leur créer un patrimoine qui les aide
mittat. à se défendre,dans la périlleuse traversée de la vie,
contre ttoutes les surprises de la mauvaise fortune.
Mais ce patrimoine pourra-t-il le leur créer sans
l'acquisition et la possessionde biens permanents et
productifs qu'il puisse leur transmettre par voied'hé-
ritage?
Quemadmodumcivitas, eodem modo familia, ut Aussi bien que la sociétécivile, la famille,comme
memoravimus,veri nominis societas est, quaspotes- Nousl'avons dit plus haut, est une société propre-
tate propria, hoc est paterna, regilur. Qnamobrom, ment dite, avec son autorité et son gouvernement
servalis ulique fiuibus quos proxima ejus caussa propre, l'autorité et le gouvernement paternel. C'est
praescripserit,in deligendis adhibendisquerébus in- pourquoi,toujours sans doute dans la sphère que lui
columilati ac juslte liberta.llstue necessariis, familia détermine sa fin immédiate,elle jouit, pour le choix
([uidemparia salteincum socielatecivili jura obtinet. et l'usage de tout ce qu'exigent sa conservation et
l'aria saltein diximus, quia cum convictus domesti- l'exerciced'unejuste indépendance,dedroits au moins
cus et cogilatione sit et re prior, quam civilis con- égaux à ceux de la sociétécivile. Au moins égaux,
junctio. priera quoqticesse magisque naluralia jura disons-Nous,car la société domestique a sur la so-
ejus officiaqueconsequitur.Quodsi cives, sifamiliae, ciétécivile une priorité logiqueet une priorité réelle
convictushumani societatisque participes factoe,pro auxquelles participent nécessairement ses droits et
adjumontooffensionem,pro tutolademinulionomjuris ses devoirs. Que si les individus et les familles en
entrant dans la sociétéy trouvaient au lieu d'un sou-
1.Deul.V.81. - 2. Gen.I, 28. tien un obstacle,au lieu d'une protection une dimi-
ENCYCLIQUE RERUMNOVARUM LVII
sui in republicaroperircnl, faslidionda cilius, quam nution de leurs droits, la société serait bientôt
Optandasocietasesset. plus à fuir qu'à rechercher.
Velleigitur ut pervadat civile imperium arbitratu Vouloir donc que le pouvoir civil envahissearbi-
suo usque ad intima domorum, magnus ac pernicio" rairement jusqu'au sanctuaire de la famille, c'est
sus est error. —Certe si qua forte familia in summa une erreur grave et funeste.—Assurément,s'il existe
rerum diflicultate consiliique inopia verselur, ut quelque part une famille qui se trouve dans une si-
inde se ipsa expedirenullo pacto possit, rectum est tuation désespéréeet qui fasse de vains efforts pour
subveniri publiéerébusextremis : sunt enim familias en sortir, il est juste que dans de telles extrémités
singulespars quaedamcivitatis. Ac pari modo sicubi le pouvoirpublic vienne à son secours, car chaque
intra domesticosparietes gravis exttterit perlurbatio famille est un membre de la société. De même, s'il
jurium mutuorum,suum cuiquejus potestas publica existe quelque part un foyer domestiquequi soit le
vindicato: neque enim hoc est ad se rapere jura ci- théâtre de graves violationsdes droits mutuels, que
vium, sed munire atque firmare justa debitaque tu- le pouvoir public y rende son droit à un chacun. Ce
tela. Hic tamen consistant necesse est, qui prassint n'est point là usurper sur les attributions des ci-
rébus publicis : hos excedere fines natura non pati- toyens, c'est affermir leurs droits, les protéger, les
tur. Patria potestas est ejusmodi, ut nec extingui, défendre commeil convient.Là, toutefois,doit s'ar-
nequeabsorberia republicapossit, quia idemet com- rêter l'action de ceux qui président à la chose publi-
munehabet cumipsa hominumvita prineipium.Filii que ; la nature leur interdit de dépasser ces limites.
sunt aliquidpatris, et velut paternesamplificatioquae- L'autorité paternelle ne saurait être abolie, ni absor-
dam personas: propriequeloqui si volumus, non ipsi bée par l'Etat, car elle a sa source là où la vie hu-
per se, sed percommunitatemdo mesticam,in qua ge- maine prend la sienne.Les fils sont quelquechosede
nerati sunt, civilemineunt ac participant societatem. leur père; ils sont en quelquesorte une extensionde
Atquehac ipsa de caussa, quod filii sunt nalural'Uer sa personne; et, pour parler avec justesse, ce n'est
aliquidpatris... anlequamusum liberiarbilrii habeant pas immédiatementpar eux-mêmes qu'ils s'aggrè-
conlinentursubparenlumcura1.QuodigiturSocialislae, gent et s'incorporentà la société civile, mais par
posthabita providentia parentum, introducunt pro- l'intermédiairede la sociétédomestiquedans laquelle
videntiamreipublicae,faciuntcontrajustiliam nalura- ils sontnés. De ce que les fils sontnaturellementquel,
lem,ac domorumcompaginemdissolvunt. que chosede leurpère... ils doiventrestersous la tutelle
des parentsjusqu'à ce qu'ilsaient acquis l'usagedu li-
brearbitre . —Ainsi, en substituant à la providence
paternelle la providencede l'Etat, les socialistesvont
contreta justice naturelle,et brisent lesliens de la fa-
mille.
Acpresterinjustitiam, nimis etiam apparet qualis Mais, en dehors de l'injustice de leur système, on
esset omnium ordinum commutatio perturbatioque, n'en voit que trop toutes les fuestes conséquences:
quam dura et odiosa servitus civium consecutura. la perturbation dans tous les rangs de la société,une
Aditus ad invidentiammutuam, ad obtrectationeset odieuse et insupportable servitude pour tous les ci-
discordias patefieret, ademptis ingenio singulorum toyens, la porte ouverte à toutes les jalousies, à tous
sollertiasquestimulis, ipsi divitiarum fontesnecessa- les mécontentements,à toutes les discordes,le talent
rio exarescerent: eaque, quam finguntcogitatione, et l'habileté privés de leurs stimulants, et, comme
aequabilitas, aliud rêvera non esset nisi omnium conséquencenécessaire,les richesses taries dans leur
hominumaequemisera atque ignobilis, nullo discri- source ; enfin, à la place de cette égalité tant rêvée,
mine, conditio. — Ex quibus omnibus porspicitur, l'égalité dans le dénuement, dans l'indigence et la
illud Socialismiplacitum de possessionibus in com- misère. — Par tout ce que Nous venons de dire, on
muneredigendisomnino repudiari oportere, quia iis comprend que la théorie socialistede la propriété
ipsis, quibus est opitulandum, nocet ; naturalibus collectiveest absolument à répudier, comme préju-
singulorumjuribus répugnât, officiareipublicaetran- diciable à ceux-là mêmes qu'on veut secourir, con-
quillitatemquecommunemperturbât. Maneat ergo, traire aux droits naturels des individus, comme
cumplebi sublevatio quaeritur,hoc in primis haberi dénaturant les fonctions de l'Etat et troublant la
fundamenti instar oportere, privatas possessiones tranquillité publique. Qu'il reste donc bien établi
inviolate servandas. Quo posito, remedium, quod que le premier fondement à poserpar tous ceux qui
exquiritur, unde petendumsit, explicabimus. veulent sincèrementle bien du peuple, c'est l'invio-
labilité de la propriétéprivée. A présent, expliquons
où il convientde chercher le remède tant désiré.
Confidenterad argumentum aggredimur ac plane C'est avec assurance que Nous abordons ce sujet,
jure Nostro; propterea quod caussa agitur ea, cujus et dans toute la plénitude de Notre droit ; car la
exitus probabilis quidem nullus, nisi advocata reli- question qui s'agite est d'une nature telle, qu'à moins
gioneEcclesiaque,reperietur. Cumvero et religionis de faire appel à la religion et à l'Eglise, il est impos-
custodia,et earum rerum, quaein Ecclesiaepotestate sible de lui trouverjamais une solution efficace.Or,
sunt, pênes Nos potissimum dispensatio sit, negle- commec'està Nousprincipalementque sont confiées
la sauvegarde de la religion et la dispensationde ce
1.S. Thom.II-II.Quart.X,art.XII. qui est du domaine de l'Eglise, Nous taire serait
LVIII ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
xisse officiumtaciturnitate videremur. — Profecto aux yeux de tous négliger Notre devoir. — Assuré-
nliorum quoque operam et contentionem tanta haec ment, une question de cette gravité demande en-
caussa desiderat : principumreipublicaeintelligimus, core à d'autres agents leur part d'activité et d'ef-
dominorum ac locupletium, denique ipsorum, pro forts ; Nous voulons parler des gouvernants, des
quibus contentio est, proletariorum : illud tamen sine maîtres et des riches, des ouvriers eux-mêmes, dont
dubitatione affirmamus,inania conata hominum fu- le sort est ici en jeu. Mais ce que Nous affirmons
tura, Ecclesia posthabita. Videlicet Ecclesia est, quas sans hésitation, c'est l'inanité de leur action en de-
promit ex Evangeliodoctrinas, quarum virtute aut hors de celle de l'Eglise. C'est l'Eglise, en effet, qui
plane componi certamen potest, aut certe fieri, de- puise dans l'Evangile des doctrines capables soit de
tracta asperitate, mollius : eademque est, quaenon mettre fin au conflit, soit au moins do l'adoucir, en
instruere mentem tantummodo, sed regere vitam et lui enlevanttout ce qu'il a d'àpreté et d'aigreur ; l'E-
mores singulorum praeceptis suis contendit : quos glise, qui ne se contentepas d'éclairer l'esprit de ses
statum ipsum proletariorum ad meliora promovet enseignements,mais s'efforceencoredorégler en con-
pluribus utilissime institutis: quaevult atque expetit séquencela vie et les moeursd'un chacun; l'Eglise,
omnium ordinum consilia viresque in id consociari, qui, par une foule d'institutions éminemmentbien-
ut opificumrationibus, quam commodissimcpotest, faisantes, tond à améliorer le sort des classes pau-
consulatur : ad eamque rem adhiberi leges ipsas vres; l'Eglise, qui veut et désire ardemment que
auctoritatemquereipublicae,utique ratione ac modo, toutes les classes mettent en commun leurs lumiè-
putat oportere. res et leurs forces pour donnerà la question ouvrière
la meilleure solution possible; l'Eglise enfin, qui es-
time que les lois et l'autorité publique doivent, avec
mesure sans doute et avec sagesse, apporter à celle
solution leur part de concours.
jllud itaque statuatur primo loco, ferendamesse Le premier principeà mettre en relief, c'est que
conditionemhumanam : ima summis paria fieri in l'hommedoit prendre en patience sa condition; il est
civili societatenon posse.Agitantid quidemSocialistse: impossible que, dans la sociétécivile, tout le monde
sed omnis est contra rerum naturam vana contentio. s lit élevéau même niveau. Sans doute,c'est là ce que
Sunt enim in hominibusmaximaeplurimaequenatura poursuivent les socialistes; mais contre la nature tous
dissimilitudines. non omnium paria ingénia sunt, les effortssont vains. C'est elle, en effet, qui a établi
non sollertia, non valetudo, non vires : quarum re- parmi les hommesdes différencesaussi multiplesque
rum necessarium diseritnen sua sponte sequitur for- profondes : différencesd'intelligence,de talent, d'ha-
tuna dispar. Idque plane ad usus cum privatorum bileté, de santé, de forces; différences nécessaires
tum communilalisacconimodate; indiget enim varia d'où nait spontanément l'inégalité des conditions.
ad res gerendas facnltate diversisque muneribus vita Cette inégalité, d'ailleurs, tourne au profit de tous,
communis; ad quae fungenda munora potissimum de la sociétécommedes individus : car la vie sociale
impolliinlur homines difterentia rei cujusque fami- requiert un organisme très varié et des fonctions
liaris. — Et ad corporis laborem quod attinet, in fort diverses ; et ce qui porteprécisémentles hommes
ipso statu innocenliie,non iners omninoerathomo fu- à se partager ces fonctions,c'est surtout la différence
lurus : al vero quod ad animi delectationemtune li- de leurs conditions respectives. — Pour ce qui re-
bèreoptavisset volunlas, idem postea in expiationem girde le travail en particulier, l'homme dans l'état
culpaesubire non sine molesliossensu coegit néces- même d'innocence,n'était pas destiné à vivre dans
sitas. Maledictaterra in opèretuo: in laborilmscorne-, loisiveté; niaisce que la volontéeût embrassé libre-
des ex ea cunctisdiebusvitoeiusel. —Similique modo ment comme un exercice agréable, la nécessité y
finisacerbitatum reliquarum in terris nullus est fu- a ajouté, après le péché, le sentiment de la douleur
lurus, quia mala peccali consectaria aspera ad tole- et l'a imposé commeune expiation. « La terre sera
randum sunt, dura, difficilla: eaque homini usquead » mauditeà cause de lui : c'est par le travail que tu
attimum vitaecomitari estnecesse. Ilaquo pati et per » en tireras ta subsistance tous les jours de ta vie ».
poli humanumest, et ut hominescxperianlur ac ten- — Il en est de mêmede toutes les autres calamités
lent omnia, isliusmodi incommoda evellere ab hu- qui ont fondu sur l'homme ; ici-bas, elles n'auront
mano convictu penitus nulla vi, nulla arte poterunt. pas de lin ni de trêve, parce que les funestes fruits
Si qui id se profiteanturposse,si miserasplobi vitam du péchésont amers, âpres, acerbes, et qu'ils accom-
polliceantur omni dolore molestiaque vacantem. et pagnent nécessairementl'hommejusqu'à son dernier
refertamquiete ac perpetuis voluptatibus, naeilli po- soupir. Oui la douleur et la souffrancesont l'apanage
puloimponunt,fraudemquestrtiunt,in mala aliquando de l'humanité, et les hommes auront beau tout e-
crupturam majora praesentibus.Optimum factu res sayer, tout tenter pour les bannir, ils n'y réussiront
lumanas, ut se habent, ita contueri, simulque oppor- jamais, quelques ressources qu'ils déploient et quel-
unum incommodisle vamentum,uti diximus, aliunde ques forces qu'ils mettent en jeu. S'il en est qui s'en
oetere. attribuent le pouvoir, qui promettent au pauvre une
vie exempte de souffranceset de peines, toute au re-
1.Gen.111,17. pas et à de perpétuellesjouissances,ceux-là certaine-
ment trompent le peuple et lui dressent des embù-
ches, où se cachent pour l'avenir de plus terribles
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LIX
calamités que celles du présent. Le meilleur part 1
consiste à voir les choses telles qu'elles sont et,
comme Nous l'avons dit, à chercher ailleurs un re-
mède capable de soulager nos maux.
Est illud in caussa, de qua dicimus, capitale ma- L'erreur capitale dans la question présente, c'est
lum, opinione fingerealterum ordinem sua sponte in- do croire que les deux classes sont ennemies-nées
fensum alteri, quasi locupletes et proletarios ad di- l'une de l'autre, comme si la nature avait armé les
gladiandum inter se pertinaci duello natura compa" riches et les pauvres pour qu'ils se combattent mu-
raverit. Quod adeo a ratione abhorret et a verllate, tuellement dans un duel obstiné. C'est là une aber-
ut contra verissimum sit, quo modo in corpore di- ration telle qu'il faut placer la vérité dans une doc-
versa inter se membra conveniunt,unde illud existit trine contrairement opposée; car de même que dans
temperamentumhabitudinis, quamsymmetriam recte le corps humain les membres, malgré leur diversité,
dixeris, eodemmodo naturam in civitato praecepisse s'adaptent merveilleusement l'un à l'autre, de façon
ut géminésillas classes congruant inter se concordi- à former un tout exactement proportionné et qu'on
ter, sibique convenienter ad asquilibritatem respon- pourrait appeler symétrique, ainsi, dans la société,
deant. Omninoaltera alterius indiget: non res sine les deux classessont destinées par la nature à s'unir
opéra, nec sine re potest opera consistere. Concordia harmonieusementet à se tenir mutuellementdans un
gignit pulchritudinem rerum atque ordinem : con- parfait équilibre. Elles ont un impérieux besoin
tra ex perpetuitate certaminis oriatur necesse est cum l'une de l'autre : il ne peut y avoir do capital sans
agresti immanitate confusio. Nunc vero ad dirimen- travail, ni de travail sans capital. La concordeen-
dum certamen, ipsasque ejus radiées amputandas, gendre l'ordre et la beauté ; au contraire, d'un conflit
mira vis est institutorum christianorum, eaque mul- perpétuel il ne peut résulter que la confusionet les
tiplex. — Ac primum tota disciplina religionis, cujus luttes sauvages. Or, pour dirimer ce conflit et cou-
et interpres et custos Ecclesia, magnoperepotest lo- per le mal dans sa racine, les institutions chrétiennes
cupletes et proletarios componereinvicem ei conjun- possèdentune vertu admirable et multiple.— Et d'à-
gere, scilicet utroque ordine ad officia mutua revo- bord toute l'économie des vérités religieuses, dont
cando, in primisque ad ea ques a justitia ducuntur. l'Eglise est la gardienne et l'interprète, est de na-
Quibus ex officiis illa proletarium atque opificem ture à rapprocher et à réconcilier les riches et les
attingunt ; quod libère et cum esquitatepactum opéras pauvres, en rappelant aux deux classes leurs devoirs
sit, id intègre et fideliter reddere : non rei ullo modo mutuels, et avant tous les autres ceux qui dérivent
nocere, non personam violare dominorum : in ipsis de la justice. Parmi ces devoirs, voici ceux qui re-
tuendis rationibus suis abstinere a vi, nec seditionem gardent le pauvre et l'ouvrier:il doit fournir intégra-
induere unquam : nec commisceri cum hominibus lement et fidèlementtout le travail auquel il s'est en-
fiagitiosis,immodicasspes et promissa ingentia arti- gagé par contrat libre et conformeà l'équité ; il ne
ficiosejactantibus, quod ferehabet poenitentiaminu- doit point léser son patron, ni dans ses biens, ni dans
tilem etfortunarum ruinas conséquentes. —Ista vero sa personne ; ses revendications mêmesdoivent être
ad divites spectant ac dominos : non habendos man- exemptesde violences et ne jamais revetir la forme
cipiorum loco opifices: vereri in eis aequum esse de séditions; il doit fuir les hommes pervers qui,
dignitatem personas,utique nobilitatam ab eo, cha- dans des discours artificieux, lui suggèrent des espé-
racter christianus qui dicitur. Quaestuosasartes, si rances exagérées et lui font de grandes promesses,
natures ratio, si christiana philosophia audiatur, non lesquelles n'aboutissent qu'à de stériles regrets et à
pudori homini esse, sed decori, quia vilaesuslentandoe la ruine des fortunes. — Quant aux riches et aux
prasbant honestam potestatem. Illud vere turpo et patrons, ils ne doivent point traiter l'ouvrier en es-
inhumanum,abuti hominibus pro rebus ad qnaestum, clave, mais respecter en lui la dignité de l'homme, re-
nec facere eos pluris, quam quantum nervis polleant levée encore par celle du chrétien. Le travail du
viribusque. Similiter prescipitur, religionis et bono- corps, au témoignage communde la raison et de la
rum animi haberi rationem in proletariis oportere. philosophiechrétienne, loin d'être un sujet de honte,
Quaredominorum partes esse, efficereut idoneo tem- fait honneur à l'homme,parce qu'il lui fournit un no-
poris spatio pietati vacet opifex : non hominom dare ble moyen do sustenter sa vie. Ce qui est honteux et
obvium lenociniis corruptelarum illecebrisquopec- inhumain,c'est d'user deshommescommede vils ins-
candi : neque ullo pacto a cura domestica parcimo- truments de lucre, et de ne les estimer qu'en propot-
nissque studio abducere. Item non plus imponere tion de la vigueur de leurs bras. Le christianisme, en
operis, quam vires ferre queant, nec id genus, quod outre, prescrit qu'il soit tenu compte des intérêts spi-
cum aetatesexuque dissideat. In maximis autem offi- rituels de l'ouvrier et du bien de son âme. Aux maî-
ciis dominorum illud eminet, justa unicuique praa- tres, il revient de veillera ce qu'il y soit donné pleino
bere. Profecto ut mercedis statuatur ex esquitate satisfaction; que l'ouvrier ne soit point livré à lu
modus, caussessunt considerandesplures : sed gene- séduction et aux sollicitations corruptrices; que rieu
ratim locupletes atque heri meminerint, premere ne vienne affaiblir en lui l'esprit de famille, ni les
emolumenti sui caussa indigentes ac miseros, alie- habitudes d'économie. Défense encore aux maîtres
naque ex inopia captare quaestum, non divina, non d'imposer à leurs subordonnés un travail au-dessus
humana jura sinere. Praudare vero quemquam mer- de leurs forcesou en désaccord avecleur âge ou leur
cede debita grande piaculum est, quod iras e ceslo sexe.Mais, parmi les devoirs principauxdu patron, il
LX ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
ultrices clamore devocat. Ecce mercesoperariorum... | faut mettre au premier rang celui de donner à cha-
qumfraudala esta vobis,clamât :et clamoreorumin «ti- cun le salaire qui convient. Assurément, pour fixer
res DominiSabaothintroivit 1. Postremo religiose ca- la juste mesuredu salaire, il y a de nombreux points
vendum locupletibus ne proletariorum compendiis de vue à considérer; mais, d'une manière générale,
quicquam noceant nec vi, nec dolo, nec fenebribus que le riche et le patron se souviennentqu'exploiter
artibus :idque eo vel magisquod non satis illi sunt la pauvreté et la misère et spéculer sur l'indigence
contra injurias atque impotentiam muniti, eorumque sont choses que réprouvent égalementles lois divines
res, quo exilior.'hoc sanctior babenda. et humaines. Ce qui serait un crime à crier ven-
geanceau ciel, serait de frustrer quelqu'un du prix
de ses labeurs. Voilà que le salaire que vousavezdé-
robépar fraude à vosouvrierscrie contre vous,et leur
clameurest montéejusqu'aux oreillesdu Dieu desar-
mées.Enfinles riches doivent s'interdire religieuse-
ment tout acte violent, toute fraude, toute manoeuvre
usuraire qui serait de nature à porter atteinte à l'é-
pargne du pauvre, et cela d'autant plus que celui-ci
est moins apte à se défendre et que son avoir, pour
être de mince importance, revêt un caractère plus
sacré.
Hie obtemperatiolegîbus nonne posset vim caus- L'obéissance à ces lois, Nous le demandons, ne
sasque dissidii vel sola restinguere? — Sed Ecclesia suffirait-ellepas à elle seule pour faire cesser tout
tamen, Jesu Christo magistro et duce, persequitur antagonismeet en supprimer les causes? L'Eglise,
majora : videlicet perfectius quiddam praecipiendo, toutefois, instruite et dirigée par Jésus-Christ, porte
illuc spectat, ut alterum ordinemvicinitate proxima ses vues encore plus haut ; elle propose un corps de
amicitiaque alteri conjungat. — Intelligere atque préceptesplus complet, parce qu'elle ambitionne de
aostimare mortalia ex veritate non possumus, nisi resserrer l'union des deux classes jusqu'à les unir
dispexerit animus vitam alteram eamque immorta- l'une à l'autre par les liens d'une véritable amitié.
lem : qua quidem dempta, conlinuo forma ac vera — Nul ne saurait avoir une intelligencevraie de la
notio honesti interiret: immo Iota haec rerum uni- viemortelle, ni l'estimer à sajuste valeur, s'il ne s'é-
vorsitas in arcanum abiret nulli hominum investiga- lève jusqu'à la considération do cette autre vie qui
tion! pervium. Igitur, quod natura ipsa admonenlo est immortelle. Supprimez celle-ci,et aussitôt toule
didicimus, idem dogmaest christianum, quo ratio et forme et toute vraie notion de l'honnête disparait ;
constitutio tota religionis tamquam fundamento bien plus, l'univers entier devient un impénétrable
principe nilitur, cum ex bac vita excesserimus,tum mystère. Quand nous aurons quitté cette vie, alors
vere nos esse victuros. Neque enim Deus hominem seulement nous commenceronsà vivre ; celte vérité,
adhaecfragilia etcaduca, sed ad coelestiaatque oeterna que la nature elle-mêmenous enseigne,est un dogme
generavit, terramque nobis ut exulandi locum, chrétien sur lequel repose, comme sur son premier
non ut sedem habitandi dédit. Divitiis ceterisque fondement, toute l'économie de la religion. Non,
rébus, quaeappellantur bona, aflluas, careas, adesler- Dieu ne nous a point faits pour ces choses fragiles
jiam beatitudinem nihil interest : quemadmodum et caduques, mais bien pour les choses célestes et
utare, id vero maxime interest. Acerbitates varias, éternelles; ce n'est point comme une demeure fixe
quibus vita mortalis fere contexitur, Jésus Christus qu'il nous a donné cette terre, mais commeun lieu
copiosaredemplionesua nequaquam sustulit, sed in d'exil. Que vous abondiezen richesses et en tout te
virtutum incilamenta, materiamque bene merendi qui est réputé biens de la fortune, ou que vous en
traduxit : ita plane ut nemomortalium queat presmia soyez privé, cela n'importe nullement à l'éternelle
sempiterna capessere,nisi cruentis JesuChristi vesli- béatitude ; l'usage que vous en ferez, voilà ce qui in-
giis ingrediatur. Si suslinebimus,et conregnabimus2. téresse. Par sa surabondante rédemption, Jésus
Laboribus ille et cruciatibus sponte susceptis, cru- n'a point supprimé les afflictions, qui forment pres-
cialuum et laborum mirifice vim delenivit : nec so- que toute la trame de la vie mortelle, il en a fait des
lum cxemplo, sed gralia sua perpeluacquemercedis stimulants de la vertu et des sources du mérite ;
spe proposita, perpessionem dolorum effecit facilio- en sorte qu'il n'est pont d'hommequi puisse pré-
îem : id enim, quod in prxsenli est momenlaneumet tendre aux récompenseséternelles s'il ne marchesur
levé tribulalionisnoslrse,supra modumin sublimitate les traces sanglantes de Jésus-Christ. « Si nous
séléniumglorix pondusoperalurin coelis3. » souffronsaveclui, nous régneronsavec lui. » D'ail-
leurs, en choisissant de lui même la croix et les
1. Jac. V, 4. —2.II adTim.II, 12. — 3.HCor.IV, 17. tourments, il en a singulièrementadoucile poids et
l'amertume, et, afin de nous rendre encore la souf-
france plus supportable, à l'exemple il a ajouté sa
grâce et la promesse d'une récompense sans fin.
Car le momentsi court et si légerdes afflictionsquenous
souffronsen cellevie produit en nous le poids éternel
dune ûloiresouveraineet incomparable.
r
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXI
Itaque fortunati monentur, non vacuitatem doloris Ainsi, les fortunésde ce monde sont avertis que les .
afferre, nec ad felicitatem asvi sempiterni quicquam richesses ne les mettent pas à couvert de la douleur, !
prodessedivitias, sed po.ins obesse i : terrori locu- qu'elles ne sont d'aucune utilité pour la vie éter-
pletibus esse debere Jesu Christi insuetas minas 2 nelle, mais plutôt un obstacle;qu'ils doiventtrembler ,
rationem de usu fortunarum Deo judici soverissime devant les menaces inusitées que Jésus-Christ pro-
aliquando reddendam. fère contre lesriches ; qu'enfin, il viendraun jour où ,
ils devront rendre à Dieu, leur juge, un compte très
rigoureux de l'usage qu'ils auront fait de leur for-
tune.
De ipsis opibus utendis excellonsac maximi mo- Sur l'usage des richesses, voici l'enseignement
menti doctrina est, quam si philosophia inchoatam, d'une excellenceet d'une importanceextrême que la
at Ecclesiatradidit perfectamplane, eademqueeffi- philosophie a pu ébaucher, mais qu'il appartenait à
cit ut non cognitionetantum, sed moribus teneatur. l'Eglise de nous donner dans sa perfectionet de faire
Cujus doctrines in eo est fundamentum positum, descendrede la connaissanceà la pratique. Le fon-
quodjusta possessiopecuniarum a justo pecuniarum dement de cette doctrine est dans la distinction entre
usu distinguitur. Bona privatim possidere, quod la juste possession des richesses et leur usage légi-
paulo ante vidimus. jus est homini naturale : eoque time. La propriétéprivée. Nous l'avonsvu plus haut,
uti jure, maxime in societate vitas, non fas modo est pour l'homme de droit naturel ; l'exercice de ce
est, sed plane necessarium. Licitumest quod homo droit est chose non seulementpermise, surtout à qui
propriapossideat.Et est etiam necessariumad huma- vit en société, mais encore absolument nécessaire.
nam vitam 3. At vero si illud quaeratur, qualem Maintenant,si l'on demandeen quoi il faut faire con-
esse usum bonorum necesse sit, Ecclesia quidem sister l'usage des biens, l'Eglise répond sans hésita-
sineulla dubitatione respondet: quantumad hoc,non tion : « Sous ce rapport, l'hommene doit pas tenir
débet homohabere res exterioresut proprias, sed ut » les choses extérieures pour privées, mais bien
communes, ut scilicet dj facili aliquis eas communicet » pour communes,de telle sorte qu'il en fasse part
in necessitatealiorum. UndeApostotusdicit : divitibus » facilementaux autres dans leurs nécessités. C'est
hujus saeculiproecipe...facile tribuere, communicare*. » pourquoi l'Apôtre a dit : Ordonne aux riches du
Nemocerte opitulari aliis de eo jubetur, quod ad » siècle de donner facilement,de communiquer leurs
usus perlineat cum suos tum suorum necessarios: » richesses.» Nul assurément n'est tenu de soulager
immonec tradere aliis quo ipse egeat ad id servan- le prochainen prenant sur son nécessaire ou sur
dum quod personaeconveniat, qtiodque deceat : nul- celui de sa famille; ni mêmede rien retrancher de ca
lus eniminconvenientervivere débet5. Sed ubi neces- que les convenancesou la bienséance imposent à sa
sitati satis et decorodatum, officiumest de eo quod personne: Nul en effet nedoit vivrecontrairementaux
superat gratificari indigentibus. Quod superest, date convenances.Mais dés qu'on a suffisammentdonné à
cleemosinamb. Non justitiae, excepto in rébus extre- la nécessitéet au décorum,c'est un devoir de verser
mis, officiaista sunt, sed caritatis christiana},quam le superflu dans le sein des pauvres. C'est un de-
prolectolege agendo petere jus non est. Sed legibus voir non pas de stricte justice, sauf les cas d'extrême
judiciisque hominum lex antecedit judiciuinque nécessité, mais de charité chrétienne ; un devoir,
Christi Dei, qui mullis modissuadet consuetudinein par conséquent, dont on ne peut poursuivre l'ac-
largiendi ; beatius est magis dure quam accipere 1 : complissement parles voies de la justice humaine.
et collatam negatamvepauperibus beneficentiampé- Mais, au-dessus des jugements de l'homme et de ses
riode est ac sibi collatam negatamve judicaturus. lois, il y a la loi et le jugement de Jésus-Christ,
Qaamdiufecisli uni ex his fratribus meis minimis, notre Dieu, qui nous persuade de toutesles manières
mihi fecisli8. — Quarum rerum htec summa est ; de faire habituellementl'aumône: « Il est plus heu-
quicumquemajorem copiam bonorum Dei munere » reux, dit-il, celui qui donne que celui qui reçoit »,
uccepit, sive corporis et externa sint, sive animi, ob et le Seigneur tiendra pour faite ou refusée à lui-
hanecaussam accepisse, ut ad perfectionemsui pari- même, l'aumône qu'on aura faite ou refuséeaux pau-
lerque, velut minister providentiaedivinae,ad ulili- vres. « Chaque fois que vous avez fait l'aumône à
lates adhibeat ceterorum. liabensergo talentum,curet » l'un des moindres de mes frères que vous voyez,
omninone taceat: habensrerum affluentiam,vigiletne » c'est à moi que vous l'avez faite. » — Du reste,
u misericordixlargilale torpescat: liabens arlem qua voici, en quelques mots, le résumé de cette doc-
•egitur, magnoperesludeatut usum atque utililalem trine : Quiconque a reçu de la divine bonté une
'lliuscumproximopartiatur 9. plus grande abondancesoit des biens externes et du
corps, soit des biensde l'âme, les a reçus dans le
1.Matth.XIX,23-24. —2. Luc,VI,24-25.—3. II-II Qirast. but de les faire servir à son propre perfectionnement,
LXVI, a. 2. — 4. II-II, Qaaest.
LXV,a. 2. —5. II-II, Quoesl. et, tout ensemble, commeministre de la Providence,
[XXII,a. 6.—6. Luc,XI,41.—7.Actor.XX,35.—8, Matth., au soulagement des autres. C'est pourquoi « quel-
SXV,40.—9. S. Greg.Mago.inEvang.Hom.IX,n. 7. qu'un a-t-il le talent de la parole, qu'il prenne garde
de se taire ; une surabondance de biens, qu'il ne
laisse pas la miséricorde s'engourdir au fondde son
coeur; l'art de gouverner, qu'il s'applique avec soin à
en partager avec son frère et l'exercice et les fruits. »
LXII ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
Bonis autem fortunesqui careant, ii ab Ecclesia Quant aux déshéritésde la fortune, ils apprennent
perdocentur,non probro haberi, Deo judice, pauper- de l'Eglise que, selonle jugement de Dieu lui-même,
fatem,nec eo pudendum,quod victus labore quesra- la pauvreté n'est pas un opprobreet qu'il ne faut pas
tur. Idque confirmavitre et fact}Christus Dominus, rougir de devoir gagner son pain à la sueur de son
qui pro salute hominum cgcnusfactus est, cum esset front. C'estce queJésus-ChristNotre-Seigneura con-
dives ': cumque esset filins Dei ac Deus ipsomet, firmépar son exemple,lui qui, tout riche qu'il était,
videri tamenac putari fabri lilius voltiit : quin eliam s'estfait indigentpour le salut deshommes;qui, fils de
magnam vitas partem in opère fabrili consumere Dieuet Dieu lui-même,a voulu passer aux yeux du
non recusavit. Nonnehic est faber, filius Marae? 2 monde pour le fils d'un artisan ; qui est allé jusqu'à
Hujus divinitatem exempli intuenlibus, ea fjcilnis consumerune grande partie do sa vie dans un travail
iulelliguntur: veram himinu digniiatem atqus ex- mercenaire.Quiconquetiendra sous son regardle mo-
cellentiamin moribus esse, hoc est in virtule, posi- dèledivin comprendraplus facilementce que nousal-
tam: virtutem vero commune morlalibus patrimo- lonsdire : que la vraie dignité de l'hommeet son ex-
nium, imis et summis, divilibus et proletariis aeque cellenceréside dans ses moeurs,c'est-à-diredans sa
parabilo: nec aliud quippiam quam virtutes et mé- vertu ; que la vertu est le patrimoine commundes
rita, in quocumque reperiantur, mercedem beatitu- mortels, à la portée de tous, des petits et des grands,
dinis asernas sequuturam. Immo vero in calamito- despauvres et des riches ; que seuls la vertu et les
sorum genus propefisior Dei ipsius videtur volun- mérites,n'importeen quelsujet ils se trouvent,obtien-
tas : boatos enim Jésus Christus nuncupat piupe- dront la récompensede l'éternellefélicité.Bien plus,
res 3 : invitât peramanter ad se, solatii caussa, c'estvers les classes infortunéesque le coeurde Dieu
quicumque in labore sint ac luctu 4: intimns et in- somble s'incliner davantage. Jésus-Christ appelle
juria vexalos complectitur caritale praecipua.Qua- les pauvres des bienheureux; il invite avec amourà
rum cognitionererum facile in forlunatis deprimitur venir à lui, afin qu'il les console,tousceux qui souf-
t unens animus, in asrumnosisdemissus extollilur: frent et qui pleurent ; il embrasse avec une cha-
alleri ad ftcilitatem, alteri ad modeslinmilectuntur. rité plus tendre les petits et les opprimés. Ces doc-,
Sic cupitum superbias intervallum efficiturbrevius. trines sont bien faites sans nul doute pour humilier
nec difliculter iinpetrabitur ut ordinis utriusque, l'âmehautaine du richeet le rendre plus condescen-
junctis amice doxtris, copulenturvoluutate?. dant, pour relever le courage de ceux qui souffrent
et leur inspirer de la résignation. Avecelles se trou-
verait diminuéun abîme cher à l'orgueil, et l'on ob-
tiendrait sans peine que des deux côtés on se donne
la main et que les volontéss'unissent dans une mémo
amitié.
Quostamen,si christianis prosceptisparuerint, pa- Mais c'est encore trop peu de la simple amitié: si
runi est amicitia, amor eliam fraternusinter se con- l'on obéit aux préceptes du christianisme, c'est dans
j tgabit. Sonlientenim et intelligent, omnes plane ho- l'amour fraternel que s'opérera l'union. De part et
mines a comtnuni parente Deo, procreatos: omnes d'autre, on saura et l'on comprendraque les hommes
a l eumdem finem bonorum tendere, qui Deus est sont tous absolument issus de Dieu, leur Père com-
ipse, qui afficorebeatitudine perfectaatque absoluta" mun; que Dieu est leur unique et commune fin, et
et homines et Angelosunus potest: singulos item que lui seul est capable de communiqueraux anges
parilir esse Jesu Christi bénéficie redetnplos et in et aux hommesune félicité parfaite et absolue; que
digeuiiatcmfiliorumDei vindicatos, ut ptme necessi- tous, ils ont été égalementrachetéspar Jésus-Christ
tudinc fraterna cum inter se tum etiam cum Christo et rétablis par lui dans leur dignité d'enfants de
Domino,primogeniloin multis fratribus. cnntinian- Dieu, et qu'ainsi un véritable lien de fraternité les
tur. Item natura; bona, munera gratiae divina}per- unit soit entre eux, soit au Christ leur Seigneur, qui
tiiiore communiteret promiscue ad genus hominum est le premier-né de beaucoupde frères,primogenilus
universiim,nec quemquam, nisi indignum,bonorum in multis fratribus. Ils sauront enfin que tous les
coelestiumfieriexheredem.Si autem filii, el lieredes: biens de la nature, tous les trésors de la grâce ap-
heredesquidemDei,coheredesautem Clirisli6. partiennent en commun et indistinctementà tout le
genre humain, et qu'il n'y a que les indignesqui
soient déshérités des biens célestes: Si vousêtes fils,
vousêtesaussi héritiers:héritiers de Dieu, cohéritiers
de Jésus-Christ.
Talis est forma ofliciorumac jurium, quam chris- Telleest l'économiedes droits et des devoirs qu'en-
tiana philosophia profitelur. Nonne quieturuui per- seigne la philosophie chrétienne.Ne verrait-on pas
brevi tempore certamenomne videatur, ubi illa in l'apaisement se faire à bref délai, si ces enseigne-
civiliconvictuvaleret? ments pouvaient une fois prévaloir dans les sociétés.
Deniquenec satishabet Ecclesia, viam inveniendas Cependant l'Eglise ne se contente pas d'indiquer
curationis ostendere, sed admovet sua manu medi- la voie qui mène au salut, elle y conduit et applique
VIII,9. —2. Maro.VI,3.—3. Matth.V,3: do sa propre main le remède au mal. Elle est tout
1. II Corinth.
Bea'ipauperrs spiritu.—4. admeomnes,
Matth.XI,28:Venite qui entière à instruire et à élever les hommes d'après
ab'/raJ'A' vos.—5. Itom.VIII,17 ses principes et sa doctrine, dont elle a soin de ré-
eloneraliostis,etegoreficiam
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXIII
cinam. Nam tota in eo est ut ad disciplinam doc- pandre les eaux vivifiantes aussi loin et aussi large-
Irinamque suam excolat homines atque instituât: ment qu'il lui est possible, par le ministère des evé-
cujus doctrines saluberrimos rivos, Episcoporum et ques et du clergé. Puis elle s'efforcede pénétrer dans
Cleri opéra, quam latissime potest, curât deducen- les âmeset d'obtenir des volontésqu'elles se laissent
dos. Deindepervadere in animos nitilur flectereque conduire et gouverner par la règle des préceptes di-
voluntates, utdivinorum disciplina praeceptorumrégi vins. Ce point est capital et d'une importance très
se gubernarique patiantur. Atque in hac parte, quae grande, parce qu'il renferme comme le résumé de
princeps est ac permagni momenti, quia summa uti- tous les intérêts qui sont en cause, et ici l'action de
litatum caussaqne tota in ipsa consistit, Ecclesia l'Eglise est souveraine. Les instruments dont elle
quidem una potest maxime. Quibus enim instrumen- dispose pour toucherles âmes,elle les a reçus à cette
tis ad permovendosanimosutitur, ea sibi hanc ipsam fin de Jésus-Christ, et ils portent en eux l'efficace
ob eaussamtradita a Jesu Christo sunt, virtutemque d'une vertu divine. Cesont les seuls qui soient aptes
habent divinitus insitam. Istiusmodi instrumenta à pénétrer jusque dans les profondeurs du coeurhu-
sola sunt, quaecordis atlingere pénétrâtes sinus apte main, qui soient capables d'amener l'homme à obéir
queant, hominemque adducereutobedientem se prae- aux injonctions du devoir, à maîtriser ses passions,
beatofficio,motus animiappetentisregat, Deumet pro- à aimer Dieu et son prochain d'une charité sans me-
ximo caritate diligat singulari ac summa, omniaque sure, à briser courageusement tous les obstacles qui
animose perrumpat, qnaevirtutis impediunt cursum. entravent sa marche dans la voie de la vertu.
Salis est in hoc génèreexempla veterum paulisper Il suffit ici de passer légèrement en revue par la
cogitatione repetere. Res et facta commemoramus, pensée les exemples de l'antiquité. Les choses et les
quas dubitationem nullam habent: scilicet civilem faits que nous allons rappeler sont hors de toute
hominum communitatem funditus esse institutis controverse. Ainsi, il n'est pas douteux que la société
christianis renovatam: hujusce virtute renovationis civile des hommesa été foncièrementrenouvelée par
ad meliora prouiotumgenus humanum, immo revo- les institutions chrétiennes ; que cette rénovation a
catum ab interitu ad vitam, auctumque perfectione eu pour effet de relever le niveau du genre humain,
tanta, ut nec extiterit ulla antea, nec sit in omnes ou pour mieux dire de le rappeler de la mort à la vie
conséquentes estâtes futura major. Denique Jesum et de le porter à un si haut degré de perfectionqu'on
Christumhorum esse beneficiorumprincipium eum- n'en vit de semblable ni avant ni après, et qu'on
dem et finem: ut ab eo profecta, sic ad eum omnia n'en verra jamais dans tout le cours des siècles.
referenda. Nimirum accepta Evangelii luce, cum in- Qu'enfin, ces bienfaits, c'est Jésus-Christ qui en a
carnationis Verbi hominumqueredemptionis grande été le principe et qui doit en être la fin ; car, de même
mysterium orbis terrarum didicisset, vita Jesu que tout est parti de lui, ainsi tout doit lui être rap-
Christi Deiet hominis pervasit civitates, ejusque fide porté. Quand donc l'Evangile eut rayonné dans le
etpraeceptis et legibus totas imbuit. Quare si socie- monde, quand les peuples eurent appris le grand
tati generis humani medendum est, revocatio vîtes mystère de l'incarnation du Verbe et de la rédemp-
institutorumque christianorum sola medebitur. De tion des hommes, la vie de Jésus-Christ, Dieu et
societatibusenim dilabentibus illud rectissime prae- homme, envahit les sociétés et les imprégna tout
cipitur, revocari ad origines suas, cum reslitui vo- entières de sa foi, de ses maximes et de ses lois.
lunt, oportere. Haec enim omnium consociationum C'est pourquoi, si la sociétéhumainedoit être guérie,
perfectio est, de eo laborare idque assequi, cujus ellene le sera que par le retour à la vieet aux insti-
gratia institutae sunt : ita ut motus actusque sociales tutions du christianisme. A qui veut régénérer une
eadem caussa pariât, quaepeperit societatem.Quam- société quelconque en décadence, on prescrit, avec
obrem declinare ab instituto, corruptio est : ad insti- raison, de la ramener à ses origines. Car la perfec-
tutum redire, sanalio. Verissimeque id quemadmo- tion de toute société consiste à poursuivre et à at-
dum de toto reipublicaecorpore, eodemmodo de illo teindre la fin en vue de laquelle elle a été fondée: en
ordine civium dicimus, qui vitam sustentant opère, sorte que tous les mouvementset tous les actes de la
quasest longe maxima multitudo. vie sociale naissent du même principe d'où est née
la société. Aussi, s'écarter de la fin, c'est aller à la
mort ; y revenir, c'est reprendre de la vie. Et ce quet
Nous disons du corps social tout entier s'applique
également à cette classe de citoyensqui vivent de
leur travail et qui forment la très grande majorité.
Nec tamen putandum, in colendis animis totas Et quel'on ne pensepas que l'Eglise se laisse telle-
esse Ecclesiaecuras ita defixas, ut ea negligat quas ment absorber parle soin des âmes, qu'elle négligece
ad vitam pertinent mortalem ac terrenam. — De qui se rapporte à la vie terrestre et mortelle. — Pour
proletariis nominatim vult et contendit ut emergant ce qui est en particulier de la classe des travailleurs,
e miserrimostatu fortunamque meliorem adipiscan- elle fait tous ses efforts pour les arracher à la mi-
tur. Atque in id conferthoc ipso operam non medio- sère et leur procurer un sort meilleur. Et, certes, ce
crem, quod vocat et instituit homines ad virtutem. n'est pas un faible appoint qu'elle apporte à cette
Moresenim christiani, ubi serventur integri, partem oeuvre,par le fait seul qu'elle travaille, de paroles et
altquam prosperitatis sua sponte pariunt rébus d'actes, à ramener les hommesà la vertu. Les moeurs
externis, quia conciliant principium ac fontem om- chrétiennes, dès qu'elles sont en honneur, exercent
-LXIV ENCYCLIQUE RERUMNOVARUM
niumbonorum Deum: coercentgeminasvîtes pestes, naturellement sur la prospérité temporelleleur part
qute nimium saepe hominem efûciunt in ipsa opum de bienfaisanteinfluence;car elles attirent la faveur
abundantia miserum, rerum appetentiam nimiamet de Dieu,principe et sourcede tout bien; elles com-
voluptatumsitim i : contonti denique cultu victuque priment le désir excessif des richesseset la soif des
frugi, vectigalparcimonia supplent, procul a vitiis, voluptés: ces deux fléaux qui trop souvent jettent
quasnon modoexiguas pecunias,sed maximasetiam l'amertumeet le dégoût dans le sein mêmede l'opu-
copiasexhauriunt, etlauta patrimonia dissipant. Sed lence; elles se contentent enfin d'une vie et d'une
proetereaut bene habeant proletarii, recta providet nourriture frugale et suppléentpar l'économie à la
intituendis fovendisquerébus, quas ad sublevandam modicitédu revenu, loin de ces vices qui consument
eorum inopiam intelligat conducibiles.Quin in hoc non seulementles petites, mais les plus grandes for-
etiam génère beneficiorumita semper excelluit, ut tunes et dissipent les plus gras patrimoines.
ab ipsis inimicis presdicationeefferatur.Ea vis erat L'Eglise, en outre, pourvoit encoredirectementau
apud vetustissimos christianos caritatis mutues,ut bonheurdes classesdéshéritées,par la fondationet le
persoepesua se re privarent, opitulandi caussa, divi- soutien d'institutions qu'elle estime propres à soula-
tiores : quamobremneque...quisquamegenserat inler ger leur misère; et même en ce genre de bienfaits,
illos2. Diaconis, in id nominatim ordine institulo, elle a tellementexcellé, que ses propres ennemisont
datum ab Apostolisnegotium, ut quotidianaebenefi- fait son éloge. Ainsi chezles premiers chrétiens,telle
centiae exercèrentmunia: ac Paulus Apostolus, otsi était la vertu de leur charité mutuelle, qu'il n'était
sollicitudine districtus omnium Ecclesiarum,nihilo- point rare de voir les plus riches se dépouiller de
minus darese in laboriosailineranon dubilavit, quo leur patrimoineen faveur des pauvres. Aussi l'indi-
ad tenuioreschristianosstipemproesensaflérret. Cu- gencen'était-elle point connueparmi eux; les Apôtres
jus generispecunias, a christianis in unoquoquecon- avaient confié aux diacres, dont l'ordre avait été
ventu ultro collatas, depositapietatis nuncupat Ter- spécialementinstitué à celte fin, la distribution quo-
tujlianus, quod scilicet insumerentur egenis alendis tidiennedes aumônes; et saint Paul lui-même,quoi-
homandisque, et puerisac puellis re ac parenlibusdes- que absorbé par une sollicitude qui embrassaittoutes
litutis, inque dotK*tici$senibus,itemnaufragis 3. les Eglises, n'hésitait pas à entreprendre de pénibles
voyages pour aller on personne porter des secours
aux chrétiens indigents. Des secours du mêmegenre
étaient spontanémentofferts par les fidèlesdans cha-
cune do leurs assemblées; ce que Tertullien appelle
les dépôtsde la piété, parce qu'on les employait à
entreteniret à inhumerlespersonnesindigentes,lesor-
phelinspauvresdesdeuxsexes,les domestiques âgés, les
victimesdu naufrage.
Hinc sensimillud extitit palrnnonium, quod reli- Voilà commentpeu à peu s'est forméce patrimoine,
giosa cura tamiuam rem familiarem indigentium que l'Eglise a toujours gardé avec un soin religieux
Ecclesia custodivit. Immo vero subsidia misera; commele bien propre dela famille des pauvres. Elle
plebi, remissa rogandiverecundia,comparavit. Nain est alléejusqu'à assurer dessecoursaux malheureux,
et locupletium et indigentium communis parens, en leur épargnant l'humiliation de tendre la main.
excitata ubique ad excellentemmagnitudineni cari- Car celle communeMère des riches et des pauvres,
tate, co'.legia condidit sodalium religiosorum. alia- profitant des merveilleux élans de charité qu'elle
que utiliter permulta instituit, quibus opem fereuti- avait partout provoqués, fondades sociétés religieu-
solius est illa virtus, quia nisi a sacratissimo Jesu ses et une foule d'autres institutions utiles, qui ne
bus, genus miseriarum prope nullum esset, quod so- devaientlaisser sans soulagementà peu près aucun
latio careret. llodie quidemmulti, quod eodemmodo genre de misère.
fecere olim ethnici, ad arguendain transgrediunlur Il est sans doute un certain nombre d'hommesau-
Exlesiam hujus eliam tam egrogiaecaritatis: cujus jourd'hui qui, fidèleséchosdes païens d'autrefois, en
in locum subrogare visum est conslilutam legibus viennent jusqu'à se faire même d'une charité aussi
puhlicis beneficientiam.Sed quas christianamcatila- merveilleuseune arme pour attaquer l'Eglise ; et l'on
tem suppléant,lotam se ad aliénas porrigeutem uti- a vu une bienfaisance établie par les lois civiles se
litales, artes humana}nullse reperientur. Ecclesite substituer à la charité chrétienne; mais cette.charité
Christi corde ducitur, nulla est uspiam : vagalur au- qui se vouetout entière et sans arriére-penséeà l'uti-
tem a Chrislo longius, quicumque ab Ecclesia dis- litédu prochain, no peut être supplééepar aucunein-
cessjrit. dustrie humaine. L'Eglise seule possède celte vertu,
parce qu'on ne la puise que dans le coeur sacré de
Jésus-Christ,et que c'est errer loin de Jésus-Christ
que d'être éloigné de son Eglise.
Al vero non potest esse dubium quin, ad id qii d Toutefois,il n'est pas douteuxque pour obtenir le
Oit propositum,ea quoque, quasin hominum potet- résultat voulu, il ne faille de plus recourir aux
moyens humains. Ainsi tous ceux que la question
1. Radiaomniummalorum est cupidilas.Tim.VI,10. ?, regarde doiventviser au mêmebut et travailler de
Aa. IV,34—3.Apol.II, XXXIX. concert chacundans sa sphère. Il y a là commeune
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXV
tate sunt, adjumenta requirantur. Omnino omnes, image de la Providence gouvernant le monde ; car
ad quos caussa pertinet, eodem intendant idemque nous voyons d'ordinaire que les faits et les événe-
laborent pro rata parte necesse est. Quod habet ments qui dépendent de causes diverses sont la ré
quamdam cum modératricemundi providentia simi- sultante de leur action commune.
litudinem: fere enim videmusrerum exitus a quibus
caussis pendent, ex earum omnium conspicatione
procedere.
Jamvero quota pars remedii a republica expec- Or, quelle part d'action et de remède sommes-nous
tanda sit, prasstat exquirere. — Rempublieam hoc en droit d'attendre de l'Etat? — Disons d'abord qua
locointelligimus non quali populus utitur unus vel par Etat nous entendons ici non point tel gouverne-
alter, sed qualem et vult recta ratio natures con- ment établi chez tel peuple en particulier, mais tout
gruens, et probant divinaedocumenta sapientiae,quae gouvernementqui répond aux préceptes de la raison
Nos ipsi nominatimin litteris Encyclicis de civita- naturelle et des enseignementsdivins, enseignements
tum constitutione christiana explicavimus. Itaque que Nous avons exposés Nous-mêmes spéciament
per quos civitas regitur, primum conferre operam dans Nos Lettres-Encycliques sur la constitution
generatim atque universaedebent tota ratione legum chrétienne des sociétés. Ce qu'on demande d'abord
atque institutorum, scilicet efficiendout ex ipsa con- aux gouvernants, c'est un concoursd'ordre général,
formatione atque administralione reipublicae ultro qui consiste dans l'économietout entière des lois et
prosperitas tam communitatis quam privatorum des institutions ; Nous voulons dire qu'ils doivent
eiflorescat. Id est enim civilis prudenties munus faire en sorte que, de l'organisation même et du
propriumqueeorum qui prassunt, officium.Nuncvero gouvernement de la société, découle spontanément
illa maxime efficiunt prospéras civitates, morum et sans effortla prospérité tant publique que privée.
probitas, recte atque ordine constitutaefamilies, cus- Tel est en effet l'office de la prudence civile et le
todia religionis ac justifias,onerum publicorum cum devoir propre de tous ceux qui gouvernent. Or, ce
moderata irrogatio, tum aequa partitio, incrementa qui fait une nation prospère, ce sont des moeurs pu-
artium et mercaturae, florens agrorum cultura, et si res, des familles fondéessur des bases d'ordre et de
qua sunt alia generis ejusdem,quaequo mjore studio moralité, la pratique de la religion et le respect de
provehuntur. eo melius sunt victuri cives et beatius. la justice, une imposition modéréeet une répartition
— Harum igitur virtute rerum in potestate recto- équitable des charges publiques, le progrès de l'in-
rum civitatis est, ut ceteris prodesse ordinibus, sic dustrie et du commerce, une agriculture florissante
et proletariorum conditionem juvare plurimum : id- et d'autres éléments, s'il en est, du même genre :
que jure suo optimo,neque ulla cum importunitatis toutes choses que l'on ne peut porter plus haut sans
suspicione: débet enim respublica ex lege muneris faire monter d'autant la vie et le bonheur des ci-
sui in communeconsulere. Quo autem commodorum toyens. — De mêmedonc que, par tous ces moyens,
copia provenerit ex hac generali providentia major, l'Etat peut se rendre utile aux autres classes, de
eo minus oportebit alias ad opificum salutem expe- mêmeil peut grandement améliorerle sort de la classe
riri vias. ouvrière; et cela dans toute la rigueur de son droit
et sans avoir à redouter le reproche d'ingérence;
car, en vertu même de son office, l'Etat doit servir
l'intérêt commun. Et il est évident que plus se mul-
tiplieront les avantages résultant de cette action d'or-
dre général, et moins on aura besoin do recourir à
d'autres expédients pour remédier à la condition des
travailleurs.
Sedillud prastereaconsiderandum,quod rem altius Mais voici une autre considération qui atteint plus
attiagit, unam civitatis esse rationem communem profondémentencore notre sujet. La raison formelle
summorumatque infimorum.Sunt nimîrum proletarii de toute sociétéest une et communeà tous ses mem-
pari jure cum locupletibus natura cives, hocest par- bres, grands et petits. Les pauvres, au même titre
tesveres vitamqueviventes, unde constat, interjectis que les riches, sont, de par le droit naturel, des ci-
familiis, corpus reipublicae: ut ne illud adjungatur, in toyens, c'est-à-dire du nombre des parties vivantes
omni urbe eos esse numéro longe maximo. Cum igi- dont se compose,par l'intermédiaire des familles, le
tur illud sit perabsurdum, parti civium consulere, corps entier de la nation, pour ne pas dire qu'en
partem negligere, consequitur, in salute commodis- toutes les cités, ils sont le grand nombre. Comme
que ordinis proletariorum tuendis curas débitas col- donc il serait déraisonnable de pourvoir à une classe
locari publiée oportere: ni fiat, violatum iri justi- de citoyens et d'en négliger l'autre, il devient évident
tiam, suum cuique tribuere prascipientem.Qua de re que l'autorité publique doit aussi prendre les mesures
sapienter S. Thomas: sicut pars el totum quodam- voulues pour sauvegarder le salut et les intérêts de
tnodosunt idem, ita id, quod est tolius, quodammodo la classe ouvrière. Si elle y manque, elle viole la
est partis *. Proinde in officiisnon paucis neque le- stricte justice, qui veut qu'à chacun soit rendu ce qui
vibus populo bene consulentium principum, illud in lui est dû. A ce sujet, saint Thomas dit fort sage-
ment : De mêmeque la partie et le toutsont en quelque
1. II-II Qaoest.,
LXI, a. 1ad. 2. manière une même chose, ainsi ce qui appartient au
I.
LXVI ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
primis eminet, ut unumquemque civium ordinem tout est en quelque sorte à chaquepartie. C'est pour-
sequabiliter tueantur, ea nimirum, quas distribuliva quoi, parmi les graves et nombreux devoirs des gou-
appellatur, justitia inviolate servanda. vernants qui veulent pourvoir commeil convient au
bien public, celui qui dominetous les autres consiste
à avoir soin également de toutes les classes de ci-
toyens, en observant rigoureusementles lois de la
justice dite distributive.
Quamvis autem cives universos, nemine excepto, Mais, quoique tous les citoyenssans exceptiondoi-
conferre aliquid in summam bonorum communium vent apporter leur part à la masse des biens com-
necesse sit, quorum aliqua pars virilis sponte recidit muns, lesquels, du reste, par un retour naturel, se
in singulos, tamen idem et ex aequoconferre nequa- répartissent de nouveau entre les individus, néan-
quam possunt. Qualescumquesint in imperii generi- moins les apports respectifs ne peuvent être ni les
bus vicissitudines, perpétuafutura sunt ea in civium mêmes ni d'égale mesure. Quelles que soient les vi-
statu discrimina, sine quibus nec esse, nec cogitari cissitudes par lesquelles les formes de gouvernement
societas ulla posset. Omnino necesseest quosdam sont appelées à passer, il y aura toujours entre les
reperiri, qui se reipublicaededant, qui leges coudant, citoyens ces inégalités de conditionssans lesquelles
qui jus dicant, denique quorum consilio atque aucto- une sociéténe peut ni exister, ni se concevoir.A tout
ritate negotia urbana. res bollicas adininistrenlur. prix, il fautdes hommesqui gouvernent, qui fassent
Quorum virorum priores esse partes, eosquo haben- des lois, qui rendent la justice, qui, enfin, par leurs
dos in omni populoprimarios, nemo non videt, prop- conseils ou par voie d'autorité, administrent les af-
terea quod communibono dant operam proxime at- faires de la paix et les choses de la guerre. Que ces
que excellentiratione. Contra vero qui in arte aliqua hommesdoivent avoir la prééminencedans toute so-
exercentur, non ea, qua illi, ratione nec iisdem mu- ciété et y tenir le premier rang, personne n'eu peut
neribus prosunt civitati ; sed tamen plurimum et douter, puisqu'ils travaillent directement au bien
ipsi, quamquam minus directe, utilitati publicoein- communet d'une manière si excellente.Les hommes,
serviunt. Sane sociale bonum cum debeat esse ejus- au contraire, qui s'appliquent aux choses de l'indus-
modi, ut hominesejus fiant adeptione meliores, est trie, ne peuvent concourir à ce bien communni dans
prefecto in virtute praecipuecollocandum.Nihilomi- la même mesure, ni par les mêmes voies; mais eux
nus ad hene constitutam civitatem suppoditatio quo- aussi, cependant, quoique d'une manière moins di-
que pertinet bonorum corporis atque exte.rnorum, recte, ils serventgrandementles intérêts dela société.
quorum usus estnecessariusad aclum virtutis 1. Jam- Sans nul doute, le bien commun, dont l'acquisition
vero his pariendis bonis est proletariorum maxime doit avoir pour effet do perfectionner les hommes,
efiicaxac necessarius labor, sivein agris artem atque est principalementun bien moral. Mais, dans une so-
manum, sive in ofticinis exerceant. Immo eorum in ciété régulièrementconstituée, il doit se trouver en-
hoc génère vis est atque ellicientia taiita, ut illud core une certaine abondancede biens extérieurs, dont
verissimum sit, non aliunde quam ex opilicum la- l'usage est requis à l'exercicede la vertu. Or, tous ces
bore gigni divitias civitalum. Jubet igitur asquitas biens, c'est le travail de l'ouvrier, travail des champs
curam de proletario publiée geri, ut ex eo, quod in ou de l'usine, qui en est surtout la source fécondeet
communemaffert utilitatem, percipiat ipso aliquid, nécessaire. Bien plus, dans cet ordre de choses, le
ut tectus, ut vestitus, ut salvus vitam lolerare minus travail a une telle féconditéet une telle efficacité,que
yjgre possit. Unde consequitur, favendum rébus l'on peut affirmer, sans crainte de se tromper, qu'il est
omnibus esse quae conditioni opificumquoqtto modo la source unique d'où procèdela richessedes nations.
videantur profuturee.Quas cura tantum abest ut no- L'équité demandedonc que l'Etat se préoccupe des
ceat cuiquam, ut potius profutura sit universis, quia travailleurs et fasse en sorte que, de tous les biens
non esse omnibus modis eos miseros, a quibus tam qu'ils procurent à la société, il leur en revienne une
necessaria bona proficiscuntur,prorsus interest rei- part convenable,commel'habitation et le vêtement,
publicae. et qu'ils puissent vivre au prix de moins de peines
et de privations. D'où il suit que l'Etat doit favori-
ser tout ce qui, de près ou de loin, paraît de nature
à améliorerleur sort. Cette sollicitude, bien loin de
préjudicier à personne, tournera au contraire au pro-
fit de tous, car il importe souverainementà la nation,
que des hommes qui sont pour elle le principe de
biens aussi indispensables ne se trouvent pas conti-
nuellementaux prises avec les horreurs de la misère.
Non civem, ut diximus, non familiam absorberi a Il est dans l'ordre, avons-Nous dit, que ni l'indi-
republica rectum est: suam utrique facultatem vidu ni la famille ne soient absorbés par l'Etat; il.
agendi cum libertate permittere aequumest, quantum est juste que l'un et l'autre aient la faculté d'agir
incolumi bono communi et sine cujusquam injuria avecliberté aussi longtempsque cela n'atteint pas le
potest. Nihilominus eis, qui imperant, videndum ut bien général et ne fait injure à personne. Cependant,
aux gouvernants il appartient de protéger la commu-
1. 8. Thom.,D* reg.Princip,I. o.XV. nauté et ses parties; la communauté,parce que la
ENCYCLIQUE RERUM VOVARUM LXVII
communitatemejusquepartes tueantur. Communita- nature en a confiéla conservationau pouvoir souve-
tem quidem, quippe quam sunimes potestati conser- rain, de telle sorte que le salut public n'est pas seule-
vandamnatura commisitusque eo, ut publicae cus- ment ici la loi suprême, mais la cause même et la
todia salutis non modo suprema lex, sed tota caussa raison d'être du principat; les parties, parce que, de
sit ratioque principatus : partes vero, quia procura- droit naturel, le gouvernementne doit pas viser l'in-
tionem reipublicesnon ad utilitatem eorum, quibus térêt de ceux qui ont le pouvoir entreles mains, mais
commissaest, sed ad eorum, qui commissisunt, na- le bien de ceux qui leur sont soumis. Tel est l'ensei-
tura pertinere,philosophiapariter et fideschristiana gnement de la philosophie non moins que de la foi
consentiunt. Gumqueimperandi facultasproficiscatur chrétienne. D'ailleurs toute autorité vient de Dieu et
a Deo, ejusque sit communicatio quasdam summi est une participation de son autorité suprême; dès
principatus, gerenda ad exemplar est potestatis di- lors ceux qui en sont les dépositaires doivent l'exer-
vinae,non minus rébus singulis quam universis cura cer à l'instar de Dieu, dont la paternelle sollicitude
paterua consulentis. Si quid igitur detrimenti alla- ne s'étend pas moins à chacunedes créatures en par-
lum sit aut impendeat rébus communibus, aut sin- ticulier qu'à tout leur ensemble.Si donc soit les in-
gulorum ordinum rationibus, quod sanari aut prohi- térêts généraux, soit l'intérêt d'une classe en particu-
beri alia ratione non possit, obviam iri auctoritate lier se trouvent ou lésés, ou simplementmenacés,et
publica necesse est. — Atqui interest salutis cum qu'il soit impossible d'y remédier ou d'y obvier au-
publicae, tum privâtes pacatas esse res et composi- trement, il faudra de toute nécessitérecourir à l'au-
tas : item dirigi ad Dei jussa natures quasprincipia torité publique. — Or, il importe au salut communet
omnem convictus domestici disciplinam : observari privé que l'ordre et la paix régnent partout; que toute
et coli religionem: florere privatim ac publiée mores l'économiede la vie domestiquesoit réglée d'après les
integros : sanctam retineri justitiam, nec alteros ab commandementsde Dieu et les principes de la loi na-
alteris iinpune violari : validos adolescere cives, ju- turelle; que la religion soit honorée et observée; que
vandaetutandasque,si res postulet, civitati idoneos. l'on voie fleurir les moeursprivées et publiques: que
Quamobremsi quando fiât, ut quippiam turbarum la justice soit religieusementgardée et que jamais une
impendeatob secessionemopificum,aut intermissas classe ne puisse opprimer l'autre impunément; qu'il
ex composito opéras : ut naturalia familias nexa croisse de robustesgénérations,capablesd'être le sou-
apud proletarios relaxentur : ut religio in opificibus tien et, s'il le faut, le rempart dela patrie. C'est pour-
violetur non satis impertiendo commodiad officia quoi, s'il arrive que les ouvriers, abandonnantle tra-
pietatis: si periculum in offieinis integritati morum vail oule suspendantpar les grèves, menacentla tran-
ingruat a sexu promiscuo, aliisve perniciosis invita- quillité générale; que les liens naturels de la famille
mentis peccandi: aut opificumordinem herilis ordo se relâchent parmi les travailleurs; qu'on foule aux
iniquis premat oneribus, vel alienis a persona ac di- pieds la religion des ouvriers en ne leur facilitant
gnitate humana conditionibus aftligat: si valetudini point l'accomplissementdeleurs devoirsenvers Dieu;
noceatur opère immodico, nec ad sexum estatemve que la promiscuitédes sexes, ou d'autres excitations
accommodato,his in caussis plane adhibenda, certos au vice constituent dans les usines un péril pour la
intra fines, vis et auctoritas legutn. Quos fines ea- moralité, que les patrons écrasent les travailleurs
dem, quaslegumpossit opem, caussa déterminât: vi- sous le poids de fardeaux iniques, ou déshonorent en
delicet non plura suscipienda legibus, nec ultra pro- eux la personne humaine par des conditions indignes
(rediendum,quam incommodorumsanatio, vel peri- et dégradantes; qu'ils attentent à leur santé par un
uli depulsiorequirat. travail excessif et hors de proportion avec leur âge
et leur sexe : dans tous ces cas, il faut absolument
appliquer dans de certaines limites, la force et l'au-
toritédes lois. Ces limites seront déterminéespar la
finmême qui appellele secours des lois : c'est-à-dire
que celles-ci ne doivent pas s'avancer ni rien entre-
prendre au delà de ce qui est nécessaire pour répri-
mer les abus et écarter les dangers.
Jura quidem, in quocumque sint, sancte servanda Les droits, où qu'ils se trouvent, doivent être reli-
sunt : atque ut suum singuli teneant, débet potestas gieusementrespectés et l'Etat doit les assurer à tous
publica providere, propulsandis atque ulciscendis les citoyens, en prévenant ou en vengeant leur viola-
injuriis. Nisi quod in ipsis protegendis privatorum tion. Toutefois,dans la protection des droits privés,
juribus, prescipueest infimorum atque inopum ha- il doit se préoccuperd'une manière spéciale des fai-
benda ratio. Siquidem natio divitum, suis septa bles et des indigents. La classe riche se fait comme
prassidiis, minus eget tutela publica : miserum vul- an rempart de ses richesseset a moins besoin de la
gus, nullis opibus suis tutum, in patrocinio reipu- tutelle publique. La classe indigente, au contraire,
blicaemaxime nititur. Quocircamercenarios,cum in sans richesses pour la mettre à couvert des injusti-
multitudine egena numerentur, débet cura providen- ces, compte surtout sur la protection de l'Etat. Que
tiaque singulari complectirespublica. l'Etat se fasse donc, à un titre tout particulier, la
providence des travailleurs qui appartiennent à la
classe pauvre en général.
Sed qilesdammajoris momenti prasstat nominatim Mais il est bon de traiter à part certains poiats de
LXVIII ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
prestringere. — Caput autem est, imperio ac muni- plus grande importance. — En premier lieu, il faut
mento legum tulari privatas possessiones oportere. que les lois publiques soient pour les propriétés
Potissimumque, in tanto jam cupiditatum ardore, privées une protection et une sauvegarde. Et ce qui
continenda in officioplebs : nam si ad meliora con- importe par dessus tout, au milieu de tant de cupi-
tendere concessumest non répugnantejuslitia, at al- dités en effervescence,c'est de contenir les masses
teri, quod suum est, detrahere, ac per speciem ab- dans le devoir; car, s'il est permis détendre vers
surdaB cujusdam asquabilitatis in fortunas aliénas de meilleures destinées avec l'aveu de la justice,
inviolare, justitia vetat, nec ipsacommunis utilitatis enlever de force le bien d'autrui, envahir les pro-
ratio sinit. Utique pars opificum longe maxima res priétés étrangères, sous le prétexte d'une absurde
meliores honesto labore comparare sine cujusquam égalité, sont choses que la justice condamne et
injuria malunt : verumtamen non pauci numerantur que l'intérêt commun lui-même répudie. Assuré-
pravis imbuti opinionibusrerumque novarum cupidi, ment, les ouvriers qui veulent améliorerleur sort par
qui id agunt omni ratione ut turbas moveant, ac ce- un travail honnête et en dehors de toute injustice
teros ad vim impellant. Intersit igitur reipublicae forment la très grande majorité; mais combienn'en
auctoritas, injoctoqueconcitatoribus freno, cb opifi- compte-t-onpas.qui, imbus de fausses doctrines et
cum moribus corruptrices artes, a lsgitimic domi- ambitieux de nouveautés,mettent tout en oeuvrepour
nis periculumrapinaruin coerceat. exciter des tumultes et entraîner les autres à la vio-
lence! Que l'autorité publique intervienne alors, et
que, mettant un frein aux excitations des meneurs,
elle assure les moeursdes ouvriers contrelesartifices
de la corruption, et les légitimes propriétés contre et
péril de la rapine.
Longinquior vel operosior labor, atque opinalio Il n'est pas rare qu'un travail trop prolongé ou
curies mercedis caussam non raro dant artificibus trop pénible et un salaire réputé trop faible donnent
quamobremopère se solvant ex composito, otioque lieu à ces chômagesvoulus et concertésqu'on appelle
dedant voluntario. Gui quidem incommodo usitato des grèves. A cette plaie, si communeet en même
et gravi medendumpubliée,quia genus istud cessa- temps si dangereuse, il appartient au pouvoir public
tionis non héros dumtaxat, atque opifices ipsos affi- de porter un remède; car ces chômagesnonseulement
cit damno, sed mercaturis obest reique publicae uti- tournent au détriment des patrons et des ouvriers
litatibus : cumque haud procul esse a vi turbis- eux-mêmes, mais ils entravent le commerceet nui-
que soleat, saepenumerotranquillitatem publicam in sent aux intérêts généraux do la société, et commeils
discrimen adducit. Qua in re illud magis efficaxac dégénèrentfacilementen-violenceset en tumultes, la
salubre, antevertere auctoritate legum, malumque ne tranquillité publique s'en trouvesouvent compromise.
erumpere possit prohibere, amotis mature caussis, Mais ici il est plus efficaceet plus salutaire que
unde dominorum atque operariorum conflictusvi- l'autorité des lois prévienne le mal et l'empêche de
deatur extiturus. se produire, en écartant avec sagesse les causes qui
paraissent de nature à exciter des conflitsentre ou-
vriers et patrons.
Similiquemodo plura sunt in opifice,praesidiomu- Chez l'ouvrier pareillement il est des intérêts
nienda reipublicae: ac primum animi bona. Siqui- nombreux qui réclament la protection de l'Etat, et,
dem vita mortalis quamtunvis bona et optabilis, non en première ligne, ce qui regarde le bien de son
ipsa tamen illud est ultimum, ad quod nati sumus: âme.La vie du corps, en effet, quelqueprécieuse et
sed via tantummodo atque instrumentum ad animi désirable soit-elle,.n'est pas le but dernier de notre
vitam perspicientia veri et amore boni complendam. existence;elle est une voie et un moyenpour arriver,
Animus est, qui expressam gerit imaginem similitu- par la connaissancedu vrai et l'amour du bien, à la
dinemque divinam, et in quo principatus ille residet, perfection de la vie de l'âme. C'est l'âme qui porte
per quem dominari jussus est homoin inferioresna- gravées en elle-même l'image et la ressemblancede
turas, atque cfficere utilitati sues terras omneset Dieu; c'est en elle que réside celle souveraineté dont
maria parentia. Replèteterram et subjicile eam : et l'homme fut investi quand il reçut l'ordre de s'assu-
dominaminipiscibusrnariset volalitibuscoeliet univer- jettir la nature inférieureet de mettre à son service
sis animantibus,quse moventursuper terram '. Sunt les terres et les mers. Remplissezla terre et l'assu-
omnes homines hac in re pares, nec quippiam est jettissez; dominezsur les poissons de la mer, et sur
quod inter divitesatque inopes, intir dominos el fa- les oiseaux du ciel et sur tous les animaux qui se
mulos,inter principes privatosque différât: namidem meuvent sur la terre. A ce point de vue, tous les
dominusomnium1. Nemini licet hominis dignitatom, homme?sont égaux; point de différenceentre riches
de qua Deus ipse disponit cummagna reverentii,im- et pauvres, maîtres et serviteurs, princes et sujets :
pune violare, neque ad eam perfeclionem impelire Ils n'ont lotis qu'un même Seigneur.Cette dignité de
cursum, qua; sit vitae in coelis sempitenae consen- l'homme que Dieu lui-même traite avec un grani,
tanea. Quin etiam in hoc génère traclari se non con- respect,il n'est permis à personne de la violer impu-
venienter natures sua;, animique servilutem serviro nément, ni d'entraver la marche de l'homme vers
celte perfectionqui répond à la vie éternelleet cé-
1. Oeil.I, 28.—2. Rom.X, 12. leste. Bien plus, il n'est mêmepas loisible à l'homme.
ENCYCLIQUE RERUMNOVARUM LXIX
velle, ne sua quidem sponte homo potest : nequeenim sous ce rapport, de déroger spontanément à la di-
de juribus agitur, de quibus sit integrum homini, gnité de sa nature, ou de vouloir l'asservissement
verum de officiis adversus Deum, quas necesse est de son âme, car il ne s'agit pas de droits dont il ait
noteservari. la libre disposition, mais de devoirs envers Dieu
qu'il doit religieusement remplir.
Hinc consequitur requies operum et laborum per C'est de là que découle la nécessité du repos et de
festos dies neoessaria. Id tamen nemo intelligat de la cessation du travail aux jours du Seigneur. Qu'on
majorequadam inertis otii usura, multoque minus n'entende pas toutefois par ce repos une plus large
de cessatione, qualem multi expetunt, fautrice vilio- part faite à une stérile oisiveté, ou encore moins,
rum et ad effusionespecuniarum adjutrice, sed om- commeun grand nombre le souhaitent, ce chômage
nino de requiete operum per religionem consecrata. fauteur des vices et dissipateur des salaires, mais
Conjuncta cum religione quies sevocat hominem a bien un repos sanctifié par la religion. Ainsi, allié
laboribus negotiisquevitesquotidianesut ad cogitanda avec la religion, le repos retire l'hommedes labeurs
revocet bona caelestia, tribuendumque cultum nu- et des soucisde la vie quotidienne, l'élève aux gran-
mini ffiterno justum ac debitum, Hase maxime na- des pensées du ciel, et l'invite à rendre à son Dieu
tura atque haeccaussa quietis est in dies festos ca- le tribut d'adoration qu'il lui doit. Tel est surtout le
piendas: quod Deus et in Testamento veteri prasci- caractère et la raison de ce repos du septième jour
pua lege sanxit: Mémentout diem sabbatisanctifiéesi ; dont Dieu avait fait mêmedéjà dans l'Ancien Testa-
et facto ipse suo docuit, arcana requiete, statim pos- ment un des principaux articles de la loi : Souviens-
teaquam fabricatus hominemerat, sumpta : Requievit toi de sanctifier le jour du sabbat, et dont il avait
die septimoab universoopèrequodpatrarat 2. lui-mêmedonné l'exemple par ce mystérieux repos
pris incontinent après qu'il eut créé l'homme : Il se
reposale septièmejour de tout le travail qu'il avait fait.
Quod ad tutelam bonorum corporis et externorum, Pour ce qui est des intérêts physiques et corporels,
primum omnium eripere miseros opificese sesvitia l'autorité publique doit tout d'abord les sauvegarder
oportet hominum cupidorum,personis pro robus ad en arrachant les malheureux ouvriers aux mains de
quasstumintemperanter abutentium. Scilicet tantum ces spéculateurs qui, ne faisant point de différence
exigi operis, ut hebescat animus labore nimio, una- entre un hommeet une machine,abusent sans mesure
que corpusdefatigationisuccumbat, non justitia, non- de leurs personnespour satisfaire d'insatiables cupi-
humanitas patitur. In homine, sicut omnis natura dités. Exiger une sommede travail qui, en émoussant
sua, ita et vis efficiens certis est circumscripta fini- toutes les facultés de l'âme, écrase le corps et en
bus, extra quos egredi non potest. Acuilur illa qui- consume les forces jusqu'à l'épuisement, c'est une
dem exercitatione atque usu, sed hac tamen lege ut conduite que ne peuvent tolérer ni la justice ni l'hu-
agere intermittat identidemet acquiesçât. De quoti- manité. L'activité de l'homme, bornée commesa na-
diano igitur opère videndumne in plures extrahatur ture, a des limites qu'elle ne peut franchir. Elle s'ac-
horas, quam vires sinant. Inlervalla vero quiescendi croît sans doute par l'exercice et l'habitude, mais à
quanta esse oporteat, ex vario génère operis, ex ad- la condition qu'on lui donne des relâcheset des inter-
junctis temporum et locorum, ex ipsa opificum va- valles de repos. Ainsi le nombred'heures d'une jour-
letudine judicandum. Quorum est opus lapidem e née de travail ne doit-il pas excéderla mesure des
terra excindere, aut ferrum, ass, aliaque id genus forces des travailleurs et les intervalles de repos de-
effodere penitus abdita, eorum labor, quia multo vront-ils être proportionnés à la nature du travail et
major est idemque valetudini gravis, cum brevitato à la santé de l'ouvrier, et réglés d'après les circons-
temporisest compensandus.Anni quoque dispicienda tances des temps et des lieux. L'ouvrier qui arrache
tempora : quia non raro idem opérasgenus alio tem- à la terre ce qu'elle a do plus caché, la pierre, le fer
pore facile est ad tolerandum, alio aut tolerari et l'airain, est soumis à un labeur dont la brièveté
nulla ratione potest, aut sine summa difficultate non devra compenser la peina et la fatigue, ainsi que le
potest. dommagephysique qui peut en être la conséquence.
Il est juste, en outre, que l'on tienne compte des épo-
ques de l'année : tel mêmetravail sera souventaisé
dans une saison qui deviendra intolérable ou très
pénible dans une autre.
Denique quod facere enitique vir adulta astatebe- Enfin, ce que peut réaliser un hommevalide et dans
neque yalidus potest, id a femina puerove non est la force de l'âge, il ne serait pas équitable de le de-
esquumpostulare. Immo depueris valde cavendum,ne mander à une femme ou à un enfant. L'enfance en
prius officinacapiat, quam corpus, ingenium,animum particulier — et ceci demande à être observé stricte-
satis firmaveritestas.Erumpentesenim in pueritia vi- ment — ne doit entrer à l'usine qu'après que l'àge
res, velut herbescentemviriditatem, agitatio prascox aura suffisammentdéveloppéen elle les forcesphysi-
elidit: qua exreomnisest institutio puerilis interitura. ques, intellectuelleset morales; sinon, comme une
Siccerta quaedamartificia minus apte conveniunt in herbe encore tendre, elle se verra flétrie par un tra-
feminasad opéra domesticanatas : quasquidemopéra vail trop précoce et il en sera fait de son éducation.
De même, il est des travaux moins adaptés à la!
1. Exod.XX,8. —2. Gen.II,2, femme que la nature destine plutôt aux ouvrages
I_XX ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
ettuentur magnoperein muliebri génère decus, et li- domestiques; ouvrages d'ailleurs qui sauvegardent
berorum institution! prosperitatique famillesnatura admirablement l'honneur de son sexe et répondent
respondent. Universe autem statuatur, tantum esse mieux, par leur nature, à ce que demandentla bonne
opificibus tribuendum otii, quantum cum viribus éducationdes enfants et la prospérité de la famille.
compe.nseturlabore consumptis; quia detritas usu En général, la durée du repos doit se mesurer
vires débet cessatio restituere. In omni obligatione, d'après la dépense des forces qu'il est appelé à resti-
quas dominis atque artificibus invicern contrahatur, tuer. Le droit au repos de chaquejour, ainsi que la
haec semper aut adscripta aut tacita conditio inest, cessationdu travail le jour du Seigneur, doiventêtre
utrique generi quiescendiut cautumsit : neque enim la conditionexpresse ou tacite de tout contrat passé
bonestum esset convenire secus, quia nec postulare entre patrons et ouvriers. Là où cette condition n'en-
cuiquam fas est, nec spondere neglectumofficiorum, trerait pas, le contrat rieserait pas honnête, car nul
quae velDeo vel sibimetipsi hominem obstringunt. ne peut exiger ou promettre la violation des devoirs
de l'hommeenvers Dieu et envers lui-même.
Rem hoc loco attingimus sat magni momenti: Nous passons à présent à un autre point de la
quaerecte intelligatur necesse est, in alterutram par- question d'une importance non moins grande et qui,
tem ne peccetur. Videlicet salarii definitur libero pour éviter tout extrême,demandeà être définiavec
consensu modus: itaque dominus rei, pacta mer- justesse : Nous voulons parler de la fixationdu sa-
cede persoluta, liberavisse fidem, nec ultra debere laire. Le salaire, ainsi raisonne-t-on, une fois libre-
quidquam videatur. Tune solum iieri injuste, si vel ment consenti de part et d'autre, le patron en le
pretium dominus solidum, vel obligatas artifex ope- payant a rempli tous ses engagements et n'est plus
ras reddere totas recusaret : his caussis rectum esso tenu à rien. Alors seulementla justice se trouverait
poteslatem politicam intercedere, ut suum cuique lésée si lui refusait de tout solder, ou l'ouvrier d'a-
jus incolume sit, sed pneterea nullis. — Gui aug- chever tout son travail et de satisfaire à ses engage-
mentation! aequusrerum judex non facile, neque in ments; en quels cas seulementle pouvoir public au-
tantum assentiatur, quia non est absoluta omnibus rait à intervenir pour protéger le droit d'un chacun.
partibus : momentum quoddam rationis abest nia- — Pareil raisonnement ne trouvera pas de juge
ximi ponderis. Hoc est enim operari, exercere se équitable qui consente à y adhérer sans réserve, car
rerum comparandarum caussa, qua}sint ad varios il n'embrasse pas tous les côtés de la question et il
vitio usus, potissimumque ad tuitionem sui neces- en omet un de fort sérieux. Travailler, c'est exercer
sarias. In sudorevultus lui vescerispane i. Itaque son activité dans le but de se procurer ce qui est re-
duas velut notas habet in homine labor natura in- quis pour les divers besoins de la vie, mais surtout
sitas, nimirum ut personalis sit, quia vis agens pour l'entretien de la vie elle-même.Tu mangeraston
adhteret personas,atque ejus omnino est propria, a pain à la sueur de ton front. C'est pourquoi le travail
quo exercetur, et cujus est utilitati nata : deinde ut a reçu de la nature commeune double empreinte : il
sit necessarius,ob hanc caussam, quod fructus laho- est personnel,parce que la forceactive est inhérente
rum est homini opus ad vitam tuendam : vitam à la personne et qu'elle est la propriété de celui qui
autem tueri ipsa rerum, cui maximeparendum, na- l'exerceet qui l'a reçue pour son utilité; il est néces-
tura jubet. Jamvero si ex ea,dumtaxat parte spec- saire, parceque l'hommea besoindu fruit de sontra-
tetur quod personalis est, non est dubium quin inte- vail pour conserver son existence, et qu'il doit la
grum opifici sit pactes mercedis augustius finire conserverpour obéir aux ordres irréfragables de la
modum : quemadmodum enim opéras dat ille vo- nature. Or, si l'on ne regarde le travail que par le
luntate, sic et ille operarum mercede vel tenui vel côté où il est personnel, nul doute qu'il ne soit au
plane nulla contentus esse voluntate potest. Sed pouvoir de l'ouvrier de restreindre à son gré le taux
longe aliter judicandtim si cum ratione personali- du salaire; la mêmevolonté qui donne le travail peut
talis ratio conjungitur necessitatis,cogitatione qui- se contenter d'une faible rémunérationou même n'en
dem non re ab illa separabilis. Reapse manere in exiger aucune. Mais il en va tout autrement si au
vita, commune singulis oflicium est, cui scelus est caractèrede personnalitéon joint celui de nécessitédont
déesse.Hinc jus reperiendarum rerum, quibus vita la penséepeut bienfaire abstraction, mais qui n'en est
sustentatur, necossario nascitur : quarum rerum fa- pas séparableen réalité. Et, en effet,conserver l'exis-
cultatem infimo cuique non nisi quessita labore mer- tenceestun devoir imposéàtousles hommeset auquel
ces suppeditat. Eslo igitur, ut opifex atque horus li- ils ne peuventse soustraire sans crime. Dece devoir
bère in idem placitum, ac nominatimin salarii mo- découle nécessairement le droit de se procurer les
dum consentiant: subest tamen semper aliquid ex choses nécessaires à la subsistance,et que le pauvre
justitia naturali,idque libérapaciscentium voluntate ne se procure que moyennant le salaire de son tra-
majus et antiquius, scilicetajendo opilici, frugi qui- vail. Que le patron et l'ouvrierfassent donc tant et de
dem et bene morato, haud imparem esse mercedem telles conventions qu'il leur plaira, qu'ils tombent
oportere.Quodsi necessitate opifexcoactus, aut niali d'accord notamment sur le chiffre du salaire, au-
'lejoris metu permotus duriorem conditionemacci- dessus de leur libre volonté, il est une loi de justice
iat, quae, etiamsi nolit, accipiendasit, quod a do- naturelle plus élevée et plus ancienne, à savoir que
le salaire ne doit pas être insuffisantà faire subsister
l'ouvrier sobre et honnête. Que si, contraint par la
1. Gen.111,19. nécessité, ou poussé par la crainte d'un mal plus
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXXI
mino vel a redemptoreoperum imponitur, istud qui- grand, il accepte des conditions dures que d'ailleurs
dem est subire vim, cui justifia réclamât. il ne lui serait pas loisible de refuser, parce qu'elle!,
lui sont imposéespar le patron ou par qui fait l'offre
du travail, c'est là subir une violencecontre laquelle
la justice proteste.
Verumtamen in his similibusque caussis, quales Mais, de peur que dans ce cas et d'autres analo-
filassunt in unoquoquegénère artificii quota sit ela- gues, commeen ce qui concernela journée du travail
borandum hora, quibus pressidiisvaletudini maxime et la santé des ouvriers, les pouvoirspublics n'inter-
in officinis cavendum, ne magistratus inférât seso viennent pas importunément, vu surtout la variété
importunius, prassertim cum adjuncta tam varia sint des circonstancesdes temps et des lieux, il sera pré-
rerum, temporum,locorum, satius erit eas res judi- férable que la solution en soit réservée aux corpora-
cio reservare collegiorum, de quibus infra dicturi tions ou syndicats dont nous parlerons plus loin, ou
sumus, aut aliam inirè viam, qua rationes merce- que l'on recoure à quelque autre moyende sauvegar-
nariorum, uti par est, salves sint, accedente, si res der les intérêts des ouvriers, même si la cause
postulaverit, tutela prassidioquereipublicos. le réclamait, avec le secours et l'appui de
l'Etat.
Mercedem si ferat opifex satis amplam ut ea se L'ouvrier qui percevra un salaire assez fort pour
uxoremque et liberos tueri commodumqueat, facile parer aisément à ses besoins et à ceux de sa famille,
studebit parcimonies,si sapit, efficietque,quod ipsa suivra, s'il est sage, le conseilque semble lui donner
videtur natura monere, ut detractis sumptibus, ali- la nature elle-même: il s'appliquera à être parcimo-
quid etiam redundet, quo sibi liceat ad modicum nieux, et fera en sorte, par de prudentes épargnes, de
censum pervenire, Neque enim efficaciratione di- se ménager un petit superflu, qui lui permette de par-
rimi' caussam, de qua agitur, posse vidimus, nisi hoc venir, un jour, à l'acquisition d'un modeste patri-
sumpto et constituto, jus privatorum bonorum sanc- moine.Nous avons vu, en effet, que la question pré-
tum esse oportere. Quamobrem favere huic juri le- sente ne pouvait recevoir de solution vraiment effi-
ges debent, et quoad potest, providere ut quamplu- cace si l'on ne commençaitpar poser commeprincipe
rimi ex multitudine rem habere malint. Quo facto, fondamentall'inviolabilité de la propriété privée. Il
presclaras utilitates consecuturaBsunt ; ac primum importe donc que les lois favorisent l'esprit de pro-
corte asquior partitio bonorum. Vis enim commu- priété, le réveillent et le développentautant qu'il est
tationum civilium in duas civium classes divisit possible dans les massespopulaires. Ce résultat, une
urhes, immenso inter utrumque discrimine inter- fois obtenu, serait la source des plus précieux avan-
jecto. Ex una parte factio praepotens, quia pros- tages; et, d'abord, d'une répartition des bienscertai-
dives : quae cum operum et mercatura} univer- nement plus équitable. La violence des révolutions
sum genus sola patiatur, facultatem omnem copia- politiques a divisé le corps social en deux classes, et
rum effectricemad sua commodaac rationes trahit, a creusé entre elles un immense abîme. D'une part,
atque in ipsa administratione reipublices non pa- la toute-puissance dans l'opulence : une faction qui,
rum potest. Ex altéra inops atque infirma mul- maîtresse absolue de l'industrie et du commerce,dé-
titudo, exulcerato animo et ad turbas semper pa- tourne le cours des richesses et en fait affluervers
rato. Jamvero si plebis excitetur ïndustria in elle toutes les sources ; faction d'ailleurs qui tient en
speniadipiscendi quippiam, quod solo contineatur, sa main plus d'un ressort de l'administration publi-
sensimfiet ut alter ordo évadât finitimus alteri, su- que. De l'autre, la faiblesse dans l'indigence: une
blato inter summas divitias summamque egestatem multitude, l'âme ulcérée, toujours prête au désordre.
discrimine. — Praeterea rerum, quas terra gignit, Eh bien ! que l'on stimule l'industrieuse activité du
major est abundantia futura. Homines enim, cum se peuple par la perspective d'une participation à la
elaborare sciunt in suo, alacritatem adhibent stu- propriété du sol, et l'on verra se comblerpeu à peu
diumquolonge majus : immo prorsus adamare ter- l'abîme qui sépare l'opulence de la misère et s'opérer
ram instituunt sua manu percultam, unde non ali- le rapprochementdes deuxclasses. En outre, la terre
menta tantum, sed etiam quamdam copiam et sibi produira toute chose en plus grande abondance. Car
et suis expectant. Ista voluntatis alacritas, nemonon l'homme est ainsi fait, que la pensée de travailler sur
videt quam valde conférât ad ubertatem fructuum, un fonds qui est à lui redouble son ardeur et son ap-
augendasque divitias civitatis. — Ex quo illud ter- plication,Il en vient même jusqu'à mettre tout son
tio locomanabit commodi,ut qua in civitate homines coeurdans une terre qu'il a cultivée lui-même,qui lui
editi susceptique in lucem sint, ad eam facile reti- promet, à lui et. aux siens, non seulement le strict
neantur ; neque enim patriam cum externa regiono nécessaire, mais encoreune certaine aisance. Et nul
commutarent,si vitoe degendostolerabilem daret pa- qui ne voit sans peine les heureuxeffetsde ce redou-
tria facultatem.Non tamen ad hasecommoda perve- blement d'activité sur la féconditéde la terre et sur
niri nisi ea conditione potest, ut privatus census ne la richesse des nations. — Un troisième avantage sera
exhauriatur immanitate tributorum et vectigalium. l'arrêt dans lemouvementd'émigration : nul, en effet,
Jus enim possidendi privatim bona cum non sit lege ne consentirait à échanger contre une région étran-
hominumsed natura datum, non ipsum abolere, sed gère sa patrie et sa terre natale, s'il y trouvait les
tantummodoipsius usum temperareet cum communi moyens de mener une vie plus tolérable. Mais une
bono componere auctoritas publica potest. Faciat conditionindispensable pour quo tous ces avantages
LXXII ENCYCLIQUE RERUMNONARUM
igitur injuste atque inhtimane, si de bonis privato- deviennent des réalités, c'est que la propriété privée
rum plus aequo,tributorum nomine, detraxerit. ne soit pas épuisée par un excès de charges et d'im-
pôts. Ce n'est pas des lois humaines, mais de la nature
qu'émane le droit de propriété individuelle; l'autorité
publique ne peut donc l'abolir ; tout ce qu'elle peut,
c'est en tempérer l'usage et le concilier avec le bien
commun.C'est pourquoi elle agit contre la justice et
l'humanité quand, sous le nom d'impôts, elle grève
outre mesure les biens des particuliers.
Postremo domini ipsique opilices multum hac ia En dernier lieu, nous dirons que les maîtres et les
caussa possunt, iis videlicet institutis, quorum ope ouvriers eux-mêmes peuvent singulièrement aider à
et opportune subveniatur indigentibus, et ordo alter la solution, par toutes les oeuvrespropres à soulager
propius accédât ad altefum. Numeranda in hoc ge- efficacementl'indigence et à opérer un rapprochement
imre sodalitia ad suppetias mutuo ferendas : res va- entre les deux classes. De ce nombre sont les so-
jlias, privatorum providentia constitutas, ad caven- ciétés de secours mutuels : les institutions diverses,
|dutn opifici, itemque orbitati uxoris et liberorum, si dues à l'initiative privée, qui ont pour but de secourir
'quid subitum ingruat, si débilitas afflixerit, si quid les ouvriers, ainsi que leurs veuves et leurs orphe-
humanitus accidat : instituti patronatus pueris, puel- lins, en cas de mort, d'accidents ou d'infirmités;
lis, adolescentibusnatuque majoribus tutandis. Sed les patronages qui exercent une protection bienfai-
prit'.cipemlocum obtinent sodalitia artificum, quo- sante sur les enfants des deux sexes, sur les adoles-
rum complexu fere cetera continentur. Fabrum cor- cents et sur les hommesfaits. Mais la première place
poratorum apud majores nostros diu bene facta cons- appartient aux corporations ouvrières, qui, en soi,
titere. Rêvera non modo utilitates praeclarasartifici- embrassent à peu près toutes les oeuvres.Nos ancê-
bus, sed artibus ipsis, quod perplura rhonumenta tres éprouvèrent longtemps la bienfaisante influence
testantur, decus atque incrementum peperere. Erudi- de ces corporations; car, tandis que les artisans y
tiore nunc aetate, moribus novis, auctis etiam rébus trouvaient d'inappréciables avantages, les arts, ainsi
quas vita qtiotidiana desiderat, profecto sodalitia qu'une foule de monumentsle proclament,y puisaient
opificumflecti ad praesenteinusum necesseest. Vul- un nouveau lustre et une nouvelle vie. Aujourd'hui,
go coiri ejus generis societates, sive totas ex opi- les générations étant plus cultivées, les moeursplus
ficibus conflatas, sive ex utroque ordine mixtas, policées,les exigencesdela vie quotidienne plus nom-
gratum est : optandum vero ut numéro et actuosa breuses, il n'est point douteux qu'il ne faille adapter
virtute crescant. Etsi vero de iis non semel verba les corporations à ces conditions nouvelles. Aussi
fecimus, placet tamen hoc loco ostendere, eas esse est-ceavec plaisir que Nous voyons se former partout
valde opportunas, et jure suo coalescere : item qua [des Sociétés de ce genre, soit composéesdes seuls
illas disciplina uti, et quid agere oporteat. ouvriers, soit mixtes,réunissant à la fois des ouvriers
et des patrons; il est à désirer qu'elles accroissentleur
nombre et l'efficacité de leur action. Bien que Nous
Nous en soyons occupéplus d'unefois, Nous voulons
exposer ici leur opportunité et leur droit à l'exis-
tence, et indiquer commentelles doivent s'organiser
et quel doitêtre leur programme d'action.
Virium suarum explorata exiguitas impellit ho- L'expérience quotidienneque fait l'hommede l'exi-
minem atque hortatur, ut opem sibi alienam velit guité de ses forces, l'engage et le pousse à s'adjoindre
adjungere. Sacrarum litterarum est illa sententia : une coopération étrangère. C'est dans les Saintes
Meliusest duos esse simul, quam unum: habent enim Lettres qu'on lit cette maxime: Il vaut mieux être
emolumentumsosielutissuse.Si unus cecideril,ab al- deux ensembleque tout seul, car alors ils tirent de l'a-
lerofulcielur. Voesoli: quia cumcecideritnonhabetsub- vantagede leursociété.Si l'un tombe,l'autrele soutient,
levanlemse 1. Atque illa quoque : Fraler, qui adju- Malheur à l'hommeseul! car lorsqu'il sera tombé il
vatur a fralre, quasi civitasfirma 2. Hac homo pro- n'aura personnepour le relever.Et cet autre : Le frère
pensione naturali sicut ad conjunctionem ducitur qui est aide par son frère est commeune ville forte. De
congregationomquecivilem, sic et alias cum civibus cette propension naturelle, commed'un mêmegerme,
inire societates expetit, cxiguas illas quidem nec naissent la sociétécivile d'abord, puis au sein même
perfectas, sed societates tamen. Inter has et magnam de celle-ci, d'autres sociétés, qui, pour être restrein-
illam societatemob différentes caussas proximas in- tes et imparfaites, n'en sont pas moins des sociétés
terest plurimum. Finis enim societati civili propo- véritables. Entre ces petites sociétéset la grande, il y
situs pertinet ad universos, quoniam communi con- a de profondesdifférences, qui résultent de leur fin
tinetur bono : cujus omnes et singulos proportione prochaine. La fin de la société civile embrasse uni-
compotesesse jus est. Quare appellatur publicaquia versellementtous les citoyens, car elle réside dans
per eam hominessibiinviccmcommunicantin una repu- le bien commun, c'est-à-dire dans un bien auquel tous
et chacun ont le droit de participer dans une mesure
proportionnelle. C'est pourquoi on l'appelle publique,
i. Eccl.IV, 9-12.—2. Prov.XVIII,19. parce qu'elle réunit les hommespour enformerunena-
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXXIII
blica conslituendai. Contra vero, quaein ejus velut tion.Aucontraire,les sociétésqui se constituent dans
sinu junguntur societates, privatas habentur et sunt, son sein sont tenues pour privéeset le sont en effet,
quia videlicet illud, quo proxime spectant, privata car leur raison d'être immédiate est l'utilité partiui-
ulititas est ad solos pertinens consociatos.Privata au- lière et exclusive de leurs membres.
temsocietasest,quoead aliquodnegoliumprivatumexer- La société privée est cellequi se formedans un but
cendumconjungitur,sicut quod duo vel très societatem privé, commelorsque deux ou trois s'associent pour
ineunt, ut simul negotientur s. Nunc vero quam- exercer ensemble le négoce.Or, de ce que les socié-
quam societatesprivâtes existant in civitate, ejusque tés privées n'ant d'existencequ'au sein de la société
sunt velut partes totidem, tamen universe ac per se civile, dont elles sont commeautant de parties, il ne
nonest in potestate reipublicaene existant prohibere. suit pas, à ne parler qu'en général et à ne considérer
Privatas enim societatesinire concessumest homini que leur nature, qu'il soit au pouvoir de l'Etat do
jure natures : est autem ad praesidiumjuris nalura- leur dénier l'existence, Le droit à l'existenceleur a
lis instituta civitas, non ad interitum : eaque si ci- été octroyépar la nature elle-même,et la société ci-
viumcostus sociari vetuerit, plane secum pugnantia vile a été instituée pour protéger le droit naturel,
agat, propterea quod tam ipsa quam caetus privati non pour l'anéantir. C'est pourquoi une société ci-
uno hoc e principio nascuntur, quod homines sunt vile qui interdirait les sociétés privées s'attaquera t
natura congregabiles. elle-même,puisque toutes les sociétés, publiques et
privées, tirent leur origine d'un même principe, a
naturelle sociabilitéde l'homme.
Incidunt aliquando temporacum ei generi commu- Assurément, il y a des conjoncturesqui autorisent
nitatum rectum sit leges obsistere: scilicet si quid- les lois à s'opposer à la fondationd'une société de te
quam ex instituto persequentur, quod cum probitate, genre. Si une société,en vertu mêmede ses statutsor-
cumjustitia, cum reipublicaesainte aperte dlssideat. i ganiques, poursuivait une finen opposition flagrante
Quibus in caussis jure quidem potestas publica, quo avecla probité, aveclajustice, avec la sécurité de l'E-
minus illsa coalescant, impediet : jure etiam dissol- tat, les pouvoirs publics auraient le droit d'en empê-
vet coalitas : summam tamen adhibeat cautionem cher la formationet, si elle était formée,de la dissou-
necesse lest, ne jura civium migrare videatur, neu dre. Mais encorefaut-il qu'en tout cela ils n'agissent
quidquamper speciemutilitatis publicaestatuât, quod qu'avec une très grande circonspection,pour éviter
ratio non probet. Eatenus enim obtemperandumle- d'empiéter sur les droits des citoyens et de statuer
gibus, quoad cum recta ratione adeoquecum legeDei sous couleur d'utilité publique quelque chosequi se-
sempiterna consentiant3. rait désavouépar la raison. Car une loi ne mérite
obéissance qu'autant qu'elle est conformeà la droite
raison et à la loi éternellede Dieu.
Sodalitatesvarias hic reputamus animo et collegia Ici, se présentent à Notre esprit les confréries,
et ordines religiosos,quos Ecclesiaeauctoritas et pia les congrégations et les Ordres religieux de tout
christianorum voluntas genuerant : quanta vero cum genre, auxquels l'autorité de l'Eglise et la piété des
salute gentis humanae,usque ad nostram memoriam fidèlesavaient donné naissance; quels en furent les
historia loquitur. Societates ejusmodi, si ratio sola fruits de salut pour le genre humain jusqu'à nos
dijudicet,cum initashonestacaussa sint, jure naturali jours, l'histoire le dit assez. Considéréessimplement
initas apparel fuisse. Qua vero parte religionemat- au point de vue de la raison, ces sociétés apparais-
tingunt, sola est Ecclesiacuijuste pareant. Non igi- sent commefondées dans un but honnête, et consé-
tur in eas quicquam sibi arrogare juris, nec earum quemmentsous les auspices du droit naturel; du côté
ad se traducere administrationem recte possunt qui où elles touchent à la religion elles ne relèvent que
pressantcivitati : eas potius officiumest reipublicae de l'Eglise. Les pouvoirs publics ne peuvent donc
vereri, conservare,et, ubi res postulaverint, injuria légitimement s'arroger sur elles aucun droit, ni s'en
prohibere. Quodtamen longe aliter fieri hoc praeser- attribuer l'administration : leur officeplutôt est de
tim tempore vidimus. Multislocis communitateshu- les respecter, de les protéger et, s'il en est besoin,
jus generis respublica violavit, ac multiplici quidem de les défendre. Or, c'est justementtout l'opposé que
injuria : cum et civilium legum nexo devinxerit,et Nous avons été condamné à voir, surtout en ces
legttimojure personasmoralisexuerit, et fortunissuis derniers temps. Dans beaucoup de pays, l'Etat a
despoliarit. Quibus in fortunis suum habebat Eccle- porté la main sur ces sociétés et a accumulé à leur
sia jus, suum singuli sodales, item qui eas certes égard injustice sur injustice : assujettissement aux
cuidam caussas addixerant, et quorum essent com- lois civiles, privation du droit légitime de personne
modo ao solatio addictae. Quamobrem temperare morale, spoliation des biens. Sur ces biens, l'Eglise
avait pourtant ses droits; chacun des membresavait
les siens; les donateurs leur avaient fixé une
1. S. Thom.Contraimpugnantes Dei cultumet religionem, destination, ceux enfin quiquien retiraient des secours
cap.II. — 2.1b. — 3.Lexhumanain tantumhabetrationem et du soulagementavaient les leurs. Aussi ne pou-
inquantum
ieffit^ estsecundum rationemrectam,etsecundum hoc vons-Nous Nous
mani/eetum estquoda legexlernaderivatur.In quantum veroà empêcher de déplorer amèrement
rationerecedit,sic diciturlexiniqua,et sicnonhabetrationem des spoliations si iniques et si funestes; d'autant plus
legit,ted magieviolentiae
eujusdam. (S.Thom.Sam.theol.MI, qu'on frappe de proscription les sociétés catholiques
quart.Xfll,a. 3. dans le temps mômeoù l'on affirme la lécalité des
LXXIV ENCYCLIQUE RERUMNOVARUM
animo non possumusquin spoliationesejusmoditam ! sociôtésprivées, et que, ce que l'on refuse à deshom-
injustas ac perniciosas conqueramur, eo vel ma- mes paisibles et qui n'ont en vue que l'utilité publi-
gis quod societatibus catholicorum virorum, paca- " que, on l'accorde,et certestrès largement,à des hom-
tis iis quidemet in omnes partes utilibus, iter proe- mes qui roulentdansleur esprit des desseinsfuneste-,
cludi videmus, quo temporeedicitur, utique coire in à la religion tout à la fois et à l'Etat.
societatem per leges licere : eaque facultas large rê-
vera hominibus permittitur consilia agitantibus re-
ligioni simul ac reipublicaeperniciosa.
Profecto consociationumdiversissimarum maxime Jamais assurément, à aucune autre époque,on ne
ex opificibus,longe nunc major, quam alias frequen- vit une si grande multiplicité d'associations de tout
tia. Plures unde ortumducant, quid velint, qua gras- genre, surtout d'associations ouvrières. D'où vien-
sontur via, non est hujus loci quaerere.Opiniotamen nent beaucoup d'entre elles, où elles tendent, par
est, multis confirmata rébus, praeesseut plurimum quelle voie, ce n'est pas ici le lieu dole rechercher.
occultiores, eosdemque disciplinam adhibere non Mais c'est une opinion confirméepar de nombreux
christiano nomini, non saluti civitatum consenta- indices qu'elles sont ordinairementgouvernées par
neam : occupataque efficiendorumoperum universi- des chefs occultes, et qu'elles obéissent à un mot
tate, id agere ut qui secum consociari recusarint, d'ordre égalementhostileau nom chrétienet à la sé-
luere poenasegestate cogantur. — Hoc rerum statu, curité des nations; qu'après avoir accaparé toutes
alterutrum malint artificeschristiani oportet, aut no- les entreprises, s'il se trouve des ouvriers qui se re-
men collegiisdare, unde periculumreligioni extimes- fusent à entrer dans leur sein, elles leur font expier
cendum: aut sua inter se sodalitia condere, vires- ce refus par la misère. —Danscet état de choses, les
que hoc pactoconjungere,quo se animose queant ab ouvriers chrétiens n'ont plus qu'à choisir entre ces
illa injusta ac non feronda oppressione redimere. | douxpartis: ou de donner leur nom à des sociétés
Omninooptari hoc alterum necesseesse, quam potest j dont la religion a tout à craindre, ou de s'organiser
dubitationemapud eos habere, qui nolint summum j eux-mêmeset de joindre leurs forces pour pouvoir
hominis bonum in praesentissimum discrimen con- secouerhardiment un joug si injuste et si intoléra-
jicere? ble. Qu'il faille opter pour ce dernier parti, y a-t-il
des hommes,ayant vraiment à coeur d'arracher le
souverain bien de l'humanité à un péril imminent,
qui puissent avoir là-dessusle moindredoute?
Valde quidem laudandi complures ex nostris, qui Certes, il faut louerhautement le zèle d'un grand
probe perspectoquid a se tempora postulent, expe- nombredes nôtres, lesquels, se rendant parfaitement
riuntur ac tentant qua rationeproletarios ad meliora comptedes besoins de l'heure présente, sondent soi-
adducerehonestis artibus possint. Quorumpatroci- gneusement le terrain, pour y découvrir une voie
nio suscepto, prosperitatemaugere cum domesticam honnêtequi conduise au relèvement do la classe ou-
tum singulorum student : item moderari cum a;qui- vrière. S'étantconstitués les protecteurs des person-
tate vincula, quibus invicem artifices et dominicon- nes vouéesau travail, ils s'étudient à accroître leur
tinentur : alere et confirmarein utrisque momoriam prospérité tant domestique qu'individuelle,à régler
officiiatque evangelicorumcustodiampraeceptorum; avec équité les relations réciproquesdes patrons et
qu;e quidem praecepta, hominem ab intemperantia des ouvriers, à entretenir et à affermir dans les uns
revocando,excedere modum vêtant, personarumque et les autres le souvenir de leurs devoirs et l'obser-
et rerum dissimillimo statu harmoniamin civitate vation des préceptesdivins; préceptes qui, en rame-
tuentur. Hac de caussa unum in locum saipe conve- nant l'homme à la modérationet condamnanttous
nire videmusviros egregios,quo communicentconsi- les excès, maintiennent dans les nations, et parmi
lia invicem,viresque jungant, et quid maxime expe- les éléments si divers de personnes et de choses, la
dire videatur, consultent.Aliivariumgenusartilicum concordeet l'harmonie la plus parfaite. Sous l'inspi-
tipportuna copulare societate student; consilio ac re ration des mémos pensées, des hommes de grand
juvant, opus ne desit honestum ac fructuosum,pro- mérite se réunissent fréquemmenten congrès, pour
vident. Alacritatemadduntac patrociniumimportiunt se communiquerleurs vues, unir leurs forces,arrêter
Episcopi : quorum auctoritate auspiciisqueplures ex des programmesd'action. D'autres s'occupentde fon-
utroque ordine cleri, quae ad excolendumanimum der des corporationsassorties aux divers métiers et
pertinent, in consociatissedulo curant. Deniqueca- d'y faire entrer les artisans; ils aident ces derniers
tliolici non desunt copiosis divitiis, sed mercenario- de leurs conseilset de leur fortune, et pourvoientà
rum velut consortes volutitarii, qui constituera late- ce qu'ils ne manquentjamais d'un travail honnêteet
que fundere grandi pecunia consociationesadnitan- fructueux.Les evéques, de leur côté, encouragentces
tur: quibusadjuvantibusfacileopificiliceat nonmodo efforts etlesmettentsousleurhaut patronage:parleur
commodapraesentia,sed etiamhonesta;quiotisfuttirae autorité et sousleurs auspices,des membresdu clergé,
âduciam sibi labore quaerere.Tam multiplextamqne tant séculierquerégulier, se dévouenten grand nom-
alacris industria quantum attulerit rébus communi- bre aux intérêts spirituels des corporartions. Enfin.
nus boni plus est cognitum,quam ut attineat dicnre. il ne manquepas de catholiquesqui, pourvus d'abon-
Hinc jam bene de reliquo tempore sperandiauspicia dantes richesses, mais devenus en quelque sorte
sumimus,modosocietatesistius modiconstanterin- compagnons volontaires des travailleurs, ne regar-
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXXV
crementacapiant, ac prudenti temperatione consti- ; dent à aucune dépensepour fonderet étendre au h in
tuantur. Tutetur hos respublica civium ccetusjure ! des Sociétés,où ceux-ci puissent trouver, avec une
sociatos : ne trudat tamen sese in eorum intimam ! certaineaisance pour le présent, le gage d'un repos
rationem ordinemquevîtes : vitalis enim motus cie- I honorable pour l'avenir. Tant de zèle, tant et de si
tur ab interiore principio, ac facillime sane pulsu | industrieux efforts ont déjà réalisé parmi les peuples
eliditurexterno. un bientrès considérable,et trop connupour qu'il soit
nécessaire d'en parler en détail. Il est à Nos yeux
d'un heureux augure pour l'avenir, et Nous Nous
promettons de ces corporations les plus heureux
fruits, pourvu qu'elles continuent à se développeret
que la prudencepréside toujours à leur organisation.
Que l'Etat protège ces Sociétésfondéesselonle droit;
que, toutefois, il ne s'immisce point dans leur gou-
vernement intérieur, et ne touche point aux ressorts
intimes qui leur donnentla vie; carie mouvementvi-
tal procèdeessentiellementd'un principe intérieur, et
s'éteinttrésfacilementsousl'actiond'unecauseexterne.
Est profecto temperatlo ac disciplinaprudens ad A ces corporations, il faut évidemment,pour qu'il
eamrem neeessariaut consensus in agendofiât cons- y ait unité d'action et accorddes volontés,une orga-
piratioque voluntatum. Proinde si libéra civibus ! nisalion et une discipline sage et prudente. Si donc,
coeupdifacultas est, ut profectoest, jus quoque esse commeil est certain, les citoyens sont libres de s'as-
oportet eam libère optare disciplinam, easque leges socier, ils doivent l'être également de se donner les
quaemaximeconduceread id, quod propositumest, statuts et règlementsqui leur paraissent les plus ap-
judicentur. i propriés au but qu'ils poursuivent.
Eam, quae memorata est temperationemdiscipli- ! Quelsdoiventêtre ces statuts et règlements?No s
namque collegiorumqualem esse in partibus suis ne croyonspas qu'onpuisse donnerdes règles certai-
singulisoporteat, decernicertis definitisqueregulis nes et précisespour en déterminer le détail : tout dé-
non censemusposse, cum id potius statuendum sit pend du génie de chaquenation, desessais tentésetde
ex ingenio cujusquegentis, ex periclitatione et usu, l'expérienceacquise,du genre de travail, de l'étendue
ex génère atque efficientia operum, ex amplitudine du commerce,et d'autres circonstancesde choseset de
commerciorum,aliisquererum ac temporumadjunc- temps qu'il faut peser avec maturité. Tout ce qu'on
tis, quae sunt prudenter ponderanda. Ad summam peut dire en général, c'est qu'on doit prendre pour
rem quod spectat.haectamquam lex generalisac per- règle universelleet constante, de tellementorganiser
pétua sanciatur, ita constitui itaque gubernari opifi- et gouvernerles corporations qu'elles fournissent à
cum collegiaoportere,ut instrumenta suppeditentap- chacunde leurs membresles moyensaptes à lui faire
tissima maximequeexpedita ad id, quod est proposi- atteindre, par la voie la plus commodeet la plus
tum, quodque in eo consistit ut singuli e societate courte, le but qu'il se propose, et qui consistedans
incrementumbonorumcorporis,animi, rei familiaris, l'accroissement le plus grand possibledes biens du
quoad potest, assequantur. Perspicuum vero est, ad corps, de l'esprit, de la fortune.
perfectionempietatis et morum tamquamad caussam Mais il est évident qu'il faut viser avant tout l'ob-
proscipuamspectari oportere : eaque potissimum jet principal qui est le perfectionnementmoral elle-
eaussa disciplinamsocialempenitus dirigendam.Se- ligieux; c'est surtout cette fin qui doit régler toute
eusenim degenerarentin aliam formam,eiquegeneri j l'économiede ces sociétés; autrement,elles dégénère-
collegiorum,in quibus nulla ratio religionis haberi raient bien vite et tomberaient, ou peu s'en faut, au
solet, haud sane multum praestarent. Ceterum quid rang des sociétés où la religion ne tient aucune
prosit opificirerum copiam societatequaesisse,si ob place. Aussi bien, que servirait à l'artisan d'avoir
mopiam cibi sui de salute periclitetur anima? Quid trouvé au sein de la corporation l'abondancematé-
prodesthomini,si mundumuniversumlucretur, animae rielle, si la disette d'aliments spirituels mettait en
verosusedetrimentumpatiaturl 1 Hanc quidem docet péril le salut de son âme? Quesert à l'hommede ga-
Christus Dominus velut notam habendam, qua ab gner l'univers entier, s'il vient à perdre son âmet
elhnicodistinguatur homo christianus : Hsecomnia Voicile caractèreauquelNotre-SeigneurJésus-Chri:t
géniesinquirunt...quoerileprimum regnumDei,etjusti- veut qu'on distingue le chrétien d'avec le gentil :
liam ejus, et hsecomniaadjicienturvobis2_Sumptis Les gentils recherchenttoutes ces choses... cherchez
igitur a Deoprincipes, plurimumeruditioni religiosas d'abordle royaumede Dieu, et toutes ces chosesvous
tribuatur loci, ut sua singuli adversus Deum officia serontajoutéespar surcroit.
cognoscant: quid credere oporteat, quid sperare at- Ainsi donc,après avoir pris Dieu commepoint de
que agere salutis sempiternaecaussa, probe sciant : départ, qu'on donne une large place à l'instruction
curaque prascipua adversus opinionum errores va- religieuse, afin que tous connaissent leurs devois
riasque corruptelas muniantur. Ad Dei cultum stu- envers lui : ce qu'il faut croire, ce qu'il faut espérer,
diumquepietatis excitetur opifex, nominatim ad re- ce qu'il faut faire en vue du salut éternel, tout cela
doit leurêtre soigneusementinculqué; qu'on les pré-
1.Matth.XVI.26.—2, Matth.VI. 32,33. munisse avec une sollicitude particulière contre les
LXXVI ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
ligiortem diertim festorum colendam. Vereri dtli- opinions erronées et toutes les variétés du vice.
gereque communem omnium parcntem Ecclesiam Qu'on porte l'ouvrier au culte de Dieu, qu'on excite
condiscat: itemque ejus et obtemperareprasceptlset en lui l'esprit de piété, qu'on le rende surtout fidèle
sacramentafrequentare,quaesunt ad expiandas animi à l'observation des dimancheset des jours de fête.
labes sanctitatemquecomparandam instrumenta di- Qu'il apprenne à respecter et à aimer l'Eglise, la
vina. communeMèrede tous les chrétiens, à obtempérerà
ses préceptes, à fréquenter ses sacrements,qui sont
des sourcesdivines où l'âme se purifie de ses taches
et puise la sainteté.
Socialium legum posito in religione fundamento, La religion ainsi constituée comme fondementde
pronum est iter ad stabiliendas sociorum rationes toutes les lois sociales, il n'est pas difficiledodéter-
mutuas, ut convictusquietus ac res florentes conse- miner les relations mutuellesà établir entreles mem-
quantur. Munia sodalitatum dispartienda sunt ad bres pour obtenir la paix et la prospérité do la so-
communesrationes accomodate,atque ita quidem ut ciété. Les diverses fonctionsdoivent être réparties
consensumne minuat dissimilitudo.Officiapartiri in- de la manièrela plus profitableaux intérêtscommuns
telligenter, perspicuequedefiniri, plurimum ob hanc et detelle sorte quel'inégaliténe nuise point à la con-
caussam interest, ne cui fiât injuria. Communeadmi- corde.Il importegrandement que les charges soient
nistrelur intègre, ut ex indigentia singulorumpraefi- distribuéesavecintelligenceetclairementdéfinies,afin
niatur opitulandi modus: jura officiaquedominorum que personnen'ait à souffrird'injustice. Que la masse
cum juribus officiisqueopificumapte conveniant.Si communesoit administréeavec intégrité et qu'on dé-
qui ex alterutro ordine violatum se ulla re putarit, termine d'avance, par le degréd'indigencede chacun
nihil optandum magis, quam adesse ejusdem corpo- des membres,la mesure de secours à lui accorder;
ris viros prudentes atque integros, quorum arbitrio que les droits et les devoirs des patrons soient par-
lilem dirimi legesipsa}socialesjubeant. Illud quoque faitementconciliésavec les droits et les devoirs des
magnopere providenduinut copia operis nullo tem- ouvriers. Afinde parer aux réclamationséventuelles
pore deficiatopifieem,utque vectigalsuppeditet, unde qui s'élèveraientdans l'une ou l'autre classeun sujet
necessitali singulorumsubveniatur nec solum in su- de droits lésés, il serait très désirable que les statuts
bitis ac fortuitis industries casibus, sed etiam cum mêmechargeassentdes hommesprudentset intègres,
valtetudo, aut senectus, aut infortunium quemquam tirés de son sein, de régler le litige en qualité d'ar-
oppressit. bitres. Il faut encore pourvoir d'une manière toute
spécialeà ce qu'en aucun temps l'ouvrier ne manque
de travail et qu'il y ait un fondsde réserve destinéà
faire face non seulement aux accidents soudains et
fortuits inséparables du travail industriel, mais en-
core à la maladie, à la vieillesseet aux coups de la
mauvaisefortune.
His legibus, si modovoluntate accipiantur, satis Ces lois, pourvu qu'elles soient acceptéesde bon
erit tenuiorum commodisac saluti consultum: con- coeur, suffisent pour assurer aux faibles la subsis-
sociationes autem catholicorum non minimum ad tance et un certain bien-être; mais les corporations
prosperitatem momentiin civitatesunt habiturae.Ex catholiques sont appelées encore à apporter leur
eventis prosteritts non temero providemus futura. bonne part à la prospérité générale. Par le passé,
Truditur enimestasostate, sed rerum gestarum miras nous pouvonsjuger sans téméritéde l'avenir. Un àge
suntsimilitudines, quia reguntur providentia Dei,qui fait place à un autre, mais le cours des choses pré-
conlinuationem seriemque rerum ad eam caussam sente de merveilleuses similitudes, ménagées par
moderatur ac flectit,quam sibi in procreationegene- cetteProvidencequi dirige tout et fait tout converger
ris humani prasstituit. — Ghrietianis in prisca Ec- vers la fin que Dieu s'est proposéeen créant l'huma-
clesiae adolescentis aetate probro datum accepimus, nité.
quod maxima pars stipe precaria aut opère faciendo Noussavons que dansles premiersâges de l'Eglise,
victitaront. Sed destituti ab opibus potentiaque, per- on lui faisait un crime de l'indigencede ses membres,
vicere tamen ut gratiam sibi locupletium,ac patro- condamnésà vivre d'aumônes ou de travail. Mais,
cinium potenliumadjungerent. Cernere licebat impi- dénués comme ils étaient de richesses et de puis-
gros, laboriosos, pacificos,justifies maximequecari- sance, ils surent se concilier la faveur des riches et
tatis in exemplum retinentes. Ad ejusmodi vitas la protection des puissants. On pouvait les voir di-
morumque spectaculum,evanuit omnis proejudicata ligents, laborieux, pacifiques, modèlesde justice et
opinio, obtrectatio obmutuit malevolorum, atque surtout de charité. Au spectacled'une vie si parfaite
inveteratae superstitionis commenta veritati chris- et de moeurssi pures, tous les préjugés se dissipè-
tiana}paullatim cessere. — De statu opificumcerta- rent, le sarcasme se tut et les fictionsd'une supersti-
tur in pressens : quas certatio ratione dirimatur an tion invétérée s'évanouirent peu à peu devant la vé-
secus, plurimum interest reipublicae in utramque rité chrétienne. — Le sort dola classe ouvrière, telle
partem. Ratione autem facile dirimeturab artificibus est la question qui s'agite aujourd'hui; elle sera ré-
christianis, si societateconjunctiac prudentibus auc- solue par la raison ou sans elle, et il ne peut être in-
toribus usi, viam inierint eamdem, quam patres ac différentaux nations qu'elle le soit par l'une ou Dar
ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM LXXVI'
majores singulari cum salute et sua et publica tenue- l'autre voie. Or, les ouvriers chrétiens la résoudrons
runt. Etenim quamtumvis magna in homine vis opi- facilement par la raison si, unis en sociétés et obéis
nionum prosjudicatarumcupiditatumque sit, tamen sant à une direction prudente, ils entrent dans la voie
nisi sensum honesti prava voluntas obstupefecerit, où leurs pères et leurs ancêtres trouvèrent leur salut
futura est benevolentiaciviumin eos spontepropen- , et celui des peuples. Quelle que soit dans les hommes
sior, quos industrios ac modestos cognoverint,quos la force des préjugés et des passions, si une volonté
oaquitatemlucro, religionem officii rébus omnibus perverse n'a pas entièrement étoufféle sentiment du
constiterit anteponere.Ex quo illud etiam conseque- juste et de l'honnête, il faudra que tôt ou tard la
tur commodi, quod spes et facultas sanitatis non bienveillance publique se tourne vers ces ouvriers,
minima suppeditabitur opificibus iis, qui vel omnino qu'on aura vus actifs et modestes, mettant l'équité
despecta fide christiana, vel alienis a professionemo- avant le gain et préférant à tout la religion du de-
ribus vivant. Isli quidem se plerumque intelligunt voir. Il résultera de là cet autre avantage, quel'espoir
f tlsaspe simulataqnererum speciedeceptos.Sentiunt et de grandes facilités de salut seront offerts à ces
enim, sese apud cupidos dominos valde inhumane ouvriers qui vivent dans le mépris de la foi chré-
traclari, nec fieri fere pluris quam quantum~pariant tienne ou dans les habitudes qu'elle réprouve. Ils
operandolucri : quibus autem sodalitatibusimplicati comprennent d'ordinaire, ces ouvriers, qu'ils ont été
sunt, in iis pro caritate atque amore intestinas dis- le jouet d'espérances trompeuses et d'apparences
cordias existere, petulantis atque increduleepauper- mensongères. Car ils sentent, par les traitements
tatis perpétuas comités. Fracto animo, extenuato inhumains qu'ils reçoivent de leurs maîtres, qu'ils
corpore, quam valde se multi vellent e servitute tam n'en sont guère estimés qu'au poids de l'or produit
hnmili vindicare : nec tamen audent, seu quod homi- par leur travail; quant aux sociétés qui les ont cir-
num pudor, seu metus inopiasprohîbeat. Jamverohis convenus, ils voient bien qu'à la place de la charité
omnibus inirum quantumprodesse ad salutem colle- et de l'amour, ils n'y trouvent que les discordes in
gia catholicorum possunt, si hassitantes ad sinum testines, ces compagnesinséparables de la pauvreté
suum, expediendis difficultatibus, invitarinl, si re- insolenteet incrédule.L'âme brisée, le corps exténué,
6ipiscenlosin fidem tutelamquesuam acceperint. combienqui voudraientsecouerun joug si humiliant?
Mais, soit respect humain, soit crainte de l'indi-
gence,ils ne l'osent pas. Eh bien ! à tous ces ouvriers,
les sociétés catholiques peuvent être d'une merveil-
leuse utilité, si, hésitants, elles les invitent à venir
chercherdans leur sein un remède à tous leurs maux ;
si, repentants, elles les accueillentavecempressement
et leur assurent sauvegarde et protection.
Ilabetis, Venerabiles Fratres, quos et qua ratione Vous voyez. Vénérables Frères, par qui et par
elaborarein caussa perdifficili necessesit. — Accin- quels moyens cette question si difficiledemande à
gondumad suas cuique partes et maturrime quidem, être traitée et résolue. — Que chacun semette à la tâ-
ne tantes jam molis incommodumfiât insanabilius che qui lui incombe,et cela sans délai, de peur qu'en
cunctatione medicinae. Adhibearit legum instituto- différant le remède, on ne rende incurable un mal
rumque providentiam, qui gerunt respublicas : sua déjà si grave. Que les gouvernants fassent usage de
meminerint officialocupletes et domini : enitantur l'autorité protectrice des lois et des institutions; que
ratione, quorum res agitur, proletarii : cumque reli- les riches et les maîtres se rappellent leurs devoirs ;
gio, ut itiitio diximus, malum pellere funditus sola que les ouvriers dont le sort est en jeu poursuivent
possit, illud reputenl universi, in primis instaurari leurs intérêts par des voies légitimes, et puisque la
mores christianos oportere, sine quibus ea ipsa arma religion seule, comme nous l'avons dit dès le début,
prudenties,quaemaxime putanlur idonea, parumsunt est capable de détruire le mal dans la racine, que
ad salutem valitura. — Ad Ecclesiam quod spectat, tous se rappellent que la première conditionà réali-
desiderari operam suam nullo tempore nulloque ser, c'est la restauration des moeurschrétiennes, sans
modo sinet, tanto plus allatura adjumenti, quanto lesquelles mêmeles moyens suggérés par la prudence
sibi major in agendo libertas contigerit : idque nomi- humaine commeles plus efficacesseront peu aptes à
natim intelligant, quorum muuus est saluti publica; produire de salutaires résultats. — Quant à l'Eglise,
consulere.Intendant omnesanimi industriaequevires son action ne fera jamais défaut en aucune manière
ministri sacrorum : vobisque, Venerabiles Fratres, et sera d'autant plus fécondequ'elle aura pu se déve-
auctoritate praeeuntibuset exemplo, sumpta ex evan- lopper avec plus de liberté, et ceci, Nous désirons
gelio documentavîtes hominibus ex omniordine in- que ceux-là surtout le comprennent dont la mission
culcare ne desinant : omni qua possunt ope pro sa- est de veiller au bien public. Que les ministres sacrés
lute populorum contendant,potissimumque studeant déploient toutes les forces de leur âme et toutes les
et tueri in se, et excitare in aliis, summis juxta atque industries de leur zèle, et que, sous l'autorité de vos
infimis, omniumdominam ac reginam virtutum, ca- paroles et de vos exemples. Vénérables Frères, ils
ritatem. Optata quippe salus expectanda praecipue ne cessent d'inculquer aux hommesde toutes les clas
est ex magna effusionecaritatis : christiana}caritatis ses les régies évangéliquesde la vie chrétienne; qu'ils
i àtelligimus,quae totius Evangelii compendiaria lex travaillent de tout leur pouvoir au salut des peu
est, quaequesemetipsampro aliorum commodissem- ples, et par dessus tout qu'ils s'appliquent à nourrir
LXXVIII ENCYCLIQUE RERUM NOVARUM
per devovere parafa, contra sasculiinsolenkiamatque en eux-mêmes et à faire naître dans les autres, la
immoderatnm amorem sui certissima est homini an- charité, reine et maîtresse de toutes les vertus.
tidotus : cujus virtutis partes ac lineamenta divina C'est en effet, d'une abondante effusion de charité
Paulus Apostolus iis verbis expressit : Caritas paliens qu'il faut principalement attendre le salut; Nous
est, benigna est : non quserit quse sua sunt : omnia parlons de la charité chrétienne, qui résume tout
suffert : omnia sustinet . l'Evangile et qui, toujours prête à se dévouer au
soulagement du prochain, est un antidote très assuré
contre l'arrogance du siècle et l'amour immodéré de
soi-même: vertu dont l'apôtre saint Paul a décrit les
officeset les traits divins dans ces paroles : La cha-
rité est patiente; elle est bénigne; elle ne cherche pas
son propre intérêt; elle souffre tout, elle supporte
tout.
Divinorum munerum auspicem ac benevolenties Comme gage des faveurs divines et en témoigna; e
Nostras testem vobis singulis, Venerabiles Fratres, de Notre bienveillance, Nous vous accordons de tout
etClero populoque vestro apostolicam benedictionem coeur, à chacun de vous, Vénérables Frères, à votre
peramanter in Domino impertimus. clergé et à vos fidèles, la bénédictionapostolique dans
le Seigneur.
Datum Romaeapud S. Petrum die XV Maii An. Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 15 mai de
MDCGCXCI,Pontificatus Nostri decimoquarto. l'année 1891,de Notre Pontificat la quatorzième
LEO PP. XIII. LÉON XIII, PAPE.
1.1 Corinth.XIII,4-7.
LETTRE ENCYCLIQUE
DROIT CANONIQUE
A
ABONDONNEMENT Les empiétements des parlements sur la juri-
diction ecclésiastique ont été tels en France qu'on
En matière de droit canonique, ce terme s'em-
n'y a plus aucune idée de l'abandonnement au
ploie : 1° pour l'acte par lequel un clerc déjà bras séculier.
condamné par le juge ecclésiastique est livré Voici ce que dit, au sujet de l'abandonnement
aux juges séculiers; 2° pour l'acte par lequel on
au bras séculier, le concile de Trente, (Sess.
renonce à un bénéfice, soit d'une manière ex-
XIII, cap. IV, de Reform.) :
presse} soit tacitement. « Comme il se trouve quelquefois que des ec-
§ I. Abandonnement au bras séculier. clésiastiques tombent dans des crimes si énor-
En raison du but et de la dignité de l'état sa- mes et si atroces, qu'on est obligé de les déposer
cerdotal, les clercs ne dépendent nullement de des ordres sacrés et de les livrer à la justice sé-
la juridiction séculière ; ils ressortissent aux tri- culière; qu'il est requis pour cette procédure,
bunaux ecclésiastiques pour tous les délits qu'ils par les saints canons, un certain nombre d'é-
commettent, même pour ceux qui sont pure- vêques, ce qui pourrait être cause quelquefois
ment civils, à moins que le Saint-Siège n'ait que l'exécution de la justice serait trop différée,
accordé des dérogations spéciales par concordat. par la difficulté de les assembler tous, ou même
(Par exemple, la convention entre Pie VII et le que leur résidence serait trop interrompue,
roi de Bavière permet de porter aux tribunaux quand d'ailleurs ils seraient disposés à y assis-
séculiers les causes civiles des ecclésiastiques). ter : pour ce sujet, le saint concile ordonne et
« Les délits que des ecclésiastiques peuvent déclare qu'un évoque, sans l'assistance d'autres
commettre, sont ou purement ecclésiastiques, évêques, peut par lui-même, ou par son vicaire
ou purement civils, ou mixtes. général, dans le spirituel, procéder contre un
« Les délits purement ecclésiastiques sont clerc engagé dans les ordres sacrés, même dans
1° l'hérésie, occulte ou publique ; 2° le schisme, la prêtrise, jusques à la condamnation, et la
qui comporte l'inhabileté à posséder les charges déposition verbale; et qu'il peut aussi par lui-
ecclésiastiques, et permet de priver de celles même, sans autres évêques, procéder à la dé-
qu'on a; 3° l'apostasie (celui qui quitte l'habit gradation actuelle et solennelle desdits ordres
ecclésiastique sans permission et se met dans la et grades ecclésiastiques, dans les cas auxquels
vie séculière, est apostat ab ordine ; il perd les la présence d'autres évêques est requise à un
privilèges canoniques de la cléricature, et on nombre certain, marqué par les canons, en se
peut le frapper des censures); 4°la simonie; K°le faisant néanmoins assister en leur place par un
blasphème; 6° le sacrilège personnel ou local. pareil nombre d'abbés, ayant droit de crosse et
« Les délits purement civils sont : 1° L'homi- de mitre par privilège apostolique, s'il s'en
cide, qui fait encourir l'irrégularité perpétuelle peut trouver aisément dans le lieu ou dans le
et la privation des bénéfices; la complicité à diocèse, et qu'on puisse commodément les as-
l'avortement est punie d'excommunication ré- sembler; sinon, et à leur défaut, en y appe-
servée à l'évêque. 2" L'incendie. 3»Le vol. 4° Le lant au moins d'autres personnes constituées
faux témoignage en justice. 5° La fabrication en dignité ecclésiastique, et recommandables
de fausse monnaie et la falsification des lettres par leur âge, leur expérience et leur capa-
pontificales. 6° La diffamation. 7° La conspira- cité en fait de droit. »
tion, la sédition, la rébellion contre le prince Le chapitre Cumnon ab homine,de Judic. stipula
temporel. qu'un clerc qui est tombé dans uncasgrave dejus-
« Les délits mixtes sont ceux qui offensent la tice, infurto, vel homicidio,vel perjurio, seu alio crû
religion et l'ordre social : l'adultère, l'inceste, le mine deprehensus,doit être déposé par le juge d'é-
péché contre nature ' ». glise; si la déposition ne le corrige pas, on doit
1. Analectajuris pont., XIIIe série, colonne 41. l'anathématiser; si après une si sévère punition,
1
ABBAYE
il ne se corrige pas non plus, alors on le dégrade, < qui les a supprimées pour s'emparer de leurs
on ledépouille de tous leshabits ecclésiastiques, biens.] Durand de Maillane, dans son Dictionnaire
et on l'abandonne ensuite au bras séculier, c'est- de Droit canonique, en nomme 11 48, dont 873
à-dire entre les mains des officiers laïques, pour d'hommes et 311de femmes. Il en était de même
être
puni corporellement; « ut quod non prajva- en Autriche, où l'on comptait 2046 monastères :
let sacerdos efficere per doctrinsB sermonem, 1443 d'hommes et 603 de femmes. L'empereur
potestas hoc impleat per disciplinée terrorem. » Joseph II en supprima 1143.
(Cap. Principes, 23. q. 5.) Parmi les abbayes qui occupent un rang dans
Dieu a séparé la juridiction ecclésiastique de l'histoire, nous devons citer, en France, celles
la juridiction séculière, comme nous le verrons de Gluny instituée par Bernon (9)0), de Giteaux
au mot Officialité, mais elles se doivent les se- fondée par Robert de Molème (1098),et illustrée
cours dont elles peuvent avoir besoin pour pro- par S. Bernard, de Clairvaux fondée par S. Ber-
duire le bien qui l'ait l'objet de leur institution : nard (1115), de Prémontré fondée par S. Nor-
« Una per aliam adjuvari débet, si opus sit. »
(i. bert (1120), de la Trappe fondée par Rotrou,
Glos. in. cap. Statuimus.) C'est pourquoi, dans comte du Perche (1140), et réformée par l'abbé
toute nation organisée chrétiennement, le juge de Rancé qui y établit l'étroite observance de
ecclésiastique doit pouvoir demander l'aide des Citeaux (1662); en Italie, celle du Mont-Cassin
magistrats et des officiers séculiers quand il en fondée par S. Benoît (529); en Allemagne, celles
a besoin pour l'exécution de ses jugements, et de Fulde fondée par S. Boniface (744), et de Cor-
ceux-ci ne doivent pas être libres de lui re- vey fondée par Louis le Débonnaire ; en Suisse,
fuser leur assistance. La raison en est que les celle de St-Gall fondée par S. Gall (700);en An-
Etats, comme les individus, ont l'obligation ri- gleterre celle de Westminster. Les principales
goureuse de reconnaître la religion révélée par abbayes de Paris et des environs étaient celles
le Fils de Dieu et d'entrer dans l'Eglise qu'il a de Montmartre, de St-Denis, de Port-Royal-des-
établie. Quique préposés aux choses temporel- Champs, de St-Victor, de St-Germain des Prés,
les, les Etats ne peuvent faire abstraction des de Ste-Geneviève, de Chelles et de St-Antoine.
choses religieuses auxquelles l'Eglise est prépo- « Il nous suffit d'observer, dit Bergier 1, que la
sée, attendu que ces dernières sont supérieures multitude des abbayes de l'un et de l'autre sexe
et d'une importance capitale pour la fin ultime n'a rien d'étonnant pour ceux qui savent quel
de l'homme. était le malheureux état de la société en Europe
VoirlesmotsDégradation, Immn-taltpendant le dixième siècle et les suivants ; les
etl'Encyclique
Officilité,
An, § II à VIinclus. monastères étaient non seulement les seuls asiles
§ II. Abandonnement de bénéfice où la piété pût se réfugier, mais encore la seule
Il se fait d'une manière expresse ou tacite. ressource des peuples opprimés, dépouillés, ré-
On abandonne un bénéfice d'une manière ex- duits à l'esclavage par les seigneurs, toujours
presse, quand on en fait un acte de cession, quand armés et acharnés à se faire une guerre conti-
on se marie, quand on accepte un bénéfice in- nuelle. Ce fait est attesté par la multitude des
compatible, etc. bourgs et des villes bâtis autour de l'enceinte
On l'abandonne tacitement, ou, comme par- des abbayes. Les peuples y ont trouvé les se-
lent certains canonistes, d'une manière équivo- cours spirituels et temporels, le repos et la sé-
que, par le changement d'habit, par la non ré- curité dont ils ne pouvaient jouir ailleurs. »
sidence, ou en ne desservant pas le bénéfice. Nous avons dit qu'une abbaye est un lieu
L'abandonnement de bénéfice n'est au résumé érigé en prélature, parce que, bien que, dans
qu'une cession, résignation, démission de bé- l'ordre hiérarchique, les abbés n'aient point de
néfice. caractère qui les élève au-dessus des autres
Voirlesmots; Démission,
Bésignation,Binéfices. prêtres, la juridiction qu'ils exercent sur leurs
religieux pour faire observer la règle, les per-
ABBAYE. sonnes distinguées qui ont honoré ce titre, et la
Dans sa propre signification, une abbayeest un puissance des monastères, ont fait mettre les
lieu érigé en prélature, où vivent des religieux abbayes entre les prélatures, ce qui doit avoir
eu des religieuses sous l'autorité d'un abbé ou lieu particulièrement pour les chefs d'ordre :
d'une abbesse. Le concile de Meaux, tenu en « Episcopi, abbates, archiepiscopi et alii eccle-
845, can. 10, appelle les abbayes paternités, siarum praelati de negotiis ecclesiasticis... laï-
parce que le mot abbé signifie père. corum judicio non disponant. » (Ex synodo Eu-
Le nombre des abbayes, en France, était très geniilll, cap. Decernimus.)Le titre de prélats qui
considérable à l'époque de la révolution de 1793 1.Dictionnaire de théologie,
articleABBAYE.
ABBE 3
est donné aux abbés dans le corps du droit ca- ABBÉ.
non n'empêche pas que les dignitaires de plu- On
sieurs cathédrales ne prétendent avoir la pré- nauté appelle abbé le supérieur d'une commu-
de religieux, dont il a le gouvernement
séance sur les abbés qui ne sont pas chefs et temporel. Le nom d'abbé, dit le con-
d'ordre. C'est même une question sur laquelle spirituel cile d'Aix-la-Chapelle, tenu en 836, veut dire
on ne peut point donner de décision constante
et générale. père spirituel.
Il y avait autrefois deux sortes d'abbayes de § I. Origine des abbés. Différentes sortes.
l'un et de l'autre sexe : les unes étaient royales, Abbé, en latin abbas, vient d'un mot hébreu ab,
les autres épiscopales. Celles-là devaient rendre qui signifie père. Les Chaldéens et les Syriens
compte de leur temporel au roi, celles-ci à l'é- ont ajouté la lettre a, et en ont fait abba dans le
vêque. « Ut illa monasteria, dit le concile de même sens; les Grecs et les Latins ont ajouté la
Vernon de l'an 735, canon 20, ubi regulariter lettre s, et ont fait abbas, d'où nous vient le nom
monachi, vel monachae vixerunt, aut quod eis d'abbé. « Un corps, une communauté quelcon-
de illis rébus dimittebatis, unde vivere potuis- que, dit Bergier ', ne peut subsister sans su-
sent, exinde si regalis erât ; ad domnum regem bordination; il faut un supérieur qui commande
faciant rationes abbas vel abbatissa, et si epis- et des inférieurs qui obéissent. Parmi des mem-
copalis, ad illum episcopum. Similiter et de illis bres tous égaux et qui font profession de tendre
vicis. »C'est-à-dire que les monastères qui avaient à la perfection, l'autorité doit être douce et
été fondés ou dotés par les rois devaient rendre charitable; on ne pouvait donner aux supérieurs
compte de l'administration de leur temporel aux monastiques un nom plus convenable que celui
officiers du roi, et ceux dont les évêques étaient de père. » Les anciennes règles donnent le titre
fondateurs n'étaient comptables qu'aux évêques. d'abbés à ceux qui gouvernent les monastères,
Thomassin 1montre que l'intervention de l'au- fait remarquer d'Héricourt 2, afin de leur faire
torité royale était souvent nécessaire pour la connaître qu'ils doivent avoir une tendresse de
réforme des abbayes et la conservation de leurs père pour les personnes dont la conduite leur
biens, et que les privilèges que les rois pou- est confiée, et afin que les religieux aient pour
vaient avoir sur les abbayes n'exemptaient point eux le respect et la soumission que des enfants
celles-ci de la juridiction des évêques. Il ne pou- ont pour leur père.
vait en effet en être autrement. S. Antoine, comme le premier auteur de la vie .
On distinguait aussi les abbayes en régulières commune des moines, fut donc aussi le premier
et en séculières. Les abbayes commendataires à qui l'on donna le nom d'abbé dans le sens de .
étaient celles dont les abbés étaient à la nomi- notre définition ; mais les supérieurs des com-
nation du roi. munautés de moines ne furent pas autrefois les
Lorsqu'une abbaye possédait des terres ou seules personnes à qui l'on donnât ce même
des fermes situées à une trop grande distance, nom. On appelait aussi abbés, comme nous l'ap-
l'abbé envoyait des moines s'établir dans ces prend Cassien dans ses Conférences, tous les ana-
domaines afin de les faire valoir, et il les rem- chorètes et les cénobites d'une sainteté de vie
plaçait assez fréquemment pour qu'ils ne per- reconnue, quoique solitaires et simples laïques:
dissent pas, loin des autres religieux, l'esprit ce qui prouve que le nom d'abbé était ancien-
de règle et de piété. Ces succursales portaient nement bien respectable, puisqu'il n'était donné .
-
le nom de celles, d'obédiencesou de prieurés, et le qu'à ceux qui étnient choisis, ou qui, par leurs
supérieur qui gouvernait au nom de l'Abbé re- vertus, méritaient de l'être, pour exercer l'art
cevait le titre de prieur. Mais un grand nombre sublime et difficile de conduire les âmes.
de ces colonies religieuses ne tardèrent pas à C'est dans ce même sens que les supérieurs
empiéter sur les droits de l'abbaye mère ; elles des chanoines, vivant anciennement en commu-
s'administrèrent elles-mêmes, et au XIVesiècle, nautés, furent aussi appelés abbés, sans qu'ils
les prieurés étaient regardés et réglés comme fussent pour cela moines comme les cénobites.
de véritables bénéfices. Les prieurés furent ap- Bien que le nom d'abbé fût celui dont on se
pelés conventuels, et l'on donna aux chefs de servait plus ordinairement autrefois pour dési-
ces maisons le titre de prieurs conventuels,par gner les supérieurs des communautés religieu-
opposition au nom de prieurs claustraux que por- ses, on ne laissait pas de leur donner quelque-
taient les gouverneurs spirituels des abbayes en fois d'autres noms. Dans les règles, par exem-
commende. ple, de S. Pâcôme, du Maître et de S. Benoît,
Voirles mots: Abbé,Chanoine, Commende. 1.Dictionnaire
§ II, Monastère, dethéologie,
articleABBAYE.
I. Discipline
del'Eglise,part.III,liv. 1, ch.25. 2.Loisecclésiastiques,
pag.68,
4 ABBE
ils étaient quelquefois appelés majeurs, prélats, On appelle encore abbés de régime, dans quel-
présidents, prieurs, archimandrites. Toutes ces ques congrégations, certains prieurs claustraux,
différentes dénominations étaient communément pour les distinguer des véritables abbés en ti-
en usage avant le onzième siècle ; jusqu'alors on tre. Enfin, dans certains pays, comme en Portu-
avait appelé indifféremment les supérieurs des gal et en Espagne, on donne à titre- d'honneur
communautés religieuses de l'un ou l'autre de le nom d'abbé à certains curés, comme on le
ces noms, sans conséquence et sans distinction. donne en France, par politesse, à tous ceux qui
Ce ne fut que longtemps après l'abus qui s'en portent l'habit ecclésiastique, qu'ils soient ou
fit, soit par les religieux titulaires eux-mêmes, non dans les ordres sacrés.
soit par les laïques qui, en s'emparant des biens Ménage dit qu'autrefois les abbés étaient no-
des abbayes, s'arrogèrent le titre d'abbés que bles ou réputés tels en France. De là vient sans
certains ordres réformés ou nouvellement éta- doute qu'on a étendu et perpétué cette qualifi-
blis imaginèrent par humilité de ne pas donner cation dans l'usage du monde.
ce nom à leurs supérieurs, et de les appeler de Voirci-dessous : § vilr,etle motChefd'ordre.
noms plus simples de recteur, prieur, maitre, mi- § II. Abbé. Élection. Confirmation. Bénédiction.
nistre, gardien, comme l'on voit dans les com- Dans l'origine de la vie monastique, lorsque
munautés des Chartreux, des Célestins, des les solitaires étaient dans le goût de se réduire
Mendiants et de toutes les nouvelles congréga- en conventualité, ou ils prenaient ce parti à l'ins-
tions de religieux. tigation de quelqu'un d'entre eux qui leur don-
Parmi ceux qui ont conservé le titre d'abbés, nait ce conseil dans des vues de charité et de
le droit canon distingue les abbés séculiers et plus grande perfection, et alors on ne cherchait
les abbés réguliers. (C. Ex transmisse. Junctd pas d'autre supérieur, à moins que celui-ci, par
Glossd,,verb. Abbatis, de Renunc.'C. Cùm ad monas- humilité, ne s'en excusât ; ou bien, s'étant réu-
terium, de Statu monachorum.) nis d'eux-mêmes pour vivre en communauté, ils
Les abbés séculiers sont ceux qui possèdent faisaient également d'eux-mêmes leur choix,
des bénéfices ecclésiastiques sous le titre d'ab- comme ils étaient obligés de le faire à la mort
bayes anciennement régulières, et depuis sécu- du premier fondateur ou de quelque autre abbé
larisées. (Cap. Cùm de beneficio.)On met au rang qui venait à mourir sans nommer ou désigner
des abbés séculiers les abbés commendataires, son successeur.
dont nous parlerons au § VIII. De ces abbés sé- Comme dans ces premiers temps de ferveur
culiers non commendataires, les uns jouissent les solitaires ne faisaient rien qui ne fût à leur
de certains droits épiscopaux, les autres sont grande édification et à celle de tous les fidèles,
seulement honorés du titre d'abbés, ou n'ont les évêques des diocèses dans l'étendue desquels
avec ce titre que le droit de présider aux assem- ils vivaient, loin de s'opposer à leur façon de vi-
blées d'un chapitre de cathédrale, par un fai- vre, admiraient eux-mêmes leurs vertus et ne
ble reste de l'ancienne autorité que l'abbaye se mêlaient point de l'élection de leurs supérieurs.
donnait en régularité. Cela paraît expressément confirmé parle concile
Les abbés réguliers sont ceux qui ont actuel- d'Arles, tenu l'an 451,à l'occasion d'un différend
lement des religieux sous leur gouvernement, mû entre Fauste, abbé de Lérins, et Théodore,
et à qui conviennent proprement le nom et les évoque de Fréjus, touchant les droits de l'un et
droits d'abbés. (Cap. Cùm ad monasterium,de Stat. de l'autre sur ce monastère. Néanmoins, le père
monach.; Cap. In singulis, eod. titulo.) Thomassin 1 dit que, primitivement les évêques
Parmi les abbés réguliers, on distingue les ab- nommaient et les abbés et les prévôts, et que
bés chefs d'ordre ou de congrégation, et les ab- l'élection des abbés fut ensuite accordée aux mo-
bés particuliers. nastères par un privilège qui, devenant fré-
Les abbés chefs d'ordre ou de congrégation quent, passa, enfin, en droit commun 2.
sont ceux qui étant supérieurs généraux de leur Ce premier temps, dont parle le père Thomas-
ordre ou congrégation, ont d'autres abbayes sous sin, ne peut être celui de S. Antoine, de S. Pacôme
leur dépendance, ce qui les fait appeler quel- ni d'autres anciens fondateurs de monastères,
quefois pères abbés Les abbés particuliers sont parce qu'il est certain, par l'histoire, que cessaints
des abbés titulaires ou commendataires qui désignaient eux-mêmes leurs successeurs sans
n'ont aucune abbaye inférieure et subordonnée que les évêques prissent la moindre connaissance
à la leur. De ces derniers, il y en a qu'on appelle de leur choix, quoiqu'ils en eussent le droit. Il
portatifs ou in partibus, parce que le monastère est certain encore que, du temps de S. Benoit,
de leur abbaye est détruit ou occupé par des en- 1.Discipline del'Église,part,n, liv.I. ch. 32,n. 8.
nemis. 2. l'art. au liv.u, ch.33,n.13.
ABBÉ
les évêques ne prenaient aucune part à ces élec- censure et d'irrégularité qui lui interdise les
tions, ou du moins fort peu, puisque par la rè- fonctions de son état ; qu'il ne soit pas même
gle de ce saint, qui fut faite en 526, il est étnbli, dans aucun de ces cas qui ôtent à un religieux
au ch. 64, que l'abbé sera choisi par toute la le pouvoir d'élire sans permission de son supé-
communauté ou la plus saine partie, et que si rieur. (Dict. cap. Ex eo, de Elect.in 6° ; cap. ult. de
les moines s'accordaient à choisir un sujet indi- Cler. excom.; c. Cumdilectus, de Consuet.; c. Cumin-
gne, les évêques diocésains, les autres abbés, et ter, de Elect.; cap. fin. eod.; cap. Is cui, de Sent, ex-
même les simples fidèles du voisinage devaient com.in 6°.)
empêcher ce désordre, et procurer un digne su- 4° Un électeur ne doit pas être convaincu d'a-
périeur au monastère. L'abbé, une fois choisi, voir élu ou postulé un sujet tout à fait indigne
devait être bénit, suivant la même règle, par l'é- pour la science, les moeurs ou l'âge. (Cap. Cum
vêque ou par d'autres abbés ; et c'était là une cé- in cunctis, in fin. ; c. Innotuit, in fin ; c. Scriptum, de
rémonie introduite à l'imitation de la consécra- Elect.)
tion d'un évêque. La règle de S. Benoît ayant 5° Enfin les impubères, les laïques et les frè-
été dans la suite la règle qui fut suivie dans res convers sont incapables du droit d'élire,
tous les monastères de l'Occident, les moines cap. Ex eo, de Elect. in 6°. Dans certains ordres,
élurent partout leurs abbés; il n'y eut que les comme dans celui des Capucins, les frères con-
monastères mis en commende, et ceux dont l'é- vers sont capables d'élire et d'être élus.
lection était autrement empêchée par les princes Quant aux éligibles, pour être tels, il faut
séculiers, comme cela était très ordinaire dans 1° que les religieux aient atteint l'âge requis
ces anciens temps, qui n'usassent pas de ce
par les canons.
droit '. 2° H faut qu'ils aient fait profession expresse
Les canons ne sauraient être plus exprès sur et non tacite dans l'ordre dans lequel l'abbé doit
ce droit d'élection appartenant aux moines, il être élu, à moins que la coutume ne fût con-
faut les voir dans la cause 18, question 2 du Dé- traire, ou qu'il ne s'en trouvât point de digne
cret ; nous ne rapporterons que celui du pape ou de capable ; dans lequel cas on peut avoir
Grégoire I, exprimé en peu de mots : « Abbas in recours aux religieux d'un autre monastère,
monasterio non per episcopum aut per aliquem mais de la même règle. (Concil. Tridt.it., sess.
extraneum ordinetur (id est, eligatur.) » (Can. XXV, décret, de Reform.,cap. 21, de Regul.; c. Nul-
Abbas.) Il est donc constant que les moines dont lus, de Elect. in 6°.; Clem. I, de Elect. Débet eligi
les abbayes ne sont pas considérables, c'est-à-dire, exgremio Ecclesimcui prseficitwr; c. Cùm dilectus, de
dans le cas des réserves ou des commendes, sui- Elect. ; cap. 8, caws. 18, q. 2.)
vant la taxe de la Chambre Apostolique, élisent 3° Il faut aussi qu'ils soient prêtres: ce qui
librement leurs abbés. n'est expressément établi par aucun canon. Le
Quant à la forme de cette élection, outre les ch. 1erDeMtate et qualitate dit seulement que les
règles établies pour les élections en général, et abbés qui ne sont pas prêtres, doivent se faire
que nous rapportons au mot : Election, il y a promouvoir à la prêtrise : « Ut abbates, decani
encore des règles particulières que les canons et prsepositi qui presbyteri non sunt, presbyteri
prescrivent pour l'élection des abbés: elles regar- fiant; » par où quelques canonistes ont conclu
dent la personne des électeurs et celle des éligi- qu'il suffisait d'être constitué dans les premiers
bles, et on peut les appliquer à l'élection de ordres sacrés. Panorme, sur le chapitre cité,
toutes sortes de supérieurs de religieux. tient que la prêtrise est absolument nécessaire
1° Les électeurs doivent être, au temps de l'é- aux religieux qu'on veut faire abbés et Barbosa
lection, de l'ordre ou du monastère où l'abbé prétend que cette opinion est la plus universel-
doit être élu, par une profession de voeu expresse lement reçue. Il est aujourd'hui peu de monas-
ou tacite. (Cap. Ex eo, § In Ecclesiis, de Elect., tères où les statuts ne terminent à cet égard le
lib. 6.) différend par leurs dispositions. Les premiers
2° Pour être capable d'élire, il faut qu'un re- abbés étaient laïques, de même que les moines
ligieux soit constitué dans les ordres sacrés, à qu'ils gouvernaient. Ils devinrent ecclésiasti-
moins que les statuts de l'ordre ou la coutume tiques lorsque le pape S. Sirice appela les moi-
ne dispensent de cette obligation. (Dict. cap., nes à la cléricature.
J. G. Clem.Ut ii qui, de Mtate et qualitate.) 4° Pour être éligible, il fallait être né d'un
3° Il faut qu'un électeur ne soit noté ni d'ex- légitime mariage, à moins qu'étant bâtard on
communication, ni d'aucune autre espèce de n'eût obtenu dispense du pape. (Cap. 1, de Filiis
1.Thomassin, Discipl.del'Église,part,III,liv.II. ch.59,n. 2; presbyt.; cap. ult. eod. tit.) Les papes avaient ac-
part,I,liv.II, ch.33n.19; liv.III,ch. 32,n. 6. cordé aux supérieurs de différents ordres, le
ABBÉ
pouvoir de dispenser leurs religieux du défaut 8° Enfin l'élection d'un abbé doit être faite
de naissance, à l'effet d'être élevés aux dignités suivant les statuts, règlements et usages de
régulières; mais Sixte V révoqua ces privilèges, chaque ordre, et même de chaque monastère.
et Grégoire XIV les a rétablis sous quelques « Abbatem cuilibet monasterio non alium, sed
modifications, c'est-à-dire, qu'au lieu d'en don- quem dignum moribus atque actibus monasticaj
ner l'exercice à chaque supérieur indistincte- disciplina? communi consensu congregatio proe-
ment, il ne l'a accordé qu'aux chapitres géné- posuerit. » (Can. 3, etseq., caus. 18. q. 2.) De là,
raux et provinciaux. bien que, par le droit commun, l'élection de
5° Il ne faut être dans aucun de ces cas qui l'abbé général appartienne à toute la congré-
rendent irrégulier, infâme ou indigne : « Ità gation, et celle des abbés particuliers aux reli-
simoniacus, apostata, homicida, perjurus, pro- gieux des monastères qui sont les lieux de
digus, neophytus, excommunicatus, suspensus, leur destination, s'il en est autrement prescrit
interdictus, notoriè malus et denique patiens par la règle, ou que l'usage et la coutume soient
defectum aliquem animi seu corporis, eligendus contraires, on doit suivre ce qui est réglé, ou ce
esse nequit. » (C«p. Constituas, de Appel.; c. fin. qui est d'usage. Si les abbayes sont consisto-
deCler. excomm.minist. c. 1 depost. brxbat. c. cum riales, on observe à Rome les mêmes formali-
delectusde consuet'). tés que pour l'élection des évêques, suivant
Le concile de Rouen, de l'an 1074, can. 2, dé- la constitution de Grégoire XIV, du 1b mai
fend de nommer pour abbé un moine qui n'au- 1590.
rait pas pratiqué longtemps la vie monastique Par le chapitre Ne pro défunt, de Elect., les
ou qui serait tombé publiquement dans un religieux doivent procéder à l'élection dans les
crime d'impureté. trois mois de la vacance du siège abbatial.
Par une décision du pape Urbain VIII, de L'abbé qui a été élu après avoir consenti à
l'an 1626, les religieux qui ont été mis en péni- son élection, doit la faire confirmer dans les
tence par le Saint-Office, sont incapables des trois mois.
charges, même après avoir satisfait à la péni- Régulièrement c'est à l'évêque qu'appartient
tence qui leur a été imposée. Mais il faut obser- cette confirmation. (Cap. 16, ex tit. de Confirm.
ver que si un religieux avait quitté son habit elect. lib. I; cap. Monasteria, 18, q. 2.) Mais si le
de religion par légèreté, et qu'il rentrât après monastère est exempt, c'est au pape. (Cap. Si
dans son état, il recouvrerait tous ses droits abbatem,de Elect. in 6°.) Pie IV, par une consti-
après son absolution, et on pourrait l'élire abbé. tution qui commence par ces mots : Verbissanc-
(Oldrad, Consid. 102.) tissimis, ordonna qu'aucune sorte d'abbés, pré-
6° De ce que les irréguliers et les indignes lats et autres dignitaires monastiques ne pour-
sont exclus des charges, il s'ensuit qu'on ne raient s'immiscer en l'administration spiri-
doit élever que ceux qui, comme l'exige le con- tuelle ou temporelle de leurs charges, qu'ils
cile de Tribur, sont prudents dans le gouver- n'eussent été confirmés par le Saint-Siège, et
nement, humbles, chastes, charitables, etc. C. si qu'ils n'eussent reçu en conséquence des lettres
quis 18. q. 2. « Nesit turbulentus abbas, dit S. Be- apostoliques, c'est-à-dire des bulles, sur leur
noît, nec anxius, ne sit nimius et obstinatus, confirmation : ce qui est conforme à l'Extrav.
ne sit zelotypus et nimis suspiciosus. » Doit-on lnjunctse, de Elect. Mais postérieurement diffé-
nommer le plus digne? S. Thomas dit lui-même rents ordres ont obtenu des papes des privilèges
que les religieux les plus pieux ne sont pas qui, en les exemptant de la juridiction des ordi-
toujours les sujets les plus dignes du gouver- naires, donnent aux religieux pouvoir d'en
nement : Bonus civis, malus princeps. élever parmi eux à des charges éminentes, de
7° Celui qui est déjà abbé d'un monastère ne faire ce que les canonistes appellent des prélats
peut être élu abbé d'un autre, à moins que ce locaux, c'est-à-dire des généraux provinciaux
nouveau monastère ne fût tout à fait indépen- qui aient sur eux une autorité absolue et indé-
dant du premier : que s'il se fait une transla- pendante : d'où vient que la plupart des abbés
tion d'abbés d'un monastère à un autre, l'abbé reçoivent de ceux-ci leur confirmation, et ces
transféré n'a plus aucun droit sur le monastère généraux la reçoivent eux-mêmes du pape,
qu'il a quitté. Can. Unum abbatem, 21, g. 1; c. quand ils n'en sont pas dispensés par un privi
Ult. de Relig. domib.; Concil. Trident., sess. XXV, lège tout particulier, qui donne à leur élection
de Regul. cap. 6 et 7, où il est ordonné que les une confirmation implicite et suffisante; comme
voix ou suffrages seront donnés secrètement. cela fut accordé à l'ordre de Cîteaux par Eu-
t. Barbosa,de Jur. Eccles.lib. 1, cap. 17,a. M.Mlranda, gène IV, aux frères mineurs, aux minimes, etc. :
Man.Prml.tora.»,q.13,art.11Conel.g. « Quando autem ad eligentem spectat electio
ABBÉ
et confirmatio, tum eo ipso quod eligat confir- ces termes du concile de Francfort, tenu en 794 :
mare videtur. » (C. Ut circà, de Elect. in 6°, J. G.) « Ut abbas in congregatione non eligatur, ubi
Les abbés élus et confirmés doivent recevoir jussio régis fuerit, nisi per consensum Episcopi
la bénédietion de leur propre évoque; c'est un loci illius. » Depuis le dixième siècle jusqu'au
usage attesté par Innocent III, dans le chapitre seizième, les moines ont élu leurs abbés assez
Cùm contingat, de Mtate et qualitate. Il y a des librement, quoique toujours obligés de réquérir
abbés qui ont le privilège de recevoir cette bé- le consentement, ou du moins l'agrément du roi
nédiction d'un autre prélat que de leur évêque. pour l'élection des abbés dans les principales
Régulièrement les abbés sont bénits par ceux-là abbayes du royaume. Par le concordat passé
mêmes qui les confirment. entre Léon X et François I", l'élection par voie
Il n'y a point de temps fixé par les canons du chapitre des abbés et prieurs conventuels
pour demander ou recevoir cette bénédiction était défendue; mais, arrivant la vacance de
dont on voit dans le Pontifical la forme, ainsi ces abbayes et prieurés, le roi y nommait
que celle du serment qui l'accompagne quand au pape un religieux du même ordre, âgé
elle se fait d'autorité apostolique; mais Tam- d'au moins vingt-trois ans commencés dans
burin dit qu'on doit la demander dans l'année. le temps des six mois du jour de la vacance,
Félinus est du même sentiment. Panorme veut et le pape lui donnait des provisions. Il était
qu'on ne la donne qu'un jour de fête, et c'est la ajouté que si le roi nommait un clerc séculier
disposition du Pontifical. ou un religieux d'un autre ordre, ou qui fût
La bénédiction n'ajoute rien au caractère do au-dessous de l'âge de vingt-trois ans, ou au-
l'abbé (ctim dicitur abbas anté benedictionem,cap. trement incapable, le roi serait tenu d'en nom-
Meminimus,de Accus.)Le chapitre I de Sup. negl. mer un autre dans les trois mois du jour du
prselat. ne la regarde pas même comme néces- refus, fait en plein consistoire, et déclaré au
saire, pour que les abbés puissent eux-mêmes solliciteur de la nomination, faute de quoi le
bénir leurs moines; cependant, dans l'usage, pape y pouvait pourvoir librement.
un abbé ne pourrait conférer des Ordres, ni Autrefois les concordats avaient concédé
faire d'autres semblables fonctions spirituelles au roi la faculté d'élire ou nommer les abbés
sans être bénit. « Per confirmationem electionis dans la plupart des monastères. Le concor-
non transfertur potestas, quae sunt Ordinis; illa dat de 1801, passé entre Pie VII et Napoléon,
enim transferuntur per consecrationem. » (Cap. n'a pas renouvelé ce privilège, parce que la loi
Transmissam,de Elect.). Cette bénédiction, d'ail- civile ne reconnaît plus d'abbayes en Franco.
leurs, quoiqu'elle n'imprime aucun caractère, ne L'article premier du décret du 13 février 1790
se réitère point si un abbé déjà bénit est transféré porte même que « La loi constitutionnelle du
ou promu à une autre abbaye ; on suit à son égard royaume ne reconnaîtra plus de voeux monas-
la règle établie touchant les secondes noces, tiques solennels de personnes de l'un ni do
qu'on ne bénit pas. (C. 1 et 3 de Secund.nupt.) l'autre sexe : en conséquence les ordres et con-
Lorsque l'abbé, canoniquement élu, a obtenu grégations réguliers dans lesquels on fait de
sa bulle, il se présente à l'official du diocèse pareils voeux sont et demeurent supprimés en
dans lequel l'abbaye est située : l'official le fait France, sans qu'il puisse en être établi de sem-
mettre à genoux devant lui et lui fait prêter le blables à l'avenir. » Cependant, comme nous le
serment accoutumé; ensuite il rend une sen- dirons ailleurs, les voeux monastiques solennels,
tence adressée au prieur et aux religieux, et il pour avoir cessé d'être reconnus par la loi civile,
donne pouvoir, en vertu de sa commission, au n'en sont pas moins obligatoires aux yeux de
premier notaire apostolique ou son procureur, l'Église; de sorte que les abbayes, par le fait
de mettre le nouvel abbé en possession de même de leur suppression, sont rentrées dans
l'abbaye, en observant les formalités ordinai- le droit commun pour leur élection, confirma-
res. tion et bénédiction.
En France, l'élection des abbés a souffert bien Les Souverains Pontifes se sont réservé la
des variations. Dès le huitième siècle on voit confirmation de l'élection de l'abbé. Cependant
des abbayes distinguées en abbayes royales et ils ont quelquefois accordé aux supérieurs géné-
en abbayes épiscopales. Dans les premières, le raux de certaines congrégations la faculté de
roi nommait les abbés, s'il n'en avait permis confirmer les abbés inférieurs : par exemple,
par privilège l'élection aux moines. L'évêque d'après un décret de la congrégation des régu-
nommait aux autres abbayes, et son consente- liers, du 1er octobre 1834, le supérieur général
ment était requis même pour ces élections pri- de l'ordre de Cîteaux confirme les abbés de la
vilégiées des religieux, ainsi qu'on le voit par Trappe. L'abbé confirmé reçoit la bénédiction
8 ABBÉ
de l'évêque diocésain. Ce décret étant un pré- res et le chant du choeur, chaque monastère sui
cieux document pour le temps actuel, nous vra, selon son usage, ou la règle de saint Benoît,
croyont devoir le consigner ici. Voici à quelle ou les constitutions de l'abbé de Rancé.
occasio il fut publié : « 9° Ce qui est prescrit par l'art. 8 pourra
L'ab). de la Trappe n'avait pas d'abbé de- être modéré ou mitigé par les supérieurs des
puis la mort (1827) de dom Augustin de Les- monastères pour les religieux qu'ils jugeront
trange. lin 1834,dom Perselin fut élu abbé. Son mériter quelque adoucissement, à raison de leur
élection fut confirmée à Rome, et le cardinal âge, de leur mauvaise santé, ou pour quelque
Weld, assis';' de deux abbés, lui conféra la bé- autre cause juste.
nédiction abbatiale. Le Saint-Siège pourvut en « 10° Quoique les monastères des trappistes
même temps au gouvernement des maisons de soient exempts de la juridiction des évêques, ce-
trappistes. Le1reoctobre 1834,les cardinauxOdes- pendant, pour des raisons particulières et jus-
calchi, préfet de la congrégation des évêques et qu'à ce qu'il soit statué autrement, ils seront
des réguliers, Pedicini et Weld, choisis dans la soumis à la juridiction des mêmes évêques, qui
même congrégation pour régler ce qui concerne procéderont comme délégués du Saint-Siège '.
les monastères de la Trappe en France, ont été « 11° Les religieuses trappistines, en France,
d'avis do statuer ce qui suit : appartiendront à cette congrégation, et leurs
Décretdu Saint-Siègerelatif aux abbés de la monastères ne seront point exempts de la juri-
diction des évêques : cependant le soin spirituel
Trappe 1.
« 1° Tous les monastères de trappistes en de chaque monastère de religieuses sera confié
à l'un ou à l'autre des religieux du monastère
France formeront une seule congrégation qui le
le nom plus voisin. Les évêques choisiront et approu-
portera de Congrégation de religieux veront les religieux qu'ils trouveront propres à
intérieurs de Notre-Dame de la Trappe.
« 2° Le général de l'ordre de Citeaux en sera cet emploi, et pourront nommer des confesseurs
le chef et confirmera chaque abbé. extraordinaires, choisis même dans le clergé sé-
« Il y aura en France un vicaire général muni culier. « 12" Les constitutions que les religieuses de-
de tout pouvoir pour administrer la congréga- vront observer à l'avenir seront soumises au
tion. du Saint-Siège. »
« 4» Cette charge sera unie à perpétuité avec jugement « Ce décret ayant été soumis à Sa Sainteté
l'abbaye de l'ancien monastère de Notre-Dame (Grégoire
de la Trappe, d'où les Trappistes sont sortis; XVI), par le secrétaire de la congré-
des réguliers, dans l'audience qu'il a eue
de sorte que chaque abbé de ce monastère, cano- gation le 3 octobre 1834, Sa Sainteté l'a approuvé en
niquement élu, exerce en même temps les pou- tout, l'a confirmé, et ordonné
voirs et les fonctions de vicaire général. qu'il fût observé.
« Signé CHARLES ODESCALCHI, préfet.
« 5»Chaque année, le vicaire général célébrera
« JEAN,archevêque d'Ephèse, secrétaire. »
un chapitre, où seront convoqués les autres ab-
bés ou prieurs conventuels, et visitera chaque Comme éclaircissement
detoutle§ v précédent,
onpeutvoirles
mots: Election,Age,Bâtard,Electeur,Acception,
Religieux,Suf-
monastère par lui-même ou par un autre abbé; frage,Concordat, Voeu.
quant au monastère de la Trappe, il sera visité
par les quatre abbés de Melleraie, du Port-du- § III. Abbés universels et locaux, perpétuels
Salut, de Belle-Fontaine et du Gard. et triennaux.
« 6« Toute la congrégation observera la règle Autrefois chaque monastère avait son abbé
de saint Benoît et les constitutions de l'abbé de indépendant de tout autre ; les religieux ne re-
Rancé, sauf les prescriptions renfermées dans connaissaient point d'autres supérieurs,et l'abbé
ce décret. lui-même n'était soumis qu'à l'évêque. (C. A66a-
« 7° Les trappistes se conformeront au décret tes; c. Monasteria,18, q. 2.)
de la congrégation des Rites, du 20 avril 1822, Environ vers le dixième siècle, les abbés de
sur le Rituel, le Bréviaire et le Martyrologe dont Cluny réunirent plusieurs monastères sous la
ils devront se servir. dépendance d'un seul abbé; chaque monastère
« 8° Le travail ordinaire des mains ne se pro- avait bien son supérieur, mais son autorité était
longera pas en été au delà de six heures, et dans fort limitée, et de plus subordonnée à l'autorité
le reste du temps au dela de quatre heures et de- de l'abbé, supérieur général de tout l'ordre.
mie; quant à ce qui regarde les jeûnes, les priè- Les congrégations de Camaldul, de Vallom-
dans la suite, tous les
1, Letextelatindecedécretsetrouvedansla Bibliothecacano- breuse, de Citeaux, et,
nieade Ferraria,édit.Migna,tom.1,col.1448,et dansle Trac 1. Voyezsousle motTRAPPISTES un antredécretdu 3mar
datuedeJureregularium,loin,I, p. -107. 1839pourl'interprétation
docetarticle.
ABBÉ 9
ordres suivirent cet exemple ; d'où est venue la abbés fussent perpétuels. Nous croyons que
distinction des abbés locaux et particuliers d'a- ce mode est plus avantageux au bien des ordres
vec les abbés universels et généraux : on nomme religieux que l'amovibilité dès supérieurs et la
ces derniers pères-abbés, comme on nomme en- nomination triennale.
core en plusieurs endroits père-abbé l'abbé Voirlesmots: Filiation,
Généraux Moine.
d'Ordre,
d'une maison qui en a enfanté une autre ; ce qui § IV. Abbés réguliers. Autorité. Gouvernement.
s'appelle, chez les Cisterciens, abbé de la grande Pouvoir.
église, comme il paraît, par la Carte de Charité, L'autorité des abbés, dans l'origine de leur
ch. S, où il est dit que l'abbé d'un chef-maison établissement, était toute fondée sur la charité.
a droit de supériorité et de visite dans les mai- Les règles écrites de S. Pacôme et de S. Benoit
sons qui en dépendent. « Qui quidem abbas jus donnèrent dans la suite aux abbés un caractère
superioritatis et visitationis habebat in monas- de juridiction coercitiye, qui s'étendait sur tout
teriis quae genuerat, ut habent institutiones ca- le gouvernement monastique. La règle de S.
pituli generalis ejusdem ordinis. » C'est de là que Benoît, que nous prendrons pour exemple
viennent les grands pouvoirs des chefs d'ordre général de l'autorité des abbés réguliers, a été
sur leur filiation. dès le septième siècle, suivie dans presque tous
C'était encore l'usage autrefois de n'élire les les monastères d'Occident et elle a servi de fon-
abbés qu'à perpétuité; cet usage subsista jus- dement à toutes celles qui ont été faites depuis.
qu'au temps des réformes, c'est-à-dire jusqu'à Par cette règle c'est à l'abbé seul qu'il appair
ce qu'on eût reconnu l'abus que faisaient les ab- tient de conduire les religieux, de les instruire,
bés de la perpétuité de leurs pouvoirs; mais de les corriger, de les punir et de faire à ce sujet
les papes n'avaient pas attendu les réformes, tout ce qui lui parait le plus convenable; mais
et, avant qu'elles ne se fussent accomplies, ils son gouvernement doit être doux, charitable
s'étaient réservés de nommer les abbés des et prudent. S. Benoit ne croit pas à cet effet
principales abbayes. Beaucoup furent données pouvoir lui donner une meilleure règle à suivie
en commende. La congrégation du Mont-Cassin que celle que prescrivait S. Paul à Timotlne
et, à son imitation, plusieurs autres, deman- par ces paroles : Argue, obsecra, increpa, ce qui
dèrent l'abolition de ces commendes et l'élec- signifie qu'il doit user plus ou moins de sévé-
tion de leurs abbés, avec promesse de ne les rité, de douceur et de force, suivant lescircons-
élire qu'à temps, et tout au plus triennaux. Les tances.
papes ne purent se refuser à cette condition, S. Benoît veut que l'abbé fasse tout avec con-
proposée par les congrégations, la plupart réfor- seil; « Qui agunt omnia cum consilio, reguntur
mées, savantes et fort utiles à l'Eglise; ils leur sapientià. » (Prov., ch. Xlll.) Dans les moindres
accordèrent donc la permission d'élire leurs su- choses, dit-il, il consultera les anciens; dans les
périeurs à temps, et leur laissèrent tous les importantes, il assemblera toute la communauté
revenus de leurs monastères, qu'ils ne parais- proposera le sujet, et demandera l'avis de cha-
saient plus indignes de posséder. cun, sans qu'il soit toutefois restreint à en sui-
En France, on ne voyait dans aucun ordre, vre d'autre que le sien, s'il lui parait meilleur:
réformé ou non, les abbés ou supérieurs parti- « Quoties aliqua proecipua agenda suntin monas-
culiers de monastères dans l'indépendance dont terio, convocet abbas omnem cougregationein,
nous avons parlé; dans tous les ordres et con- ut dicat ipse undè agatur, et audiens consilium
grégations, il y avait des supérieurs généraux, fratrum tractet apud se, et quod judioaverit uli-
parmi lesquels on pouvait comprendre les abbés lius faciat. » Il n'est pas aisé de déterminer
même commendataires, comme représentant ces quelles étaient ces choses qui demandaient ou
anciens abbés réguliers et généraux d'ordre. On ne demandaient pas, suivant la règle de S. Be-
voit par le décret ci-dessus du Saint-Siège, en noit, la convocation de toute la congrégation;
date du 3 octobre 1834,que le général de l'ordre les instituts des nouveaux ordres sont à cet
de Cîteaux en est le chef, et qu'il confirme égard plus précis, parce qu'ils donnent plus de
chaque abbé. Du reste, dans quelques ordres, les détail, et ne donnent pas aux supérieurs des
supérieurs ne sont élus que pour trois ans; dans pouvoirs si illimités.
d'autres, au contraire, et dans certaines congré- Toujours dans le même esprit de sagesse, S.
gations, les supérieurs sont perpétuels. Néan- Benoit permet à l'abbé d'établir un prévôt,
moins, dans les uns comme dans les autres, on praepositum,pour l'aider et le soulager dans son
doit tenir tous les trois ans le chapitre de disci- gouvernement, sans pourtant rien perdre de son
pline que recommande le concile de Latran. La autorité ; car, comme en ce temps-là il y avait
règle de S.Benoît a établi que les supérieurs ou de ces prévôts dans certains monastères, qui
10 ABBÉ
ayant été ordonnés, comme les abbés, par des Parmi les ordres mendiants, chaque ordre est
évêques ou des abbés même, s'estimaient autant gouverné par un général nommé ministre chez les
que ces derniers, et causaient ainsi du scandale franciscains, et prieur chez les autres. A me-
par leur vanité, S. Benoît veut que ces prévôts sure que les maisons étaient fondées, on mettait
soient tout à fait soumis aux abbés et s'exprime en chacune un prieur, dans l'ordre de S. Fran-
en ces termes : « Dum sunt maligno spiritu su- çois un gardien ; mais comme elles se multipliè-
perbiee inflati, existimantes se secundos abba- rent extrêmement en peu de temps, on les divisa
tes, sibi tyrannidem scandalo nutriunt, discus- par provinces, et on établit des ministres ou
siones fovent, nos providemus expedire propter prieurs provinciaux. Tousces officiers sont électifs
pacis caritatisque custodiam, in abbatis pendere Le provincial peut transférer, dans sa province,
arbitrlo ordinationem monasterii sui, ita ut alii les religieux d'une maison à l'autre à son gré, s'il
omnes quocumque etîam officio fungantur, illi n'y a affiliation ou conventualitê dûment autori-
subditi non aequales sint, nec parum cum eo ma- sée. Le général a le même pouvoir sur tout l'or-
glstratum gerentes. » dre, et ne dépend que du pape.
Ces derniers mots s'adressent aux autres offi- Tous ces différents gouvernements dans les
ciers du monastère après le prévôt, Ces officiers différents ordres n'empêchent pas qu'en général,
étaient : le doyen, le portier, le cellerier, l'infir- par les canons, il n'appartienne toujours à l'abbé
mier, l'hospitalier, que l'abbè, par la même rè- et à tout supérieur de religieux, de gouverner
gle, établissait ou révoquait, selon qu'il jugeait leurs inférieurs pour le spirituel, de les corriger
à propos 1. et de les punir : « Monachi autem abbatibus
On voit donc, par ce que nous venons de dire, omni obedientia et devotione subjaceant. » (Can.
que, suivant la règle de S. Benoit, l'abbé avait, 1, c. 3, 4, caus. 18. q. 2; Ea quse,de Statu monach.)
et quant au spirituel et quant au temporel, tou- Le concile de Trente, sess. VI, ch. 4 et sess. XXV,
tes sortes de pouvoirs; qu'il était obligé de pren- ch. 4 et 14, apporte quelques limitations à l'ex-
dre conseil, mais qu'il était le maître de ne pas ercice de cette autorité, par rapport à celle de
le suivre : ce qui rendait son gouvernement pro- l'évêque.
prement monarchique, modéré seulement par la Le chapitre Nullam, 18, q. 2, et le chapitre
règle même. Edoceri, de Rescriptis, donnent aux abbés la même
Dans la suite des temps, cette grande autorité autorité pour le temporel ; ils peuvent l'admi-
que S. Benoît avait donnée aux abbés, par sa nistrer à leur gré, sans consulter les moines :
règle, s'affaiblit plus ou moins, selon les diffé- « Proeterquam in arduis ; » c'est-à-dire que, con-
rents pays et les différentes circonstances des formément à la règle de S. Benoît, les abbés
siècles. Les nouvelles congrégations, les nou- doivent prendre l'avis de leurs religieux dans
veaux ordres introduisirent, à l'égard des abbés les affaires importantes.
ou supérieurs, chacun des usages différents et C'est sur tous ces différents droits que les ca-
analogues à la forme de leurs constitutions par- nonistes ont distingué, dans un abbé, supérieur
ticulières. Les fondateurs de Gîteaux, par exem- de religieux, trois sortes de puissances: puis-
ple, voyant que le relâchement de Cluny venait sance d'économie, puissance d'ordre et puissance
en partie de l'autorité absolue de leur abbé per- de juridiction.
pétuel, donnèrent des abbés à tous les nouveaux La puissance d'économie a pour objet la con-
monastères, et voulurent qu'ils s'assemblassent servation des biens temporels, ce qui a lieu
tous les ans en chapitre général, pour voir s'ils même pour l'intérêt commun dans l'état des ab-
étaient uniformes et fidèles à observer la règle. bayes dont les menses sont divisées ; c'est-à-dire
Ils conservèrent à Citeaux une grande autorité que les aliénations ne peuvent se l'aire sans
sur les quatre premières filles (on donnait ce qu'il en soit traité entre l'abbé et les religieux.
nom aux quatre plus anciennes abbayes dépen- (Clem. Monasteriorum, de hebus eccles. ulienan-
dant de Citeaux : c'étaient La Ferté, Pontigny, dis.)
Clairvaux et Morimond), et chacune d'elles La puissance d'ordre ou de dignité s'exerce
sur les monastères de sa filiation. Les chanoines sur les matières du service arvin ; et c'est à ce
réguliers suivirent â peu près le gouvernement titre que les abbés donnent les ordres mineurs,
des moines; ils eurent des abbés dans les principa- la bénédiction, etc.
les maisons, des prieurs dans les moindres, et Mais le droit qu'a l'abbé de conférer les or-
autrefois des prévôts et des doyens, qui sont de- dres mineurs est soumis à des conditions déter-
meurés dans les chapitres séculiers*. minées. L'abbé doit être prêtre et avoir reçu la
1. Thomassin, del'Église,part, II, liv.II, ch. 20,n. bénédiction de
Discipline
17et 18. l'évêque ; il ne peut exercer son
auDroitecclésiastique,
2. Fleur;,Institution part.I. 27,ch. pouvoir que sur ses subordonnés et dans les li-
ABBÉ 11
mites de son monastère.(Cap. Cum contingat, 11, diocésain ou limitrophe respectivement est ré-
tit. XIV, de Mlate et qualit.) S'il arrive que l'évê- servé tout ce qui n'est pas clairement démontré
que lui refuse sa bénédiction, après trois de- ocmme attribué à l'abbé. La présomption pour
mandes infructueuses, il est autorisé à passer l'évêque est fondée sur le droit commun. Mais
outre en usant de ses pouvoirs envers ses sub- l'abbé peut, dans sa juridiction, profiter, de tous
ordonnés. (Cap. Statuimus, 1, tit, X, de Suppl. ne- les droits qu'il tient de la prescription ou du pri-
gl. prxlat.) vilège contre l'évêque diocésain ou limitrophe
Lés abbés peuvent délivrer des dimissoires à respectivement. On appelle limitrophe celui
leurs sujets réguliers, mais ils sont incompé- dont l'église cathédrale est plus voisine qu'au-
tents à l'égard de leurs sujets séculiers. cune autre de léglise abbatiale, en calculant la
Relativement au pouvoir qu'ont les abbés de distance d'après les voies ordinaires.
conférer à leurs religieux les quatre ordres mi- Voirles mots:Offices
claustraux,Prévôt,Doyen,Dignités,
Moine,Conventualité, Général,Religieux,Obéis-
Translation,
neurs, pouvoir déjà fort ancien dans les coutu- sance,Aliénation, Ordre.
mes ecclésiastiques, et que le second concile de
Nicée a reconnu, il s'explique, dit le savant Hal- § V. Abbés réguliers. Droits. Prérogatives.
lier, d'une manière très vraisemblable par le La plupart des droits que nous allons rappor-
trop grand éloignement où se trouvaient du ter ont la même cause que les exemptions et les
siège épiscopal les moines retirés au fond des privilèges des religieux.
solitudes; obligés d'ailleurs par les règles cano- Les abbés sont placés par les canonistes im-
niques à nommer exclusivement à toutes les médiatement après les évêques : c'est le rang
charges ecclésiastiques des titulaires consacrés qu'ils leur donnent dans les conciles. Ils sont
par l'ordination, les évêques aimèrent mieux compris, comme les évêques, sous le nom de
abandonner aux abbés les ordinations qui n'exi- prélats. Le chapitre Decernimusde judic, leur
geaient pas nécessairement la consécration épis- donne expressément cette qualité en ces termes :
copale. Ce pouvoir a été restreint par le concile « Sed episcopi, abbates, arcblepiscopi et alii
de Trente. ecclesiarum proelati. »
La puissance de juridiction regarde les per- La dignité abbatiale n'est pas comprise, non
sonnes, et comprend les droits de correction, plus que la dignité épiscopale, sous le simple
d'excommunication, et généralement tout ce qui nom de dignité ou de bénéfice dans les choses
est nécessaire pour l'exacte observation de la odieuses, « in odiosis. » (Archid. in. c. i de Prie-
régie dans l'intérieur du monastère. Mais à l'é- bend., in princ.)
gard des crimes et autres cas qui ne regardent Un abbé est estimé l'époux de son église,
point l'observation de la règle, c'est aux évêques comme un évêque : il la rend veuve par sa mort.
qu'appartient le droit de correction. (Concil.Tri- (Innoc, in c. Qui propter, in princ, vers. Viduatis,
dent., sess. XXV, cap. 14 ';c. Hoc. tantum 18, q. 1; de Elect.)
c. Si quis, dist. 54; c. De persona 11, g. 1; c. He- Plusieurs abbés, par privilège du Saint-Siège,
prehensibilis,de Appel.; c. Monachi; cap. Universi- ont, comme les évêques, le droit de porter la
tatis, de Sent, excom.) mitre et le bâton pastoral. Seulement leurs mi-
Dans un conflit entre l'autorité de l'abbé et tres doivent être brodées d'or et non ornées de
l'autorité de l'évêque dans les limites diocésai- pierres précieuses comme celle des évêques.
nes duquel se trouve l'abbaye (lorsqu'il s'agit Ils ont aussi le droit de bénir solennellement
d'un abbé improprement d'aucun diocèse) ou dans leurs propres églises, après les vêpres,
près du diocèse duquel cette abbaye se trouve la messe et les matines, à moins que le Saint-
(lorsqu'il s'agit d'un abbé proprement d'aucun Siège ne leur eût spécialement permis de don-
diocèse), la présomption est toujours pour l'é- ner cette bénédiction, de porter la mitre et la
vêque contre l'abbé. Car ici le privilège est en crosse ailleurs et dans un autre temps, comme
lutte avec la loi, l'exception avec la règle, et ce en des processions hors l'enceinte de leurs
qui est extraordinaire avec ce qui est ordinaire. églises ; ce qui fut accordé par le pape Ur-
Or, on ne suppose jamais une dérogation àla loi, bain III à l'abbé de l'église de Latran, à Rome.
à moins que cette exception ne soit parfaitement
(G. Abbates, de Privilegiis, in 6°.) « Abbates quos
constatée. Il s'ensuit qu'à l'autorité de l'évêque apostolica sedes in exhibitione benedictionis su-
1.«Regularis,nonsubditusEpiscopo, quiintraclaustra
monas- per populum, speciali privilegio insignivit, in
teriidegit,etextraea ita notoriedeliquerit,
ntpopulo soandalo
sit, ecclesiis quae ad eos pertinent pleno jure, quando
Episcopo a suo intra
instante, superiore tempus Episcopoab preefl- in eis divina officia célébrant, possunt post mis-
gendum severepuniatur, depunitione Episcopum certiorem
faciat:
sinminus,asuosuperiore officioprivetur, ab Epis- sarum solemnia, et vespertinas ac matutinas
et délinquant
copopuniriposait. laudes, solemnem super populum elargiri. » Les
12 ABBÉ
abbés ne peuvent donner cette bénédiction en consacrer même les autels et leurs vases ; mais
présence de quelque évêque ou autre prélat su- pour cela, plus que pour tout le reste, il faut
périeur, s'ils n'en ont une pormission particulière que leur privilège soit bien spécial.
du pape ; ils ne peuvent non plus, eh aucun cas, Les abbés exempts, à qui il avait été accordé
donner cette bénédiction en particulier, dans les pir le pape d'user des droits que nous venons
rues et hors de leurs églises comme les évo- de voir, conféraient communément les ordres
ques; cela leur est défendu par un décret de la mineurs, non seulement à leurs religieux, mais
sucrée congrégation, du 24 août 1609. encore à ceux sur qui ils avaient le droit de ju-
Le Sexto (cap. de Privilegiis)détermine le genre ridiction ecclésiastique. Cela a été défendu ou
de mitre simple ou anryphrigiée, dont les abbés restreint par le concile de Trente.
doivent user dans les conciles, selon qu'ils sont Ils peuvent accorder des dispenses excommu-
ou ne sont pas exempts. Le cérémonial des évo- nier leurs religieux et absoudre, comme on peut
lues renouvelle celte disposition, et nous trou- le voir aux mots: Dispense, Excommunication,
vons dans cet usage de la mitre, la raison pour Absolution, Cas réservés.
laquelle, dans les conciles oecuméniques où l'on Les abbés ont droit de visite dans les monastè-
a donné place aux généraux d'ordre, ceux-ci res qui leur sont soumis. Ils ont voix prépon-
n'ont siégé qu'après les abbés de simples monas- dérante dans les chapitres.
tères. Le pontifical romain admet également la A l'égard des abbés à qui les papes ont ac-
présence des abbés mitrés dans les absoutes cordé le droit de juridiction comme épiscopale,
solennelles des prélats et des princes. sur un certain territoire, voyez les mots exemp-
Comme il y a plusieurs sortes de mitres, sui- tion et Juridiction commeépiscopale.
vant les distinctions qu'on en a fait à Rome, Voirlesmots: Prélat,Epoux,Absoute,Mitre,Bénédiction
§i.
les abbés ne doivent se servir que de l'espèce Ordre,Dispense, Ex'communicalion,
Absolution,Cas
réservés,
Visite,
Suffrage.
de mitre qui leur a été désignée par le privi-
lège du Saint-Siège, et ils sont censés plus ou § VI. Abbés réguliers. Charges. Obligations.
moins élevés en dignité, selon qu'ils portent « Abbatis nomen potius est sollicitudinis quam
une de ces mitres plus ou moins riche. Il y a ordinis vol honoris. » (C. Tuam, J. G. de JEtate et
seulement ceci à observer par rapport à l'usage quai.) S. Benoît, après avoir donné à l'abbé une
que peuvent faire les abbés de ces différentes autorité fort étendue, lui recommande expressé-
mitres, qu'aux conciles synodaux ou provin- ment de pratiquer le premier la règle, et d'édi-
ciaux, où ils assistent, quoique exempts, ils ne fier ses inférieurs autant par de pieux entretiens,
peuvent jamais porter la mitre précieuse, par que par l'exemple de ses bonnes oeuvres : « Om-
respect pour les évêques, sauf, en tout autre en- nia bona et sancta factis amplius quam verbis
droit, de jouir de leur privilège dans toute son oslendat, ut capacibus discipulis mandata Do-
étendue. Il y a toutefois des abbés, en Italie et înini verbis proponat, duris vero corde et sim-
en Espagne, qui ont le droit d'user de ce privi- plicioribus factis suis divina preecepta demons-
lège, même en présence des évêques. tret. » (Cap. 2, 65-,regul. Bened.)
Il y a des abbés à qui les papes ont accordé S. Augustin, parlant des devoirs des prélats
le privilège de porter les habits distinctifs do en général, s'exprime en ces termes:» Seipsum
l'évêque, comme le rochet, le camail, en con- scilicet proelatus bonorum operum praebeat exem-
servant la couleur des habits de leur ordre. plum, corripiat inquietos, consoletur pusillani-
Les abbés qui jouissent de ces différents pri- mes, suscipiat infirmos, patiens sit ad omnes,
vilèges ont la préséance sur ceux qui n'en jouis- disciplinam libens habeat, metuendus imponat,
sent pas; mais, régulièrement, ils n'en peuvent et tamen magis amari à subditis appetat quam
user hors de leurs monastères qu'avec la per- timeri. »
mission des évêques, à moins, comme nous Le fameux canon Abbates,18, q. 2, tiré du con-
avons déjà dit, qu'ils n'aient à ce sujet une cile d'Orléans, de l'année 511, soumit les abbés
permission particulière du Saint-Siège. à la correction des évêques : « Abbates pro hu-
Les abbés ne peuvent, sans privilège spécial, militate religionis in episcoporum potestate con-
user du baldaquin ; ils ne peuvent avoir,comme sistant, et si quid extra regulam fecerint, ab epis-
les évêques, un siège dressé et élevé proche de copis corrigantur. " Le concile d'Épaone, tenu
l'autel ; cela ne leur est permis qu'aux trois ou l'an317, dit la même chose; il ajoute,canon 19,
quatre fêtes de l'année où ils officient solennel- que l'évêque peut même les déposer. Enfin le
lement. concile de Trente, confirmant implicitement la
Certains abbés ont le droit, comme les évê- disposition de la règle de S. Benoit en ce qu'elle
ques, de bénir les ornements de leurs églises, de charge l'abbé du salut de ses moines, dit : « Il
ABBÉ 13,
est de précepte divin pour tous ceux qui sont et de plus à la vigilance des plus charitables
chargés du soin des âmes, de connaître leurs pasteurs.
brebis, d'offrir pour elles le saint sacrifice, de les Voirlesmots: § m deConcile,
Parrain,Résidence.
nourrir du pain de la parole de Dieu, de leur ad-
ministrer les sacrements, et de les édifier par § VII. Rang des Abbés dans les Conciles.
l'exemple de toutes sortes de bonnes oeuvres. » Cette question se trouve traitée dans le § V
(Sess. XXIII, ch. I, de Reform.) ci-dessus, où nous parlons des droits et des pré-
Puisque les abbés sont tenus d'observer eux- rogatives des abbés.
mêmes exactement la règle, ils doivent veiller L'auteur des Maximescanoniquesde France, en-
à ce que tous les religieux l'observent; ils seigne que les abbés ont la préséance dans les
doivent à cet effet visiter les monastères de conciles et ailleurs, sur tous les prélats infé-
leur dépendance. Ils doivent faire lire et rieurs, ce qui est conforme à la réponse du pape
étudier les Saintes Écritures à leurs religieux Grégoire XIII, aux Pères du concile de Rouen, en
Ils doivent encore, suivant le concile de Trente, , 1581; mais elle a souvent été contestée dans les
assister aux synodes diocésains, quand ils ont anciennes assemblées générales de France.
des églises paroissiales ou séculières en leur ad- On ne trouve même nulle part, dans le droit ,
ministration, et qu'ils ne sont pas soumis à des canon, que les abbés aient droit à une convo-,
chapitres généraux; mais ils ne sont pas tenus cation aux conciles provinciaux ou aux syno-
d'assister aux conciles provinciaux. des, surtout s'ils sont exempts de la juridiction
Les abbés ne doivent lever personne des fonts des Ordinaires. Il faut cependant excepter le
baptismaux. Ils ne peuvent ni imposer des pé- cas où ils auraient, sur un clergé et une popur ,
nitences, ni accorder des indulgences, ni exer- lation déterminée, une juridiction quasi-épisco-
cer d'autres droits semblables qui n'appartien- pale. Leur convocation dans tout, autre cas, ne
nent qu'à la dignité épiscopale. (C. Acccdentibus, résulterait donc que d'un usage ou d'un privi-
de Excess.Praelat.) lége, mais non d'un droit. C'est ce qui se trouve
Dans l'administration des biens temporels, confirmé par le texte suivant du concile de
l'abbé doit être prudent, et ne rien faire d'im- Tours tenu en 1849: « Juxta morcm pristinum
portantsans consulter les religieux, comme nous invitabuntur, prout Métropolitaine cum suis suf-
l'avons déjà dit. fiaganeis expidirejudicaverit, abbates monasterio-
Enfin l'abbé doit faire tout ce à quoi la règle rum in provincia existentium, necnon et alii
l'oblige: s'il agit en despote, en licencieux, les viri scientia commendabiles. »
moines peuvent l'accuser, et poursuivre sa des-
titution : « Si fuerint (abbates) dilapidatores, si § VIII. Abbés commendataires.
incontinenter vixerint, aut tale aliquid egerint On appelle abbé commendataire le séculier à
proquoamovendi merito videantur, aut si etiam qui on a donné une ubbaye eu commende.
pro necessitate majoris officii de consilio fra- L'on peut appliquer aux abbés commendataires
trum fuerint transferendi. » (C. Munachi,2, § Prio- ce que nous disons au mot Coinmende touchant
res. deStat. monach.) l'origine, les qualités, les droits et les obliga-
Le canon Si quis, 18, q. 2, fait par le concile tions des commendataires en général; et, par une
de Tribur, en Allemagne, sur la règle de S. Be- conséquence nécessaire de cette obligation, il
noit, donne plus d'étendue aux causes de desti- faut aussi rappeler ici ce que nous avons dit ci-
tution d'un abbé. « Si quis abbas, dit ce canon, dessus, des droits honotiliques et utiles des abbés
cautus in regimine, humilis, castus, misericors, réguliers.
discretus, sobriusque non fuerit, ac divina proe- Les abbés commendataires étaient regardés
cepta verbis et exemplis non ostenderit, ab epis- dans l'Église, comme constitués en dignité ec-
copo in cujus territorio consistit, et à vicinis ab- clésiastique et comme prélats et vrais titulaires ;
batibus et coeteris Deum timentibus à suo ar- ils prenaient possession de leurs églises abba-
ceatur honore, etiamsi omnis congregatio vitiis tiales comme on fait des autres églises; il ,
suis consentiens, eum abbatem habere voluit. » . baisaient l'autel, ils touchaient les livres et
Toutefois, pour empêcher que les moines n'a- les ornements, prenaient séance au choeur
busassent du droit de destituer leurs abbés, le en la première place, et par leur mort les églises
pupe Pelage leur défendit d'en user sans juste étaient appelées vacantes, viduatoe.Ils pouvaient
cause : « Non licet autem monachis abbates pro en cette qualité être juges délégués, et avoir
suo arbitrio et sine causa expellere, et alios or- séance dans les conciles ; dans les abbayes qui
dinare. » (C. Nullam potestatem18, q. 2.) avaient territoire et juridiction, ils exerçaient
Les abbés réguliers sont obligés àlarésidence les fonctions de la juridiction spirituelle, et les
14 ABBESSE
peuples les reconnaissaient pour leurs supé- d'une communauté de filles, dans le mêmeesprit
rieurs légitimes ; ils étaient enfin égaux aux ab- qu'on donne le nom d'abbés aux supérieurs d'une
bés titulaires. communauté de religieux. C'est la mère spiri-
Les abbés commendataires n'étaient point tuelle des religieuses; aussi, dans bien des cou-
ordinairement bénits et ne portaient la crosse et vents de filles qui n'ont pas le titre d'abbayes,
la mitre qu'en peinture dans leurs armes. appelle-t-on la supérieure du nom de mère. En
Dans les guerres civiles on a vu souvent les Orientées abbesses étaient appelées amma,c'est-
abbésy prendre parti comme les autres seigneurs. à-dire mère, en langue syriaque, comme en la
Ils étaient même obligés de le faire, soit pour le même langue abbé signifie père.
service du roi, soit pour le service de leur sei-
gneur dominant, suivant la loi des fiefs. Les Ca- § I. Abbesse. Election.
pitulairesles dispensaient de rendre en personne Les vierges réduites en communauté ont eu le
le service militaire ; cependant ils le continuè- droit d'élire leurs abbesses quand les évêques
rent encore longtemps, parce qu'ils croyaient ont cessé de les leur nommer, ainsi qu'ils en
qu'une telle dispense dégradait leurs fiefs. Ils avaient anciennement le droit et l'usage .
servaient encore à la tête de leurs vassaux en En France, comme les abbayes de filles n'a-
1077; et ils n'avaient souvent pas d'autre moyen vaient pas été comprises dans le concordat entre
de se garantir du pillage. D'ailleurs, il y avait Léon X et François Ier, elles restèrent toujours
des seigneurs laïques, qui, sous prétexte de pro- électives; et quoique dans le siècle dernier les
tection, se mettaient en possession des abbayes, abbesses fussent généralement nommées par le
ou par concessions des rois, ou de leur propre roi, les bulles qu'elles obtenaient de Rome por-
autorité, et prenaient le titre d'abbès. taient constamment qu'elles avaient été élues
C'est dès le vin8siècle qu'on vit des seigneurs par leur communauté.
laïques prendre ainsi le titre d'abbés de certai- Une religieuse ne peut élire, suivant le cha-
nes abbayes que les moines d'ailleurs leurs don- pitre lndemnitatibus,de Elect. in 6°, qu'elle n'ait
naient souvent pour se mettre, par là, sous leur douze ans accomplis et fait profession tacite ou
protection. Ces abbés laissaient le soin du spi- expresse; mais ce chapitre a été abrogé par le
rituel à des abbés titulaires, ou à des prieurs ou concile de Trente. Elle ne peut être élue abbesse
prévôts; et, pour les distinguer des autres, on ou prieure qu'elle n'ait fait profession expresse
les appelait abbates milites. C'est à ce titre que et qu'elle ne soit âgée de trente ans accomplis.
plusieurs rois de France, et des princes du sang, Quant à la forme de l'élection, une abbesse
ainsi que des ducs et des comtes, tels que Hu- élue par les deux tiers des religieuses doit être
gues-Capet, Philippe Ier, Louis VI, les ducs bénite nonobstant toute exception, opposition
d'Orléans, etc., portèrent le titre d'abbés ; ces et appellation, ainsi que celle dont l'élection, faite
derniers s'intitulèrent abbés du monastère de par un moindre nombre de religieuses, a été
Saint-Aignan d'Orléans. Ces sortes d'abbés ont ensuite approuvée par autant de nouvelles vo-
aussi donné naissance aux abbés de cour du cales qu'il en faut pour former les deux tiers,
dernier siècle : c'étaient des cadets de familles pourvu que cela se fasse avant qu'on ait passé
nobles qui prenaient le titre d'abbés, en expec- à des actes étrangers ou affaires qui ne regardent
tative d'une abbaye qu'ils ne possédaient pas pas l'élection. De plus, suivant le même chapi-
encore. Nous citerons, comme exemple assez tre, lorsque la moitié des religieuses n'a point
récent, l'abbé de Montgaillard, historiographe, donné sa voix à une même personne, les autres
né en 1772, au château de Montgaillard (Lan- religieuses peuvent s'unir au plus grand nom-
guedoc), mort à Paris en 1825.Il n'entra jamais bre même après le scrutin : et s'il s'y en unit
dans les ordres, et remplit, sous le Consulat et assez pour surpasser la moitié des voix, celle
l'Empire, un emploi dans l'administration mi- qui est élue peut être confirmée par le supérieur
litaire, ce qui ne l'empêcha pas de porter le ti- à la charge de faire juger l'appel, si les oppo-
tre d'abbé de Nivelles et d'Orval. santes à l'élection et à la confirmation veulent
Voirlamot: Commende. le poursuivre.
ABBESSE. Que si les autres religieuses ne veulent pas s'u-
nir en faveur de celle qui a le plus de voix, ou
L'abbesse est la supérieure d'une communauté s'il ne s'y en unit pas un assez grand nombre
de religieuses, sur lesquelles elle exerce une au- pour faire plus de la moitié des capitulantes, le
torité à peu près semblable à l'autorité d'un supérieur, avant de confirmer et de bénir celle
abbé sur ses religeux. quia été nommée par le plus grand nombre, doit
Le nom d'abbesse a été donné à la supérieure examiner les raisons de celles qui ne veulent
ABBESSE 15
pas s'unir; et pendant cet examen qui doit se ne doit pas entrer dans le monastère; à cet effet
faire sommairement, sinestrepitu nec figurajudicii, il doit se placer dans un endroit extérieur, d'où,
la religieuse nommée gouverne le temporel et le à travers les grillages, il entende ou reçoive le ;
spirituel du monastère : mais elle ne peut ni alié- suffrage de chaque religieuse.
ner, ni recevoir des religieuses à la profession. « Il entende ou reçoive : Audiat vel accipiat; »
Le concile de Trente, sans rien changer à la de ces mots il suit qu'on ne peut pas faire cette
forme que prescrit le chapitre Indemnitatibus,par élection par la voie secrète du scrutin. La Con-
rapport aux suffrages dans l'élection d'une ab- grégation du Concile l'a décidé de même; mais
besse, veut qu'elle soit âgée au moins de qua- Sixte V, par une constitution particulière, or
rante ans, qu'elle ait huit ans de profession ex- donna que les religieuses de Sainte-Claire n'é-
presse, et qu'elle soit irréprochables dans sa liraient leurs supérieures que par la voie du scru-
conduite; que s'il ne s'en trouve pas dans le tin, conformément au chapitre 6 de la mémo
monastère qui aient toutes ces qualités, le con- session XXV.
cile veut qu'on en choisisse dans un monastère Les canonistes décident qu'une religieuse bâ
du même ordre, et enfin que si cela paraît trop tarde ne peut être élue abbesse sans dispense.
incommode au supérieur qui préside à l'élection, Mais ils ne sont pas d'accord sur la question do
on choisisse pour abbesse dans le même monas- savoir s'il en est de même d'une veuve, d'une
tère une religieuse âgée de trente ans accomplis, bigame et enfin d'une religieuse qui a perdu
et qui depuis cinq ans ait fait preuve de vertus. sa virginité; le plus grand nombre tient la né-
Le concile ordonne de suivre pour tout le reste gative, pour le cas où l'abbesse n'a pas le droit
tes usages et constitutions de chaque monastère. de donner la bénédiction et d'exercer de sem-
[Sess.XXV, de Regul.,cap. 7.1) blables fonctions spirituelles 1. : :
Le même concile veut qu'on n'établisse pas Les abbesses doivent être confirmées et béni-
t'abbesse supérieure de deux monastères, et que tes, comme les abbés, par l'évêque, de qui elle
si elle en a déjà deux sous son gouvernement, sont plus particulièrement sujettes. Mais si elle;
elle se démette de l'un des deux dans l'espace de négligeaient de demander cette bénédiction dans
six mois, sous peine, après ce temps, d'être pri- le cours de l'année qui suit le jour de leur con-
vée de plein droit de l'un et de l'autre. (Loco firmation, elles en perdraient le droit. (Clcr-,
citato.) Le concile de Vernon, de l'an 755, ca- ment. 2, de Statu Monach.)La forme de leur béné.
non 6, prescrivait la même chose. diction est aussi particulièrement prescrite dans
C'est à l'évêque à présider à l'élection des ab- le Pontifical.
besses qui ne sont pas exemptes ou soumises, Par une bulle de Sixte V, toutes les abbesse
par privilège ou par leur règle, à d'autres supé- d'Italie ne peuvent être élues que pour trois an
rieurs. ce qui fait que n'ayant pas le monastère à titrv
Par la constitution Inscrutab'dis du pape Gré- perpétuel, elles ne sont point proprement au .
goire XV, de l'an 1622, il est décidé que l'évê- rang des dignitaires 2.
que peut employer un simple prêtre pour pré- Voirlesmots:Accession,Religieuse, Voix,Election,
Suffrage,
sider à l'élection d'une abbesse, mais sans pré- Bâtard,Bénédiction.
judice au monastère, c'est-à-dire sans frais, § IL Abbesse. Autorité. Droits. Obligations.
comme s'il y présidait lui-même. Cette bulle a Nous n'avons rien dit, sous le mot Abbé, tou-
été suivie d'une déclaration des cardinaux, qui chant l'autorité, les droits et les obligations des;
soumet à la punition des évêques ceux qui sans abbés, qui nepuisse s'appliquer aux abbesses, les ;
leur participation procèdent à l'élection d'une bienséances du sexe gardées : « Officium auteni
ibbesse. abbatissse est idem in suo monasterio quod ab-,
Suivant le concile de Trente (loco citato), l'é- bâtis aut generalis in monachos : quaecunque
vêque ou autre supérieur, qui préside àl'élection, enim competunt abbati, ea ferè omnia locum ;
1.«Abbatissa, etquocunque
et Priorissa alionomme vel habent in abbatissam, exceptis quoe feminsa ré-
Proefecta
Proepositaappellelur,eliguturnonminorannisquadraginta,etqua pugnant 3. »
oetoannispostoxpressam laudabiliter
professionem vixerit.Quod L'abbesse peut donc imposer des préceptes
' si hisqualitalibusnoiireperialurin
eodemmonasterio,exalioejus
domordinis cligipnssit.Sihocetiamincommodum Superiori,qui spirituels à ses religieuses, les corriger quand,
élection)prajest,videatnr,exiisqureinoodemmonasterio annum elles faillissent, leur infliger même certaines,
trigesimum excesseriut,et quinquesattemannispostprofessionempunitions ; mais elle ne peut les excommunier,
rodévixerint, episcopo, velaliosuperioreconsentiente,
eligatur. non plus que les ecclésiastiques qui sont sous sa
Duobus veromonasleriis nullapraeficiatur.
Etsiquaduovelplura
quoeumque modoobliDCl, cogntur,unoexcepto,intrasexmenses 1. Barbosa, deJureeccles.,lib.1,cap.45.
casteraresipoare.l'ost id verotempus,nisi resignaverît,
omnia 2. Fagnan,in cap.Utfilii,deFiliispresbyt.,n.25,36et —
ipsujure .
i.«.t:ni. 3. Darbosa,
lococitato.n.3S.
16 ABIGEAT
juridiction; elle doit recourir aux supérieurs conduire de manière à ne cesser jamais de lui
pour faire prononcer les censures qu'elle croit être utile. L'abbesse et les religieuses doivent
: voir lieu d'obtenir contre ceux ou celles qui respectivement travailler à devenir, par leur
lui désobéissent. «Non tanquam matri, sed tan- vigilance, des vases saints dans le service du
quam proelatse ei promittunt obedientiam mo- Seigneur. L'abbesse principalement ne doit-se
niales. » (Cap.Cum in ecclesiis,de Maj. et Obedient.) distinguer des autres que par ses vertus; elle
L'abbesse jouit donc à ce titre des droits de pré- doit avoir l'habillement et l'entretien des sim-
lature, à l'exception, ainsi que nous l'avons dit, ples religieuses, afin que, marchant dans la
de ceux dont l'exercice ne conviendrait pas à même voie de salut, elle soit en état de rendre
non sexe : comme de visiter les monastères, de bon compte à Dieu du gouvernement dont on
bénir et voiler ses religieuses, de les entendre l'aura chargé 1. »
en confession, de prêcher publiquement, de dis- Toutes les congrégations religieuses defemmes
penser des voeux de ses religieuses ou de les sont entièrement soumises à l'autorité épisco-
commuer (Bullede S Pie V.) pale, d'après un décret du cardinal Caprara, du
La juridiction des abbesses est, comme on le 1erjuin 1803. Ce décret est partout observé en
voit, beaucoup plus limitée que celle des abbés. France.
Elles ne peuvent exercer aucune des fonctions Voirlemot: Religieuse.
qui sont interdites aux personnes de leur sexe,
ni prononcer des censures, ni en absoudre celles
ABDICATION.
qui les ont encourues. (Cap. Nova10, extr. de Poe-
r.it. et remiss.)
En un mot elles n'ont que l'administration L'abdication est, en droit canon, l'acte par le
du temporel de leurs monastères; en ce qui quel on se dépouille du bien que l'on possède.
concerne le spirituel, elles relèvent de l'Evêque C'est dans ce sens que ce mot est employé dans
la Clémentine Exivi de Paradiso, et le chapitre
diocésain.
Le premier capitulaire fait à Aix-la-Chapelle, Cum ad monasterium,de Stat. monach., pour mar-
en1780, défend aux abbesses de donner des bé- quer l'obligation où sont les religieux de ne rien
en propre : « Abdicatio proprietatis,
nédictions, cum manus impositions et signaculo posséder
saiictsecrucis super capita virorum, comme aussi de dit ce dernier chapitre, sicut et custodia casti-
donner le voile, cum benedictionesacerdotalis. tatis, adeo est annexa régulée monachali, ut
contra eam, nec Summus Pontifex possit licen-
Il est permis cependant à une abbesse de dis- tiam
indulgere. »
penser ses religieuses du jeûne ou de l'absti- On se sert aussi de ce mot abdication dans le
nence de certains aliments, selon leur état;mais
elle exerce ce droit, moins en vertu d'une juri- droit canon, pour signifier le délaissement d'un
diction spirituelle, qu'une femme ne peut avoir, emploi, d'un bénéfice; mais, dans une acception
une autorité de raison lui donne la des plus générales, le mot démission est au-
que par que
règle môme approuvée par le pape. jourd'hui consacré en notre langue à cette der-
nière signification.
Les abbesses ont les mêmes droits et le même
Voirlesmots: Pécule,Mendianls, Démission.
Acquisition,
pouvoir que les abbés dans l'administration du
temporel; mais à raison de leur sexe ou des
difficultés de la clôture, les évêques ont sur ABIGEAT.
elles, à cet égard, le droit ou plutôt la charge
d'une particulière inspection. Le droit canon classe l'abigeat, c'est-à-dire le
Cependant elles peuvent, de droit commun, vol de bestiaux, parmi les différentes espèces
mais seulement par procureur, poursuivre en de larcins. (Cap. 19, De Poenit., dist. i.) C'est la
justice la conservation des choses et des droits quantité qui distingue le larcin de l'abigeat.
de leurs couvents. Ainsi celui qui dérobe un porc, un mouton, est
Quand aux devoirs des abbesses, voyez ce que un voleur, mais celui qui dérobe un troupeau
nous avons dit sur le même sujet sous le mot Abbé. est un abigeat.
Nous ajouterons ici le portrait que fait le 1 «Puellarum monasteriis debentfeminai
laiesproeferri et ab-
canon 52 du second concile de Châlon, tenu batissce creari,quoeetseetsubditum gregemcummagnareligione
sous Charïemagne, d'une religieuse digne d'être et sanctitatenoverintcustodire, et his quibusprasunt,proeessa
élue abbesse : « Celles-là, dit ce canon, doivent nondesinant, sedet se illasita observent,ut potevasasanctain
Domini talemenimsedébetabbalissa suh-
être choisies pour être abbesses, en qui l'on re- ministerio proeparata,
ditisexhiberein habitu,investe,in communi uteisad
convictu,
connaît assez de vertus pour garder avec reli- coelestia régnapro his quasin regimineaccepit, inconspectuDo
gion le troupeau qui leur est confié, et pour le minirationem reddituram.»
ABJURATION 17
ABJURATION. cuit sancto concilio ut impositionem manuum
L'abjuration est la déclaration publique par recipientes, sic in clero permaneant. Hsec autem
laquelle on renonce à une hérésie ou à une er- prae omnibus eos convenit scriptis confiteri,
reur; ou, en d'autres termes, c'est le serment quod catholica? Ecclesiae dogmata suscipiant ; id
par lequel un hérétique converti renonce à ses est et bigamis se communicare, et his qui in
erreurs et fait profession de la foi catholique. persecutione prolapsi sunt erga quos et spatia
Cette cérémonie est nécessaire pour qu'il puisse constituta et tempora (poenitentiae) deflnita, ita
être absous des censures qu'il a encourues et ut Ecclesiae dogmata sequantur in omnibus. »
être réconcilié à l'Église. « Abjuratio, secun- (Concil.Nicsen. 1. can. 8.) Le second concile de
dum nominis etymologiam, idem significat Nicée a renouvelé ce canon, en l'appliquant
aux erreurs de ce temps. C'est en vertu de ces
quod jurejurando negare, secundum rem vero,
ut haeresum detestatio cum assertione catho- mêmes principes qu'on oblige toujours les pro-
licse veritatis. » testants qui se convertissent à abjurer les er-
Parmi les abjurations religieuses les plus reurs de la prétendue religion réformée.
connues, nous citerons celle de Henri IV, à Depuis, on exigea des prêtres qui avaient
Saint-Denis, le 25 juillet 1593; celle de Chris- prêté serment à la constitution civile du clergé,
tine, reine de Suéde, à Inspruck, en 1655; celle pour être absous des censures réservées au
de Turenne, en 1668.Ces trois grands person- Saint-Siège , qu'ils rétractassent ce serment
nages abandonnèrent le protestantisme pour d'une manière authentique, qu'ils déclarassent
entrer dans le giron de l'Eglise catholique. qu'ils obtempéraient sur ces choses au jugement
Dans le droit canon, on trouve quelquefois le de l'Eglise, et qu'ils réparassent ainsi le scan-
mot d'abjuration ou d'abjurer, employé en un dale qu'ils avaient donné. Pour les prêtres in-
autre sens. Il y a dans le chapitre Cum haberet, trus, il était requis que leur renonciation et ab-
de Eo qui duxit, etc., « abjurare adulteram »,pour dication de la juridiction qu'ils avaient usurpée,
dire abandonner l'adultère; mais l'usage ne per- fût publique, comme l'avait été leur crime.
met de se former ni doute, ni équivoque sur le C'est ce que portent formellement deux brefs
sens de notre définition. de Pie VI, du 19 mars et du 22 juin 1792.
Les protestants, dit Bergier ', ont souvent Ces brefs semblent avoir été rapportés impli-
tourné en ridicule les conversions et les abju- citement par le Concordat. Ils n'ont plus du
rations de ceux d'entre eux qui rentrent dans le reste aucun objet maintenant.
sein de l'Eglise catholique. Pour prévenir cette Dans les pays d'inquisition, on distinguait
espèce de désertion, ils ont posé pour maxime trois sortes d'abjuration : de formali, de vehe-
qu'un honnête homme ne change jamais de re- menti,et de levi. L'abjuration de formali était celle
ligion. Ils ne voient pas qu'ils couvrent d'igno- qui se faisait par un apostat ou un hérétique
minie, non seulement leurs pères, mais les apô- reconnu notoirement pour tel.
tres de la prétendue réforme, qui ont certaine- L'abjuration de vehementi se faisait par le
ment changé de religion et qui ont engagé les fidèle violemment soupçonné d'hérésie ;
autres à en changer ; ils rendent suspectes les Et l'abjuration de levi par celui qui n'était
conversions des juifs, des mahométans , des soupçonné que légèrement d'hérésie;
païens qui se font protestants ; et leur censure L'abjuration de formali et de vehementise fai-
retombe même sur tous ceux qui se sont con- sait avec certaines formalités particulières. On
vertis à la prédication des apôtres. Leur maxime revêtait le prévenu d'un sac bénit où il y avait
ne peut être fondée que sur une indifférence ab- par derrière la figure d'une croix de couleur
solue pour toutes les religions, par conséquent rouge safranée. On appelait ce sac l'habit de
sur une incrédulité décidée. S. Bénit. On élevait un trône dans l'église,
Dans tous les temps, l'Eglise a exigé des hé- où l'on avait déjà convoqué le peuple; on pro-
rétiques et des schismatiques, prêtres ou laï- nonçait de là un discours relatif à la cérémo-
ques, qui voulaient rentrer dans son sein, l'ab- nie; le discours fini, le coupable faisait son
juration ou rétractation de leurs erreurs. Dès le abjuration, verbalement et par écrit, entre les
temps du premier concile de Nicée, nous voyons mains de l'évêque et de l'inquisiteur.
que les hérétiques étaient tenus de confesser Il était rare qu'on usât de cette cérémonie,
par écrit qu'ils recevaient les dogmes de l'E- qui n'avait lieu que quand de grandes circons-
glise catholique : « De bis qui se nominant ca- tances l'exigeaient.
tharos, id est mundos (species erat novatiano- L'abjuration de levi se faisait en particulier
rum) si aliquando venerint ad Ecclesiam, pla- et en secret, dans la maison de l'évêque et de
1.Dictionnairede théologie
; ABJURATION. l'inquisiteur.
2
18 ABBÉVIATEURS
Il ne faut pas confondre l'abjuration avec ce ABLEGAT
qu'on appelle purgation canonique. L'abjuration On appelle ablegat(du latin legatus,envoyé, ab,
a d'ordinaire une espèce d'hérésie particulière
hors de,) un commissaire spécial chargé par la
pour objet; mais elle se fait généralement de
toutes les hérésies, au lieu que la purgation ne cour de Rome de porter à un cardinal nouvelle-
se fait que de certains délits connus et déter- ment nommé la barrette et la calotte rouges. Ses
fonctions cessent dès que le cardinal a reçu les
minés.
de sa dignité. C'est, en quelque sorte,
L'abjuration sous les distinctions que l'on insignes
vient de voir, n'était pas connue en France, le vicaire d'un légat dont il exerce les fonctions
en pareille circonstance.
parce qu'il n'y a jamais eu d'inquisition. Les
hérétiques quelconques, résolus de rentrer dans ABOLITION.
le sein de l'Eglise romaine, faisaient et font en- On se sert de ce terme pour signifier l'acte ou
core leur abjuration entre les mains des arche- les lettres
ou en retiennent l'acte en par lesquelles un crime est aboli.
vêques, évêques, qui « Abolitio ab aboleo quod idem est quod abs-
bonne forme. Cet acte est ainsi reçu : « N. epis-
Notumfacimus hoere- tergere, intendere, oblivisci. » (Archid., In C.
copus... universis, die....,
sim quam antea profitebatur deposuisse, ac Prsevaricationem,ii, q. 3, n. I.)
fidei catholicae, apostolica? et romanae profes- ABONNEMENT.
sionem juxta formam ab Ecclesia praescriptam
L'abonnementest en général une convention
emisisse, ipsumque a vinculo excommunicatio-
nis solutum, quo propter dictam hoeresim liga- fixe qui réduit à un prix certain ou à une quantité
des choses ou des droits incertains ou in-
tus erat, in Ecclesia catholica receptum fuisse. »
Avant un édit de 1685, les évêques étaient obli- déterminés. Abonner signifie mettre des bornes,
les actes aux parce qu'autrefois on disait bonne pour borne.
gés de remettre d'abjuration gens Un abonnement perpétuel est une aliénation
du roi, pour qu'ils les signifiassent aux minis- à
tres et aux consistoires des lieux où les conver- équipollente une renonciation de droit. De là
tis faisaient leur résidence. ce contrat est défendu aux bénéficiers et autres
Nous devons ajouter que,suivant le concile de administrateurs, hors les cas et sans les forma-
Trente 1, l'évêque est le seul qui puisse absou- lités dont nous parlons sous le mot Aliénation.
dre du crime d'hérésie; il ne peut commettre ABRÉVIATEIJRSI.
personne à cet effet, pas même un de ses grands Les abréviateurssont des officiers qu'on appelle
vicaires. Cependant, en France, les évêques, à Rome de parco, du mot parquet, qui
usant d'un pouvoir plus étendu que leur ac- est le lieuprélats où ils s'assemblent dans la chancel-
corde une ancienne coutume 2 ou comme délé- lerie.
gués du Saint-Siège, peuvent commettre quel- Il y a deux sortes d'abréviateurs, dont les
qu'un pour absoudre de l'hérésie.
fonctions sont différentes : ceux du grand par-
Les rituels indiquent l'ordre à suivre pour ab- de majori parco, et ceux du petit parquet,
soudre un hérétique dans le for extérieur et re- quet, de minori, quoique les uns et les autres soient
cevoir son abjuration 3.
Voirlesmot»: Intrus,Purgation, Apostat. appelés prélats de parco.
Les prélats du grand parquet se trouvent au
1.« LiceatEpiscopis delinquentes quoscumque sibisubditos, parquet de la chancellerie pour juger des bulles,
in dioecesi suaperseipsos, autVicarium, adidspecialiter deputan- c'est-à-dire pour examiner si elles sont expédiés
dum, i n foroconsciente g ratisabsolvere, impositapoenitentiasa-
lutari.Idemet in hseresiscrimine ineodemforoconscientioe eis selon les formes prescrites par la chancellerie
tantum,noneorumVicariis, aitpermissum. »{C.Trid.,Sess.xxiv, et si elles peuvent être envoyées au plomb;
c.6.) ce qui appartient seulement à ceux de majori
t. Mémoires duclergi, tome II, pag. 317.
parco, lesquels encore, au nombre de douze,
3. Prooès-verbal del'abjuration d'unhérétique : dressent toutes les minutes des bulles qui
PardevantN..., {lesnom,prénoms, qualitéet demeure duprêtre),
s'estprésenté N..{nom, prénomsetcondition du nouveau converti s'expédient en chancellerie, dont ils sont
oudela convertie), de la paroissede....,diocèsede...,âgé (ou obligés de suivre les règles, qui ne souffrent
âgée)de..., quiayant reconnuquel'Eglisecatholique, aposto- luiavoirdonnéle baptême souscondition,à ce dûmentautorisé),
liqueet romaineestlavéritableEglisede Jésus-Christ, laseule dansl'Eglise de...,suivantla formedes cérémonies prescrites
par
héritièredes promesses et del'autoritédecedivinsauveur,de le rituel,envertudupouvoir queMgrl'Evêque nousa donnéà cet
sa proprevolonté et sansaucune contrainte,mais uniquement effet,endatedu..., et enprésencede N....et de N...,témoins
pourassurersonsalut,a demandéavecinstanced'êtrereçu au {leursnoms, prénoms, professionset domiciles), ont signé
lesquels
nombre desenfantsdeladiteEglise, et a abjurél'hérésie deLuther avecnouset lenouveauconverti(oula nouvelle convertie),
(ou
(ou deCalvin o u d e
de...), laquelle n ous luiavons donné l'absolu- bien: et nonlenouveau convertioula nouvelleconvertie, qaiu
tion,aprèsnousêtreassurédelavalidité desoubaptême (ouaprès déclaré nelavoirsigner,deceinterpellée),
ABBÊVIATIONS 19
point de narrative conditionelle ni aucune clause tions pour les copistes leur en a toujours fait
extraordinaire. C'est pourquoi, lorsqu'il est be- conserver la pratique, à Rome plus qu'ailleurs ;
soin de dispense d'âge ou de quelque autre de sorte que les abréviations sont devenues de
grâce, il faut nécessairement passer et expédier style dans les expéditions de chancellerie ro-
par la Chambre ; et en ce cas le sommiste, qui maine ; elles sont écrites sans seni oe,sans points
est un prélat officier de ladite Chambre, dresse et sans virgules; et si une bulle ou une signa-
la minute des bulles. ture était autrement écrite, il y en aurait assez
Les abréviateurs du petit parquet, de minori, pour la faire rejeter, comme suspecte de fausseté.
n'ont presque aucune fonction, quoiqu'ils soient Les brefs sont écrits plus correctement.
en plus grand nombre. Ils ne font que porter Le pape Léon XIII vient d'ordonner que les
les bulles aux abréviateurs de majori, et sont bulles soient écrites en caractères ordinaires et
proprement de ces officiers qu'on appelle officiâ- ne contiennent plus que des abréviations faciles
tes otiosi.Mais les bulles des papes qui accor- à comprendre, par exemple : Aplicam Benednem,
dent aux abréviateurs les qualités de nobles, de pour Apostolicam Benedictionnem.
comtes palatins et de familiers du pape, et plu- Gomme l'on peut être dans le cas de lire des
sieurs autres droits, ne font aucune distinction anciennes expéditions de Rome, écrites en
des abréviateurs du grand parquet d'avec les abrégé, nous donnons ici la formule, d'après
autres. Par une bulle même de Sixte IV, de l'an celle que l'on trouve dans le petit Traité des usages
1478,il est dit que l'on monte au grand parquet de la cour de Rome. Cette formule, quoique la
après avoir passé par le petit. Cette même cons- plus ordinaire, n'est cependant pas invariable.
titution déclare que ces offices n'ont rien d'in- Nous observerons que, par une règle de chan-
compatible avec d'autres offices; que le pape con- cellerie, il est défendu de mettre les dates et
fère les uns et le vice-chancelier les autres, etc. les chiffres des rescrits en abrégé.
Le titre d'abréviateur a été donné à ces of- Du reste, il est une sorte d'abréviations dont
ficiers à raison de ce qu'ils dressent les minu- on se sert pour citer les autorités du droit. Nous
tes et les bréviatures des lettres apostoliques : en donnons l'explication sous le mot : Citation.
« A conficiendis litterarum apostolioarum bre- A
viaturis sive minutis. » AA. anno.
Voirlesmots: Plomb,Sommiste. i
Aa. anima.
ABBEVIATIONS. Au. de Ca. auri de camerâ.
Ab. Abbas.
On appelle abréviations des notes ou des ca- Abs. ou Ab. absolutio.
ractères qui suppléent les lettres que l'on re- Abrie. absolutione.
tranche pour abréger. Abns. abs. absens.
On usait anciennement de deux sortes d'abré- Absolvën. absolventes.
viations : l'une se faisait par des caractères de Accu, accusatio.
l'alphabet, et l'autre par des notes. La première A. Gen. à censuris.
ne conservait que la lettre initiale d'un mot, Adheren. adhserentium.
ce qui s'appelait écrire per sigla ou singla. Ainsi Admitt. Admitten. admittmtes.
écrire S. P. Q. R. pour senatus populusqueRoma- Ad no. prses. ad nostram prxsentiam.
nus, c'était écrire per singla, ou abréger par des Adridr. adversariorum.
caractères. « Singla ou singula sunt singularise Adrios. adversarios.
litteroe » dit Cujas. AEst.sestimatio.
La seconde sorte d'abréviations se faisait par Affect. affectus.
des notes marquées par des caractères autres Affin. affinitas.
que ceux des alphabets, et qui signifiaient des Aiar. animarum.
parties de phrases tout entières. C'était là pré- Aiùm. animum.
cisément écrire en notes, et c'est cet art que Al. alias.
pratiquaient ceux qui ont été appelés notaires. Aliâ. aliam.
Justinien défendit d'écrire le Digeste en Alinatne alienatione.
abrégé et étendit cette défense aux écrivains Aliquodo. alioquomodo. j
publics pour toutes sortes d'écrits. Almous altissimus.
Si ces lois eussent entièrement aboli l'usage Alr. aller.
des abréviations, on n'aurait pas eu tant de Als. pns. grâ. alias proesensgratia.
peine à entendre et à traduire plusieurs anciens Alter. altûs. alterius.
monuments ; mais la commodité de ces abrévia- Ann. annuatim.
20 ABRÉVIATIONS
Ann. annuum. Cas. causas.
Annex. annexorum. Caus. causa.
Appel, rem. appellationeremotd. Cen. eccles. censura ecclesiastica.
Ap. obst. rem. appellationis obstaculoremoto. Cens, censuris.
Aplicam. Apcam. Apostol. apostolicam. Gerdo.cerf. m. certo modo.
Ap. sed. leg. ApostolicxSedis legatus. Ces°, cessio.
Appatis. aptis. approbatis. Ch. Christi.
Approbat. approbem. approbationem. C. civis.
ApprobO. approbatio. Circumpeôni. circumspectioni.
Arb3. arbitrio. Cister. Cisterciensis.
Arch. Archidiaconus. Cle. clarx.
Ap. Arcpo. Archopo. Archiepiscopo. Cla. clausula.
Archiepus. Archiepiscopus. Claus. clausa.
Arg. Argumentum. Clico. Clerico.
Asseq. assequuta. Clis. clausulis.
Assequëm. assequutiô". assequutionem. Clunia. Cla. Cluniacensis.
Attata. attentata. Co. com. communem.
Attator. attentatorum. Cog. le. cognatiolegalis.
Attent. atto. att. attente Cog. spir. cognatiospiritalis.
Au. auri. Coga. cogn. cognofa. cognomina.
Auctë. authorit. uuthoritaie. Cogên. cognomen.
Audiën. audientiutn. Cohâo. cohabitatio.
Augen. augendam. Cog". cognominatus.
Aug"1. Augustini. Coïïgis. cogtis cons. consanguinitatis.
Authen. authentica. Coîone. communione.
Aux. auxiliares. Coittatur. committatur.
Aux 0, auxilio. Collât, collatio.
Colleata. Golleg. collegiata.
B
Collitigan. collitigantibus.
BB. Benedictus. Coll. collitigantium.
Beatiss. Beatissime. Com. communis.
Beat"". Pr. BeatissimePater. Comdamcommendam.
Bed". benedtï. benedicti. Comdtus commendatus.
Ben. benedictionem. Commr. Epô. committatur Episcopo.
Benealibus. beneficialibus. Competem. competentem.
Beneùm. beneficium. CCn. contra.
Benelos. benevolos. Conc. concilium.
Benevol. benevolentia. Confeone. confessione.
Benigt". benignitate. Confeori. confessori
Bo. mem. bonx mémorise. Concone. communication.
C Coiilis. conventualis.
Câ. eam. caméra. Conriis. contrariis.
Caâ. câ. causa. Cons. consecratio.
Cais. aium. causis animarum. Cons. t. r. consultalionitaliter responlelk'
Canice. canonicè. Conscioe.conscienfise.
Canflcor. canonicorum. Consequèn. consequendum.
Canon, canonicatum. Conservan. conservando.
Canon, reg. canonicusregularis. Cosne. concessione.
Can. sec. canonicussecularis. Consit. concessit.
Canôtus. canonicatus. ConstbM.constitutionibus.
Cartria. cancellaria. Constitution, constitutionem.
Consu. consensu.
Capel. capella.
Capel. capellanus. Cont. contra.
Capna. capcllania. Coêndarent. commendarent
Car. causai'um. Coeretur. commendaretur.
Card. Cardilis. Cardinolis. Cujuscumq. cujuscumque.
ABRÉVIATIONS 21
Cujuslt. cujuslîbet. Epô. Episcopo.
Gur. Curia. Epûs. Episcopus.
D Et. etiam.
D. N. PP. DominiNostri Papx. Ex. extra.
D. N. DominiNostri. Ex. Rom. Gur. Extra. RomanamCuriatn.
Dât. datum. Ex. val. existimationemvalons.
Deât. debeat. Exat. exist. existât.
Decrô. décrète Excôe. excommunicatione.
Decrû'm. decretum. Excofs. excommunicationis.
Dêfcti. defuncti. Excom. excommunicatio.
Defivo. definitivo. Execrab. execrabilis.
Denomin. denominatio. Exens. existens.
Dénommât., denom. denominationem. Exist. existenti.
Derogât. derogatione. Exit. existit.
Desup. desuper. Exp. expmi. exprimi.
Devolfft. devol. devolutum. Exp0». exprimend. exprimenda.
Die. dioecesis. Expis. express, expressis.
Die. dictam. Exped. expediri.
Dignf. digfi. dignemini. Exped. exped" 1. expeditioni
Dil. fil. dilectusfilius. Expe4*. expedienda.
Dipn. dispotitione. Exprès, expressis.
Dis. ves. discretionivestrx. Exp°. express, expressio.
Discreôni. discretioni. Exten. extendendus.
Dispao. dissipatio. Extend. extendenda.
Dispën. dispendium. Extraordin. extraordinario.
Dispens. dispensao. dispensatto. F
Disposit. dispositive. Facien. facin. facientes.
Diversôr. diversorum. Fact. factam.
Divor. divortium. Famari. famulari.
Dfli. Dom. Domini. Fel. felicis.
Dnicae. Dominiez, Fel. rec. pred. n. felicisrecordationis prxdecessoris
Dno. Domino. nostri.
D., Dns., Doms. Dominus. Festuibus festivitatibus.
Dotât, dotatio. Fn. for. fors, forsan.
Dotate., Dot. dotatione. Foa. forma.
Dr. dicitur. Fol. folio.
Dte. dicte. Fr. frater.
Dti. dicti. Fraem. fratrem.
Duc. au. de ca. Ducatorumauri de camerâ. Frantls. franciscus.
Ducat. Ducatorum. Frat. fraternitas.
Ducën. ducentorum. Fruct. fructus.
Dùm ret., dùm viv. dùm vivent. Fructib. fruct. fructibus.
E Frûm. fratrum.
Ea. eam. Fundat. fundatio.
Eccl. Rom. EcclesiaRomana. Fundat. fundatum.
Eccleium. Ecclesiarum. Fund*. fundne. fundaëne. fundatione.
Ecclesiast. Ecclesiasticis. G
Ecclia., Eccl. Ecclesia. Gêner, gïïalis. generalis.
Ecclis. Ecclicis. Ecclesiasticis. General, generalem.
Ee. esse. Gnatio. generatio. <1-
Effûm. effect. effectum. Gnli. generali.
Ejusd. ejusdem. Gnlr. general, generaliter.
Elec. electio. Gnra. gênera.
ëm. enim. Gra. grat. gratia.
Emoitum. emolumentum. Grad. affin. gradus a ffinitas.
Eod. eodem. Grar. gratiurum.
S3 ABRÉVIATIONS
Grat gratiosx. Lit. litis.
Gratifie, gratificatio. Litig. litigiosus.
Graf". gratificatione. Litigios. litigiosa
Grc. gratim. Litma. légitima.
Gras*, gratiosê. Litt. littera.
H Litterar. litterarum.
Hab. habere. Lo. K6ro.
Hab. haberi. Lre. litterx.
Habeant, heantur. habeantur. Lris. litteris.
Haben. habentia. Ltè. ta'tè.
Hactus. hactenus. Ltimo. légitime
Het. habet. Ludca».Ludouicus.
llere. habere. M
Hita. habita. M. monetx.
Hoe. Itomine.
Maa. materia.
Homici. homicidium.
Magist. Magister.
Hujusm. huoi. luimoi. hujusmodi.
Humil. humilit. bumlr. hurniliter. Magro. magislro.
Mand. mandamusvel mandatum.
I Mand. Q. mandamusquatenus.
I. infrà. Manib. manibus.
Id. idus. Mediet. medietate.
Igr. igitur. Medtè. médiate.
Illor. illorum. Mens, wiensis.
Immun. tmtnunitar. Mir. misericorditer.
Inipctruii. impetrantium. Miraone. miseratione.
Jmponem. imponendis. Mniri. ministrari.
] nipot I. importante. Mo. modo.
Jncipi. incipiente. Mon. can. proem. monitionecanoniedprsemissa.
lufraptum. infrà scriptum. Monrium. monasterium.
Infrascript. intrape. infrà scripte. Moven moventibus.
Intropla. intro scripta. Mrimonium. mtmon. matrimonlum.
Invocaone. invocatione.
Jnvocal, invocaoum. invocationum. N
Irrcgullo. irregularitate. Nri. nostri.
1s. idibus. Naa. natura.
J Nativitm. nativitatem.
Janunr. januarius. Necess. necessariis.
Jocs. Joannes. Necessar. nerior. necessariorum.
Jud. judicium. Neria. necessaria.
Jud. jud™.judicum. No. non.
Jur. juravit. Nobil. nobilium.
Juris. part, juris Patronatus. Noen. nomen.
Jurto. juramento. Noia. noa. nom. nomina.
Jux. ;uita. Nonobst. nonobstantibus.
Nost. nostri.
S Nol. notandum.
Kal. Kl. calcnias. Nol. nota, notitia.
L Notar. notarié
Laic laicus. Noto. pubco. notariopubliée
Laicor. tafeorum. Nra. nostra.
Latiss. latme. latissimè. Nul tus. nullatenùs.
Legit. légitimé. Nuncup. nuncupatum.
Legit. legitimus. Nuncupat. nuncupationum.
Legma. légitima. Nuncupe. nuncupate.
Lia. licentia. Nup. nuper.
Liber, itoer vel K&ro. Nup. nuptim.
ABRÉVIATIONS 23
0 Pndit. prxtendit.
0. Non. Pnt. possunt.
Obbat. obtinebat. Pntia. prxsentia.
Obbit. obitum. Pntium. prxsentium.
Obit. oôitus. Pntodum. prxtento standum.
Obrieri. obtineri. P°. seu 1°. primo.
Obnet. obt. obtinet. Podtus. primodictus.
Obst. obstaculum. Poen. poenit. poenitentia.
Obstan. obstantibus. Point, poss. possint.
Oblin. obtinebat. Pontus. pontificatus.
Octob. octobris. Poss. possit.
Occup. occupatam. Poss. possonë. possessionem.
Ocs. omnes. Possess. possessione.
Oll'ali. officiait. Possess. possor. possessor.
Ofiluni. officium. Poten. potentia.
Oi. omni. Ppum. perpetuum.
Oib. omn, omnibus. Pr. pater.'
Oio. oino. omn. omnino. Proeal. prxallegatus.
Oium. om. omnium. Prseb. prxbenda.
Oppls. opportunis. Proebend. prxbendas.
Oppo».oppoit. opporlMno Prsed prxdicta..
Or. orat. orator. Proefer. prxfertur.
Orat. oraforia. Praem. prxmissum.
Orce. orace. oratrice. Proesen. prxsentia.
Ordi»*.ordinationib* Proet. prxtendit.
Ordin. ordio. ordina Pred'. prxdicitur.
Ordis. ordinis. Pred"". prxdictus.
Orclris. ordinariis, Prim. primam.
Ori. oratori. Primod. primodicta.
Oris. oratoris. Priotuus. prioratus.
Orx. oratrix Procurât, pror. procurator.
P Prori. procuratori.
PP. Pap». Prov. provisionis.
Pa. Papa. Provione. provtsume.
Pact. pactum. Proxos. proximis.
Pudlis. prxjudicialis. Pt. potest.
Pam. primam. Pt. prout.
Parochial. Parolis. parochialis. Ptam. prxdictam.
Pbr. Presbyt. presbyter. Ptr. ptur. prxfertur.
Pbrecidn. presbytericida. Pttur. petitur.
Pub. publico. .
Pbri. presbyteri.
Pcepit. percepit. Purg. cano. purgatio canorpga,
Penia. poenitentia. Puidere. providere.
Peniaria. poenitentiaria. Q
Pcniten. poenitentibus.
Pens. pensione. ''h
Penult. penultimus. Qd. qu. quod.
Perinde val. perinde valere. Qm. qon. quondam.
Qmlt. quomolt. quomoâolibet.
Perpuam. perpétua»». Qtnus. qtus. quatenùs.
Perqo. perquisitio. Qualit. qualitatum.
Persolven. persotoenda-
Quat. quaten. quatenùs.
Pet. petitur.
Quoad. vix. quoad vixerit.
Pfessus. professus.
Pinde. perinde. Quod0. quovismodo.
Pmissor. prxmissorum. Quon. quondam.
Pn. pns. prxsens. Quor. quorum.
24 ABREVIATIONS
R Slaris. Sxcularis.
11.Rta. registrata. Slm. salutem.
Rec. recordationis. S. M. M. Sanctam. Mariam Majorent
Reg. régula. Snia. sententia.
Regul. regularum. Snta. Sta. sancta.
Relione. religione. Snti. sati. sanctitati.
Rescrip. rescriptum. Sollic. sollicitatorem.
Resdsm.residentiam. Solit. solitam.
Réservât, reservata. Solut. soluti'. soluonis.. solutioni*
Réservât, reservatio. Sortile. sortilegium.
Resig. Resig 0. resignatio. Spealem. specialem.
JEtesignation. rtsiynationem. Spealer. specialiter.
Resig" 0. resignatione. Speali. speciali.
Resig". resignarc. Spec. specialis.
Res°. reservatio. Specif. sp°. speci/tcatio.
Restois. restitutionis. Spualibus. spiritualibus.
Retroscript- Rtùs. retro-scriptus. Spu. spiritu.
Rgnet. resignet. Spus. spiritus.
Rlaris. regularis. Stat. status.
Rla3. regulx. Substanlis. substantialis
Rlium. regularium. Subvent. subvnis. subventionis.
Rntus. renatus. Suce, succores. successores.
Robor. roboratis. Sumpt. sumptum.
Rom. Romanus. Sup. suprà.
Roma. Romana. Suppat. supplie, supplicat
Rulari. regulari. Suppantls. suplicantibus.
Supplicaonis. supplicatitmts.
S Suppne. supplicatione.
S. sanctus. Suptum. supradictum.
S. P. sanctum Petrum. Surrog. surrogandus.
S. sanctitas. Surrogan. surrogandis.
S. R. E. Sancta;Romanx Ecclesix. Surrogaonis. surrogat. surrogationis.
S. V. Sanctitate Vestrx. Suspen. suspentionis.
S. V. Or. Sanctitali Vestrx Oratori. T
S», suprd.
Sacr. une. sacra unctio. Tangen. tangendum.
Tant. Tm. tantum.
Sacror. sacrorum.
Soecul. sxcularis. Temp. tempus.
Ten. tenore.
Saluri. salri. salutari. Tenen. tenendum.
Sanctit. sanctitatis. Terno. termino.
Sanctmo. P*. SanctissimePater. Test, testimonium.
Sartum. Sacramentum. Testib. testibus.
Se. co. ex. VML«Bujweundùmcommunemexistima-
Thia. Theolia. Theologia,
tionemvaianm«tmuum. Tit. Tli. tituli.
Sec. secundum.
Tn. tamen.
Sed. A^.Ai$s4^fm$i»iicx.
Sen. sadwtHs. Tpore. tempore.
Sen. exco. Sententia excommunicationis. Tpus. tempus.
Sentent, sententiis. Trecen. trecentorum.
Séparât, separatim. U
Sign. signatura. Ult. ultima.
Silem. stmilem. Ult. pos. ultimus possessor.
Silibus. similibus. Ulti. ultimi.
Simpl. simplicis. Ultus. ultimus.
Singttl. Slorum. singulorum. Ursis. universis.
S». Sitam. Usq. usque.
ABROGATION, ABROGER 25
V tingue de l'abolition qui ne peut jamais être
V. vestra. partielle, et qui a lieu aussi bien par la volonté
Vr. vester. législative que par désuétude.
V. Vre. vestrx. En droit canonique, une loi, un canon se
Vacan. vacantem. trouve abrogé :
Vacan. vacantibus. 1° Par une coutume contraire : « Sicut enim
Vacaonum. vacationum. moribus utentium in conlrarium, nonnullse
VacatDi».vacaonis. vacutionis. leges hodiè abrogatoe sunt, ità moribus uten-
Val. valorem. tium ipsse leges confirmantur. » (Can. In istis, §
Venebli. venerabili. Leges, dist. 4.)
Verisile. verisimile. 2° Par une constitution nouvelle et opposée
Verusq. verusque. «posteriores leges derogantprioribus, » (Can.In
Vest. vester. istis, § Leges, dist. 4) émanant d'un pouvoir sou-
Videb. videbr. videbitur. verain. Or, comme la souveraine autorité se
Videl. videlicet. trouve, soit dans le Pontife Romain seul, soit
Viginti quat. viginti quatuor. dans le concile oecuménique légitimement réuni
X sous ses ordres, il est permis de déroger indiffé-
remment soit aux canons des conciles par des
XPti. Christi.
constitutions pontificales, soit aux constitutions
Xptianorum. Christianorum.
pontificales par des canons des conciles généraux.
Xpni. Christiani. De même, les statuts des légats apostoliques,
XX. viginti. les canons des conciles soit nationaux, soit pro-
Les noms des diocèses s'abrègent de cette ma- vinciaux, les décrets des évêques diocésains
nière : Parisien. Rothomag. Lugdunen. Senon. portés soit dans le synode, soit en dehors du
pour Parisiensis,Rothomagensis,Lugdunensis,Seno- synode, peuvent être modifiés par de nouveaux
nensis, etc., comme on le verra au mot: Diocèse. statuts des légats apostoliques, par de nouvelles
En France, les abréviations sont défendues aux décisions des conciles nationaux ou provinciaux
notaires dans leurs contrats ; s'il leur en échappe et par de nouveaux décrets synodaux ou épis-
à la rapidité de la main, il faut qu'elles ne copaux.
tombent ni sur les noms propres, ni sur les Il faut seulement remarquer à cet endroit
sommes, ni sur les dates, ni enfin sur aucune qne, comme dans le système du régime de l'É-
partie essentielle de l'acte; par où il paraît que glise, il se trouve des législateurs supérieurs à
la règle de chancellerie dont nous avons parlé d'autres législateurs, et que l'autorité des infé-
a été adoptée par notre jurisprudence. (Loi du rieurs est virtuellement ou éminemment ren-
25 vent, an XI, art. 13; Codecivil, art. 42.) fermée dans celle des supérieurs, il s'ensuit que,
ABROGATION. ABBOGER. quelquefois, l'autorité du supérieur peut casser
ou abolir une loi, même sans le fait propre de
| C'est détruire une loi, l'annuler, la changer l'autorité qui l'avait immédiatement portée.Mais,
ou l'effacer entièrement. On ne dit pas abroger en général, on voit toujours que c'est la même
une coutume, mais supprimer une coutume. autorité qui a porté les lois, qui les abolit au
L'abrogation peut être expresseou tacite.Elle est besoin.
expresse lorsqu'elle est littéralement prononcée 3° Par la cessation de cause : « Cessante causa,
par une loi nouvelle; tacite, si une loi vient à cessât lex. » (C. Neophytus,dist. 61.)
être portée qui, sans déclarer que la précédente 4° Par le changement des lieux: « locorum
est abolie, contient cependant des dispositions varietate. » (C. Aliter, dist. 31.)
nouvelles tout à fait contraires aux anciennes, 5° Parce que le canon est trop rigoureux :
ou si l'ordre de choses pour lequel la loi avait « Nimio rigore canonis. » (C. Fraternitatis, dist.
été faite est anéanti. Elle est encore ou totale ou 34.)
partielle : totale, lorsque la loi nouvelle remplace 6° A cause du mal qui en résulte « propter
l'ancienne dans toutes ses dispositions; partielle, malum indè sequens. » (C Quiasancta, § Verùm,
lorsque cette loi nouvelle prononce l'annulation dist. 63.)
de quelques dispositions de la première, et On peut réduire ces différentes causes à ces
laisse l'ensemble en vigueur. Dans ce dernier trois : 1° à l'usage contraire établi par la loi
cas, l'abrogation se rapproche de la dérogation, ou par la coutume; 2°à la différence des temps,
qui laisse subsister la loi antérieure, ou du des causes et des lieux; 3° aux inconvénients
moins ne l'abolit qu'en partie. Mais elle se dis- qui en résultent.
26 ABSENCE
L'abrogation est une des voies par où finissent rend sa présence nécessaire : « Episcopus qui
les censures; ce qui arrive, 1° par une loi con- non est in domo episcopali et alius quilibet be-
trire, émanée d'une égale ou plus grande auto- neficiarius, quando non debitam praestat resi-
rité : comme cela a lieu pour les décrétâtes des dentiam in loco beneficiario. » Pour les élec-
papes et les canons des conciles généraux tou- tions, de quelque manière que l'on soit absent,
chant les mariages clandestins, abrogés par le « modo séparent parietes, » on est toujours
concile de Trente. censé absent.
2° Par la coutume contraire : les canons pè- C'est au juge ou à ceux qui ont l'autorité à
nitentiaux ont fini par la coutume de plusieurs déterminer le caractère des différentes sortes
siècles sans y soumettre ceux qui y étaient com- d'absence, lorsque les lois et les canons ne dé-
pris. cident rien, pour le cas particulier dont il s'agit 1.
3° Par la révocation de l'ordonnance qui a Un bénéficier qui est absent du lieu où son
porté la censure : ainsi les privilèges accordés bénéfice demande qu'il réside, perd ou son bé-
aux religieux de confesser sans l'approbation néfice, ou les fruits et les distributions dudit
des évêques ou autres semblables, ont fini par bénéfice, selon la nature de son absence. Si elle
les décrets du concile de Trente et par les bul- est absolue, sans cause et sans retour, il y a
les qui les ont révoqués. lieu à la privation du bénéfice, selon les cir-
4° Par la cessation de ce qui a porté à ordon- constances.
ner la censure : c'est ainsi que les canons faits Si l'absence n'est que momentanée, mais sans
pour le temps de schisme ont fini avec le schisme juste cause, il y a lieu en ce cas à la perte des
même. distributions.
5° Par le non usage, qui vient du défaut d'ac- Les constitutions des papes mettent au nom-
ceptation de la loi qui l'ordonne. Il est à re- bre de ceux qui gagnent en leur absence les dis-
marquer que toutes ces différentes formes d'ab- tributions de leurs bénéfices, les auditeurs de
rogation ne peuvent jamais convenir à la cen- Rote, les inquisiteurs de la foi, les collecteurs
sure ab homine. apostoliques et d'autres officiers de la cour de
Voirlesmots: Coutume,
Canonspénitentiaux,
Censure. Rome travaillant dans les affaires de dépouille
au profit de ladite cour et autres. (Constitutions
ABSENCE. de ClémentVU, Paul III, Pie V, Sixte V.)
L'a&sence,en général, est l'état d'une personne Tous les pasteurs sont obligés à la résidence,
qui a disparu du lieu de sa résidence, de la- comme nous verrons au mot : Résidence. Ce-
quelle on n'a pas de nouvelles, et dont par pendant ils ont des causes légitimes pour s'ab-
conséquent l'existence, ou la mort est incertaine. senter quelquefois de leurs églises : comme les
Le présumé absent est celui qui a disparu du conciles, les ordinations des évêques et les con-
lieu de sa résidence sans qu'on ait reçu de ses sécrations des églises; quelques-uns même, dans
nouvelles, et dont l'absence n'a pas encore été les meilleurs temps, comme le remarque Fleury,
déclarée. Il ne faut pas confondre l'absent, ni allaient à la cour du prince solliciter les affai-
le présumé absent, avec celui qui est seulement res de leurs églises ou des pauvres et des per-
éloigné de son domicile, et dont on a des nou- sonnes opprimées ; mais ces absences n'étaient
velles. Celui-ci est appelé suivant le langage du ni longues ni fréquentes, et les évêques absents
droit non présent. menaient une vie exemplaire, et s'occupaient si
Il est différentes sortes d'absence dont l'ap- saintement dans les lieux de leur séjour, que
plication se fait en droit selon les différents cas l'on voyait bien quel esprit les conduisait.
qui intéressent les absents ; par exemple, en Le concile de Trente a ordonné qu'un évêque
matière de présomption, on ne considère que ne pourrait s'absenter de son diocèse plus de deux
l'absence du ressort ou de la province. ou trois mois, sans quelque cause pressante de
Pour les assignations en procédure, celui qui charité, de nécessité, d'obéissance, ou d'utilité
ne se présente pas est absent, fût-il dans sa évidente de l'Église ou de l'État; et que, dans ces
maison, au barreau même, s'il ne paraît pas : cas, il devrait avoir permission par écrit du pape,
« Qui non est in jure, et si domi sit, vel in foro, ou de son métropolitain, ou du plus ancien suf-
vel in horto ubi latitat. » Pour constituer procu- fragant; que, dans tous les cas, il devrait pour-
reur, il faut être au moins hors de la ville, voir à son troupeau, afin qu'il ne souffrît point
" extra continentiam urbis. » Enfin par rapport par son absence, et faire en sorte de passer l'a-
à notre sujet plus particulièrement, l'évêque vent, le carême, et les fêtes solennelles dans
est censé absent s'il n'est pas dans son palais, son église cathédrale. Ce concile déclare que les
ainsi qu'un bénéficier au lieu où son bénéfice 1. Moneta,deDistributionibue part.II, q. ».
quotidianis,
ABSENCE 37
contrevenants pèchent mortellement, et ne peu- leurs chapitres et enfin les chanoines absents
vent en conscience prendre les fruits (aujour- par ordre du pape, ou exempts de résidence
par
d'hui s'appliquer leur traitement ecclésiastique) privilège de Sa Sainteté, gagnent leurs distri-
du temps de leur absence; mais qu'ils doivent butions absents 1.Il en est encore de même des
les appliquer aux fabriques des églises, ou aux chanoines malades ou infirmes par la caducité
pauvres des lieux. Il étend la même peine aux de l'âge, ou autrement.
curés et autres titulaires ayant charge d'âmes : Les chanoines malades ne doivent rien per-
il leur défend de s'absenter sans la permission dre. (Cap. Cùm percussio, 1 extr. de Cleric. xgrot.)
par écrit de leur évêque, et permet à l'ordinaire La maladie est une excuse légitime. (Cap. Ad
de les obliger à résider, même par privation audientiam, 15extr. de Cleric. non residentib.) Les
de leur titre 1. conciles de Bordeaux, en 1582, de Bourges, en
Les chanoines absents pour l'utilité évidente 1584,et d'Aix, en 1585, adjugèrent pareillement
de leurs églises, ou à cause des fonctions ecclé- les distributions quotidiennes aux malades, c'est
siastiques de leurs dignités, comme l'archidiacre aussi l'avis de tous les canonistes et detous les
en visite, le pénitencier, le théologal, un cha- auteurs. En général, il faut regarder comme pré-
noine-curé, un administrateur d'hôpital, les sent quiconque est absent,«necessitate cogente.»
chanoines à la suite de l'évêque, ou employés Les chanoines malades on infirmes par la ca-
par lui dans le diocèse, ceux qui assistent aux ducité de l'âge ou autrement, de manière à ne
conciles, aux synodes, ceux qui plaident contre pouvoir sans imprudence assister aux offices
1. Quoniam autem,qui aliquantisper tantumabsunt,exvete- divins, gagnent les distributions quotidiennes
rumCanonum sententia nonvidentur abesse,quiastatimreversuri et manuelles dans leur absence, quoiqu'ils fussent
sunt: saorosanota Synodus vultilludabsentioe spatiumsingulis an- malades par leur faute, pourvu qu'ils soient as-
nig,aive sive
continuum, interruptum,extraproedictas causas,nullo sidus aux offices quand ils se
pactodebereduos,aut ad summum trèsmensesexcedere, etha- portent bien; c'est
berirationem, utidoequa excausaflat,etabsqueullogregisdetri- la décision unanime de tous les canonistes 2,
menlo;quodanita sit, abscedentium eonscientioe
reliquit,quam fondée sur le chapitre Cùm percussio, extr. de
speratreligiosam et timoratam fore,cumDeoeordapateant,cujus Cleric.xgrot.
opusnonfraudulenter agere,suopericulo tenentur.Eosdem inte-
madmonet, etin Domino hortatur, neperilliustemporis spatium Barbosa (loc.cit., n. 65), décide encore, après
Dominici Adventus, Quadragesimoe, Nativitatis,Resurrectionis Do- plusieurs auteurs, que les bénéficiers, qu'une
mini,Pentecostes itemet CorporisChristidiebus,quibusrefici juste crainte ou une injuste violence empêche
maxime, et inDominogauderePastorisprssentiaovesdebeant, de
ipsiabecclesia suacathedrali ullopactoabsint,nisi Episcopalia résider, gagnent leurs distributions; par
muniain suadioecesi eosaliovooent. exemple, s'ils sont pris ou retenus par des en-
Siquisautem,quodutinamnunquam eveniat,contrahujusde- nemis, ou s'ils n'osent s'exposer à tomber entre
eretidispositionem abfuerit; statuitsacrosancta Synodus, proeter leurs mains, si la peste est dans le lieu de leur
aliaspoenas adversusnonrésidentes, sub PauloIII impositaset résidence. Dans ces cas et d'autres semblables,
innovâtes, acmortalispeccati reatum,quemincurrit,eumprorata
temporis absentioe,fructussuosnonfacere,nectuta conscientia, dit-il, les auteurs décident qu'ils doivent être
alia etiamdeclaratione nonsecuta,illossibidetinere posse; sed réputés présents. Nous pensons, nous, qu'un bé-
teneri,autipsocessante, per Superiorem eeclesiasticumillosfa- néficier, surtout s'il a charge d'âmes, n'aurait pas
bricoe ecclesiarum, autpauperibus locierogare,prohibita quacum- droit à ses distributions s'il s'absentait volon-
queconventione velcomposiUone, quoeprofructibus mateperce-
ptisappellatur ; ex quaetiamproedicti fructusin totum,aut pro tairement dans un temps de peste.
parteei remitterentur, nonobstantibus quibuscumque privilegiis Enfin, les chanoines employés par l'évêque aux
quicumque a ut
cullegio fabricoe concessis.
Eademomnino, etiamquoadculpam,amissionem fructuum, et missions et prédications dans le diocèse, sont
poenas decuratisinferioribus, et aliisquibuscumque, quibeneâ- réputés présents au choeur, et gagnent toutes
eiumaliquodeeclesiasticum, euramanimarumhabens,obtineni, les distributions, tant quotidiennes que manuel
sacrosancta Synodus déclarât et decernit;ita tai.en,ut, quando- les, comme ceux qui assistent pendant le
cumqueeos,causapriusperEpiscopum cognilaet probata,abesse
contigerit, Vicarium idoneumab ipso ordinarioapprobandum,temps qu'ils sont aux missions et prédications.
cum débitamercedisassignatione relinquant. Discedendi autem Mais on peut demander si les chanoines qui
licentiam inscriptisgratisque concedendam ultrabimestretempus, prêchent des carêmes ou des stations, pendant
nisiexgravicausa,nonobtineant.Quodsi, per edictumcitati une
etiamnonpersonaliter, contumaces fuerint,liberumessevultor- partie de l'année dans, des diocèses étran-
per censurasecclesiasticas
dinariis.- et sequestrationem, etsubs- gers, ont également droit à leurs distributions,
traclionem fractnnm,atiaque jurisremédia,eliamusquead pri- ou, comme l'on dit aujourd'hui, à leur traite-
vationem, compellere : necexecutionem hane,quolibet privilegio, ment et autres avantages pécuniaires qui pour-
licentia,famiiiaritate,exemptione, etiam ratione cujuscumque be- raient être attachés à leur canonicat. Nous pen-
neficii,pactione, statuto,etiamjuramento, vel quacumque auc-
toritateconfîrmato, consuetudine, etiamimmemorabili, quoepotius 1. Barbosa, lib.m, cap.18,n. 40.— Mo.
Dejure ecclesiast.,
corruptela censenda est,siveappellatione, aut inhibitione,
etiamin neta de Distributionibus — Oarcias,Tractatus
quotidiannis. de
RomauaCuria, vel vigoraEugenianae constitutionissuspendi Beneficiis, part, m, cap.î, n. 333.
posse.{Cône. Trid.,SessXXIII,cap.i et 2, DeReform) Ibid.,n.53 usg.64.
2. Barbosa,
28 ABSENT
sons que la question ne souffre pas de difficulté, ABSENT.
si l'évêque autorise l'absence et si cette absence Un absent, en général, dit Ulpien, en la loi Ifn
ne nuit en rien aux offices capitulaires, comme
est une personne qui n'est pas là où elle est de-
l'avait décidé, dans un cas semblable, un arrêt "
du conseil d'État, du 30 octobre 1640,pour le mandée : Is dicitur absens qui abest à loco in
quo petitur, absentem accipere debemus eum,
chapitre de Chartres. Au reste, ces absences ont qui non est eo lociin
lieu du gré de l'évêque et au vu et au su du quo loco petitur. »
gouvernement, sans qu'il songe pour cela à § I. Absent. Élection. Chapitre.
faire supporter le moindre décompte sur le trai- Dans le cas d'une élection, on doit commen-
tement du chanoine ainsi occupé. cer par en donner avis à tous ceux qui y ont
En France, la loi civile retranche une partie droit, aux présents comme aux absents, et les
de leur traitement aux ecclésiastiques qui ne appeler à l'élection. Cette formalité est si es-
résident pas. sentielle, que l'omission d'un seul électeur ren-
L'article 8 de la loi du 20 avril 1833 porte : drait l'élection plus nulle que la contradiction
« Nul ecclésiastique salarié par l'État, lorsqu'il expresse de plusieurs électeurs : « Cum viduatse
n'exerce pas de fait dans la commune qui lui providendum est Ecclesiae debenteuneti qui eli-
aura été désignée, ne pourra toucher son gendi jus habent legitime citari ut electioni inter-
traitement. » sint; quod si vel in unica persona fuerit id
Mais il est à remarquer que le pouvoir légis- omissum,irritam redditelectionem talis pmissio.
latif n'a pas le droit de décréter de semblables Soepeetenim rescriptum est magishac in re unici
mesures, attendu qu'il ne salarie le clergé que obesse contemptum quam multorum contradic-
pour l'indemniser de la spoliation révolution- tionem. » (Lancelot, lnst., de Electione,§ Nam cùm
naire de ses biens. En principe, le traitement viduatx, c. Cum in ecclesiis,dePrxbend. in C°.)
est dû par l'État; en fait, c'est aux supérieurs Cependant si, après avoir omis d'appeler un
ecclésiastiques à procurer par les moyens à leur électeur ou même plusieurs, on procède à l'é-
disposition, l'exécution des canons de disci- lection, elle sera valide si ces électeurs absents
pline. et non appelés la ratifient, sauf les nullités dont
Néanmoins l'État a cru devoir réglementer elle peut être ailleurs infectée. (Lancelot, loc.
ces choses. C'est l'objet du décret du 17 novem- cit., § Pfane\)Maisonne peut forcer les électeurs
bre 1811 sur les indemnités à payer aux rem- à la ratification, quelque digne que soit le sujet
plaçants des titulaires des cures et sur la part qui a été élu. (Zoesius, Panorm. et Innocent.
à réserver à ces derniers en cas d'absence, de m Dict. cap. de Elect.).
maladie ou d'éloignement pour cause de mau- Le chapitre Quod sicut, 28, Extr., de Elect., veut
vaise conduite 1. qu'on ne soit obligé d'appeler que ceux qui peu-
et le sens de ce der-
Pour les absences permises, l'article 4 d'une vent l'êtresecommodément,
ordonnance du 1ermai 1832,s'exprime ainsi : nier mot prend diversement suivant les usa-
différents pays : « Modo in provincta
« L'absence temporaire, et pour cause légi- ges des
sint absentes; ea in re potissima ratio habetur
time, des titulaires d'emplois ecclésiastiques, du consuetudinis, » ut notât in cap. Coram,35, de
lieu où ils sont tenus derésider, pourra être au- Elect.
torisée par l'évêque diocésain, sans qu'il en ré- L'omission d'un électeur ne rend pas l'élec-
sulte décompte sur le traitement, si l'absence ne tion nulle de elle ne la rend qu'an-
plein droit,
doit pas excéder huit jours. Passé ce délai et nulable. Panorm. et Innocent.) « Ab-
(Zoesius,
jusqu'à celui d'un mois, l'évêque notifiera le sentium vocatio non est de substantia electionis,
congé au préfet, et lui en fera connaître le mo- sed tantum de justifia. » (Fagnan, in cap. Quia
tif. Si la durée d'absence pour cause de mala- de Elect., n. 38.)
die ou autre doit se prolonger au delà d'un mois, propter, Un électeur absent peut charger un ou plu-
l'autorisation de notre ministre de l'instruction sieurs électeurs présents de porter pour lui son
publique et des cultes sera nécessaire.
suffrage; mais il faut, pour cela, qu'il ait été ap-
Relativement aux effets de l'absence par rap- pelé avant de donner cette procuration. «Débet
port au mariage, voir ci-dessous le mot :Absent. enim vocari. » (Innocent, in cap. 2, de Novioperis
Voirlesmots: Résidence, Distribution. nunc.) Il ne serait pas juste qu'un électeur fût
1.Onpeutvoirà l'Appendice, (numot: Absence)letextedece privé de son droit d'élire dans un état où de lé-
décretquenousfaisons suivred'unavisduConseil d'Etat,endate gitimes empêchements ne lui permettraient pas
du8 juillet1831,relatifà l'absencedeschanoines
etautresecclé- d'en user en personne. (C. Si quis justo 46, § Ab-
siastiques. sens de Elect., in 6°-)
ABSENT 2a
Un électeur chargé de porter le suffrage d'un Le chapitre 2 de Arbit., in 6", décide que, quand
absent ne peut élire deux différentes personnes, il y a trois arbitres choisis, deux peuvent ter-
l'une en son nom, l'autre au nom de l'absent, à miner l'affaire en l'absence de l'autre.
moins que la procuration ne lui donne ce pou- Ce qui vient d'être dit d'un électeur absent
voir. «Porro cum unus est procurator simpliciter ne peut s'appliquer qu'aux élections où l'on suit
constitutus, si is unum, suo,et alium domini sui la forme du chapitre Quia propter. Communé-
nomine in scrutinio nominandum duxerit, nihil ment on n'admet qu'un suffrage par procura-
agit; nisi de certa eligenda persona sibi domi- tion, soit parce que si le scrutin n'a pas lieu,
nus dederit spéciale mandatum : tune enim in les raisons que disent ou qu'entendent les élec-
illam ejus, et in aliam suo nomine licite poterit teurs présents peuvent les faire changer d'opi-
consentire. » (Bonif. VIII, cap. Si quis, § Porrô, de nion, soit parce que le concile de Trente, qui a
Elect. et electipotestate, in 6°.) fait sur la matière des élections un décret que
Un électeur absent, avons-nous dit, peut char- nous rappelons sous le mot : Élection, ne veut
ger plusieurs électeurs présents d'élire pour lui ; pas qu'on supplée aux suffrages des électeurs
mais tous ne pourront pas élire pour l'absent, absents *.
parce qu'il rendraient l'état de la procuration nui- Voirlesmots: Election, Arbitre.
sible et incertain, s'ils élisaient différentes per- p II. Absent. Mariés.
sonnes. Dans ce cas, l'électeur le premier chargé Un homme absent est réputé vivant, jusqu'à
de la procuration est censé avoir élu pour ce qu'on prouve le contraire. Si l'on n'en a point
l'absent; que s'il ne paraissait de l'antériorité de nouvelles, il ne faut pas moins de cent ans
des procurations, celui-là d'entre ces élus par soit censé mort. (L. 8, ff. de Usu et
les procureurs, serait préféré, qui aurait en sa pour etqu'il Redit. ; l. 36 de Usuf.; l. 25 eod. de sa-
la de Usuf.
faveur la plus grande et plus saine partie cros. Eccl.)
l'assemblée; et, dans le cas encore où l'assem- Sur ce longue que soit l'ab-
blée fût divisée à cet égard, on aurait recours à sence d'unprincipe,saquelque femme ne peut se remarier,
mari,
l'antériorité de la date des procurations ou des si elle ne
lettres envoyées par l'absent. rapporte des preuves certaines de sa
mort. Par l'ancien droit civil, cette femme pou-
S'il arrivait que l'électeur absent chargeât vait se remarier après cinq ou six ans d'absence,
imprudemment deux procureurs d'élire conjoin- mais Justinien abrogea cet usage et déclara par
tement à sa place, alors la procuration resterait
l'Authentique Hodiè, eod. de Repudiis, tirée de la
sans effet, et l'absent imputerait à son impru- Novelle 117 cap. 11, que la femme dont le mari
dence la privation de son droit. est à l'armée ne peut se remarier par quelque
Un électeur absent ne peut charger de sa pro- espace de temps que son absence dure et
quoi-
curation qu'un de ceux qui ont, comme lui, droit qu'elle n'en reçoive ni lettres ni nouvelles; que
d'élire, ou l'étranger que le chapitre agrée; il si elle apprend qu'il est mort, elle doit s'en in-
ne peut non plus envoyer son suffrage par let- former de ceux sous lesquels il était enrôlé,
tres, quand même aucun des électeurs ne vou- prendre le certificat de sa mort, vérifié par ser-
drait se charger de sa procuration. La raison de ment, pour être déposé dans les actes publics,
cette dernière décision est que les voix doivent et attendre ensuite un an entier avant de se re-
être données et reçues dans le secret, l'une après marier.
l'autre : ce qui ne paraît pas compatir avec la Le droit canon a réglé la chose à peu près de
manière d'élire par lettres missives. « Et sane la même manière, tant dans le cas d'un mari
cum non ante electionem, sed in ipsa electione qui est à la guerre, que dans toutes les autres
sécréta et sigillatim duntaxat singulorum vota espèces d'absence, pour voyage de long cours ou
sint exprimenda, per litteras reddi non pote- autrement; en sorte que la longue absence de
runt. » (On peut voir toutes ces règles réduites l'un des deux conjoints ne suffit jamais à l'autre
en principes dans les Institutes du Droit canonique, pour contracter un nouveau mariage, sans des
de Lancelot, au titre de Elect.du liv. I.) preuves certaines de la mort de l'absent. (C. In
Dans le cas d'une élection, tous les électeurs prxsentia, de Sponsalibus et Matrim.) Ce chapitre
doivent être cités : nous venons de le voir, et ré- qui est du savant pape Clément III, se sert de
gulièrement cette convocation doit se faire dans ces termes : * Donec certum nuntium recipiant
tous les cas où il s'agit d'affaires importantes ; de morte virorum. » Les docteurs se sont exer-
mais dans les cas ordinaires, les deux tiers cés sur le sens de ces deux mots: certumnuntium;
des capitulants présents suffisent, et ce qui est les uns voulaient que le bruit commun, soutenu
fait par le plus grand nombre de ces deux tiers 1. Jurisprudencecanonique, sect.1,n. 4j—Mé-
verb.ABSENT,
est censé légitime. (Fagnan., Panormit.) moiresduclergé,tom.XII,pag.1244.
80 ABSOLUTION'
de quelque circonstance de probabilité suffit; ce serait un devoir pour le ministère public de
d'autres la déposition d'un témoin irréprocha- demander la nullité du second mariage : autre-
ble ; mais le rituel romain semble exiger quel- ment on fournirait aux époux un moyen indi-
que chose de plus, il dit : « Caveat proeterea pa- rect de divorce, et l'on mettrait en opposition
rodias ne facile ad contrahendum matrimonium la morale avec la loi. En effet, si l'absent se
admitlat... eos qui antea conjngati fuerunt, ut réunissait à sa femme sans que le second ma-
sunt uxores militum. vel captivorum, vel alio- riage fût dissous, il aurait d'elle, d'après l'ar-
rum qui percgrinantnr, nisi diligenter de iis ticle 312 du Code, des enfants légitimes aux yeux
omnibus facta inquisilionc, et roadordinarium de la morale, et illégitimes aux yeux de la loi.
débita, ab eoque habita ejusmodi eclebrandi li-
centia ; » c'est-à-dire qu'il faut un extrait mor- § III Absent. Absolution.
tuaire légalisé par l'évêque du lieu où l'homme (Voirlemot: Absolution
)
est décédé, et môme par le juge séculier. ABSOLUTION.
Si l'absent est mort dans un hôpital d'armée, L'absolution est l'acte par lequel on déclare
le certificat doit être attesté par un officier de innocent un accusé : " Absolvere est innocentem
guerre, et visé par l'évêque du lieu où se doit judicare vel pronuntiare. » (Apud Just., I. Si ex
faire le mariage, avant que le curé puisse duobus14. § I ff., de Jur. solut.)
s'en servir. Il faut en un mot des preuves au- Nous distinguerons deux sortes d'absolutions :
thentiques. Il y a néanmoins des cas où l'on est l'absolution judiciaire, et l'absolution péniten-
obligé de se contenter de preuves testimoniales, tielle. Nous dirons ensuite ce qu'on entend par
quand il ne peut pas y en avoir d'autres. absolution ad affectum,par absolution des morts,,
Si une femme s'est remariée avec un second etc.
mari du vivant du premier, et qu'elle apprenne § I. Absolution judiciaire.
que celui-ci est encore en vie, elle est obligée L'absolution judiciaire n'est autre chose que
de quitter le second mari pour retourner avec le
le premier, soit qu'elle ait contracté le second jugement qui absout un accusé en justice,
un certain ordre de procédure régulière.
mariage de bonne ou mauvaise foi, qu'il y ait après Nous ne dirons rien ici de cette sorte d'abso-
ou non des enfants du second lit : « Quod si
lution par rapport aux cas où elle doit être ac-
post hoc de prions conjugis vita constiterit, re- : les circonstances la décident, et les ca-
lictis adulterinis complexibus, ad priorem con- cordée cela n'ont rien de contraire
nons en aux lois ci-
jugem revertatur. » (C. Dominus,de Secundisnup- viles, ordonnent d'absoudre tout accusé qui
c. de qui
tiis; Tuas, Sponsàduorum.) ou non suffisamment convaincu
la paraît innocent,
Mais dans le cas où femme, sur des nou- être condamné. « Promptiora sunt jura ad
velles probables, s'est remariée de bonne foi pour
absolvendum, quam ad condemnandum. » (C.
du vivant de son premier mari, les enfants Ex litteris, de Probat.)
qu'elle a eus de son second mariage sont légiti-
mes, pourvu que la bonne foi n'ait pas cessé § II. Absolutionpénitentielle.
avant la naissance de ces enfants : c'est la dé- L'absolution pénitentielle comprend, dans un
cision du pape Innocent III, dans le chapitre sens étendu, non seulement l'absolution sacra-
Ex tenore,Quifilii sint legilimi. mentelle au for intérieur, mais l'absolution des
Le Code civil, parlant des effets de l'absent censures au for extérieur, que l'on n'accorde pas
relativement au mariage, statue, article 139: sans quelque satisfaction ; ainsi l'on ne dit pas,
« L'époux absent dont le conjoint a contracté ou l'on ne doit pas dire absoudre, mais dispen-
une nouvelle union sera seul recevable à atta- ser d'une irrégularité, « quoesine culpâ esse po-
quer ce mariage par lui-même ou par son test. Absolutio autem est favorabilis, dispensa-
fondé de pouvoir, muni de la preuve de son tio odiosa. » C'est pourquoi dans le doute on
existence. » absout toujours, et, lorsque la censure est no-
L'époux qui aurait contracté un second ma- toirement injuste, on n'absout pas, mais on re-
riage sans être assuré de la mort de son con- laxe; on ne dit pas absoudre d'un interdit,
joint se serait rendu grandement, coupable de- mais le lever, en relaxer, ce qui est au fond la
vant Dieu. même chose, suivant la remarque de Gibert, en
D'après l'article 139 du code civil, que nous son Traité des censures.
venons de citer, l'époux absent dont le conjoint L'absolution sacramentelle est donc celle qui
a contracté une nouvelle union est seul receva- s'exerce dans le tribunal secret de la pénitence,
ble à attaquer ce mariage; cependant si, étant et qui n'a d'effet qu'au for de la conscience.
de retour, il ne faisait point ses réclamations, Régulièrement, pour accorder cette absolution,
ABSOLUTION SI
il faut réunir en soi les deux pouvoirs de l'or- de juridiction ; de sorte que pendant que le siège
dre et de la juridiction; le concile de Trente en de celui qui a porté la censure est vacant, l'ab-
fait une loi en ces termes : « Mais comme il est solution n'appartient qu'à celui qui a la juridic-
de l'ordre et de l'essence de tout jugement, tion.
que nul ne prononce de sentence que sur ceux Régulièrement, les supérieurs des évêques ne
qui lui sont soumis, l'Église de Dieu a tou- peuvent absoudre des censures portées par ces
jours été persuadée, et le saint concile confirme derniers qu'en cas d'appel; mais les évêques
encore la même vérité, qu'une absolution doit eux-mêmes peuvent, hors de ce cas, absoudre
être nulle si elle est prononcée par un prêtre des censures portées par les prélats inférieurs
sur une personne sur laquelle il n'a point de qui leur sont soumis, quoiqu'ils ne doivent pas
juridiction ordinaire ou subdéléguée. » (Sess. le faire pour le bon ordre sans leur participa-
XIV, cap. VII; c. Si episcopus,de Poenis,in 6°.) tion, et sans exiger de ceux qu'ils absolvent une
On voit, sous le mot Approbation, quels satisfaction convenable. De même, le supérieur
sont ceux à qui cette juridiction est due ou con- à qui a été porté l'appel d'une censure doit ren-
cédée. Tout prêtre l'a nécessairement dans un voyer Pappelaut au juge à quo, s'il reconnaît
cas pressant de mort : c'est la décision du même que la censure soit juste ; si elle est injuste il
concile dans le chapitre VII précité. Il peut, l'absout; mais si elle est douteuse, le supérieur
dans cette circonstance, absoudre le mourant peut retenir ou renvoyer l'absolution. Il est plus
de tous péchés et de toutes censures réservées convenable qu'il la renvoie. (C. 1 de Offic. ord.,
ou non, quoiqu'il n'ait que le pouvoir de l'or- in 6°, etc.)
dre. Voici les paroles du Concile : « De peur que Suivant les principes du droit, rappelés sous
quelqu'un ne vînt à périr, il a toujours été ob- le mot Archevêque, le métropolitain est en
servé dans la mêmeÉglise de Dieu, par un pieux droit d'accorder l'absolution des censures en
usage, qu'il n'y eût aucun cas réservé à l'article visite ou sur déni de justice, et c'est aussi ce
de la mort, et que chaque prêtre pût absoudre que les canonistes établissent comme une chose
tous les pénitents des censures et de quelque indubitable *.
péché que ce soit. » Mais, en France, comme nous le disons sous
On a élevé sur cette question une difficulté, le mot Visite, les métropolitains n'ont pas le
demandant si le pénitent revenu en santé ou en droit de visite dans les diocèses de leurs suffra-
sûreté doit recourir de nouveau à un confesseur gants.
qui ait tous les pouvoirs requis. L'auteur des Au surplus, un prélat peut absoudre tous ceux
Conférencesd'Angers traite cette question, et dit qu'il peut censurer (Fagnan, in c. Ad haec,de Re-
que l'absolution est irrévocablement et légiti- ligiosis domibus) et l'on doit dire aussi que le
mement obtenue pour les péchés même réser- pape, par un effet de cette supériorité ou pléni-
vés, et qu'à l'égard de ceux auxquels la censure tude de puissance que les canons lui donnent,
est attachée, les théologiens sont partagés, ainsi peut absoudre tous les fidèles de partout, pour
que l'usage i. tous les cas réservés ou non, au for intérieur.
Gibert2 établit, pour règle, que tout prêtre ap- L'absolution qui se donne au for intérieur, n'a
prouvé peut absoudre des censures de droit, si point d'effet et ne peut être tirée à conséquence
elles ne sont réservées ; car les censures étant pour le for extérieur, pas même quand l'abso-
les peines des péchés, il est convenable et né- lution aurait été donnée en vertu de jubilé ou
cessaire que tout prêtre approuvé puisse absou- bulle apostolique !. Le chapitre A noois est, de
dre des péchés même, à moins qu'ils ne soient Sent, excom.,s'exprime ainsi sur ce sujet : « Quam-
réservés, parce qu'alors il a les mains liées. Mais vis absolutus apud Deum fuisse credatur, non-
si tout prêtre qui peut absoudre des péchés, peut dùm tamen habendus esse apud Ecclesiam ab-
aussi absoudre des censures, celui qui peut ab- solutus. »
soudre des censures ne peut pas toujours absou- A l'égard des pouvoirs des curés et des régu-
dre des péchés. Cette autre règle se prouve par liers, voir les mots : Approbation, Confession
l'exemple de ceux qui n'ont que le pouvoir de Curé.
juridiction, et non celui de l'ordre : tels sont les L'absolution au for extérieur, qui ne se peut
abbesses, les cardinaux non prêtres, les vice-lé- entendre que des censures depuis le non usage
gats, les clercs nommés à un évêché, et non bulles de la pénitence publique, est simple ou condi-
avant leur promotion; car l'absolution de la cen- tionnelle, privée ou solennelle ».
sure, comme la censure elle-même, sont des actes liv.V,chap.14.
1. Cabassut,
1. ConférenceII, quest.descasréservés. S.Éveillon, ch.35,art. I
Traitédesexcommunications,
2. Traitédescensures. deCens,eccles.,
3. Van-Espen, cap.5, § 1.
,82 ABSOLUTION
1° L'absolution pure et simple est celle qui télé, parce qu'elles ne sont données
que
n'est accompagnée d'aucune modification qui en servir à celui qui les obtient, en cas que la pour cen-
limite ou retarde les effets. La forme de cette sure soit valable. (Honorius III. cap.
Venerabili,
prononciation est la même au for extérieur extra., de Sent, excommun.; CoelestinusIII, cap. Ex
qu'au for intérieur pour l'excommunication. parte, de Verborumsignificatione.)
2° L'absolution conditionnelle est celle dont Comme, selon la rigueur des canons, un ex-
l'effet dépend de l'accomplissement d'une con- communié est un infâme et incapable d'ester en
dition. Plusieurs docteurs, et des plus respecta- jugement, on lui accorde dans les tribunaux ec-
bles, ont soutenu qu'on ne pouvait absoudre clésiastiques une absolution à cautèle, dont l'ef-
sous une condition qui eût trait au temps futur, fet est seulement de le rendre capable de procé-
mais seulement au passé ou au présent; mais der en justice. Autrefois, en France, en vertu
cette opinion n'est pas suivie dans l'usage de l'édit du mois d'avril 1695, on n'admettait
Du genre des absolution s conditionnelles sont point, dans les tribunaux séculiers, cette excep-
les absolutions ad cautelam et cum reincidentid. tion contre les excommuniés.
L'absolution ad cautelam, seu ad majorem caute- Celui qui se prétend excommunié injustement,
lam, est celle que l'on prend pour plus grande poursuivant son appel, ou autre procédure
précaution, et sans reconnaître la validité de la pour en être relevé, commence par demander
censure, et seulement en attendant le jugement cette absolution à cautèle,qui est ainsi qualifiée,
définitif. parce que, ne demeurant pas d'accord de la va-
L'absolution ad cautelam emporte une condi- lidité de son excommunication, il prétend n'a-
tion qui tient au passé ou au présent : « Ego te voir besoin d'absolution que par précaution, et
absolvo à tali excommunicatione, si indiges, vel pour ne pas donner lieu à l'exception d'excom-
si eam de facto contraxisti. » L'absolution cum munication.
reincidentidest celle qui est donnée sous une con- Par ce même motif de précaution, se sont in -
dition, laquelle manquant, celui qui avait obtenu troduites les absolutions générales, qui ont passé
l'absolution retombe dans le même état de cen- en stylejeomme celle qui est toujours la première
sure où il était. clause des signatures et des bulles du Saint-
L'absolution ad reincidentiam est ainsi appe- Siège, et qui n'a lieu qu'à l'effet d'obtenir la
lée parce qu'elle ne peut être donnée qu'à l'ar- grâce demandée, de peur qu'on ne l'accuse de
ticle de la mort et quand l'absolution ne peut nullité: car si l'impétrant était effectivement
être différée sans qu'il y ait péril grave de scan- excommunié, il serait obligé d'obtenir une ab-
dale ou d'infamie, suivant l'avis du confesseur. solution expresse.
Dans les deux cas le confesseur peut absoudre Quand quelqu'un a été excommunié par sen-
des censures même spécialement réservées au tence du juge, quoiqu'il se porte pour appelant
Pape, sous peine cependant de réincidence si de la sentence, il demeure toujours lié et en état
dans l'espace d'un mois, celui qui a été absous d'excommunication ; et, en cet état, deux raisons
ne recourt pas par lettre et par l'entremise du l'obligent de demander une absolution provi-
confesseur au Saint-Siège. Ainsi l'a déclaré la soire, l'une pour avoir liberté de communiquer
congr. du S. Office, le 23 juin 1886.Quand une( avec tous ceux dont il a besoin pour la défense
affaire a été portée en jugement au for exté- de sa cause, l'autre pour la participation aux
rieur, cette absolution ne vaut que pour le for, biens spirituels et l'exercice des fonctions de sa
de la conscience. charge, s'il en a une. « Nec excommunicati sunt
La judiciaire et l'extrajudiciaire. La judiciaire audiendi priusquàm fuerint absoluti. » (Cap. Per
est celle qu'est obligé de demander un excom- tuas; c. Cùm desideres, de Sent, excom.)
munié pendant l'appel qu'il a émis de la sen- Cette absolution ne se donne que sur le fon-
tence qui l'excommunie. dement de la nullité du jugement qui porte la
Quand il a sujet de douter de la validité d'une censure dont est appel. Si l'appelant n'alléguait
excommunication ou d'une autre censure, dit 1 que l'injustice de la censure, il ne serait pas
d'Héricourt le supérieur ecclésiastique peut ' écouté; mais l'exception de nullité sommaire-
accorder l'absolution, en faisant promettre avec ment prouvée met le juge dans la nécessité
serment à celui qui a encouru la censure de se d'accorder l'absolution qu'on lui demande ,
soumettre à ce que le juge devant lequel l'ap- nonobstant toute opposition de la partie adverse
pel est porté ordonnera, s'il est justifié que la ou du juge dont est appel. « Sic statuimus ob-
censure soit légitime; on appelle ces absolutions, servandum, ut petenti absolutio non negetur,
dans le droit canonique, des absolutions à eau- quamvis in hoc excommunicator vel adversa-
rius se opponat. » (C.Solet, de Sent, excom.in 6«.)
ABSOLUTION 33
Il faut excepter le cas où le suppliant a été ex- quand il sera remis, il ira trouver son supé-
communié pro manifesta offensa. L'offensé peut rieur, pour recevoir de lui l'absolution. S'il ne
alors s'opposer; on lui donne huit jours pour satisfait pas à cette condition, il retombe de
prouver la validité de la censure; s'il parvient droit dans la même censure.
à la prouver, l'absolution est refusée. De même, si le pape qui l'absout le renvoie à
Il n'y a que le juge qui a prononcé la cen- l'ordinaire, pour donner aux parties offensées
sure, ou son supérieur, par la voie de l'appel, les satisfactions qui leur sont dues, ou si, eu
qui puissent accorder l'absolution ad cautelam; absolution simple, il a promis de le faire, et qu'il
un juge délégué n'aurait pas ce pouvoir, s'il ne ne le fasse pas; mais, dans ces derniers cas, il
le tenait immédiatement du pape. (Glos. in c. faut un nouveau jugement, qui est proprement
Solct cit.) ce qu'on appelle réintrusion, « reducere in sen-
Les conditions sous lesquelles se donné cette tentiam excommunicationis. » (C.Ad audientiam,
absolution sont, outre la preuve de nullité sus- de Officiovicarii.)
mentionnée, que la partie adverse soit citée, et L'absolution privée est celle qui se fait en
que celui qui demande d'être absous donne particulier sans les solemnités prescrites par le
préalablement assurance ou caution de réparer Ponlilical romain, et tirée du canon Cum ait-
sa faute, et d'obéir à l'Église s'il vient à suc- quis, II, q. 3, et du chapitre A nobis i, de Sait.
comber. « Non relaxetur sententia, nisi prius excomm.
sufficiens praestetur cmenda , vel compclens 4° L'absolution publique, au contraire, est
cautio de parendo juri, si offensa dubia propo- celle qui se fait avec ces moines solemnités.
natur. » (C. Solet, dict.;c. Venerubilibus,extr. eod.) Eveillon i rapporte cette même forme d'absou-
Un auteur remarque que le pape Innocent 111 dre solennellement, et observe qu'elle n'est sui-
fut le premier qui fit connaître l'absolution à vie que quand l'excommunication est aggravée
cautèledans le chapitre Per tuas, de Sent, excom- d'anathème, dans lequel cas l'évêque la donne
mun.; ce qui n'est pas exactement vrai, disent lui-même. Ce même auteur rapporte aussi au
Durand de Maillane et Gibert. même endroit la formule de l'absolution privée,
De ce que cette absolution n'a lieu que dans accordée par un piètre commis par l'évêque.
le cas de nullité, les docteurs concluent qu'on Le Pontifical romain donne un avis qu'on doit
ne peut la demander pour lus censures à jure, considérer eu l'absolution des censures , soit
oui ne peuvent être infectées de ce vice 1. qu'elle soit publique ou particulière : « Circa
L'absolution ad cautelam extrajudiciaire se absolutionern vero ab excommunicatione, sive
donne au tribunal de la pénitence en ces ter- a canoue, sive ab hornine prolata, tria sunt
'
mes : « Absolvo te ab omni vinculo excommu- specialiter atlendenda : lu ut cxcomnuiniuutus
nicationis, si quam incurrioli ou in quantum juret antè omnia mandatis Eeelesiie et ipsius
possum et tu indiges. » Elle s'accorde dans des absolventis, super eo propter quod excommu-
actes légitimes, comme pour une élection; le nicationis vinculo est lignlus, et si propter
supérieur qui a le pouvoir dit : « Absolvo vos manifestani offensam uxcommuuicalus sit, quod
et unumquemque vestrum ab omni vinculo ex- antè omnia satisl'aciat coiupetenler; 2° ut ru-
communicationis, si quam incurristi, ad effec- concilietur, quod lieri débet hoc modo, etc.,
tuin hujus electionis duntaxat. » (c'est la forme des prières et descérémonies;) 3° quod
Felinus dit que quand le pape veut donner absolutio fieri dcbeal justact rationabiliu pr.io-
audience à des ambassadeurs excommuniés, il cepta, » (cequi (si relatif aux circonstances.)
les absout ad cautelam pour cet acte seulement. Nous avons dit que l'absolution des censures
Enfin les évêques qui confèrent les ordres dans le for intérieur n'ôte que les effets des
sont dans l'usage prudent d'absoudre ad caute- censures; nous devons ajouter ici que la même
lam les ordinands, pour prévenir toute irrégu- absolution dans le for extérieur, qui n'est né-
larité. [Cap.Apostolicx, de Exceptionibus.) cessaire que quand celui qui est lié de censures
A l'égard de l'absolution cum reincidentid, l'es- a été dénoncé, ôte tous les effets des censures
pèce s'en trouve dans le chapitre Eos qui, de tant intérieures qu'extérieures; pourvu toute
Sent, excomm.in 6», en deux cas qui oui chacun fois qu'elle soit totale, car elle peut n'être que
le même motif : le premier, quand l'excommu- partielle, c'est-à-dire d'une seule des censures
nié est à l'article de la mort, et l'autre, quand duiit le censuré se trouve atteint, les censures
il ne peut, pour quelque empêchement légitime, n'ayant point entre elles tle liaison nécessaire.
recourir au supérieur. Un prêtre qui n'a pas le Au reste, l'absolution « cuittekn'a maintenant
pouvoir l'absout en cet état, à condition que, en France d'autre effet quo du rendre capable
1. Eveillon,
Truitedesexcommunications,
tue.cit.,ait. 5. ou.3, ..il.ît.
1. Traitédesexcommunications,
34 ABSOLUTION
d'ester en droit canon : si donc un ecclésiasti- nes apostolicas, et illis utentibus receptatoribus
que interdit faisait quelque fonction de son et fautoribus eorum ac res vetitas ad infidèles
ordre, sur le fondement de cette absolution, deferentibus, violatoribus ecclesiasticoe liberta-
avant que l'excommunication eût été déclarée tis via facti, ausu temerario apostolicis manda-
au fond nulle ou abusive, il deviendrait irrêgu- tis non obtemperantibus, et nuntios, vel execu-
lier. tores apostolicas sedis, et ejus officialium, ejus
§ IV; Censures,
Voirlesmots: Casréservés, §V; Juridiction, commissa exequentes impedientibus, qui prop-
Excommunication §111,ad effectuant.
; Absolution, ter prasmissa, vel aliquod eorum excommuni-
§ III. Absolution ad effectuai. cati a jure vel ab homine, per quatuor menses,
Les papes, en leurs rescrits de grâces, bulles scienter excommunicationis sententiam hujus-
et signatures, n'omettent jamais la clause sui- modi sustinuerint, et generaliter quibuscumque
vante : « Teque a quibusvis excommunicatio- aliis, qui censuris aliquibus, etiam alias quam
nis, suspensionis et interdicti, et aliis ecclesias- ut proefertur, quomodolibet ligati in illis annum
ticis sententiis, censuris et poenis, tam a jure continuum insorduerint *. »
quam ab homine quavis occasione, vel causa Voirlesmots: Concession,
Excommunication.
latis, si quibus quomodolibet innodatus existis § IV. Absolutiondes morts.
ad effectum prassentium tantum consequendum C'est une question parmi les docteurs, si l'on
absolventis absolutum fore censentes, etc. » peut excommunier et absoudre un mort. L'his-
L'effet de cette clause est d'absoudre, en tant toire ecclésiastique en fournit plusieurs exem-
que de besoin, l'impétrant des censures dont il ples ; et Eveillon , qui tient l'affirmative, en
pourrait être atteint, pour le rendre capable de donne pour raison que les évêques et supérieurs
la grâce qu'on lui accorde, ad effectumgratix peuvent avoir des causes importantes pour en
factx; d'où viennent ces mots du titre absolution agir ainsi, comme pour édifier l'Église, pour
ad effectum.Les canonistes remarquent que cette faire connaître au public le mal de ceux qui
absolution qui, suivant leur langage, naît du sont morts, afin qu'on n'imite pas leur exem-
ventre même de la signature, ne profite point ple, ou qu'on ne suive pas leurs erreurs. S. Cy-
à l'excommunié qui a croupi un an dans son prien excommunia Géminius Victor après sa
état d'excommunication sans se faire absoudre, mort dans de sages vues, et Justinien dit dans
étant alors comparé à un hérétique, suivant les son édit que les docteurs de l'Église catholique
canons confirmés et renouvelés par le concile anathématisèrent Théodore de Mopsueste après
de Trente, en ces termes : « Or, tout excom- sa mort, « ne simpliciores legentes illius impia
munié qui ne reviendra point à résipiscence conscripta, a rectâ fide declinarent. » (Can. San-
après avoir été duement admonesté, non seule- cimus,24, q. 2.)
ment sera exclu des sacrements de la commu- Si l'on peut excommunier un mort, il est
nion et fréquentation des fidèles ; mais si, étant moins extraordinaire qu'on puisse l'absoudre.
lié par les censures, il persiste pendant un an, Cependant, quelque marque de pénitence qu'ait
avec un coeur obstiné, dans l'infamie de son donnée avant sa mort un excommunié dénoncé,
crime, on pourra même procéder contre lui on ne doit point l'inhumer en terre sainte, ni
comme contre une personne suspecte d'héré- prier pour lui publiquement, quand il est mort
sie. » (Sess. XXV, c. 3, de Reform.) avant d'avoir obtenu l'absolution. Mais l'Église
Cette absolution ad effectum ne profite point peut accorder l'absolution après la mort, quand
non plus aux irréguliers ni à tous ceux dont il y a des preuves certaines de la pénitence de
parle la règle 66 de la chancellerie qui a pour l'excommunié; c'est aussi ce que décide Inno-
titre : De lnsordescentibus,dans ces termes : cent III, dans le chapitre A nobis, Extra., de
« Item, ne personis, pro quibus litteras Suas Sent, excommunicat.,où il est dit : « Vos de quan-
Sanctitatis emanabunt, ob generalem absolutio- tumcumque siquis(excommunicatus)juramento
nern a censuris ecclesiasticis, quibus ligati fo- prsestito, quod Ecclesias mandato pareret, hu-
rent, ad eorum effectum indifferenter concedi, miliare curaverit , quantacumque poenitentiae
et in litteris apostolicis apponi solita, prasste- signa proecesserint ; si tamen morte prasventus
tur occasio censuras ipsas vilipendendi et in- absolutionis non potuit beneficium obtinere,
sordescendi in illis statuit et ordinavit, hujus- quamvis absolutus apud Deum fuisse credatur,
modi absolutionern et clausulam in litteris, quas nondum tamen habendus est apud Ecclesiam
in futurum cum illa concedi continget, non suf- absolutus ; potest tamen et débet ei Ecclesias
fragari non parentibus rei judicaVe, incendia- beneficio subveniri, ut si de ipsius viventis poe-
riis, violatoribus ecclesiarum, falsificatoribus et Praxisbenef.,
1. Corradus, lib.11,cap.16; Ilosa,part.I,cap.4,
falsificari procurantibus litteras et supplicatio- n. 155.
ABSOUTE 35
nitentia per evidentia signa constiterit, defunc- contumace ne fût un signe de mépris pour la
to etiam absolutionis beneficium impendatur. » censure.
En conséquence, on trouve la formule de cette
§ VI. Absolution à sasvis.
absolution dans le Rituel romain.
L'absolutionà sxvis est une grâce accordée par
Cette absolution n'a qu'un effet indirect pour le pape par une signature particulière, à celui
a à quelque jugement de mort, ou
l'âme du défunt en tant qu'elle donne droit à qui assisté
la sépulture ecclésiastique, à la prière publi- qui a commis quelque faute qui le rend irrégu-
lier et incapable de posséder aucun bénéfice.
que et à l'oblation nominale du saint sacrifice
de la messe. (V. le mot Irrégularité.)
Pour l'absolution du jeudi saint, voyez le mot
Absoute.
§ V. Absolution des absents. ABSOUTE.
Il n'est pas permis de donner l'absolution On appelle ainsi l'absolution que les évêques
sacramentelleà un absent c'est ce qui ressort du donnent quelquefois au peuple, et celle qu'un
décret suivant de Clément VIII, donné en curé donne à un de ses paroissiens défunt, dans
1602: « S. S. Dominus noster propositionem » les cérémonies de son enterrement.
licere per literas.seu internuntium confessario S'il s'agit de l'enterrement du souverain Pon-
absenti peccata sacramentaltter confiteri et ab tife, d'un cardinal, du métropolitain ou de l'é-
eodem absente absolutionern obtinere «ad mi- vêque diocésain, d'un empereur, d'un roi, ou
nusut falsam, temerariam et scandalosam dam- d'un grand prince, il convient qu'il y ait cinq
navit ac prohibuit; praecepitque, ne deinceps absoutes faites par le pontife célébrant et quatre
ista propositio publicisprivatisque lectionibus autres évêques ou prélats, ou, s'il n'y en a pas,
etc. doceatur neve unquam tanquam aliquo par les quatre prêtres les plus dignes.
casu probabilis defendatur, imprimatur aut ad L'absoute est aussi une cérémonie qui se pra-
praxim quovis modo deducatur. » tique dans l'Église romaine le jeudi saint, pour
représenter l'absolution qu'on donnait vers le
On peut néanmoins absoudre des censuresune même temps aux pénitents de la primitive
personne absente, s'il y a une cause urgente. Église.
(Cap. De manifesto 17, c. 2, qu. 1 ; cap. Quanto 8, L'usage de l'Église de Rome et de la plupart
c. 2 qu. 5.) D'après Suarez, (de posait, d. 32, des Églises d'Occident était de donner l'abso-
sect. 6,) de Lugo, (de poenit.disp.22, n. SI), Fil- lution aux pénitents le jour du jeudi saint,
liucci, (de Sacrameut.tr. 7, n. 370), cette absolu- nommé pour cette raison le jeudi absolu.
tion peut être donnée à une personne qui même Dans l'Église d'Espagne et dans celle de
l'ignorerait; il n'y a d'exception à cette règle Milan, cette absolution publique se donnait le
que lorsque en temps de jubilé, l'absolution jour du vendredi saint. En Orient, c'était le
des censuresest jointe à l'absolution sacramen- même jour ou le samedi suivant, veille de Pâ-
telle. (LEHMKULHL.Theol.mor., II n. 875). ques. Dans les premiers temps, l'évêque faisait
Un évoque, quoique absent de son diocèse, l'absoute, et alors elle était une partie essen-
peut absoudre néanmoins ses diocésains des cen- tielle du sacrement de pénitence, parce qu'elle
sures, parce qu'une telle absolution ne requiert, suivait la confession des fautes, la réparation
généralement, ni connaissance de la cause, ni des désordres passés et l'examen de la vie pré-
éclat judiciaire, et que, par conséquent, rien ne sente. « Le jeudi saint, dit Fleury ', les péni-
s'oppose à ce qu'un évêque exerce un tel acte tents se présentaient à la porte de l'église; le
de juridiction hors de son territoire. Il n'en se-
rait pas de même cependant s'il fallait employer prélat, après avoir fait pour eux plusieurs
prières, les faisait entrer à la sollicitation de
toutes les formes judiciaires, car alors la per- l'archidiacre, qui lui représentait que c'était un
mission de l'Ordinaire du lieu serait nécessaire.
temps propre à la clémence, et qu'il était juste
On pourrait encore absoudre, même malgré que l'Église reçût les brebis égarées en même
lui, un délinquant qui aurait satisfait, mais qui temps qu'elle augmentait son troupeau par les
se refuserait à demander ou à recevoir l'abso- nouveaux baptisés. Le prélat leur faisait une
lution. Cependant il faudrait de graves raisons exhortation sur la miséricorde de Dieu, et le
pour cela, car il y aurait à craindre qu'en pareil changement qu'ils devaient faire paraître dans
cas cette sorte de persistance du sujet, dans sa leur vie, les obligeant à lever la main pour signe
1.TraitédesCensures,
page108. 1. Moeurs n. XXV.
deschrétiens,
30 ABSTINENCE
de cette promesse. Enfin se laissant fléchir aux L'abstinence a pour objet principal de mor-
prières de l'Église, et persuadé de leur conver- tifier les sens et de dompter les passions. On
sion, il leur donnait l'absolution solennelle. " voit, dans l'Ecriture, qu'après le déluge Dieu
A présent, ce n'est plus qu'une cérémonie qui permit à Noé et à ses enfants de manger la chair
s'exerce par un simple prêtre et qui consiste à des animaux, mais qu'il leur défendit d'en
réciter les sept psaumes de la pénitence, quel- manger le sang. La loi de Moïse défend aux
ques oraisons relatives au repentir que les Juifs la chair des animaux impurs. Elle interdit
fidèles doivent avoir de leurs péchés. Après quoi aux prêtres l'usage du vin pendant tout le
e prêtre prononce les formules Misereaturet In- temps qu'ils sont occupés au service du temple.
dultientiam; mais tous les théologiens et tous les A la naissance du Christianisme, les Juifs vou-
c nonisles conviennent qu'elles n'opèrent pas laient assujettir les païens convertis à toutes
1 rémission des péchés; et c'est la différence de les observances de la loi judaïque et aux absti-
ce qu'on appelle absoute d'avec l'absolution nences qu'elle ordonnait, mais les Apôtres as-
proprement dite. semblés à Jérusalem décidèrent qu'il suffisait
ABSTÈME. aux nouveaux convertis de s'abstenir du sang,
des viandes suffoquées, de la fornication et de
Abstème, du latin abstemius. On nomme ainsi l'idolâtrie. L'abstinence se trouve encore pres-
les personnes qui ont une répugnance natu- crite
relle, pour le vin et ne peuvent en boire. Ces par S. Paul, dans son épitre aux Ro-
mains, XIV, 20,21 : « N'allez pas, dit-il, pour une
à
personnes, cause de l'aversion qu'elles ont du viande dont vous mangerez, détruire l'ouvrage de
vin, nécessaire à la célébration de la sainte Dieu. Toutes les viandes sont pures, mais il est mal
Messe, sont incapables de recevoir les saints à un hommed'en avec scandale. Il est bon
ordres. (Can. 13. concil. Elvir.) Plusieurs cano- au contraire de nemanger
uistes enseignent que les abstènies ne peuvent pointmanger de chair, ni boirede
même être aux ordres vin, et de s'abstenir de tout ce qui choque,scandalise
pas promus mineurs. ou affaiblit votre frère.
Pendant que les calvinistes soutenaient de
Dans tout ce qui est nécessaire ou
toutes leurs forces que la communion sous les reconnu l'Eglise, très utile à la sanctification des âmes
deux espèces est de précepte divin, ils décidèrent doit être réglé, et, comme la mortification est
au synode de Chareiilnn que les abstènies pou-
vaient être admis à la cène, pourvu qu'ils tou- indispensable pour nous faire marcher sur les
traces de Jésus-Christ et nous maintenir dans la
chassent seulement la coupe du bout des lèvres, il fallait que dans sa forme la plus con-
sans avaler une seule goutte de vin. Les lulbô- vertu, la
riens leur reprochaient cette tolérance, comme nue et plus accessible à tous, elle devînt une
institution publique.
une prévarication sacrilège. De cette contesta-
tion même, on a conclu contre eux qu'il n'est pas L'Eglibe n'a rien ordonné de contraire à S.
Paul lorsqu'elle a défendu l'usage de certaines
vrai que la communion sous les deux espèces
soit de précepte divin, puisqu'il y a des cas où viandes en certains jours, puisqu'elle ne les a
l'on peut s'en dispenser 1. pas regardées comme immondes, mais qu'elle a
seulement considéré que l'abstinence de ces
ABSTENTION. viandes, en certains jours, pouvait contribuer à
la chair. (Concil.de Colognede l'an 1536.)
La simple ordonnance de s'abstenir de célé- mortifier
brer le service divin dans une église n'est point L'abstinence de la viande et de tout aliment
une censure, quoiqu'elle approche beaucoup de gras est de précepte, 1° tous les vendredis et
l'interdit local. De là. il faut conclure que celui samedis de l'..nnée. Cependant il est permis de
qui célèbre dans une église polluée par l'effusion faire gras le jour de Noël, si cette fête tombe le
du sang ou autrement pèche grièvement, mais vendredi ou le samedi ; c'est la disposition du
qu'il n'encourt pas d'irrégularité. (Bonif. VIII, chapitre Explicari, 3, de Observ. jejun. : « Expli-
ctip. Is quis, de Sentent, excommuuicat.,in 6°.) cari per sedem apostolicam postulas, utrum sit
licitum illis qui nec voto nec régula sunt abs-
ABSTINENCE. tricti, carnes comedere, quando in sextà ferià
L'tt6sti«cnce,tclle que nous l'envisageons ici,est dies Nativitatis Dominicas occurrit. Ad hoc res-
une vertu par laquelle on s'abstient de certaines pondemus quod illi carnibus propter festi ex-
cnoses, en vertu dune institution ecclésiastique: cellentiam vesci possunt, secundum consuetu-
tel est le jeune el l'abstinence de la viande pen- dinem Ecclesias generalis. Nec tamen hi repre-
dant le Carême, ainsi que les vendredis et same- hendendi sunt qui ob devotionem voluerint'
dis de chaque semaine. abstinere. • Dans plusieurs diocèses de France,
1. Bergier,Dictionnaire
dethéologie,
art. ABSTEME d'après un ancien usage, il est permis de faire
ABSTINENCE 37
gras tous les samedis, depuis Noël jusqu'à la jourd'hui, et s'il est permis d'user de ces choses,
Purification. et même de la viande à certains jours du Ca-
Comme dans plusieurs provinces d'Espagne, il rême, ce n'est qu'en vertu de dispenses annuel-
s'était établi cette singulière coutume que tout les qui, devant être renouvelées,n'ont pu abroger
en s'abstenant le samedi de l'usage de la viande la loi.
en général, il était permis de manger les extré- Le concile de Rouen (1849) s'exprime ainsi à
mités des animaux, Benoît XIV, par sa Bulle cet égard : « quoad dispensationos, unusquis-
Jam pridem, permit aux royaumes de Gastille, que episcopus, apostolica auctoritate siiffullus,
de Léon et des Indes, d'user de toutes les par- in suâ dioecesi statuât quod salnti auimarum
ties des animaux les samedis où le jeûne ne se- utilius fore judicaverit. » (Décret.XXI.)
rait pas prescrit. Dans les premiers siècles, "l'abstinence du vin
Dans ces derniers temps, le commandement en Carême, était jointe à celle de la viande; elle
de l'abstinence le samedi a été suspendu dans a depuis longtemps disparu.
plusieurs pays, en vertu d'une autorisation du On lira avec intérêt les observations suivantes
Saint-Siège. que nous trouvons dans les Analecta juris ponti-
2° L'usage de tous les diocèses de France, de- fiai, tome IX, col. 515 et suiv. :
puis plus de treize cents ans est d'observer « Le précepte de l'abstinence appartient au
l'abstinence les trois jours des rogations. On droit naturel et divin. L'Eglise n'a fait que dé-
l'observe aussi dans plusieurs diocèses, le jour terminer cette obligation, en fixant le mode et
de S. Marc. La coutume est devenue loi ; elle le temps. Or, une tradition qui remonte à l'âge
donne lieu maintenant à un si grand nombre des apôtres, tradition universelle dans l'Eglise,
de transgressions qu'il serait à désirer que le car elle comprend l'Orient et l'Occident, cette
Saint-Siège retranchât par son autorité suprême tradition, disons-nous, est que les chrétiens
cette obligation d'abstinence. Déjà quelques doivent observer, non pas seulement un jour
prélats français ont supprimé cette abstinence, d'abstinence par semaine, mais bien deux jours
en vertu d'induits du Souverain Pontife. entiers.
Le concile tenu à Avignon en 1849),considérant » En ce qui concerne le vendredi, la discipline
que la loi de l'abstinence pendant les trois jours a été constamment uniforme, soit parmi les
des rogations, n'était pas en vigueur dans tous Orientaux, soit parmi les Latins.
les diocèses de France, et qu'elle était presque » L'Eglise de Rome a toujours observé l'abs-
abrogée par un usage contraire, décida, avec tinence du samedi. On croit que cette institution
l'approbation du Souverain Pontife, que l'abs- remonte au prince des apôtres. Afin d'abolir
tinence ne serait plus prescrite à l'avenir pen- complètement le sabbat hébraïque, qui avait été
dant ces trois jours dans toute l'étendue de la le jour de Dieu pendant quatre mille ans, le
province métropolitaine d'Avignon. « Haecpro- moyen le plus efficace était de le consacrer à la
vincialis synodus, approbante Summo Pontifice, pénitence, d'en faire un jour d'abstinence, et
decernit usum carnium non in posterum fore comme la vigile du dimanche, qui est le jour
prohibitum, triduo rogationum, in dioecesibus de fête des chrétiens. La substitution du di-
provineise Avenionensis. » (Tit. III, cap. 2.) manche au sabbat est le signe caractéristique qui
Dans certains endroits, lorsque la fête de sépare l'ancien monde et le monde chrétien. La
S. Marc et la procession de ce jour sont trans- discipline romaine a prévalu dans tout l'Occident,
férées, il n'y a pas d'abstinence cette année-là. et le samedi est partout un jour d'abstinence. Les
3° En Carême, on doit s'abstenir en règle gé- induits, qui permettent de faire gras le samedi,
nérale, des aliments gras, des oeufs et du lai- n'ont pas détruit la loi : cette loi subsiste encore
tage. dans la discipline générale, les induits sont très
Dès le principe, l'Eglise a fait entrer dans le récents, ils ne sont accordés que pour un laps
jeûne des retranchements sur la quantité et la de temps très restreint, pour un an ou pour cinq
qualité des aliments ordinaires. La chair des ans au plus. La loi reprendrait son empire si le
animaux étant plus nutritive, et l'usage n'en Pape refusait de renouveler l'induit, qui est mo-
ayant été accordé par Dieu aux hommes, après tivé sur la quasi-impossibilité d'avoir des ali-
le déluge, que par indulgence, elle fut interdite ments maigres.
tous les jours où le jeûne était obligatoire. Par » Les constitutions apostoliques commandent
voie de conséquence, il était prescrit de s'abs- expressément le jeûne du mercredi et du ven-
tenir aussi de tout ce qui provient des animaux, dredi. « Proecipimus vobis quartis et sextis fe-
comme des oeufs, de la graisse, du beurre, du riis jejunetis. » (Lib. 5, cap. ult.)
laitage. En droit, cette règle existe encore au- » Le canon apostolique 69 punit de déposition
38 ABSTINENCE
les ecclésiastiques, et d'excommunication les » L'abstinence du samedi, au lieu du mercredi,
laïques qui ne jeûneraient pas le carême et les se propagea rapidement dans l'Eglise latine,
mercredis et vendredis de toute l'année. Ainsi surtout à partir du septième siècle.
les jeûnes du mercredi et du vendredi sont com- » S. Isidore ajoute que plusieurs personnes
pris dans la même loi et commandés sous la jeûnaient aussi le samedi, pour se conformer à
même peine que le carême. l'usage de Rome : « Sed et sabbati die a pleris-
» Tertullien, qui vivait à la fin du second que, propter quod in eo Ghristus jacuit in se-
siècle, a fait parler toute l'Eglise latine au même pulchro, prsesertim cum apostolica Sedes hanc
sens que les constitutions apostoliques, à savoir regulam teneat.
que les deux abstinences de chaque semaine « Entre les lettres du pape Adrien Ier, il y en
venaient des apôtres. Si toute l'Eglise latine a une qu'il écrivit à Egila, évoque d'Espagne,
était dans ce sentiment à la fin du second siècle, pour le jeûne du vendredi et du samedi : « Pro
à peine peut-on douter que ce ne fut une cons- jejunio sexta feria ac sabbato celebrando. »
titution et une tradition des apôtres. » On travaillait aussi à en faire un comman-
» S. Epiphane n'a cité le livre des constitu- dement dans les églises de France. C'est dans les
tions apostoliques qu'en y joignant la tradition capitulaires de Charlemagne que nous trouvons
des apôtres, attestée par l'ancienne pratique et cette loi proposée : « Omni sexta feria propter
la coutume immémoriale de toutes les églises du passionem Domini jejunetur; sedet sabbati
monde. S. Epiphane ajoute que l'on honore dans dies a plerisque, propter quod in eo Christus
les deux jeûnes le commencement et la consom- jacuit in sepulchro jejunio consecratus habe-
mation de la Passion de Jésus-Christ; qu'on fait tur. > (Lib. VI, cap. 184.)
le service divin le matin et que le jeûne finit » S. Grégoire VII fit une loi générale pour
à l'heure de none. (Haeres.75, Expositiofi.d.,n. 22.) toute l'Eglise, non du jeûne, mais de l'absti-
» Plusieurs églises d'Occident gardaient l'abs- nence du samedi, hors des maladies ou d'une
tinence le samedi, selon la tradition romaine ; grande fête. Gratien dit que ce fut dans un con-
S. Augustin nous apprend qu'elle était observée cile romain; ce fut celui de l'an 1078.
en Afrique, mais non à Milan. Ste Monique » Voici le décret :
étant en peine si elle devait garder l'abstinence » Quia dies sabbati apud sanctos patres nos-
du samedi, comme on faisait en Afrique, ou tros in abstinentia celebris est habitus, nos eo-
bien observer le mercredi, comme à Milan, où rumdem authoritatem sequentes salubriter ad-
elle était alors, S. Augustin, qui était encore monemus, ut quicumque se Christian» religio-
catéchumène, consulta sur ce doute S. Am- nis partieipem esse desiderat, ab esu carnium,
broise. eadem die,nisi majore festivitate interveniente,
* Toujours est-il que les églises d'Occident, vel infirmitate impediente, abstineat. » (DeCons.,
qui n'observaient pas le samedi, avaient l'abs- lib. III, cap. 31.)
tinence du mercredi ; en tout cas, les deux jours » Innocent III, répondant à la consultation de
d'abstinence par semaine étaient universelle- l'archevêque de Prague sur la liberté que quel-
ment gardés dans toute l'Eglise, suivant la tra- ques-uns se donnaient de manger de la viande
dition apostolique. le samedi, quoique ce ne fût pas la coutume de
» Ainsi les deux jours d'abstinence par se- son église, et que quelques-uns fussent scanda-
maine sont très anciens dans l'Eglise latine lisés, ordonna de maintenir la coutume de son
comme dans l'Orient. L'heure de none terminait église. (Consil.de ohserv.jejun.)
ces jeûnes : on les appelait demi-jeûnes, parce » S. Antonin dit qu'on ne peut sans crime
que les autres jeûnes étaient prolongés jusqu'à manger de la chair le samedi, dans les lieux où
la fin des vêpres, qui ne finissaient qu'avec le la coutume de n'en point manger est universel-
jour. (Tertull., lib de Jejun.) lement reçue, mais si la coutume est d'en man-
» Le pape S. Innocent Ier nous apprend qu'à ger, on peut sans scrupule se conformer à la
Rome et dans les églises qui imitaient sa disci- coutume : « In sabbatis comedere carnes in lo-
pline sur les jeûnes, on jeûnait tous les vendre- cis, ubi est consuetudo universaliter non come-
dis, aussi bien que tous les samedis. di, mortale est : secus si consuetudo patrioe
» La raison que ce Pape propose est convain- habet, quod comedantur, quia tune stabitur
cante, puisque c'était une coutume aussi an- consuetudini. » (S. Antonin mourut en 1459.)
cienne que l'Eglise de Rome, et passée en loi. " Telle était donc alors la discipline de l'E-
La raison qu'il en donne, c'est la tristesse des glise occidentale, qu'on n'y parlait plus de l'o-
apôtres pendant le vendredi et le samedi avant bligation du jeûne du samedi; et quant à
Pâques, que les fidèles voulaient imiter. l'abstinence, elle était d'obligation. Il peut se
ABUS 39
faire que ce que dit S. Antonin eût été dès lors ment ceux qui peuvent donner lieu à des récla-
limité au petit nombre de samedis privilégiés mations, et contre lesquels on peut trouver un
entre Noël et la Purification, et à un petit nom- remède et un secours. Nous ne parlerons pas des
bre de diocèses qui avaient retenu le vestige de autres, dont Dieu est le seul juge, comme si un
l'ancienne discipline, et observaient encore évêque privait sans raison un prêtre de la juri-
l'abstinence du mercredi. diction déléguée, si un confesseur refusait in-
» Vers le milieu du siècle dernier, les Espa- justement l'absolution, et beaucoup d'autres abus
gnols ont obtenu du Saint-Siège la dispense semblables.
totale et perpétuelle de l'abstinence du samedi. Le premier abus est de s'attribuer une juri-
Le vendredi même n'est pas bien rigoureuse- diction sur les sujets d'un autre : « Nullus, dit le
ment observé en Espagne, grâce à la célèbre droit canonique, altenus terminos usurpet, nec
bulle de la croisade. Ces mitigations ont-elles alterius parochianumjudicare, vel ordinare, aut
été favorables au progrès de l'esprit et de la excommunicare proesumat ; quia talis judicatio
vigueur chrétiens ? Il semble permis d'en dou- aut ordinatio nullas vires habebit; unde et Do-
ter. En effet, la décadence morale et religieuse minus loquitur. » (Deut., cap. 19): « Ne trans-
de 1 Espagne semble coïncider avec la suppres- grediaris terminos antiquos, quos posuerunt pa-
sion des vénérables lois qui maintiennent dans tres tui. » (Cap. Nullus, caus. 9, q. 2.)
le peuple chrétien la pratique de la mortifica- Le second abus consiste à étendre la juridic-
tion et de la pénitence, et qui assurent l'ac- tion sur une matière étrangère, ce qui arrive-
complissement du précepte divin concernant rait si un curé, revêtu seulement du pouvoir
l'abstinence. spirituel, voulait encore exercer sur ses propres
» Rome et l'Italie continuent de garder l'abs- paroissiens une juridiction* contentieuse; ou si
tinence du samedi. En Angleterre, en Belgique un juge ecclésiastique jugeait de sa propre au-
et en France, l'induit est très récent, ainsi que torité des choses purement civiles.
nous l'avons dit plus haut. Loin d'être accordée Le troisième serait si un supérieur qui n'est
à perpétuité, la dispense n'est donnée que pour pas le supérieur immédiat, appelait à son tribu-
quelques années; il faut, par conséquent en ob- nal sans raisons approuvées par les canons, une
tenir le renouvellement. Afin que la dispense cause qui ne serait pas jugée en première ins-
soit valide, il est nécessaire que les motifs que tance par le juge immédiat : « Cùm, omisso dioe-
l'on allègue en la demandant soient fondés et cesano episcopo, fuisset ad archiepiscopum ap-
réels. » pellatum, in causa ipsâ de jure procedere non
Régulièrement, la cuisine, les jours maigres, debebat... Quocircà mandamus quatenùs sen-
ne peut être faite qu'au beurre ou à l'huile. tentias post hujusmodi appellationem latas de-
Pour être autorisé à la faire à la graisse, il fau- nuntietis penitùs non tenere. » (Cap. Dilecti filii,
drait avoir obtenu préalablement un induit de Appellalionibus.)
spécial. Le seul motif à invoquer serait celui-ci: Mais la difficulté est de savoir quel est le su-
le beurre est une alimentation peu commune périeur seulement médiat. On admet communé-
dans le pays et en conséquence coûteuse; l'huile ment que l'évêque aune juridiction immédiate sur
n'y est pas admise habituellement et encore chacun de ses diocésains. Il est certain, au con-
est-elle réservée spécialement pour les jours de traire, que l'archevêque, le primat, le patriar-
maigre strict. che, comme tels, n'ont qu'une juridiction mé-
A Rome, l'induit de la préparation à la graisse diate. Relativement au Souverain Pontife,
est renouvelé chaque année. toute cause peut lui être directement déférée
omissis mediis, car puisqu'il est le recteur de
ABUS.
l'Eglise universelle et qu'il a juridiction ordi-
L'abus est le terme de droit qu'on applique à naire sur tous les fidèles, il peut concourir
tous les cas où il y a de la vexation de la part avec tous les ordinaires pour la connaissance
des supérieurs ecclésiastiques, ou contravention des causes (can. 17, caus. 9, qu. 3). Il résulte
aux canons. Ainsi l'on entend par abus tout de ce qui précède que le Pape peut accueillir
usage illicite de la juridiction: « Abusus dicitur sans qu'il y ait abus, les appels qu'on ferait de
malus usus vel illicitus usus abusio. Abusus n'importe quel tribunal ecclésiastique en
etiam est qui propriè committitur in actu, eu- omettant même les degrés intermédiaires de
jus actus nullus est, » (Archiâ. in c. Quamvis,de sa juridiction (can. 4 et 6, caus. 2, qu. 6). Les
Offic.deleg. in 6°.) Cette définition est un peu canons assimilent en cette matière au souve-
étendue et renferme un grand nombre d'abus. rain Pontife, son délégué dans la province de
Nous ne les indiquerons pas tous, mais seule- sa juridiction, comme représentant du Pape, il
40 ABUS
peut accueillir immédiatement les appels omissit, vent abus dans tous ces cas. Mais qui ne voit
gradibus mediis (V. SANTI JUScan. 1 II, lit. 28). qu'ils peuvent donner lieu à une foule de procès
En quatrième lieu, il y aurait abus, si les pre- et de vexations, s'ils s'ont mal interprétés. Car
miers supérieurs retiraient on restreignaient in- d'abord il y a diverses opinions sur les libertés
justement et sans cause la juridiction ordinaire et coutumes gallicanss ; on n'a jamais défini en
de ceux qui leur sont inférieurs. Le chapitre Ad quoi elles consistent, et il s'est souvent élevé
li.rc, 2, du Exccïsibus, blâme l'évêque qui aurait des controverses à cet égard entre les magistrats
placé plusieurs églises libres sous la dépendance et le clergé de France. Les magistrats prétendent
des archidiacres, pour diminuer les revenus de qu'il y a abus, quand une bulle ou toute autre
ces églises. constitution dos Souverains Pontifes est publiée
En cinquième lieu, il y aurait abus, si l'on en- sans l'agrément du gouvernement. Mais ne peut-
freignait les lois de discipline actuellement en il pas arriver qu'il soit nécessaire, selon les
vigueur ; par exemple, si un supérieur ordon- lois canoniques et le droit divin lui-même, de
nait ou faisait quelque chose contre les canons promulguer une constitution que le gouverne-
généralement reçus. ment rejetterait injustement et sans cause, sur-
En sixième lieu, il peut se glisser une foule tout s'il s'agissait d'une constitution qui eût
d'abus dans les jugements, soit parce que le une connexion nécessaire avec le dogme, et qui
juge méprise les formes prescrites par la loi, soit condamnât quelque erreur?
qu'il nuise aux parties par des retards ou toutes Voici encore quelques cas que notre législa-
antres choses fâcheuses. (Cap. 14 de Reseri.ptis.) tion considère comme abus :
Quant à la législation civile, les Articles or- 1°Il y a abus dans le fait de la part d'un évê-
g iniques, faits, suivant l'expression de Lacor- que de censurer, dans un mandement, la loi or-
daire, pour emprisonner l'Eglise , ont créé ganique du 18 germinal an X, et de la représen-
toutes sortes d'abus et peuvent donner lieu à ter comme violant les véritables libertés de
toutes les vexations. l'Eglise de France. (Cons. d'Etat, 9 mars 1845.)
Art. 6. Il y aura recours au conseil d'Etat 2° Le fait d'un évoque d'avoir, dans une lettre
clans tous les cas d'abus de la part des supérieurs rendue publique, quoiqu'en réponse aux critiques
cl autres personnes ecclésiastiques. Les cas d'a- dirigées contre un de ses actes par le ministre
bus sont l'usurpation ou l'excès du pouvoir, la dos cultes, contesté les droits qui appartiennent
contravention aux lois et règlements do la ré- au gouvernement à l'égard des évoques, et cen-
publique, l'infraction des règles consacrées par suré certains actes attribués au gouvernement
les canons reçus en France, l'attentat aux liber- et concernant la politique extérieure, constitue
tés, franchises et coutumes de l'Eglise gallicane, une contravention aux lois de l'empire et un
et toute entre prise ou tout procédé qui dans l'exer- excès de pouvoirs, et à ce titre doit être frappé
cice du culte, peut compromettre l'honneur des d'une déclaration d'abus. (Cons. d'Etat, 8 août
citoyens, troubler arbitrairement leurconscience, 1803.)
dégénérer contre eux en oppression, ou en inju- 3" Il y a, de la part d'un Evêque, abus et
res, ou en scandales publics. excès do pouvoir : 1° Dans le fait d'imposer à
Art. 7. Il y aura pareillement recours au con- des curés, avant leur installation, une renoncia-
seil d'Etat, s'il est porté atteinte à l'exercice pu- tion écrite et signée à se pourvoir devant l'au-
blic du culte et à la liberté que les lois et règle- torité civile, dans le cas où il jugerait à propos
ments garantissent à ses ministres. de le destituer pour des causes graves et cano-
Art. 8. Le recours compètera à toutes les per- niques; 2" Dans le fait d'interdire, sous peine
sonnes intéressées ; à défaut de plaintes parti- d'excommunication et sans intimation préala-
culières, il sera exercé d'office par les préfets. ble, le recours à la puissance séculière pour des
Le fonctionnaire public, l'ecclésiastique ou la faits qui seraient de sa. compétence ; 3° Dans le
personne qui voudra exercer ce recours, adres- fait de modifier, sans autorisation du gouver-
sera un mémoire détaillé et signé au conseiller nement, la constitution du chapitre de la ca-
d'Etat chargé de toutes les affaires concernant thédrale, telle qu'elle avait été établie par des
les cultes, lequel sera tenu de prendre, dans le statuts approuvés par ordonnances ou décrets.
plus court délai, tous les renseignements conve- (Cons. d'Etat, 6 avril 1857.)
nables, et sur son rapport, l'affaire sera suivie 4° Il y a abus dans le fait d'avoir publié dans
et définitivement terminée dans la forme admi- un mandement, ou d'avoir lu en chaire une let-
nistrative, ou renvoyée, selon l'exigence des cas, tre encyclique ou une bulle dont la réception,
aux autorités compétentes. la publication et la mise à exécution n'ont pas
On ne peut disconvenir qu'il y ait très sou- été autorisées par le gouvernement. (Cons.
ABUS 41
d'Etat, 26 octobre 1820, 9 mars 1845,8 février ver ou armer une partie des citoyens contre
1865.) les autres, le ministre du culte qui l'aura pro-
5° La mesure prise par un curé ou desser- noncé, sera puni d'un emprisonnement de deux
vant, dans l'exercice des droits de police et de à cinq ans, si la provocation n'a été suivie
surveillance qui lui sont conférés par les lois et d'aucun effet; et du bannissement, si elle a
règlements, no peut être déférée à la censure du donné lieu à une désobéissance, autre toutefois
conseil d'Etat (Cons. d'Etat, 10décembre 1868.) que celle qui aurait dégénéré en sédition ou ré-
En conséquence, ce curé ou desservant peut, volte.
sans craindre de donner lieu à un appel comme 203. Lorsque la provocation aura été suivie
d'abus, expulser un jeune garçon du catéchisme, d'une sédition on révolte dont la nature donnera
enjoindre à une personne qui trouble la tran- lieu contre l'un ou plusieurs des coupables à
quillité d'une procession de sortir des rangs de une peine plus forte que celle du bannissement,
cette procession (Dalloz, Recueil périodique, cette peine, quelle qu'elle soit, sera appliquée
1869.),chasser de l'église une personne qui y au ministre coupable de la provocation.
occasionne du désordre (Cons. d'Etat, 23 décem- 204. Tout écrit contenant des instructions
bre 1840),défendre, dans une circonstance grave, pastorales, en quelque forme que ce soit, et
à des jeunes filles d'accompagner un convoi dans lequel un ministre du culte se sera ingéré
funèbre et faire enlever des emblèmes déposés de critiquer ou de censurer, soit le gouverne-
sur un cercueil (Cons. d'Etat, 15septembre 1843), ment, soit tout acte de l'autorité publique, em-
enjoindre publiquement à un fidèle, pendant portera la peine du bannissement contre le mi-
l'office,de quitter la place qu'il occupe et le cos- nistre qui l'aura publié.
tume qu'il porte comme membre d'une confré- 205. Si l'écrit mentionné en l'article précé-
rie formée dans la paroisse (Cons. d'Etat, 7 août dent contient une provocation directe à la dé-
1829),séquestrer les chaises apportées à l'église sobéissance aux lois ou autres actes de l'auto-
par des particuliers qui ne veulent pas payer les rité publique, ou s'il tend à soulever ou armer
droits fixés parle conseil de fabrique, ou même une partie des citoyens contre les autres, le
sommer publiquement ces individus d'avoir à ministre qui l'aura publié sera puni de la dé-
payer le plus tôt possible. (Cons. d'Etat, 22 avril tention.
1858). 206. Lorsque la provocation contenue dans
6° Le fait par un ecclésiastique d'avoir pro- l'écrit pastoral aura été suivie d'une sédition
noncé en chaire des paroles qui ont dégénéré ou révolte dont la nature donnera lieu contre
en scandale public constitue un cas d'abus. l'un ou plusieurs des coupables à une peine
(Cons. d'Etat, 3 mai 1837.) plus forte que celle de la détention, cette peine,
7° Il y a abus dans le fait, de la part d'un quelle qu'elle soit, sera appliquée au ministre
curé ou desservant, de prononcer en chaire, coupable de la provocation.
contre une jeune fille de la paroisse, l'exclusion Les articles 207 et 208 prononcent une amende
d'une congrégation motivée sur sa mauvaise de 100 à 300 fr., un mois à deux ans de prison,
conduite ou sur sa participation à certains gra- même le bannissement ou même une peine plus
ves désordres survenus dans la commune. sévère, contre les ecclésiastiques qui auront
(Cons. d'Etat, 19 juin 1829). communiqué avec la cour de Rome sans l'in-
Nous avons cité ces décisions dans l'espoir termédiaire du Ministre des cultes. Ces arti-
qu'elles suffiront pour juger des cas analogues cles sont virtuellement abrogés par les consti-
qui peuvent se présenter. tutions qui ont reconnu la liberté de la presse
Le Code pénal punit de la manière suivante et la liberté de conscience et des cultes. La li-
les délits ou abus commis par les ecclésiastiques berté de conscience entraîne le droit de l'éclai-
dans leurs fonctions : rer par tous les moyens.
Art. 201. Les ministres des cultes qui pro- D'après le premier article organique, aucune
nonceront, dans l'exercice de leur ministère et « bulle, bref, rescrit et autres expéditions de
en assemblée publique, un discours contenant la cour de Rome, même ne concernant que
la critique ou censure du gouvernement, d'une des particuliers, ne peuvent être reçus, pu-
loi, d'un décret ou de tout autre acte de l'au- bliés, imprimés ou autrement mis à exécution
torité publique, seront punis d'un emprisonne- sans l'autorisation du Gouvernement. »
ment de trois mois à deux ans. Les Evêques demandèrent qu'il fût fait,
202. Si le discours contient une provocation comme autrefois, une exception en faveur des
directe à la désobéissance aux lois ou aux ac- brefs de la pénitencerie relatifs au for inté-
tes de l'autorité publique, ou s'il tend à soule- rieur; un décret du 28 février 1810fit droit à
42 ABUS
leur demande. Cette exception était d'autant matoires à l'égard du demandeur, se confondent
plus nécessaire qu'il avait été décidé, en 1808, avec un acte de fonctions ecclésiastiques dudit
(ju'aucune supplique ne pourrait être transmise sieur Lebris, et avec l'exercice du culte, et ren-
au Souverain Pontife que par la voie du minis- trent dans les cas d'abus, prévus par l'article 6
tère des cultes, et que plusieurs personnes de la loi du 18 germinal an X (articlesorgani-
avaient la plus grande répugnance à employer ques), qu'elles devaient donc être déférées, avant
cette voie, craignant qu'il ne fût donné une pu- toute action judiciaire, à l'autorité du conseil
blicité indiscrète aux motifs qui les faisaient d'Etat; — Rejette. »
recourir à Rome. Les refus injustes et arbitraires des sacre-
L'usage a étendu cette faculté au delà des ments, de la sépulture chrétienne, etc., lors-
limites accordées par la décret de 1810.Depuis qu'ils sont contraires aux lois canoniques, sont
longtemps on s'adresse directement au Souve- de véritables abus;mais le refus du prêtre peut
rain Pontife, sans autorisation, pour tous les souvent avoir lieu pour de justes et légitimes
cas qui n'intéressent que l'administration spi- causes , que l'autorité séculière n'approuve
rituelle des paroisses et des diocèses. point, quoique ce refus soit tout à fait juste et
Le clergé doit sans doute observer les lois de conforme à la règle des canons. Dans ces diver-
l'État; mais ne peut-on pas comprendre quel- ses circonstances, les ministres de l'Église ont
quefois sous ce nom, et on en a vu trop d'exem- donc besoin d'user d'une très grande prudence
ples , des décrets contraires au droit divin et d'une très grande circonspection. On voit
comme au droit canonique, et à l'occasion des- aux mots Sacrement et Sépulture, les cas où
quels il est permis de dire, comme les apôtres : l'on peut et où l'on doit refuser les sacrements,
Jugez s'il est juste d'obéir aux hommes plutôt la sépulture chrétienne, etc.
qu'à Dieu : Si juslum eut vos pottus audire quam On trouvera, aux mots Appel et Appellation,
Dcum judicate? (Act. Apost., cap. 4.) Nous ne ci- les remèdes canoniques contre l'abus; et, au
terons que le divorce qui fut, soit en 1792,soit mot Appel comme d'abus, comment la loi ci-
sous le premier empire, permis en France par vile agit contre ce qu'elle appelle : abus.
le code civil, pendant une vingtaine d'années ACCEPTATION.
seulement, puis supprimé le 8 mai 1816, et na-
guère rétabli par une loi du 27 juillet 1884,jus- L'acceptation est l'acte par lequel quelqu'un
qu'à ce qu'un bon gouvernement le supprime accepte et agrée quelque chose.
de nouveau. § I. Acceptation d'un bénéfice.
Un prêtre peut compromettre l'honneur des La collation d'un bénéfice n'est parfaite que
citoyens dans l'exercice même de son ministère, du moment qu'elle a été acceptée par celui à
par exemple dans une prédication pendant les qui le bénéfice est conféré; c'est l'acceptationqui
offices publics. Dans ce cas, il y a délit spécial forme le lien entre le bénéfice et le bénéficier,
d'abus, différent de la simple diffamation, dont « per collationem absenti factam jus non acqui-
le prêtre peut être coupable dans d'autres cir- ritur, nisi absens eam ratam habuerit. » (C. Si
constances. Les tribunaux ont déclaré que les tibi absenti, de Prseb.,in 6°.)
juges ordinaires ne peuvent connaître de ce Tout pourvu d'un bénéfice, soit sur résigna-
délit, que lorsque le conseil d'État a prononcé tion simple ou en faveur, soit per ubttum, est
sur l'abus. Ainsi un arrêt de la cour de cassa- donc tenu d'accepter ou de répudier le bénéfice
tion, du 18 septembre 1836,porte : « La cour... qui lui est conféré. Avant cette acceptation, il
sur le moyen pris des art. 13 et 14 de la loi du est censé n'y avoir aucun droit, ou du moins il
11 mai 1819.(Art. 13.) Toute allégation ou im- n'a point fait de titre sur sa tête : car cette
putation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur collation quoique non acceptée, donne toujours
ou à la considération de la personne ou du ce qu'on appelle jus ad rem. Avant l'acceptation,
corps auquel le fait est imputé, est une diffama- la collation ne donne que jus ad rem, tandis que
tion. Toute expression outrageante, terme de la collation acceptée donne jus in re.
mépris ou invective, qui ne renferme l'imputa- Cette acceptation peut se faire en plusieurs
tion d'aucun fait, est une injure. — Art. 14.La manières et relativement au genre de la vacance
diffamation et l'injure seront punies d'après les ou à la nature des provisions. Mais comme cette
distinctions suivantes, etc.) : — Attendu que acceptation n'a plus lieu maintenant en France,
d'après les faits rapportés dans le jugement du nous n'entrerons ici dans aucun détail.
tribunal de Brest, les paroles que le sieur Le- § II. Acceptation d'une élection.
bris est prévenu d'avoir proférées publiquement L'acceptation est absolument nécessaire pour
en chaire, et qui sont incriminées comme diffa- la validité d'une élection ; si l'élu est absent, on
ACCEPTION 43
lui donne un mois de temps pour accepter son à son Église de ses dons mêmes. » Cette raison
élection, et trois mois pour obtenir sa confir- n'empêchait pas que, dans le parlement de Paris,
mation. on ne jugeât le contraire, c'est-à-dire qu'un do-
nateur ou fondateur pouvait révoquer sa libé-
§ III. Acceptation d'une donation.
ralité, jusqu'à ce qu'elle eût été, comme on di-
L'acceptation est de l'essence d'une donation, sait, homologuée par le décret de l'évêque ; car
en sorte qu'une donation dont l'acte ne ferait c'est là proprement ce qui mettait le sceau à l'ac-
pas expressément mention du consentement ou ceptation ou à l'effet des donations faites à l'E-
de l'acceptation du donataire, serait nulle sui- glise. Il en était autrement de celles qui étaient
vant les lois : c Non potest liberalitas nolenti faites aux hôpitaux, parce qu'ils étaient consi-
acquiri. » (L. 19, ff. de Donat.) dérés comme des corps laïques, ou dont l'admi-
« La donation entre-vifs, dit l'article 894 du nistration n'était pas tant dans la dépendance
code civil, est un acte par lequel le donateur se de l'ordinaire, à moins qu'ils n'eussent été éri-
dépouille actuellement et irrévocablement de la gés en titres perpétuels de bénéfices.
chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte.»
« La donation entre-vifs n'engage le donateur, ACCEPTION DE PERSONNES.
et ne produit aucun effet, que du jour qu'elle a L'acception de personnesest une injuste préfé-
été acceptée en termes exprès. » (Art. 932.) rence que l'on donne à une personne, au préju-
Il en était de même sous l'empire des ancien- dice d'une autre. « Acceptio personse, dit Hu-
nes lois, ainsi que le prouvent les deux articles gon, est quoedam fatua reverentia exhibita alicui
suivants de l'édit de main-morte du mois de fé- non causa débita, sed propter timorem vel uti-
vrier 1781. litatem. »
« Art. 5. Les donations entre-vifs, même celles L'Écriture sainte défend sévèrement à un juge
qui seraient faites en faveur de l'Église ou pour de favoriser un parti au préjudice de l'autre, d'a-
causes pies, ne pourront engager le donateur, voir plus d'égard pour un homme puissant que
ni produire aucun autre effet, que du jour qu'el- pour un pauvre; c'est un crime contraire à la
les auront été acceptées par le donataire, ou loi naturelle. « Ne faites acception de personne
par son procureur général, ou spécial, dont la mais écoutez le petit comme le grand: vous
procuration demeurera annexée à la minute de n'aurez égard à personne, car c'est le jugement
la donation ; et en cas qu'elle eût été acceptée de Dieu. Si une cause vous paraît difficile ren-
par une personne qui aurait déclaré se porter voyez-la moi, et je l'entendrai. » (Deut. ch. I,
fort pour le donataire absent, ladite donation v. 17.) Job en témoigne de l'horreur. (Cap. XXIV
n'aura effet que du jour de la ratification ex- et XXXI.)Il est dit dans l'Ancien et le Nouveau
presse que ledit donataire en aura faite par acte Testament que Dieu ne fait point acception de
passé devant notaire, duquel acte il restera mi- personnes, etc. Mais sans rappeler ici les au-
nute. Défendons à tous notaires et tabellions tres passages de l'Ecriture qui défendent sévè-
d'accepter les donations, comme stipulants pour rement aux juges de faire acception de per-
les donataires absents, à peine de nullité des- sonnes dans la distribution de la justice, nous
dites stipulations. » ne rapporterons que ces paroles du pape S.
« Art. 8. L'acceptation pourra aussi être faite Grégoire le Grand adressées aux évêques d'un
par les administrateurs des hôpitaux, hôtels- concile : « Admonemus autem ut non cujusquam
Dieu ou autres semblables établissements de personae gratia, non favor, non quodlibet blan-
charité, autorisés par nos lettres patentes, re- dimentum quemquam vestrûmab his qusenun-
gistrées en nos cours, et par les curés et mar- tiata sunt nobis, molliat vel à veritate excutiat,
guilliers, lorsqu'il s'agira de donations entre- sed sacerdotaliter ad investigandam (veritatem)
vifs pour le service divin, pour fondations par- vos propter Deum accingite. « (C. Sicut,inquit, 2,
ticulières ou pour la subsistance et le soulage- 3.7.)
ment des pauvres de leur paroisse. » Dans les ordinations, dans les élections, dans
Avant cette ordonnance, on ne faisait pas dif- les collations de bénéfices, dans l'administration
ficulté dans certains parlements de confirmer même des choses spirituelles l'acception de per-
des donations faites en faveur de l'église pu de sonnes est un vice contre lequel l'Église s'est tou-
causes pies, quoique non acceptées : « Dieu pré- jours élevée. (C. Licet, S,q. 1.)Dans une élection,
sent en tous lieux par son immensité, disait par exemple.ce ne serait pas assez pour un électeur
M. de Catellan, et maître par son domaine sou- de choisir une personne digne, s'il peut en choisir
verain de tous les biens de la terre, accepte Une plus digne: «Non satisestsieligatur idoneus
toujours suffisamment le don qu'on lui fait ou etutilis Ecclesioesi reperiatur idoneior, eligentes
44 ACCESSOIRE
autem non salvant conscientiam suam ubi po- Par le chapitre Publicato,extr. de Elcct., le scru-
tuerunt eligere meliorem, quia debent consulere tin une fois publié dans une élection, les élec-
Ecclesiae meliori modo quo possunt. » (C. Ubi teurs ne peuvent plus varier, comme nous le di-
periculum,§ Cxlerum, de Electione.)Si cependant sons ailleurs. Mais cette règle souffre deux
les statuts portaient seulement qu'on élirait exceptions : l'une en l'élection d'une abbesse,
une personne capable, bonumvirum, l'électeur, l'autre en l'élection du pape. Les religieuses, en
dans ce cas, n'aurait rien à se reprocher, et l'é- l'élection de l'abbesse, et les cardinaux, en l'élec-
lection serait valide. Il en serait autrement si tion du pape, peuvent retenir leurs suffrages en
les électeurs avaient fait serment de n'élire que faveur d'un élu, après la publication du scrutin ;
le plus digne 1. ce qui s'appelle par accession, eligereper accès-
L'acception de personnes est une chose con- sum. Sur quoi nous remarquerons qu'il y a ces
damnée généralement partout où l'on a quelque différences entre ces deux élections par rapport
idée de la justice. Mais au for extérieur, elle à l'accession, qu'en l'élection d'une abbesse, elle
n'est pas toujours punie; elle ne l'est, par exem- n'exclut pas les oppositions, quoiqu'elle forme
ple, dans les élections, ainsi que dans la collation la moitié des voix requises par le chapitre In-
des bénéfices, que lorsque l'élu ou le collataire demnitatibus,et que c'est le contraire dans l'élec-
a devers lui des qualités personnelles qui le ren- tion du pape. L'accession en l'élection du pape
dent de droit indigne du choix qu'on a fait de doit se faire secrètement, suivant la Constitution
sa personne. Les motifs de ceux qui l'ont choisi de Grégoire XV; ce qui n'est pas absolument re-
quelque iniques qu'ils puissent être, ne peuvent quis en l'élection d'une abbesse.
lui nuire qu'autant qu'on les prouve, et qu'ils Un auteur (Bignon) dit que le chapitre Indem-
sont tels que le choix paraît ou illicite ou simo- nitatibus, portant
que potest fieri electioper accès-
niaque. sum, ne s'entend que quand on commencé l'élec-
Voirlesmots:Election,
Simonie. tion per viam scrutinii, et qu'il s'y trouve quelque
ACCÈS. interruption ou par égalité de voix ou autrement.
Alors on peut reprendre la voie d'inspiration
En matière de bénéfices, les canonistes dis- pour confirmer et accomplir l'élection. C'est ce
tinguent l'accès, l'ingrès, et leregrês : accessus,in- qu'on dit communément, qu'on peut revenir
gressuset regressus. et changer d'opinion ; ainsi la voie d'inspiration
L'accèsest le droit qu'un clerc peut avoir pour peut bien être accessoire à la voie du scrutin,
l'avenir sur un bénéfice : c'est une espèce do mais non le scrutin à la voie d'inspiration.
coadjutorerie. Le pape donne ce droit quelque- Cotte règle ne peut avoir lieu pour les élec-
fois à un impétrant atteint de quelque incapa- tions où l'on observe la forme du chapitre Quia
cité personnelle, mais momentanée, comme le où les électeurs ne peuvent plus varier
propter,
défaut d'âge. Dans ce cas, le pape commet le bé-
quand leur suffrage a été rendu public.
néfice à un tiers appelé custodinos, pour le tenir
jusqu'à ce que le pourvu curn jure 'accesss soit ACCESSOIRE.
parvenu à l'âge qui fait cesser son incapacité.
L'ingrès est le droit par lequel celui qui a ré- L'accessoire est ce qui accompagne une chose,
signé un bénéfice dont il n'a pas pris possession, et qui est sous sa dépendance, mais sans y être
avec stipulation de retour, peut rentrer dans le lié nécessairement.
même bénéfice, ingredi in beneficium,dansles cas L'accessoire suit le principal, dit la quaran-
pour lesquels le retour a été stipulé. tième règle du droit dans le Sexte : « Accesso-
Quant au regrès, voyez ce mot. rium naturam sequi congruit principalis ». Cela
Pie V, par sa Constitution de l'an 1571, abo- signifie que l'accessoire dépend tellement du
lit l'usage de l'accès, ingrès, regrès et de tous principal que, régulièrement parlant, lorsque le
les autres actes tendant à rendre les bénéfices principal est accordé, défendu, annulé, enlevé ou
héréditaires. Mais cette constitution n'a été pro- confirmé, l'accessoire est censé également ac-
prement exécutée qu'en Franco, où l'on ne con- cordé, défondu, annulé, enlevé ou confirmé.
naît que les regrôs et les coadjutorerics en cer- « Ratio regulao est, dit Reiffonstuel (DeReg.ju-
tains cas rares. ris, reg. 42, n. 5) tum quia accessorium est conne-
xum et adhoerens principali : connexorum au-
ACCESSION. tem eadem est ratio, idemque judicium... Tum
Accession,en latin accessus est un terme em- quia mugis dignum trahit ad se minus dignum.
ployé en matière d'élection. Principale autem regulariter loquendo est prse-
InPragm.,de Elect.,cap.Sicut.
1. Guimier, cipuum et magis dignum. »
ACCUSATEUR 45
METROPOLES LIMITES I
ETCATHEDRALE. SAINTS
PATRONS. DESDIOCESES_
BULLE (Paternoe charitatis) pour la nouvelle même année, la circonscription des diocèses)à don-
circonscriptiondes diocèses. ner sur-le-chample bienfait de l'institution canoni-
» PIE, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu. que aux nouveauxévêques, afin que, sentinelles en
» Pour en conserverle perpétuelsouvenir, Israël, ils pussent promptement veiller à la gardo
» La sollicitudede la charité paternelle qui nous du troupeau qui leur a été confié.
fit conclurela conventiondu 11juin 1817,avec notre » Or, tel est le contenude ces lettres :
très cher fils en Jésus-Christ, Louis, très chrétien, » PIE, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu.
roi de France, ayant pour fin de régler plus conve- » Pour en conserverle perpétuelsouvenir.
nablementles affairesecclésiastiquesde son royaume, » Le soin de toutes les Églises, que la divine Pro-
cette sollicitudenous porta (après avoir désigné sui- » videnceaconfié à notre faiblesse, nous ordonneim-
vant le voeu du roi, par nos lettres apostoliques » périeusementde veiller avecun zèle infatigableà la
Commissadivinitus,du 6 des calendes d'août de la » garde du troupeau du Seigneur, et de seconderda
CONCORDAT 507
» toute la force de notre autorité apostolique tout ce » sous l'invocation de la bienheureuseVierge Marie;
» qui sera jugé devoir procurer la plus grande gloire » de Chàlons-sur-Marne, sous l'invocation de saint
» de Dieu et l'accomplissement de la religion catho- » Etienne; de Laon, sous l'invocation de la bienheu-
» lique ; et c'est dans ce dessein que nous avons ré- » reuse ViergeMarie; de Beauvais, sous l'invocation
« commentconclu avec notre très cher fils en Jôsus- » de saint Pierre ; de sous l'invocation de
» Christ, Louis, roi de Francetrès chrétien, une con- » samt Vincent; du Noyon, sous l'invocation de saint
Puy,
» venlion que nous avons confirméeet revêtue de no- » Laurent; de Tulle, sous l'invocation de saint Mar-
» tre sanction pontificale,par lettres apostoliques » tin; de Rodez, sous l'invocation de la bienheu-
» scelléesen plomb, en date du quatorzièmejoui des » reuse
» calendesd'août de cette année. Vierge Marie; de Castres, sous l'invocation
» de saint Benoit; de Périgueux, sous l'invocation
» Entre autres choses, nous y avons statué l'aug- » de saint Etienne et de saint Front; de Luçon,
» mentationdu nombredes archevêchéset évéchésdu n sous l'invocation de la bienheureuse Vierge Ma-
» royaume de France, et par conséquent une nouvelle » rie; d'Aire, sous l'invocation de saint Jean-Bap-
» circonscriptiondesdiocèses.C'est pourquoi,afin que « tiste; de Tarbes, sous l'invocation de la bienheu-
» nos voeuxet ceux de ce très pieux monarque ob- » reuse Vierge Marie, appelée de la Sède; de Nî-
» tiennent promptement leur effet, nous avons fait » mes, sous l'invocation de la bienheureuse Vierge
examineravec soin l'état des diocèses actuels, la » Marie ; de Perpignan, sous l'invocation de saint
» grandeur, la nature, la population des provinces » Jean-Baptiste; de Béziers, sous l'invocation des
» où ils sont situés afin d'établir de nouveaux ou- » saints Nazaire et Celse, martyrs; de Montauban,
» vriers, là où l'abondance de la moisson et la dis- » sous l'invocation de la bienheureuse Vierge Ma-
» tance des lieux en ferait sentir le besoin ; et, sui- » rie ; de Pamiers, sous l'invocation de saint An-
» vant les paroles du prophète, pour renforcer la » toine ; de Marseille, sous l'invocation de la Vierge
» garde et poser de nouvelles sentinelles. Après nous » Marie; de Fréjus, sous l'invocation de la bienheu-
» être concerté avec Sa Majesté très chrétienne et » reuse Vierge Marie; de Gap, sous l'invocation de
» avoir pris l'avis d'une congrégation choisiede nos » la bienheureuse Vierge Marie et de saint Arnould ;
» vénérablesfrères les cardinaux de la sainte Église » de Viviers, sous l'invocation de saint Vincent;
» romaine, nous avons examiné avec soin et mâtu- » de Verdun, sous l'invocation de la bienheureuse
» rite toutes les questions relatives à cette affaire; et » Vierge Marie; deBelley, sous l'invocation de saint
» ayant écrit aux archevêqueset évêques et aux cha- » Jean-Baptiste; de Saint-Diez, sous l'invocation de
» pitres des sièges vacants, nous leur avons mani- » saint Diez ; de Boulogne, sous l'invocation de la
» festé notre désir d'obtenir leur assentiment à la » bienheureuseVierge Marie; d'Orange, sous l'invo-
» circonscriptionproposée. » cationde la bienheureuseVierge Marie de Nazareth.
« Ainsi, tous ces arrangements ayant été heureu- » Et attendu que, par nos lettres apostoliques du
» sèmentterminés à la gloire du Dieu Tout-Puissant » troisième jour des calendes de décembre (26 dé-
» et de la bienheureuseMère de Dieu, que l'illustre » cembre 1801),les églises d'Avignonet de Cambrai,
» nation française honore avec une vénération parti- » qui très anciennement étaient en possession des
» culière, ainsi qu'à l'honneur des autres saints pa- » droits et des prérogatives de métropoles, ont été
» trons de chaque diocèse, et pour l'avantage des » réduites au rang de simples cathédrales ; aujour-
» âmes des fidèles, nous avons, en pleine connais- » d'hui de notre pleine autorité apostolique, nous les
» sance de cause et après un mûr examen et dans la » rétablissons dans leur ancien rang et leurs pre-
» plénitude du pouvoir apostolique, établi, outre les » miers honneurs, et nous les comprenons parmi
» siègesarchiépiscopaux maintenant existants dans » les autres églises archiépiscopales, et pour empè-
« le royaume de France, et nous établissons et éri- » cher que la mémoire d'une autre église très an-
» geons de nouveau sept autres Églises métropolitai- » cienne et très illustre, la métropole d'Embrun, qui
>•nés, savoir : » demeure supprimée en vertu desdites lettres apos-
» De Sens, sousl'invocation de saint Etienne,pre- » toliques, ne se perde entièrement, nous en ajoutons
» mier martyr;de Beins, sous l'invocationde labien- » le titre à celui de la métropole d'Aix.
» heureus„Vierge Marie; d'Alby, sous l'invocationde » Voulant d'ailleurs porter nos soins et notre at-
» saint Jean-Baptiste ; d'Auch, sous l'invocation de » tention à ce que, par suite de l'accroissement des
» la bienheureuseVierge Marie ; de Narbonne, sous » sièges, il soit fait en France une circonscription
» l'invocationdes saints Juste et Pasteur ; d'Arles, » exacte des diocèses, pour faciliter l'exercice de la
» sous l'invocationdes saints Trophime et Etienne; » juridiction spirituelle, et, par une démarcationfixe
» de Vienne en Dauphiné, sous l'invocation de saint » et précise, prévenir toutes les disputes qui pour-
» Maurice. » raient s'élever à cet égard ; de notre pleine et apos-
» Et trente-cinqautres églises épiscopales,savoir : » tolique autorité, nous décrétons par les présentes
» de Chartres, sous l'invocation de saint Etienne, » lettres, ordonnons et établissons en France une
» premier martyr; de Blois, sous l'invocation de » nouvelle division et circonscriptiondes archevêchés
» saint Louis, roi de France ; de Langres, sous l'in- » et évéchés, que nous jugeons convenables de fixer,
» vocationde saint Mamers; de Châlons-sur-Saône, » d'après l'état des lieux et provinces, de la manière
» sousl'invocationdesaint Vincentet de saint Claude; » suivante savoir :
» d'Auxerre, sous l'invocation de saint Etienne ; de » Métropolede Paris, département de la Seine. —
» Nevers, sous l'invocationde saint Cyr; de Moulins, » Suffragants: Chartres, Eure-et-Loir; Meaux, Seine-
508 CONCORDAT
» et-Marne; Orléans, Loiret; Blois, Loir-et-Cher; » ment do Castelnaudary, département de l'Aude ;
» Versailles, Seine-et-Oise. » Montpellier,arrondissement de Montpellier et de
» Métropole de Lyon, département du Rhône.— » Lodôve,départementde l'Hérault; Perpignan,Py-
» Suffragants; Autun, arrondissementd'Autun et de » rénéos-Orientales ; Béziers , arrondissement de
» Charoles, du déparlement de S lône-ot-Loire; Lan- » Béziersetde Saint-Pons,département de l'Hérault.
» grès, Haute-Marne; Chàlons-sur-Saône,arrondis- » Métropolede Toulouse,département de la Hauto-
» sementsde Màcon,de Ghàlons,de Louhans, dépar- » Garonne. — Suffragants: Montauban, Tarn-et-Ga-
» ternentde Suône-et-Loiro; Dijon,Côto-d'Or;Saint- » ronne; Pamiers, Ariége.
» Claude,Jura. » Métropole d'Arles, arrondissement d'Arles, dé-
» Métropolede Rouen, départementde la Seine-In- » partement des Bouches-du-Rhône.— Suffragants:
» férieure.—Suffragants:Bayeux,Calvados;Évreux, » Marseille, arrondissement de Marseille, départo-
» Eure; Séez, Orne; Coutances,Manche. » ment des Bouches-du-Rhône;Ajaccio,Corse.
« Métropolede Sens, arrondissementde Sons et de » Métropoled'Aix, avec le titre d'Embrun, arron-
» Joigny, déparlementde l'Yonne. — Suffragants: » dissement d'Aix, département des Bouehes-du-
» Troyes, Aube; Auxerre. arrondissements de Ton- » Rhône. — Suffragants: Fréjus, Var; Digne, Bas-
» nerre, d'Auxerreet d'Avallon, du département de » ses-Alpes; Gap, Hautes-Alpes.
» l'Yonne; Nevers, Nièvre; Moulins, Allier. » Métropolede Vienne, arrondissement de Vienne
» Métropolede Reims, arrondissement de Reims, » et de Latour-du-Pin, département de risére. —
» du département de la Marne et département des » Suffragants: Grenoble, arrondissement do Greno-
» Ardennes. — Suffragants: Soissons, arrondissc- » ble et de Saint-Marcelin,départementde l'Isère ;
» ment de Soissonset de Château-Thierry,du dépar- » Viviers, Ardèche; Valence,Drôme.
» lementde l'Aisne; Ohàlons-sur-Marne,arrondissc- « Métropolede Besançon,départements du Doubs
» ments d'Épernay, de Sainte-Ménehould,de Vitry, » et de la Haute-Saône. — Suffragants : Strasbourg,
» du département de la Marne ; Laon, arrondisse- » Bas-Rhin, Haut-Rhin; Metz, Moselle, y compris
» ments de Saint-Quentin,de Laon et de Vervins, du » les communesde Boucholing,Lettenig, Keindelin,
» départementde l'Aisne ; Beauvais, arrondissement » Zetting et Deding,qui dépendaient du diocèse do
» de Beauvaiset de Senlis, département do l'Oise; «Trêves; Verdun, Meuse; Belley, Ain, y compris
» Amiens,Somme; Noyon, arrondissementde Oler- » l'arrondissementde Gex,qui dépendaitauparavant
» mont et de Compiégne,départementde l'Oise. » du diocèsede Chambéry;Saint-Diez,Vosges; Nancy,
» Métropolede Tours, départementd'Indre-et-Loire. » Meurthe.
» — Suffragants: Le Mans, Sarthe et Mayenne; An « Métropolede Cambrai, départementdu Nord. —
» gers, Maine-et-Loire; Rennes, arrondissementsde » Suffragants: Arras, arrondissements de Béthune,
» Redon,Vitré, Renneset Montfort,départementd'I1- » d'Arras et de Saint-Pol, département du Pas-de-
» le-et-Vilaine; Nantes, Loire-Inférieure; Quimper, » Calais; Boulogne,arrondissementsde Saint-Omer,
» Finistère; Vannes,Morbihan; Saint-Brieuc,Côtes- » de Boulogneet de Montreuil, départementdu Pas-
» du-Nord; Saint-Malo, arrondissements de Saint- » de-Calais.
» Maloet de Fougères, départementd'Ille-et-Vilaine. » Métropolod'Avignon,arrondissementsd'Avignon
» Métropolede Bourges, départementsdu Cher et » et d'Apt, département de Vaucluse.—Suffragants:
» del'Indre. —Suffragants:Clermont,Puy-de-Dôme; » Orange, arrondissements d'Orange et de Carpon-
>>Limoges, Haute-Vienneet Creuse; Le Puy, Haute- » tras, départementde Vaucluse.
5>Loire; Tulle, Corréze ; Saint-Flour, Cantal. » Mais comme,par l'effet dela dernièrerévolution,
» Métropoled'Alby, arrondissement d'Alby et de » les églises de France ont été privées de leur patri-
» GaillacdéparementduTarn.—Suffragants:Rhodez, » moine, et que les dispositions de l'article 13 dola
» Aveyron; Castres, arrondissement de Castres,et de » conventionde 1801,touchantl'aliénation des biens
» Lavaur, département du Tarn; Cahors, Lot; » ecclésiastiques, dispositionsque nous avions con-
» Mende,Lozère. » firméespar amour de la paix, ont déjà sorti leur
» Métropole de Bordeaux, département de la Gi- » effet et doivent être irrévocablement maintenues
» ronde. — Suffragants : Agen, Lot-et-Garonne; An- » dans toute leur force et teneur, il devient neces-
» goulême,Charente; Poitiers, Vienne et Deux-Sè- » saire de pourvoir à leur dotation d'une autre ma-
» vres, Périgueux, Dordogne; La Rochelle,Charonte- « nière convenable: à cet effetnous dotons les sus-
» Inférieure; Luçon, Vendée. » dites églisesarchiépiscopaleset épiscopalesenbiens
» Métropole d'Auch, Gers. — Suffragants: Aire, « fonds, en rentes sur la dette publiquedu royaume,
» Landes; Tarbes, Hautes-Pyrénées,Bayonne, Bas- » vulgairementconnuessous la dénominationde ren-
» ses-Pyrénées. » tes sur l'Etat, et en attendant que les évêquespuis-
» Métropolede Narbonne, arrondissement de Nar- « sent jouir de ces revenuset de cesrentes, nousleur
v bonne et de Limoux, et les trois cantons de Ru- » assignons provisoirementd'autres revenus qui doi-
i) chant, Mouthoumet,la Grasse, de l'arrondissement » vent améliorerleur sort, ainsi qu'il est prescrit par
y>de Carcassonne,déparlement de l'Aude. — Sufïra- » l'article 8 de la dernière convention.
» gants : Nimes, Gard; Carcassonne, les neuf can- » Et en outre, et conformémentaux saints décrets
» tons de Alrome, Capendu, Carcassonne, Congues, » du concilede Trente, chaque métropoleet chaque
» Mas, Cabardès, Montréal, Payriac et Faissac, de » cathédraledevant avoir un chapitre et un sémi-
» l'arrondissement de Carcassonne, et l'arrondisse- » naire; mais considérant que,d'après l'usage, main-
CONCORDAT 509
» tenant observé en France, le nombre des digni- » nouvelle circonscription des diocèses, un certain
» tés et des chanoinesn'est pas encore fixé, nous ne » laps de temps avant l'envoi des institutions cano-
» pouvons,quant à présent, rien statuer sur cet éta- » ques et l'installation des nouveaux évêques, nous
» blissement: nous commettonscette charge aux ar- » voulons que l'administration spirituelle des terri-
» chevéqueset évêques des sièges que nous venons » toircs qui, pourl'effetdola nouvellecirconscription,
» d'établir, et nous leur ordonnonsd'ériger, aussitôt » doivent appartenir à d'autres sièges, reste en at-
» que faire se pourra, dans les formes canoniques, » tendant dans les mêmes mains, où elle est aujour-
» les susdits chapitres et séminaires à la dotation » d'hui, jusqu'à ce que les nouveaux évêques aient
» desquelsil est pourvu par l'article 8 de la susdite » pris possession de leurs sièges.
» convention. Nous leur recommandonsde veiller » Cependant,en fixant cette nouvelle circonscrip-
» pour la bonneadministration et la prospérité des- » tion des diocèses,laquellecomprendaussi le duché
» dits chapitres à co que chacund'eux dresse', sui- » d'Avignonet le Comtat-Venaissin, nous n'avons
» vant les meilleures lois ecclésiastiques et les dé- » voulu porter aucun préjudiceaux droitsincontesla-
» erets synodauxdes statuts, dont l'approbation et » blés du Saint-Siège sur ces doux pays, ainsi que
» la sanction leur seront soumises, et qu'ils fe- » nous avons fait ailleurs la réserve, et notamment
» ront observer : ces statuts auront pour objet prin- » à Vienne, durant le congrèsdes puissancesalliées,
» cipal la célébration du service divin, et en second » et dans le consistoire que nous avons tenu le
» lieu la manièredont chacundevra s'acquitter de » 5 septembre 1815;et nous nous promettons de la
» ces emplois. Ils auront soin, en outre, qu'il y ait » piété du roi très chrétien, ou qu'il rendra ces pays
» dans chaque chapitre deux chanoines, dont l'un » au patrimoine de saint Pierre, ou du moins qu'il
» remplira les fonctions de pénitencier et l'autre cel- » nous en donnera une juste indemnité, et qu'ainsi
» les de théologal. Mais nous voulons que dès qu'ils » Sa Majesté ellectuera la promesseque son trés il-
» auront achevéla formation de leurs chapitres, ils » lustre frère avait faite à notre prédécesseurPie VI,
» nous fassent parvenir un procès-verbal de cet éta- » d'heureuse mémoire,et qu'il neput aecomplirayant
» blissement,en nous désignant le nombre des di- » été prévenupar la mort la plus injuste.
» gnités ot des chanoines. » En achevant un aussi grand ouvrage pour la
» Ils porteront aussi toute leur attention vers les » gloire de Dieu et pour le s lut des âmes, nous de-
» séminairesoù les jeunes clercs sont formés à la » mandons principalementau Père des miséricordes
» disciplinede l'Église. Ils y établiront les règle- » et par l'intercession de la sainte Mère de Dieu, de
» ments qu'ils croiront, dans le Seigneur, le plus » saint Denis, de saint Louis et des autres saints
» propres à leur y faire puiser et garder inviolable- » que la France honoreplus particulièrementcomme
» ment la saine doctrine, à nourrir leur piété et en- » ses patrons et protecteurs, nous avons la ferme
» tretenir l'innocence de leurs moeurs,afin que ces » confianced'obtuuirquele nombredes évéchéset des
» jeunes plantes y croissentheureusementpour l'es- » évêques étant augmenté,la parole de Dieu sera an-
» poir de l'Église, et puissent avec l'assistance di- » noncéeplus souventd'une manière plus fructueuse;
» vine, donner par la suite des fruits en abon- » ceux qui sont dans l'ignorance seront instruits, et
» dance. » les brebis quiallaient périr dans l'égarementrentre
» Nous assignons à perpétuité, en matière spiri- « ront au bercail. Par ce moyen, nous pourrons nous
» tuelle, à la juridiction des sièges archiépiscopaux » réjouir des avantagesde cettenouvellecirconscrip-
» et épiscopaux ériges par les présentes, les dépar- » tion, qui ayant procuré la destruction des erreurs
» tementset arrondissements attribués pour le ros- » qui se propageaient et la conclusion des affaires
» sort de chaquediocèse, les habitants de l'un et de n ecclésiastiques, et donné plus de splendeur au
» l'autre sexe, clercs ou laïques et ecclésiastiques; » culte divin, et une mémopiété sincère dans toutes
» et nous les soumettonsauxditos églises et à leurs » les actions.
» futurs évêques, avec leurs villes, territoire, dio- » Nous voulons que les présentes lettres aposto-
» cèse, clergé et avec leur population tant présente » liques, et ce qu'elles contiennent et donnent, no
» qu'à venir. Nous ordonnonsdonc aux évêques qui » puissent être attaquées, sous le faux prétexte que
» seront placés, soit maintenant, soit par la suite, » ceux qui ont intérêt à tout ou partie desdites
» sur lesdits sièges archiépiscopaux,do prendre li- » lettres, soit maintenant, soit à l'avenir, du quel-
» brement, soit par eux, soit de faire prendre en leur » que état, rang, ordre, dignité ecclésiastique ou
» nom, et garder à perpétuité, on vertu desdites let- » séculière qu'ils soient, quelque dignes qu'on les
» très apostoliqueset de leur institution canonique, Msuppose d'une mention expresse et personnelle,
» possessionvraie, réelle, actuelle, effectivedesdits » n'y auraient point consenti, ou que quelqus-uns
» sièges et du gouvernementet do l'administration » d'entre eux n'auraient pas été appelés à l'effetdes
» des diocèsesde la juridiction qui leur compotele » présentes, ou n'auraient pas été suffisammenten-
» ressort desdits diocèses,et enfin des biens et re- » tendus dans leurs dires, ou auraient éprouvé
« venus qui leur sont ou seront assignés en dota- » quelque lésion, quel que puisse être d'ailleurs l'é-
« tion; à l'effetde quoi, nous avons voulu, pour l'a- » tat de leur cause, quelques privilèges mêmeex-
» vantage des sièges archiépiscopaux,et épiscopaux, » traordinaires qu'ils aient , quelques couleurs,
» qu'il fût pourvu à la fixation des revenus dont ils » prétextes ou citation de droits même inconnus
» doiventjouir. » qu'ils emploientpour soutenir leurs prétentions.
» En outre, comme il doit s'écouler, après cette » Ces mêmes lettres ne pourront également être
510 CONCORDAT
» considérées comme entachéesdu vice de subrep- » autre autoritéque ce soit, auxquels statuts, clauses,
» tion, d'obreption, de nullité ou de défaut d'inten- » actes et droits quelconques,nous dérogeonspar
» tion de notre part ou de consentementde la part » ces présentes, et nous voulons qu'il soit dérogé,
» des parties intéressées, ou de tout autre défaut, » quoiqu'ils n'aient pas été insérés ou spécifiésex-
» quelque grand, inattendu, substantiel, soit sous » pressément dans les présentes, quelque dignes
» prétexte que les formes n'ont pas été gardées, que » qu'on les supposed'une mention spécialeou d'une
» ce qui devait être conservé ne l'a pas été, que » forme particulière dans leur suppression; voulant,
» les motifs et les causes qui ont nécessité les pré- » de notre propre mouvement,connaissanceet pleine
» sentes, n'ont pas été suffisammentexaminés, dé- » puissance,que les présentesaientla mêmeforceque
» duits et expliqués, soit enfin pour toute autre cause » si la teneur des statuts à supprimer et celle dos
» ou sous tout autre prétexte : le contenudes pré- » clauses spéciales à conserver y étaient nommé-
» sentes lettres ne pourra aussi être attaqué, en- » ment et de mot à mot exprimées; la dérogation
» freint, ajourné dans l'exécution,restreint, modifié, » ayant lieu seulement quant à l'effet de ces pré-
» ou remis en discussion ; on ne pourra alléguer » sentes, soit en général, soit en particulier, et ce
» contre elles ni le droit de rétablir les choses dans » qui n'est pas incompatible avec elle demeurera
>»l'entier état précédent, ni celui de réclamation » dans toute sa validité. Nous voulonsaussi qu'on
» verbale, non plus que tout autre moyen de fait, » ajoute aux copies des présentes, même à celles
» de droit et de justice ; nous déclarons qu'elles ne » qui seraient imprimées,pourvu qu'elles soient si-
» sont comprises dans aucune clause révocatrice, » gnées par un notaire ou officierpublic, et scellées
» suspensive, limitative, restrictive, négative, ou » du sceau d'une personne constituéeen dignité ec-
» modifiante,établie pour toute espèce do constitu- » clésiaslique, la mômefoi que l'on ajouterait aux
» tions, d'écrits ou de déclarations générales ou spé- » présentes, si elles étaient produites en original.
» cialos, mêmequi seraientémanéesde notre propre » Qu'il ne soit donc permis à qui que ce soit d'on-
» mouvement, certaine science et plein pouvoir, » freindre ou de contrarier par une entreprise té-
» pour quelque cause, motif, ou temps que ce soit ; « méraire cette bulle d'érection, de formation, d'ad-
» nous statuons, au contraire, et nous ordonnonsen » jonction, de démembrement, do circonscription,
» vertu de notre autorité, de notre propre mouve- » division, assignation, assujettissement à la juri-
» ment, sciencecertaine et pleine puissance, qu'elles » diction, dotation, commission, mandement, déro-
» sont et demeurent exceptées des clauses, qu'elles » gation, décrets et volonté ; et si quelqu'un entre-
» ressortiront à perpétuité leur effet, et qu'elles se- » prend de le faire, qu'il sacho qu'il encourra l'in-
» ront fidèlement observées par tous ceux qu'elles » dignation du Dieu tout-puissantet dosbienheureux
» concernentet intéressent de quelque manière que » apôtres saint Pierre et saint Paul.
» ce suit; qu'elles serviront de titre spirituel et » Donnéà Rome, à Sainte-Marie Majeure, l'an
» perpétuel à tous les archevêques et évêques des » de l'incarnation de Notre-Seigneur Jésus-Christ,
» églises nouvellement érigées, à leurs chapitres et » le sixième jour dos calendes d'août 1817, et do
» aux membres qui les composeront,généralement » notre pontificat le dix-huitième.
» à tous ceux qu'elles ont pour objet, lesquels ne » Signé A., cardinal prodataire.
» pourront être molestés, troublés, inquiétés ou em-
» péchéspar qui que ce soit, tant à l'occasion des » H. cardinal CONSALVI.
» présentes que pour leur contenu, en vertu de Visade curia.
» quelque autorité ou prétexte que ce soit. Ils ne » Lieudu f sceauduplomb. » SignéD. TESTA.
» seront tenus ni à faire preuve ou vérificationdes » Contre-signeF. LAVIZZARI. »
» présentes, pour ce qu'elles contiennent, ni à pa » Mais nous vîmes, avec une douleur profonde de
» rattre en jugementou dehors, pour raison de leurs coeur, la susdite convention suspendue dans son
» dispositions. Si quoiqu'un osait, en connaissance exécution,et nous ne pûmes qu'être sensiblement
» de cause, ou par ignorance,quelle que fût son au- affligéde voir ainsi éloignés et retardés les fruits
» torité, porter atteinte à ces présentes, nous dé- abondants que nous en attendions.
» clarons, par notre autorité apostolique, nul et in- » Il nous fût en effet exposé, au nom du roi très
» valide tout ce qu'il aurait fait, nonobstantles dis- chrétien, que les chargesqui pesaient sur l'État, ne
» positions référées dans les chapitres de droit, sur permettaient pas d'établir 92 sièges épiscopaux,et
» la conservation du droit acquis et toutes autres que d'autres obstacles s'étaient opposésà ce que la
» règles de notre chancellerie apostolique, nos sus- conventionreçut son exécution : pour lover ces dif-
» dites lettres apostoliques commençant par ces ficultés,le roi eut recours à l'autorité apostolique,
» mots : Qui Christi Dominivices,les statuts, coutu- afin que de la meilleure manière possible, eu égard
» mes, privilèges et induits, soit des métropolesde aux circonstances du royaume, on fit, suivant les
» la dépendance desquelles nous avons retiré quel- règles canoniques,quoique diminutiondans le nom-
ques églisessuffragantes,soit des sièges archiépis- bre des sièges, dont Sa Majesté avait d'abord de-
» copaux et épiscopaux,maintenant existants, dont mandél'érection.
» nous avons distrait certaines portions de territoire )>Nous le vîmes sans douteavec peine ; mais pour
» destinés à former de nouveauxdiocèses,quand bien montrer que do notre part nous ne voulionsrien
>>mêmeces statuts, privilèges et induits auraient été omettre de ce qui pouvait contribuerà régler enfin
» confirméspar l'autorité apostolique,ou par quelque d'une manière stable les affaires ecclésiastiquesen
CONCORDAT 511
France, nous prêtâmes à ces demandes une oreille lection des évêques et de voir s'ensuivre, pour l'ac-
favorable : et cependant, dans la crainte de voir croissementde la religion, les salutaires effets vers
s'accroître par un long veuvage de plusieurs de ces lesquels ont tendu, constamment et sans interrup-
sièges, les maux de l'Église de France, nous crûmes tion, nos soins et nos efforts, dans l'arrangement
devoir user d'un remède temporaire, le seul et uni- ferme et stable des affaires ecclésiastiques do
que qui se présentât au milieu de tant de difficultés. France.
Nous étant concertéavec le roi très chrétien, ayant » Mais des obstacles s'offraient à cause du droit
mûrement et avecla plus grande attention examiné acquis de quelquesévêquesqui avaient reçu l'insti-
cette affaire, et oui l'avis d'une congrégationparti- tution canoniquepour des sièges qui ne se trouvent
culièrede nos vénérables frères, les cardinaux de la plus compris dans cette dernière circonscription;
sainte Église romaine, nous décrétâmes que, dans toute difficultéa été levée, dès lors que plusieurs
la division des diocèses et provinces ecclésiasti- d'entr'eux ont été régulièrementtransférés à d'autres
ques, toutes choses resteraient dans l'état où elles sièges, et que les archevêques des églises d'Arles et
se trouvaient, comme nous l'exposâmes plus au do Vienneont volontairement renoncé à leur droit,
long, tant dans l'allocution tenue en consistoire se- se déclarant prêts d'embrasser avec ardeur tout ce
cret, le 23août 1819,que dans nos lettres apostoli- qui, dans le bien des églises de France, viendrait à
ques en formede bref, adresséesaux évêquesqu'elles être statué par nous sur cette affaire.
intéressaient. » L'archevêquede Reims a volontiers aussi accédé
» Bien que cette condescendancedu Siège aposto- au rétablissement de l'église épiscopalede Chàlons,
lique, applaudiede tous les fidèles catholiques, n'ait en consentant que quatre arrondissement du dépar-
pas peu contribué à tranquilliser les consciences, tement de la Marne, jusqu'ici compris dans les li
elle n'a pas néanmoins suffi à notre sollicitudeet mites du diocèsede Reims, en fussent distraits pour
aux soins du roi pour satisfaire nos voeuxcommuns former celui do Chàlons.
sur l'augmentation du nombre des pasteurs et les « Tous ces obstacles surmontés, l'avis de notre
demandes des peuples, dont nous avons admiré susdite congrégation entendu, le tout mûrement et
l'empressement et le zèle pour la chose catholique. duement considéré, nous avons cru, avant tout, par
» Le roi très chrétien, sentant en effet très bien de graves motifs, devoir déclarer que l'érection en
que le salut des âmes demandait absolument que métropolitaine de l'église de Cambrai, sanctionnée
les fidèles ne fussent pas plus longtemps privés du par notre bulle de 1817,demeure suspendue à notre
secoursde leurs pasteurs, nous fit exposer tout ce volontéet à celledu Saint-Siège;qu'elle reste, comme
que, vu la nécessité dos temps, on pourrait entre- auparavant, suffragantede l'église métropolitainedo
prendre de plus utile, et nous donna, en dernier Paris, et qu'Arras, que nous avions donnée pour
lieu, à connaître que, par ses soins constamment suffragante à Cambrai, soit comptéeau nombre des
dirigés vers cette fin, il avait pu se ménager les suffragants do Paris.
moyensde pourvoir successivementà la dotation de » De même, quoique par nos lettres en forme do
trente sièges récemmentérigés. Des fonds pour six bref, du 24 seplembre 1821,quatre arrondissements
sièges se trouvant prêts, les prélats nommés par le de la Marne, qui formaient le diocèse do Chàlons,
roi, et qui avaient reçu de nous l'institution canoni- aient été par nous ajoutés au siège de Reims, néan-
que, prirent aussitôt possession de leurs églises, à moins, comme la conservation de ce siège est re-
la grande satisfaction des fidèles de ces diocèses, connuetrès utile, nous les séparons du diocèse de
qui furent récréés par la présence si longtemps dé- Reims et les assignons de nouveau à celui de Chà-
sirée de leurs évêques. lons.
» Commenéanmoins ce qu'il importait le plus au » Mais,pourque ne périsse pas la mémoire, à tant
roi et à nous était qu'une affaire de ce genre, aussi de titres recommandable,des trois sièges archiépis-
salutaire, fût promptementterminée, afinde pouvoir copaux, savoir, Arles, Narbonne, et Vienne en Dau-
plus facilementrecueillir les fruits que depuis long- phiné, dont l'érection n'a pas lieu, nous ordonnons
temps nous attendons de notre sollicitude pater- d'ajouter leurs noms titulaires à d'autres sièges
nelle ; d'un autre côté, comme la désignation des épiscopaux, et réunissons à d'autres églises les égli-
sièges qui doivent être conservés semble devoir ses épiscopales que nous leur avions données pour
beaucoupcontribuer à ce que, une fois connus, on suffragantes.
pourra se procurer les moyens de les doter le plus » Par la même raison, les territoires attribués
tôt possible, et ainsi, par une prompte institution par la bulle de 1817aux diocèses des deux sièges
canoniquedes évêques,comblerles voeuxdes fidèles, qui ne peuvent être conservés, passeront aux dio-
déférantaux demandes du roi, nous avons de notre cèses des églises subsistantes.
autorité apostolique, résolu de mettre la dernièro » Afin donc que tout ce que nous avons statué de
main à cette oeuvretrès salutaire. Quoiqueen effet, notre bienveillanceapostoliquesoit clairement connu
en raison de la nature des lieux et de l'étendue du et qu'il ne reste aucun doute dans l'exercice de la
pays, un plus grand nombre d'évêques donnât à la juridiction spirituelle, nous donnons ici la circon-
religion de plus amples accroissements, nous avons scription entière de tous les diocèses do Franco ; la-
! remarqué néanmoins que l'augmentation de trente quelle, de notre science certaine et mûre délibéra-
sièges ne serait pas d'un médiocre avantage, puis- tion, de la plénitude de notre pouvoir apostolique,
qu'elle nous donne l'espérance certaine dohâter l'é- décrétons,prescrivons et établissons commeil suit
618 CONCORDAT
ELENCHUS
dioeceseonet provinciarumjuxta bullam anni 1822.
» Quant à toutes les autres choses statuées et ré- parvenir au plus tôt les documentsde tout ce qu'ils
gléespar les mêmes lettres apostoliques de 1817, auront fait à ce sujet.
surtout pour ce qui regarde l'érection des chapitres, » La haute opinionque nous avons de la piété et
l'établissement des séminaires et l'administration de la religion du roi très chrétien,les promessesqui
temporaire des lieux attribués aux nouveaux dio- nous ont été faites en son nom, ont amené notre
cèses, jusqu'à ce que les évêques aient pris, suivant coeura lui donner ce nouveautémoignagede condes-
les formes, possessionde leurs églises, nous voulons cendance apostolique, dans la seule et unique vue
et ordonnonsqu'elles soient observéesenleur entier d'éloigner tous les obstacles qui s'opposaientau ré-
et en toutes leurs parties, et afin de pourvoir d'une tablissement plein et stable des affaires ecclésiasti-
manière plus utile et plus prompteà l'établissement ques de France, et de recueillir les fruits les plus
et au gouvernement des chapitres, les archevêques abondants qu'avec tant de soin nous nous étions
et évêques dresseront les statuts qui doivent les ré- proposé en faisant la conventionde 1817,et que l'il-
gir, auront soin de les faire observer, et dès que lustre clergé do France, avec tout ce qu'il y a de
rusle chapitres seront érigés, et qu'ils leur auront fidèleset d'hommes attachés à la foi dans ce puis-
donné la formo qui leur convient, ils nous feront sant royaume, attend avec la plus vive impatienco
CONCOURS 513
C'est là ce que nous demandons, par les prières les lere aut limitare, et facere licitum quod ob pro-
plus ferventes, au Père des miséricordes.En l'obte- hibitionem juris est illicitum. s (C. Cumpridem,
nant, ce sera pour le roi très chrétien un grand mo- cit.)
tif de joie, et l'Eglise et l'État en retireront d'im- Suivant le chapitre Veniens,deTransact.,le con-
nenses avantages.
» Nous voulons et ordonnons que les présentes cordat, revêtu de l'approbation du pape est exé-
lettres et tout ce qui y est exprimé et contenusoient cutoire contre les successeurs au bénéfice.
exécutées selon leur forme et teneur, et avec leur Un concordat, déjà passé entre les parties,
plein et entier effet, etc. peut n'avoir pas lieu en plusieurs manières.
» Donnéà Rome, à Sainto-Marie-Majeure,l'an de l°Par]arévooation desdeuxparties,ouseulement
l'Incarnation de Notre-Seigneur-Jésus-Christ1822, de l'une d'elles avant l'obtention du bencplacitum
la veille des nones d'octobre, et de notre pontificat du
la 23«année. pape ; la raison est que l'approbation du pape
étant nécessaire, elle est mise dans le concordat
» Signé, H., cardinal CONSALVI. »
Lieuf du sceau. par manière de condition. 2° Si le pape ne veut
pas approuver le concordat en tout ou en partie,
§ VI. Concordat entre bénéficiers. ou si, ne l'ayant pas approuvé dans un certain
Cette sorte de concordat n'est autre chose espace de temps fixé, avec la clause résolutoire,
qu'une transaction, par laquelle l'un des conten- l'une des parties ne veut plus en poursuivre
dants à un bénéfice en litige cède à l'autre ses l'approbation, ou enfin si le procureur constitué
droits, moyennant une pension ou sous la con- pour consentir meurt, ou laisse suranner la pro-
dition de payer, par celui en faveur de qui la curation. 3° Le concordat est résolu par la mort
cession est fuite, les frais du procès, ou ceux de naturelle ou civile de l'une des parties avant
bulles, ou enfin une dette contractée pour le l'approbation du pape. 4° Par la restitution en
bénéfice cédé. entier fondée sur une juste cause. 5° Enfin le
C'est une règle de droit canon que toute paction concordat n'a paslieu, s'ilarrive une éviction de
sur chose spirituelle ou mixte est nulle, comme bonne foi du bénéfice cédé.
suspecte de simonie, « redolet simoniam. * (C. coxcouns.
Cumpridem, de Pactis.) « Pactiones factae a vobis,
ut audivimus, pro quibusdam spiritualibus ob- On appelle concoursl'action réciproque de per-
cum omnis omnis- sonnes qui agissent ensemble pour une mémo
tinendis, in hujsmodi pactio fin ; on appelle concurrents ou contendants ceux
que conventio debeat omnino cessare, nullius
penitus sunt momenti.» (C. Vit., eod. tit.) qui ont en vue la possession du même bénéfice.
Cette maxime, toute expresse qu'elle est, souf- On distingue, en matière de bénéfices, quatre
fre des exceptions dans la pratique. On a estimé sortes de concours :1° le concours par examen ;
2° le concours de provisions ; 3° le concours do
nécessaire, pour le bien de la paix, de permet-
tre les concordats en litige, pourvu qui n'y ait dates en cour de Rome ; 4° le concours entre
autrement rien d'illicite ; c'est-à-dire qu'ils fus- expectants.
sent passés pour un droit véritablement acquis, § I. Concours par examen.
pro jure quaesitoet non quaerendo;et sous ces seu- Nous appelons ainsi le concours qui se ter-
les conditions de payer une pension annuelle, mine par le choix d'un sujet reconnule plus ca-
ou les frais au juste du procès, pro sumptibus li- pable, après l'examen de tous ceux qui ont con-
tis moderatis, ou les frais des bulles, ou enfin, couru. Cette voie pour parvenir aux bénéfices a
comme nous avons dit en la définition, une dette été inconnue, dans l'Église, jusqu'au temps du
contractée pour raison d'un bénéfice contesté. concile de Trente, où les Pères assemblés, con-
Sur ce pied-là, le pacte est censé honnête, mais sidérant l'importance des devoirs qu'imposent
non tout à fait licite, puisque l'autorité du pape les cures à ceux qui en sont pourvus, jugèrent à
est encore nécessaire ; si bien que, jusqu'à ce propos d'établir la voie du concours pour ces
que Sa Sainteté ait approuvé la convention ou sortes de bénéfices. Ils firent, à cet effet, un rè-
la cession, les parties ne peuvent en réclamer glement qui, quoique fort long, doit être rap-
l'exécution l'une contre l'autre. La nécessité de porté ici. Nous passons ce qui regarde, au com-
cette approbation se tire de ce que tout pacte en mencement, l'établissement des vicaires, en at-
matière spirituelle est suspect de simonie : delà tendant que la cure soit remplie, nous en par-
vient que, comme le pape seul peut purger un lons sous le mot Commende, § II.
acte du soupçon de ce vice, l'ordinaire, ni même « Or, pour cela, l'évêque et celui qui a droit de
le légat, s'il n'a des pouvoirs exprès, no peuvent patronage, nommera dans dix jours, ou tel au-
-validement autoriser ces sortes de concordats : tre temps que l'évêque aura prescrit, quelques
« Soins pontifex potest prohibitionem juris tol- •; ecclésiastiques qui soient capables de gouverner
511 CONCOURS
une église, et cela en présence des commissaires turité de leur âge, leurs bonnes moeurs, leur sa-
nommés pour l'examen. Il sera libre néanmoins voir, leur prudence, et toutes les autres qualités
aux autres personnes qui connaîtront quelques ec-. nécessaires à cet emploi. Et entre eux tous, l'é-
clésiastiques capables de cet emploi, de porter vêque choisira celui qu'il jugera préférable par-
leurs noms, afin qu'on puisse ensuite faire une dessus tous les autres; et à celui-là, et non àun
information exacte de l'âge, delà bonne conduite, autre, sera conférée ladite église, par celui à
de la suffisance de chacun d'eux : et même si qui il appartiendra de la conférer.
l'évêque ou le synode provincial le jugent plus « Si elle est de patronage ecclésiastique, et
à propos, suivant l'usage du pays, on pourra que l'institution en appartienne à l'évêque, ce-
faire savoir, par un mandement public, que lui que le patron aura jugé plus digne entre
ceux qui voudront être examinés aient à se pré- ceux qui auront été approuvés par les exami-
senter. nateurs, sera par lui présenté à l'évêque pour
«Le temps qui aura été marqué étant passé, être pourvu : mais quand l'institution devra
tous ceux dont on aura pris lesnoins seront exa- être faite par autre que par l'évêque, alors
minés par l'évêque, ou, s'il est occupé ailleurs, l'évêque seul, entre ceux qui seront dignes, choi-
par son vicaire général et par trois autres exa- sira le plus digne, lequel sera présenté par lepa-
minateurs, et non moins: et en cas qu'ils soient tron à celui à qui il appartient de le pourvoir.
égaux ou singuliers dans leurs avis, l'évêque ou « Que si l'église est de patronage laïque, celui
son vicaire pourra se joindre à qui il jugera le qui sera présenté par le patron sera examiné
plus à propos. par les mêmes commissaires délégués, comme il
« À l'égard des examinateurs, il en sera pro- est dit ci-dessus, et ne sera point admis, s'il
posé six au moins tous les ans par les évêques n'en est trouvé capable ; et, dans les cas susdits,
ou son vicaire général, dans le synode du on ne pourvoira de ladite église aucun autre
diocèse, lesquels seront tels qu'ils méritent que l'un des susdits examinés et approuvés par
son' agrément et son approbation. Quand il lesdits examinateurs, suivant la règle ci-dessus
arrivera que quoique église viendra à vaquer, prescrite, sans qu'un dévolu, ou appel interjeté,
l'évêque en choisira trois d'entre eux, pour même par devant le Siège Apostolique, les lé-
faire avec lui l'examen ; et quand une autre gats, vice-légats ou nonces dudil Siège,ni devant
viendra à vaquer dans la suite, il pourra encore aucun évêque ou métropolitain, primat ou pa-
choisir les mêmes ou trois autres, tels qu'il triarche, puisse arrêter l'effet du rapport desdits
voudra entre les six. Seront pris pour exami- examinateurs, ni empêcher qu'il ne soit mis à
nateurs, des maîtres ou docteurs, ou licenciés exécution. Autrement le vicaire, que l'évêque
en théologie ou en droit canon, ou ceux qui aura déjà commis à son choix pour un temps,
paraîtront les plus capables de cet emploi entre ou qu'il commettra peut-être dans la suite, à la
les autres ecclésiastiques, soit séculiers, soit ré- garde de l'église vacante, n'en sera point retiré
guliers, même des ordres mendiants, et tous ju- jusqu'à ce qu'on l'en ait pourvu lui-même ou
reront, sur les saints Evangiles, de s'en acquit- un autre approuvé et élu comme dessus. » (Sess.
ter fidèlement, sans égard à aucun intérêt hu- XXIV, de Réf., ch. 18.)
main. Quelques conciles provinciaux, tenus en France
« Ils se garderont bien de ne jamais rien pren- dans le XVIesiècle, firent des status pour l'ob-
dre, ni avant ni après, en vue de l'examen; au- servation du règlement du concile de Trente;
trement, tant eux-mêmes que ceux aussi qui mais il ne paraît pas que ces conciles aient été
leur donneraient quelque chose encourront si- exécutés longtemps dans les provinces mêmes
monie, dont ils ne pourront être absous 'qu'en où ils furent tenus. Une des principales raisons
quittant les bénéfices qu'ils possédaient, même qui l'ont fait tomber en désuétude, c'est qu'il
auparavant, do quelque manière que ce fût, et tendait à l'anéantissement des droits des patrons.
demeureront inhabiles à on jamais posséder Le clergé, assemblé en 1635, délibéra s'il était
d'autres; de toutes lesquelles choses ils seront avantageux d'admettre le concours pour les
tenus do rendre compte, non seulement devant cures ; mais les avis furent si partagés, qu'on
Dieu, mais même, s'il en est besoin, devant le ne décida rien; et dès lors il n'en a plus été ques-
synode provincial, qui pourra les punir sévère-' tion. Le concordat de LêonX regardait l'ancien-
ment, à sa discrétion, s'il se découvre qu'ils neté comme un titre légitime de préférence dans
aient fait quelque chose contre leur devoir. la collation des bénéfices ; le degré ensuite, au
«L'examen étant fait, on déclarera tous ceux défaut do l'ancienneté, était un titre de préfé-
que les examinateurs auront jugés capables et rence ; et enfin la faculté.
propres à gouverner l'église vacanto par la ma- Le concours n'a pas lieu en France, et nous
CONCOURS 515
croyons que c'est à tort ; car il a lieu en Italie de sens, qu'elle préférerait un directeur instruit
et partout où la discipline du concile de Trente et sans piété à un autre pieux et sans lumières;
a été reçue sans difficulté. Voici comme il se qu'avec l'un elle serait sûre de marcher dans la
pratique,: l'évêque commence par nommer un bonne voie, qu'avec l'autre elle courrait grand
desservant , c'est-à-dire un curé provisoire, risque, de s'égarer. Effectivement, nous avons
pour faire le service jusqu'à ce que la cure soit eu occasion de remarquer que la piété seule,
conférée. Dans dix ou vingt jours au plus, il pré- dans un pasteur, était loin d'être suffisante.
sente les sujets qui doivent être examinés, après Nous avons connu des paroisses dont les unes
avoir fait publier le concours, s'il le juge à pro- avaient des pasteurs plus pieux qu'instruits, et
pos. Les sujets sont examinés par trois exami- d'autres, au contraire, dont les curés étaient plus
nateurs synodaux, au choix de l'évêque ou du distingués par leur science que par leur piété.
grand vicaire, lequel assiste aussi à l'examen. Eh bien, en général, nous avons trouvé plus de
Les examinateurs jurent sur les saints Évangi- foi, plus de piété solide et véritable dans les
les de n'avoir en vue que le bien de l'Église. paroisses conduites par ces derniers que dans
S'ils reçoivent des présents, ils sont excommu- celles des autres. Si donc les lèvres du prêtre,
niés par le seul fait, de même que ceux qui les comme dit l'Esprit-Saint, doiventêtre les gardien-
leur donnent. Les uns et les autres ne peuvent nes de la science; si, dans tous les temps, le pas-
être absous qu'après s'être démis des bénéfices teur des âmes a dû posséder l'art des arts, ce-
ou charges qu'ils avaient avant de commettre lui de faire connaître, aimer et pratiquer les
la simonie, et demeurent inhabiles à en acqué- grandes vérités du salut, cette science sublime
rir d'autres. Le jugement des examinateurs est doit aujourd'hui plus que jamais être la sienne.
exécuté nonobstant appel. C'est le résumé de ce Le concours, dont nous parlons, et qui est re-
que prescrit le décret du concile de Trente rap- commandé par les Pères du concile de Trente,
porté ci-dessus. serait, selon nous, un puissant moyen, avec les
Le concours obvie à une infinité d'inconvé- conférences ecclésiastiques, pour faire naître
nients et n'en a lui-même aucun, vu surtout les dans le jeune clergé une sainte émulation pour
admirables perfections que les constitutions la science de son état. D'ailleurs, l'expérience
apostoliques y ont apportées. Il réserve la pré- prouve qu'un prêtre instruit est toujours, ou
rogative de l'évêque, et dans la députation des presque toujours, un prêtre régulier et édifiant,
examinateurs, et surtout dans le choix du plus car en se livrant à l'étude de la sainte Écriture,
digne des candidats approuvés. Il ne donne pas des saints Pères, de la théologie, des saints ca-
tout à la science, puisque l'examen doit porter nons, il y trouve mille motifs d'aimer et de
aussi sur les qualités morales, le zèle, la pru- pratiquer les devoirs de son état.
dence, et le reste, sous peine de nullité du con- En Autriche, l'article 24 du concordat porte
cours. Il n'écarte pas les hommes modestes qui que : « Toutes les paroisses seront pourvues à
ne présument pas de se présenter pour assumer » la suite d'un concours public ouvert et en sui-
la cure des âmes, puisque l'évêque peut les ins- » vant les prescriptions du concile de Trente. »
crire d'office sur la liste des candidats et les ap- L'article suivant ajoute que « l'empereur a la
peler à l'examen. faculté de nommer à tous les canonicats et pa-
Autrefois, en France, en vertu du concordat de roisses soumises au droit de patronage résul-
Léon X, on ne donnait les paroisses importan- tant du fonds de religion ou d'études, à charge
tes qu'aux gradués, mais aujourd'hui qu'il n'ex- toutefois d'élire un des trois que l'évêque aura
iste plus de grades, il paraîtrait au moins con- jugé les plus dignes à la suite d'un concours
venable de ne donner ces importantes paroisses public. »
qu'à ceux des ecclésiastiques qui feraient preuve L'article 22 veut que « la louable coutume de
par le moyen du concours, de plus de science et » donner un canonicat à la suite d'un concours
de talent. La piété sans doute doit être prise en .» public soit conservée avec soin partout où elle
considération, car elle est utile à tout, pietas ad » est en vigueur. »
omnia utilis est; mais si elle est utile à toutes § II. Concours de provisions.
choses, elle ne peut néanmoins les suppléer tou- (Voirlesmots: Provisions,
Date.) '
tes ; elle ne remplacera jamais la science si in-
dispensable dans tout pasteur des âmes. Au reste, § III. Concours de date en conr de Rome.
on ne donnerait la préférence à la science, dans (Voirle mot: Date.)
le concours, qu'à ceux des ecclésiastiques dont § IV. Concours d'expectants.
la conduite serait également sainte, régulière et On voit, sous le mot anteferri, la préférer; ce
édifiante. Sainte Thérèse a dit, avec beaucoup que, donne la clause de ce nom aux mandataires
510 CONCUBINAGE
qui en sont favorisés dans leurs mandats. En ment par loquel, après une première monition
parlant du concours des provisions, même de les clercs convaincus de ce crime sont privé.
celui des dates, nous rappelons aussi certains de la troisième partie des fruits de leur béné-
principes qu'on peut appliquer aux expectants fice; après la seconde, ils perdent la totalité des
de la cour de Rome, comme aux autres pourvus. fruits et sont suspendus de toutes fonctions;
Mais rien de si inutile que la connaissance des après la troisième, ils sont privés de tous leurs
droits ou privilèges des mandataires apostoli- bénéfices et offices ecclésiastiques, et déclarés in-
ques, depuis l'abrogation des mandats. capables d'en posséder aucun; en cas de rechute
Voirle mot: Mandat. ils encourent l'excommunication. Défense aux
CONCUBINAGE. archidiacres, doyens et autres, de connaître de
ces matières dans lesquelles, au surplus, les
Le concubinage se prend aujourd'hui parmi
nous pour le commerce charnel d'un homme et évêques peuvent procéder sans forme ni figure
de sur la seule connaissance certaine du
d'une femme libre, quoiqu'on donne aussi quel- fait.procès, « Qui sine strepituet figura judicii, et sola
quefois ce nom à un commerce adultérin. facti veritate inspecta, procedere possint. »
Suivant le droit canon, le concubinage est ex- Les conciles provinciaux de France ont rap-
pressément défendu : on pourrait conclure de pelé ce règlement : celui de Narbonne, en 1551,
.;quelques anciens canons qu'il était autrefois to- celui de do Rouen, on
léré parmi les chrétiens : « Is qui non habet de 1381; ceux de Reims et
uxorem et pro uxore concubinam habet, à com- celui Tours, en 1583; celui de Bourges, en 1584;
munione non repellatur : tamen, aut unius mu- d'Aix, en 1585,etc.
A des clercs qui n'ont point de béné-
.lieris, aut uxoris, aut concubin» sit conjunc- ficesl'égard ni de pensions, le concile veut que les
tione contentus. « (C. 1s qui, dist. 34.) Mais cela
les punissent par différentes peines,
se doit entendre de certains mariages qui se fai- évêques
saient autrefois avec moins de solennités : « Ibi suivant la nature et les circonstances de leur
crime.
loquitur quando non constat de mutuo con-
sensu. » (Glos.in eod.) « Competentibus dico, dit deLe même concile de Trente (Sess.XXIV, ch. 8,
saint Augustin, fornicarivobis, non licet, suffi- Reformat, matr.) a fait un pareil règlement
ciant vobis uxores. Audiat Deus, si vos surdi lamconsuctudincm habereaudeant
velslalotisecclcsiarum
; alioquin à sacrisca-
poenis,
si a
si nombus, impositis, puniantur. Quod
estis audiant angeli, vos contemnitis. Concu- superioribus moniti,ab iis senonabstinuerint, tertiaparlefruc-
.binas habere non licet vobis, etsi non habetis luum,obvenlionum acproventuum beneficiorum suorumquorum-
uxores. Tamen non licet habere eoncubinas cumque, et pensionum, (Conc. Lateran.2, cap.6.)ipsofactosint
dimittatis et ducatis uxores. Tanto privali: quaifabricoe ecclesioe,aut alleripioloco,arbilrioEpis-
quas postea eopiapplicetur. Sinveroindelictoeodemcumeadem, velaliafe-
m agis damnatio erit vobis, si volueritis habere mina, persévérantes, secundoe monilioni adliucnonparuerint, non
uxores et eoncubinas. » Ces défenses regardent tanlum fruetusomnes, acproventus suorumbeneficiorum, et pen-
les chrétiens en général, tant laïques qu'ecclé- sioneseoipsoamiltant,quiprcediclis locisapplicentur, sedetiam
a beneficiorum ipsorumadminislralione, quoadOrdinarius, etiam
siastiques. Ces derniers ne peuvent y contreve- utiSedisApostolicoe delegalus, arbitrabitur, suspcndanlur ; etsiita
venir sans un plus grand scandale. (C.Interdixit, suspensi, nihilominus casnonexpellant; autcumiisetiamversen-
c. c. c.
dist. 32; [Cumomnibus; Volumus; Foeminas, tur, tunebeneficiis, portionibus, acoffieiis,et pensionibus quibus-
dist. 18; c. i, Inhibendum est, et seq., de Cohabita- cumque e cclesiasticis perpetuo priventur, atque inhabiles ac indi-
tioneClericorumet mulier.) gniquibuscumque honoribus, dignitatibus, beneficiisac offieiis in
reddanlur, donecpostmanifestam vitaïemendulionern
Vers le dixième siècle, on vit à cet égard de posterum abeorumsuperioribus, cumiisex causavisumfueritdispensau-
grands abus de la part du clergé. On tâcha aus- dum.Sedsi, poslquam cassemeldimiserint intermissum consor-
sitôt d'y remédier par différentes peines. Les tium repelere, autalias hujusmodi scandalosas mulieressibiadjun-
ausi fuerint;praiterpraidictas poenasexcommunicationi
conciles défendirent au peuple d'entendre la gere Necquxvisappellatio, autexemplio
gladioplectantur. praedictam
messe d'un prêtre concubinaire, et ordonnèrent executionem aut :
impediat, suspendatsupradictorumque omnium
que les prêtres qui seraient convaincus de ce cognitio, nonad Arcliidiaconos, necDecanos, autaliosinferiores,
crime seraient déposés. Le concile de Trente, sedaJ Episcopos ipsospertineat : quisinestrepilu,et figurajudi-
dans sa XXeSession,c. 14 de Réf. 1 a fait un rùgle- bénéficia cii,et solafaeliveritateinspecta, procedere Clericivero
possint.
ecclesiastica autponsiones nonhabentes, juxtadelicliet
i. « Quamlurpe,ac clericorum Domine, qui se divinoc ultui contumaci.'c et ab
perseverantiamqualitalem, ipsoEpiscopo car-
s it iu
ddixerunt, indignum, impudicitiaî sordibus,immundoque ceris poena, suspensiono ab ordine,ac inhabilitate ab bénéficia
concubinatuversari,satisres ipsa, communi fideliumomnium of- oblinenda, aliisvemodis, juxtasacrosCanones, puniantur. Episeopi
fensiono,aummoque clericalis
militisededecore, testatur.
Ut igilur quoque, quod absit, s itab hujusmodi crimine non abstinuerint, et
adeam,.quamdeoetcontinentiam, ac vita;integritatemminislri a synodoprovinciali admoniti,senonemendaverint; ipsofacto
eccleaiaï
revoconlur,populusque hinceos magis discal
revererï, sint : etsi
suspensi persévèrent etiamadSanctissiinum Homanum
.quoillosvitahonestiores :
cognoveritprohibetsanclaSynodus Poulificem ab eademsynododeferanlur, quipro qnalitate culpse
quibuscumque ne
cloricis, eoncubinas, autalias de
mulieres, quibus etiam perprivationem, si opuserit, ineos animadvortat. » (Concil
posaithaberi in
suspicio, domo v elextra aut
detinere, cum ilsul- Tria. S ess. c .
xxv, 14.)
CONCUBINAIRE, CONCUBINE, 517
contre les laïques concubinaires, et ordonne que texte, mais encore celui qui entretient une
les évoques les avertiront par trois fois de quit- femme diffamée et suspecte d'incontinence, ot
ter leur mauvais commerce, sous peine d'excom- qui, après avoir été averti par son supérieur, re-
munication et de plus grande peine s'il y échet, fuse de la quitter.
sans distinction d'état ni de sexe. Il faut observer qu'anciennement il y avait des
Suivant l'assemblée de Melun, en 1579, le concubines légitimes, approuvées par l'Église.
concubinage est, après l'hérésie et la simonie, Ce qui venait de ce que', par les lois romaines, .
le crime qui cause les plus grands maux à l'É- . il fallait qu'il y eût proportion entre les condi-
glise. Les évoques ne doivent rien négliger pour tions des contractants. La femme qui ne pouvait >
l'en déraciner (Tit. XXXI.)' point être tenue à titre d'épouse pouvait être-
Par le concile de Nicée, il fut défendu aux concubine; ce qui signifiait alors un mariage
clercs de garder des femmes qu'on appelait légitime, mais moins solennel que celui dans
alors sous-introduites,superinductx, pour vivre lequel la femme avait le titre d.'uxior L'Église
avec eux dans le célibat. n'entrait point dans ces distinctions, et se tenant
Un clerc qui a eu plusieurs concubines, soit au droit naturel, approuvait toute conjonction
en même temps, soit successivement avant d'en- d'un homme et d'une femme, pourvu qu'elle
trer dans le clergé ou depuis qu'il y a été admis, fût unique et perpétuelle. Le premier concile de
n'est point irrégulier, quoiqu'il doive être puni Tolède, en 400, décide que celui qui, avec une
pour ce crime, surtout s'il l'a commis après femme légitime, a une concubine, est excom-
avoir reçu les ordres. (Innocent.III, cap. Quiacirca, munié; mais que si la concubine lui tient lieu
extra, de Bigamisnon ordinandis.) d'épouse, en sorte qu'il se contente de la com-
Voirlesmots: Agapètes, ClercetConcubinaire. 1
pagnie d'une seule femme, à titre d'épouse
CONCUBINAIRE, CONCUBINE. ou de concubine, à son choix, il ne sera point
Dans la rigueur du droit, on ne devrait appe- rejeté delà communion. « Is qui non habet uxo-
ler concubinaireque celui qui retient une concu- rem, et pro uxore concubinam habet, a commu-
bine dans sa propre maison ; cependant on donne nione non repellatur : tamen aut unius mulie-
ce nom à quiconque vit mal avec une femme, ris, aut uxoris, aut concubin» sit conjunctione
soit qu'il la retienne chez lui ou qu'il la voie contentus. » Et comme le mariage des clercs in-
ailleurs. (Concilede Trente, sess. XXIV, ch. 8, de férieurs était alors toléré, il ne faut pas s'éton-
ner s'il y en avait de concubinaires, le concubi-
Reform.matr. sess.XXV,ch. 14. i On appelle concu-
bine la femme qui se prête à ce mauvais com- nage tel qu'il vient d'être expliqué, pouvant
merce. tenir lieu alors de mariage. Si l'Église s'éleva
On distingue les concubinaires privés de si fortement dans la suite contre les clercs con-
ceux qui sont publics. On entend par ces der- cubinaires, c'estque le mariage leur fut défendu.
niers non seulement ceux dont le concubi- Tellement que, dans le temps même où le con-
était encore licite entre les laïques,
nage est constaté par sentence, ou par aveu fait cubinage
devant un juge, ou par une notoriété si publi- pourvu qu'il tînt lieu de mariage, il ne pouvait
être licite en aucun cas à l'égard des clercs.
que qu'il ne puisse être caché par aucun pré- plus de se
I. « Gravepeccatum est, homines solutoseoncubinas habere; Mais les défenses qui leur furent faites
gravissimum vero,etin hujnsmagnisacramenti singularem con- marier ne furent pas toujours bien observées,
temptumadmissum, uxoralosquoquein hocdamnationis statu ni dans tous les pays. La dernière défense et
vivere,ac audereeasquandoque domietiamcumnxoribusalere celle qui a toujours été le mieux observée, est
etretinere.Quare,ut huictantomalosanctasynodusopportune celle qui leur a été faite par le concile de Trente,
remediis provideat,statuithujusmodi concubinarios, tamsolulos
quamuxoratos, cujuscumque status,dignitatiset conditionisexis- en 1562.
tant,si,postquam abOrdinario, etiamexofficio, ter admonitiea On tient pour concubines, à l'égard des clercs,
dore fuerinl,concubinasnon ejecerint,sequenbearum consuetudinenon seulement celles dont ils abusent notoire-'
non sejunxerint, excommunicatione feriendosesse; a quanon
absolvantur,donecreipsaadmonitioni factseparuerint. Quodsiin ment, mais toutes les femmes suspectes, c'est-à-
concubinatu perannum,censuris neglectis, pormanserint, contra dire qui ne sont pas au-dessus de tout soupçon.
eosabOrdinario severeproqualitato criminis procedatur. Mulieres, On punit à proportion les fautes, quoique étran-
siveconjugaloe,sivesolitee, quoecumadulteris seu concubinariia contre leur voeu de
publiéevivunt,siteradmonitaî nonparuerint, ab Ordinariisloco- gères, que font les clercs
rum,nulloeliamrequirente, ex officio graviterpromodoculpaa continence. Autrefois un prêtre ne pouvait s'en
puniantur; etextraoppidum, veldioecesim,siideisdem Ordinariis relever que par une pénitence de dix ans, en-'
videbitur,invoeato, si opusfuerit,brachiosoeculari, : core était-ce un adoucissement à l'ancienne dis-
ejiciantur
contraadultères
aliispoenis etconcubinarios insuorobora
inflictis, suivant laquelle il devait être déposé
permamentibus. » (Conoil. Trid., Sess,xxiv,c. 8, de Reform. cipline,
Matr.: Concubinatus pamisgravissimis punitur.)Au §précédent, sans miséricorde. D'après le concile de Trente,'
nousavonscitélech.14delaSessionXXIV les clercs concubinaires, après la première mo-
518 CONFÉRENCES ECCLÉSIASTIQUES
nition, sont suspendus de toutes leurs fonctions : convincatur.De plus, on doit fournir à l'accusé
après la troisième monition, ils sont dépouillés tous les chefs d'accusation qui lui sont imputés
de leurs offices et rendus inhabiles à en possé- avec les noms et les dépositions des témoins,
der; s'ils récidivent, ils sont excommuniés. afin qu'il puisse se défendre. Il n'y a d'excep-
tion que pour le cas d'hérésie où l'on n'est pas
(Sess. XXV, ch. 14.)
D'après l'article 902 du Code civil, toutes per- obligé de produire les noms : « Accusato danda
sonnes peuvent disposer et [recevoir, soit par sunt omnia capitula, in quibus accusatur,
donation entre-vifs, soit par testament, excepté nomina et dicta testium, ut possit se defendere,
celles que la loi en déclare incapables. Or, sui- excepto casu hoeresis, quia in hoc non dantur
vant Grenier, Merlin, Toulier, les donations en- nomina. (Deaccus, c. Qualiter.)
tre les concubinaires sont permises, parce que Voirlemot: Contumace.
la loi, disent-ils, fixant d'une manière précise CONDITION.
les incapacités n'en prononce point contre les (Voirle mot: Empêchement.)
concubinaires >. CONFÉRENCES ECCLÉSIASTIQUES.
Cependant la cour de Besançon a jugé, par
arrêt du 25 mars 1808, qu'une concubine est in- Il faut entendre par ce mot une espèce de
capable de recevoir, soit par donation directe, synode particulier, qui se tient dans un diocèse
soit par disposition déguisée, surtout lorsque le par les curés et autres prêtres par l'ordre de l'é-
concubinage est de notoriété publique. C'est vêque. Thomassin dit qu'on donnait autrefois à
aussi la doctrine de M. Delvincourt 2. ces conférences le nom de chapitre, consistoire,ca-
Quoi qu'il en soit, nous pensons, pour ce qui lendes,synode,session;que l'usage en était fréquent
regarde le for intérieur que, si les donations en France, en Angleterre et en Allemagne, et
entre concubinaires avaient été faites en vue du très rare en Italie, où les diocèses n'étant pas si
libertinage, il conviendrait que le donataire étendus, on n'avait pas cru nécessaire d'établir
les employât, au moins pour la plus grande d'autres synodes que celui de l'évêque même et
partie, à quelques oeuvres pies ou au soulage- de tout le diocèse. S. Charles a été le premier
ment des pauvres. Si le donateur ne mérite pas évêque d'Italie à y introduire l'usage des confé-
de recouvrer ce qu'il a donné, le donataire, rences ecclésiastiques. Ce saint prélat ordonna,
son complice, ne mérite pas plus de retenir le dans son premier concile de Milan, que chaque
salaire de son crime. évêque diviserait son diocèse en différentes con-
Voyez, sous le mot : Concordat de Léon X, le trées, auxquelles il préposerait un vicaire forain,
titre huitième de ce concordat sur les concubi- tenant lieu d'archidiacre et de doyen rural, qui
naires publics. convoquerait en conférences ecclésiastiques, une
CONCURRENT. fois chaque mois, les curés de son ressort.
Hincmar de Reims fit des ordonnances relati-
On appelle ainsi une personne qui concourt ves à l'institution des conférences ecclésiasti-
avec une autre vers le même objet. En terme fixées au premier jour de chaque mois ;
ques,
de chronologie, on appelle concurrents certains c'est la première fois qu'il en est question dans
jours surnuméraires qui concourent avec le cycle l'histoire. Ablon, évêque de Verceil, fut le pre-
solaire ou qui en suivent le cours. Les années mier en Italie, recommanda, pour la fin de
qui,
communes sont composées de cinquante-deux
chaque mois, les conférences ecclésiastiques ins-
semaines et un jour, et les années bissextiles tituées sous Hincmar.
sont composées de cinquante-deux semaines et Maintenant les conférences ecclésiastiques sont
deux jours. Ce jour ou ces deux jours surnumé- établies dans presque tous les diocèses de
raires sont nommés concurrents. France. Nos derniers conciles provinciaux s'en
CONDAMNATION, CONDAMNÉ. sont occupés d'une manière toute spéciale. Celui
La condamnationest un jugement par lequel de la province ecclésiastique de Tours, tenu à
on prononce contre un condamné une peine af- Rennes en 1849,les rétablit dans les ternies sui-
flictive ou infamante. vants :
Personne, d'après les lois canoniques, comme « Quant aux conférences ecclésiastiques, qui,
d'après la raison, ne peut être condamné sans bien dirigées et fréquentées par tous, contribuent
être entendu et convaincu, à moins qu'il ne soit si fortement à l'honneur des études ecclésiasti-
contumace, c'est-à-dire qu'il refuse obstinément ques et à la gloire du clergé, les pères du concile
de comparaître : Accusatus non potest puniri nisi désirent que, suivant l'ancien usage jusqu'à pré-
i. Gousset,
Codecivilcommenté. sent conservé heureusement en plusieurs diocè-
t. Coursde Codecivil,tom.II. pag.421,édil.de1819. ses, elles soient rétablies et mises en vigueur
CONFESSEUR 519
dans la province ecclésiastique de Tours. Ainsi, férences -ecclésiastiques, comme celle de toutes'
chaque mois, pendant le temps de l'année déter- les assemblées civiles ou religieuses.
miné et dans le lieu désigné, tous les prêtres du
même canton se réuniront pour traiter en con- CONFESSEUR.
férence, les matières proposées par l'évêque. Un confesseur est un prêtre qui a le pouvoir
« Toutes les branches de la science ecclésias- d'entendre les péchés des fidèles et de les absou-
tique et de la discipline seront la matière des con- dre, c'est-à-dire qui a droit d'administrer le sa-
férences ecclésiastiques, à savoir : l'Écriture crement de pénitence. :
sainte, la théologie, le droit canon, la liturgie, § I. Qualités et devoirs des confesseurs.
l'histoire de l'Église. L'évêque aura soin de
faire observer strictement les règles pour la te- On reconnaîtrais davoirs des confesseursdans_
nue des conférences de son diocèse. (DecretumIX, les différentes qualités qu'on exige d'eux. Ces
n. 3, de Collationibusecclesiasticis.) qualités sont : 1° la puissance, 2° la science, 3°
Le concile de Paris, de la même année, ex- la prudence, 4° la bonté, 5° le secret.
horte tous les prêtres à s'appliquer à bien pré- 1° A l'égard de la puissance, il doit avoir pre-
mièrement la puissance de l'ordre, c'est-à-dire;
parer les conférences, et à traiter avec soin les la
matières qni en font l'objet. (Tit. IV, cap. 2.) prêtrise ; s'il n'est pas prêtre, il ne peut pas-
Une autorité plus haute encore, celle de Sa absoudre, pas même à l'article de la mort. IL
Sainteté Pie IX, recommande en ces termes la doit avoir, de plus, la puissance de juridiction!
tenue des conférences ecclésiastiques : « Afin ordinaire ou déléguée, et enfin il doit avoir la
que les prêtres qui doivent s'appliquer à la doc- puissance d'exercice, c'est-à-dire qu'il ne soit ni
trine et à l'étude, et qui sont obligés d'ensei- excommunié ni suspens; sans quoi, la confes-
sion est invalide et le confesseur pèche mortel-
gner au peuple ce que tous sont tenus de savoir
Celui qui entend des confessions sans'
pour le salut éternel, et d'administrer les sacre- lement.
être prêtre duement approuvé tombe dans l'ir-
ments, ne voient pas diminuer leur goût pour
les sciences sacrées ni languir leur zèle, c'est régularité '.
notre très vif désir que, aussitôt que cela sera 2° Par rapport à la science, elle doit être telle,
possible, on établisse des conférences, avec les dit S. Thomas, qu'un confesseur sache distinguer
règlements convenables, dans toutes les divi- ce qui est péché d'avec ce qui ne l'est pas; qu'il
sions de vos diocèses, et que ces conférences sache du moins douter, et qu'en doutant il ait
portent surtout sur les questions relatives à la recours à de plus savants que lui. Il faut, sur
le cas de restitu-
théologie morale et à la liturgie; que chaque toutes choses, qu'il connaisse
prêtre en particulier soit tenu d'y assister et d'y tion, les cas réservés et plusieurs autres points
apporter, traitée par écrit, la question que vous de morale que les confesseurs trouvent exposés
aurez proposée; que, dans ces conférences, un dans les théologiens, les casuistes ou les confé-
temps déterminé par vous soit consacré à des rences de leurs diocèses.
discussions sur la théologie morale ou sur la 3° Il doit être prudent : cette prudence se rap-
science des sacrés rites, après que l'un de ces porte à ses instructions, à ses interrogations et
prêtres aura prononcé un discours principale- à toute sa conduite dans l'exercice de ce minis-
ment relatif aux devoirs du sacerdoce '. » tère : « Sacerdos autem sit discretus et cautus,
Les conférences ecclésiastiques ne sont défen- ut more periti medici superinfundat vinum et
dues par aucune loi. Une circulaire du préfet de oleum vulneribus sauciati, diligenter inquirens
la Meurthe, en date du 7 mars 1837,annonça aux et peccatoris circumstantias et peccati: quibus
sous-préfets celles que l'évêque de Nancy avait prudenter intelligât quale deboat ei praebere
établies dans son diocèse, et les engagea, dans consilium, et hujusmodi remedium adhibere, di-
le cas où elles provoqueraient l'attention publi- versis experimentis utendo ad salvandum asgro-
que, à en donner l'explication de manière à tum. » (Cap. Omnis utriusque sexus, de Poenit.et
en faire comprendre l'esprit, le but et l'uti- remiss.)
lité. 4° Qu'il soit bon, c'est-à-dire exempt lui-même
On pourrait rappeler cette sage mesure aux de péché : « Si Deus benignus est,ut quid sacer-
maires qui ont la prétention ridicule d'empêcher dos ejus austerus? Vis apparere sanctus? Circa
ces utiles réunions aux presbytères. 1.Dansun casdenécessité, nonseulement y a danger
lorsqu'il
Du reste, les lois qui accordent à tous les certain,maismêmedangerprobable demort,unprêtre,quelqu'il
citoyensle [droit de s'assembler paisiblement et sans soit, lorsmême qu'il seraitdégradé,excommunié, irrégulier,
ou hérétique,peutet doit,à. défautdo toutautreprêtre
armes, autorisent par là même la tenue des con- apostat un pénitentdetout péoué,oit'
approuvé,confesser et absoudre
1. BrefdePieIXauxévèquei du17mars1856.
d'Autriche, censuremêmeréservée. (Ferraris.)
520 CONFESSEUR
vitam tuam esto austerus, circa alienam beni- les cas, et sans aucune exception. Il l'est en effet
gnus. » (Can. Alligant, caus. 26, q. 7.) Si malheu- de droit naturel, puisque le bien de la société
reusement, au lieu de cette bonté que nous re- l'exige ainsi; sans cette sûreté, quel est le pé-
commandent les canons, un confesseur avait le cheur coupable de grands crimes qui voudrait
coeur assez corrompu pour séduire ses péniten- los accuser à son confesseur? Interrogé par un
tes, il n'est point de peines qu'il ne méritât. magistrat, non seulement le confesseur peut,
5° Enfin, et c'est ici une condition qui inté- mais il doit répondre comme s'il ne savait rien,
resse notablement la police de l'Église au for comme s'il n'avait jamais entendu la confession
extérieur, le confesseur doit être secret, si se- du pénitent au sujet duquel on l'interroge. Le
cret, dit S. Thomas, qu'il peut, au mépris ;de confesseur tient biplace de Dieu, et, comme tel,
toutes les menaces ot do toutes los peines, nier il n'est soumis à aucun tribunal.
un fait contre la vérité dans un cas de contrainte '. Ce principe est reconnu et adopté par la juris-
Tl peut même, suivant ce docteur, accompa- prudence civile, comme on peut s'en convaincre
gner sa négative de serment, soit que la confes- par les considérants de l'arrêt suivant de la
sion ait été suivie d'absolution ou non, soit Cour de cassation, du 30novembre 1810,au rap-
qu'il doive résulter de grands maux du secret : port de M. Vasse, et sur le recours de l'abbé
velut occisiorégis vel civitatis ruina. Il peut seule- Laveine :
ment, dans ces cas, prévenir lui-même le mal ABRÊT de la Courde cassationdu 30 novembre1810,
avec beaucoup de circonspection, sans compro- relatif au secretde la confession.
mettre le pénitent, soit en l'avertissant, en l'ex- « Vu les articles 1eret suivants du concordatdu
hortant lui-même, soit en avertissant les autres 26 messidor an
de prendre garde aux artifices et aux mauvais IX; et la loi du 18 germinal an X
contenant les articles organiques du régime de l'É-
desseins de leurs ennemis, des hérétiques; et glisecatholiquedans ses rapports généraux avec les
les prélats qu'ils veillent sur leur troupeau : droits et la policede l'État.
« Et hujusmodi ita tamen ut nihil dicat quo » Attendu qu'il en résulte que la religioncatholique
verbo,vel motu, vel nutu confitentem prodat. » est placée sous la protectiondu gouvernement; que
Les canonistes ullramontains les plus respecta- ce qui tient nécessairementà son exercicedoit oonsé-
bles, tels que Panorme, Archidiaconus, Hostien- quemmentêtre respectéet maintenu; que la confession
sis, Joannes-Andreas, n'ont pas adopté la doc- tient essentiellementau rit de cette religion ; que la
trine de S. Thomas, en ce qu'il défend la révé- confessioncesserait d'être pratiquée, dès l'instant où
son inviolabilitécesserait d'être assurée; que les nw-
lation, etiam de eis qux pcriculumrégis, reipublicx gistrats doiventdonc
tangunt. (Doct., in C. Sacerdos, de Poenit., dist. 6.) cret de la confession, respecteret faire respecterle se-
et qu'un prêtre ne peut être
Ce dernier canon 2, de Poenit.,dist. 6, attribué tenu de déposer, ni mêmeêtre interrogé sur les révé-
au pape S. Grégoire I", l'an 600, s'exprime ainsi lations qu'il a reçues dans cetacte de sa religion;
touchant l'obligation du secret imposé aux con- » Que sans doute les prêtres sont semmis,comme
fesseurs : « Sacerdos ante omnia caveat, ne de his les autres citoyensà l'obligationde rendre témoignage
qui ei confitentur peccata, alicui recitot non pro- en justice des faits qui sont à leur connaissance,lors-
pinquis, non extraneis, neque quodabsit, pro ali- que cetteconnaissanceleur est parvenue autrement
quo scandalo. Nam si hoc fecerit, deponatur, et que par la confiancenécessaire delà confession,qu'il
omnis diebus vilae suas ignominiosus peregri- n'est pas dû à cet égard plus de privilège à la foi sa-
nando pergat. » Le chapitre Omnisutriusque sexus cerdotalequ'à la foi naturelle;
" Mais ce principe général ne peut être appliqué à
du concile de Latran, dit à la fin : « Caveat autem
l'espècesur laquelleil a été statué par la cour de jus-
(le confesseur) omnino ne verbo, aut signo, aut tice criminelledu départementde Jemmapes;
alio quovis modo aliquatenus prodat peccatorem, » Que, dans cette espèce, en effet,si la révélation
sed si prudentiori consilio jindiguerit, illud abs- faite au prêtre Laveine n'a pas eu lieu réellement
que ulla expressione person» caute requirat; dans un acte religieux et sacramentelde confession,
quoniam qui peccatum in poenitentiali judicio elle n'a été déterminéeque par le secret qui était dû
sibi detectum proesumpserit revelare, non solum à cet acte; que c'est dans cet acte, et sous la foi de
à sacerdotali officio deponendum decernimus, son inviolabilité,que le révélant a voulu faire sa ré-
verum etiam ad agendam perpetuam poeniten- vélation; que, de son côté, le prêtre Laveinea cru la
tiam, in arctum monasterium detrudendum. » recevoirsous la foi et l'obligationde cette inviolabi-
dette procédure, suivant le droit des décrétales, lité; que la bonne foi et la confiancede l'un ou de
l'autre ne peuvent être trompéespar une forme qui,
doit être faite par l'évêque. n'étant relative qu'à l'effetsacramentelde la confes-
Ce même concile de Latran a déclaré que le sion, ne peut en anéantirles obligationsextérieureset
secret de la confession est inviolable dans tous civiles;
1.Thom.Sent,i, dist.21,q.2, art. I, Glos.i adt, n. 3. » Qu'une décision contraire dans cette espèce, en
CONFESSEUR 021
éliaulant la confiancequi est due à la confessionre- Les fidèles ont la faculté de choisir leur con-
ligieuse, nuirait essentiellementà la pratique de cet fesseur, même pour la confession pascale, parmi
acte de la religion catholique; qu'elle serait consé- tous les
en avecles lois en prêtres approuvés du diocèse.
quemment opposition qui protègent Entre tous les privilèges que les papes avaient
"exerciceet qui sont ci-dessus citées; qu'elle blesse-
rait d'ailleursla morale et l'intérêt de la société: accordés aux rois et aux reines de France, un
» D'après ces motifs, la cour casse et annule, etc. » des plus authentiques était de se choisir un con-
L'article 378 du code pénal prononce une peine les fesseur, sans être assujettis à le prendre parmi
Le titre
d'un mois à six mois de prison et une amende le prêtres approuvés par l'ordinaire.
de 100francs à 500 francs, contre ceux (prêtres Clément plus formel de ce privilège est la bulle de
ou laïques) qui, dépositaires par état ou par VI, du 20 avril 1551.
profession des secrets qu'on leur confie, auront § V. Confesseurs du clergé.
révélé ces secrets. Un prêtre ne peut donc être Comme le pape n'est pas impeccable (ses fau-
tenu de déposer ni être interrogé en justice sur tes sont d'autant plus graves qu'il est plus élevé
une révélation qui lui a été faite en confession, en dignité), il doit avoir un confesseur, mais il
et même hors la confession, si on la lui a faite peut se confesser à qui il veut, car il ne doit re-
sous la foi de l'inviolabilité du secret, en sa qua- cevoir d'ordre de personne.
lité de prêtre. Jean-de-Dieu, canoniste de Bologne, sous In-
Un confesseur ne doit pas dire qu'il a refusé nocent IV, discute la question des confesseurs
l'absolution à son pénitent, quoique ce ne soit du clergé. Il examine, après avoir parlé du con-
pas là proprement une révélation de ses péchés; fesseur du pape, quel doit être le confesseur des
mais s'il était interrogé là-dessus, il doit répon- cardinaux, et il fait connaître le sentiment de
dre qu'il a fait ce qu'il a dû *. quelques canonistes qui leur assignent le pape
Suivant les règlements des conciles, les prê- pour confesseur. Quelques autres bornent cette
tres ne peuvent recevoir la confession des fidè- obligation aux cardinaux évêques; les cardinaux
les que dans l'église, et revêtus de leurs habits prêtres doivent alors se confesser à ces derniers
de choeur, si ce n'est dans un cas de nécessité. et les cardinaux diacres à ceux de leurs collègues
Un confesseur ne doit pas, sans nécessité, en- qui sont de Tordre des prêtres; néanmoins, en
tendre les [confessions des femmes après le cré- ce qui touche l'opinion de ceux qui veulent que
puscule du soir ou avant l'aurore. le pape soit le confesseur de tous les cardinaux,
La S. Congrégation de l'Inquisition a défendu cette obligation est limitée aux crimes notoires;
à tout confesseur, sous peine de suspense de s'il s'agit d'une faute secrète, c'est au grand pé-
l'exercice de la confession, d'entendre les con- nitencier qu'ils doivent s'adresser.
fessions des femmes ou desrjeunes filles hors du Pour les patriarches, si le crime est notoire,
confessionnal, ou dans un confessionnal sans Jean-de-Dieu leur assigne le pape pour confes-
grille. seur ; si le péché est secret, ils peuvent se con-
§ II. Confesseur, Religieux. fesser à qui il leur plaît.
(Voirlemot: Approbation.) Les archevêques, dans le cas de la notoriété
§ III. Confesseur de religieuses. du crime, doivent se confesser au pape; sinon,
(Voirle mot: Religieuse,
§ VII.) à celui qu'ils voudront choisir.
Les évêques, pour le susdit cas de notoriété,
§ IV. Confesseur, Choix. doivent se confesser au patriarche ou métropo-
Il n'est permis aux fidèles de se confesser litain, au moins pendant le temps que se tient
qu'à des confesseurs approuvés dans les termes le concile provincial; si la faute est secrète, ils
prescrits sous le mot : Approbation. Les évêques choisissent leur confesseur. Le concile de Paris,
eux-mêmes, à qui le chapitre Fin. de Poenit.et en 1212, veut que les évêques se choisissent pour
remiss., semble donner à cet égard un privilège, entendre leur confession, des personnes discrè-
ne peuvent se choisir un confesseur d'un autre tes, et les exhorte à se confesser souvent. Le
diocèse que dans le nombre de ceux qui sont concile de Toulouse, en 1590, règle que les évê-
approuvés par un évêque. Un concile provincial ques auront leurs confesseurs dans leur maison
n'aurait pas le pouvoir de dispenser de cette auprès d'eux, et qu'ils conféreront avec leurs
règle». confesseurs des affaires difficiles, etc.
1. Lerefusde confession, quandiln'estpasaccompagné d'in- Les conciles ont fait plusieurs règlements sur
jurepublique, estun fait quipeutêtre déféréà l'autorité
ecclé- la confession des prêtres; on leur désignait les
maisquinepeutdonnerlieua un appelcomme
siastique, d'abus.
(Arrêtduconseil d'Etatdu28mars1831.) confesseurs auxquels ils devaient s'adresser, et
Allag.25,n. 9.
2, Barbosa, ils n'avaient point la liberté de se choisir un di-
522 CONFESSION SACRAMENTELLE
lecteur. Les ordonnances synodales de Troyes, qu'un ministre de la religion n'est point inca-
en 1300,s'expriment ainsi : « Nec credant sacer- pable de recueillir les dispositions faites à son
dotes quod nisi de licentia episcopi sui possint profit, quoiqu'il soit continuellement resté au-
pro voluntate sua sibi eligere confess'orem qui près d'une personne pendant la maladie dont
suarum curam habeat animarum. Hoc enim so- elle est morte, lorsqu'il n'a point été le confes-
lis episcopis et quibusdam aliis proelatis exemp- seur du malade, lors même qu'il lui aurait
tis est concessum, et qui petunt ab episcopo donné l'extrême-onction.
confessores, debent idoneos et providos et ho-
nestos petere. » CONFESSION.
Le concile de Poitiers, de l'an 1280,commande C'est l'acte par lequel on avoue la vérité sur
à tous les abbés, clercs et bénéficiers de ne se quelque fait.
confesser qu'à l'évêque ou à son pénitencier, ou Il faut distinguer la confession en matière
à ceux qu'il leur marquera, défendant à tout au- temporelle, et la confession en matière spiri-
tre confesseur de les absoudre sans avoir un tuelle. Celle-ci est appelée confession sacramen-
pouvoir spécial du pape ou de son légat. Le telle; nous en parlerons dans un article séparé.
même concile ordonne la même chose pour les La confession en matière temporelle se fait en
chanoines et pour les supérieurs de communau- cause civile ou criminelle, ou hors jugement.
tés. La confession qui se fait en jugement s'ap-
Selon les statuts de Rouen, en 1226,il est or- pelle confession judicielle,et celle qui se fait hors
donné que chaque prêtre se confessera au moins jugement, c'est-à-dire ailleurs qu'en justice ré-
une fois l'an à son évêque ou à son pénitencier. glée, est appelée confession extra-judicielle.
Grancolas cite les ordonnances synodales de Cette question n'a qu'un rapport éloigné au
l'archevêque do Nicosie, on 1313, qui défendent plan de cet ouvrage. Cependant la glose du cha-
de se confesser à un prêtre dont on vient soi- pitre Ex parte, de Confessis,qui permet à l'abbé
même de recevoir la confession. et aux religieux d'un monastère de révoquer
Tous ces règlements n'ont été que de disci- une erreur de fait avancée par leur économe, a
pline locale, car dans les mêmes siècles, nous recueilli les différentes conditions qu'exigent les
voyons que plusieurs conciles synodaux laissent lois, pour qu'une confession produise en ma-
aux prêtres la faculté de se choisir leurs confes- tière civile une preuve parfaite. Elles sont ren-
seurs ; tel est celui do Nîmes, en 1224,et celui dues par le sens de ces deux vers :
de Lavaur, en 1318.Il n'est pas besoin de dire Major, contrase,ubijusfitet hostis,
spontesciens,
qu'il ne reste plus rien de cette ancienne disci- Certum, lisque,favor,jus,necnaturarepugnet.
pline sur le choix des confesseurs, si ce .n'est à Ubijus fit, signifie devant le juge compétent.
l'égard des religieuses, pour la confession des- Sur ce principe, le pape Alexandre III décida
quelles il faut une approbation spéciale, con-
formément à leurs statuts. qu'un clerc, convaincu, même par sa confession,
devant un juge séculier, ne devait pas pour cela
D'après l'art. 909du Code civil, les médecins être condamné par le juge d'Église. (C. At si
qui ont traité une personne pendant la maladie clerici, de Judiciis.)
dont elle meurt, ne peuvent profiter des disposi-
tions entre-vifs ou testamentaires qu'elle aurait CONFESSION SACRAMENTELLE.
faites en leur faveur pendant le cours de cette La confession sacramentelle est la déclaration
maladie. Les mêmes règles doivent être obser- fait de ses fautes à un prêtre,
qu'un pécheur
vées à l'égard du ministre de la religion. en recevoir l'absolution.
il à à pour
Or est remarquer que c'est la qualité de
directeur de la conscience, de confesseur du do- § I. Confessionannuelle. Son précepte et à qui la
nateur pendant sa dernière [maladie, que l'art. faire.
909 est applicable. Cet article admet deux ex- La confession est de précepte divin : elle a
ceptions à ce principe. été instituée par Jésus-Christ. Anciennement
La première est celle où la libéralité a pour elle se faisait en public comme en secret; mais
objet de récompenser des services rendus. un acte d'humilité, toi quo la confession pu-
La seconde est celle où la disposition est à ti- blique n'était, ce semble, praticable que dans
tre universel, et lorsque le confesseur donataire, ces premiers temps de ferveur, où la charité des
est parent du donateur ou testateur, jusqu'au fidèles ne leur laissait voir dans les pénitents
quatrième degré inclusivement, pourvu toute- humiliés que le triomphe de leur vertu et les
fois que ce dernier n'ait pas d'héritier direct. effets de la grâce. Aussi, dès que, devenus moins
La Cour de cassation a décidé, le 18mai 1807, zélés, les chrétiens n'eurent plus pour les pé-
CONFESSION SACRAMENTELLE 523
cheurs contrits la même charité ou la même es- doctrine sur la confession et rappelant le pré-
time, on cessa de s'exposer volontairement au cepte de la confession annuelle décrété par le
mépris par des confessions publiques : on ne se concile de Latran, in cap. Utriusque de Poenit.et
confessa plus qu'en secret. Le concile de Trente remis., dit que la confession publique n'est pas
(SessionXIV,chap. 5, de Confess.*) en exposant la de précepte divin, quoique rien n'empêche qu'on
i. « Exinstitutione sacramenti Poenitentiae jam explicata, uni- ne la fasse pour la réparation de ses scandales.
veraaEcclesia semperintellexit institutametiamesseà Domino Voici comment s'exprime le IV 0 concile de
integram peccalorum confessionem, et omnibua postBaptismum.
lapsisjuredivinonecessariam exislere: quia Dominus nosterJe- Latran, tenu en 1215, touchant le précepte de
sus-Christus, e terrisascensurus ad coelos, sacerdotes sutipsius la confession annuelle et de la communion pas-
vicarios reliquit,tanquamproesides et judices;ad quosomnia cale : «Omnis utriusque sexus fidelis,postquam
mortalia criminadeferantur, in quaeChristifidèles ceciderint; quo, ad annos discretionis pervenerit, omnia sua
pro poteslateclavium,remissionis aut retentionispeccatorum, solus
séntentiam pronuntient. Constatenimsacerdotes judicium hoc, peccata saltem semel in anno fideliter con-
incognita causa,exercere nonpotuisse, nequeoequitatem quidem fiteatur proprio sacerdoti : et injunctam sibi poe-
illosin pcenis injungendis servarepotuisse, si ingénèreduntaxat, nitentiam propriis viribus studeat adimplere,
etnonpotiusinspecie,ac sigillalim, suaipsipeccatadéclarassent. suscipiens reverenter ad minus in pascha Eu-
Exhiscolligitur, oportere a poenitentibus omniapeccatamorta-
lia,quorum postdiligentem suidiscussionem conscientiam habent, charistioe sacramentum; nisi forte de proprii
in Confessione recenseraetiamsioccultissima illasint,et tantum sacerdotis consilio, ob aliquam rationabilem
adversus duo ultimaDecalogi praecepta commissa, qusenonnun- causam ad tempus ab hujusmodi perceptione
quamanimum graviussauciant,~"et periculosiora suntiisqutein duxerit abstinendum : alioquin et vivens ab in-
manifesto admittuntur. Namvenalia,quibusà gratiaDeinonex-
cludimur et in quoefrequentius labimur,quanquam recteetutili- gressu ecclesise arceatur, moriens christiana
ter, citraque omnem proesumptionem inconfessione dicantur, quod careat sepultura. Unde hoc salutare statutum
piorumhominum usus demonstrat, taceritamencilraculpam, fréquenter in ecclesiis publicetur, ne quisquam
multisque aliis-remediis expiaripossunt.Verum,cumuniversa ignorantiae csecitate, velamen excusationi assu-
mortalia peccaLa, etiamcogitationis, hommes iraefiliosetDeiini*
micosreddant,necessum est, omniumetiamveniam,cumaperta mât.
etverecunda confessione, aDeoqueerere. Itaquedumomnia,quoe » Si quis autem alieno sacerdoti voluerit justa
memorioe occurrunt, peccata Christifidèlesconfiteri student,pro- de sua causa sua confiteri peccata, licentiam,
culdubioomniadivinae misericordiae agnoscenda exponunt; qui prius postulet, et obtineat à proprio sacerdote :
verosecusfaciunt,etscianter aliquaretinent,nihil d ivinesbonitati
persacerdotem remittendum proponunt. Sienimerubescat oegro- cum aliter ipse illum non possit absolvere vel
tus vulnusmedico detegere,quodignorât,medicina noncurât. ligare. » (Cap. Omnis, de Poenit., etremiss.) Concil.
Colligitur proeterea,etiameascircumstantias inconfessione expli- Trid., (Sess. XIII, c. 19.)
candasesse,qusespeciempeccatimutant: quodsineillispeccata Le sens de ce décret est d'ordonner que la con-
ipsanequeh poenitentibus intègreexponantur, necjudicibus inno-
tescant;et fierinequeat,ut de gravitalecriminum rectecensere fession annuelle se fasse seulement au propre
possint, etpoenam, quamoportet,proillispoenitentibus imponere. prêtre, ou à celui qui en a reçu la permission,
Undealienumà rationeest,docerecircumstantias basabhomîni- ou celle de son supérieur; c'est l'interprétation
busotiosisexcogitalas fuisse; aut unamtantumcircumslantiamcommune des conciles provinciaux, des papes,
confitendam esse,ntmpepeccassein fratrem.Sed et impium des
est,confessionum, quaebacrationefieriproecipitur, impossibilem théologiens et des canonistes. Mais, que doit-
dicere,aut carnificinam illamconscieutiarum appellare. Constat on entendre par propre prêtre ? Est-ce le curé de
enim,nihilaliudin Ecclesia a poenitentibus exigi,quamut,post- la paroisse ou tous les prêtres approuvés du
quamquisquediligentius seexcusserit, etconscicntioe suassinus diocèse ? Plusieurs canonistes pensent qu'il ne
omnes et latebrasexploraverit, ea peccataconfitealur, quibusse
Dominum et Deumsuummortaliter oflendisse meminerit : reliqua s'agit ici que du curé; ils disent, pour appuyer
autenipeccata,quaediligentep cogitanti nonoccurrunt, in univer- leur sentiment, que, dès l'an 1280, un synode
sum,eademconfessione inclusa esseintelliguntur : proquibusfide- de Cologne, et Pan 1281 un concile de Paris,
litercumPropheta dieimus : ab occultis metsmundameDomine. de 24 évêques et d'un grand nombre
vero
Ipsa hujusmodi confessionis ac
difficullas, peccata d etegendi composé
verecundia gravisquidem posset,nisitoi tantisque
videri commo- de docteurs, avaient déjà décidé la contestation
diset consolationibus levaretur,quoeomnibus, dignead hocsa- en faveur des curés; qu'en 1451 et 1456, la fa-
cramentum accedentibus, perabsolutionem certissime conferuntur. culté de théologie de Paris, et en 1478, le pape
Coeterum, quoadmodumconfiteudi secretoapudsolumsacerdo- Sixte IV, confirmèrent cette décision, et qu'elle a
tem,etsiChristusnonvetueritquinaliquisinvindictam suorum
-seelerum et sui humiliationem, cumobaliorum exemplum, lum toujours été suivie dans le clergé de France ; que
obEcclesise offenséeoedificationem, delictasua publiéeconfiteri queenimperLateranense concilium Ecclesia
staluit,ut Christifl
poss.it; nonesttamenhocdivinoproecepto mandatum, necsutis delesconfiterentur, quodjure divinonecessarium et institutum
consultehumanaaliqualegepraeciperetur, ut delicta, proesertimesseintellexerat; sedut proeceptum saltemsemelin
confessionis,
Becreta publicaessentconfessione aperienda. Undecuma sanctis- anno,abomnibus cumadannosdiscretionis
et singulis, pervenis-
tamiset antiquissimis Patribus, magnounanimique consensu, Unde
sé- sent,impleretur. jam inuniversa Ecclesia, ingentiani*
cum
crétaconfessio sacramenf alis, quaab initioEcclesiasanctausa marumfideliumfructu,observatur mosillesalutarisconûtendi,
est,et modoetiamulitur,fueritsempercommendata ; manifeste sacroilloet maxime a temporeQuadragesimoe
acceptabili : quem
refellitur inaniseorumcalumnia, qui eama divinomandatoalie- moremhoecsanctaSynodusmaxime probatet amplectitur, tan*
nam,etinventum humanum esse,atquea Patribusinconcilio La- quampiumet meritoretinendum. » {Cône.Trid.Sess*xiv,De
teraneusi congregatis initiumhabuisae, docerenonverentur.Ne- Confess, c. 5.)
521 CONFESSION SACRAMENTELLE
les conciles de Bourges, en 1584,et do Narbonne, pas do foi que le pape fut le propre prêtre de tous
en 1551, sont aussi très exprès là-dessus et que los fidèles. Noël Alexandre, dans une de ses dis-
c'est évidemment le sens du concile de Latran, sertations, a pulvérisé ce paradoxe de Launoy.
puisqu'il exige que celui qui voudra se confesser Le pape Jean XXII, dans la bulle Vas electionis,
à un prêtre étranger, en obtienne la permission condamna expressément, en 1320, la doctrine
de son propre prêtre. Cependant, on donne au- qui exclut de la dénomination de propre prêtre le
jourd'hui généralement une interprétation diffé- pape, les évêques, les religieux et les autres dé-
rente aux mots proprio sacerdoti.Voici la décision putés par les évêques pour entendre les confes-
de S. Liguori, dans son traité de la Pénitence : sions. (Extrav. comm.,deHxrcticis. cap. 2.) Alexan-
« Fidèles libère se possunt confiteri cuicumque dre IV avait déjà condamné, en 1255, Guillaume
confessario approbato, et hoc etiam tempore do Saint-Amour, qui le premier avait enseigné
paschali, et invito parocho. Proprio sacerdoti que le curé seul, à l'exclusion du pape et de
intelligendum, omni sacerdoti, qui ab ordinario l'évêque, est le proprius sacerdos.
est approbatus. Et hoc saltem ex praosonti uni- . La Sorbonne, pendant les siècles passés, con-
versali consuctudine hodio certum est quidquid tribua beaucoup à soutenir ce système. EugènelV
antiqui aliter dixerint. » BenoîtXIV *,qui donne condamna ceux qui disaient que le pape même
la même décision, dit que la proposition con- ne pouvait donner aux religieux le pouvoir d'ab-
traire, jure, meritoqueesse castigandam. S. Charles, soudre validement. Alors la Sorbonne déclara
dans les conciles I, II, III et V de Milan, a fait la bulle du pape suspecte de fausseté, ajoutant
plusieurs bons règlements sur cette matiàre. Il qu'elle troublait l'université et d'autres choses
ordonna, entre autres choses, que ceux qui, dans semblables. Les jansénistes accueillirent et fo-
le temps de Pâques, auront été absents de leur mentèrent ce système. Le clergé de France, en
paroisse, porteront à leur curé une attestation i 655, condamna ces erreurs. Habert *dit que sou-
du lieu où ils auront fait leurs paques : et sur vent des théologiens de la faculté de Paris ont
la communion pascale des laïques qui servent soutenu cette erreur, en donnant exclusivementl
dans les monastères, il les oblige à la faire dans au curé le titre de proprius sacerdos; selon lui, ce
l'église de la paroisse. Les conciles de Bordeaux titre est au moins schismatique, et il ajoute
en (583ot 1634, d'Aix en 1585,et de Narbonne en qu'on a souvent condamné cette proposition.
(009, ordonnent aux curés de tenir un registre Navarre et beaucoup d'autres enseignent que
fidèle des noms et des prénoms de ceux qui se le proprius sacerdos est le pape, l'évêque et le
seront confessés au temps de Pâques, où seront curé. D'autres disent, avec plus de fondement
aussi marqués le jour et le mois; registres qu'ils et même avec certitude, que c'est le pape, l'évê-
seront tenus de produire à l'évêque, quand il le que, le curé et le prêtre délégué par l'évêque ou
demandera. tout confesseur autorisé à confesser les fidèles 2.
Nous pensons donc et nous disons que , Le proprius sacerdosa toujours été, et est encore
par proprius sacerdos, il faut entendre tout prê- le prêtre quelconque délégué par l'évêque, et le
tre approuvé par son évêque pour entendre les prêtre est appelé proprius sacerdos de ceux qui se
confessions. Mais notre opinion a cet égard confessent à lui 3.
parut fort étrange à un respectable curé qui On voit même, par le canon Omnis utriusque
nous écrivit que la décision de S. Liguori, que sexus, que l'esprit du concile de Latran était de
nous avons citée, était formellement en opposi- parler de tous les confesseurs en général, et en
tion avec la pratique suivie dans son diocèse et particulier de celui qui est propre à chaque pé-
contraire aux décisions des conférences ecclé- nitent. En effet, ce même canon donne des règles
siastiques imprimées par ordre de son évêque. que tous les prêtres doivent observer sur la dis-
En (847, un journal religieux 2 crut devoir aussi, crétion. Si le curé avait été le seul proprius sa-
dans plusieurs articles, attaquer notre senti- cerdos, qu'aurait été le pénitencier des anciens
ment. Nous n'en fûmes point étonné, car nous siècles et du temps même du concile? Qui
savons que quelques théologiens et canonistes aurait été le proprius sacerdos des religieux qui
ont embrassé sur cette question des opinions avaient leurs confesseurs députés ad hoc par l'é-
fort exagérées. Launoy est allé jusqu'à dire vêque ? Qui aurait été le proprius sacerdos des
qu'un chrétien qui se confesserait à son évêque, curés et des prêtres, qui devaient avoir un con-
ou même au pape ne remplirait pas le précepte fesseur désigné par l'évêque? Qui aurait été co-
du canon Omnisutriusque sexus, comme s'il n'était
e. 9, deConf.§7, 8et 9.
1.DePoenitentia,
1.DeSynododicecesana,lib.xi. 2. Navarre,m cap. Placuit., de Poenit,dist.n.13); Pon-
2. La Voixdela vérité,journalqui méritaalorsd'êtreinterdit tas,cas16; Thomassin, del'Église,part.T.lib,n, e. 10,
Discipline
parMgrAffre. 3. Nardi,Descurésetdeleursdroitsdansl'Église,chap.9.
CONFESSION SACRAMENTELLE 525
lui dès religieux qui se confessaient eux et con- do Tours, tenu à Rennes, auront la plus grande
fessaient les fidèles? celui des aumôniers, des liLervé dans le choix de leurs confesseurs, même
chapelains, etc? pour la confession annuelle, etiam pro confessioni
Si l'on veut consulter beaucoup de conciles sacramentaliannua facienda de prxcepto, à laquelle
provinciaux et de synodes tenus, surtout en nous déclarons que l'on satisfera, dans toute
France, depuis le quinzième siècle, on y verra notre province, en s'adressant à tout prêtre ap-
souvent répété que les expressions proprius sacer- prouvé par l'ordinaire. « Cui satisfieri, declara-
dos, proprius confessarius, suus confessariussont mus per confessionem factam cuilibet sacerdoti
synonymes, et signifient tout simplement le ex approbatis ab ordinario. » Tous les prêtres
confesseur que chacun avait choisi pour soi. Il avertiront leurs paroissiens, surtout au temps
en est même qui l'expliquent très clairement. du carême, de cette faculté qui leur est accordée,
Par exemple, le synode de Clermont, en 1208, et aucun ne se permettra de gêner cette liberté,
lequel dit : « Proprium autem sacerdote;n dici- directement ou indirectement, à l'égard de quel-
mus duobus modis ex officio, ut pote papam, que personne que ce soit. » (Décret.XVII, § 4.)
episcopos, curatos, vel ex commissione, sicut Enfin le concile d'Avignon prescrit la même
fratres prsedicatores et minores, et quibus com- pratique en ces termes : « Nous décidons qu'il
misit episcopus vices suos. » On ne pouvait est permis à tous les fidèles et à chacun d'eux
parler plus clairement. Voici encore d'autres de s'adresser à quelque prêtre que ce soit, ap-
preuves décisives et sans réplique: Le célèbre prouvé par l'ordinaire, pour la confession,
Alexandre de Halès, très renommé du temps même au temps de Pâques, etiam temporePaschali,
du concile de Latran, et mort en 1245, assure et nous décidons en conséquence que tous les
que le proprius sacerdosest l'évêque, le curé et paroissiens soient avertis publiquement par
tout prêtredéléguéparl'évêque.S. Thomas et S. Bo- leurs propres curés, que cette faculté leur est
naventure (dist. XVII q. 2) pensent de même. accordée. » (Titul. IV, cap. 5.)
S. Thomas dit que celui qui se confesse à l'évê- Dans la plupart des diocèses de France, l'ap-
que ou à un prêtre délégué par lui se confesse probation de l'évèquo tient lieu de permission
proprio sacerdoti. Voyez encore Fontana (Défense pour la confession, et rien de si commun clanu
de l'épiscopat),Ferraris (verboEucharistia. 4, 25), ces mêmes diocèses que les confessions hors de
Lambertini (Notif. 105) et plusieurs passages la paroisse sans permission du curé. Dans celui
de la sainte rote romaine. d'Évroux, par exemple, les statuts portent :
Il est donc démontré que le concile, par pro- « Nous ordonnons aux pasteurs do Laisser à leurs
prius sacerdos, n'entendait pas le curé comme paroissiens la liberté de se confesser, môme
curé, mais le propre confesseur de chacun, curé pour Pâques, à tout prêtre approuvé dans le
ou non, délégué par l'évêque, qui seul est le diocèse. » On exige seulement que le paroissien
proprius sacerdosdans la rigueur des termes. vienne recevoir la communion dans sa paroisse,
S'il restait encore à cet égard le moindre par les mains du curé ou de son vicaire.
doute, il serait résolu par nos derniers conciles
provinciaux, du moins pour la pratique actuelle, | II. Confessiondes enfants.
car ceux qui ont examiné cette question se sont D'après le canon Omnisutriusquesexus, cité dans
.prononcés de la manière la plus formelle et lo paragraphe précédent, il est évident que tous
dans les termes les plus clairs et les plus expli- les fidèles parvenus à l'âge de discrétion, c'esl-
cites. à-dire environ à l'âge de sept ans, sont rigou-
« Par le propre prêtre, dit le concile de la reusement tenus de se confesser au moins une
province de Reims, tenu à Soissons, on entend fois l'an, et que ce précepte oblige les enfants qui
le curé, l'évêque et le Souverain Pontife. Mais, ont suffisamment de raison pour se rendre cou-
afin de faire cesser entièrement la restriction pables de péché, comme il oblige les personnes
pernicieuse apportée à la liberté des fidèles, re- plus âgées. Cependant beaucoup de curés se
lativement au choix du confesseur, nous voulons sont imaginé que les enfants ne devaient se
et déclarons, volumuset declaramus, que ceux qui confesser et recevoir l'absolution qu'à l'époque
se confesseront à tout prêtre approuvé par l'é- de leur première communion. C'est là une er-
voque, cuilibetab episcopoapprobettosacerdoti,rem- reur grave et très pernicieuse au salut des en-
pliront le précepte delà confession annuelle; de fants qui, faute de se confesser et de recevoir
sorte qu'il est expressément défendu atout curé l'absolution de leurs fautes, vivent en état de
d'inquiéter qui que ce soit à cet égard, nonobs- péché plus ou moins grief et prennent souvent
tant toute ooutume contraire. » (Titul. Vil, cap.ï.) de mauvaises habitudes qu'ils conservent tbute
» Les fidèles, ajoute le concile de la province leur vie.
526 CONFIDENCE
Pour obvier à ce grave inconvénient, nos der- le pavage quelques débris de mosaïque du
niers conciles provinciaux d'Avignon, de Lyon, XIII0 siècle i.
de Bordeaux et de la province de Reims ont
| V. Confession(par rapport au Protestantisme.)
sagement prescrit aux curés d'accoutumer les On appelle ainsi, dans le Protestantisme, les
enfants à se confesser, et de les absoudre, s'ils
en sont dignes, même avant le temps de la pre- écrits, délibérations, qui veulent établir des
mière communion. « Et si digni absolutionis vi- symboles de foi. C'est ainsi que l'on dit : la
Confessiond'Augsbourg,la Confessionanglicane, la
deantur, etiam ante tempus primoe communionis
absolvantur. » Le devoir du vrai pasteur est Confession belge, la Confessionhelvétique,la Confes-
sion téTrapolitaine,ou de Strasbourg, etc.
d'accoutumer les enfants à cette sainte pratique
et de les préparer ainsi insensiblement par une deEn vertu du libre examen, il y aura autant
vie innocente à recevoir dignement le sacrement confessions dans le Protestantisme qu'il y
aura d'assemblées et même d'individus. Ce sera
de l'Eucharistie. Il doit donc les confesser plu-
sieurs fois l'année, et, autant que possible, à toujours l'histoire de ce ministre protestant qui
des époques déterminées. Car il serait souve- avait voulu rédiger son Symbole.A chaque révi-
rainement déplorable, si, par la négligence et sion, c'était une nouvelle modification, si bien
l'incurie d'un pasteur, l'âme de ces pauvres en- qu'après un certain temps, il n'y avait plus rien
fants languissait dans le péché et dans des ha- du premier Symbole... que le triste doute qui
bitudes coupables et vicieuses. « Quam dolendum ne traîne après lui que l'ennui, le trouble et le
esset, si, parochi negligentia, longum per tem- découragement.
pus, eorum animas in peccatis et pravis consue- CONFIDENCE.
tudinibus languescerent. » (Concil. Lugd. 1850,
Décret. XXIV, n. 4; concil. Prov. Rhemens., titul. La confidence est une convention expresse
VIII, cap. 3 ; concil.Burd., tit. III, cap. 5, n. 5.) ou tacite faite lors de la résignation ou de la
Le concile de Périgueux, tenu en 1856, insiste collation d'un bénéfice, de rendre ce bénéfice,
de nouveau sur cette question en ces termes : ou d'en donner les fruits, ou une partie au rési-
« Et quod ad illorum confessi jotem spectat, non gnant, ou au collateur, ou à un autre par lui
obliviscantur parochi quod it. proecedenti conci- nommé :«Est conventio inrenuntiatione vel pro-
lio Burdigalensi sancitum est de hujusmodi visione beneficii, de ipso restituendo, vel ejus
functione, non raptim nec jocose implenda, sed fructibus dandis sibi aut alteri, tacite vel ex-
cum ea pia gravitate, cum ea patienti, discreta presse inita. »
et anxia sollicitudine, qua tam suis quam par- Il n'est fait aucune mention dans tout le corps
vulorum animabus in Deo provideant. » (Tit. H, du droit canon, non plus que dans les constitu-
cap. i.) tions des anciens Papes, de cette espèce de si-
monie. Pie IV fut le premier des papes, qui
§ III. Secret de la confession. dans une bulle de l'an 1564, parla contre les
(Voirlemot: Confesseur,
§ I.) confidentiaires. Pie V, son successeur, s'étendit
§ IV. Confession des Martyrs, des confesseurs de beaucoup après sur cette matière dans deux dif-
la foi. férentes bulles, l'une de l'an 1568, et l'autre du
Petite grotte ou excavation, creusée au-des- 1erjuin 1569.Cette dernière porte en son titre :
sous d'un maître-autel et où sont vénérés les Des confidences bénéficielles, de leurs cas, pré-
et preuves : De confidentiisbeneficiali-
corps des saints confesseurs de la foi. Les plus somptions
importantes, à Rome, sont celles de S. Jean de bus, earumquecasibus, prAEsumptionibus et probotio-
Latran, S. Pierre, Sainte-Marie-Majeure, S. Paul- nibus. On verra par les termes de cette bulle,
hors-les-murs et Sainte-Sabine. jusqu'à quel point on avait porté dans le XVI
Quelques-unes sont fermées par des grilles de siècle l'abus des règles, par ce nouveau crime :
fer ou de marbre, comme à S. Alexandre, S. Cé- « Multi enim ipsa bénéficia jure retinere ne-
saire, S. S. Nérée et Achillée, ou ornées de mo- quentes; alii, ne cogantur ad sacros ordines et
saïques d'émail, comme à S. Georges in Velabro, ad residentiam, ad incedendum in habitu cleri-
S.S. Jean et Paul, etc. cali, ut ad bellum proficiscantur ut inimicos oc-
La confession de S. Pierre dessine une croix. cidant; alii, ut alieno nomine lites tegant.aut
Son ornementation en stucs dorés date du pon- défendant; quidam ut purgato delicto vel abso-
tificat de Clément VIII. Grégoire XVI a privilé- lutione consecuta illa répétant, eadem in alios
gié l'autel pour les vivants et pour les morts. Au deponunt, et in plerisque fructus ipsorum, aut
rétable est un tableau sur bois représentant eis ministrantur, aut quibus ipsi statuunt saîpo
S. Pierre et S. Paul (xiv°siècle). Il reste dans 1.Barbier de Montault: L'Année à Rome.
liturgique
CONFIDENCE 527
laicis et inhabilibus ; plerique, vel infirmi, ut tre, jouissent de fait des fruits du bénéfice à l'ex-
bénéficia in suis domibus perpétuent, illa re- clusion du titulaire, c'est une confidence.
nuntiarunt et renuntiant in alios, qui vel pro- 9° Enfin, de quelque manière qu'une tierce
fanam familiam cedentium de fructibus eccle- personne soit interposée au titre ou aux reve-
siasticis alant, vel illaetiamnum infantibus,aut nus d'un bénéfice, ce bénéfice est estimé en dé-
nascituris asservent, facto interdum circuitu re- pôt et en confidence.
trocessionis, cum reservatione fructuum, et alia- Ces différentes manières de tomber dans le
rum rerum, aut accessu, praesertim ab illis qui crime de confidence, comprennent les trois dif-
praestandorum jurium Caméras Apostolicae sunt férents caractères dont parle Flaminius, sous
immunes; alii, aut incapaces, aut aliis benefi- ces termes : Pactum,conditioet modus.Elles peu-
ciis ecclesiasticis onusti, aut ecclesiastico ordini vent en rendre coupables, non seulement le ré-
sese mancipare refugientes, aut mère laïci, bé- signant, le collateur et le patron, mais encore
néficia ecclesiastica aliis conferenda procurant, le médiateur, et surtout celui qui reçoit le bé-
ut do illis postmodum ad libitum suum dispo- néfice; et il faut remarquer que le crime n'au-
natur, fructus etiam percipientes illorum. Ad rait pas moins lieu, quand une seule personne
hoecplerique ordinarii et alii collatores, ac etiam en serait coupable. Binsfeld, de simonia apud me,
patroni laïci curant dponenda bénéficia , ut p. 77 et seqq. où touchant les peines de ce crime,
fructus seu pensiones capiant eorumque, aliis- cet auteur s'exprime ainsi : « Simoniacus etiam
que faeiant ministrari; aliaque item permulta tantum conventionalis ob confidentiam, incur-
ejusmodi admittuntur; quibus immaculata re- rit poenas has; prima est, quod nihil juris acci-
rum divinarum puritas impie violatur, etc. » piat in beneficio peream obtento; secunda, ipso
Les auteurs qui ont traité cette matière ex jure excommunicatur; tertia, perdit alia bénéfi-
professo, réduisent par méthode les différents cia bene quoesita; quarta, sit inhabilis ad om-
cas où se commet le crime de confidence, retra- nia alia. »
cés en général de cette bulle, à ceux qui sui- Le concile de Bourges, tenu en 1584, déclare
vent : les bénéfices obtenus ou donnés en confidence
1° Si quelqu'un résigne un bénéfice à un au- vacants de plein droit, et oblige à la restitution
tre avec réservedepension,sans le consentement ceux qui en ont perçu les fruits ; et non seule-
du Pape, en quelque cas et pour quelque cause ment prive les confidentiaires de tous les béné-
que ce soit. fices ou pensions qu'ils possèdent, mais même
2° Si un bénéficier criminel, ou autrement les déclare incapables d'en obtenir d'autres; ce
irrégulier, résigne son bénéfice, et qu'après qui paraît avoir été ainsi réglé dans ce concile,
avoir obtenu dispense, il le reprenne. en conformité de la bulle Intolerabilis du Pape
3° Si quelqu'un impètre un bénéfice avec ce Pie V.
pacte, qu'il le remettra à un autre, ou qu'il s'en D'après la constitution Apostolicx Sedis de
dessaisira à la recommandation d'une telle per- Pi c IX, ceux qui se rendent coupables de simo-
sonne. nie confidentielle pour un bénéfice quelconque,
4° Si quelqu'un a accepté un bénéfice à la place quel que soit leur rang, sont passibles d'une ex-
d'un enfant, en attendant qu'il ait l'âge requis commnnication latx sententixréservée au souve-
pour le lui résigner. rain-Pontife.
5° Si le collateur use de son droit et de son Sous le nom du bénéfice, on doit entendre
autorité, pour se réserver à lui, ou pour réser- ici, les paroisses telles qu'elles sont constituées
ver en faveur d'un autre, une partie des fruits en France depuis la Révolution. Ainsi l'a décidé
du bénéfice à sa collation ou présentation. la sacrée pénitencerie, le 9 janvier 1819,1e9 août
6° Si quelqu'un exempt de payer par privilè- 1821,et le 9 janvier 1823.« Suivant ces décisions,
ges les expéditions de la chambre ou de la chan- dit Mgr Gousset, le salaire ou traitement que le
cellerie, fait expédier les bulles d'un autre en clergé de France reçoit du Gouvernement doit
son nom pour éviter les frais. être regardé comme un revenu ecclésiastique.On
7° Si quelqu'un à l'effet de défendre ou soute- se fonde sur ce que le pape Pie VII, en légiti-
nir un procès sur un bénéfice, le résigne à un mant la vente des biens de l'Eglise, par le con-
autre, afin qu'ayant gagné le procès,il le remette cordat de 1801, ne l'a fait qu'à raison de l'enga-
à un tiers, ou le restitue à lui-même. gement pris par le gouvernement de procurer
8° Si n'étant intervenu en la collation ou ré- un traitement convenable au clergé; de sorte
signation aucune sorte de pacte simoniaque, ni que ce traitement doit être considéré comme
autrement répréhensible, toutefois le résignant, une portion des biens qui appartenaient aux
ou le collateur, ou les parents de l'un ou de l'au- Eglises de France avant la Révolution. »
538 CONFIRMATION
En conséquence de ce qui précède, l'excom- CONFIRMATION.
munication infligée à ceux qui se rendent cou- Nous parlerons sous ce mot de la confirma-
pables de simonie pour un bénéfice quelconque, tion comme sacrement et comme ratification o i
serait également encourue par quiconque com-
mettrait la simonie dans la collation de telle ou approbation d'une chose.
telle paroisse. § I. Confirmation. Sacrement.
PREUVE. La constitution Intolerabilis de Pie V, Le concile de Trente, session VII, explique
marque diverses conjectures, par où l'on peut en trois canons la foi de l'Église sur ce sacro-
parvenir à la preuve de la confidence, ordinai- ment. La matière consiste dans l'onction du
rement très cachée : saint chrême et l'imposition des mains de l'é-
1° Si après une résignation ou cession con- vêque. Le canon Dehis vero, dist. 5, de Consecra-
sommée, le bénéfice retourne par voie de regret tione, ne désigne ce sacrement que par l'imposi-
ou autrement au résignant, ou que lui ou les tion dos mains.
siens en perçoivent les fruits au préjudice du La forme consiste dans les paroles que l'évê-
résignataire : il en faut dir% autant des colla- que prononce lorsqu'il applique l'onction du
teurs et patrons, s'ils jouissent, ou leurs proches, chrême : « Signo te signo crucis, et confirmo te
des fruits du bénéfice conféré. chrismate salutis, in nomine Patris, et Filii, et
2» Si quelqu'un exempt des frais de provi- Spiritus Sancti. » (Can. Novissimi, de Consecrat.,
sions, après avoir été pourvu du bénéfice, le re- dist. 5.)
met ensuite au résignant, sous la réserve auto- On ne peut avoir à la confirmation qu'un
risée d'une portion des revenus ou d'une pen- parrain ou qu'une marraine. Un parrain pour
sion. les garçons, une marraine pour les filles. (Con-
3° Si l'irrégulier, dispensé de son irrégularité, cilesde Bordeaux en 1583, et de Milan V.) Ce par-
reprend un bénéfice auquel il avait renoncé après rain ou cette marraine ne peut pas être le même
6on irrégularité encourue. que celui du baptême. (Concilede Narbonne, en
4° Si le résiliant dans la disposition 1609.)Et il est défendu de rien donner à celui
s'ingère
des choses quedépendent du bénéfice, ou que qui est confirmé ou à ses parents pour ne pas
le résignataire constitue son procureur pour donner prétexte de réitérer ce sacrement. « Ne
la perception des fruits du bénéfice. occasionem praîbeat iterandi hoc sacramen-
5° Si le résignant a fait tous les frais des pro- tum. » (Concilesd'Aix, deNarbonne,et {" de Milan.)
visions et des autres expéditions de son rési- A l'égard de l'affinité que produit la confirma-
gnataire. tion, voyez le mot. Affinité. Ce n'est plus la
Toutes ces présomptions se trouvent dans la coutume maintenant de donner des parrains ou
bulle citée; comme il y en a de plus ou moins marraines aux confirmants. On se contente de
concluantes, les auteurs disent que certaines leur donner un nom. Du reste, le grand nombre
font preuves, mais que les autres ne suffisent do ceux qui se présentent pour recevoir la con-
pas i. firmation rendait cette coutume presque impra-
Voirlemot.'Simonie. ticable en bien des paroisses, où les églises
CONFI DENT1AIRE. sont déjà trop exiguës pour recevoir la foule
C'est proprement celui qui prête son nom qui y accourt dans ces circonstances.
pour posséder le titre du bénéfice, à la charge C'était un ancien usage de donner le sacre-
de remettre à un tiers, soit les revenus du bé- ment de confirmation à trois heures du soir. Le
néfice en totalité ou en partie, soit le titre môme 5» concile de Milan recommande aux évêques
du bénéfice dans le temps dont on est convenu. de s'y conformer, mais rien n'empêche qu'on
Il y a des auteurs qui distinguent l'auteur de, ne puisse l'administrer le matin, c'est même ce
la confidence, c'est-à-dire, celui qui remet le, qui se fait le plus communément maintenant,
bénéfice pour s'en réserver les fruits, ou poul- et alors il est convenable que celui qui reçoit
ie faire parvenir à la personne qu'il affectionne, ce sacrement , soit à jeun. Plusieurs con-
et qui ne peut le posséder encore, du confiden- ciles enjoignaient même à l'évêque de conférer
tiaire dont nous venons de parler ; mais dans. à jeun ce sacrement à des personnes qui étaient
l'usage ordinaire, on appelle confidentiairestous, également à jeun : à jejuno jejunis. En beau-
ceux qui participent au crime de confidence. Etl coup de diocèses, on recommande à ceux qui
•rntrefois on comprenait les confidentiaires sousj doivent se présenter pour ce sacrement d'être
la dénomination générale de simoniaques. à jeun, autant que faire se peut.
1.Menoch. dEPrmeumpt.lia.S.pres.9. Navar.m Manual
cap. On ne doit pas régulièrement administrer ce
13,a n. 109uiq.ad.111.Biotfeld,deSimonia,loc.cit. • icrement avant l'âge de sept ans. Pour le rece»
CONFIRMATION 520
voir, il faut être en état de grâce. Les curés spécial pour insérer les noms de tous ceux qui
sont obligée d'avertir leurs paroissiens de re- ont reçu la confirmation. « Habeatur etiam in
cevoir ce sacrement et de les y préparer par des unaquaque ecclesia parochiali liber confirmatq-
jinstructions convenables. (Concilesde Tours en rum in quo ipsorum nomina inscribantur. » On
1583,de Bourgesen 1584,d'Aixen 1585, de Toulouse doit avoir soin d'indiquer le jour et l'année,
[en 1590, de Narbonneen 1609, de Bordeauxen 1624 dit le concile de Bordeaux.
leten 1850.)Ges mêmes conciles enjoignent aux La confirmation ne doit être donnée à aucune
évêques d'être exacts à visiter les différentes personne étrangère au diocèse, à moins qu'elle
parties de leurs diocèses pour administrer le n'ait obtenu préalablement la permission de son
sacrement de confirmation. ordinaire, ou que cette permission de l'ordi-
Le sacrement de confirmation peut être lici- naire, puisse être présumée pour une grave
tement conféré aux idiots, comme aux fous fu- raison.
rieux, lors même qu'ils le seraient sans relâche. Le concile de Trente a décidé dogmatique
Un clerc ne peut pas être admis à la tonsure, ment, session VII, can. 3, que l'évêque est lt
s'il n'est déjà confirmé : « Prima tonsura non seul ministre ordinaire de ce sacrement : « Si quis
initientur qui non susceperunt sacramentum dixerit , sanetae Confirmationis ordinarium
confirmationis. » (Conc.de Trid., sess. XXIII, c.IV ministrum non esse solum Episcopum, sed
de la Réf.) quemvis simplicem sacerdotem ; anathemasit. »
Maintenant, pour que les fidèles retirent des Le mot ordinaire semble faire entendre que l'é-
.fruits abondants du sacrement de confirmation, vêque peut commettre un prêtre pour donner
jon ne le confère qu'aux enfants qui ont fait leur extraordinairement la confirmation, et telle est
première communion et qui sont suffisamment en effet l'opinion de plusieurs docteurs qui se
instruits, à moins de cas extraordinaires dont fondent d'ailleurs sur l'usage de l'Église grec-
l'évêque seul est juge. C'est ce que décide for- que et sur ce que le canon Manus, dist. 5, deCon-
mellement le concile de la province de Tours, secr., qui donne aux évoques le pouvoir exclusif
tenu à Rennes en 1849. Nous ordonnons, dit-il, de faire l'imposition dos mains, est regardé
que personne ne soit admis à recevoir le sacre- comme apocryphe. Le canon Pervenit, ajoutent-
ment de confirmation sans avoir fait sa pre- ils, de la même distinction, donne aux prê-
mière communion, à moins toutefois qu'une tres le pouvoir d'oindre le front des baptisés en
grave raison, dont l'évêque sera juge, ne con- l'absence des évêques. Mais le pape Benoît XIV*
seille d'agir autrement. « Sancimus nullum ad se déclare pour l'opinion contraire. Ce savant
hoc sacramentum admittendum esse, quin ad pape établit que les Souverains Pontifes sont
primam communionem accesserit; nisi ta- seuls en droit de commettre des prêtres pour
men aliud gravis ratio, judice episcopo, sua- administrer le sacrement de confirmation, et
deat. » (Décret.XVII, § 2.) Le concile d'Avignon qu'ils ne donnent cette commission qu'à condi-
de la même année,dans le chapitre 3 du titre IV, tion que les prêtres se serviront du chrême
décidela même chose. « In Ecclesialatina amulto consacré par les évêques. «Posita autem reserva-
tempore consuetudo viget confirmationem non tione, (ce sont les termes de Benoit XIV), facul-
conferendi ante septennium , et in provincia tatis de qua sermo, a Summo Pontifice sibi
Avenionensi, non nisi post primam communio- facta, nec licite, nec valide potest episcopus la-
nem pueris hoc sacramentum administratur, et tinus illa uti, nam quam vis confirmare, sit ac-
hune usum retinendum censent Patres concilii, tus ordinis episcopalis cujus formitns et validi-
exceptis quibusdam casibus, judicio episeopi. » tas a pontificis nutu non pendet, delegare ta-
Le concile de la province de Reims et celui men simplici presbyteri potestatem exercendi
déjà cité de la province de Tours prescrivent, ejusmodi actum, potius ad jurisdictionem quam
à ceux qui doivent être confirmés, de présenter ad ordinem pértinet episcoporum vero, sive sit
à l'évêque ce qu'on appelle communément un immédiate a Christo Domino, sive a Summo
billet de confirmation,qui constate la permission du Pontifice, ita semper huio subest, ut consen-
curé et une préparation suffisante pour recevoir tientibus omnibus catholicis, ejusdem auctori-
ce sacrement. Ce billet, signé du curé ou de son tate et imperio limitari, atque ex légitima causa,
vicaire, doit être délivré hors le tribunal de la omnino auferri possit. »
pénitence. « Tradat parochus, extra tribunal Clément XIII donna la faculté de confirmer
poenitentiae, non discernens eos quos absolvit aux vicaires apostoliques de la Chine, et Pie VI
sacramentaliter ab iis quos absolvere non po- à ceux de la Cochinchine et du Tonkin. Ils
tuit. » (Titul. IV, cap. 2.) furent autorisés à déléguer leurs missionnaires
Il doit y avoir dans chaque église un registre i. DeSynodo lib. vu, cap.7 et8.
dioecesana,
I. 34
530 CONFRÉRIE
pour administrer le sacrement, en se servant du des bénéfices : « Bona damnatorum si sint laici. '
saint chrême consacré par un évêque catholi- confiseentur ; si vero clerici applicentur eccle-
que. Une instruction, que publia la Sacrée Con- siis, a quibus stipendia receperunt. » En sorte
grégation de la Propagande, sous la date du 4 que si les clercs ont des bénéfices eh différentes
mai 1774,prescrit en détail tous les rites que églises, dans un seul diocèse ou dans plusieurs,
doit observer le prêtre délégué pour administrer la distribution de leurs biens se fera au profit
la confirmation. de chacune de ces églises, suivant ce qui est ré-
Plusieurs canonistes avaient déjàdit que le pape glé par le chapitre Relatum,de Testamentis.
seul peut donner à un abbé le pouvoir de con- Le chapitre Oportet, de Mandatis principum, dé-
firmer, mais non de bénir et de consacrer la ma- sire qu'on corrige plutôt les clercs en leurs per-
tière du sacrement. sonnes qu'en leurs biens : « Magis emendare
Les apôtres envoient S. Pierre et S. Jean à clericorum personas quam in eorum bonassevire
Samarie, pour faire recevoir le Saint-Esprit, par debere; non enim sunt res quse delinquunt, sed
l'imposition des mains, aux nouveaux baptisés. res qui possident. »
S. Philippe n'étant que diacre ne pouvait le leur Le juge d'Église ne peut ordonner de confis-
donner, parce que ce pouvoir était réservé aux cation, parce que l'Église n'a point de fisc, quia
'apôtres, comme il est encore aujourd'hui ré- Ecclesia nec territorium, nec fiscum habet ; il peut
servé aux évêques, leurs successeurs, qui seuls seulement condamner à des peines pécuniaires
peuvent donner le sacrement de confirmation. applicables à telle oeuvre qu'il lui plaira.
Ce trait d'histoire affermit l'autorité du canon Nous croyons superflu d'ajouter que les ca-
Manus, et justifie la doctrine de Benoît XIV. nons relatifs à la confiscation ne peuvent plus
Commele sacrement de confirmation imprime avoir d'application parmi nous.
un caractère à ceux qui le reçoivent, de même
le CONFRÉRIE.
que le baptême, on ne peut recevoir plus
d'une fois. (Ex concil. Tarrac, can. Dictum,de Con- On donne ce nom, du latin confraternitas, et
secrat., dist. 5 ; Greg. III, can. De homine, de Con- quelquefois celui de congrégation, à une société
secr., distinct. 5.) de plusieurs personnes établie pour quelque fin
(Voirlesmois: Consécration,Chrême.) pieuse. Cette société est aussi appelée associa-
§ II. Confirmation. Election. tion et agrégation. Quand elle donne naissance
|
(Voiriemot: Election.) à d'autres co îfréries qui y sont agrégées, elle
prend le nom d'archiaonfrérie.
§ III. Confirmation des abbés. Le but des confréries est d'attacher plusieurs
(Voirl emot: Abbé.)
personnes ensemble par un lien spirituel de fra-
§ IV. Confirmation, approbation. ternité, pour s'aider mutuellement par les priè-
Il est parlé, sous divers mots de cet ouvrage, res, les exemples, les conseils, et s'appliquer
ae la confirmation dans le sens d'une approba- aux oeuvres particulières de piété ou de charité,
tion de quelque acte ; telles sont les confirma- qui sont propres à la confrérie que l'on em-
tions d'élection, de conciles, de concordats, brasse. On pense que l'établissement en remonte
d'aliénations, transactions, etc. Sur quoi il faut au moins au neuvième siècle.
voir ces différents mots, en retenant cet axiome, Le droit canon et les anciennes histoires ne
que la confirmation par elle-même ne donne parlent que de congrégations de clercs ou de
rien, mais approuve seulement ce qui a été moines; ce qui fait croire que jusqu'au temps
donné ou requis: Qui confirmâtnihil dat, sed datum des nouvelles réformes, où les nouveaux reli-
tantum significat. gieux se livrèrent tout entiers au service de l'É-
CONFISCATION. glise, les fidèles ne connaissaient d'autres assem-
blées et d'autres exercices de dévotion que ceux
Il est parlé de confiscation dans plusieurs de la paroisse. On vit alors se former des con-
textes du droit canon. (C. Accusatoribus3, quxst. fréries de toutes les sortes. Les papes les favo-
5 ; c. Vergentis; c. Excommunicavimus, de Hxreticis.) risèrent d'indulgences, les corps religieux en
La première de ces décrétales ordonne que les prirent soin. Les plus considérables furent les
biens des hérétiques seront confisqués respecti- confréries de pénitents, qui se répandirent sur-
vement .au profit de chaque seigneur où ils se tout en Italie et dans le midi de la France, et se
trouveroat assis; l'autre dit que les biens des composaient exclusivement de-personnes du
clercs hérétiques ne seront pas confisqués même sexe. Les membres de ces associations se
comme ceux des hérétiques laïques, mais qu'on nommaient Pénitents,parce que, dans leurs exer-
en fera l'application aux églises où ils ont eu cices religieux et dans les cérémonies publiques
CONFRÉRIE 531
du culte, ils portaient, en signe d'humilité et de juridiction épiscopale, entièrement réservé à l'é-
pénitence, un vêtement particulier, appelé ca- vêque, chargé principalement des âmes. C'est
goule,qui avait la forme d'un grand sac muni l'ordre établi par les conciles. « De xenodochiis
de manches et d'un long capuchon qui couvrait et aliis similibus locis per sollicitudinem epis-
le visage, et descendait même sur la poitrine. coporum in quorum dioecesiexistunt, ad easdern
Deux petites ouvertures, pour les yeux, étaient utilitates quibus constituta sunt, ordinentur. »
pratiquées à la partie supérieure ; quelquefois, (C. 3, de Religiosis domibus.)Les confréries, dit
aussi, il y avait une échancrure à la hauteur de le canon 7 du concile d'Arles de l'an 1234,doi-
la bouche : fi i de laisser la respiration plus libre. vent être défendues, si elles ne se font pas par
Suivant la couleur de leur cagoule, ces confréries autorité de l'évêque.
étaient appelées pénitents blancs, noirs, bleusou Le pape Clément VIII publia à ce sujet la
gris. Dans nos départements du midi, ces con- constitution Quaecumque,le16 décembre 1604,par
fréries, outre les pratiques de dévotion auxquel- laquelle il est défendu d'ériger aucune nouvelle
les elles s'appliquaient, constituaient encore de confrérie sans la permission et l'autorité de l'é-
véritables associations de secours mutuels. La vêque, à qui de plus il faut présenter les statuts
première confrérie de ce genre, dont l'histoire pour qu'il les examine et les approuve. En con-
fasse mention, est une confrérie de la sainte séquence, la congrégation des évêques et des ré-
Vierge pour laquelle Odon évêque de Paris fixa guliers déclara, le 6 décembre 1617, que les jé-
en 1208,une fête annuelle. La confrérie des gon- suites et les dominicains qui étaient en mission
faloniers fut fondée à Rome, en 1265.Henri III, dans les Indes occidentales, ne pouvaient y éri-
roi de France, à son retour de Pologne, en 1572, ger des confréries sans l'approbation de l'évê-
se fit agréger, à Avignon, à la confrérie des pé- que voisin. La congrégation des Rites rendit
nitents blancs et bleus, et quelques années après une décision conforme, le 6 octobre 1617.
en 1583,il fonda, à Paris, une confrérie divisée Le concile de Rennes, de l'an 1849, recom-
en pénitents blancs, noirs et bleus, dans laquelle mande fortement dans le décret XIX, les pieuses
il fit entrer les personnes les plus notables de associations ou confréries de fidèles, instituées
la cour, du parlement de la bourgeoisie et même pour pratiquer des oeuvres de religion ou de
de l'armée. charité; mais en même temps, il veut qu'elles
Mais aucune de ces confréries ne fut enrichie soient bien ordonnées et bien dirigées, de peur
des dons spirituels du pape, comme celles qui qu'elles ne deviennent un foyer de discordes, de
furent établies à Rome sous les noms de Confa- scandales et d'autres maux.
Ion, c'est-à-dire, de la rédemption des captifs, du En conséquence, d'après les principes que nous
Saint-Crucifixou de Saint-Marcel,des Agonisants, venons d'exposer, le concile défend à qui que ce
Saint-Sacrement,du Scapulaire, du Rosairede la soit, de former ou d'ériger une nouvelle confré-
Résurrectionde Notre-Seigneur, de la Bienheureuse rie sans le consentement et l'approbation de l'é-
ViergeMarie,de la Plante, des Stigmatesde S. Fran- voque diocésain, qui doit en examiner les statuts
çois, de la Miséricorde,de l'Angegardien, et enfin avec le plus grand soin, « sine consensu et ap-
de Saint-Sauveuren l'église de Saint-Jean-de-La- probatione episcopi dioecesani, qui ejus statuta
tran. On a donné à ces confréries le nom d'ar- diligenter examinanda curabit. »
chiconfréries,paxe que les autres confréries s'y Le concile déclare, en outre, conformément à
font agréger p jur profiter des prières qui s'y la constitution de Clément VIII, que nous ve-
font et des indulgences qui y sont attachées. nons de citer, et aux autres constitutions apos-
En 1836,il a été établi à Paris, dans l'église toliques, que toutes les confréries ou associa-
de Notre-Dame-des-Victoires, une archiconfrérie, tions quelconques, même établies dans les égli-
sous le titre du Trèssaintet immaculécoeurde Marie, ses des réguliers, ou qui sont approuvées par
dont le but est de prier pour la conversion des lettres apostoliques, ou agrégées à des archicon-
pécheurs. Les Souverains Pontifes y ont aussi fréries érigées canoniquement, ne pourront pas
attaché plusieurs indulgences. Il y a encore à exister sans le consentement et la volonté des
Paris l'archiconfrérie de mères chrétiennes fon- ordinaires ; qu'elles seront entièrement soumi-
dée par le R. Théodore Ratisbonne et autorisée ses à leur juridiction, que leurs indulgences et
par Bref du H mars 1859,celle, plus ancienne, privilèges ne se pourront gagner ou communi-
de S. François Xavier des Missions étrangères quer sans le visa et la reconnaissance des mê-
qui se rattache à l'oeuvre de la propagation de mes ordinaires des lieux,enfin,que leurs officiers
la foi, celle de la Doctrine chrétienne sous l'in- ou directeurs seront tenus de rendre compte de
vocation de Jésus, Marie et Joseph. leur administration àl'évêque, si celui-ci l'exige.
L'établissement des confréries est un acte de (Décis.de la congrég. du conciledu 29 mat 1683.)
532 CONFRÉRIE
Le même concile ordonne encore que toutes tare ecclesiarum cathedralium aut collegiatarum,
les confréries érigées dans les églises paroissia- sed in sacellis tantum et extra horam qua divi-
les, seront en tout soumises au curé du lieu, ou num officium peragitur », c'est-à-dire, dans le
à son vicaire délégué spécialement par lui,quand temps de la messe paroissiale. Le concile de
il aura le pouvoir de déléguer, le tout suivant Narbonne, en 1609,défend de tenir le Saint Sa-
les règlements établis par l'évêque. Si quelques crement dans les chapelles de confréries, « nisi
confréries ont été établies dans des oratoires, hoc expresse approbante episcopo. »
chapelles ou lieux exempts de la juridiction cu- Il y a des conciles, entre autres celui de Sens,
riale, les évêques auront soin de déterminer tenu en 1528,qui défendent de payer aucun droit
leurs droits, fonctions et prérogatives, charges de confrérie, ou d'exiger de serment de la part
et obligations, si exactement que toute occasion dos confrères qui se font recevoir.
de division et de contestation entre lesdites con- Suivant le concile de Sens, et celui de Nar-
fréries et les paroisses, soit écartée. bonne, que nous venons de citer, les évêques
Enfin, les exercices et oeuvres pieux des con- sont en droit de se faire apporter les statuts des
fréries et associations, seront tellement réglés, anciennes confréries, l'état de leurs revenus et
que la célébration des offices de la paroisse n'en de leurs charges, et de leur prescrire des règle-
soit jamais empêchée ni troublée, et bien plus ments convenables; les officiers des confréries
encore, que les fidèles ne soient pas détournés doivent être approuvés par l'évêque et prêter
de ces offices, surtout au moment de la prédica- serment devant lui, et les procureurs des con-
tion. fréries sont obligés de rendre leurs comptes à
Les confréries sont-elles au rang des corps l'évêque. Le même concile de Sens réprime des
pieux et ecclésiastiques ? Sur cette question, les abus qui s'étaient glissés ou pourraient s'intro-
canonistes ne paraissent pas bien d'accord. Bar- duire dans plusieurs confréries,comme les repas
bosa fait rapporter la question aux lieux, aux trop fréquents et trop licencieux.
corps, aux biens, et aux personnes. 1° Par rap- Toutes les confréries, comme établissements
port aux lieux, il dit qu'ils sont saints et dignes publics légalement privilégiés, ont été suppri-
de l'immunité, si l'on y célèbre les saints mys- mées par la loi du 18 août 1792,titre I, art. Ier.
tères : « Si habeant hospitale vel ecclesiam cum Ces associations pieuses, n'étant plus reconnues
campanili et altaribus, alias secus. <> par la loi, ne peuvent, par conséquent, profiter
2° Le corps de la confrérie est ecclésiastique, directement des dons qui leur seraient faits.
suivant le même auteur, quand l'évêque l'a ap- Nous n'entendons parler ici que des dons qui
prouvé pour des fins pieuses, sans distinguer auraient besoin de l'autorisation du gouverne-
s'il y a plus ou moins de laïques que de clercs ; ment; car rien n'empêcherait qn'on ne pût faire
en cette qualité, gaudet privilégia fori. quelque offrande à ces pieuses associations. Ce-
3° Les biens des confréries, ainsi approuvées pendant si ces dons, quoique faits à la confrérie,
par l'évêque, sont mis au rang des biens ecclé- étaient destinés aux réparations et à l'embellis-
siastiques, et comme tels, inaliénables sans les sement d'une chapelle de l'église paroissiale, ils
formalités prescrites. Cela, dit-il, est sans diffi- pourraient être acceptés par la fabrique, et au-
culté quand les biens sont unis aux églises et torisés par ordonnance.
chapelles où la confrérie fait ses exercices de Un arrêt de la cour royale d'Aix a déclaré que
piété. les confréries n'étant pas autorisées, et ne for-
4° A l'égard des personnes qui composent ces mant pas aux yeux de la loi un être moral, elles
confréries, c'est-à-dire des confrères, ils restent ne peuvent avoir l'exercice d'aucune action, soit
tels qu'ils sont dans le siècle. Les laïques sont active, soit passive.
toujours soumis à leurs juges, et ne jouissent Tout ce qui concerne les confréries se réduit
point du privilège des clercs, à moins qu'il ne donc actuellement à leurs exercices de piété, que
s'agisse de choses spirituelles dépendantes de l'évêque seul a le droit de régler, et aux dépenses
leurs confréries, comme de la réception des con- nécessaires pour l'entretien de la chapelle où se
frères, de leur élection pour les charges, ou de font les réunions. Les dépenses sont votées et
leur rang pour les processions, dans lesquels cas employées d'après la libre volonté des membres
l'évêque est leur juge, suivant la constitution de la confrérie, dont les engagements cessent
du pape Grégoire XIII, conforme au concile de quand ils le jugent convenable. Les fabriques
Trente. (Sess. XXV, de Regul., chap. 13.) n'ont pas droit de voir les comptes des con-
Les conciles, notamment celui de Bourges, de fréries et encore moins de disposer de leurs de-
l'an 1584,défendent aux confréries de se tenir ou niers.
de célébrer leurs offices « in choro ad majus ai- Une ordonnance du roi, du 28mars 1831,décide
CONGRÉGATIONS ECCLÉSIASTIQUES 533
que la suppression d'une congrégation religieuse vées par le Saint-Siège, en vue d'un but a
ou confrérie, établie dans une paroisse, ne peut atteindre et faisant des voeux simples, ou des
donner lieu à un appel comme d'abus, contre le communautés de prêtres séculiers qu'unit une
curé qui l'a supprimée. simple promesse ou un engagement d'honneur.
Les biens des confréries, qui avaient suivi le Ces congrégations, fondées souvent au mo-
sort de ceux des fabriques, ont été restitués, par ment d'une nécessité imprévue, ont bien mérité
le décret du 17 juillet 1805, non point aux dites de la religion et du Saint Siège. Beaucoup ont
confréries qui n'ont aucun caractère légal, mais pris pour fondement de leurs constitutions la
aux fabriques. règle des Jésuites.
On donne aussi le nom de confréries à toutes En voici la liste, d'après la Gerarchia caltolica
les corporations d'arts et métiers, lorsque c'est de 1887.
un lien religieux qui les unit. I. — Les DOCTRINAIRES (Prêtres dela doctrine chré-
Les confréries rétablies depuis le concordat tienne).Cette congrégation fut fondée à L'Isle,
de 1801, jouissent des mêmes privilèges et des prés Avignon, le 22 septembre 1592, par levén.
mêmes indulgences que celles qui avaient été César de Bus, chanoine de Cavaillon. Son but
érigées canoniquement avant cette époque. C'est est la prédication et l'enseignement. Elle est
ce qu'a décidé en ces termes un décret de la con- dirigée par un vicaire général avec un procureur
grégation des indulgences, en date du 14 mai général, tous les deux résidant à Rome.
1853; Une autre congrégation, les Doctrinaires d'Ita-
« Utrum sodalitates quse canonice existebant lie (Padri déliaDottrina cristiana) fut fondée vers le
ante concordatum 1801, amiserunt de facto sua milieu du seizième siècle, par Marc Sadis Cusani,
privilégia et indulgentiasî gentilhomme milanais, pour instruire le peuple
Sacra congregatio indulgentiis ac sacris reli- de la doctrine chrétienne et ne pas le laisser se
quiis proeposita sub die februarii 1847, respon- faire prendre par les novateurs, comme s'étaient
dit : Négative quoad sodalitates olim légitime laissés gagner les peuples ignorants de la Suisse
existentes et deinde sub eisdem titulo, legibus, et du Nord. Ce fut pour cette congrégation que
habitu (ubi tamen gestare liceat) noviter ac ca- Bellarmin composa son petit Catéchisme.
nonice erectas. In quarum, etc. » Les deux congrégations de Doctrinaires pa-
raissent s'être fondues en une seule association.
CONFRONTATION. IL — Les CLERCS RÉGULIERS DESÉCOLES PIEUSES,
ou PIES(Piaristes ou PU operari), fondés en 1600
La confrontation est un acte important en
doit être observé avec par S. Joseph Calazanz, prêtre espagnol. Venu
procédure criminelle, qui à Rome, ce saint prêtre s'affilia à l'archiconfré-
attention, suivant le chapitre Prxsentium, de Tes- rie des Doctrinaires et loua, en 1597, à la
tibus et Attest. porte
de Settimana, une maison où il réunit les en-
Le juge ordonne la confrontation de l'accusé fants des divers
quartiers de la ville, pour les
avec les témoins pour voir s'ils le connaissent, instruire et leur fournir le matériel
ou s'ils lui soutiennent en face ce qu'ils ont dit nécessairegratuitement à leurs travaux élémentaires. C'est
contre lui, et pour lui donner moyen de son côté ainsi
de réunir les témoins. (C. Cum clam, 53, de Tes- que naquit la communauté des clercs ré-
la le guliers des écoles pies à laquelle PaulV permit,
tib.) Après confrontation, procès est ins- en 1617,de faire des voeux simples et de se don-
truit, et doit être communiqué au promoteur, ner des règles. Grégoire XV lui donna, en 1621,
pour prendre ses conclusions définitives. le titre de Sociétédes clercs réguliers des pauvres,
On confronte aussi les accusés les uns aux sous la
mais on ne confronte les témoins protectionde la Mèrede Dieupour les écoles
autres; pas
aux témoins, ce serait ôter à l'accusé les moyens pies. Les piaristes sont très répandus en Italie, en
de se justifier, en empêchant les contradictions et en Autriche où ils ont des établisse-
où les témoins peuvent tomber dans leurs dé- Espagne ments florissants.
positions, étant entendus séparément, au lieu Leur maison-mère est à Rome. Ils sont dirigés
que s'ils étaient confrontés, ils pourraient, étant par un préposé général, avec un procureur gé-
de mauvaise foi, s'arranger sur ce qu'ils vou- néral, i
draient dire pour perdre l'accusé. III. — Les PRÊTRES DELAMISSION(Lazaristes).'
CONGRÉGATIONS ECCLÉSIASTIQUES. Société de prêtres séculiers fondée par S. Vin-
cent de Paul en 1624et que le pape Urbain VIII
On appelle congrégationsecclésiastiquesdes réu- éleva au rang de congrégation spéciale. En 1632,'
nions de prêtres ayant des constitutions approu- elle obtint le collège S. Lazare à Paris, d'où ses
534 CONGRÉGATIONS ECCLÉSIASTIQUES
membres furent appelés Lazaristes. La congré- nouveau l'existence légale à la congrégation et
gation a pour but les missions, le ministère pa- elle fut chargée de desservir toutes les colonies
roissial, au besoin, l'oeuvre des séminaires, des françaises.
collèges et des pèlerinages. La congrégation du Saint Coeurde Marie fut
. Cette congrégation a des maisons dans le fondée en 1841, à La Neuville, près Amiens, par
monde entier : dans toute l'Europe, en Asie, le P. Libermann, juif converti, pour l'évangéli-
en Afrique et en Amérique. Les dignes soeurs sation des nègres.
de la charité suivent les missionnaires, et fon- M. Monel, supérieur de la congrégation du
dent partout des hôpitaux, des orphelinatset des Saint-Esprit, nommé vicaire général de Mada-
écoles. gascar, se démit do ses fonctions en faveur du
La maison-mère, où réside le supérieur gé- P. Libermann et le Saint-Siège approuva la
néral, est rue de Sèvres, à Paris; un procureur réunion des deux congrégations, le 26 septembre
géuéral réside à Rome. 1848.
IV. La SOCIÉTÉ DES PRÊTRESDE S. SULPICE Les prêtres de la congrégation du Saint-Esprit
(Sulpiciens).Société de prêtres séculiers fondée et du Saint Coeur de Marie vont partout où la
en 1641,par M. Olier. Le but de cette société est S. Congrégation de la Propagande les envoie.
surtout l'oeuvre des grands séminaires. Elle en Le séminaire du Saint-Esprit est pour former le
dirige plusieurs en France, aux États-Unis et clergé des colonies françaises ; mais la congré-
au Canada. La maison principale est le séminaire gation a un noviciat distinct pour former ses
de S. Sulpice à Paris, où réside le supérieur gé- missionnaires.
néral. VIII. — Congrégation des PRÊTRESDU TRÈS
V. — Lacongrégation des PRÊTRESDEJÉSUSET SAINTRÉDEMPTEUR (Rèdemptoristesou Liguoriens).
DEMARIE (Eudistes). Congrégation pour les mis- Congrégation fondée en 1732, par S. Alphonse
sions dans les campagnes, l'oeuvre des séminai- de Liguori, à Scala, royaume de Naples. Son
res et celle des collèges. Elle fut fondée en but est l'apostolat. Aux trois voeux simples de
1643, par le P. Eudes qui fut d'abord de pauvreté , de chasteté et d'obéissance, elle
l'Oratoire. La maison principale est à Redon ajoute celui de n'accepter, en dehors de la con-
pu réside le supérieur général. grégation, aucune charge et bénéfice sans un
VI. — LES PRÊTRES DE LASOCIÉTÉ DESMISSIONSordre spécial du pape ou du supérieur général.
ÉTRANGÈRES , de Paris. Société fondée au XVIIe Benoît XIV conseilla aux membres de la con-
siècle et dont dont la maison-mère est le Sémi- grégation de s'appeler Rèdemptoristes,pour qu'on
naire des Missions Etrangères à Paris. Cette ne les confondit pas avec les chanoines du très
société a, comme contrées à évangéliser, cinq saint Rédempteur, de Bologne.
provinces de la Chine, le Tonkin, l'Indo-Chine, Les Rèdemptoristes, pour mieux remplir leur
la Cochinchine, le Cambodge, Siam, la plus apostolat, font construire leurs maisons dans
grande partie de la Birmanie et de l'Indoustan, les quartiers des villes les plus pauvres et les
soit une population de 203 millions d'idolâ- plus populeux. Ils sont répandus dans le monde
tres. entier. Leur maison-mère est à Rome où se
VII. — Congr. du SAINT-ESPRITETDEL'IMMACULÉ trouve le Recteur majeur, avec un procureur
COEUR DEMARIE. Congrégation formée de la réu- général.
nion de celle du Saint-Esprit avec celle du Saint IX. — Congrégation des PASSIONISTES, ou
Coeurde Marie. des Clercs déchaussésde la Sainte Croix et de la
La congrégation du Saint-Esprit fut fondée Passionde Notre-Seigneur.Société religieuse fon-
à Paris, en 1703, par un saint prêtre natif de dée par S. Paul de la Croix, en 1736, dans le
Rennes, dans le but de donner l'instruction gra- but de prêcher la pénitence autant par l'exem-
tuite à de pauvres clercs destinés à remplir dans ple que par la parole. Le moyen de prédication
le saint ministère les postes les plus délaissés, de la congrégation est de mettre sous les yeux
tels que vicariats de campagne, service des hô- du peuple les souffrances du Seigneur dont la
pitaux, missions, tant en France qu'à l'étranger. grandeur témoigne de l'énormité du péché.
.C'est cette congrégation qui a fait construire le L'institut fut approuvé en 1725 et en 1741par
séminaire du Saint-Esprit, à Paris. Au siècle les papes Benoît XIII et Benoît XIV. Quoiqu'il
dernier, elle envoya des missionnaires en Chine, soit très sévère, il est répandu et a des maisons
aux Indes, au Tonkin, au Canada, en Acadie, jesqu'en Australie. La maison-mère est à Rome,
à S. Pierre et Miquelon, à Cayenne et dans la où réside le préposé général, avec un procureur
Guyane. général.
En 1816, une ordonnance royale rendit de X. — Congrégation des OBLATS DEMARIE IKHA-
CONGRÉGATIONS ECCLÉSIASTIQUES 535
CULÉE, fondée en 1815, à Àix en Provence, par de Picpus, établissent des maisons dans toutes,
Mgr de Mazenod, alors coadjuteur de l'évêque les villes importantes.
de Marseille. Son but est l'oeuvre des missions La congrégation, dirigée par un vicaire gêne-
et celle des grands séminaires. Sa devise est : rai, avec un procureur général, a sa maison-
Evangelizarepauperibus misit me Deus. Elle a des mère à Paris.
maisons en France, en Italie, en Angleterre et XV. — INSTITUT DELACHARITÉ. Cette congréga
des missionnaires dans toutes les parties du tion, dirigée par un préposé général, avec un
monde. La maison-mère, autrefois à Marseille, procureur général, fut fondée en 1839 par le
a été transférée à Paris, où réside le supérieur pieux et savant abbé Rosmini Serbati. La mai-
général ; un procureur général réside à Rome. son-mère est à Strezza, près du Lac Majeur.
XL — Congrégation des OBLATS DE LAVIERGE XVI. — Congrégation de SAINTE-CROIX (au
MARIE(de Pignerol), fondée en 1816.Son but est Mans), composée des Pères Salvatoristes, des!
la perfection de ses membres et celle des fidèles. Frères Joséphites et des religieuses Marianistes.\
Elle emploie pour atteindre ce but les exercices Elle a été fondée par le R. P. Moreau, en 1835,
de S. Ignace. Elle fait l'éducation des aspi- et années suivantes.
rants à la prêtrise, prêche et exerce gratuite- Les Frères Joséphites doivent leur première j
ment les fonctions du saint ministère toutes les origine à un vénérable prêtre], Jacques Duja-j
fois que ses membres en sont requis avec rié, curé de Ruillé-sur-Loire, qui, en 1806, avait;
la permission de l'ordinaire. Elle s'occupe en- fondé les soeurs de la Providence. Le P. Mo-
core de répandre les bons livres. La S. Congré- reau fut prié par l'évêque du Mans de terminer,
gation de la Propagande l'a chargée d'envoyer l'oeuvre de M. Dujarié, malade.
des missionnaires aux Indes, dans l'empire des Les Pères Salvatoristes ont pour but les mis-
Birmans. Elle est dirigée par un recteur ma- sions, l'instruction de la jeunesse et le minis-
jeur, avec un procureur général. tère paroissial. Les Frères Joséphites s'occu-
XII. — Congrégation des MISSIONNAIRES DUPRÉ- pent de l'instruction primaire et de l'instruction
CIEUX SANG,fondée à Giano (Etats de l'Eglise) secondaire. Les Soeurs Marianistes s'occupent
le 15 août 1815, par levén. Gaspard dei Buffalo, des soins de lingerie et infirmerie des établisse-
noble prêtre romain. Les membres de cette so- ments d'instruction des séminaires et collèges
ciété portent le titre de missionnaires apostoliques. de la congrégation, ou instruisent les jeunes
Ils desservent les pèlerinages et fondent des mai- personnes dans des maisons particulières.
sons dans les diocèses pour répondre aux néces- Cette congrégation dont le supérieur général;
sités de la prédication; ils ont un grand nombre de est à Rome, a des établissements très floris-.
maisons non seulement en Europe, mais encore sants en Europe, aux Etats-Unis, au Canada,
en Amérique. La maison-mère, où réside le di- au Bengale, en Australie, etc.
recteur général, et le procureur général est à XVII.— La PIEUSESOCIÉTÉ DESMISSIONS. (Pallo-;
Rome. tini) sorte d'archiconfrérié dont le conseil est
XIII. — La COMPAGNIE DEMARIE(Pères Maristes composé de prêtres séculiers, fondée à Rome
de Lyon), fondée en 1816, par le P. Colin, et ap- en 1835,par le P. Palloti. Elle est dirigée par, '
avec un procureur général.
prouvée en 1860par Pie IX. Son but est l'oeu- un recteur général,
vre des missions, celle des séminaires et des XVIII. —Les PRÊTRES DELARÉSURRECTION, con-
collèges. Cette société est répandue; elle dirige grégation de prêtres polonais dont le supérieur
un certain nombre de séminaires et de collèges général et le procureur général résident à Rome.
et elle a les missions de la Nouvelle Zélande XIX. — Les PRÊTRES DUTRÈSSAINT-SACREMENT,'
avec une partie de celles de l'Océanie. Le pré-, congrégation fondée à Paris, le 13 mai 1856,par
posé général de la Congrégation est à Lyon, le P. Eymard, prêtre du diocèse de Grenoble.
et le procureur général est à Rome, Cette société se dévoue entièrement, par les
XIV. — Congrégation des SS. COEURS DEJÉSUS trois voeux, au service et au culte de Notre-
ETDEMARIE,(dite de Bicpus), fondée en 1805par Seigneur Jésus-Christ dans la sainte Eucharis-
le P. Goudrin. Son but est l'adoration perpé- tie et exposé solennellement sur Tàutel, dans
tuelle, l'oeuvre des séminaires, celle des collè- l'exercice perpétuel de l'adoration, de l'action
ges, les missions au peuple, et la prédication de de grâce, de la réparation et de la supplication
l'évangile 'parmi les infidçles. Dès 1840, les pour la conversion du monde et le règne eu-
membres de cette congrégation étaient répan- charistique de Jésus-Christ. Pour la vie active,
dus dans toutes les contrées du monde, en Eu- l'apostolat de la société se borne à la sainte
rope, en Amérique, en Océanie et en Asie. Eucharistie, à nourrir la foi, la dévotion et l'a-
Les religieuses de l'Adoration perpétuelledites mour des fidèles envers le très saint Sacrement;
536 CONGRÉGATIONS ROMAINES
ses oeuvres sont: les retraites intérieures en fa- Augustins, et à leur ordre alphabétique dans
veur des prêtres surtout; les retraites de pre- l'ouvrage, les mots : Fransciscains, Carmes,
mière communion ; des associations d'adora- Mercédaires, Trinitaires, Servîtes, Hieronymi-
tion établies dans des paroisses; les retraites tes).
ecclésiastiques et religieuses ; l'oeuvre des pre- 4° ClercsRéguliers. (Voir le mot Barnabites à
mières communions des adultes; la prédication l'Appendice de ce volume, et, à leur ordre al-
des quarante heures; l'oeuvre des tabernacles. phabétique dans l'ouvrage, les mots : Théatins,
La devise de cette congrégation est : Tout pour Somasques, Jésuites, Mineurs, ministres des
l'amour et la gloire de Notre-SeigneurJésus-Christ au infirmes, Mère de Dieu, Ecoles pies.)
très saint Sacrememtde l'autel. 5° Congrégations ecclésiastiques(voir ce mot ci-
La société admet dans son sein des prêtres et dessus.)
des laïques vivant tous sous la même règle et 6° Instituts religieux, comprenant les congréga-
avec les exercices communs. Ses membres sont tions de Frères. Sous ce mot nous parlerons
divisés en trois classes : les religieux contem- aussi des congrégations de religieuses.
platifs, les religieux contemplatifs et actifs ; les Sous le mot Bénédictins, nous faisons con-
agrégés. naître toutes les congrégations et ordres dont
Lés agrégés sont les membres, prêtres ou laï- les constitutions dérivent de la règle de S. Be-
ques, qui, ne pouvant suivre toute la règle, noît. Au mot Fransciscains nous parlons de
forment le tiers ordre du Très Saint Sacrement toutes les congrégations de l'ordre de S. Fran-
La' maison-mère est à Paris, où réside le vi- çois etc. De cette manière, il y aura peu d'ins-
caire général, avec un procureur général. titutions religieuses que nous n'ayons pas fait
XX. — La congrégation des SALÉSIENS, fondée connaître dans le cours de l'ouvrage.
par le P. dom Bosco, supérieur général actuel, CONGRÉGATIONS ROMAINES 1.
avec un procureur général, et dont la maison-
Nous avons vu (§ III du mot Concile) que les
mère est à Turin (Italie).
papes, dans les dix ou onze premiers siècles,
Cette oeuvre d'un saint prêtre italien recueille
les enfants pauvres, les instruit et leur apprend expédiaient les affaires de la chrétienté, en se
servant de leur presbyterium et des conciles ro-
tiri état. Elle vient de créer des maisons à
mains. Après, vu la difficulté de réunir souvent
Marseille, Paris, Rouen et autres grands centres des conciles et même le presbyterium, ils expédiè-
de population en France. rent ces affaires dans les consistoires et ils
XXI — Congrégation des MISSIONNAIRES DUSA-
créèrent cardinaux dès évêques de toutes les
cré COEUR(d'Issoudun), fondée par le R. P. Che-
nations.
valier, curé d'Issoudun. Le P. Chevalier en est
avec un Outre les Déjà le pape S. Léon IV (847-55) avait rendu
supérieur, procureur général. un décret portant que les cardinaux s'assemble-
missions, cette congrégation s'occupe de l'oeu- raient deux fois
vré des collèges. par semaine dans le palais
— des MISSIONNAIRES FILS apostolique, pour traiter des choses de la disci-
XXII Congrégation
DOCOEURIMMACULÉ DE MARIE,société de prédica- pline. Jean VIII (872-82)ajouta deux réunions
mois. Sous Innocent III (H98-1216)les réu-
teurs' dont le P. Xifré est supérieur général, avec par
nions du palais apostolique avaient lieu trois
un procureur général. fois par semaine.
XXIII. — Congrégation des MISSIONNAIRES DE Dans ces consistoires, le pape présidait et,
S. FRANÇOIS DESALES,dont la maison-mère est
après l'avis des cardinaux, il décidait. La plus
à Annecy. grande partie des canons que nous avons dans
CONGRÉGATIONS RELIGIEUSES. les Décrétales ont été faits dans ces consistoires.
Le terme de Congrégationsreligieuses est un mot Il y avait déjà à cette époque les consistoires
ordinaires ou secrets, et les consistoires extraor-
générique que certains auteurs ont employé pour dinaires ou publics.
désigner tous les ordres religieux et que d'autres
ont réserve pour désigner les instituts de Frères. Comme les recours à Rome augmentaient tou-
jours, les décisions des consistoires ne suffisaient
Nous conserverons autant que possible la di-
vision de la Gerarchia cattotica qui est celle-ci : pas; les papes étaient obligés d'examiner beau-
i° Chanoines Rêgutiers(Voir ce mot à l'Appen- coup de causes en particulier : ils le faisaient
dice de ce volume.) avec leurs chapelains, dans la chapelle du. pa-
2° Moitiés (Voir à l'Appendice les mots Anto- 1, ToutcequenousallonsdiresurlesCongrégations Romaines
est tiré d'ouvrages ayant toute autorité,commeles Analecta
nlens, Basiliens, Bénédictins). les ouvragesde MgrBARBIEB
Juris Pontificii, DeMONTAULT,la
3° Ordres Mendiants (voir à l'Appendice le mot Gerarchiacattotica,VAnnuarioPontifia,etc.
CONGRÉGATIONS ROMAINES 537
lais. Ces chapelains recevaient les affaires à Au XIIIesiècle, le pape Innocent III avait éta-
examiner, recueillaient les raisons des parties, bli des inquisiteurs pour s'opposer à l'hérésie
puis en faisaient relation au pape, qui jugeait. des Albigeois. Mais la congrégation actuelle de
On les appela auditeurs du sacré palais. Ils devin- l'Inquisition a été instituée par la bulle Licetab
rent, sous Jean XXII(1316-34),des jugesdélégués initiode Paul III, en date du 2 juillet 1542,confir-
pour les causes secondaires et formèrent le tri- mée par la bulle Immensaxterni de Sixte V.
bunal de la Rotequi a résolu tant de causes spi-
rituelles, comme on peut le voir au mot : Rote. du préfet, du secrétaire avec ses aides, des consul-
A cette époque existaient déjà la Pénitencerie teurs et des agentsqui interviennent dans les causes.
Nous avons fait un article séparé pour les consul-
apostolique et la Daterie apostolique(voir ces mots) teurs (voir ce mot.)
qui aidaient aussi à l'expédition de beaucoup PRÉFET.
d'affaires, et la Chancellerieapostolique, à laquelle
les papes laissèrent le jugement des causes pro- A la tête de chaque Congrégation, excepté celles
fanes de for ecclésiastique qu'on portait àRome, dont le pape se réserve la présidence, il y a un pré-
en appel des sentences des ordinaires et des mé- fet qui est nomméà vie par le pape. C'est le préfet
qui dirige les séances et la marche des affaires, et
tropolitains. On appelait ces causes : causes mi- c'est lui qui signe les décrets de la Congrégation.
neures. A la mort du cardinal c'est le cardinal se-
• crétaire d'État qui prendpréfet,
la signature, jusqu'à ce
Aux XVe xvi«siècles, les causes et les consulta- que le pape ait nomméun autre préfet.
tions se multiplièrent considérablement. C'est En l'absence du préfet, c'est le plus ancien cardi-
nal de la Congrégation qui a la signature; il fau-
alors que les papes'résolurent les congrégations drait un ordre du pape pour qu'il en fût autrement.
que nous voyons fonctionner aujourd'hui.congré- Le cardinal-préfet a une grande part, avec le se-
gations qui ne font qu'un même tribunal avec crétaire, dans la préparation des causes qui doivent
le pape et qui rendent des sentences pontificales être introduites devant la Congrégation: renseigne-
sans appel' et qui offre un avantage considérable ments à prendre auprès des ordinaires, avertisse-
par suite de la maturité des jugements et la ments aux parties intéressées, etc. C'est lui qui-
prompte expédition des affaires, comme on le traite les affaires qui doivent être expédiées par la
verra par l'exposition que nous allons faire de simple audience du pape, et, il a, comme le secré-j
leur composition et de leur mode de procéder. taire, le privilège qu'on doive le croire sur paroles,'
au sujet des ordres ou décisions qu'il atteste avoir,
!§ I. La Sacrée Congrégation de l'Inquisition ro- reçus du pape, vivaevocis oraculo, de la bouchedu
maine et universelle (ou du Saint-Office.) Souverain Pontife.
Le Souverain Pontife s'est réservé la présidence Il a aussi le pouvoir de traiter, avec le secré
de la congrégation. taire, les affaires de moindre importance. Pour ces
Elle est composéede dix cardinaux dont l'un est sortes d'affaires, ainsi que pour la direction des au- !
secrétaire. très, il est d'usage, en quelques Congrégations, de
'
Elle a 27consulteurs », dont le premier est asses- tenir des congrès dans le palais du cardinal-préfet,
seur,unautre (dominicain)estcommissaire du S.-Office', auxquels le secrétaire et le substitut de la Congre-'
un antre avocatfiscal,et un quatrième avocarodei rei, gation ont coutume d'assister.
défenseurdes accusés. SECRÉTARIAT.
3
Il y a qualificateurs ', et divers officiers ou at-
tachés: un sommiste, un relalore (rapporteur), un terChaque Congrégationa son secrétaire, pour anno-
les choses qui s'y font et les rédiger en forme
chef notaire, un archiviste; et un pro-computiste*.
publique.
1. Nous disons sansappel, parce que la partie con- La signature du préfet, avec celle du secrétaire et
damnéen'a d'autre appel que la révision de l'affaire le sceau de la Congrégation, confère l'authenticité
par la même congrégationqui a porté le jugement. aux résolutions et aux sentenceset leur donneforce
2. Voir le mot Consulteur. légale devant les tribunaux inférieurs. Les magis-
3. Qualificateur,théologien préposé pour qualifier trats diocésains doivent exécuter et faire exécuter
les propositionsdéféréesà la Congrégation.Les qua- ces décrets authentiques, mais l'on ne doit ajouter
lificateursne sont pas juges ; ils exposentleur senti- aucune foi in judicio vel extra aux déclarations im-
ment sur les propositions qu'ont leur présente. Voici primées ou manuscrites qui ne sont pas authenti-
la série complètedes qualificationsque peut mériter quées commenous venons de le dire. La S. Congré-
une proposition: hérétique, erronée,téméraire, mal- gation du Concile, la S. Congr.des Rites l'ont ainsi
sonnante, blasphématoire, offensante des oreilles déclaré. Le pape Urbain VIII donna un décret le
pieuses, scandaleuse,schismatique, séditieuse. 2 août 1634,pour la Congrégationde la Propagande.
i. Pour comprendre le fonctionnement des SS. Dans la Congrégationde l'Inquisition, c'est un
J
; Congrégations, il faut se rendre compte de l'office cardinal qui est secrétaire. Dans les autres, c'est
toujours un archevêque ou évêque in partibus infide-
538 CONGRÉGATIONS ROMAINES
Cette congrégation est la première dans l'or- ils réservé la présidence. Son but est l'accroisse;
dre des temps, comme elle est la première par ment et la défense de la foi catholique ; elle a
l'importance de ses attributions qui concernent tout pouvoir dans les choses qui se rapportent
la foi. Aussi, les souverains pontifes s'en sont- aux crimes d'hérésie, de schisme. d'apostasie.
Hum,ou un prélat de la cour romaine. Cependant,a gaux; les consultori,consulteurs légaux; les compu-
l'Index, c'est un religieux dominicainquia toujours tistes,abréviateurs; les scrittori, scribes, copistes;'
rempli cet office. les esattori, collecteurs.
Le secrétaire assiste aux congrégationsgénérales Des règlements,fruit d'une longueexpérience,ser-
acs cardinaux. A la Congrégationdu Concile,c'est vent de direction dans chacun de ces offices.
le secrétairequi fait la relation des affaires qui sont
au rôle, et, dans le scrutin, il a vote consultatif. PROCUREURS, SOLLICITEURS, AGENTS,AVOCATS.
L'usage de la Propagande, c'est que la relation soit Procureurs.— Auprès des Congrégations,le rôle
faite tantôt par un cardinal désigné à cet effet des avocats près de nos tribunaux est rempli par
commeponens, tantôt par le secrétaire. Au S.-Of- les procureursqui sont véritablementles patrons, les
fice, la relation est faite par l'assesseur.D'autres défenseurs des causes. Ce sont eux qui composent
Congrégationsont pour usage d'employer toujours les requêtes et tous autres actes que requiert la
un cardinal ponens; mais le secrétaire assiste à bonne direction des causes. Les procureurs inter-
toutes les délibérations pour noter les décrets et viennent surtout danslesaffairescontentieuses.Dans
sentences, et les enregistrer dans les livres de la les affaires non contentieuses, on est libre de faire
Congrégation. intervenir qui on veut commeprocureur ou comme
Tous les décrets des Congrégationsdoivent être agent.
référés au Souverain-Pontife.C'est le secrétaire qui Pour être admis procureur auprès des Congréga-
fait cette référence. tions, il faut avoir passé un examen et témoignerde
Les secrétaires des congrégations ont des jours sa probité et de sa bonne conduite.
fixes pour les audiences du pape. Après lui avoir Ces procureurs prennent un prix modéré, mais,'
référé les décisions de leurs congrégations, ils lui commel'Eglise a toujours soindes pauvres, le Pape
soumettent les affaires expédiées par le cardinal- nomme des procureursdes pauvres,et de pieuses so-
préfet et le secrétaire. ciétés se sont aussi établies dans ce but.
C'est après les audiences du pape, que le secré- Solliciteurs.— Les procureurs ont des aides appe-
taire doit expédier les sentencesrendues. lés solliciteursqui comparaissentaux citations et in-
Une autre charge du secrétaire, c'est d'avertir les timations préparatoires des causes. Ce sonteux qui,
cardinaux des jours de tenue des congrégationsgé- ordinairement, ont la procuration des plaideurs.
nérales. Il remet à chacun un feuillet indiquant les Agents. Les requêtes doivent être adressées au
causes qui doiventêtre traitées, avec les raisons des SouverainPontife et remises à la main aux secréta-
parties et les motifs de droit de part et d'autres. riats des Congrégationsqu'elles concernent.Les en-
Cette relation abrégéeest suivie d'un sommaire ren- voyer par la poste serait peu respectueux,et il faut
fermant les principaux documents à l'appui, ainsi d'ailleurs que quelqu'un se présente aux secréta-
que le vote des consulteurs. riats pour retirer les décrets des Congrégations.Les
Évidemment, un seul homme ne peut faire à lui nonces, les évéques ont ordinairementdes agents à
tout seul une si grande besogne.Le secrétaire a des Rome. C'est par des agents que sont traitées auprès
aides, des officiers,ou employés: des Congrégationsla plupart dos affaires extra ju-
Dans les bureaux du secrétariat, se trouve un re- diciaires. Toutepersonne honorablementconnuepeut
gistre, appeléprotocole,où sont inscrites, par ordre, servir d'agent.
toutes les affaires pendantes avec indicationde leur Avocats.— La procédure des Congrégationsfavo-,
situation ; l'employé qui a soin de ce registre est rise éminemmentla maturité des jugements. L'ac-
appeléprotocoliste. cusation et la défensedoivent être faites par écrit.
Un autre subalterne important du secrétaireest Ce que veut le juge, c'est la vérité, c'est la justice
l'archiviste; c'est à lui que sont confiéesles archives et tout se fait ici dans le calme et avec la plus
de la congrégation. Ces archives sont déposées au grande urbanité; on n'y voit pas de plaidant sur-
palais du Vatican : chaquecongrégationa un endroit pris et décontenancépar des allégations orales aux-
spécial. Les archives font foi et les copies qu'on quelles il ne s'attendait pas, demander un sursis
fait des pièces qui s'y trouvent, sont tenues pour pour examiner l'attaque et préparer ses réponses.
authentiques quand elles sont attestées conformesà Toutes les pièces sont communiquées,écrites, aux
l'original, confrontéesavec l'originalpar l'archiviste litigants avant la prononciationdes jugements, etils
et revêtues du sceau de la Congrégation. ont eu le temps de produire, aussi par écrit, leurs
Il y a, en outre, dans les secrétariats, et suivant réponses.
les besoins, différents officiers, tels que les notaires Les causes qui sont soumises aux SS. Congréga-
ou greffiers; les minutantiqui font les minutes des tions sont souvent très difficiles.Pour les éclaircir,
rescrits et les copient sur les registres; les som- il faut être versé dans lessciencesecclésiastiqueset
mistesqui admettent et insèrent dans les rescrits les humaines. Ce sont dans ces causes difficilesque
clauses nécessaires; les consulenti consultants lé- les avocats interviennent, et l'on comprendimmê-
CONGRÉGATIONS ROMAINES 539
d'abus des sacrements et de tous autres crimes dans un autre appartement, et l'on prend leur
qui portent avec eux la suspicion de l'hérésie. conseil, ou leur vote; et c'est ainsi qu'on déter-
Gomme . affaires non contentieuses, c'est la mine les affaires qui, déjà examinées et discu-
congrégation de l'Inquisition qui expédie les in- tées mûrement, semblent devoir être soumises
duits qu'on accorde aux évêques pour dispenser au pape. Le lendemain, jeudi, il y a une autre
de l'abstinence quadragésimale, de certains em- congrégation des mêmes cardinaux en présence
pêchements de mariage, etc. du pape, à qui l'on réfère, en abrégé, les choses
Gomme affaires consultatives, cette congréga- discutées dans la congrégation cardinalice du
tion est une de celles qui en ont le plus; elle ré- jour précédent, afin de recevoir les décisions de
sout les doutes relatifs à la foi et aux moeurs et Sa Sainteté. Quelquefois, selon la qualité des af-
elle en a. souvent résolu sur la validité ou la li- faires, on admet les consulteurs dans cette con-
céité de l'administration des sacrements. C'est grégation tenue devant le pape, et de ces déci-
cette congrégation qui a décidé sur la licéité du sions émanent les commissions qui sont données
prêt à intérêt. aux inquisiteurs locaux, ou aux évêques sur
Comme tribunal au criminel, l'hérésie, la po- les affaires de foi.
lygamie, la sollicitation en confession, la réten- S'il s'agit d'examiner des livres, la bulle Sol
tion des livres prohibés, la transgression de licita de Benoît XIV prescrit la congrégation
l'abstinence, la ce! bition de la messe et l'ad- préparatoire des consulteurs, dans laquelle ils
ministration du sacrement de pénitence par des sont appelés à délibérer et voter en commun.
hommes qui ne sont pas prêtres, le culte public Cette congrégation émet un vote consultatif et
envers ceux qui ne sont pas canonisés ni béati- précède de quelques jours celle des cardinaux
fiés, les superstitions astrologiques et les faus- qui prescrivent si le livre doit être condamné et
ses révélations, où il n'est pas rare de trouver proscrit ; et le jugement est soumis à la sanc-
des choses non conformes à la pureté de la foi tion du pape qui ordonne en même temps de
tels sont les crimes qui relèvent du S.-Office et publier le décret de condamnation, s'il y a lieu.
contre lesquels on procède selon les règles des Voirlemot: Inquisition.
saints canons. Elle a en outre, avec la congréga-
§ II. La Sacrée Congrégation du Consistoire (ou la
tion des Evêques et Réguliers.et la congrégation S. Congrégation Consistoriale.)
du concile, les cas d'appel des décisions des tri-
bunaux ecclésiastiques. La Présidence de la Congrégation est réservéeau
La congrégation du S.-Office, étant présidée pape.
Elle se composede S cardinaux
par le pape, procède d'une manière spéciale re- Le secrétaire est un prélat romain, avec un substi-
lativement à ses consulteurs. Les consulteurs un archiviste et un aide pour les écritures.
s'assemblent le lundi de chaque semaine, avec tut,
les prélats et autres. On lit en leur présence les Instituée en 1587, par la bulle Immensa de
procès, lettres et relatious, et on examine les Sixte V, le but de cette congrégation est de prépa-
autres affaires pour plus grande instruction de rer les questions qui doivent être agitées en
l'assesseur qui doit en référer dans une autre consistoire. Elle s'occupe de connaître les légi-
congrégation, à laquelle les cardinaux intervien- times causes d'érection des églises cathédrales,
nent. Cette seconde congrégation a lieu le mer- de leur dotation, chapitre, clergé et peuple, et
credi : l'assesseur, seul, debout, comme minis- autres choses nécessaires à ces sortes d'érection,
tre, réfère les affaires courantes, enlisant même selon les décrets du concile de Trente et les
les procès, lettres et relations de verbo adverbum; saints canons. Elle examine toutes les difficul-
et, après que les cardinaux ont discuté l'affaire tés incidentes des mêmes érections; toutes les
entre eux, selon qu'ils le jugent, on fait entrer controverses entre les églises cathédrales déjà
les consulteurs.qui attendent,pendaut ce temps, érigées; unions et démembrements de ces égli-
diatement que les avocats dont il est ici question morale répondant aux cas pour lesquels on le con-
ne peuvent être que de savants jurisconsultes, doc- sulte. Les mémoires qu'il établit pour la cause qu'il
teurs en l'un et l'autre droit. défend sont des thèses.
Le procureurs'occupedeschoses de fait, l'avocat ne Ici encore on a songé aux pauvres. Tous les avo-
s'occupeque des choses de droit. C'est pourquoi l'of- cats consistoriaux doivent, pour être reçus, s'enga-
fice d'avocat auprès des Congrégations, peut être ger à prendre gratuitement le patronage des plai-
exercé par les ecclésiastiques attendu que par cet deurs qui n'ont pas le moyen de payer leur défense,
exercice, ils ne sont pas exposés à se rendre coupa- et il existe à Rome une pieuse société d'avocats qui
bles de calomnieet de mensonge: l'avocat, alors, est se réunit tous les jours de fête pour recevoir les re-
commele jurisconsulte répondant selon le cas posé quêtes des personnes pauvres qui demandent la dé-
par sa partie, ou commeun professeur de théologie lense gratuite et faire la répartition des causes.
540 CONGRÉGATIONS ROMAINES
ses et de leurs diocèses, ou celles des monastè- toutes les difficultés qu'ils rencontrent dans la
res; incompatibilité de dignités; présentations direction de leurs diocèses, juge les causes des
et nominations des évêques; confirmations ou églises et de leur juridiction, de leurs droits et
admissions des élections ou des postulations ; privilèges, ou bien apaise ces controverses par
députations des suffragants et des coadjuteurs des transactions amiables, ou d'office à la re-
avec future succession ou sans future succession; quête des parties. Elle agit de même dans les
âge et qualité des sujets qui doivent être pro- difficultés qui surgissent entre les chapitres et
mus, et autres matières se rapportant aux actes les seigneurs temporels. Elle est chargée de
que le pape remplit dans le consistoire. Après présenter au pape des visiteurs pour les églises
avoir discuté et examiné entre eux ces diverses qui en ont besoin, partout où la religion chré-
causes, les cardinaux de la congrégation en ré- tienne est en vigueur. Elle doit envoyer des vi-
fèrent au pape, qui, ensuite, à son gré ou selon caires apostoliques dans les diocèses quand l'é-
qu'ils ont décidé, propose les mêmes affaires vêque ne peut gérer, pour cause de maladie ou
dans le consistoire. autre.
s III. La S. Congrégationde la Visite Apostolique. La charge de la Congrégation des Réguliers
Le pape en a la direction. est d'examiner et de résoudre toutes les contro-
Elle est composéede 3 cardinaux, avecun arche- verses, causes et affaires des réguliers portées
vêque in partibus commesecrétaire. à Rome, par conséquent les controverses entre
Il y a 3 consulteursdont l'un est chancelier. les évêques et les réguliers, causes dont le pape
Commeofficiers,elle a un assesseur, un substitut, s'est réservé le jugement.
et un minutantequi est en mêmetemps archiviste. D'après la bulle lmmensa, la Congrégation
La juridiction de cette congrégation ne s'étend des Réguliers doit répondre aux controverses,
pas au delà de la ville? de Rome et de son dis- doutes et consultations de tous les instituts reli-
trict. De même que chaque évoque doit visiter gieux sans exception, donner les permissions
son diocèse, le pape est tenu, en sa qualité d'é- pour passer dans un ordre plus parfait et pré-
vêque de Rome, de visiter le sien et de s'oc- senter des religieux pour visiter les provinces
cuper d'une manière toute spéciale de ses inté- des différents ordres.
rêts spirituels. La sollicitude de toutes les Egli- Les affaires contentieuses de la Congrégation
ses absorbant entièrement son temps, il s'est des Evêques et Réguliers y sont le plus souvent
déchargé de l'accomplissement de ce devoir portées par voie d'appel des décrets ou senten-
spécial sur cette congrégation qui fut instituée ces des Ordinaires des lieux. Les plus impor-
le 8 juin 1592,par Clément VIII. tantes sont, avec ces appels, les causes matrimo-
niales et celles qui se rapportent à la profession
§ IV. La Sacrée Congrégation des Evêques et
Réguliers. religieuse.
Les affaires ordinaires non contentieuses sont
Composéede 31cardinaux dont l'un est préfetet un la
autre sous-préfet. députation des visiteurs ou commissaires
Le secrétaire est un évêquein partibus, avecun apostoliques dans les diocèses ; la nomination
prélat romaincommesous-secrétaire, de vicaires apostoliques administrateurs dans les
Il y a 23 consulteurs, dont 13 religieux. diocèses dont les évêques sont impotents ; les
Les officiers comprennent: un auditeur, un juge nominations des vicaires apostoliques pour dé-
rapporteur, un sommistè,trois minutantidontl'un est faut d'élection de vicaires capitulaires ; les ven-
archiviste,un protocolisteet un caissier. tes, permutations et hypothèques de biens ap-
Cette Congrégation est la réunion de deux partenant à des églises, ou à des établissements
congrégations : celle des évêques et celle des pies ; les approbations des ordres religieux, de
Réguliers, créées à deux époques différentes. La leurs règles et de leurs constitutions, etc.
connexion qui se rencontrait souvent dans les Les [affaires consultatives sont nombreuses,
affaires des deux congrégations lésa fait réunir. par exemple : doute sur la validité d'une érec-
La congrégation des évêques a été créée par tion de monastère non érigé selon toutes les
Grégoire XIIIet celle des Réguliers par la bulle règles canoniques ; validité des voeux prononcés
lmmensade son successeur, Sixte V. dans un institut non approuvé par le Saint-
La première, qui ne doit pas s'immiscer dans Siège ; admission des novices, etc ; valeur des
les choses qui appartiennent à celle du concile, privilèges, etc., etc.
a été fondée pour résoudre les doutes et les con- En matière criminelle., la Congrégation des
troverses des évêques basées principalement sur Evêques et Réguliers a de tout temps statué sur
les questions de fait. Elle correspond avec les les appels des réguliers et des clercs, ainsi que
évêques relativement à tous le# doutes et à pour les délits purement ecclésiastiques des se-
CONGRÉGATIONS ROMAINES 541
culiers. C'est elle qui transmet aux Ordinaires les décrets, le pape S. Pie V lui donna l'autori-
des lieux les instructions sur la marche régu- sation de décider sans autre délégation les cas
lière des procès criminels. Depuis la constitu- que la Congrégation estimerait clairs, sauf à en
tion Post diuturnas de Pie VII, en date du 30 oc- référer au Souverain Pontife pour tous les cas
tobre 1800,il n'y a plus, de recours des procès où il lui semblerait qu'il y a doute. Sixte V
criminels qu'à la Congrégation des Evêques et donna à la Congrégation le pouvoir ordinaire
Réguliers. d'interpréter et de faire exécuter les décrets dis-
Cette Congrégation ne juge pas en première ciplinaires du Concile, réservant pour le Souve-
instance. rain Pontife l'interprétation des canons et des
Dans les pouvoirs accordés par les papes à chapitres dogmatiques.
cette Congrégation, il y a toujours la clause : Le concile de Trente ne s'est pas borné, comme
sont exceptéesles causes qui concernentl'interpréta- ceux qui l'ont précédé, à statuer sur quelques
tion du Concilede Trente. points de discipline, mais il les a touchés tous,
en rappelant les prescriptions des Souverains
§ V. La Sacrée Congrégation du Concile.
Pontifes et des anciens canons, y ajoutant ses
Composée de 25cardinaux dont l'un est préfet.
Un archevêqueinpartibusest secrétaire.avecun pré- propres décisions.
lat romain pour sous-secrétaire. En conséquence, la S. Congrégation a en
Uneconsulteprêlatice a été ajoutéeprovisoirement quelque sorte la mission ordinaire d'éclaircir tous
à la Congrégation,non seulement pour les affaires les doutes se rapportant à la discipline ecclé-
généralesqui y sont traitées, mais aussi pour aider siastique. C'est comme la cour de cassation de
les prélats qui, dans cette Congrégation, s'occupent l'Eglise catholique. Elle juge tout appel des
des rapports des Ordinaires sur l'état de leurs Egli- tribunaux diocésains fondé sur le doute de sa
ses. — Les prélats qui s'occupent do ces Rapports voir s'ils ont bien entendu et appliqué la loi ca-
sont au nombrede onze, auxquels on a adjoint un
rédacteur des réponses que fait la S. Congrégation nonique.
aux évêques. Les causes contentieuses sont très fréquentes
Près de cette même S. Congrégation, se trouve à la S. Congrégation du Concile; elles sont trai-
aussi une Congrégation spéciale de la révision tées selon les règlements publiés en 1593, sous
des conciles provinciaux, composée du cardinal- Innocent XII, en 1731, sous Clément XII, et en
préfet de la S. Congrégationdu Concile et de cinq 1847, sous Pie IX. Elles concernent, le plus sou-
autrescardinaux. vent, les appels des décrets ou sentences des
La S. Congrégationdu Concile a 22 consulteurs, Ordinaires.
dont 12religieux, un archiviste, deux minutantiet un
Les causes non contentieuses sont aussi com-
protocoliste. induits et les dispenses
Cette Congrégation, interprète du Concile de munes, car, outre les
établie le Aliasnon- sur les décrets du Concile de Trente, elle a
Trente, fut par motu-proprio l'examen des relations de statu Ecclesix que
nullus de Pie IV, en date du 10 août loôi.
transmettent les évêques conformément aux
Elle n'était d'abord composée que de 8 cardi-
constitutions de Benoit XIV et de Sixte V, ainsi
naux et n'avait comme but que de faire exé- la révision des conciles provinciaux, comme
cuter et observer partout les ordonnances du que
nous l'avons dit.
concile de Trente, sans faculté de l'interpréter; Les affaires consultatives sont innombrables,
elle devait en référer au Souverain Pontife pour cette Congrégation doit résoudre tous
tous les doutes qui se présenteraient sur le sens puisque doutes concernant la discipline du concile
des décrets. Par la bulle BenedictusDeus, rendue les
de le de Trente, à l'exclusion de toutes les autres
pour la confirmation du concile Trente,
Congrégations.
pape défendait à tout le monde d'éditer des Si les autres Congrégations se trouvent en
commentaires, gloses, annotations, scholies sur
les décrets du Concile, réservant aux Souverains présence d'un doute déjà résolu par la Congré-
Pontifes seuls l'interprétation de ces décrets. Il gation du Concile, elles s'appuient sur la solu-
lui re-
voulait par cette défense éviter les gloses dont tion donnée. Autrement, elles doivent
les décrétales sont accompagnées et établir l'u- mettre la cause.
niformité de la discipline, unité que les inter- § VI. La Sacrée Congrégation de la résidence des
prétations diverses des tribunaux inférieurs Evêques.
auraient bien vite altérée. Composéedu cardinalvicaire de Sa Sainteté.
Mais, comme il était bien difficile à la Con- Lesecrétairede la S. Congrégationdu Concile est
grégation de donner des décisions sans expli- en même temps secrétairede la Congrégationde la
cations sur le sens dans lequel il fallait entendre Résidencedes Evêques.
542 CONGRÉGATIONS ROMAINES
Cette Congrégation a été établie par Ur- Les officiersou employéssont : 4 minutanli,et un
bain VIII pour veiller à ce que les évêques fas- archiviste.
sent, aux termes des sacrés canons et des pro- unPour le temporel, il y a un chef d'administration,
messes de leur sacre, leur résidence dans leur consultant légal, un procureur légal, un compta-
diocèse et leur ville épiscopale. ble, un minutante,un archiviste, un architecte,et un
directeur de l'Imprimeriepolyglotte.
§ VII. La Sacrée Congrég. sur l'État des Réguliers. On a adjointprovisoirementà laS. Congrégationune
Le SouverainPontife s'est réservé la présidence consulteprélatice qui aide aussi la S. Congrégation
de la Congrégation. du Rite Oriental.
Elle n'est composéeque d'un cardinal. « La première réunion de la Congrégation de
Le secrétairede la S. Congrégationdes Évêques et la Propagande eut lieu en 1597,sous Clément VIII.
Réguliersest en même temps secrétaire de cellede Cependant, elle ne fut complètement or-
l'État des Réguliers. ganisée que le 22 juin 1622, par la bulle Inscru-
Etablie en 1847, par le pape Pie IX, cette tabili de Grégoire XV, spécialement pour pro-
[Congrégation a pour but de proposer au Sou- pager la foi dans les pays infidèles ou occupés
verain Pontife les moyens de maintenir l'ob- par les hérétiques.
servance des constitutions dans les ordres reli- « La constitution Cuminter multipliéesordonne
gieux. de faire gratuitement toutes les expéditions
§ VIII. La Sacrée Congrégation de l'Immunité ec- quelles qu'elles soient, pour les pays de mission
et soumet à sa juridiction tous les collèges éta-
clésiastique. blis ou à établir dans les contrées qu'elle évan-
Composéede 7 cardinaux, dont l'un préfet.
Le secrétaireest le même que celui de la Congré- gélise. « Ses attributions consistent à envoyer les
gation du Concile. missionnaires dans les divers pays qu'ils doi-
Il y a 4 consulteurs.
Provisoirement,cette Congrégationest unie à celle vent évangéliser. Elle nomme les évêques des
du Concile. missions et les vicaires apostoliques. Elle a la
et temporelle des missions
On peut voir au mot Immunité ce qu'on en- gestion spirituelle
dont elle règle aussi les affaires contentieuses.
tend par les immunités.
Elle est le juge ordinaire des controverses qui
Les matières des immunités étaient autrefois s'élèvent entre les missionnaires, les religieux
du ressort de la Congrégation des évêques éta- missionnaires de divers les supérieurs
blie par Sixte V. Par la bulle Inscrutabili di- de ces mêmes ordres et leordres,
vinx Providentiae,en date du 22 juin 1622,Urbain clergé indigène. Elle
résout également les doutes qui lui sont soumis.
VIII fonda une congrégation spéciale qu'il dé- « La congrégation générale se tient une fois
nomma Congrégationde l'Immunité.
mois, le lundi. Elle ne s'assemble devant
« Cette Congrégation, dit Mgr Barbier de Mon- par le pape que pour délibérer sur les affaires les
tault, a pour missiisn detraiter les affaires concer- plus graves.
nant la juridiction apostolique et les obstacles « Chaque semaine, il se tient un congrès au-
que son libre exercice peut rencontrer. Elle veille quel assistent seulement le cardinal-préfet, le
à la défense de l'immunité locale, personnelle et secrétaire et les *. »
employés
réelle, protège la juridiction des tribunaux ec-
X. La Sacrée Congrégation de la Propagande pour
clésiastiques contre l'envahissement des laïques §
et des juges séculiers, et décide en cas de conflit. les affaires du Rite Oriental.
Elle s'attache à conserver intacts les droits et Composéede 19cardinauxdont l'un est préfet.
Un prélat romain est secrétaire.
privilèges de l'Eglise, et prescrit aux Ordinaires
des règles de conduite pour les cas de contesta- et 11 y a 26consulteurs, dont 9 religieux; 4 minutanli,
5 interprètes.
tion avec la puissance temporelle. Enfin, elle a Près de cette Congrégationsetrouve: leruneCommis-
été constituée tribunal d'appel pour toutes les sionpour la révisionet correctiondes livresde l'Eglise
questions d'immunité*. » orientale, dont la direction est confiéeà deux cardi-
§ IX. La Sacrée Congrégation de la Propagande. naux.
2°L'Administrationdela chambredesdépouilles,com-
Composéede 29cardinaux, dont l'un est préfet, et
un autre, préfet de l'Économie. poséed'un cardinal-président, d'un secrétaire, d'un
Le secrétaireest un archevêquein partibus,avec un computiste, d'un consultant légal, d'un procureur
substitut et un protonotaireapostolique. légal et d'un collecteur.
Il y a 37 consulteurs,dont 17religieux. Celte Congrégation remonte à Urbain VIII.
I. PréfacedelaCollection
de»Décrets dela Congr. Elle n'avait alors pour attribution spéciale que
authentiques
del'Immunité, 1. BarbierdoMontault,Semainedu Clergé,t. XI,page327.
CONGRÉGATIONS ROMAINES 543
la correction des livres du rite oriental. Cepen- tions de Clément VIII et de Benoît XIV, que
dant elle ne fut régulièrement organisée que nous ferons connaître au mot Index.
sous Benoît XIV. Pie IX l'a réorganisée en 4862, La Congrégation de l'Inquisition,(ou du Saint-
en étendant le cercle de ses attributions à toutes Office) s'occupe aussi des mauvais livres, mais à
les affaires d'Orient. l'occasion des questions de foi, d'apostasie et
d'autres cas passibles d'une peine.
§ XI. La Sacrée Congrégation de l'Index.
§ XII. La Sacrée Congrégation des Rites.
Composée de 26 cardinaux, dont l'un est préfet.
Le religieux dominicain, maître du S. Palais Composéede 36 cardinaux,dont l'un est préfet.
Le Sacriste du le Doyende la Rote avec deux
Apostolique,en est assistantperpétuel,et un autre re- des auditeurs, le Pape, Maîtredu saint Palais, le Promoteur
ligieuxdominicainen est toujours secrétaire. de la Foi avec son Substitut aident aux travaux de la
Il y a 35 consulteurs, dont 17 religieux.
Commeofficiersou attachés, elle a 5 rapporteurs S. Congrégationdes Rites.
dont l'un est le minutanteet archiviste. Par dispositionprovisoire, les auditeurs composant
le S. Tribunal de la Rote sont appelés, réunis en
Le but de cette Congrégation est la correction, corps, à étudier et à décidersur des matières spécia-
ou la censure et la réprobation des livres con- leset déterminéesque la S. Congrégationleur soumet.
traires à la foi, à la morale et à la discipline. Les Maîtres des cérémonies pontificales prennent
Elle a une ample juridiction sur les personnes part aux travaux de cette Congrégation.Ce sont eux
des ordinaires, des écrivains et des libraires, et que l'on consulte d'ordinaire pour tout ce qui a trait
elle peut procéder aux censures contre les ré- à la liturgie, et leur mémoireest imprimé sous le nom
fraetaires. de votum.
Elle établit un catalogue de tous les livres Un prélat romain est secrétaire.
La S. Congrégationa 21 consulteurs,dont 15 reli-
condamnés.
Le pape Gelase I" (492-96)avait déjà, dans un gieux. Commeattachés, ellea un hymnographe,chargé de
concile romain, dressé une liste des livres que, composerdes hymnes nouvelles, et de réviser celles
suivant son expression, les catholiques devaient qui sont soumisespour être approuvées; un substitut,
éviter'. Grégoire IX et d'autres papes suivi- deux minutanli, deux scribes, ainsi qu'un notaire-
rent cet exemple 2. chancelier-archiviste pour l'enregistrementdesactes,
Le concile de Trente avait nommé une com- leur expéditionet leur conservation.
mission de 18 Pères chargés de dresser un In- Le Lut assigné à la S. Congrégation des
dex des livres prohibés, avec pouvoir de s'ad- Rites, la nature et l'étendue de ses pouvoirs,
joindre des théologiens. Tous les Pères d'ailleurs sont nettement définis dans la bulle lmmensa, du
étaient autorisés à contribuer au travail de la 23 janvier 1587, par laquelle le pape Sixte V
commission. constitua ce tribunal. En voici le passage prin-
Le secrétaire de cette commission, Forrerius, cipal : « Les rites sacrés et les cérémonies dont
nous dit ' que les Pères conclurent qu'il n'y l'Eglise, instruite par l'Esprit saint, fait usage,
avait rien de mieux à faire que d'adopter le en suivant la tradition et la discipline apostoli-
catalogue romain fait quelque temps aupara- que, dans l'administration des sacrements, dans
vant par les Inquisiteurs de Rome, en l'augmen- les divins offices et dans tout le culte do Dieu
tant un peu ou en le diminuant. Mais, quoique et des saints, contiennent un enseignement élevé
le travail de la commission du Concile fût ter- pour le peuple de Dieu, renferment une profes-
miné, vu que le concile n'avait pas le temps de sion de la vraie foi, expriment la mnjesté des
le juger en détail, il fut arrêté, dans la XXVeet choses saintes, élèvent l'esprit des fidèles à la
dernière session, qu'on le remettrait au Souve- méditation des mystères de la religion, et allu-
rain Pontife,afin que, selon son jugement et par ment en eux le feu de la dévotion. C'est pour-
son autorité, il fût définitivement achevé et pu- quoi, voulant développer de plus en plus la
blié. piété des enfants de l'Eglise et relever le culle
Le pape Pie IV le fit, en effet, terminer et il divin, en rétablissant les rites sacrés et les cé-
parut sous le titre d'Index du Concilede Trente. rémonies, nous avons choisi cinq cardinaux,
Le successeur de Pie IV, saint Pie V, institua qui devront s'occuper principalement de faire
la sainte Congrégation de l'Index en 1571. observer avec exactitude les Rites sacrés que
Cetts congrégation doit maintenant établir nous tenons de l'antiquité, en tous lieux, dans
ses jugements d'après les règles de la commis- toutes les églises de la ville et de l'univers,
sion du concile de Trente, les Observations de même dans notre chapelle pontificale, dans la
Clément VIII et d'Alexandre III, les Institu- célébration de la messe, dans les offices divins,
1. Can.111,dist.xv. —2. Zallwein, Princip.Jur. univ.t. i, dans l'administration des sacrements, et géné-
p. 4, e.2. 8 5. —3. Préfacedel'Index. ' ralement dans tout ce qui appartient au culte
544 CONGRÉGATIONS ROMAINES
de Dieu, afin que les cérémonies soient rétablies nial des représentants des puissances près le
là où elles sont tombées en désuétude, et réfor- Saint-Siège et des souverains, quand ils vien-
mées si elles ont été altérées. Tout d'abord, ils nent visiter le Pape, etc.
réformeront et corrigeront, en tant que besoin § XIV. La Sacrée Congrégation de la Discipline
sera-,.le Pontifical, le Rituel et le Cérémonial; Régulière.
ils réviseront les offices des saints Patrons et Composéede 10 cardinaux, dont un préfet et un
les concéderont, après nous avoir préalablement autre sous-préfet.
consulté. Ils étudieront avec le plus grand soin Le secrétaire de la S. Congrégation des Evê-
les questions relatives à la canonisation des ques et Réguliers est en même temps secrétairede
saints et à la célébration des fêtes, afin que celledela Disciplinerégulière.
tout se fasse selon les règles, avec ordre et con- Instituée par Innocent X, en 1649, et régle-
formément à la tradition des Pères, etc. Ils mentée plus tard par Clément IX et Inno-
connaîtront des contestations sur les préséan- cent XII, cette Congrégation a pour charge de
ces et de toutes les difficultés qui surgiront veiller à l'exacte observation des règles et cons-
touchant les Rites sacrés et les cérémonies ; ils titutions des Ordres religieux.
les décideront sommairement et y mettront § XV. La Sacrée Congrégationdes Indulgences et
fin... des saintes Reliques.
Donc, tout ce qui est relatif aux saints rites, Composéede 31 cardinaux,dont l'un est préfet.
c'est-à-dire à la célébration de la messe, à l'ad- Le secrétaireest un évêquein partibus.
ministration des sacrements, aux offices di- Il y a 20 consulteurs,dont 11 religienx.
vins, tout ce qui concerne la correction et la Commeattachés : un substitut, un minutantearchi-
pureté des livres liturgiques : le missel, le bré- viste et un scribe.
viaire, le rituel, le pontifical, le cérémonial et Cette Congrégation fut fondée par le bref In
le martyrologe, l'approbation des offices pro- ipsis pontificatusde Clément IX, en date du 6 juil-
pres, des hymnes, et autres prières spéciales, let 1669.Ce pape avait d'abord formé une com-
telles que celles que le pape enrichit d'indul- mission de cardinaux et de prélats dont il pre-
gences, ce qui regarde la béatification et la ca- nait l'avis pour les choses concernant les indul-
nonisation des saints, tout cela est du ressort gences et les reliques. La commission ayant ré-
de la S. Congrégation des Rites. pondu à son attente, il l'institua comme Con-
« Au point de vue pratique, c'est à la S. Con- grégation stable et permanente, et lui donna le
grégation des Rites qu'il faut s'adresser pour pouvoir ordinaire de résoudre toute difficulté
les induits dérogatoires aux règles générales, et doute qui s'élèveraient relativement aux reli-
comme l'anticipation des matines ou de la ques des saints et aux indulgences ; de corriger
messe, la célébration des messes votives, les bé- les abus ; de prohiber la publication des indul-
nédictions particulières , la réserve eucharisti- gences fausses et apocryphes; de reconnaître les
que, etc. reliques nouvellement découvertes, et de veiller
Chacun des décrets de cette Congrégation est pour que, dans la concession des indulgences et
porté en assemblée générale, après que lecture la distribution des reliques, tout se passât
des rapports des consulteurs a été faite. Il est pieusement et saintement. Le bref exprime dans
ensuite soumis, soit par le préfet, soit par les termes les plus expressifs la juridiction per-
le secrétaire, en audience, au Pape qui l'ap- manente et ordinaire de la Congrégation, dans
prouve, le rejette ou le modifie à son gré '. les limites de ses attributions spéciales. Clé-
§ XII. La Sacrée Congrégation du Cérémonial. ment IX se réserva toutefois la solution des
Composéede 19 cardinaux, dont le Doyen du Sacré doutes dogmatiques, pour lesquels la Congréga-
Collègecommepréfet. tion doit en référer au Souverain Pontife,ainsi que
Un prélat romain est secrétaire. Les maîtres des dans les difficultés plus sérieuses et plus graves.
Cérémoniespontificalesen sont les consulteurs. Il prescrit à la Congrégation de procéder à la
Cette Congrégation a été établie par Gré- correction des abus, judicii forma plane postpo-
goire XIII, en 1572. Elle règle les cérémonies sita, avec un pouvoir qui est l'autorité même du
des chapelles papales, résout les doutes de pré- Pape: falsas,apocryphas,indiscretasqueindulgentias
séance et de formalités entre les cardinaux, les etc., nostra seu illius auctoritate rejiciendi. D'après
prélats, etc. prescrit les règles d'étiquette qu'ils les prescriptions de Pie IX, la Congrégation doit
doivent observer dans leurs costume, leurs vi- réviser les catalogues et sommaires d'in-
sites, leurs armoiries. Elle s'occupe du cérémo- dulgences, ainsi que souscrire, sous peine de
suivies,voirBenoitXIVDt nullité les concessions faites par voie de bulles,
1. Pourlesrèglesde procédure
etle Codex
Dcatificatione, propostul,caus,BeattKome1879, , de brefs et de rescrits.
CONGRÉGATIONS ROMAINES 545
Comme recueils authentiques des décrets de cette « 2° D'approprier à la Fabrique ùa Saint-
Congrégation, nous citerons les Décréta authentica Pierre les legs pieux incertains, ou laissés à des
S. C. Indulgentiis,etc., publiées à Ratisbonne en personnes non suffisamment déterminées, inca-
1883,les Prascripta authentica du P. Schneider, con- pables, etc.
, sulteur de la dite Congrégation, et la Raccoltadont « 3° De conserver la basilique de Saint-Pierre
I nous avons parlé S IV du mot Chapelet en état de décence, de s'occuper de l'adminis-
§ XVL La Sacrée Congrégation de l'Examen des tration de ses biens et du nombreux personnel
Evêques. qui lui est attaché ;
« 4° De modifier, en certains cas, les derniè-
Composéede deux cardinaux pour la théologieet de
deux autres pour le droit canon. res volontés des fondateurs.
Mgr le Patriarche d'Antioche et le père dominicain « De plus, Mgr l'économe reçoit ordinaire-
maître du S. Palais sont adjoints pour la théolo- ment de chaque nouveau pontife les facultés
gie et l'Auditeurde Sa Sainteté pour le droit canon. suivantes, que les Ordinaires des lieux sont
Cette Congrégation a été instituée par suite chargés de mettre à exécution dans leurs diocè-
de la constitution Onus aposlolicsesercitis de Gré- ses respectifs :
goire XIV, en date du 15 mai 1591, qui prescrit « 1° Il réduit, pour un temps, les messes éven-
les formes des enquêtes ou examens qu'on doit tuelles des chapellenies et des legs pieux, soit
faire, tant sous la doctrine que sous la conduite temporaires, soit perpétuels.
des candidats aux évêchés. « 2° Il change temporairement les jours, les
La S. Congrégation de l'Examen est une heures et les autels indiqués dans les testaments
annexe de la S. Congrégation consistoriale et fondations pieuses.
dont elle éclaire le jugement. « 3° Il transfère, pour un temps, d'une église
Elle se compose d'un nombre plus ou moins à une autre les obligations perpétuelles et tem-
grand de cardinaux, au gré du pape, et de quel- poraires de messes avec la clause ordinaire :
ques prélats et religieux, professeurs de droit Accedenteconsensu quorum iuterest et dummodopo-
canonique et de théologie qui portent le titre puli commoditatinon officiât.
d'examinateurs. Le Maître du S. Palais semble « 4° 11 proroge lesdiles réductions ou transla-
être le seul qui soit fixe. tions de messes avec la clause uccoutumée :
Cet examen est pour les évêchés qui sont à la lisdem perdurantibus cireumstantiis, et servata forma
libre collation du pape. Les autres, c'est-à-dire pi'imseconcessionis.
ceux qui ont l'élection canonique ou quelque « 5° Il permet la permutation des fonds,
induit apostolique accordant la nomination au pourvu que l'égalité de leur valeur soit consta-
pouvoir civil, conservent l'enquête, ou les in- tée.
formations canoniques que prescrit le concile « 6° Il donne les facultés de faire célébrer les
de Trente et pour lesquelles on a l'instruction messes per alium.
publiée par ordre d'Urbain VIII. « 7° 11 permet de différer, pour un temps qui
ne soit pas trop long, la célébration des messes
§ XVII. La Sacrée Congrégation de la Révérende éventuelles et des messes provenant de legs
Fabrique de S. Pierre.
soit temporaires, soit perpétuels.
Composéede 8 cardinaux. Le Préfet est le cardinal pieux,« 8° Il réduit à perpétuité le nombre des mes-
archiprètre delà basilique de Saint-Pierre.
Le secrétaire est un prélat romain. Il est en même ses, afin d'en mettre les honoraires en harmonie
temps économeet président de l'étude de mosaïque. avec la taxe synodale.
Commeattachés: un substitut, 2 minutanli, un con- « 9° II transfère à perpétuité la célébration
sulteur légal, 2 procureurs, un facteur général, un as- des messes à une autre église et à un autre au-
sistant et gardien des munitions. tel, quand l'église et l'autel désignés dans les
Cette congrégation fut fondée en 1592, par fondations n'existent plus.
Clément XII. Mgr. Barbier de Montault nous « Quant aux autres facultés dont peut avoir
indique ainsi ses attributions '. besoin Mgr l'économe, il les demande au Saint-
« La Congrégation de la Révérende Fabrique Père, quand il va à l'audience, le samedi de
de Saint-Pierre a dans ses attributions : chaque semaine. »
« 1° De surveiller l'exécution des legs pies,
dans l'Etat pontifical ; et c'est pour cette raison §XVIII. La Sacrée Congrégation de Lorette.
que les notaires qui y font des actes de cette na- Composéede 9 cardinaux dont l'un est préfet.
Le secrétaire est un prélat romain.
ture, doivent, sous peine d'amende, lui en don- Commeofficiers: un consultant et un archiviste.
ner connaissance, dans l'espace d'un mois;
, 1.Semaine du Clergé,tain.XIIIp. 199. Cette Congrégation a été instituée le 9 août
I. U5
510 CONGRÉGATIONS ROMAINES
1698,par Innocent XII, pour s'occuper de tout est in his, quae scribuntur a Cardinalibus sacras
ce qui concerne le sanctuaire de Lorette renfer- congregationis concilii Tridentininomine ipsius
mant la maison habitée par la Sainte Famille à congregationis, ac si a Papa scripta essent, etc. »
Nazareth, miraculeusement transportée par les Cela s'applique à toutes les congrégations de
anges à Lorette, en 1295-. cardinaux.
Affaires extra- Les congrégations traitent les causes et les
§ XIX. La Sacrée Congrégation des
affaires réservées au Souverain Pontife ; par
ordinaires.
de 20 cardinaux. conséquent dans les décrets qu'elles rendent,
Composée dans les décisions interprétatives qui émanent
Le secrétaireest un prélat romain.
Il y a 16consulteurs. d'elles, dans les ordres qu'elles donnent, c'est
Officiers on attachés un sous-secrétaire,2 minu- l'autorité du pape qu'elles exercent ; car, toutes
tanli et trois autres employés. les fois que le pape confère à quelqu'un une fa-
La révolution française ayant bouleversé de culté, un pouvoir qu'il n'avait pas précédem-
l'autorité apostolique qu'il commu-
fond en comble l'ancien état de choses, Pie VII ment, c'est
: « Quotiescumque Papa tribuit aliquam
établit, en 1814, cette Congrégation pour s'occu- nique
des intérêts dans tout ce facultatem alteri qui eam prius non habebat,
per grands catholiques
concerne les ou in- tune auctoritas illa intelligetur esse apostolica. »
qui questions diplomatiques dit Fagnan 1 qui cite en preuve plusieurs textes
ternationales.
du droit canonique.
§ XX. La Sacrée Congrégation des Etudes. Il est évident, en effet, que, source et cause
Composéede 23 cardinaux dont l'un est préfet. des SS. Congrégations, le pape doit aussi être
Le secrétaire est un prélat romain. causa causati, la source et la cause des résolu-
II y a 8 consulteurs. tions qui émanent d'elles. C'est pourquoi les
Officiers ou attachés : un pro-substitut, un minu- SS. Congrégations ont coutume de mentionner
tante, un archiviste,et un computiste. dans leurs décrets l'autorité apostolique dont
Cette Congrégation a été instituée en 1587, elles sont revêtues,ainsi celle du Saint-Office s'in-
par Sixte V, pour s'occuper de l'instruction pu- titule: «Congrégation des Emes. Cardinaux ins-
blique dans la ville de Rome. titués inquisiteurs généraux par autorité apos-
Elle surveille les études dans les séminaires tolique dans toute la république chrétienne,
et les écoles ecclésiastiques. Depuis quelques etc;» celle de l'Index se dit « préposée par auto-
années, on soumet à cette Congrégation l'exa- rité apostolique à l'examen, la permission, la
men des livres classiques. correction et la prohibition des livres dans l'E-
A cette Congrégation se rattache'.: glise iuniverselle; » celle du Concile s'intitule :
La Commission cardinalice pour les études histo- « Interprète du concile de Trente par autorité
riques. du Pape, » ou « par autorité apostolique. » Donc
les décrets, les résolutions, les interprétations,
Composéede 5 cardinaux.
Il y a 9 consulteursdont l'un est secrétaire. les sentences, les jugements, les décisions, les
Cette Commission a été instituée par la let- mandats, les prescriptions et les ordres émanées
doivent être attribués au
tre de SS. Léon XIII, au cardinal Pitra, en date des SS. Congrégations
du 18 août 1883. Elle a été fondée pour l'avan- Souverain Pontife dont elles exercent la suprême
cement de l'étude de l'histoire de l'Eglise. Elle autorité dans les limites de leurs attributions.
doit préparer de grandes publications avec do- On admettra facilement cette conclusion, si on
cuments authentiques pour servir de sources à se rappelle ce que nous avons dit à la note du
ceux qui voudront vulgariser l'histoire ecclé- § I, en parlant du secrétariat des congrégations.
Nous avons dit que le secrétaire réfère au pape
siastique.
toutes les décisions des congrégations. Rien ne
§ XXI.Autorité des Congrégations. se fait donc à son insu et les décisions ne sont
Le Siège Apostolique, dit Benoit XIV », rend expédiées qu'après la référence au pape. Il exa-
ses sentences par l'organe des congrégations: mine plus particulièrement, après examen des
« Quarum (congregationum t voce suas Sedes congrégations, les causes qu'il s'est réservées ;
apostolica déclarât sententias. » Garcias cite une mais de ce que les congrégations décident do
lettre de la S. Congrégation du concile, dans certaines causes qui sont plus communes, en
laquelle il est dit qu'on doit faire le même cas vertu de leurs facultés ordinaires, il ne faut pas
de ce que cette congrégation écrit que si le pape conclure que leurs décisions ne sont pas d'auto-
l'avait écrit lui-même : « Eadem ratio habenda rité apostolique. La référence seule suffirait
1 Institut.76,n.8. 1. CaputQuoniam,de Constitutionibus.
CONGRÉGATIONS ROMAINES 517
pour la leur donner, si elles ne l'avaient pas « Il est difficile de prévoir d'avance toutes les
déjà. Les tribunaux civils jugent au nom de difficultés qui pourront être soulevées contre le
l'empereur, du roi, ou de l'autorité supérieure de texte qui paraît le plus clair. Il semblait que
la république, en vertu de leur faculté ordinaire, cette décision devait terminer la question. Ce-
et sans que ces autorités supérieures aient pendant deux nouveaux doutes se produisirent,
la moindre connaissance de leurs jugements, et il ne faut pas nous en plaindre, puisque les
et l'on ne considérerait pas comme émanées du solutions ne laissent plus place désormais à une
pape les décisions de ces tribunaux ayant des discussion raisonnable. On a remarqué que,
attributions bien définies, examinant soigneu- dans la consultation soumise à la Congrégation
sement toutes choses, jugeant en s'appuyant des Rites, il est parlé des réponses qui sont scri-
toujours sur les précédents et les règles des ca- pto formiter editae.On a demandé : 1° Ce qu'il faut
nons et en référant au souverain Pontife sur entendre par ces réponses et quels en sont les
toutes les questions douteuses ? caractères distinctifs ; 2° Si, pour devenir obli-
S'il y a des tribunaux qui offrent toute ga- gatoires, elles ont besoin d'être promulguées,
rantie, ce sont bien ceux-là : ils ont droit à tout soit à Rome spécialement, soit par les évêques
honneur,toute soumission et respect ,tant à cause dans leurs diocèses respectifs ; 3° Si elles doi-
des juges qui les composent qu'en vertu de l'au- vent être considérées comme publiées dans les
torité suprême qui les a établis, et tous les fidè- formes requises et tenues pour authentiques,
les sont tenus en conscience de se soumettre à par cela seul qu'elles sont insérées dans la col-
leurs décisions comme à des sentences papales. lection de Gardellini. Nous reproduisons tex-
M. l'abbé Ecalle, dans ses nombreux articles • tuellement la consultation et les réponses ?
liturgiques insérés dans la Semainedu Clergé,par- « ROMANA.—Quoesitum quum fuerit a sncra
lant de l'autorité de laS. Congrégation des rites, Rituum Congregatione ut declarare dignaretur
conclut ainsi : sequentia duo dubia, ut in universi catholici or
« Si ces raisons et ces faits ne suffisaient pas bis ecclesiis unisona sit ipsius sacroe Congrega-
pour établir l'autorité intrinsèque des actes de tionis decretorum et responsionum observnntin,
la Congrégation des Rites, le doute ne serait dubia ipsa in ordinariis comitiis ad Vaticanuni
plus permis aujourd'hui; car une décision sou- hodie coadunatis inter caetera per me subscrip-
veraine l'a définitivement écarté. La question tum Seeretarium relata fuerunt.
suivante fut posée à la Congrégation des Rites » 1° Quum in declaratione sacrorum Rituum
le 23 mai 1846, au nom de l'ordre des Domini- Congregationis, latadie 23 maii 1846, sancitum
cains: An décréta a sacra Congregationeémanâta fuerit, décréta et responsiones abipsa emanatas,
et responsionesquoecumque ab ipsa propositis dubiis dummodo scripto formiter editae fuerint, eam-
scripto formitereditse,eamdem habennt auctoritatem dem auctoritatem habere ac si immédiate ab ipso
ac si immédiateab ipso Summo Pontifice promana- Summo Pontifice promanarent, — quaeritur, an
rent, quamvis nulla facta fuerit de isdem relatio per verba dummodoformiter scripto editse fuerint
Sanctitati Sum? La Sacrée Congrégation répondit sufficiat quod sint subscriptae a sacrorum lii-
affirmative. tuum Congregationis prsefecto et secretario, ne
« On ne pourra pas alléguer que la Congréga- ejusdem sigillo munitse; seu potius requiratur
tion des Rites s'est constituée juge dans sa pro- ut sint vel Romse, vel ab episcopis in suis dioo-
pre cause, et qu'elle a pu céder à la tentation cessibus promulgatse ?
d'exagérer ses pouvoirs. Bien que, de fait, elle » 2° Et quatenus affirmative nd primam par-
se crût autorisée à résoudre seule ce doute, tem, négative ad secundam, — an tanquam for-
comme il s'agissait de déterminer le sens et la miter édita habenda sint décréta et responsio-
portée de la bulle à laquelle elle devait son exis- nes in Gardelliniana authentica collectione in-
tence, elle pensa avec raison que sa décision ne sertse ?
deviendrait inattaquable aux yeux dé ceux qui » Et sacra eadem Congregatio, post diligens
voulaient restreindre ses attributions, qu'autant omninm examen, respondere rata est :
qu'elle serait formellement approuvée et con- » Ad primum,affirmative ad primampartem,
firmée par l'autorité même du Souverain Pontife. négative ad secundam.
Aussi lisons-nous à la suite de cette réponse : » Ad secundum, affirmative, uti patet ex aa-
Et facta de praaemissisomnibussanctissimo Domino jecta declaratione.
nostro PioIX, Pontifia maximo,per eumdemsubscri- » 8 aprilis 1854. »
ptum seretarium fideli relatione Sanctitas Sua resnri- Done: 1° les décisions de la Congrégation dos
ptaa sacra Congregationein omnibuset singulisappro- Rites ont une valeur intrinsèque et sont obliga-
bavit confirmavitque. toires dans toute l'Eglise sans qu'il soit néces-
548 CONGRES
saire que le Souverain Pontife les approuve spé- par la référence des préfets et des secrétaires des
cialement et les confirme par son autorité apos- congrégations; les fidèles qui demandent justice
tolique; 2" il suffit pour cela qu'il n'y ait aucun ou quelques grâces, trouvent des tribunaux tout
doute sur leur authenticité, laquelle est cons- prêts, composés d'hommes savants et expéri-
tante lorsqu'elles portent la signature du préfet mentés qui examinent mûrement les causes par
et du secrétaire de la Congrégation, et sont mu- eux-mêmes et par des consulteurs d'une-grande
nies du sceau officiel ; 3° comme tout le monde science, puis en assemblée générale. La distri-
ne peut avoir sous les yeux les pièces revêtues bution des causes donne une procédure plus
de ces caractères extérieurs, tout décret, toute expéditive.
réponse qui se trouve dans la collection de Gar- Les choses de la foi sont traitées dans la Con-
dellini doit être tenu pour authentique, la col- grégation du S.-Office qui veille à sa pureté et
lection elle-même étant officielle et spécialement punit les crimes qui la blessent, dans celle de
approuvée par la Congrégation. » l'Index qui écarte les mauvais livres,et dans celle
Il en est de même pour toutes les autres con- de la Propagande qui travaille à étendre la foi
grégations. parmi tous les peuples du monde.
Les choses du culte divin appartiennent à la
§ XXII. Remarques.
congrégation des Rites, et celles de la discipline
I. Malgré toute l'attention apportée dans la aux congrégations du Concile, des Evêques et
distribution des causes et matières entre les Réguliers, etc.
congrégations, il était presque impossible d'em-
pêcher que certaines affaires ne ressortissentcu- CONGRÈS.
mulativement de plusieurs d'elles. Ce cumul se Le congrèsétait autrefois une manière de preuve
rencontre plus fréquemment dans les induits et honteuse dont l'usage s'était introduit au quin-
les grâces pontificales qu'elles expédient par au- zième siècle en France et qui dura environ cent
dience du pape. Il a été pourvu à cet inconvé- ans, disent les auteurs. Il fut aboli par un ar-
nient par le décret Ut occurratur d'Innocent XII rêt du parlement de Paris, du 18 février 1677.
qui défend de présenter frauduleusement à une Le parlement de Provence avait, ce semble, dé-
congrégation quelque supplique tendant à solli- fendu le congrès dès l'année 1640; par un arrêt
citer une grâce déjà refusée par l'organe d'une du 16 février, il prononça qu'il n'y avait point
autre congrégation, sous peine de nullité de la d'abus dans la sentence d'un officiai d'Arles,
concession. Au reste, les congrégations ont cou- qui l'avait refusé à une femme et qui l'avait
tume de s'abstenir de procéder à un acte quel- condamnée à la cohabitation triennale avec son
conque, dès qu'elles apprennent qu'une autre mari, contre qui elle avait porté sa plainte pour
congrégation s'en est occupée. cause d'impuissance.
Comme on a pu le remarquer, le secrétaire de Jamais aucune loi civile ou ecclésiastique n'a
la congrégation des Evêques et Réguliers est en autorisé l'usage du congrès. On enjoignait aux
même temps secrétaire des congrégations de parties de procéder à la consommation du ma-
l'Etat des Réguliers et de la Discipline régulière, riage dans le lieu préparé pour ce sujet. Les
et le secrétaire de la congrégation du Concile est époux étaient dans un lit bien fermé, des ma-
en même temps secrétaire des congrégations de trones étaient dans la chambre, et des médecins
la Résidence des Evêques et de l'Immunité. et chirurgiens étaient dans une chambre voisine.
Comme c'est le secrétaire qui reçoit et prépare M. de Lamoignon, avocat général, porta la parole
les causes,cette réunion de plusieurs secrétariats dans l'affaire du marquis de Langey, qui donna
obvie en partie à l'inconvénient ci-dessus. lieu au règlement du 18 février 1677.Il fit voir
II. Toutes les congrégations ont des causes que cette preuve infâme n'était fondée sur au-
spécialement réservées au Souverain Pontife. cun texte de droit; qu'elle était inutile, parce que
III. Les congrégations n'exécutent pas elles- la vue d'une femme qui pousse son mari à cette
mêmes leurs décisions. Ce sont les Ordinaires extrémité cause plutôt l'indignation que l'a-
qui les exécutent sur un rescrit, simple lettre mour, et parce qu'on ne peut rien conclure do
signée du préfet ou du secrétaire. ce qu'un homme ne fait pas paraître dans un
IV. Si l'on se rend compte du fonctionnement moment fixe une vigueur qui dépend d'une na-
des congrégations, on comprend immédiatement ture capricieuse et qui n'aime à se faire sentir
l'avantage qu'elles offrent. que dans la retraite. Il montra ensuite, par plu-
11est impossible que le pape expédie directe- sieurs exemples de personnes qui avaient été
ment cette multitude d'affaires. déclarées impuissantes après le congrès, et qui
Par les congrégations tout se fait de son aveu, avaient eu depuis des enfants, que l'expérience
CONSÉCRATION 540
s'accorde sur ce sujet avec le raisonnement. Le 1° L'huile d'olive mêlée de baume, qu'on ap-
marquis de Langey, dont il s'agissait alors, en pelle chrême.
fournissait une preuve. 2° L'huile des catéchumènes,qui n'est que d'o-
lives, et qu'on appelle les saintes huiles.
CONGRUE. 3° L'huile des infirmes, qu'on appelle aussi
lemot: Portioncongrue.)
{Voir dans l'usage les saintes huiles, mais qui est ap-
CONJURATION. pelée proprement, dans les livres ecclésiastiques,
l'huile des infirmes.
(Voirlemot: Conspiration.}
Le chrême, dont le chapitre I, de Sacra une-
CONSANGUINITÉ. tione, cap. Cumvenisset,§ Ad exhibendum,explique
La consanguinité se prenait chez les"Romains le sens mystique, est employé à l'onction des
pour l'agnation : « Est enim consanguinitas spe- baptisés, des confirmés, des évêques, des églises,
cies agnationis, id est fraternitatis. » (§ Vulgo des autels, des calices, des patènes et des fonts
Inst. de Success. agnat.) Mais ce terme signifie baptismaux. (Voir le chapitre Cumvenisset, sous
parmi nous toute sorte de parenté et de cogna- le mot : Chrême.)
tion, de même que dans les textes du droit L'huile des catéchumènes sert à oindre les
canon. baptisés en certaines parties du corps, les églises
L'article 165 du Code civil défend le mariage et les autels avant l'onction du saint chrême,
entre l'oncle et la nièce, la tante et le neveu ; les mains du prêtre qui est ordonné, les bras et
mais en comparant cet article avec les deux l'épaule des rois que l'on consacre.
précédents, on voit que le mariage n'est prohibé L'huile des infirmes est appliquée sur le ma-
qu'entre l'oncle et la nièce, la tante et le neveu lade à qui l'on administre le sacrement d'ex-
légitimes et consanguins, et non entre les mêmes trême-onction.
parents naturels ou simplement alliés. (Malle- L'évêque ne peut faire le saint chrême que le
ville, Toullier, Rogron.) Mais le magistrat civil jeudi de la semaine sainte, et doit le renouveler
n'a pas le droit d'apposer ni de supprimer des tous les ans : c'est là un devoir de précepte. (C.
empêchements dirimants. Si quis de alio chrismate; c. Omni tempore',J.G.,
Le droit canon va beaucoup plus loin que le disl. 4, de Consecrat.)
Code civil pour les empêchements de consan- Le chrême qui doit servir de matière au sa-
guinité et d'affinité. En ligne collatérale, l'empê- crement de confirmation ne peut être fait que
chement deconsanguinité s'étend au quatrième par l'évêque même, non aulema simplicisacerdote.
degré inclusivement, tant pour les naturels que C'est la raison pour laquelle les papes, en com-
pour les parents légitimes. Quant à l'affinité, ou mettant des prêtres pour administrer le sacre-
elle provient du mariage, ou d'un commerce ment de confirmation, les soumettent toujours
criminel; dans le premier cas, elle produit un à l'obligation de se servir du saint chrême con-
empêchement dirimant jusqu'au quatrième de- sacré par les évoques : « Nemo est, dit Re-
gré inclusivement; dans le second cas, elle ne noît XIV, en l'endroit cité, sous le mot : Confir-
s'étend qu'au second degré. mation, qui dubitet chrismatis benedictionem
VoirlesmotsI Affinité,
Degré,
Agnation,Empêchement. commemoratam semper fuisse inter propria et
CONSANGUINS. praecipua episcopalis ordinis munera. »
On appelle frères consanguinsceux qui sont nés Quelques auteurs ont avancé que le pape pou-
d'un même père, et non d'une même mère; ceux vait commettre à un prêtre la confection du saint
servir de matière au sacrement de
qui sont nés d'une même mère, et non d'un chrême pour
même père, sont appelés frères utérins. confirmation : la raison qu'ils donnent est que
la forme de cette consécration a été laissée à la
CONSÉCRATION. disposition de l'Église, et que ce n'est que par
La consécrationest la cérémonie qui rend une les canons que les évêques ont reçu le pouvoir
chose ou une personne sacrée. C'est en ce sens exclusif de la faire. Les paroles de Renoît XIV,
de rapporter, et l'usage géné-
que l'on dit la consécration des saintes huiles,' que nous venons
d'un autel , d'un calice , d'une église , d'un' ral de l'Église, prouvent combien cette opinion
test extraordinaire.
èvêque.
I. Consécrationdes Quand un évoque a deux diocèses à gouver-
§ saintes huiles.
ner, il doit faire le saint chrême alternative-
Pour comprendre ce que c'est que la consô ment dans l'un et dans l'autre. (C. Te referente,
cration, des saintes huiles, il faut savoir qu'op de Celébr.miss., et ibi doct.)
distingue trois sortes de saintes huiles : L'huile des catéehumènesesl o nployée,comme
550 CONSÉCRATION
nous avons dit, à oindre la poitrine et les épaules chrême ne peut s'y faire qu'à huis clos : « Ja-
des baptisés, les mains des prêtres qui sont nuis clausis juxta moderationem. » (C.Aimama-
élevés au sacerdoce, les igises et les autels ter, vers. Adjecimus, de Sent, excom.in 6°.) Bar-
avant la consécration avec le chrême, et enfin bosa * estime que la confection du chrême peut
les princes et les rois chrétiens. Par le droit ec- aussi se faire publiquement dans une église in-
clésiastique, l'onction est due à tous les rois terdite.
chrétiens; mais cette onction est différente de On voit, sous le mot Bénédiction, que les
celle qui se fait aux évêques, en ce que celle-ci prêtres ne peuvent faire ou donner les bénédic-
se fait avec le saint chrême, in capite et in ma- tions in quitus adhibetursacra unctio, c'est-à-dire
nibus, au lieu que l'autre ne se fait que in bra- l'onction des saintes huiles; cela s'entend sans
chio,,in modum crucis, et avec l'huile des caté- délégation de l'évêque; car dans la bénédic-
chumènes, ut ostendatur,dit le pape Innocent III, tion des cloches, le prêtre peut faire l'onction du
in cap. 1 de Sacra «net., quanta sit differentiainter chrême.
auctoritatempontifias et principis potestatem. On voit sous ce mot même et sous celui d'É-
L'huile des infirmes est la matière éloignée vêque, quelles sont les bénédictions et consé-
du sacrement de l'extrême-onction. L'évêque crations qui appartiennent privativement à l'é-
seul peut consacrer cette huile : « Ab episcopo vêque, et celles que les prêtres peuvent faire ou
tantum oleum infirmorum benedicendum. » Les donner avec ou sans commission de l'évêque.
théologiens disent que le sacrement de l'extrême- Nous ne parlerons ici dans un article séparé
onction ne serait pas valide, si l'on ne se ser- que de la consécration des évêques et arche-
vait pas précisément de l'huile des infirmes ; vêques.
que l'évêque doit en faire de nouvelle tous les Pour ce qui regarde le sacre des rois de
ans. (Cap. Litteris, dist. 3, de Consecrat.)Bonacina France, voir le mot Sacre
dit 1 que le pape peut commettre à un prêtre la Voirlesmots: Chrême, Sacre.
Extrême-Onetion.Cloche,
Huiles,
confection de l'huile des infirmes ; y aurait-il à § II. Consécration des évêques.
cet égard de la différence entre cette huile et le
saint chrême? Bonacina ne le pense pas, il La consécration de l'évêque est une cérémonie
ajoute que le pape peut commettre aussi à un ecclésiastique, dont l'objet est de dédier à Dieu
prêtre la confection du chrême. Voyez ci-dessus d'une manière toute particulière, celui qui a été
ce que nous disons de cette opinion. nommé, et de lui donner le caractère et l'ordre
Les théologiens disent aussi qu'un prêtre ou attaché à l'épiscopat. C'est proprement la ré-
un curé peut mêler de l'huile non consacrée à ception de l'évêque dans son église. On l'ap-
l'huile consacrée, quand celle-ci ne lui parait pas pelle sacre ou consécration, parce que l'évêque
assez abondante: c Modo quod additur, sit mino- devient personne sacrée, par l'onction qui est
ris quantitatis consecratio ; nam magis dignum faite sur lui avec le saint chrême.
aUrahit ad se minus dignum. » (C.Quodin dubiis, L'évêque une fois confirmé et en possession,
de Consecrat.ecclesix.) peut faire tout ce qui dépend de la puissance
Quand un évêque est absent de son diocèse, de juridiction. Mais il ne saurait entreprendre
ou qu'étant mort le siège est vacant, un évoque quoi que ce soit qui dépende du ministère de
voisin y vient faire la consécration de ces diffé- l'ordre, il ne saurait jouir de la plénitude du
rentes huiles. (Glos., verb. Spiritualibus, in c. Si sacerdoce qui confère le droit d'ordonner et de
episcopusde Supl. negl. prael.)Dans un cas de né- déposer les clercs, de bénir les vierges, de con-
cessité, soit qu'aucun évêque voisin ne puisse sacrer les églises et les autels, que lorsqu'il aura
venir, ou autrement, on peut se servir des huiles été consacré. (C. Transmissent, de Elect.) Or, l'é-
surannées. vêque dont l'élection ou la nomination a été
Il n'y a point d'exemption pour les choses duement confirmée par l'institution canonique,
qui dépendent de la puissance de l'ordre dans doit se faire sacrer dans trois mois à compter
un évêque: ainsi pour les saintes huiles, les con- du jour de la confirmation, sous peine de la
sécrations des églises, les ordinations, etc., les perte des fruitsde l'évêché, et de l'évêché même,
réguliers les plus privilégiés doivent recourir à s'il laisse passer trois autres mois sans s'ac-
l'évêque. (C. Veniens,16, vers. Chrisma,Prxscript.) quitter de ce devoir. C'est la disposition du ca-
Quoique le baptême et la confirmation puis- non Quoniam,dist. 75, tiré du concile de Chalcé-
sent être administrés solennellement dans une doine, et du can. 1, dist. 100, renouvelé par le
église interdite, suivant la disposition du cha- concile de Trente, sess. XXIII, chap. 2, de Re-
pitre Quoniam, de Sententia excom. in 6°, le saint form , en ces termes : « Ceux qui auront été
i. DeSacramentis,
ditp.7,qu.1. 1.DeOfficioetpotestate alleg.51,n.25.
episcopi,
CONSÉCRATION 551
préposés à la conduite des églises cathédrales merite de l'élu, et il la fait lire. Ensuite l'élu
ou supérieures, sous quelque nom ou titre que prête serment de fidélité au Saint-Siège, suivant
ce soit, quand ils seraient cardinaux de la sainte une formule dont il se trouve un exemple dès
Église romaine, si dans trois mois ils ne se le temps de S. Grégoire VII. On y a depuis
font sacrer, seront tenus à la restitution des ajouté plusieurs clauses, entre autres celle d'al-
fruits qu'ils auront perçus. Et s'ils négligent ler à Rome rendre compte de sa conduite tous
encore de le faire pendant trois autres mois, ils les quatre ans, ou d'y envoyer un député. (Con-
seront de droit même privés de leurs églises. Si çu Rom., an. 1079.)Cette pratique ne s'observait
la cérémonie de leur sacre ne se fait point à la point en France à cause du malheur des temps;
cour de Rome, elle se fera dans l'église même à mais on en voit aujourd'hui un très grand
laquelle ils auront été promus, ou dans la nombre d'exemples.
même province, si cela peut se faire commodé- Alors le consécrateur commence à examiner
ment. » l'élu sur sa foi et sur ses moeurs, c'est-à-dire sur
La forme de la consécration est marquée dans ses intentions pour l'avenir : car on suppose
le Pontifical; on y voit même la forme de la que l'on est assuré du passé. Il lui demande
consécration qui se faisait au temps des élec- donc, s'il veut soumettre sa raison au sens de
tions. l'Écriture sainte, s'il veut enseigner à son peu-
La consécration doit se faire un dimanche ple, par ses paroles et par son exemple, ce qu'il
(C. Qui in aliquo, dist. 51; c. Ordinationes;c. Quoi entend des Écritures divines ; s'il veut observer
die dominico,dist. 75), en l'église propre de l'élu, et enseigner les traditions des Pères et les dé-
suivant la prescription du concile de Trente ci- crets du Saint-Siège; s'il veut obéir au pape
dessus rapportée. Cependant depuis longtemps, suivant les canons; s'il veut éloigner ses moeurs
en France, les évêques étaient ordinairement de tout mal, et, avec l'aide de Dieu, les changer
sacrés à Paris. Mais, depuis quelques années, en tout bien, pratiquer et enseigner la chasteté,
les fidèles ont vu avec bonheur ceux qui de- la sobriété, l'humilité, la patience; s'il veut être
vaient être leurs pères dans la foi recevoir la affable aux pauvres et en avoir pitié, être dé-
consécration épiscopale dans les églises mêmes voué au service de Dieu, et éloigné de toute af-
auxquelles ils étaient promus. L'adresse des faire temporelle et de tout gain sordide. Il l'in-
bulles règle aujourd'hui le lieu où la consécra- terroge ensuite sur la foi de la Trinité, de l'In-
tion doit se faire. carnation, du Saint-Esprit, de l'Église : en un
Le consécrateur doit être assisté au moins de mot, sur tout le contenu du symbole, marquant
deux évêques. Ce consécrateur doit être le mé- les principales hérésies par les termes les plus
tropolitain, qui peut toujours consentir à ce précis que l'Église a employés pour les con-
qu'un autre fasse la consécration. (C. Episcopi, damner. (C. Qui episcopus,dist. 23.)
dist. 24; c. Ordinationes, dist. 64; c. Non dtbet, L'examen fini, le consécrateur commence la
dist. 65), quoique tous coopèrent ensemble à la messe. Après l'épître et le graduel, il revient à
consécration, il n'y en a qu'un seul qui accom- son siège, et l'élu étant assis devant lui, il
plisse cette fonction. Le pape peut commettre la l'instruit de ses obligations, en disants : Un évê-
consécration d'un évêque à un seul évêque, que doit juger, interpréter, consacrer, ordonner, of-
quia forma ibi non accipitur pro substantia rei, sed frir, baptiser et confirmer. Puis l'élu étant pros-
tantum pro ritu. Mais le pape ne le fait que dans terné, et les évêques à genoux, on dit les lita-
les cas extraordinaires. Le consécrateur et l'élu nies, et le consécrateur prend le livre des Evan-
doivent jeûner la veille. (Pontif rom.) Sur quoi giles qu'il met tout ouvert sur le cou et les
l'on a demandé, si l'élu, ayant été fait prêtre le épaules de l'élu. Cette cérémonie était plus fa-
samedi, peut être consacré le dimanche au ma- cile du temps que les livres étaient des rouleaux,
tin. Affirmant Glos. 1, in fin. c. Quod à Patribus, car l'Evangile ainsi étendu pendait des deux
dist. Innoc, in c. Litteras vers. Nec valet, de Temp. côtés comme une étole. Le consacrant met en-
ordin.; Host. Abb., ibid. suite ses deux mains sur la tête de l'élu avec
Le consécrateur étant assis, et devant l'autel, les évêques assistants, en disant : AccipeSpiri-
le plus ancien des évêques assistants lui pré- tum sanctum.Cette imposition des mains est mar-
sente l'élu, disant : L'Eglise catholique demande quée dans l'Ecriture, comme la cérémonie la
que vous éleviezce prêtre à la charge de l'épiscopat. plus essentielle à l'ordination; et l'impositior
Le consécrateur ne demande point s'il est digne, du livre est aussi très ancienne pour marque»
comme on faisait du temps des élections, mais sensiblement l'obligation de porter, le joug d
seulement, s'il y a un mandat apostolique, Seigneur, et de prêcher l'Evangile '.
c'est-à-dire la bulle principale, qui répond du t. Timoth.1T,14,T.22; Constit.apostolic,lib.vm,4.
522 CONSEILLERS
Le consécrateur dit une préface, où il prie L'évêque consacré hors doson église doit n'a-
Dieu de donner à l'élu toutes les vertus dont voir rien de plus pressé, après cette cérémonie,
les ornements du grand prêtre de l'ancienne loi que de se rendre à son diocèse, et, s'il part de
étaient les symboles mystérieux ; et tandis que Home, il doit en rapporter des indulgences pour
l'on chante l'hymne du Saint-Esprit, il lui fait ceux qui entendent sa première messe. Le peu-
l'onction de la tête, avec le saint chrême; puis ple doit recevoir son nouveau pasteur avec joie
il achève la prière qu'il a commencée, deman- et dignité : « Episcopi pro Christo legatione
dant pour lui l'abondance de la grâce et de la funguntur in terris. » (C. Onmesqui, 7, q. 1; c.
vertu, qui est marquée par cette onction. On Accusatioqiioque,2, q. 7; c. In novo dist. 21.) Les
chante le psaume 132 qui parle de l'onction cérémoniaires règlent qu'à cette entrée le clergé
d'Aaron,etle consécrateur oint les mains del'élu et les nobles de la ville iront prendre le nouvel
avec le saint chrême; ensuite il bénit le bâton pas- évêque à la porte dos remparts, que de là le
toral, qu'il lui donne pour marque de sa juridic- prélat, couvert de sa mitre et monté sur un
tion, l'avertissant de juger sans colère, et de cheval blanc, encaparaçonné et convenablement
mêler la douceur à la sévérité. Il bénit l'anneau orné, ira, sous un baldaquin que tiendra le
et le lui met au doigt en signe de sa foi, l'exhor- premier magistrat de la ville, jusqu'à son
tant de garder l'Église sans tache, comme l'é- église, dont il est devenu l'époux, jure divino
pouse de Dieu. Enfin il lui ôte le livre des évan- indissolubili.
giles de dessus les épaules et on le lui met en- La consécration d'un archevêque est à peu
tre les mains, disant : Prenez l'Evangile et allez près la même que celle d'un évêque ; il y a ces
prêcher au peuple qui vousest commis, car Dieuest différences, qu'à la consécration de l'archevê-
assezpuissant pour vousaugmentersa grâce. que, outre les trois évêques suffragants qui doi-
Là se continue la messe. On lit l'Evangile; et vent nécessairement y procéder, les autres évê-
autrefois le nouvel évêque prêchait pour com- ques de la province doivent y assister, ou au
mencer d'entrer en fonction. A l'offrande, il moins écrire leurs lettres d'adhésion, ainsi que
offre du pain et du vin, suivant l'ancien usage, le primat. (C. Quia, dist. 64; c. 1, dist 66.) L'ar-
puis il se joint au consécrateur et achève 'avec chevêque, quoique consacré, quoique mis en
lui la messe, où il communie sous les deux es- possession, ne peut exercer aucune sorte de
pèces, et debout. La messe achevée, le consécra- fonctions, siveordinis,sivejurisdictionis, qu'il n'ait
teur bénit la mitre et les gants, marquant leurs reçu le pallium.
significations mystérieuses ; puis il intronise le Les évêques et archevêques de France doi-
consacré dans son siège. Cette partie de la cé- vent, après ou avant leur consécration, aller
rémonie est appelée intronisation,parce que c'est prêter au chef du gouvernement le serment de
l'installation dans la chaire épiscopale qui est fidélité prescrit par l'article 6 du concordat de
faite en forme de trône, étant élevée et couverte 1801; ils sont tenus de le faire avant d'entrer en
d'un dais, comme les trônes des princes. En- fonctions.
suite on chante le Te Deum,et pendant ce temps- Voirlesmots: Provisions,
LiminaApostolorum, Abbé,Trans.
là les évêques assistants promènent le consacré lation.
par toute l'église pour le montrer au peuple. %III. Consécration des autels.
Enfin il donne la bénédiction solennelle : Con- (Voirlemot: Autel.)
secratus surgens cum mitra et baculo in medioalta-
ris dat solemnembenedictionem,qua data, geneflexus § IV. Consécration des églises et des calices.
versus consecratoremdicit cantando: Ad multosan- (Voirlesmots:Eglise,Calice.)
nos. CONSEIL, »E FABRIQUE.
L'évêque ne peut point, le jour même de sa (Voirle mot: Fabrique.)
consécration épiscopale, conférer les ordres, ni
CONSEILLERS.
remplir les fonctions qui tiennent au caractère
épiscopal, même en célébrant la messe et après On appelait ainsi les clercs qui étaient dans
le sacre. (C. Quodsicut, 28, § Super, de Elect.) les parlements et dans quelques autres tribu-
Sont consacrés tous ceux qui ont la dignité naux du royaume, et qui avaient voix délibéra-
épiscopale, même le Souverain Pontife, qui, tive, tant à l'audience qu'au conseil.
selon la coutume, est consacré par le cardinal- Les conseillersclercsne pouvaient tenir des bé-
évêque d'Ostie; le Souverain Pontife peut ce- néfices à charge d'âmes. Ils pouvaient seulement
pendant recevoir la consécration de l'évêque posséder quelque prébende ou dignité dans
qu'il voudra honorer de son choix. Les abbés, un chapitre où ils avaient le privilège d'être
au lieu de consécration, reçoivent la bénédiction. censés présents quand ils étaient de service
CONSERVATEUR 558
aux tribunaux où ils avaient leurs charges « Item voluit et ordinavit, quod super regigna-
et offices. C'était une règle inviolable que tione cujuscumque beneficii ecclesiastici, seu
les conseillers clercs n'opinaient jamais en cessione juris in eo, quam in manibus suis, vel
matière criminelle, sur le fondement de la ma- in cancellaria apostolica fieri contigerit, aposto-
xime : Ecclesiaabhorret a sanguine. licoe litterse nullatenus expediantur, nisi resi-
Outre les offices de conseillers clercs dans les gnans vel cedens, si prsesens in romana curia
parlements et présidiaux, il y avait dans pres- fuerit personaliter, alioquin per procuratorem
que chaque province des sièges épiscopaux, suum ad hoc ab eo specialiter constitutum, ex-
dont les évêques étaient conseillers nés. L'ar- pédition! hujusmodi in eadem cancellaria ex-
chevêque de Paris, par exemple, et l'abbé de presse consenserit et juraverit, ut moris est. Et
Saint-Denis, étaient conseillers nés au parle- si ipsum resignantem seu cedentem, pluries su-
ment de Paris, avec droit d'entrée, séance, voix per uno et eodem beneficio, in favorem diversa-
et opinion dêlibérative, tant à l'audience qu'au rum personarum, successive consentire conti-
conseil. L'archevêque d'Avignon jouissait du gerit, voluit Sanctitas Sua quod primus consen-
même droit au parlement de Provence; les évê- sus tenere debeat, et alii posteriores consensus
ques de Rennes et de Nantes au parlement de ac litterse illorum prsetextu etiam sub priors
Bretagne, etc. data expeditae pro tempore, nullius sint roborii
vel momenti, nec litterse reservationis, vel
CONSENS OU CONSENTEMENT.
assignationis etiam motu proprio, cujusvis pen-
Le consensest un sommaire étendu au dos do sionis annuae super alicujus beneficii fructibus
la'signature, par le notaire de la chancellerie, expediri possint, nisi de consensu illius qui
ou bien par un des notaires de la chambre, et pensionem persolvere tune debebit. »
contient l'année, le jour du mois, le nom du ré- La quinzième clause de la concession dans
signant, et celui du procureur qui est rempli une provision se rapporte à la seconde partie
dans le blanc de la résignation, et la sous- de cette règle : mais il faut observer qu'à pré-
cription dudit notaire qui atteste que l'original sent dans la daterie, la date de la signature et
de la procuration est demeuré en la chambre du consens n'est qu'une seule et même date :
apostolique en la forme suivante : « Quia paria sunt resignare et consensum proes-
« Et anno... RetroscriptusN. in Romana curia sol- tare resignationi, » suivant la remarque des
licitatorem, procuratorem,suum resignationi consen» docteurs in II Clem.de Renuntiat. ; de là devient
sit et juravit, etc. oiseuse la question agitée, si un résignant peut
» Est in caméra apostolica. révoquer sa résignation avant l'extension du
N. Not. » consens.
Le consens est une formalité introduite pour CONSERVATEUR.
obvier à certaines fraudes que les petites dates
avaient occasionnées. Celui qui veut résigner Le conservateurest un juge établi par le pape
présente une supplique par lui-même ou par pour conserver les droits et les privilèges decer-
un procureur. S'il est présent, il prête un pre- tains corps ou de certaines personnes : « Con-
mier consentement interprétatif, dont les offi- servator est judex delegatus a papa, datus ad
ciers de la daterie retiennent la date. La suppli- tuendum aliquos contra manifestas injurias, seu
que est ensuite portée au pape qui la signe, et violentias, judiciali non utens indagine; 1. »
de là on passe à l'expédition. Cette expédition, Il est parlé des conservateurs dans le Sexte.
qui ne se fait que par le ministère de plusieurs Le chapitre 1, de Officio et Potest. judicis deleg.
officiers, exige un nouveau consentement de la eod., dit : « Statuimus ut conservatores quos
part du résignant ou de son procureur. Le plerumque concedimus a manifestis injuriis,
premier de ces consentements est appelé à et violentiis defendere possint, quos ei com-
la daterie petit consens,il est prêté pour obtenir mittimus defendendos, nec ad alia quoe judi-
la grâce; le second, qui est le consens dont cialem indaginem exigunt, suam possint exten-
on voit ci-dessus la forme, est proprement ce dere potestatem. » Cette décision est du pape
qu'on entend par consens, c'est-à-dire le pe- Innocent IV.
tit consens étendu. Son effet est l'exécution de Suivant le chapitre Hac constitution, eod. Ht.,
la grâce obtenue : « Quamvis renuntiatio per in 6°, on ne peut établir pour conservateurs que
primum consensum h Româno Pontifice admis- des prélats, ou au moins des dignités et per-
sum perfecta sit resignatio, non possunt t.amen sonnats des églises cathédrales et collégiales :
litterse expediri, sine extensione prsedicti con- sur quoi Barbosa et plusieurs autres estiment
sensus. » La règle 45 de chancellerie porte : 1;Barbosa,DeOfficio
etpotestate : alleg.106,n.1.
episcopi
551 CONSERVATEUR
qu'un chanoine de cathédrale est censé dignité ordonnances qu'elles contiennent, ne pourront
à l'effet d'être délégué ou établi conservateur en nulle manière garantir qui que ce soit, de
par le Saint-Siège, ce qui a été confirmé en 1621 quelque qualité ou condition qu'il puisse être,
par la constitution de Grég.iire XV. quand ce serait même un chapitre, de pouvoir
Suivant la môme décret de, personne ne peut être appelé et accusé dans les causes criminelles
être le conservateur de son propre conservateur, et mixtes, devant son évêque ou autre supérieur
ni de celui qui est sous sa juridiction, ou autre- ordinaire, ni empêcher qu'on n'informe et qu'on
ment dans sa dépendance ne procède contre lui, et même qu'on ne le puisse
Lés ofliciaux ou vicaires généraux des évê- faire venir librement devant le pige ordinaire ;
ques qui n'ont ni dignités ni persotinats dans s'il s'agit de quelques droits cédés qui doivent
les chapitres, ne peuvent être établis conserva- être discutés devant lui dans les causes civiles
teurs; mais le pape peut donner à des corps de où il sera demandeur, il ne lui sera permis d'at-
religieux le pouvoir spécial de se les choisir tirer personne en jugement devant ses juges con-
pour tels. servateurs; et s'il arrive dans les causes dans
Cette décrétale, qui sert de base à toutes les lesquelles il sera défendeur, que le demandeur
nouvelles constitutions sur cette matière, pres- allègue que celui qu'il aura élu pour conserva-
crit encore aux conservateurs les cas et la forme teur lui soit suspect, ou qu'entre les juges
de leur procédure : ils ne peuvent connaître ab- mêmes, le conservateur et l'ordinaire, il naisse
solument que des violements manifestes des quelques contestations sur la compétence de
droits qui sont commis à leur défense. S'il y a juridiction, il ne sera point passé outre dans la
du doute ou des difficultés qui exigent des for- clause, jusqu'à ce qu'il ait été prononcé par
malités dans l'instruction, ils doivent s'abstenir arbitres élus en la forme de droit sur les sujets
et ne point juger, sous peine de suspense des de récusation, ou sur la compétence de la juri-
fonctions de leur office pendant un an, et d'ex- diction.
communication contre ceux qui auront provo- « A l'égard de ses domestiques qui ont cou-
qué mal à propos leur ministère. Ils ne peuvent tume de se vouloir aussi mettre à couvert par
être relevés et absous qu'après avoir satisfait ces lettres de conservation, elles ne pourront
les parties qui ont souffert de la procédure irré- servir qu'à deux seulement, à condition encore
gulière, s'ils n'en ont reçu expressément la fa- qu'ils vivent à ses propres dépens. Personne
culté du pape qui, du reste, peut seul donner non plus ne pourra jouir du bénéfice de sembla-
des juges conservateurs. La constitution de Gré- bles lettres au-delà de cinq ans, et ces sortes
goire XV, enjoint aux religieux de se les choisir de juges conservateurs ne pourront avoir aucun
dans un certain délai et sous la forme prescrite tribunal érigé en forme.
par la décrétale de Boniface VIII, incip. Statum. « Quant aux causes des mercenaires et per-
Cette constitution de Grégoire XV, ne parle sonnes misérables, le décret que le saint con-
que des réguliers, autant pour renouveler les cile a déjà rendu à cet égard demeure dans sa
anciennes décrétales du Sexte, que pour inter- force : les universités générales, les collèges
préter le décret du concile de Trente. des docteurs ou écoliers, les lieux réguliers, les
« Et d'autant, dit le concile de Trente, qu'en- hôpitaux qui exercent actuellement l'hospita-
tre ceux qui, sous prétexte qu'on leur fait divers lité, et toutes les personnes des mêmes universi-
torts et divers troubles en leurs biens, en leurs tés, collèges, lieux et hôpitaux ne sont point
affaires et en leurs droits, obtiennent, par le entendues, comprises dons la présente ordon-
moyen de lettres de conservation, qu'on leur nance ; mais demeureront exemptes et seront
affecte certains juges particuliers, pour les met- estimées telles. » (Sess.XIV,ch. o, de Reform.)
tre à couvert et les défendre de ces sortes d'ou- Par une bulle du pape Clément XIII, du 23
trages et de persécution, et pour les conserver avril 1762, il est ordonné, 1° que les constitu-
et les maintenir, pour ainsi dire, dans la pos- tions de Boniface VIII, de Grégoire XV et le
session de leurs biens, et dans leurs affaires et bref d'Innocent X, touchant les juges conserva-
leurs droits, sans permettre qu'ils y soient teurs, soient exécutées selon leur forme et te-
troublés, il s'en trouve quelques-uns qui abusent neur ;
de ces sortes de lettres et prétendent s'en servir 2° Que les réguliers mendiants et non men-
en plusieurs occasions contre l'intention de celui diants, même la société de Jésus, ne pourront
qui les a accordées, lesdites lettres de conserva- en aucun cas, ni en vertu d'aucun privilège, se
tion, sous quelque prétexte ou couleur qu'elles donner ou choisir pour juges conservateurs des
aient été données, quelques juges que ce soit supérieurs ou officiers, sous quelque titre que
qui y soient députés, et quelques clauses et ce soit, de leur ordre ou d'un autre, s'ils ne sont
CONSISTOIRE 555
perpétuels dans leur supériorité, dignité ou » Les consistoires semi-publicssont ceux aux-
office ; quels les évêques assistent.
3° Que, conformément aux décrets portés au- » Il y a enfin les consistoires publics où pren-
trefois par la congrégation générale de la Pro- nent part un grand nombre d'officiaux et de
pagande, tenue sous Urbain VIII, le 3 février prélats et où sont admis les fidèles.
1640, les mêmes religieux mendiants, moines » Les consistoires publics ont lieu principale-
ou clercs réguliers, et tous autres ne pourront se ment à l'occasion de la remise du chapeau rougo
choisir des juges conservateurs, tant qu'ils se- aux nouveaux cardinaux, et, pour y être admis,
ront dans les pays infidèles, et qu'ils y travail- ecclésiastiques, dames et messieurs doivent
leront aux saintes missions. avoir le même costume d'étiquette que pour les
Cette dernière disposition, qui a comme servi fonctions de la chapelle Sixtine '.
de cause ou de motif à cette bulle, a pour objet » Le Pape tient le consistoire dans le palais
de prévenir les troubles et les scandales qui où il réside. Les Souverains Pontifes en ont fait
naissent dans ces pays éloignés de l'établisse- partout où ils ont séjourné. Pie VI tint un con-
ment des juges conservateurs, au grand détri- sistoire à Vienne, et Pie VII en fit un à Paris.
ment de la paix, si nécessaire entre les minis- » C'est dans les consistoires que se traitent
tres de l'Église pour le succès de leur mission. les plus graves affaires de l'Église. Le Pape y
La bulle veut que, pour tous les différends qui prononce des allocutions, qui sont ensuite pu-
s'élèveront parmi eux au sujet de leurs droits bliées lorsqu'il le juge opportun, Il y crée les
ou privilèges, ils aient recours au pape et au cardinaux et préconise les évêques.
Saint-Siège apostolique qui a toujours eu à » Les ministres du consistoire sont : Le cardi-
coeur, dit cette bulle, de conserver à chacun ses nal vice-chancelier, le cardinal camerlingue,
droits : « Cui nihil antiquius est quam cuique l'auditeur du Pape, comme secrétaire du con-
jura sua servare. » sistoire, le substitut du consistoire, le notaire
C'est une règle que les juges conservateurs ne du consistoire pour les informations des évo-
doivent procéder que contre des personnes do- ques, les clercs de la chambre et avocats con-
miciliées dans le diocèse où ils sont établis con- sistoriaux, les clercs nationaux et le gardien du
servateurs, ou tout au plus dans l'étendue d'une consistoire.
diète a fine dioecesum. » Le cardinal vice-chancelier de la sainte
Ils ne peuvent commettre ni déléguer leur Eglise romaine est comme le notaire du S. Siège
pouvoir pour juger. et du consistoire. Le jour qui précède le con-
CONSERVATIONS DIOCESAINES. sistoire, il reçoit de l'auditeur du Pape, comme
Un arrêté du 12mars 1849 a créé trente-cinq secrétaire du consistoire, les feuilles consisto-
conservations pour les édifices diocésains. riales, c'est-à-dire les résumés des préconisa-
Les communes et les fabriques qui ont à faire tions, ainsi que les décrets que le Pape lit en
faire des réparations aux églises ne peuvent se consistoire. Puis, dans le consistoire même, à
dispenser de consulter la conservation de leur mesure que le Pape lit ces feuilles et ces dé-
diocèse. crets, le cardinal vice-chancelier les enregistre
CONSISTOIRE 1 dans un registre que le sous-sommiste lui t
CONSISTOIRE,consistorium,conseil, salle du conseil. remis avant d'entrer dans la salle consistoriale;
de la création des
On nomme consistoirel'assemblée du Sacré Col- ensuite il donne le certificat
cardinaux et préconisation des évêques. Ces
lège, réuni sous la présidence du Pape, pour certificats servent de base pour l'expédition des
traiter des affaires de l'Eglise. en
11y a trois sortes de consistoires : le consis- bulles, après que le secrétariat des Brefs,con-
toire secret,le consistoire semi-public,et le consis- vertu du même certificat, a formé la cédule
toire public. sistoriale que le Pape signe.
« Le consistoire secretest celui auquel les car- » Le cardinal camerlingue du Sacré Collège
dinaux seuls assistent. Les rois ont le privilège reçoit, comme le vice-chancelier, les feuilles
le consistoire.
d'y entrer; Alexandre VII y admit la reine consistoriales le jour qui précède
Christine de Suéde. Les princes de rang infé- Il tient dans le consistoire un petit registre
rieur ont obtenu quelquefois la faveur d'assister pour confronter les sièges épiscopaux que le
aux consistoires secrets jusqu'à l'extra omnes; Pape propose avec les feuilles précitées; et si le
faire
ainsi, par exemple, le grand-duc de Toscane Pape traite quelque affaire qu'il veuille
sous Innocent XII. 1 Pourles ecclésiastiques,
soutaneet manteaulong; pourles
1.Nousempruntons cetarticleà YAnnéeliturgique
à Home pourles
par dames,robenoireetvoilenoirsurlatèle(sanschapeau);
MgrBarbierdoMoulault.5«édition, pages220-232. hommes, noir.
habitet pantalon
556 CONSISTOIRE
enregistrer, le camerlingue l'écrit à part; car il un ruban de soie blanche. Après le consistoire,
fait enregistrer tous les actes consistoriaux au l'auditeur reprend les cahiers pour les déposer
secrétariat du Sacré Collège. Le secrétaire du aux archives avec les actes consistoriaux.
Sacré Collège, qui l'est en même temps de la » Le substitut du consistoire est un ecclésiastique
congrégation consistoriale, intervient aux con- au service de l'auditeur du Pape pour tout ce
sistoires avec les employés ses subordonnés, et qui concerne le consistoire. Il est nommé par
ils-se tiennent prêts pour toutes les choses qu'on bref. Il compose les feuilles consistoriales que
pourrait leur commander. A mesure que les le Pape lit dans les consistoires secrets : il exa-
cardinaux entrent dans la salle consistoriale, le mine les procès et rend compte à l'auditeur des
secrétaire du Sacré Collège prend leurs noms défauts qu'il y remarque; il en rédige les extraits
par écrit. qui sont ensuite imprimés pour l'usage des car-
» Tout ce qui concerne les provisions des dinaux. Pendant le consistoire, il doit se trouver
sièges épiscopaux ou les concessions de titres dans les antichambres pontificales, ainsi que
in partibus appartient à l'auditeur du Pape. Ses l'auditeur du Pape et les autres employés du
attributions consistoriales spéciales consistent consistoire, pour être prêts si on les appelle.
donc à s'occuper de la promotion des évêques, Les extraits des procès sont désignés sous le
surtout ceux qui sont nommés librement par le nom de propositions.Le substitut fait l'extrait des
Pape. Il prend des informations sur les sujets procès transmis par les nonces ; le notaire est
que le S. Père se propose de nommer, et il en chargé de l'extrait de ceux qui se font à Rome.
rend compte à Sa Sainteté. Puis, lorsque le Le notaire du consistoire fait les informations
Pape a fait le choix, c'est l'auditeur qui en pour les évêques d'Italie, en se conformant à
donne avis à l'évêque nommé par un billet, s'il l'instruction publiée par Urbain VIII, en 1627,
est à Rome, et par une lettre, s'il demeure hors laquelle prescrit tous les articles sur lesquels
de Rome. Les évêques d'Italie et tous ceux qui on doit examiner les témoins. L'évêque nommé
sont nommés aux sièges dont le Pape a la libre se rend à Rome, à moins que le Pape ne l'en
collation doivent subir un examen à Rome de- dispense; il se présente au Pontife, ou à son
vant le Pape et la congrégation spéciale qui auditeur; puis il fait présenter le billet de
existe à cet effet; c'est encore l'auditeur qui fait sa nomination au notaire du consistoire par un
part au secrétaire de ladite congrégation du expéditionnaire apostolique, ainsi que les docu-
jour fixé pour l'examen, qui doit avoir lieu trois ments requis, qui sont : 1° L'acte de baptême.
jours avant le consistoire, afin que l'on ait le 2" Le certificat de confirmation. 3° Les lettres
temps de faire le procès d'information. L'usage de prêtrise. 4° Le diplôme de docteur en théo-
est toutefois de faire ce procès avant l'examen, logie. 3° Le certificat de l'évêque diocésain circa
et il est fait par le notaire en présence de l'audi- vitam et mores. 6° Les autres documents, s'il en
teur. L'auditeur assiste à l'examen, mais il n'in- a. 7° L'acte de l'administration capitulaire de
terroge pas; et si on le charge de le faire, il acou- l'église vacante, exprimant le revenu de la
tume d'interroger sur les saints canons. Lorsqu'il mense. Après cela, le notaire entend sous forme
s'agit de sièges épiscopaux qui sont conférés privée deux témoins qui déposent au sujet de
moyennant l'élection des chapitres ou par no- l'église et diocèse, et deux autres pour la per-
mination royale, les procès sont faits par les sonne. Le notaire écrit les procès dans les for-
nonces ou autres personnes députées, et trans- mes légales, et il en rédige un abrégé pour le
mis à Rome. Ces procès sont examinés par l'au- pape et les cardinaux. Le jour du consistoire
diteur, ou par le secrétaire de la congrégation s'approchant, il invite les expéditionnaires et les
consistoriale, pour voir s'ils sont faits suivant témoins à comparaître devant l'auditeur du
les règles prescrites par la bulle de Grégoire XIV Pape, qui est juge ordinaire pour la révision de
et l'instruction d'Urbain VIII. La congrégation ces sortes de procès ; on lit le procès, et les té-
consistoriale examine les actes des élections ca- moins déposent sous la foi du serment et con-
pitulaires, et rend ensuite le décret de confirma- firment les dépositions par l'apposition de leur
tion, s'il y a lieu ; l'auditeur assiste à la con- signature. La lecture terminée, on vérifie si l'a-
grégation pour voir si l'on a fidèlement observé brégé ou propositioncorrespond au procès, et on
dans l'élection le célèbre canon Quia propter du l'envoie au substitut du consistoire pour qu'il
concile de Latran. Les cahiers que l'auditeur appose l'imprimatur. C'est encore le notaire qui
doit remettre au cardinal vice-chancelier et au invite les évêques nommés à se rendre dans
cardinal camerlingue le jour qui précède le con- l'appartement de l'auditeur pour l'examen, après
sistoire, sont parfaitement écrits en gros carac- lequel ils font la profession de foi, qui leur est
tères et les deux extrémités en sont unies par présentée par le même notaire ; ils signent cette
CONSISTOIRE 557
profession sur deux exemplaires identiques, vont dans la salle consistoriale attendre le Pape.
dont un est transmis, avec l'acte de la profes- Tous les officiaux décrits plus haut se rendent
sion de foi et la copie des informations, au se- au palais. L'heure arrivée, le prélat maître de
crétariat de la congrégation consistoriale. Le chambre en avertit le Pontife, lequel sort de sa
jour du consistoire, le notaire se tient avec les chambre en soutane blanche, rochet et mozette;
autres dans les antichambres pontificales, pour dans la salle voisine, le cardinal premier diacre
être prêt atout ce qui peut concerner son emploi. lui présente l'étole rougé; les deux camériers
» Les clercs de la Chambre doivent se rendre secrets participants, avec le majordome et le
dans le palais apostolique toutes les fois qu'il y maître de chambre et tous les autres de la
a consistoire ; ils se tiennent dans les salles du chambre secrète accompagnent le Pontife dans
tribunal jusqu'à ce que le consistoire soit ter- la salle consistoriale, jusqu'au siège papal ; le
miné, parce qu'il pourrait arriver comme autre- maître de chambre remet au Pape l'allocution
fois que l'on traitât en consistoire d'affaires et le petit cahier des actes consistoriaux. Les
civiles et administratives pour lesquelles on au- cardinaux se lèvent lorsque le Pape entre. Puis
rait besoin de les appeler. le gardien du consistoire dit à haute voix: Extra
»Les avocatsconsistoriauxl entrent dans les con- omnes, et tout le monde sortant, on laisse le
sistoires secrets, dès qu'ils sont terminés, et, Pape seul avec les cardinaux.
en présence du Sacré Collège, ils demandent le » L'allocution est écrite sur un cahier distinct
pallium pour les prélats qui y ont droit. des feuilles consistoriales. Tantôt le Pape im-
«Les clercs nationaux sont au nombre de trois, pose le secret, et d'autres fois l'allocution est di-
un pour l'Autriche, l'Espagne et la France ; le vulguée par l'impression. Après l'allocution,
clerc italien devint secrétaire du Sacré Col- s'il n'y a pas création ou publication de cardi-
lège, et celui d'Angleterre cessa d'exister à l'é- naux, le Pape fait lecture des feuilles consisto-
poque d'Henri VIII. Les trois clercs nationaux riales pour la préconisation des évêques. Quoi-
assistent aux consistoires publics et secrets. que l'évèché soit de nomination royale, les pa-
» L'Extra omnesest un officiai du consistoire roles que prononce le Pape en consistoire sont
qui est chargé de dire à haute voix Extra omnes, toujours les mêmes, et il ne fait jamais mention
afin que tout le monde sorte et que le Pape de la nomination ou présentation.
reste seul avec les cardinaux. Dans les consis- » Les évêques des lieux soumis à la S. Con-
toires semi-publics, il dit seulement Extra ; après grégation de la Propagande sont nommés sur
quoi il ferme la porte du consistoire, il y fait la une liste de trois noms qu'elle se procure. Le
garde, et ouvre de nouveau cette porte lorsque choix se fait ensuite en pleine congrégation, et
le consistoire est achevé. Cet officiai est nommé il est soumis au Pape pour l'approbation; après
à vie par billet du majordome, et perçoit un quoi l'on fait un décret suivant lequel le cardi-
traitement mensuel. nal secrétaire des brefs fait expédier le bref
« La veille du consistoire, le maître des cursores apostolique. Le titre épiscopal in partibus infide-
apostolicise présente au Pape, et s'agenouillant, lium est demandé par la S. C. à l'auditeur du
il dit : Sanitas et longa vita, BeatissimePater. Cms Pape. Les patriarches orientaux sont élus par
erit consistorium? Le Pape, en le bénissant, ré- les évêques de leurs nations ; les actes de l'élec-
pond à la demande : erit consistorium, et il fixe tion sont transmis à la Propagande, qui les
l'heure. Le cursor part du palais apostolique et, confirme, si elles les trouve canoniques. Pré-
après avoir donné avis au préfet des maîtres sentement le Pape annonce aux cardinaux eu
de cérémonies, il se rend, avec les autres cour- consistoire les évêques nommés par l'organe de
riers chez tous les cardinaux pour leur annoncer la Propagande depuis le dernier consistoire.
le jour et l'heure du consistoire, par ces mots : » La lecture des feuilles consistoriales étant
Emeet Rme Domine,crastina die hora... erit consisto- terminée, et le consistoire étant achevé, le car-
rium. dinal camerlingue agite une clochette, et le gar-
« On place dans la salle du consistoire un dien du consistoire ouvre la porte ; si l'on a
grand siège sous le dais du trône, et tout autour proposé dans le consistoire quelque église qui
les bancs pour les cardinaux. Le siège est cou- jouisse du pallium, un avocat consistorial est
vert de damas rouge. Les cardinaux prennent introduit, avec la personne elle-même ou son
la cappa dans les premières antichambres et procureur, pour en faire la demande. Après
1.Ilssontaunombrede douze,parmilesquelssiègentunBolo* cela, les cardinaux se levant, le Pape les salue
nais,un Milanais,un Ferrarais,un Napolitainet un Lucquois. et quitte la salle consistoriale. On fait entrer
Lesautresdoiventêtredes Etatsde l'Eglise.Ils prononcent
des le
discoursauxconsistoires parlentpourlescausesdebéutiû- les ministres du Sacré Collège, c'est-à-dire
publics,
foutinstancepourle Pallium,etc
catioaet de anonisation, secrétaire du Sacré Collège, le substitut du
558 CONSPIRATION
consistoire, le computiste, etc., avec deux cardinaux de refuser la grâce en consistoire,
maîtres de cérémonies, pour les congrégations dans ces cas le pape accorde les provisions par
que les cardinaux ont coutume de tenir après daterie avec cette dérogation expresse : « Etiamsi
les consistoires secrets pour les affaires du Sa- de illo consistorialiter disponi consueverit, » et
cré Collège. donne aux pourvus, de plenitudine potestatis, les
» Les feuilles consistoriales et l'allocution sont dispenses qui leur sont nécessaires pour raison
remises à l'auditeur, qui les dépose aux archi- de leur défaut.
ves. On conserve dans le secrétariat du consis- Au reste, les expéditions consistoriales suppo-
toire tous les actes consistoriaux depuis l'an- sent toujours la cédule et la contre-cédule; au
née 1409jusqu'à nos jours, excepté la période lieu que si elles sont faites hors consistoire, et
de 1434à 1489, qui s'est perdue, avec tout ce par la daterie, elles supposent la supplique si-
qui précède le xve siècle. » gnée du pape seulement et expédiée en la forme
CONSISTORIAL. des bénéfices inférieurs, ce qui s'observe plus
commodément pour les abbayes, parce que l'ex-
On appelle consistorialce qui passe ou doit pas-
ser par le consistoire. pédition des provisions par la voie des dates se
peut faire tous les jours, tandis que la voie du
§ I. Avocat consistorial. consistoire est plus longue parce qu'il ne se tient
Nous venons de voir un mot Gonsitoire, page qu'à certains temps.
357, 1ercol; qu'on appelle à Rome de ce nom Voirlemot: Provision.
l'avocat qui est du nombre de ceux qui ont CONSPIRATION.
droit exclusif de plaider dans le consistoire. Les conciles parlent du crime de conspira-
§ II. Bénéfices consistoriaux. tion contre son évêque ou son supérieur, pour le
Dans le consistoire secret du pape, on traite condamner aux peines les plus grièves, et entre
des affaires concernant les églises cathédrales, et autres à la vacance ipsojure des bénéfices possé-
principalement de l'élection des évêques dont désparles conspirateurs. « Hi qui episcopos suos
les provisions passent toujours par le consis- persequuntur, perpétua notantur infamià. » (Cap.
toire; c'est ce qui fait qu'on appelle proprement 9, caus. 3, quaest. 4.) L'évêque, les chanoines et
et spécialement ces affaires consistoriales. les prêtres d'un diocèse forment un corps mysti-
Il n'en est pas de même des prélatures régu- que dont l'évêque est la tête. La subordination
lières; on n'y a pas toujours traité des abbayes : doit toujours exister dans la hiérarchie ecclé-
mais depuis longtemps les papes ne pourvoient siastique; car la puissance est le partage des su-
à certains monastères que consistorialement, périeurs et l'obéissance celui des inférieurs. Il
ce qui est exprimé dans les bulles qui ont n'est donc pas permis de se révolter contre les
passé par le consistoire, en ces termes : « De premiers. Le pape Fabien ordonna que ceux qui
personà tuâ nobis et fratribus nostris ac- feraient des conspirations contre leur évêque
cepta ecclesise N. de fratrum eorumdem consi- seraient livrés au bras séculier. Le pape Etienne
lio apostolica auctoritate providemus. « Par une avait ordonné la même chose et déclara infâme
bulle du pape Grégoire XIV, de l'an 1590, et en- celui qui accuserait son évêque et lui tendr ut
core mieux par celle du pape Urbain VIII, on des pièges. « Clericus verô qui episcopum suum
doit observer à l'égard des provisions des béné- accusaverit, aut ei insidiator extiterit, non est
fices réguliers consistoriaux, tout ce qui est ob- recipiendus, quia infamis effectus est, et à gradu
servé aux provisions des églises cathédrales, debet recedere, ac curise tradi serviturus. »(Cap.
c'est-à-dire mêmes informations, même profes- 8, eàd. caus. et quaest.)Les chanoines de Lucques
sion de foi et mêmes provisions. qui avaient conspiré contre leur évêque Anselme,
Pour expédier par la voie du consistoire, il furent livrés au bras séculier, conformément à
faut que celui qui est pourvu soit qualifié, c'est- ces canons, dont il est parlé dans un concile de
à-dire qu'il ait toutes les qualités requises, et Rome de l'an 1074, et qui servirent d'autorité à
qu'il n'ait aucun défaut; car le consistoire ne la condamnation prononcée contre eux, « secun-
souffre pas même d'expression douteuse ni con- dum canon es et capitulum Fabiani pontificis,
ditionnelle dans les provisions, et en ce cas il quia conspiraverunt contra episcopum Ansel-
faut passer par la signature et par la chambre. mum. » Ils furent privés de tous les honneurs,
Le cas n'arrive presque jamais pour des évêchés, privilèges et prérogatives accordés à leur état.
mais il arrive souvent pour des abbayes et au- Le concile d'Ancyre, de l'an 314et celui d'An-
tres bénéfices consistoriaux. Lors donc que ceux tioche de l'an 341, veulent qu'on dépose les prê-
qui doivent être pourvus souffrent quelque dé- tres qui sont complices des conspirations qui se
faut ou de l'âge, ou tel autre qui obligerait les trament contre leur évêque. Le concile de Chai-
CONSTITUTION .. 559
cédoine confirme de son autorité les canons de qui in vobii est, non coacte, sed spontanée, sc-
ces conciles. Puisque les lois séculières ont dé- cundum Deum, neque dominantes in cleris, sed
fendu les conjurations, dit ce concile, à plus ut forma et exemplum facti gregis (I Pétri c. V.
forte raison les doit-on interdire dans l'Église y-2 ) Dans la suite on n'observa pas la même
par des constitutions, en sorte que si des clercs distinction, et quoiqu'on entende plus commu-
ou des moines sont trouvés coupables de com- nément par constitution, en matières ecclésias-
plots et de conspirations contre des évêques, ou tiques, les décisions et règlements des papes,
même contre des clercs, ils doivent être déposés on voit, dans les décrétales et dans les cano-
de leur état. nistes, ce nom employé dans la signification
Le troisième concile d'Orléans, de l'an 338, la plus étendue. On distingue deux sortes de
can. 21, veut qu'on s'élève contre ces conjurés constitutions : les constitutions civiles et les
et qu'on les punisse, parce que c'est par un es- constitutions ecclésiastiques.On peut y ajouter les
prit de révolte qu'ils se séparent de leur chef, constitutions mixtes.
auquel le lien de la charité les devrait unir. Un § I. Constitutions civiles.
capitulaire d'Aix-la-Chapelle, et un concile de Les constitutions civiles, relativement aux
Worms de l'an 868, ont suivi le même esprit. principes du droit romain, sont les lois établies
(Cap.29, can. 74.) Il y est parlé des conjurations par le prince, par les magistrats ou par le peu-
qui sont faites par les ecclésiastiques, et on ple : « Sunt quas princeps, aut magistratus, aut
les prive de plein droit des honneurs et digni- populi sibimetipsi sanciunt *. »
tés qu'ils avaient dans l'Eglise. Enfin le concile 11 est de maxime, suivant les canons, que les
général de Constantinople, tenu en 692, renou- lois civiles des souverains et des peuples cèdent
velle, sans aucune limitation dans son canon aux lois ecclésiastiques ; qu'elles ne sont d'au-
34, celui du concile de Chalcédoine. cune considération, quand elles se trouvent,
Toutefois, il n'est pas défendu à des chanoi- contraires aux saints canons, aux décrets des
nes qui veulent conserver leurs droits, de se Souverains Pontifes et aux bonnes moeurs, mais
maintenir dans leurs privilèges; leur accord et qu'on peut et qu'on doit môme s'en servir,
leur réunion dans ce but, ne serait point une quand, n'ayant rien que de sage, elles peu-
conjuration mais une simple assemblée de tous vent être utiles à l'Église : « Lex inipera-
les membres pour prendre des mesures afin torum non est supra legem Dei, sed subtus ;
d'empêcher que leur liberté ne soit opprimée, imperiali judicio non possunt ecclesiastica
ou pour se conserver dans une possession im- jura dissolvi. (C.1, dist. 20). a Constitutiones con-
mémoriale dans laquelle ils prétendent être tra canones et décréta proesulum romanorum,
troublés par leur chef qui, de son côté, doit vel bonos mores, nullius sunt momenti. »(C. 4,
leur faire justice et les traiter comme frères. ead. dist). « Si in adjutorium vestrum etiam ter-
Mais il est bien important dans ce cas de régler reni imperii leges assumendas putatis, non re-
tellement leurs mouvements et leurs actions, en prehendimus. <>(C. 7, ead. dist). Dans ce dernier
agissant ainsi contre leur supérieur et leur chef, cas, on ne doit s'en servir et ne les alléguer
d'éviter que la conspiration n'y ait aucune part, qu'au défaut de toute loi ecclésiastique. (G'os.,
parce que, d'après les décrétales, un ecclésiasti- ibid., dict. c. 1, ead dist.; c. 1, deNovoopèrenunc.)
que qui s'en rendait coupable, devrait être De ces principes, on a tiré cette conséquence,
privé de son rang et de son état. que les lois civiles ne doivent lier ni la per-
CONSTITUTION. sonne ni les biens et droits des ecclésiastiques,
leur fussent-elles favorables, si elles ne sont
On n'entendait autrefois, par ce nom, que la approuvées et reçues par l'Eglise même: « Quod
loi ou l'édit du prince : « Constitutio vel edic- usque adeo obtinet, etiamsi quid in eis statu-
tum est quod rex vel imperator constituit vel tum fuerit quod ecclesiarum respiciat commo-
edicit. » (C. 4; dist. 2). on donnait aussi cenom, dum, nullius firmitatis existat, nisi ab Ecclesia
d'une manière vague, à toutes sortes de lois fuerit comprobatum. » Lancelot parle ainsi de
écrites : « Lex est constitutio scripta » (c. 3, dist. la décrétale Ecclesia sanctaeromanx, de Constitut.,
i), mais on distinguait, d'une manière particu- que l'on doit expliquer suivant la glose, dans
lière, les lois ecclésiastiques par le nom de rè- le sens de ces termes : « Causae ecclesiarum per
»
gles et de canons : Olim constitutiones eccle- constitutiones laïcorum definiri non debent.
siasticx, requise, potius quam jura dicebantur ; (C. Fin., de Rébus ecclesix alien. ; c. 1, dist. 66; c.
quia . Ecclesia charitate potius quam imperio Denique; c. Cumad verum, dist. 96; c. 12, Cum lai-
régit '. |Reges gentium dominantur eorum , vos cis, de Reb. Eccles. alien.) Ce dernier chapitre,
autem non sic. ( Luc , XXII. ) Pascite gregem 1. Lancelot.
560 CONSULTEUR
pris des décrets du concile général de Latran, § III. Constitutions mixtes.
parle des biens de l'Eglise, sur lesquels, dit-il, On donne ce nom aux constitutions ecclésias-
les laïques n'ont aucune sorte de droits : « Cum tiques qui regardent des choses qui sont en
laïcis, quamvis religiosis, disponendi de rébus partie spirituelles et en partie temporelles,
Ecclesiaenulla sit attributa potestas. » comme certaines censures, le mariage, etc.
L'exclusion des princes séculiers pour édicter
des lois en matière purement ecclésiastique est § IV. Constitutions apostoliques.
absolue. Mais, commandantà des chrétienset chré- On donne le nom de Constitutionsapostoliquesà
tiens eux-mêmes, ils doivent faire des lois pour certaines décisions des Papes en matière de
protéger la foi chrétienne et faire observer la foi et de discipline, rendues sous forme de Brefs
discipline de l'Eglise : « Non quod imperatorem ou sous forme de bulles.
leges (quibus saepe Ecclesia utitur contra hsere- Les constitutions apostoliques ou pontificales,
ticos, saepe contra tyrannos atque contra pravos dit Mgr Gousset, sont obligatoires indépendam-
quosque.defenditur,dicamus penitus renuendas, ment de l'acceptation des évêques. Il suffit
etc. » (C. 1, dist. 10.) «Sententia contra leges ca- qu'elles aient été promulguées à Rome. Cepen-
nonesve prolata, licet non sit appellatione sus- dant les évêques peuvent, pour de graves rai-
pensa, non potest tamen subsistere ipso jure. » sons et dans des circonstances exceptionnelles,
(C. I, de Sententiaet Rejudic.) D'où Fagnan sou- demander au pape d'en suspendre l'exécution
tient avec raison sur ledit chapitre, Ecclesia pour leurs diocèses respectifs, mais il faut, au
sanctx Marix, que les législateurs laïques ne moins, qu'en pareil cas ils fassent connaître à
peuvent avoir sur les biens et la personne des leurs diocésains l'autorisation accordée par le
clercs aucune sorte de 'juridiction : d'abord, Pape.
« in odiosis absque dubio, dit-il, clerici non
CONSTITUTION CIVILE DU CLERGE.
veniunt appellatione populi, et hoc est commu-
nis opinio. » (C. Si sententia, de Sent, excom.,in On appelle Constitutioncivile du clergé, la loi
6°). Si la loi du prince est juste et utile au bien schismatique des 12juillet, 24août 1790.Comme
commun, alors, dit ce même auteur, les clercs cette loi ne vit plus qu'à l'état de souvenir et
étant citoyens et membres de la république, qu'elle n'a aucun intérêt pour notre époque,
seront soumis à la loi commune, ex dictamine et nous ne la reproduisons pas.
vi directiva rationis tantum. CONSULTE.
§ II Constitutions ecclésiastiques. La S. Consulte était, avant que les Piémon-
Régulièrement, on distingue trois sortes de tais se fussent emparés de Rome, le tribunal su-
constitutions ecclésiastiques : la première com- prême et prélatice qui révisait en dernier ressort
prend les ordonnances des conciles ; la seconde les jugements des autres tribunaux et les cassait
les constitutions et les décrets des papes faits au besoin ; c'était le tribunale criminel supéême
hors des conciles, et la troisième les ordonnan- la cour de cassation.
ces des évêques. Elle se divisait en deux sections composées
Les ordonnances et décisions des conciles sont chacune de cinq juges, sans compter l'avocat
plus particulièrement appelées canons , nom général et le chancelier.
de Canon, qui signifie règle, ne sera jamais
donné improprement à toute loi ecclésiastique CONSULTEUR.
qui tient lieu de règlement dans l'Eglise. Pour On appelle consulteurs,dans les Congrégations
les ordonnances des papes, il y en a de trois romaines, des théologiens et des canonistes nom-
espèces : les décrets,les décrétaleset les rescrits. més à vie par le pape (le plus souvent sur la pré-
Les décrets sont les règlements que le pape fait sentation des congrégations) et aux lumières
de son propre mouvement pour le bien géné- desquels les Congrégations recourent dans pres-
ral. Les décrétales sont des constitutions que que toutes les affaires, excepté les causes conten-
font les papes, sur la relation des évêques ou tieuses et criminelles. Les consulteurs fournis-
de quelques autres personnes qui se sont adres- sent un votumsur lequel les Congrégations des
sées au Saint-Siège, pour la décision d'une cardinaux appuient toute décision motivée.
affaire particulière, mais dont la solution peut Toutes les Congrégations n'ont pas le même
devenir une règle générale. Les rescrits sont, mode de prendre les votes de leurs consulteurs.
comme nous l'expliquons sous ce mot, des ex- Quelques-unes ont coutume de les convoquer à
péditions qui se font à Rome en faveur de cer- des délibérations communes, pour recueillir
taines personnes seulement et pour une affaire leurs votes collégialement ; les autres appellent
tout à fait particulière. individuellement un des consulteurs à donner
CONTRAINTE 561
son avis sur la question spéciale qui lui est sou- g II. Contestation en cause.
mise. C'est ainsi qu'il y a au S. Office et à l'In- Suivant le droit romain, une cause était cen-
dex des congrégations de consulteurs. sée contestée au moment que le juge en avait
Ala S. Congrégation des Rites,les consulteurs, eu connaissance. Par le droit canon, une citation
dans les cas de béatification et de canonisation, judiciaire suffit pour former le litige et rendre
interviennent avec les cardinaux aux congréga- la chose comme un gage de la justice, à quoi
tions antipréparatoires, préparatoires et généra- l'on ne peut toucher tandis qu'il est dans ses
les,qui se tiennent sur les vertus, les miracles des mains; mais on doit savoir que par ce même
serviteurs de Dieu. Cette congrégation procède droit, les citations sont toujours accompagnées
autrement quand elle traite de quelque affaire de la communication des titres. (C. Olim, deCau-
consultative relative aux cérémonies et aux ri- sis.) La trente-huitième règle de là chancellerie:
tes : elle consulte alors individuellement les Non stetur commissionipost conclusionem',défend
maîtres des cérémonies pontificales, et leur vote, d'avoir égard aux commissions apostoliques al-
qu'ils émettent par écrit, est communiqué aux léguées après la conclusion de la cause, c'est-à-
cardinaux plusieurs jours avant la congrégation dire quand le procès est en état, et que les par-
générale avec les autres feuillets des causes qui ties ne peuvent plus avancer aucune raison de
doivent y être traitées. C'est aussi la pratique droit ni de fait, à moins qu'il n'y soit dérogé
que suit la S. Congrégation des évêques et Ré- par la commission même, comme c'est presque
guliers, quand elle traite d'une affaire qui re- de style : « Item statuit et ordinavit, quod in
quiert le vote de ses consulteurs. Jusqu'en 1834, commissionibus de justifia, seu mandatis etiam
cette dernière Congrégation n'avait pas de con- consistorialibus, per eum seu de ejus mandato,
sulteurs. vel auctoritate in causis in quibus conclusum
La S. Congrégation du Concile ne fait in- existât in posterum concedendis, etiamsi in eis
tervenir les consulteurs que quand il s'agit de de conclusione hujusmodi implicite vel explicite
réviser les conciles provinciaux. Le secrétaire mentio facta fuerit, nihil censeatur esse conces-
remplit cet office dans les affaires ordinaires, sum.nisi perconcessionem commissionis hujus-
en rédigeant le feuillet qu'il distribue aux car- modi derogetur expresse. »
dinaux avant chaque congrégation générale, et Les effets de la contestation en cause sont
les secrétaires des autres Congrégations ont la considérables, c'est comme un contrat par le-
même faculté. quel les parties s'obligent à l'exécution du ju-
11y a beaucoup de religieux parmi les consul- gement qui interviendra. Le défendeur, qui
teurs. Comme les réguliers sont, toute leur vie, était, en bonne foi auparavant, est constitué eu
soumis à l'obéissance de leurs supérieurs, le pape mauvaise foi par la contestation. Les qualités
Clément X ordonna de n'en prendre qu'un par des parties et leurs demandes demeurent éta-
ordre religieux. blies, en sorte qu'il n'est plus permis d'y rien,
Le religieux qui est consulteur ne peut être changer, si ce n'est qu'il intervienne un juge-
envoyé par ses supérieurs dans un couvent hors ment qui admette à plaider enune autre qualité;
de Rome. auquel cas celui qui change de qualité doit les
On peut être en même temps consulteur de dépens de l'accident. Telle était la procédure
plusieurs congrégations. suivie autrefois dans les cours ecclésiastiques.
Dans quelques ordres monastiques, on nomme
CONTINENCE.
consulteurs des religieux chargés de transmettre
des avis au général, et qui sont comme son con- '(Voirlemot: Célibat.)
seil. CONTRAINTE.
CONTENU A NT. L'Eglise s'est constamment interdit tout moyen
C'est la même chose que concurrent. de contrainte pour convertir les juifs et les
(VoirConcurrent,
Concours.) païens à lafoi chrétienne. Elle veut qu'on n'em-
CONTESTATION. ploie à leur égard que des motifs de persuasion.
Cependant, en s'abstenant de toute contrainte
On entend par contestation les différends qui directe, elle adéterminé avec une précision toute
peuvent survenir et une sorte de procédure qu'on spéciale, les conditions suivant lesquelles lebap-
désigne sous le nom de contestation en cause. tême qu'on défend en général, sous les peines
§ I. Contestation, différend. les plus sévères, de conférer aux enfants des
Le moyen de terminer les contestations entre juifs contre le gré de leurs parents, peut leur
ecclésiastiques, c'est d'employer l'arbitrage. être administré en certaines circonstances.
Voirlemot: Arbitrage. Voirle mot: Baplème.
1. 36
562 CONTRAT DE MARIAGE
CONTRAT DE MARIAGE. mariage de quelque façon que ce soit. »
Au sens théologique et canonique, le contrat Léon XIII a affirmé la même doctrine dans
de mariage entre chrétiens n'est autre chose son encyclique Arcanum divinx Sapientix du
lue le sacrement de mariage, car ces deux 10 février 1880 : « Il faut admettre comme
notions s'identifient et ne peuvent se séparer. ayant été enseigné par les Apôtres, ce que nos
Tout mariage validoment conclu entre chré- saints Pères, les conciles et la tradition de l'E-
tiens est donc un sacrement et, s'il ne l'était glise universelle ont toujours enseigné, à savoir
pas, il n'y aurait plus contrat de mariage. que Notre-Seigneur Jésus-Christ a élevé le ma-
Cette thèse est une vérité catholique et elle riage à la dignité d'un sacrement;... Jésus-
s'appuie tant sur l'enseignement de l'Eglise Christ, a confié à l'Eglise toute la discipline
que sur la nature même du mariage. Dans concernant le mariage. » Cette proposition est
l'allocution du 27 septembre 1832, Pie IX a de foi, puisque le concile de Trente a prononcé
dit : « Parmi les catholiques, quelqu'un peut- l'anathème contre ceux qui enseigneraient le
il ignorer que le mariage est véritablement et contraire (Sess. XXIV de réf. matrim. can. 12):
proprement un des sept sacrements de la loi « Si quelqu'un dit que les causes qui concer-
«'vangélique institués par Notrc-Seigneur Jé- nent le mariage n'appartiennent pas aux juges
sus-Christ, de sorte qu'il ne peut y avoir ecclésiastique, qu'il soit anathème. »
parmi les fidèles de mariage qui ne soit en Les jansénistes et les régalistes ont pré-
même temps un sacrement ; qu'entre chrétiens tendu que cette définition ne pouvait les at-
l'union de l'homme et de la femme, hors du teindre parce que 1° sous la dénomination de
sacrement, quelles que soient d'ailleurs les juges ecclésiastiques, on peut comprendre les
formalités civiles et légales,- ne peut être au- princes chrétiens séculiers dont l'autorité est
tre chose que ce concubinage honteux et fu- également sacrée, puisque le concile n'a pas
neste tant do fois condamné par l'Eglise? D'où désigné davantage qui, dans l'espèce, est juge
il suit manifestement que le sacrement ne ecclésiastique ; 2° le concile n'a pas défini d'où
peut se séparer du lien conjugal. » Le Syl'a- ce pouvoir vient aux juges ecclésiastiques; on
hus condamne les propositions suivantes ex- peut donc admettre qu'il leur vient par suite
traites des oeuvres de Jean Népomucène Nuytz, d'une concession que leur font les princes sé-
professeur à l'université royale de Turin, dont culiers; 3° enfin le concile n'exclut pas le pou-
les Institutions deDroit ecclésiastiqueet le traité de voir simultané de l'Eglise et de l'Etat dans les
Droit ecclésiastiqueuniversel avaient déjà été cen- causes matrimoniales. Ces trois raisons furent
surés et prohibés par la constitution Ad apos- reçues et défendues au pseudo-synode de Pis-
tolicae sedis du 22 août 1831: « Le sacrement de toie, en 1786; Pie Viles réfuta et les condamna
mariage n'est qu'un accessoire du contrat et dans le bref du 17 septembre 1788,ad Episc. Mo-
peut en être séparé, et le sacrement lui-même julen. et dans la bulle Audorem fidei.
ne consiste que dans la seule bénédiction nup- Le pouvoir séculier ne peut donc considérer
tiale. » (Prop. 66.) — « Parla force du contrat comme non valide, ou annuler un mariage
purement civil, un vrai mariage peut exister qui a été contracté suivant les lois de l'Eglise,
entre chrétiens; il est faux ou que le contrat ni regarder comme illégitimes les enfants qui
de mariage entre chrétiens soit toujours un naîtraient de cette union. D'un autre côté, les
sacrement, ou que ce contrat soit nul en de- catholiques ne peuvent regarder comme va-
hors du sacrement. » (Prop. 73). lide un mariage contracté suivant les lois ci-
Le contrat matrimonial ne peut donc être viles mais contre les dispositions substantielles
séparé du sacrement, comme l'ont enseigné les de l'Église. Sous le nom général de causesma-
régalistes afin de le soumettre à la puissance trimoniales, il faut comprendre principalement
séculière, car il est par sa nature même le si- tout ce qui concerne le lien matrimonial (vin-
gne extérieur du sacrement qui consiste préci- culum) et subsidiairement ce qui est en con-
sément dans la conjonction réciproque des nexion avec le lien matrimonial, comme la
époux ou dans le contrat qui les donne irré- légitimité des enfants, les fiançailles, les em-
vocablement l'un à l'autre. pêchements de mariage, les proclamations des
La conséquence de cette doctrine, c'est que bans, les sentences de séparation quoad torum
les causes matrimoniales ressortissent exclusi- et cohabitationem.
vementau for ecclésiastique et, comme l'a dit Les autres questions qui peuvent s'élever à
Pie IX dans l'allocution citée plus haut, « c'est l'occasion du contrat matrimonial, comme
à la puissance de l'Eglise qu'il appartient ex- celles qui concernent la dot, le droit de suc-
clusivementde régler les choses qui touchent au cession, l'honneur de la famille, sont pure-
CONTUMACE 563
ment civiles et appartiennent comme telles « Non oportct quemquam judicari, vel damnari,
aux tribunaux laïques, car ils n'ont de rela- priusquam legitimos habeat praesentes accusa-
tion avec le mariage que pour ses effets civils. tores : locumque defendendi accipiat ad ab-
Les canonistes accordent aux juges séculiers luenda crimina. » (Can. S.)
la faculté de connaître des causes spirituelles Ce n'est pas, sans doute, dans le sens de ce
à condition de ne les considérer que comme dernier canon, parce qu'on refuse de présenter
de purs faits : ainsi par exemple s'ils exami- à l'accusé ses accusateurs ou qu'on lui interdit
nent si oui ou non le mariage a été contracté l'entrée du lieu où il pourrait se défendre, qu'on
ou s'il y a eu seulement concubinage. Et la rai- le condamne dans sa contumace ; c'est parce
son de cette doctrine est que le fait en lui-même, qu'il refuse lui-même de se procurer ces avan-
considéré uniquement comme tel, n'emporte tages, et que, parce qu'ayant trouvé le moyen
avec lui qu'une constatation purement maté- de désobéir à la justice, il serait inconvenant
rielle, accessible comme telle non moins au que sa désobéissance lui servît aussi de moyen
magistrat séculier qu'au juge ecclésiastique. pour se soustraire à la punition de ses crimes;
De plus, dit Mgr Santi (lib. iv, lit. I, n. 108), c'est l'interprétation qu'ont donnée les papes
les autorités civiles peuvent exiger que les mêmes aux canons qu'on vient de lire; ils ont
mariages soient inscrits dans les registres pu- décidé que, pourvu qu'un accusé fût cité et re-
blics dé l'Etat; elles peuvent aussi mettre aux cité avec les formalités requises, on pourrait le
mariages des conditions qui n'en affectent que condamner dans son absence, si, d'ailleurs, le
les effets civils, comme, par exemple, exclure crime qu'on lui impute est bien clairement
des successions les enfants nés d'un mariage prouvé. (Can. 10, Deccrnimus,caus. 3. quaest.9;
conclu au mépris des lois de l'Etat. Il leur cap. Veritatis, de Voloet Contumacia.)Le premier
appartient enfin d'établir des lois concernant de ces canons est conçu dans des termes que la
la dot et les privilèges civils des époux, mais glose corrige ; il paraît n'exiger que la contu-
la nullité ou la valeur du contrat matrimonial mace, et une partie des preuves pour tout titre
de condamnation: « Nam manifestum est confi-
proprement dit dépend toujours et entière-
ment de la juridiction de l'Eglise, parce que ce teri, eum do,crimine qui indulto, et toties dele-
contrat est un sacremeit. gati judicis, purgandi se occasione non utitur :
nihil enim interest, utrum in proesenti examine
non omnia quae dicta sunt comprobentur; cum
CONTUMACE. confessione procurata toties
ipsa quoque pro
I
Le droit canon appelle contumace, quiconque constet absentia. « Il serait dangereux, injuste
est assigné en justice et n'y paraît pas. même, de suivre la lettre de celte décision; si
Plusieurs canons, tant de l'ancien que du nou- régulièrement l'absence d'un accusé dépose con-
veau droit, permettent de procéder contre un tre lui, elle n'est pas toujours l'effet de la con-
criminel et de le condamner dans l'état de sa viction où il est de son crime, mais celui d'une
contumace, si parla déposition des témoins, ou juste crainte qu'inspire la calomnie: « Calumnia
autrement, il est prouvé qu'il soit coupable. Les turbat sapientem. » L'esprit de l'homme est sus-
canons qui défendent de condamner un absent, ceptible de tant d'illusions, qu'il peut aisément
et qui sont en assez grand nombre, ne doivent prendre le vrai pour le faux, et le faux pour le
s'entendre que de l'absent non appelé et contre vrai. Le juge même le plus intègre n'est pas à
qui on n'a pas gardé les formalités nécessaires l'abri de ces cruelles équivoques, surtout dans
pour le constituer dans une demeure véritable- les-accusations formées par d'habiles ou puis-
ment condamnable ; c'est donc ainsi qu'il faut sants imposteurs. Un innocent d'ailleurs, pro-
entendre ce que disent ces canons du décret: voqué par des ennemis, doit d'autant plus redou-
« Absente adversario non audiatur accusator, ter le lieu humiliant de sa défense, qu'on y voit
nec sententia, absente alia parte, a judice dicta rarement des gens de son espèce. C'est par tou-
ullam obtineat firmitatem. » (Cap. 11 caus. 3, tes ces raisons et par beaucoup d'autres, que les
quaest.9.) jurisconsultes conseillent la fuite à tout accusé,
«Absens vero nemo judicetur, quia et divinse et que la glose du canon cité dit sur ces mots
ethumanse hoc prohibent leges. » (Cap. 13, caus. non omnia: « Dum tamen illa quaeprobata sunt
3, quaest.9.) sufficiant ad condemnationem, et omnia simul
« Omnia quae adversus absentes in omni ne- objiciuntur, ut dist. 23. c. Illud, arg., c. Placuit.,
gotio, aut loco aguntur aut judicantur, omnino ead. caus. et quaest. »
evacuentur; quoniam absentem nullus addicit, Il ne suffit donc pas qu'un accusé soit absent
nec ulla lex damnat. » (Cap. 4, caus. 3, qu. 9.) pour le condamner. Son absence peut servir
56i CONVENTUALITÉ
d'indice, mais non pas de preuve; il faut même, CONVENTICULE.
pour que l'absence produise des soupçons, qu'elle
soit opiniâtre, et qu'on ait fait toutes lesperqui- Nous prenons le mot de conventicule, comme
sitions possibles de sa personne. Le chapitre Ve- synonyme de collège en général, mais dans un
sens
nerabilis, de Doloet Contumacia,veut qu'après ces in odieux, conformément au chapitre Multis,
perquisitions, si elles sont inutiles, on affiche et princip., et à la loi Conventicula,eod. de Episc.
la citation aux portes de l'église où le contumace cleric.Ce mot signifie parmi nous une assem-
avait son bénéfice : « Et si non poterit inveniri, blée secrète et illicite, où l'on pratique des me-
faciant ut citationis edictum per ipsos vel alios nées et des brigues ; on l'entend même de toute
apud ecclesiam tuam publiée proponatur. » Le assemblée ou séditieuse ou irrégulière : c'est le
pape Boniface VIII publia une bulle, en 1301, synonyme de conciliabule.
qui porte que toutes personnes, de quelque qua- CONVENTUALITÉ.
lité qu'elles soient, ducs, princes, rois, empereurs,
évêques, archevêques, cardinaux, sont obligés La conventualité,qu'il faut prendre ici pour cet
de se présenter devant le pape quand ils ont été état de vie commune que mènent des religieux
assignés par un acte public à l'audience de la assemblés en même lieu, est, ce semble, de l'es-
chambre apostolique, affiché dans le lieu où le sence même des corps religieux. Dès l'établisse-
pape se trouve avec sa cour, dans le temps que ment des monastères, où les solitaires se rédui-
l'acte est expédié; il ajoute que ceux qui refuse- sirent en communauté, il ne fut plus permis aux
ront de comparaître sur cette espèce d'assigna- religieux d'en sortir pour vivre de nouveau dans
tion seront traités comme contumaces, et qu'on la solitude ; il fallait pour cela la permission de
instruira contre eux leur procès, surtout s'ils l'abbé, lequel, en l'accordant, se réservait tou-
étaient dans un lieu dont on ne pût approcher jours le pouvoir de rappeler l'anachorète au cloî-
en sûreté, ou qui empêchât qu'on ne leur donnât tre. Telle a toujours été, et telle est même en-
l'assignation. (Extrav. Remnon novam,dé Doloet core la discipline monastique, sans que jamais
Contumacia.) le religieux puisse prescrire contre elle. Si l'in-
Ces formalités remplies suivant le chapitre troduction des bénéfices réguliers a fait rompre
Veritatis de Dolo et contumacia, le juge doit exa- la conventualité aux religieux de certains or-
miner la nature des preuves qui résultent de la dres, l'intention de l'Église est qu'elle se réta-
procédure, et ne condamner le contumace que blisse, et les conciles n'ont pas manqué de faire,
quand il y a suffisamment de quoi le convain- à ce sujet, les règlements nécessaires : ils ont or-
cre sans l'entendre. Une doit pas même se faire donné que, quand les revenus d'une abbaye ou
une peine de l'absoudre quand il n'a que son d'un prieuré seraient suffisants pour l'entretien
absence contre lui : « Tune absentia rei, Dei de dix ou douze religieux, au moins, la conven-
praesentia repletur. » tualité serait incessamment rétablie. (Concilesde
Le code d'instruction criminelle parle des con- Rouen, en 1881, et de Bordeaux,en 1624.)
tumaces dans les articles 46b à 478. Nous avons fait observer que la conventualitê
Dans les anciennes ofûcialités, en jugeant par est imprescriptible. C'est une maxime si vraie,
contumace, on prononçait toujours suivant la que tous les canonistes conviennent que la seule
rigueur des canons. Le premier jugement por- trace qui en reste, suffit pour réclamer sans
tait que les défauts et contumaces étaient dé- cesse son rétablissement; sur quoi l'on a fait
clarés bien et duement obtenus, contre un tel cette distinction, en matière de bénéfices régu-
absent et fugitif; et pour le profit, que le récole- liers, que tous prennent leur origine dans la
ment vaudrait confrontation. Ensuite, on don- conventualitê des moines, savoir, qu'ils sont
nait un second jugement, par lequel l'accusé conventuels, actu ou habitu, c'est-à-dire que
était déclaré atteint et convaincu de tel crime, quand il y a des religieux dans l'abbaye ou
avoir encouru telle censure, être privé de tous prieuré, y en eût-il un seul, le bénéfice est con-
ses bénéfices ; et le reste des peines qui con- ventuel actu, parce que « très faciunt colle-
venaient au cas. Voilà la procédure de la gium, sed in uno retinetur jus collegii. » (Glos.,
contumace entière ; mais elle était rare en in c. Nobis fuit, verb. Conventualide Jure patron.)
cour d'Église. Comme il n'y avait point de U en est de même d'une paroisse ; suivant le
peine afflictive, on ne craignait pas tant de canon Unio 10, quaest. 3, il faut dix paroissiens
s'y présenter; et ceux qui étaient poursuivis pour former une paroisse, mais il n'en faut
pour le délit commun simplement, n'étaient qu'un seul pour la conserver : In ipso solo
pas d'ordinaire des vagabonds ni des fugi- residet tota potentia collegii.La raison est que ce-
tifs. lui là est considéré comme représentant le col-
CORDON 565
lège ou la communauté, et non comme seul Le pape saint Pie V avait publié une bulle
particulier, nonut singulus, sed ut unkersus. pour défendre aux communautés de filles, de
Le bénéfice est conventuel habitu, lorsque la recevoir des soeurs converses, sous peine de
conventualitê ou le bénéfice même n'a jamais nullité de profession. Quelques conciles avaient
été supprimé de droit, de jure, c'est-à-dire de renouvelé cette défense; mais on voit, malgré
l'autorité du supérieur avec les formalités re- ces défenses, des soeurs converses dans presque
quises par une sécularisation ou autrement,, tous les couvents de religieuses *.
soit que les religieux soient morts ou disper- Le concile de la province de Tours, tenu à
sés : « Aut collegium, dit Panorme, fuit des- Rennes en 1849,décide que les frères convers et'
tructum auctoritate superioris, et ipso facto les soeurs converses, dans les communautés où
.extinguntur omnia jura et privilégia collegii, il en existe, doivent recevoir la communion
alias in ecclesiastico collegio conservetur jus pascale dans l'église du monastère.
apud parietes » (In c. 2, n. 12, de Postal, prxlat.)
C'est un usage reçu dans plusieurs ordres, et CONVOI.
autorisé par des bulles, que les religieux sont (Voirle mot: Sépulture.)
affiliés à telle ou telle maison de leur ordre, CORDON.
c'est-à-dire qu'ils sont attachés si particulière-
ment à un monastère, que leurs supérieurs ne Bien des fidèles aiment à porter sur eux le
peuvent, sans de justes motifs, les en tirer pour cordon de quelque saint sous la protection du-
les envoyer ailleurs. quel ils se sont mis. Les cordons auxquels l'E-
CONVERS, CONVERSES. glise a accordé des bénédictions sont ceux de:
On voit sous le mot Moine, l'état des anciens la sainte Vierge, de S. Joseph, de S. François
d'Assise et de S. Thomas d'Aquin.
religieux qui étaient tous laïques ; on ne dis- « Le cordon de la Sainte Vierge, dit Mgr. Bar-
tingua les frères convers des frères de choeur, blanche. Pour
que quand ces derniers furent élevés au sacer- bier de Montault, est de couleur
doce et que dans ce nouvel état ils furent em- les saints, il varie suivant la couleur propre
au saint. La bénédiction en est très courte et
ployés à des fonctions plus relevées que le reste
des moines toujours bornés au travail des mains. n'a qu'une oraison.
Le nombre de ceux-ci était autrefois sans com- « La bénédiction du cordon de Saint-Joseph
paraison plus grand qu'il n'est aujourd'hui : il est plus longue et plus solennelle, car elle
est devenu même insensiblement si petit que leur compte jusqu'à cinq oraisons et l'on y emploie
état a fait parmi les docteurs un grand sujet l'encens.
de controverse. On a douté si un laïque était « Pour pouvoir bénir ce cordon, il faut obte-
véritablement religieux dans un monastère où nir préalablement l'autorisation de la Congré-
la règle porte que ceux qui sont admis aspire- gation des Rites 2.
ront aux ordres sacrés et chanteront au choeur. « Le cordon de Saint-François est très popu- ;
De là viennent les noms de convers, de donnésou laire. Pour sa bénédiction le manuel" français!
d'oblats pour désigner ceux qui n'entrent dans prescrit que l'étole soit blanche.
un monastère que pour être employés aux fonc- « Le prêtre, après avoir aspergé le cordon,
tions extérieures et temporelles de la maison. en ceint celui qui doit le recevoir, en signe de
La plupart des docteurs ne distinguent pas les continence et de chasteté.
convers des oblats ou donnés; ils font abso- « Le cordon de saint Thomas d'Aquin se
lument dépendre leur état et leurs obliga- porte aussi pour obtenir la chasteté et pureté
tions de la nature de leur engagements. Na- du corps et de l'esprit. Le pouvoir de le donner
varre (de ReguL, cons. 18, n. 9 et seq.,) appelle et de le bénir s'obtient du général des domini-
moine ou religieux, celui qui fait profession cains. (Ce sont les Dominicains qui confèrent ce
dans une règle approuvée, dans la vue de se cordon avec faculté d'inscrire dans la Milicean-
faire prêtre et de chanter au choeur. Il appelle gêtique).
convers celui qui prend les mêmes engage- « La dévotion du cordon de S. François d'As-
ments avec cette différence qu'il se propose de sise fut établie pour les fidèles qui, ne pouvant
s'occuper dans le monastère, sans être obligé pas s'enrôler sous la bannière de l'ordre fran-
de suivre le choeur. Enfin il dit que l'oblat est ciscain, voulurent au moins se lier au patriar-
celui qui, sans faire aucune profession et sans
1.Mémoires duclergé,tom.iv, pag.1678.
changer d'habit, fait au monastère une dona- 2. MgrBarbierdeMontault rapporteles formulesde bénédio-
tion de tous ses biens pour y vivre retiré du tiondeces quatrecordonsdansLaSemainedu Clergé,tom.XVII
monde, le reste de ses jours. prages587a 50O.
566 CORPS, COMMUNAUTÉ
che d'Assise d'une certaine manière, s'affilier à poraux soient tenus dans une grande propreté.
sa famille, et se ceindre d'une corde, en vue de Ils doivent être lavés par un ecclésiastique dans
lui exprimer leur dévotion et de mériter une les ordres sacrés avant d'être réunis pour les
plus grande part à sa bienveillance. S. Domini- blanchir : cette première eau doit être jetée
que porta religieusement jusqu'à la mort la dans la piscine ou dans le feu. Chez les Grecs, et
pauvre corde qu'il avait obtenue de S. François, nous le faisons remarquer comme preuve du
à force d'amicales instances. François II, duc grand respect qu'ils ont pour la sainte Eucha-
de Bretagne, entoura ses armes du cordon de ristie, on se sert du corporal jusqu'à ce qu'il
S. François, et le roi François 1eren enrichit le soit tellement vieux ou sale qu'il ne puisse plus
collier de l'ordre de Saint-Michel. Sixte V, par servir; alors ou le brûle, et les cendres sont dé-
la bulle Ex supernx, du 19 novembre 1.i8o,insti- posées dans quelque endroit de l'église où l'on
tua l'arohiconfrérie du Cordon. Par une seconde ne puisse les fouler aux pieds. Il faut observer
bulle, Divimecharitatis, du 29 août 1387, il enri- que chez eux le corporal est consacré, tandis que
chit l'archiconfrérie de nouvelles indulgences. chez nous il est simplement bénit.
Plusieurs Souverains Pontifes, successeurs de Un décret de la congrégation des rites, ap-
Sixte V, confirmèrent ces concessions. prouvé par Pie VII, proscrit l'usage des toiles
« Le but des confréries du cordon de S. Fran- de coton pour les corporaux, purificatoires, nap-
çois est d'honorer d'un culte tout particulier pes d'autel, aubes et amicts. Tous ces linges
l'humble, le pauvre, le sôraphique François doivent être de fil de lin ou de chanvre. Il faut
d'Assise; de se pénétrer de son esprit et d'ob- une toile fine et unie sans aucun ornement ni
tenir, par sa puissante entremise, tant les grâ- broderie.
ces personnelles dont on a besoin, que les grâ- Un corporal reprisé ne peut plus servir, à
ces nécessaires à la sainte Église. cause des inconvénients qui pourraient en ré-
Les confrères n'ont aucune obligation spé- sulter pour les saintes parcelles.
ciale à remplir sous peine de péché; en n'ob- La bénédiction du corporal est faite par l'é-
servant pas les règles, on ne pèche pas plus vêque ou par un prêtre qui en a reçu la per-
qu'on ne le ferait en négligeant une autre bonne mission. Ce-linge ne doit pas être regardé comme
oeuvre. Ils doivent porter habituellement le cor- bénit pour avoir été employé à la célébration des
don autour de la ceinture, ou tout au moins sur saints mystères. On ne pourrait excuser de pé-
leur personne. Le quitter entraînerait la sus- ché mortel celui qui dirait la messe sans cor-
pension des faveurs spirituelles de la confrérie. poral, ou sans un corporal bénit, à moins qu'il
Un usage, de pure dévotion parmi les membres n'y eût nécessité de célébrer '. S'il y avait né-
du cordon, c'est de réciter chaque jour six fois cessité de dire la messe, le prêtre pourrait cé-
le Pater, l'Ave et le Gloria Patri, cinq fois en lébrer avec un corporal non bénit, ou il pour-
l'honneur des cinq plaies du Sauveur et des rait le bénir, dit le cardinal Gousseti, d'après
stigmates de S François, et une fois pour le le consentement présumé de l'ordinaire.
Souverain Pontife. Les confrères doivent s'ap- Le corporal perd sa bénédiction quand il est
pliquer à honorer S. François dont ils portent déchiré de manière à ce qu'aucune de ses par-
la livrée, se détacher des biens passagers d'ici- ties ne puisse plus contenir l'hostie et le ca-
bas, mortifier leurs passions, et n'aspirer'qu'à lice.
aimer et servir Dieu. Les oeuvres de piété et de
charité qui leur sont particulièrement recom- CORPS, COMMUNAUTÉ.
mandées sont les suivantes : Méditer souvent Il est aisé de confondre ces différents mots :
sur les fins dernières, sur les perfections de corps, communauté,collège, confrérie, congrégation,
Dieu, sur la vie de Notre-Seigneur; fréquenter couvent.Pour en fixer le sens, il faut dire que
les sacrements, assister aux offices, accompa- corps est un mot générique qui comprend toutes
gner le saint Viatique, réconcilier les ennemis, les différentes espèces de sociétés d'hommes qui
secourir les indigents. » forment des communautés. Collèges'entend d'une
I1 y a absolution et indulgence plénière pour université d'hommes où l'on ne fait acception
les cordigères à l'article de la mort. de personne. Confrérie signifie une société parti-
culière de plusieurs personnes, qu'un motif de
CORPORAL.
piété et de charité lie et assemble dans une
Le corporal est un linge carré, assez ample église. Enfin, congrégationse dit en général d'une
pour qu'on puisse commodément placer dessus société particulière de plusieurs personnes. On
l'hostie, le calice et le ciboire. 1. SaintAlphonse
deLiguori,lib.vr,o.387.
La discipline ecclésiastique veut que les cor- S. Théologie tom.n, pag.991,4<édiU
morale,
COTTA 567
donne ce nom aux assemblées régulières des L'ar. 1er du décret du 8 janvier 1804(17 nivose
cardinaux à Rome, à certains ordres religieux, an XII) porto : <cTous les ecclésiastiques em-
et même aux confréries de piété. ployés dans la nouvelle organisation, savoir, les
CORPS DE DROIT CANON. évêques dans leurs diocèses, les vicaires géné-
(Voirlemot: Droitcanon.) raux et chanoines dans la ville épiscopale, et
autres lieux où ils pourront être en cours de vi-
CORRECTION. site, les curés, desservants et autres ecclésiasti-
Le droit de correction, dans l'Église, doit se ques, dans le territoire assigné à leurs fonctions,
rapporter aux supérieurs ecclésiastiques sécu- continueront à porter des habits convenables à
liers et réguliers, et même aux juges laïques. leur état suivant les canons, règlement t usa-
L'évêque a de droit commun le pouvoir de ges de l'Église. »
corriger tous les clercs de son diocèse, séculiers Un prêtre interdit et expulsé par l'Evoque des
et réguliers, en corps et en particulier. (Conc. rangs de son clergé, pour cause grave, ne pour-
Trid.,sess.XlV,de Réf. c. iv1.) A l'égard des régu- rait revêtir la soutane, sans donner lieu à l'ap-
liers, il faut voir les mots : Abbés, Religieux, plication de la pénalité ci-dessus mentionnée.
Général, Obéissance. Mais pour contraindre, par la voie du ministère
En France, les laïques exercent le droit de cor- public, un prêtre à déposer l'habit, il serait né-
rection sur les ecclésiastiques qui sont soumi3 cessaire d'insérer la défense dans l'acte même
comme les autres citoyens au droit commun. d'interdiction.
Le concile de Trente, (sess. XIII, de Réf. c. I,) « Quand la loi autorise un costume, disait le
prescrit une forme d'exercer la correction dont ministre des cultes, le 14messidor an X,elle s'en-
les supérieurs ecclésiastiques ne devraient ja- gage à le protéger contre les insuites, les inju-
mais s'écarter, et il déclare les jugements rendus res, et même contre les actes de ceux qui vou-
en cette matière exécutoires, nonobstant appel. draient se l'approprier sans droit et sans carac-
tère. »
COSTUME ECCLÉSIASTIQUE.
L'article 259 du Code pénal porte : « Toute
Les ecclésiastiques doivent porter un habit personne qui aura publiquement porté un cos-
long; cet habit doit être noir, excepté pour ceux tume, un uniforme ou une décoration qui no
auxquels leur dignité donne le droit d'adopter lui appartenait pas... sera punie d'un emprison-
une autre couleur. Ils sont obligés encore d'a- nement de six mois à deux ans. »
voir les cheveux courts, et de se conformer en Il n'est permis à aucun laïque .de porter le
tout pour le costume à ce qui est ordonné par costume ecclésiastique. Les tribunaux civils ont
les statuts synodaux. (Can. Nonliceat, dist. 23 ; appliqué plusieurs fois cet article 209 du code
Concil.Trid., sess. XIV, de Reform.,cap. 6- 2.) pénal.
1.« Omnes ecclesiarum quiadcorrigendos
proelati, subditorum Il y a des habits particuliers et différents
excossus diligenter intenderedebent,et a quibusnullusclericus, des habits ordinaires, dont les ecclésiastiques
perhujussanctae Synodistatuta,cujusvis privilegii praitextu, tu- doivent se servir
pendant la célébration du ser-
tuscensetur, quominus juxta canonicas sanctiones visitari,
puniri vice divin : il n'est
et corrigipossit;siinecclesiis suisresederint, quoscumque saecu- pas permis à un chanoine de
laresclericos, qualitercumque exemptos, quialiassuaijuridictioni paraître dans le choeur de son église pendant le
subessent, deeorumexcessibus, criminibus et delictis,quoties, et service sans l'habit ordinaire du choeur, et un
quandoopusfuerit,etiamextravisitationem, tanquamadhoo prêtre ne peut célébrer la messe, en quelque en-
Apostolica)Sedisdelegati, corriç:endiet castigandi facultalem ha-
beant,quibuscumque exemptionibus, declaralionibus, consuetudi- droit que ce soit, sans les ornements qui sont
nibus,senlentiis,juramentis,concordiis, quaetanlumsuosobligent destinés pour offrir le saint sacrifice, comme
auctores,
sipsisclcricis,aceorumconsanguineis, capellanis,familia- on le verra au mot : Habit.
ribus,procuratoribus, et aliisquibuslibet, ipsorumexemptorum Pour les costumes des évêques,des cardinaux,
conlemplatione etintuttuminime suffragautibus. » (Concil.Trid.
Sess.XIV,c.4, deRéf.) et du pape, voir ces mots.
2.Quiavero,etsihabilus nonfacitmonachum, oportettamencle-
ricosvestespropriocongruentes ordinisemperdéferre ; ut perde- COTTA.
eentiam habitusextrinseci, morumhonestatem intrinsecam osten-
dant.Tanlaautembodiealiquorum Cotta, diminutif du surplis, qui sert de vête-
inolevittemeritas, religionisquement de choeur au clergé romain. Il est garni
contemptus, ut propriam dignitatem et honorem clericalem parvi
pendentes, vestesetiamdéférant publiée laicales, pedesindiversis episcopi ordinationemet mandatum nondetulerint, persuspensio
ponentes, uuumindivinis in
alterum carnulibus. Propterea omnes nomab ordinibus, acofficio,
et bencticio,
acfructibus,redditibus,
ecclesiasticaepersonoe,quantumcumque exemplae, quaeautinsa- etproventibus nec
ipsorumbeneficiorum, non, sisemel correpli,
crisfuerint,autdignitates, personatus, officia aut beneQcia qualia- denuo in hoc etiam
dtdiqueriut, perprivationem o fficiorum
etbe-
cumquft ecclesiastica obtinuerint, si posUmam ab episcopo suo, neficiorum hujusmodi coerceri
possintet debeant: constitulionem
etiamper edictum publicum, monitifuerint,bonestum babitum démentisV.inConcilio Viennensi
editam,quaeincipit:Quomam,
cleriottlem,illorum ordinietdignitaticongruentem, et juxtaipsius innovaudo, et ampliando.(Conc.Trid.,sees.XIV,c.0, d<H /.)
568 COURONNEMENT DU PAPE
de dentelles, comme l'aube, aux manches et à Le violet,couleur de tristesse, et emblème de
l'extrémité inférieure. la mortification, pour l'Avent, le temps de la
Les maîtres de cérémonies et les chantres de Septuagésime et du Carême, les Quatre-Temps,
la chapelle papale sont en simple colla. les Vigiles et les Rogations.
En été, les chanoines des basiliques majeures Le rose sèche pour deux dimanches : le 3e de
et mineures revêtent la cottapar dessus le rochet l'Avent et le 4e de Carême.
et, de même en tout temps, pour l'administra- Le vert, figure des biens à venir, pour les di-
tion des sacrements. manches ordinaires après la Pentecôte, durant
COTTE MORTE. le temps surnommé de pèlerinage, comme dit
Grimaud.
On appelle ainsi le pécule que laisse à sa mort Le noir, pour le Vendredi Saint et les offices
un religieux curé. des morts.
Voirlemot: Pécule. Le jaune n'est point une couleur liturgique.
COUCHE. Une décision de la Congrégation des Rites
Nous rapportons sous ce mot, que nous pre- du 19 mars 1833, défond l'emploi d'ornements
nons dans le sens d'une femme accouchée de de couleur jaune ou bleue. Cette dernière cou-
quelque enfant, le règlement du pape Inno- leur est cependant concédée en Espagne pour
cent III (in cap. unic, dePurificationepostpartum) : l'office et la messe do l'Immaculée Conception.
t Licet, secundum legem mosaïcam, certi dies
detenninati fuissent, quibus mulierea post par- CouleursPontificales
tum à templi cessarent ingressu, quia tamen Les couleurs pontificales sont le rouge et le
lex per Mosen est, gralia et veritas per Jesum jaune, comme le témoignent les pavillons des
Christumfacta est, inquis quod postquam umbra basiliques etlalivrée du sénat. Mais Napoléon Ier
legis evanuit et illuxit veritas Évangelii : si ayant adopté ces deux couleurs pour ses trou-
mulicres post proleni emissam acturae grutias pes d'Italie, Pie VII, en 1808, choisit le blanc
ecclesiam intrare voluerint, nulla proinde pec- et le jaune qui se sont maintenus depuis. Les
cati mole gravantur, nec ecclesiarum est eisadi- gardes nobles qui les premiers arborèrent la
tus denegandus; ne poena illis converti videatur nouvelle cocarde furent alors , par ordre de
in culpani. Si tamen ex veneratione voluerint l'empereur, incarcérés au château Saint-Ange.
aliquandiu abstinere, devotionem earum non COURONNEMENT DU PAPE.
credimus improbandam. » Dans l'ancienne loi,
aucune femme ne pouvait entrer dans le temple Le couronnementdes papes,qui se fait après leur
qu'elle n'eût laissé écouler un certain nombre élection, est une cérémonie qui regarde plutôt la
de jours pour se purifier, après la naissance d'un qualité de prince temporel que celle de vicaire
enfant. Dans la nouvelle loi, on ne fait point de Jésus-Christ et de successeur de S. Pierre.
aux femmes la même défense; elles peuvent On ne peut donc en fixer le commencement
entrer dans les églises aussitôt après la naissance qu'après que les Souverains Pontifes furent
de leurs enfants. Cependant on ne doit pas les devenus maîtres et souverains du patrimoine
condamner quand, par respect, elles s'abstien- de S. Pierre, par les libéralités de Charlemagne
nent d'y entrer. et de ses successeurs. Le couronnement se fait
La bénédiction des femmes après leurs cou- immédiatement après la bénédiction solennelle
ches ne peut avoir lieu que dans l'église parois- du pape, ou plutôt dans l'acte même de son in-
siale, et elle doit être faite par le curé ou par tronisation. La messe finie, le pape se revêt de
celui qui le représente. (Décis. de la cong. des tous ses habits pontificaux, de ceux-là mêmes
rites, du 10 décembre 1703.) qu'il avait en célébrant la messe, et se rend
sur le degré extérieur de la basilique de S.
COULEURS.
Pierre, où on lui a préparé un siège relevé et
Les couleurs prescrites par la liturgie pour décoré des ornements convenables. Là, le pape
les saints offices sont : s'assied, et un cardinal diacre de sa gauche lui
Le blanc, emblème de la pureté et de la joie, ôte la mitre, pour qu'un diacre de sa droite lui
pour les fêtes de Notre-Seigneur, de la Sainte mette la tiare, appelée par les Romains régne
Vierge, des Confesseurs, des Vierges, des sain- (regnum).Cette tiare est faite de trois couronnes
tes Femmes, et en général de tous les saints et surmontées d'un globe; on en voit partout la
saintes qui n'ont pas souffert le martyre. forme. Le peuple en cet instant chante le Kyrie
Le rouge, symbole de l'ardente charité, pour eleison.Le diacre de la droite publie en latin
la Passion, les Martyrs, le Saint-Esprit. des indulgences plénières, et le diacre de la
COURONNEMENT DU PAPE 569
gauche les publie en langue vulgaire; après après leur couronnement, sont dans l'usage de
quoi on se dispose à la procession pour se. valider par cette règle les grâces accordées par
rendre au palais de Latran; mais comme c'est leurs prédécesseurs, dont la mort a empêché
alors ordinairement fort tard, et que le pape l'exécution : « Item voluit idem D. N. papa
et les cardinaux ont besoin de prendre de la quod concessa per felic. record. Gregorium XV
nourriture, il se fait une espèce de collation et Urbanum VIII, proedecessores suos,v-et de
ou d'ambigu dans la maison de l'archiprêtre. eorum mandato expediantur in forma rationi
Voilà ce que nous avons cru devoir extraire congruit, a die assumptionis suée ad summi
du cérémoniaire romain, avant de parler de apostolatus apieem, et idem quoad concessa
l'usage où sont les papes et les jurisconsultes per pise mémorise Paulum V, etiam prsedeces-
italiens de dater après le couronnement, à sorem suum ad sex menses, dumtaxat ab ipso
l'exemple des empereurs, c'est-à-dire qu'en die incipiendos, observari voluit. »
datant 06 anno pontificatus, le commencement de Amydenius observe sur cette règle qu'elle est
cette année ne se prend que du jour du couron- toujours nécessaire, parce qu'inévitablement à
nement, et non de l'élection, dans lequel cas on' la mort du pape plusieurs affaires restent sus-
dirait : A die suscepti a nobis apostolatusofficii.Cet pendues; on brise alors tous les sceaux, et les
usage est attesté par Corradus 1, mais cet expéditions ne peuvent avoir lieu. Or, dit cet
auteur ne convient pas, avec Riganti, qu'on use auteur, comme il serait injuste qu'une grâce
de demi-bulles dans l'intervalle de l'élection accordée restât sans effet par un défaut de
au couronnement ; il dit que, quoiqu'on brise forme, dont l'impétrant ne peut être responsa-
les sceaux immédiatement après la mort du, ble, les papes "ont établi cette règle dans des
pape, on en forme un autre d'abord après l'é- termes qui en marquent l'équité : « Rationi con-
lection de son successeur, où il y a les images gruit, et convenit honestati, ut ea quae de romani
de S. Pierre et de S. Paul d'un côté, et le nom Pontificisgratia processerunt, etc. » Il suffit donc
du nouveau pape de l'autre, « ab una parte ha- de prouver à Rome que la grâce a été accordée,
bent dictas imagines, ab altéra vero nomen novi sive scripto, sive verbo, avant la mort du pape,
Pontificis, et nihil aliud iinmutatur, nisi data pour que l'on soit fondé à en requérir l'expédi-
supplicationis et litterarum. » Nous disons sur. tion dans les six mois, à compter du jour du
l'article demi-bulle, au mot Bulle, que l'on est couronnement du nouveau pape, ad sex menses,
dans l'usage d'expédier tout par brefs dans ce dumtaxat a die assumptionis.Que si celui à qui la
court espace de temps, ce qui rend la question grâce a été accordée laisse passer ces six mois,
indifférente. il demeure déchu de ses droits; la grâce est
C'est un principe fort ancien et renouvelé par absolument éteinte, à moins qu'il n'ait pu ob-
le pape Clément V (in extrav. commun., Quia tenir l'expédition après l'avoir sollicitée inuti-
nonnulli, de Sent, excom.), que le pape est, in- lement à la daterie, ce qu'il doit prouver.
dépendemment de la consécration et du cou- Rebuffe, qui, dans sa Pratique bénêficiale,a fait
ronnement, vrai et légitime pape du jour de un chapitre particulier de gratia rationi congruit,
son élection; d'où il suit que, dès ce même, dit que les grâces accordées par les prédéces-
temps, il peut gouverner l'Eglise romaine et seurs même médiats du nouveau pape sont dans
exercer les fonctions de la papauté : « Electus le cas de cette règle : « Licet, dit-il, contrarium
tamen sicut verus papa, obtinet auctoritatem teneat glossa, in regul. 6. Innoc. VIII. » Amy-
regendi romanam Ecclesiam, et disponendi denius est du sentiment de la Glose, soutient
omnes facultates illius, quod beatum Gregorium que la règle ne regarde que les grâces accordées
ante suam consecrationem fecisse cognovimus. » par les papes, dont elle fait mention.
(C. 1, distîZ). Clément V, dans l'extravagante, La date du rescrit in forma rationi congruit, est
citée, prononce excommunication contre qui- la même, suivant Rebuffe, que celle de la grâce
conque soutient le contraire. (C. Si quis pecunia accordée, non celle de l'expédition ou du jour
dist. 79; c. Licet de vitanda de Elect.) Le pape du couronnement, à la différence du perinde valere.
nouvellement élu n'entreprend jamais rien de Quoique Amydenius dise que les grâces, in
tant soit peu important qu'après son couron- forma rationi congruit, soient non seulement con-
nement, à moins que la nécessité ne fût bien formes à la raison, mais aussi dues de droit à
pressante. ceux qui les ont obtenues, il convient lui-même,
La dixième règle de chancellerie, qui a pour avec Rebuffe, que le nouveau pape peut les re-
titre ou rubrique : De litteris in forma rationi, fuser, s'il voit que ses prédécesseurs ont été
congruit expediendis,nous apprend que les papes, surpris, et que la grâce dont QAdemande l'ex-
1.Praxisdispensatsonum lib,II,.cap.4,n. 11.
apostolicarum, pédition est injuste.
570 COUTUME
Il y a une autre règle de chancellerie qui est la » Per acolytum se ad Cornolium papam fittera3
douzième, et a pour rubrique : Revalidatio litte- dédisse. »
rarum praedecessoris,gratiae et justiliae, infra annum Voirlemot: Syncelle.
concessarum.Cette règle a beaucoup de rapport
COUTUME.
avec la précédente ; il y a seulement cela de
différent que la dixième règle revalide des grâ- La coutume est un droit substitué par l'usage
c 's signées et expédiées, mais non encore pré- à une loi écrite, et peut certainement acquérir
sentées aux exécuteurs ou aux juges délégués force de loi : « In iis rébus in quibus nihil certi
pour leur exécution, au temps de la mort du divinastutuit Scriptura, mos populi et instituta
pape qui les avait accordées. Dans ce cas, les majorum pro lege tenenda sunt Dei, et sicut prse-
choses sont encore en leur entier, et le mandat, varicatores divinarum legum, ita et contempto-
quoique expédié, cesse par la mort du mandant, res ecclesiasticarum consuetudinum sunt coer-
s'il n'a été mis ou commencé d'être mis à exé- cendi '. » « Diuturni mores consehsu utentium
cution par au moins la présentation de la grâce approbati, legem imitantur. » (C. 6, dist, 12.) Le
à l'exécuteur. (C. Fin., § Officium., de Officiojudi- décret de Gratien définit ainsi la coutume :
cis deleg., in 6° ; c. Si cui nulla; 36 de Praebendis, « Consuetudo est jus quoddam moribus institu-
eod. lib). Voici les termes de cette règle dou- tum, quod pro lege suscipitur, ubi déficit lex. »
zième : (Distinct. 1, c, 5.)
Item praedictus D. N. omnes, et singulas ab ipsis La coutume, dit le docteur Phillips 2, est une
GreyorioXV et Urb. VU! Rom. Pont, praedecessori- pratique qui, présentant toutes les conditions
bus suis infra annum ante diem obituseorumconcessas légalement nécessaires, est reconnue et acceptée
gratiae vel juslitiae litteras temporibus d'bitis eorum par l'Église, sous l'inspiration du respect qu'elle
executoribus seu judicibus non praesrntatas omnino professe généralement pour tout ce qui vient
rcoalidavit, et in statum pristinum, in quo videlicet de l'antiquité.
uutea fuerant, vel pro quibus crant obtentoe, quoad L'Église catholique se gouverne par l'Écri-
hue plenarié rcstituit, ac decrevet per executores seu ture, la tradition et des usages particuliers.
judices praedictoa,vel ab eis subdctugandosad expe- L'autorité de l'Écriture et de la tradition ne
ddtonem negotiorurnin cis contentorumprocediposse, souffre aucune exception : « Auctoritate Scrip-
et deberejuxta illarum formam. turoe tota constringitur Ecclesia, universali tra-
ditione majorum, nihilominus tota. » (C. 8,
COURRIER. dist. 11.)
C'était autrefois une charge vile et abjecte, Quant aux usages particuliers, l'Église en
même une peine des malfaiteurs, comme nous souffre la diversité selon la différence des pays
lisons dans Strabon (lib V, in fin). Depuis le et des moeurs : « Privatis vero constitutionibus
Christianisme, tout au contraire, nous lisons et propriis informationibus unaquaeque pro lo-
que « cursores inter ecclesiasticos ordines et corum varietate, prout cuique visum est subsis-
officia numerabantur, » de quoi S. Ignace rend tit et regitur. » (C. 8, dist. 11.) « Quia, dit la
témoignage, epist 2, ad Pulycarpum, où, après Glose, après S. Jérôme, (in c. Ulinam dist. 7),
avoir fait mention des diacres, sous-diacres, lec- unaqua:que provincia abundat in suo sensu. »
teurs, chantres, portiers, il dit : « Decet, bea- (C. Cerlificari,de SepulL) « Ea quoe longa consue-
tissime Polycarpe, concilium cogère sncrosanc- tudine comprobata sunt ac per annos plurimos
tum et eligere si quem vehementer dilectum observata volunt, tacita civiuin conventio, non
habetis et impigrum, ut possitdivinus appellari minus quam ea quai scriptum jura servantur.
cursor, et hujusmodi creare, ut in Syriam Imo magnas auctoritatis hoc jus habetur, quod
profectus, laudibus celebret impigram charita- in tantum probatum est, ut non fuerit necesse
tem vestram. » Or, cette charge fut quelque scripto id coinprehendere. » (L. 35, de Leg.)
temps après communiquée aux lecteurs, acoly- Mais, pour que ces usages ou ces coutumes
tes et sous-diacres, comme nous l'apprenons de particulières produisent ces effets, c'est-à-dire,
S. Cyprien (épitre 24) : « Quoniam, dit-il, opor- qu'elles tiennent lieu de loi dans une église, il
tuit me per clericos scribere (scio autem nos- faut qu'elles n'aient rien contre la foi et les
tros plurimos absentes esse paucos vero qui bonnes moeurs ; c'est la doctrine de tous
illic sunt vix ad ministerium quotidiani operis les Pères. (S. Aug. ad Januarium, epist. 148.
sufficere), necesse fuit novos aliquos constituere, cap. 1.) « Quod enim neque contra fidem, neque
qui mitterentur, fuisse autem sciatis lectorem contra bonos mores injungitur indifferenter est
Saturnum, et hypodiaconum Optâtum confes- 1. Lancelot,
tit.2.
sorem. » Et le même, en son épitre 55, dit : 2 Principes
générauxdudroitecclésiastique,
tom.III,pag.409.
COUTUME 571
habendum, et pro eorum inter quos vivitur so- tume, suivant le droit canon, n'est pas bien dé-
cietate servandum est. » (C. 11, dist. 12 ; c. 8, ead.) terminé; les uns estiment qu'on doit suivre en
Le pape S. Grégoire, écrivant à S. Augustin, matières ecclésiastiques les lois civiles qui, en
apôtre d'Angleterre, lui mandait de recueillir matières profanes n'exigent que dix ou vingt
avec soin les usages des différentes églises, et ans (Tôt. tit. de Prxscript.) ; les autres fixent lo
d'en faire comme un faisceau qui servit de droit temps à quarante années; enfin les autres à un
et de coutume à l'Église naissante de ce temps immémorial. (Glos.,in c. 1, dist. 13; Glos.,
royaume : « Ex singulis ergo quibusque eccle- in c. Cum tanto, de Consueludine.)La plus com-
siis quae pia, quoa religiosa, quoe recta sunt mune opinion est qu'il faut quarante ans pour
elige, et haec quasi in fasciculum collecta, apud prescrire contre une loi ecclésiastique par une
Anglorum mentes in consuetudinem depone. » coutume dont les effets ne blessent ni la loi ni
(C. 10, dist. 12.) les bonnes moeurs, ni par conséquent la raison
Quand une coutume est louable, c'est-à-dire et le droit naturel. Car, en ce cas, la coutume
conforme à la raison et à l'équité, et non con- serait illicite et pernicieuse, et quelque longue
traire aux lois en vigueur, qu'elle est établie qu'elle fût, il faudrait l'abolir. Cène serait plus
par une longue pratique, du consentement des alors un usage, mais un abus. «Cum igitur hoec
pasteurs de l'Église, au moins de leur connais- non tam consuetudo, quam corruptela sit, quoa
sance publique, elle a une grande autorité. Une profecto sacris est canonibus inimica, ipsani
telle coutume a même la force de dispenser des mandamus de csetero non servari. » (C. 3, de Con-
canons, puisque nous en voyons plusieurs que suetudine,et ibi, Innocent.)« Mala consuetudo,quae
les plus gens de bien n'observent point, et qui non minus quam perniciosa corruptela vitanda
n'ont jamais été révoqués d'autre manière, est, nisi citius radicitus evellatur in privilegio-
comme la défense de ne baptiser qu'à Pâques rum jus ab improbis assumitur : et incipiunt
et à la Pentecôte, hors les cas de nécessité; la prsevaricationes et variae praesumptiones, celer-
défense de prier à genoux le dimanche et plu- rime non compressée, pro legibus venerari, et
sieurs autres. (Can. Nie. 20.) La coutume a eu privilegiorum more perpetuo celebrari. » (C. 3,
même la force d'abolir une loi marquée expres- dist. 8 ; c. Cumtanto, de Consueludine;c. Ad audien-
sément dans le Nouveau Testament, et confir- tiam. 3; c. Inter, S; c. Ex parte, 10, eod.i; c, eod.,
mée par plusieurs constitutions ecclésiastiques, ' in 6°.)
qui est la défense de manger du sang et des Rappelons à ce sujet la distinction des cano-
animaux suffoqués. (Act., XV, 19.) nistes : Il y a, disent-ils, trois sortes de coutu-
Il ne faut pas croire pour cela que tout ce qui mes : « Consuetudo praeter legem, secundum
se pratique publiquement soit légitime. Il y a legem, et contra legem. » La coutume qui passe
toujours un grand nombre d'abus, que l'Église la loi est proprement celle qui introduit un
tolère en gémissant, et en attendant les temps droit nouveau, et qu'on appelle pour cette rai-
favorables pour les réformer. On doit tenir son coutume de droit, consuetudojuris : elle a
pour abus toutes les pratiques contraires aux pour objet des choses sur lesquelles le droit
dernières lois écrites, si elles ne sont conformes commun ne décide rien, ubi lex deficit: une telle
à des lois plus anciennes et mieux conservées coutume oblige dans les deux fors, parce qu'elle
en un pays que dans l'autre. La principale force a d'autant plus d'autorité qu'elle s'est formée
delà coutume est pour les rites, c'est-à-dire les par le choix libre de ceux qui s'y sont soumis :
cérémonies des prières publiques et de l'admi- « Quae sine ullo scripto populus probavit, om-
nistration des sacrements, la célébration des nes tenentur. » (L. De quibus 32, de Legibus.)Au
fêtes, l'observation des jeûnes et des abstinen- surplus, on ne parle jamais de coutume que dans
ces. Comme la religion chrétienne est tout in- l'idée d'une communauté, d'un corps d'habitants,
térieure et spirituelle, il y a toujours eu une qui l'introduit de particulier à particulier : on
grande liberté dans ces pratiques extérieures. se sert du mot de prescription. On exige seu-
La règle la plus sûre est que chaque Eglise lement que telle ait été son intention, c'est-
doit retenir constamment son usage, s'il n'a à-dire qu'il ait pensé s'imposer une loi par cette
quelque chose qui répugne à la doctrine de répétition d'actes dont elle tire toute sa force :
l'Église universelle ou s'il n'est improuvé par en sorte que les simples expressions de piété de
le Saint-Siège comme contraire à la discipline la part du peuple, comme de saluer la sainte
générale. Pour connaître les lois et les coutumes Vierge à certaines heures, d'entendre la messe,
q îi sont en vigueur, il faut voir celles qui sont les offices aux jours ouvrables, ne seraient
le plus constamment suivies dans les jugements. jamais capables de former une coutume qui tînt
Le temps nécessaire pour former une cou- lieu de loi : « Quia actus agentium non operan-
572 COUVENT
tur ultra intentionem eorum. » (C. Cumolim, 38, que le droit a réglé ; si elle est contraire au droit
de Praeb.; Glos., in c. Cum tanto,11, de Cunsuet.,verb. naturel, ou même à la raison, elle est impres-
Légitime sit praescripta.) C'est pour cette sorte de criptible, nous l'avons déjà dit; mais ajoutons
coutume qu'on n'exige que dix ans pour sa pres- cette modification de quelques canonistes : « Pro
cription. (Ead. glos.; c. Consuetudo,1, dist. 12,§ 1, abolenda lege, sive civili, sive canonica per
instit. de Usacap.) contrariam consuetudinem via conniventiae in-
Quelque étendue et complète que soit la légis- troductam probabilius est non requiri rigorosum
lation calquée sur le droit divin, dit à cet égard et determinatum tempus praescriptionis, sed
le docteur Phillips, comme néanmoins ses dispo- sufficere quod tanto tempore consuetudo sit
sitions ne descendent pas dans tous les détails continuata, quantum viris prudentibus sufficit
spéciaux, elle laisse le développement d'un ad rationabiliter judicandum principem in eam
grand nombre de points disciplinaires, soit à la consensisse. »
législation particulière de chaque diocèse, soit La tolérance du prince produit en cela l'effet
à la pratique; et c'est ainsi qu'ont surgi les d'une plus longue prescription : on en induit un
coutumes que l'on désigne ordinairement sous consentement qui rend même inutile la bonne
le titre de consuetudines praeter legem. Dans les foi; c'est,dit-on, alors le législateur qui, voyant
monastères eux-mêmes, à côté des règles si sa loi non exécutée, est censé consentir à son
complètes des divers ordres religieux, il existe abrogation par la réitération des actes contrai-
encore certains devoirs particuliers non moins res. C'est encore une règle que la coutume im-
obligatoires, et qui ne sont au fond que de sim- mémoriale et raisonnable est à l'abri des clauses
ples coutumes. générales de nonobstances : « non obstante qua-
La coutume conforme à lu loi, secundamlegem, cumque consuetudine. » Il faut une dérogation
est toute de fait, parce que, supposant déjà la expresse et particulière 1.
loi, elle n'en est que l'exécution ou l'interpréta- On divise encore les coutumes en coutumes
tion. Cette coutume n'introduit donc aucun générales et coutumes particulières. Quelquefois
droit nouveau; elle confirme, exécute ou inter- le caractère d'une coutume en vigueur dans toute
prète seulement l'ancien. « Leges firmantur cum l'Église se trouve spécifié en ces termes :« Consue-
moribus utentium approbantur. » (C. in istis, 3, tudines gencralissimae, consuetudo universalls
dist. 4.) « Contra consuetudinem approbatam, Ecclesiae,consuetudo generalis Ecolesioe, consue-
quae;optima est legum interpres. »(C.Cumditetus, tudototius Ecclesioe.» (Cap. Omnia, 12; cap. Por-
8, de Cousuctud.; I. Si, de interpretatione, 37, ff. de niciosus,13,DeCelebrat. Missae; cap. Explicavi, 2,de
Legibus.) On sent bien qu'une pareille coutume, Observat.jejunii.)Mais le sens ordinaire attaché par
étant toute favorable de sa nature, ne peut être le droit canon à l'expression consuetudogeneralis
sujette à la règle de prescription. est celui d'une coutume régissant les églises
La coutume contraire à la loi, contra legem,est, d'une nation déterminée ou d'une province. (Cap.
comme on a vu, une corruption, un abus plutôt Cum venerabilis, 7 ; cap. Ex tuarum, 5, de Auct. et
qu'une coutume, si elle est contraire à la loi di- usu pallii.) L'expression consuetudoregionis est ha-
vine ou naturelle; mais n'étant que contre une bituellement synonyme de la précédente. (Cap.
loi humaine, positive, ecclésiastique ou civile, Certificari,9, deSepult.; cap. Consilium,2, de Observ.
elle peut tenir lieu de loi, même suivant la dé- jejunii.) Par coutume spéciale, on entend, au
crétale Cum tanto, déjà citée, pourvu qu'elle ait contraire, la coutume particulière d'une église,
ces deux conditions, qu'elle soit raisonnable et d'une corporation religieuse ou d'une ville; cette
légitimement prescrite : Nisi fuerit rationabitis et coutume garde quelquefois le nom de consuetudo,
légitimepraescripta. Or une coutume en générai même lorsqu'elle a été rédigée par écrit. (Cup.
est censée raisonnable, quand elle n'est réprou- Venientes, 19, de Jurejurando.)
vée ni par le droit divin, ni par le droit naturel, L'encyclique Inter multiplices,du 21 mars 1853,
ni par le droit canon, et qu'elle est de nature à a condamné un Mémoire relatif au droit coutu-
ne pouvoir ni induire à mal, ni porter préjudice mier de France.
au bien général de la société, dans lequel cas Voirlesmots: Statuts,Prescription.
elle ne saurait jamais avoir force de loi ; mais COUVENT.
il suffit que, sans produire aucun de ces effets, Un couventn'est autre chose qu'un monastère
elle puisse être tant soit peu utile par telle ou de l'un ou de l'autre sexe. On écrivait quelque-
telle considération, « secundum diversas ra- fois couvent pour conserver le sens étymologi-
tiones et in ordine ad diversos fines. » (Cap. Non que
:" Conventus pro monachorum collegio su-
debet, 8, de Consang. et affin.) Le temps pour mitur. » (C. Edoceri, de Rescriptis ; Clem. 2, eod.
prescrire une pareille coutume, est le même 1. Covarruvias,
lib.v. c. 13,n.5 ; Barbosa,
claus87,n.4.
CRIMINELS 573
iit.) « Gonventus autem est cum homines conve- tre lesquels cette peine est prononcée. (Innocent.
niunt in unum. » IIl, cap. Ex litteris, extra de Excessibuspraelatorum.)
Cassien remarque que le couvent est différent Les privilèges que les empereurs chrétiens
du monastère, en ce que le monastère se peut donnèrent autrefois aux évêques et aux clercs,
dire de l'habitation d'un seul religieux, au lieu ne changèrent rien à la poursuite des crimes
que le couvent ne se peut dire que de plusieurs publics. Les évêques pouvaient rendre des sen-
religieux habitant ensemble et vivant en com- tences arbitrales, du consentement des parties,
munauté. Néanmoins, dans l'usage, par le terme mais en matière civile seulement. Les clercs et
de monastère, on entendait les grandes commu- les moines n'avaient que leurs évêques pour ju-
nautés, telles que les abbayes. ges. Dans les matières pécuniaires, pour les cri-
Voirlesmots: Monastère,
Clôture,Abbaye. mes civils, c'est-à-dire sujets aux lois, l'évêque
CRAINTE. et le juge séculier en jugeaient concurremment.
Si en connaissait le premier, il déposait
En matière de regrès ou de restitution envers le l'évêque le juge séculier s'en saisissait;
coupable, puis
un acte quelconque, on allègue quelquefois le si ce avait prévenu, il renvoyait le coupa-
défaut de consentement par l'effet d'une crainte ble àjuge
l'évêque pour être déposé, avant l'exécu-
majeure. Or, on appelle crainte majeure, celle dont tion. Tel était le droit do Justinien.
un homme constant et ferme ne se défendrait Pour les crimes ecclésiastiques, les clercs n'é-
pas : « Metus cadens in constantem virum. »
taient jugés que par les évêques. On savait que
Toute autre sorte de crainte ne fournirait pas abhorre le sang, et l'on voyait tous les
un moyen de regrès dans le cas d'une résigna- l'Égliseles
jours évêques intercéder pour les criminels
tion, ni un moyen de restitution envers un au- les plus étrangers à l'Église, afin de leur sauver
tre acte. la vie ; ainsi on n'avait garde de leur laisser
La crainte imprimée par la violence rend le la
punition entière de leurs clercs, s'il y en
mariage nul. avait d'assez malheureux pour commettre des
Voirles mots: Réclamation,
Empêchement. crimes dignes du dernier supplice : on aurait
CRÉMIÈRES. craint de laisser ces crimes impunis. Il est vrai
On appelle crémières trois petits vases pour que les canons défendaient aux clercs d'intenter
contenir les saintes huiles, c'est-à-dire le saint aucune action devant les juges séculiers, et plus
chrême, l'huile des cathécumènes et l'huile des au criminel qu'au civil (con. Chal., can. 9 ; conc.
infirmes. Ils doivent être en argent. On en voit Carth., con. 9), parce que le désir de vengeance
cependant en étain dans certaines paroisses est plus contraire à l'Évangile que l'esprit d'in-
pauvres ; mais comme ce métal se crasse beau- térêt. Mais nous ne voyons rien dans les sept
coup, il est plus convenable que ces vases qui ou huit premiers siècles pour ôter aux juges sé-
ne sont pas d'une très grande dépense, soient culiers la punition des clercs malfaiteurs, si ca
en argent. C'est à la fabrique à les fournir. n'est des évêques, dont la dignité attirait un res-
Voir: Vasessacrés. pect particulier, et qui rarement tombaient dans
des crimes.
CRIME.
Le crime, dans certaines circonstances, est un
Nous parlons dans le cours de cet ouvrage de empêchement au mariage.
différentes sortes de crimes qu'on peut voir en Voirles mots:Dégradation, Empêchement,
Déposition, § II.
leur place. Les uns font vaquer le bénéfice de
CRIMINELS.
plein droit, les autres au contraire ne le font
pas vaquer. Plusieurs conciles, notamment ceux d' Agde,
L'homicide simple, la fornication, l'adultère en 506, de Worms, en 770, de Mayence, en 848,
ne privent pas de plein droit de leurs offices ou et celui de Tribur, en 1031,ordonnent d'admet-
dignités ceux qui en sont coupables, quoiqu'ils tre les criminels à la communion. Alexandre IV
puissent en être privés par le jugement du su- enjoignit la même chose dans le treizième siè-
périeur ecclésiastique en punition de ces crimes cle : cependant cela ne s'observait point en
et des autres de même nature. La règle générale France. Ce fut Charles VI qui, le 12février 1396,
qu'on doit observer sur cette matière est que abolit la mauvaise coutume de refuser le sacre-
la privation de plein droit n'a point lieu, à ment de pénitence aux criminels condamnés à
moins qu'elle ne soit prononcée par la loi. Ainsi mort, mais on ne leur donnait point l'Eucharis-
l'irrégularité qui est encourue pour un crime tie. Onleur donnait aussi la sépulture ecclésias-
n'emporte point la privation de l'office ou di- tique, à moins qu'il ne fût ordonné que leurs
gnité, à moins que le crime ne soit de ceux con- corps seraient exposés sur un grand chemin ou
574 CROISIERS
brûlés. Le dernier concile de la province de les mains un étendurd portant la croix de l'or-
Reims et celui de Lyon ont décidé qu'il fallait dre et qui lui dit être une des compagnes de S.
admettre à la sainte communion les criminels Ursule, martyre, et s'appeler Odile. Elle le char-
condamnés à mort, quand, par leur repentir et gea d'aller déterrer son corps à Cologne et de le
leurs bonnes dispositions, ils se montreraient faire transporter à Clairlieu, déclarant qu'elle
dignes de cette faveur. La congrégation des évê- serait la patronne de l'ordre.
ques a décidé, le 26 juin 1590, qn'on ne doit pas Ces chanoines Croisiers se répandirent beau-
la leur refuser, lors même qu'ils doivent être coup en France et sur les bords du Rhin où on
exécutés quelques heures après, « etiam mane les appelait les Pèreshospitaliers (ils unissaient le
quando exequenda est sententia, potest adminis- soin des pauvres et des malades au soin des
trari Eucharistia. âmes.)
Voirlemot: Communion, § IV. Le général de cet ordre résida au couvent de
Clairlieu jusqu'en 1796, époque à laquelle cette
CROISIERS.
maison fut supprimée. Depuis la Révolution,
Le nom de croisier signifie porte-croix, parce l'ordre se relève, il a maintenant quatre mai-
que les religieux de cet ordre de chanoines ré- sons : Sainte-Agathe près Cuyk, et Uden, en
guliers portent une croix à leur habit, sur la Hollande, Diest et Maeseyk, en Belgique.
poitrine. Parmi les privilèges des Croisiers, nous cite-
L'origine des croisiers est antérieure aux croi- rons l'induit de Léon X, du 20 avril 1516, accor-
sades, puisque des croisés ayant connu ces re- dant au général et à ses successeurs la faculté
ligieux en Palestine, sont venus fonder des mai- d'appliquer aux chapelets de cinq, dix et quinze
sons en Bohême et en Belgique. Une tradition dizaines, une indulgence de cinq cents jours pour
les fait remonter à S. Clet et dit que S. Quiriace chaque Pater et chaque Are, sans qu'il soit néces-
qui montra le lieu de la vraie Croix à S. Hélène saire de dire tout le chapelet.
et se convertit, les réforma. Grégoire XVI a rendu cette indulgence, appli-
Les plus ancieus croisiers sont ceux d'Italie. cable aux âmes du Purgatoire, le 13 juillet 1813,
Cette congrégation fut renouvelée en 1169 par et Pie IX, le 9 janvier 1848,a donné au général
Alexandre III qui, en f uyantla persécution de Fré le pouvoir de communiquer cette même faculté
déric Barberousse, avait trouvé un refuge dans à tous les prêtres de son ordre. Enfin, le 15
leurs couvents. Ce pape leur donna une règle et mars I884, SS. le pape Léon XIII, par décret
des constitutions. Le relâchement s'étant pro- de la S. Congrégation des Indulgences, a re-
duit dans l'esprit de cette congrégation, le pape connu cette indulgence comme authentique et a
Alexandre VII la supprima en 1636et donna ses déclaré la susdite faculté exclusivementpropre à
biens à la République de Venise, pour soutenir l'ordre de la Sainte Croix.
la guerre contre les Turcs. Ces chanoines réguliers de Sainte Croix por-
Il existe encore deux Congrégations de cha- tent une soutane blanche, un scapulaire noir;
noines croisiers : celle de Belgique et celle de sur la poitrine, une croix rouge et blanche dé-
Bohême. coupée aux quatre branches, (c'est le croisillon
La Congrégation de Belgique ou des Pays-Bas, qui est blanc) et, enfin, un camail noir.
fut fondée l'an 1211, par le Vén. Théodore de Les chanoines réguliers de Sainte Croix de
Celles, sur la colline de Clair-Lieu, près de Huy, Bohême s'occupaient surtout des pauvres et des
en Belgique. pèlerins. Ils furent aussi établis par un croisé
Théodore qui était à la cour du premier évê- qui avait connu les religieux de Sainte Croix en
que de Liége, le suivit en 1188, dans la croisade, Palestine. En 1235,la B. Agnès de Bohême leur
et connut en Syrie les religieux de Sainte Croix. confia l'hôpital qu'elle fonda auprès du pont
A son retour, il fut ordonné prêtre par l'évê- de Prague, et Grégoire IX confirma la Congré-
que de Liége et envoyé comme missionnaire gation de Bohême le 14 avril 1238. Le signe ex-
parmi les Albigeois. C'est au retour de sa mission térieur de cette Congrégation est une croix
qu'il fonda, avec quatre chanoines des collégia- rouge découpée aux quatre branches (comme la
les du diocèse de Liége, le couvent de Clairlieu. croix de Malte) et au-dessous de laquelle se
Le pape Honorius III approuva son ordre en trouve une étoile rouge à six pointes. Les pa-
1216, et le pape Innocent IV le confirma de nou- pes Clément X et Innocent XI, en confirmant
veau en 1248. S. Louis fit venir des religieux de les statuts de cette Congrégation, l'appellent un
Sainte Croix à Paris et les établit rue de la Bre- ordre militaire, et les empe reurs la tenaient
tonnerie. Un religieux de ce couvent, Jean No- comme telle; on les appelait Chevaliersde la Croix.
vélan eut l'apparition d'une vierge tenant dans On leur confia nombre d'hôpitaux en Bohême,
CROIX 575
en Pologne et en Lithuanie, et ils en desservent du chrétien ce que la circoncision est au juif;
encore aujourd'hui. Ils rendirent de grands ser- elle est l'échelle par laquelle on monte droit au
vices à la religion aux XVeet XVIe siècles, car Paradis; elle donne la vie, délivre de la mort,
ils s'opposèrent vigoureusement à l'invasion du mène àla vertu, empêche la corruption du fidèle,
Protestantisme et bien des villes et bourgades éteint le feu des passions, ouvre le ciel, etc. »
leur doivent la conservation de la vraie foi. Leur Comme on trouve ce sujet traité au long et par-
règle est tirée de celle de S. Augustin, comme faitement dans tous les catéchismes complets 1,
celles de tous les chanoines réguliers. nous ne nous étendrons pas davantage sur ce
Il y avait aussi une Congrégation de chanoi- sujet, nous dirons seulement que le pape Pie IX,
nes de Sainte-Croix en Portugal 1. par un bref du 28 uillet 1863, a accordé cin-
CROIX. quante jours d'indulgence à tous les fidèles, cha-
que fois qu'avec un coeur contrit, ils feront sur
Rapportons ici ce qu'Albéric dit de la sainte eux-mêmes le signe de la croix, en prononçant
croix dans son dictionnaire : « Crucis est (nostra dans le même temps, en l'honneur de la Très
salus) adorandum et venerandum, in auth. de Sainte Trinité, les paroles : « Au nom du Père,
Monachis, § 1. Ante namque crux erat nomen et du Fils, et du Saint-Esprit. »
condemnationis, nune vero facta est res honoris; Le même pape, Pie IX, par bref du 23 mars
prius in maledicta damnatione stobat, nune in 1866,accorde à tous les fidèles qui font sur eux-
occasione salutis creata est. Haec enim innume- mêmes le signe de la croix avec de l'eau bénite,
rabilium nobis bonorum extitit causa. Haec nos en
de erroribus liberavit, sedentes in tenebris illu- invoquant la Très Sainte Trinité, cent jours
d'indulgence pour chaque fois 2.
minantur. Diaboli expugnator reconciliavit Deo,
et ex alienatis restituit in domesticos. De lon- § II. Croix pectorale.
ginquis proximos fecit, et de peregrinis reddidit Cette croix qui pend sur la poitrine, est un
cives. Haec est inimicitiarum interemptio, pacis insigne de la dignité épiscopale ou abbatiale.
firmamentum, omnium nobis bonorum thesau- Elle est suspend ue pour les uns à une chaine d'or
rus, propter hanc, jam non erramus in solitudi- eu à un cordon de soie vert et or, et pour les
nibus, viam enim veritatis cognovimus ; nam autres à un cordon de soie violette.
ignitas diaboli sagittas non timemus. Fontem Thomassin parle de la croix pectorale des
enim vitae de quo extinguamur invenimus, prop- évêques et de son origine. Il nous apprend que
ter hanc in viduitate jam non sumus, sponsum l'usage de porter une croix sur soi était autre-
enim recepimus. Non pavemus lupum, quia bo- fois commun à tous les fidèles, et que les papes
num pastorem invenimus, ipse enim ait : « Ego se distinguèrent ensuite par leur attention à se
sum pastor bonus. » Et in isto crucis signo décorer de cette pieuse marque, ce qui leur était
multae victoriae christianis ortae sunt. » en quelque sorte particulier. Gar ni S. Germain,
§ I. Signe de la croix. patriarche de Constantinople, dit notre auteur,
ni Alcuin, ni enfin tous les autres qui ont ex-
L'usage du signe de la croix est de la plus
haute antiquité. Les premiers chrétiens avaient pliqué les significations mystérieuses des orne-
ments qui servaient à l'autel, tant en Orient
coutume de le faire en toutes circonstances, pour
se distinguer des païens, se reconnaître entre eux, qu'en Occident, n'ayant fait aucune mention de
montrer qu'ils n'avaient pas honte de Jésus- la croix pectorale, c'est une preuve certaine
Christ crucifie, pour dissiper et éteindre les ten- qu'elle n'était pas en usage par une loi ou par une
coutume réglée et uniforme. Thomassin rappelle
tations, chasser les démons, et attirer les béné- ensuite les
dictions de Dieu sur toutes leurs actions. A tout différents exemples que l'histoire
fournit de l'usage de cette croix, et conclut: «Que
moment, dit Tertullien (DeCoronamilit.,c. 3,et lib. été premièrement une dévotion générale et
II,ad Uxorem,)et à chaque pas, à quelque action ça fidèles de porter des croix avec des re-
que ce soit, en marchant, en entrant au logis et libre des
en sortant, en nous habillant et en nous chaus- liques; que les évêques ont été les plus zélés
sant, en nous levant et en nous mettant àtable, le pour cette pratique de piété ; que les papes ont
soir en allumant la chandelle, en nous couchant, été les premiers qui ont fait un ornement de cé-
en nous asseyant, nous imprimons le signe de rémonie de ce qui n'était qu'une dévotion arbi-
la croix sur notre bouche, sur nos yeux, sur traire, et qui ont fait briller la croix à l'autel
notre coeur et sur notre front. » La croix dit, par dessus leurs autres ornements pontificaux,
le cardinal Bona (De divina Psalmodia, c. XVI,) 1.Par exempledansle GrandCatéchisme de la persévérances
tom.I, pages73à 115.
chrétienne,
est le sceau du Seigneur; elle est sur le front 2. Recueildeprièreset d'oeuvres
1. Cf.VieduP. Théodore, piesdeMgr.
Prinzivalli
approuve
ViedelaB. Agnès,
etdivers. par laS.C.des ludulg.
576 CROIX
comme il a paru par S. Grégoirele Grand et par gélistes aux quatre coins ou les quatre grands
ce qu'en a écrit Innocent III ; enfin que les au- docteurs : sur la face principale, on voyait en
tres évêques ont été imitateurs de ce qui se pra- haut, l'archange saint Michel; à droite, la sainte
tiquait dans la première des Églises du monde. Vierge; à gauche, S. Jean évangéliste; en bas,
Les évêques qui assistèrent au huitième concile Adam vivifié par le sang du Sauveur; au mi-
de Constatinople, portaient déjà la croix pecto- lieu, un pélican.
rale. Mais Kraser dit que ce ne fut que vers le « 5. Il faut distinguer plusieurs espèces de
treizième siècle que les évêques commencèrent croix : la croix de suprématie est propre au
à la porter d'une manière solennelle sur la poi- pape, à ses légats et aux archevêques ou métro-
trine, et que la croix pectorale devint un orne- politains. Le pape s'en fait précéder partout où
ment pontifical. il va, le légat dans l'étendue de sa juridiction
La croix pectorale est d'or, d'argent ou de et l'archevêque dans les limites de sa province '.
pierres précieuses. Les archevêques, les évêques, Cette croix est, comme les croix ordinaires, à
les abbés réguliers et les abbesses la portent un seul croisillon; doubler ce croisillon est une
suspendue à leur cou, et elle est une des mar- fantaisie qu'exclut la tradition.
ques de leur dignité. « La croix capitulaire précède le chapitre réuni
Le pape ne porte la croix pectorale que lors- en corps.
qu'il chante la messe pontificalement. On croit, «La croix ordinaire sert aux paroisses et à
assez communément, que les évêques doivent l'ordre monastique : son bâton est d'argent.
cacher leur croix dans les diocèses étrangers ; « La croix des religieux, mendiants ou chanoi-
mais cette idée ne repose sur rien , il n'y a ni nes réguliers, n'a qu'un bâton de bois peint en
loi canonique, ni constitution apostolique qui blanc, auquel pend un velum2.
ait prescrit rien de semblable. La croix pecto- « Le velumest un lé d'étoffe, de la couleur du
rale, dit Benoît XIV, n'est point un signe de ju- jour, de la longueur de la hampe, et terminé par
ridiction. deux bâtonnets en haut et en bas pour le ten-
§ III. Croix processionnelle. dre. Il est galonné d'or tout autour et brodé,
« 1. La croix de procession, dit Mgr Barbier au milieu, à l'effigie du fondateur ou aux armes
de Montault 1,peut se définir : un crucifix élevé de l'ordre. On l'attache au-dessous de la pomme
sur une hampe, afin qu'on le voie plus facile- de la croix.
ment... elle est affectée exclusivement aux « Les réformés, capucins, tertiaires, etc., ont
processions, ou elle ouvre la marche du clergé. une croix de bois, plate, noircie et avec un
« 2. Elle se compose d'une hampe, divisée par Christ de carnation en relief ou simplement
des noeuds, pour en rompre la monotonie, et des clous saillants à l'endroit des bras et des
terminée en pointe à ses deux extrémités; d'nn pieds.
Christ attaché à une croix, analogue aux croix « La croix des confréries est analogue à celle
d'autels; d'une pomme saillant au-dessus de la des mendiants pour les enterrements : dans les
douille, à l'aide de laquelle la partie supérieure autres fonctions, elles prennent la croix des ré-
de la hampe s'adapte au crucifix. formés, dont la hampe n'a pas de développe-
« La forme française est généralement plus ment ; alors elles abritent le Christ d'un lé
lourde que la forme romaine; aussi nos croix d'étoffe, disposé en cintre et retombant de cha-
sont-elles très peu portatives. Ce défaut tient à que côté, où il est fixé par des tringles de fer et
la fois aux propositions exagérées et à la ma- maintenu en équilibre par des glands placés à
tière, qui est souvent de la fonte de cuivre. La 1.«Siestarchiepiscopus, crucem antesedeferri facit...Sicon-
croix, d'argent doré, qu'on porte devant le pape, tingatcardinalem legatumde latereessesimulcum...archiepis
mesure en hauteur 2 m. 26 c, dont 0,63 du som- copoinejusprovincia..., nullalenus permittet antesedeferri cru-
met à la naissance de la pomme et 0,51 c. pour cem.» (Caerem. episcop.,lib. Il, cap.IV,n. 1.)
«LeCérémonial disposequel'archevêque danssondiocèse ousa
la largeur du croisillon. faitporterdevant luila croix: celas'entend-il
seulement
province
« 3. La matière ordinaire est l'argent ou le quandil vaà l'églisepourassisterauxoffices et quandil voyage
cuivre argenté : l'argent doré n'appartient qu'au dansle diocèse, à l'occasion dela visite,ouseulement quandilest
pape, aux cardinaux et aux patriarches. enroutepoursonbonplaisir?S.R.C.respondit : Ubique, quando,
dummodo "
nonsit in curru. (18sept.1566
« 4. Les extrémités sont décorées souvent d'em- archiepiscopo
in Orestan.)
placebit,
blèmes religieux. Il serait absurde de figurer la 2. « Nonlicerecanonicis regularibus lateranonsibusS.Petriad
sainte Vierge au revers de la croix. Au moyen- aramin publicis processionibus deferreeorumcrucemdiscooper-
âge, on y mettait l'Agneau pascal, avec les évan- tam, sicutdefertcleruset capitulum ecclesiae
archiepiscopalis; sed
debere eorumcrucem deferre indictisprocessionibus cumveloseu
1.Traitédela construction,
del'ameublement
et deladécoration pallioappenso,sicutdeferuntomnesregulares. » (S.R.C, 14
deséglises,
t.I, page332. jan. 1617,inNeapolitana.)
CROIX 577
ses quatre coins 1. Au moyen-âge, cette draperie mur, près de la crédence, lorsqu'elle doit servir
formait un triangle du sommet de la croix au pour une cérémonie.
bas : il en est encore de même à Marseille. « Celle du pape, du légat ou de l'archevêque
« 6. Il y a deux manières de porter la croix. se met, dès que le cortège est entré au choeur et
Aux processions, le Christ tourne le dos aux pour tout le temps de la fonction, à la droite de
fidèles qui vont à sa suite ; on dirait qu'il mar- l'autel, du côté de l'évangile, sur une des mar-
che lui-même 2. Devant le pape, les légats et les ches. On enfonce, à Borne, la pointe de la hampe
archevêques, le crucifix est tourné, au contraire, dans un bloc de marbre, sculpté exprès et percé
vers celui dont il est l'insigne juridictionnel 3. au centre d'un trou profond ; en France, on at-
A Rome, la croix processionnelle ne s'élève tache le milieu de la hampe avec un anneau,
pas haut, il suffit que le crucifix dépasse la tête qui s'ouvre, se cheville et est scellé au mur.
de celui qui la tient; celle qui a un velumse « 9. Aux enterrements des enfauts, la croix
prend nécessairement par le pied de la hampe, se porte à la main, sans hampe 1, ce qui est un
ce qui la fait dominer davantage. caractère de solennité moindre.
« Un clerc en surplis porte d'ordinaire la « 10. Du dimanche de la Passion au samedi
croix : aux solennités, elle est tenue par un saint, la croix processionnelle a son crucifix
sous-diacre en aube et tunique ; c'est lui égale- couvert d'une housse violette 2.
ment qui en est chargé aux absoutes. « On attache à la pomme une palme bénite
« 7. Aux processions générales, chaque ordre pour la procession du dimanche des Ramaux.
religieux a sa croix propre; les paroisses, au « L'archevêque ne s'en fait pas précéder aux té-
contraire, se groupent sous une même croix. nèbres de la semaine sainte en signe de deuil s.
« La croix du chapitre précède le clergé sécu- « 11. La croix peut se passer de bénédiction.
lier. Si on y tenait cependant, elle se ferait d'une
« 8. La croix ne doit pas être à demeure dans manière privée et sans solennité par un simple
l'église, comme on le pratique à tort dans cer- prêtre 4.
taines paroisses rurales : elle sera renfermée à « 12. Saint-Jean-de-Latran a conservé l'usage
la sacristie dans une armoire pour éviter la des croix primitives, qui n'ont pas de hampes :
poussière et, au besoin, démontée. il en est de même à Salamanque 5. Ce sont des
« La croix de procession a sa place contre le exceptions, bonnes à signaler, mais non à imi-
1. « CAPUANA. —Innovissima rerumomnium perturbatione,ter. Les croix romaines, d'argent doré, sont re-
a priscaetrectasacrorumrituumobservantia recesserunt laico- leur travail d'orfévrerie ; l'une
rumsodalitates civitatisCapuanae, dumin marquables
publicissupplicationi-date du par
busfuneribusque ducendis sodalitiivexillum nulloobductum velo, XIIIe siècle et l'autre du XVe; on les
veletiamhastatamcrucemgestabant. Neconsuetudo istiusmodi nomme croix stationnales. »
invalesceret,die14mensemaioanno1831,Eminentissimus et Re- § IV. Diverses applications du mot Croix.
verendissimus Dominus cardinalis arehiepiscopus Capuanus unius- On trouve le mot Croixdans la désignation de
cujusque s odalitii m oderatores literiscommonere fecitut,juxta
sancitasleges,vexillum veloobduceret, quodultrofactumestprae- beaucoup d'objets, d'institutions et de prati-
terquama sodalitate charitatis,quoeinsuperautumans velex pri- ques. C'est ainsi qu'on appelle :
vilegio,velexconsuetudine jussibiquaesitum fuissedeferendihas- Croix de S. Thomasd'Aquin, une invocation que
tatamcrucem, neque definitum t erminum die16mense julio anno
1838, nequedecretum 17
die mensenovembriinsequente adpra- le docteur angélique exprima en forme de croix,
ximdeduxit, immoappellationem intermittens adhancSacr.Rit. et à laquelle Pie IX, par rescrit autographe du
Congr.,recursum instituit.QuumverostatutadiecoramR. P. D. 1. « Praecedente sinehastadefertur.» (Rit. Rom.
cruce,quaes
secretariosubscripto procuratores partiummultumdissiderent su- Deexeq.parvulor.)
peripsadubiorum concordatione, eademsacra congregatio, die 3 2. « Si eritarchiepiscopus,
praecedetcappellanus cumcrucevo-
meuseaugusto superiori anno,sequens dubium, superquodispu- lata.» (Caer.episc,lib.II, cap.XXV, n. 8.)
tandumhincindeforet,proposuit,nimirum:Anet quomodo sit 3. « Sieritarchiepiscopus,nondefertur cruxanteeumin matu-
servandum et exequendum monitorium Eminentissimi cardinalis tinishorumtriumdierum.» (Ibid.,cap. XXII, n. 3.)
archiepiscopi in casu? Per defensores itaquetum archiepiscopalis 4. «1. Ancrucesaltarium, seuprocessionum, sintbenedicendae,
curiaeCapuanse exuna,tumsodalitatis charitatispartibusex altera, depraecepto? —2. An,sinonsintdepraecepto, possitsimplexsa-
productisjuribusiisquerite accurateque libratiset examinatis, cerdoseasbenedicere et nonsolemniter?
private,
Emineatissimi et Reverendissimi Patressacrisritibuspraepositi «S.R.C.censuitrespondendum : Ad1, negative.Ad2, affir-
rescribendum censuerunt : Affirmative inomnibus, seumonitorium mative. Die12julii1704.»
esseservandum et exequendum. Die12septembris 1840.» 5. « SALAMANTINA. —Intercapitulum etaliasecclesias
Sala-
2. « Anfratribusdominicanis (proutmoderni incivitateJadren. manticen civitatisortaestcontroversia,praetendente illis
capitulo
praetendunt) dumcruceminprocessionibus deferunt,liceatidagere nonlicereuticruceargenteasine manica;factoque adS.R. C.
Crucifixiimagineadseseversa?— Nonlicere.—(S.R.C, 18 recursu,Congr.censuit(partibusindeauditis) : Delationem ma-
maii1675,inJadren.) nicaenequetribuere aut praeeminentiam,
jurisdictonem, nequeadi-
3. « Ipsacruximmediate antearchiepiscopum peraliquem capel- mere; rituiverononrepugnare, quominus regiicapellani
ecclesiae
lanumdeferetur, imaginecrucifixi ad archiepiscopum conversa, S.MarciSalamantin. uti,velnonutidicta
possint manica.Etfacto
interquamet archiepiscopum nullusomninoincedat ; est enim verbocumSanctissimo D,N.,placuitet suasvivae vocisoraculo
insigneipsius." (Caer. episc,lib,I, cap.XV,n. 2.) a prubavit et confirmavit.Die40februarii1598.»
I. 37
578 CRUCIFIX
21 janvier 1874, a accordé une indulgence de Quand les chrétiens eurent la liberté de leur
trois cents jours, une fois par jour, à tous ceux culte, ils commencèrent par exposer la croix
qui, au moins contrits, la réciteront dévote- seule, puis le crucifix. Le culte de l'un et de
ment. Cette invocation consiste dans ces mots : l'autre prit un grand essor après l'invention de
Cruxmihicertasalus. la sainte Croix découverte par sainte Hélène 1.
Cruxest quamsemperadoro. On réserva les crucifix pour l'intérieur des égli-
CruxDomini mecum. ses et la croix simple pour l'extérieur des bâti-
Cruxmihirefugium.
Chanoinesde Sainte-Croix,religieux dont nous ments, parce l'image du Sauveur sur la croix,
avons parlé au mot Croisiers; plus expressive et plus caractéristique, atteint
de Mans. Voir au mot plus efficacement son but que la croix simple.
Congrégation Sainte-Croix,du La forme du crucifix varie dans l'antiquité.
Congrégations ecclésiastiques. anciens crucifix représentent le buste
Congrégationdes Soeursde Notre-Damede la Croix, Quelques
fondée à Murinais (Isère), en 1832, par M. du Sauveur soit au milieu, soit en haut, soit au
Buisson curé de cette paroisse, pour l'éducation pied do la croix; sur d'autres, le corps se trouve
des jeunes filles et le soin des pauvres et des tout entier, tantôt revêtu, le plus souvent nu,
malades. les reins entourés, la couronne d'épines sur le
Filles de la Croix, soeurs institutrices fondées à front, parfois un diadème autour de la tête, qua-
tre clous aux mains et aux pieds, ceux-ci ap-
Roye, en 1625, établies à Brie-Comte-Robert et
à Paris, par madame de Villeneuve divisées en puyés sur un support, suppedaneum, le sang
coulant des plaies des mains, des pieds et du
plusieurs congrégations, par exemple la Congré- côté.
gation des Dames de Sainte-Croix,dont la maison-
mère est à Saint-Quentin; les Filles de la Croix, On rencontre aussi de bonne heure notre forme,
de Liège, qui ajoutent à l'instruction des jeu- avec un seul clou à travers les mains et les
nes filles et le soin dos pauvres, la garde des pieds. Les plus anciens crucifix représentent le
filles repenties, et les Fillesde la Croix (soeurs de Christ vivant.
S. André), dont la maison-mère est à La Puye, Quant à la physionomie que l'on donne à la
diocèse de Poitiers. figure du Christ, à travers les âges, cela dépend
Soeursde la Croix, religieuses qui tiennent des des idées des artistes qui peignaient les images
pensionnats et donnent des retraites, dont la du Sauveur. Tantôt on le représentait jeune,
maison-mère est à Guingamp. Cette congréga- beau, s'approchant des conditions de l'art ancien
tion établie par le conseil et la protection do S. dos Grecs, tantôt décharné, souffrant, abattu.
François ds Sales et de S. Vincent de Paul, a Plus tard, on s'inspira des deux impressions et
été approuvée le 22 novembre 1833. les images offrirent l'idéal de la beauté uni au
CROSSE. sentiment de la douleur et d'une sainte tristesse.
(Voirlemot Bâtonpastoral.) Rapha ël donna au visage du Christ la plus grande
CRUCIFÈRE. perfection 2.
Dans une église, « chaque autel, où se célè-
On appelle colonne crucifère, toute colonne qui brent la messe et les saints offices, dit Mgr Bar-
porte une croix, et qui est posée sur un piédes- bier de Montault, doit avoir son crucifix, requis
tal, ou sur des degrés, pour servir de monu- sous
ment de piété dans les cimetières, devant les peine de péché grave 3.
» Sa matière est la même que celle des chan-
églises, sur les chemins, ou dans les places deliers. Cependant quelquefois, on l'admet en
publiques. à de sa beauté artistique ou de ses
On donne aussi le nom de crucifère, ou ports- ivoire, cause
proportions extraordinaires.
croix, aux religieux Croisiers,dont nous parlons » Son pied est analogue à celui des chande-
au mot Croisiers.
liers, par conséquent triangulaire et armorié
CRUCIFIX. ou inscrit au besoin. Sa tige a la même taille,
Image de Jésus-Christ attaché à la croix. et le crucifix doit dépasser en hauteur les deux
On conçoit que les premiers chrétiens aient chandeliers les plus élevés.
été très réservés pour exposer le culte des ima- » On le place au milieu de l'autel, sur le gra-
ges aux yeux des païens habitués à adorer des 1. Bergier,
Dict.dethéol.; Grancolas,Ancien Sacramentaire.
dieux de pierre et de bois. Ils n'y auraient rien On
2. peutvoiruneétudesérieuse desimagesduCHrist dans1,
compris et, dans leur hostilité, ils auraient ac- Dict.erici.cl. dela théologie
catholique,au motCHRIST, faitepar
cusé les chrétiens d'adorer des images, comme leDr.Héfélé.
le font encore aujourd'hui les protestants de croix 3.Lecardinal Bona(Resliturgica.lib.I, cap.25),penseque la
quel'onplacesurletabernacledel'autel,aumilieudeschan-
mauvaise foi envers les catholiques. vientdutradition
deliers, apostolique.
CUI PRIUS 579
din ou sur le tabernacle, s'il y en a un ; mais le choeur de l'église. Et, comme les églises que
mieux derrière le tabernacle, quand la disposi- l'on construit maintenant sont souvent vastes et
tion le permet. Il est toujours à l'alignement demandent de grandes fondations, on a, sous la
des chandeliers, qui brûlent en son honneur. nef et le choeur, tout un espace vide et voûté
C'est lui qui détermine la droite et la gauche de qu'on appelle crypte et que l'on dispose en dif-
l'autel et, par le maître-autel, celles de l'église férentes chapelles pour les catéchismes et les
entière. réunions pieuses.
» Ses dimensions sont proportionnées à celles
CUI PRIUS.
de l'autel. Trop haut, il serait incommode pour
le prêtre, qui doit souvent lever les yeux vers C'est un terme de daterie qu'on applique à
lui; trop petit, il manquerait son but, qui est de une sorte de provisions dont nous allons parler.
le mettre en évidence, afin qu'on le voie de toute Nous observons ailleurs, au mot Provisions, les
l'église. différentes voies par où l'on parvient à la cor-
» Le vendredi saint, on peut exposer la reli- rection ou réformation d'une provision expédiée
que de la vraie croix, pourvu que la croix soit en daterie : Le cui prius est une de ces voies,
assez grande pour aller avec les chandeliers. quoique rarement et difficilement usitée. On
" En présence du Saint Sacrement, on sup- s'en sert dans le cas où il ne s'agit que de corri-
prime le crucifix dans les basiliques de Rome. ger quelque chose de peu essentiel dans une si-
La S. Congrégation des Rites n'admet pas que gnature; on ne l'emploie jamais pour des bulles :
cette coutume soit importée ailleurs : on ajoute on use pour lors du perinde valere. Le cui prius
en conséquence un petit crucifix, au bas et en est cependant quelque chose de différent de la
avant de l'exposition. nouvelle provision que nous avons dit être, sous
» Le crucifix est béni par l'évêque, lors de la le mot Concession, à la septième clause, une nou-
consécration de l'église. velle signature. Amydenius la définit aussi ;
» Il faut encore un crucifix, à la sacristie, au- « Gratia cui prius, nihil aliud est quam gratia
dessus du meuble où le prêtre s'habille, ainsi secunda circa idem, cum aliqua expressione quae.
qu'un crucifix portatif pour l'adoration de la non erat in signatura prima. » Cet auteur nous
croix le vendredi saint et la réception d'un lé- apprend qu'il y a deux différences essentielles
gat ou d'un évêque, qui le baise à son entrée entre la grâce de cui prius et la grâce de réfor-
dans l'église. mation, qui comprend la nouvelle provision et
» Tous les crucifix sont voilés, du dimanche le perinde valere. 1° Que la grâce de cui prius a la
de la Passion au samedi saint, d'une housse vio- date de la première signature, au lieu que l'au-
lette, qu'on remplace, au maître-autel, à Rome, tre n'a que la date courante, c'est-à-dire de la
le jeudi saint par une housse blanche... » réformation. 2° Le cui prius ne s'accorde pas
En France, on met un grand crucifix en face dans tous les cas où l'on accorde la réformation,
de la chaire. En Italie, on le met sur la chaire mais seulement lorsqu'il ne s'agit que d'un lé-
même, à la droite du prédicateur. ger défaut ou d'une omission peu importante ;
Dans toute famille chrétienne, on doit avoir et quoique cela, ajoute Amydenius, soit à l'ar-
un crucifix au moins dans chaque chambre à bitrage des officiers de la daterie, parce qu'il
coucher, et l'on fera bien de le faire bénir. n'y a point de règle certaine qui apprenne à dis-
Au mot Chemin de la Croix, nous avons dit tinguer les cas où il faut user du cui prius plu-
qu'on peut attacher les indulgences du chemin tôt que de la réformation, toutefois c'est un
de la croix aux crucifix portatifs, en faveur des principe certain que la grâce du cui prius ne
personnes qui sont légitimement empêchées de s'accorde pas sur de nouvelles expressions qui
se rendre dans les églises ou chapelles publi- n'auraient pu faire refuser la première grâce ;
ques où sont établies les stations du Via crucis. elle ne s'accorde que pour corriger ces choses,
CRYPTE. quaenon soient aut non debent negari, v. g., ut si pri-
CRYPTE vient d'un mot grec qui signifie ca- ma signatura omissum fuissent obtentumvel approba-
cher. Les cryptes étaient des grottes, des sou- tio ordinarii, et quid simile, quod absque difficultate
terrains qui servaient à différents usages aux fuisset concessum. Les officiers de la daterie no
anciens. Au temps des persécutions, les chré- sont si difficiles à accorder la grâce du cui prius
tiens s'y réfugièrent pour y célébrer le culte et que parce qu'étant daté comme la première si-
y ensevelir leurs morts. Plus tard, on bâtit gnature, dont elle est une vraie copie transfor-
souvent des églises au-dessus de ces crypes. mée en original, elle pourrait être préjudiciable
Aujourd'hui, on appelle crypte, une chapelle au tiers contre ces deux équitables règles de
souterraine placée le plus ordinairement sous chancellerie :
680 CURE
Item voluit, statuit et ordinavit, quod semperqui- gement dans la législation civile, répond la Revue
buscumquereformationibussignatis, super impetratio- théologique1, nous pensons que la prohibition
nibus quorumcumquebeneficiorum,vacantium, vel établie autrefois doit être maintenue. Le motif
certomodovacaturorum, in quibuspetitur, quod litterae de cette prohibition subsiste toujours. Quoique
super prima data expediri possint ; si ex hujusmodi le curateur ne soit pas chargé de l'administra-
expeditionesub tali data cuiquam videatur possefieri tion journalière des biens du mineur émancipé,
praejudicium,litteraehujusmodisub ipsa prima data il doit cependant intervenir dans certains actes
nullatenus expediantur, nisi reformationeshujusmodi de l'administration 2 , et s'occuper ainsi de
per fiat, sub prima data signataefuerint. (Reg. 44, de choses étrangères à son ministère ; et c'est pré-
Reformationibus.) cisément là ce que le législateur ecclésiastique
Item, ne per varias, quae pro commissionibus,seu a voulu prévenir. Aussi voyons-nous que les
mandatis, declarationibushabendis plerumque fiunt auteurs modernes regardent encore la curatelle
suggestiones,justifia postponatur : idem D. N. dé- comme interdite par la législation canonique 1.
crevit et declaravit suaeintentionis fore, quoddeinceps Voirlesmots: Tutelle,Tuteur.
per quamcumquesignaturam, seu concessionem,aut CURE.
gratiam, vel litteras apostolicas pro commissionibus
seu mandatis, aut declarationibushujusmodi, etiamsi La cure est un office spirituel et inamovible,
motu proprio ex certa scientia, ac etiam ante motam qui demande résidence, et par lequel un ecclé-
litema Sanctitate Sua emanaverint, velde ejus man- siastique est chargé de la conduite d'une pa-
dato faciendas, nulli jus sibi quaesitum quomodolibet roisse, pour en instruire les habitants et leur
tollatur. (Reg. 18 de Nontollendojus quaesitum.) administrer les sacrements. Quand il n'y a plus
d'habitants dans une paroisse, soit que les
CULTE. guerres, soit que quelque autre raison les ait
Le culte est l'honneur que l'on rend à Dieu. Il fait disperser, le titulaire est et demeure curé,
est intérieur ou extérieur. Le culte intérieur con- comme les évêques, titulaires des églises dont
siste dans les sentiments de vénération, de sou- les infidèles se sont emparés, sont véritable-
mission, d'amour, de confiance, dont nous ment évêques ; de sorte que le curé est obligé
sommes pénétrés envers la Divinité ; il ne peut de reprendre la conduite des âmes, dès que son
être soumis à aucune loi civile. Nous appelons territoire est habité. (Ex syn. Rothom., 1581,in
culte extérieur les signes sensibles par lesquels décret. Ecoles,gallican., lib. V, tit. 10. cap. 18.)
nous témoignons ces sentiments ; par exemple, Une cure, au résumé, est la même chose
en offrant le sacrifice de la messe, en faisant qu'une paroisse. Il faut donc entendre par le
des prières publiques : c'est de ce dernier que mot de cure le titre même du curé, ou plutôt
s'occupent les lois. la paroisse qui impose à celui qui est chargé
de la gouverner, des obligations et des soins
CURATELLE, CURATEUR. qui ont fait donner à son emploi le nom de
Le chapitre Pervertit, tiré du concile de Chal- cure.
cédoine, met sur la même ligne la curatelle et la Autrefois, le droit d'ériger des cures apparte-
tutelle. Effectivement dans l'ancien droit, le cu- nait à l'évêque seul. C'est un droit qui fait par-
rateur aussi bien que le tuteur était chargé d'ad- tie de sa juridiction. Les lois civiles ne le lui
ministrer les biens de son pupille : « Officium contestaient nullement. L'édit de 1695, article
et administratio curatoris pari et tutoris passu 24, portait : « Les archevêques et évêques
ambulat, » dit Maschat 1. « Mais aujourd'hui, pourront, avec les solennités et procédures ac-
remarque le cardinal Gousset 2, le curateur n'est coutumées, ériger des cures dans les lieux où
point administrateur des biens du mineur éman- ils l'estimeront nécessaire. Ils établiront pareil-
cipé; il est seulement chargé d'en surveiller lement, suivant notre déclaration du mois de
l'administration, de lui donner des conseils et janvier 1686, des vicaires perpétuels, où il n'y
de l'assister dans les actes importants qui le a que des prêtres amovibles, et pourvoiront à la
concernent. » Le curateur n'étant plus chargé, subsistance des uns et des autres, par union de
comme autrefois, d'administrer les biens du dîmes et autres revenus ecclésiastiques, etc. »
mineur émancipé, ne semble-t-il pas juste de ne Aujourd'hui, il faut l'autorisation du gouverne-
plus lui appliquer l'ancienne législation ecclé- ment ; c'est.ce que prescrit formellement l'arti-
tique, et de soutenir que rien n'empêche les cle organique 62, ainsi conçu : « Aucune partie
prêtres d'accepter cette charge ? Malgré ce chan- 1.Deuxième année, novembre 1857,pag.576.
1. Institutiones lib.
juriscivilis, I, titul. n.
XXIII, 3. 2. Codecivil,art.480,482,etc.
2. Codecivilcommenté ses
dans rapportsavecla Théologie 3. Gousset, Codecivilcommenté, notesur l'art. 427;Bouvier,
morale, notesurl'ut. 480. Institutiones
théologien,tom.IV,pag.92, édit.Paris,1846,
etc.
CURES 581
du territoire français ne pourra être érigé en de ces canons porte que l'évêque doit veiller
cure ou en succursale, sans l'autorisation sur tout ce qui regarde sa paroisse et les villa-
expresse du gouvernement. » ges: « Qusaeparochiae proprioe competunt et villis
Voirlesmots: Curés,Paroisse.
quae sub ea sunt.» Paroisse est prise ici pour
CURÉS. diocèse, suivant la remarque de Thomassin.
Nous appelons curés les prêtres que les latins Enfin, ce qui achève de persuader que, dans les
nommaient parochi,plebani, rectores, curati. « Pa- premiers temps, tout était dans la dépendance
immédiate de l'évêque, c'est le canon 32 qui
rochus a parochia dicitur, dit Barbosa 1, pleba- veut
nus a plebe vel populo qui sub ejus cura regi- qu'on dépose, comme schismatiques, les
et les clercs qui font des assemblées sé-
tur. » Il y avait pourtant cette différence entre prêtres
le parochumet le plebanumdes latins, que le pre- parées, auxquelles l'évêque ne préside point :
« Si quis presbyter contemnens episcopum
mier n'avait le soin que d'une église, et l'autre suum seorsum congregationem fecerit, et al-
de plusieurs. « Rectores dicuntur, continue le
même auteur, quia plebem et populum sibi terum altare fixerit, deponatur quasi princi-
commissum cum cura regunt. Curati etiam patus» amator existens, similiter et reliqui cle-
rici.
appellantur a cura quam de regendis ovibus Tout cela n'a rien de contraire à ce qu'on
suscipere debent; » et c'est l'acception que nous croit communément,
avons choisie dans notre façon de parler : que les évêques, dans ces
« vocatur etiam cujuslibet parochiae rector, pa- premiers temps, envoyaient les prêtres de leur
rochus. Et qui in ecclesia monachorum curam clergé aux églises particulières, d'où, après
avoir rendu le service nécessaire, ils revenaient
animarum exercet dicitur capellanus. » (Cap. 1, à
de Capel. monachorum2.) l'église épiscopale, et qu'ensuite le nombre
des fidèles s'étant accru, et celui des églises,
§ I. Curés. Origine. par conséquent, augmenté, les prêtres furent
Les monuments ecclésiastiques des trois et attachés aux églises, et leur ministère rendu
quatre premiers siècles de l'Église nous feraient fixe pour administrer les sacrements aux pa-
juger qu'il n'y avait pas alors de paroisses, ni roissiens 1.
par conséquent de curés. S'il y en eut, dit Tho- A Alexandrie, les paroisses étaient établies à
massin 3, il y en eut très peu : les Actes des la ville et à la campagne dès le temps de Cons-
apôtres, les Épîtres de saint Paul, le livre de tantin. S. Épiphane nous apprend (Haeres. 69)
l'Apocalypse, ne nous parlent que des églises des qu'il y avait à Alexandrie même plusieurs
villes considérables, des évêques et des prêtres églises (il en nomme sept ou huit) ; les rues et
qui y résidaient. S. Ignace et S. Cyprien n'a- les maisons voisines de chaque église, qui en
dressent leurs lettres qu'aux évêques des gran- étaient comme le ressort, s'appelaient laures. Il
des villes ; il n'y est même jamais fait mention y avait plusieurs prêtres dans chacune de ces
des prêtres ou des diacres de la campagne ; on églises, mais il y en avait un qui était le prési-
n'y voit pas non plus le moindre vestige d'é- dent. Arius était recteur ou, comme nous par-
glise où l'évêque ne présidât point. S. Justin, lons aujourd'hui, curé d'une de ces églises. Il se
dans son Apologétique, dit que, le dimanche, servit de l'autorité que lui donnait cette qualité
les fidèles de la ville et de la campagne s'as- pour répandre le venin de ses erreurs. S. Atha-
semblent dans le même lieu, que l'évêque y nase (Apol. 2,) nous apprend aussi que, dans les
offre le sacrifice de l'Eucharistie, qu'on le dis- grands villages, il y avait des églises et des prê-
tribue à ceux qui se trouvent présents, et qu'on tres pour les gouverner ; dans le pays de Mar-
l'envoie aux absents par les diacres. Les canons cotes, il y en avait dix. Le concile d'Elvire
attribués aux apôtres nous feraient conjectu- témoigne que l'on confiait dans ces premiers
rer, mieux qu'aucun autre écrit, que, dans ces temps la conduite d'un peuple à des diacres :
premiers temps, l'évêque était seul chargé du « Si quis diaconus regens plebem. (Can.75)
soin de tout son peuple, et que les prêtres et Nous parlerons des cures d'une ma-
les diacres n'étaient jamais séparés de lui. Le nière plus étendue au mot Paroisse.
canon 40 dit que ceux-ci ne doivent rien entre- Les canonistes parochistes en grand nombre,
prendre sans la permission de l'évêque : « Sine surtout en France, ont élevé outre mesure le
sententia episcopi nihil agere pertentent. Le 15e pouvoir et la dignité des, curés. Ils sont allés
1.DeOfficio jusqu'à prétendre qu'ils étaient d'institution di-
parochi.
2.Qu'enFrance,la loi appellelescurésde campagne desser- vine et les successeurs des soixante-douze disci-
vants,celanechangepasl'ornée quiestceluidecuré. ples, qu'ils avaient par conséquent par leur ti-
3.Discipline
del'Église,Part. I, liv., chap.21. 1.Mémoires duclergé,tom.VII,pag.481.
582 CURÉS
tre ou par eux-mêmes, une juridiction propre, blissement : Les curés primitifs sont ceux qui
indépendante, particulière et immédiate au for avaient anciennement le soin des âmes, ou
de la pénitence, le droit de gouverner et de qui possédaient un bénéfice qui originairement
conduire leur troupeau, dont ils répondent était cure, ou dans lequel on a érigé, par dé-
comme l'évêque du sien : « Animam suam po- membrement ou autrement, une nouvelle cure,
nere pro ovibus suis; » qu'ils composaient un avec établissement d'un vicaire perpétuel pour
second ordre de prélats, prxlati minores; qu'ils le gouvernement spirituel de la paroisse.
tenaient immédiatementde Jésus-Christ l'autorité Plusieurs savants rapportent l'origine des cu-
d'exercer les fonctions hiérarchiques, de purifier rés primitifs au concile de Mérida, de l'an 666,
par la correction, d'éclairer par la prédication, qui, par son douzième canon, permet à l'évêque
et de perfectionner par l'administration des sa- de prendre dans les paroisses des prêtres et des
crements. C'est ce que Gerson n'a pas craint diacres, et de les mettre dans sa cathédrale,
de dire et d'enseigner : « Qui dicuntur succes- pour se servir de leur ministère, sans que ces
sores septuaginta duorum discipulorum et prêtres, ainsi transférés, cessent de veiller sur
dicuntur praelati soecundi ordinis , dignitatis leurs paroisses, dont ils continueront à perce-
vel honoris, quales sunt curati , quibus et voir le revenu, en les faisant desservir par des
statu et ordinario jure conveniunt tres actus vicaires auxquels ils donneront une pension.
hierarchici, primario, essentialiter et immediate « Hoc elegit unanimitas nostra, ut omnes epis-
à Christo, qui sunt purgare per correctionem, copos provinciae nostrae, si voluerint, de paro-
illuminare per praedicationem, perficere per chianis presbyteris, atque diaconibus, cathe-
sacramentorum ministrationem. » Cette opinion, dralem sibi in principali ecclesia facere, maneat
aussi fausse que dangereuse, s'était fort accré- per omnia licentia... Et quam vis ab episcopo
ditée en France 2. Mais sans vouloir déprécier suo stipendii causa per bonam obedientiam ali-
les fonctions fort honorables et fort utiles des quid accipiant, ab ecclesiis tamen, in quibus
jcurés, fonctions que nous avons nous-même prius consecrati sunt, vel a rébus earum extra-
remplies pendant de longues années, nous di- nei non maneant ; sed pontificali electione, pres-
rons avec Nardi 3, parce que nous en sommes byteri ipsius ordinatione, presbyter alius ins-
intimement convaincu, d'après tous les docu- tituatur, qui sanctum officium peragat, et dis-
ments que nous avons compulsés, qu'il n'y a cretione prioris presbyteri victum et vestitum
dans l'Eglise que les évoques qui soient réelle- rationabiliter illiministretur (ministrent) ut non
ment pasteurs, selon toute la force du terme, et egeat. »
que les curés ne peuvent porter ce titre que On trouve les curés primitifs plus expressé-
comme secondaires de l'évêque, soumis, in ra- ment marqués dans le canon 16e du concile
dice, à sa juridiction, recevant de lui seul leurs d'Aix-la-Chapelle, de l'an 836: « Unicuique ec-
pouvoirs, et qu'il n'y a de vrais recteurs, de clesiae suus provideatur ab episcopis presbyter,
vrais curés que ceux dont le Saint-Esprit a dit : ut per se eam tenere possit, aut etiam priori
« Posuit episcopos regere Ecclesiam Dei. » presbytero subjugatus ministerium sacerdotale
Toute la tradition des premiers siècles est en possit. » Le prêtre qui tient une église per se,
faveur de ce sentiment. c'est-à-dire sans dépendance d'un autre, voilà
Voirlesmots: Desservant, Paroisse. le curé prieur ou primitif; le prêtre qui relève
§ II. Curés primitifs. de lui, qui ipsi subjugatus est, voilà le curé su-
Il est bien difficile de définir les curésprimitifs. balterne.
Cette difficulté vient de l'incertitude ou de De toutes les causes que l'on donne de l'éta-
l'obscurité de leur origine. La diversité des blissement dos curés, primitifs, la meilleure ne
noms qu'on donnait autrefois à ce qu'on appelle les fait pas regarder d'un oeil favorable. Les
curés primitifs, et encore plus la variété des auteurs n'en parlent tous que comme d'un
causes qui les ont fait naître, empêchent d'en établissement contraire à l'esprit des canons, à
donner une juste idée. Voici cependant celle la pureté des règles, à l'ordre même hiérarchi-
qu'on donne comme la plus conforme à leur que, en ce qu'il fait supposer un partage dans
origine et aux différentes causes de leur éta- une paroisse qui ne peut avoir deux pasteurs
1.Tom.I, page137. sans trouble : « Duo capita quasi monstrum. »
2.Undécret dela congrégationdel'Index,endatedu4décembre C'est la remarque de Duperrai.Coquille, dans ses
1653,a condamné unlivreitalienayantletitresuivant:Apologia mémoires pour la réformation de l'état ecclé-
deldirittoterritoriale
deiparrochi.Cetteprétentiondestructive
du tranche le mot, et dit que les curés
dans vade
l'Eglise, pair avec
lafausse
théorie siastique,
principehiérarchique
desconciles généraux aussisoutenue parGerson. primitifs doivent être abolis et supprimés; ce
3.Descurésetdeleursdroitsdansl'Eglise,chap.2et3. qui a été suivi.
CURÉS 533
Les curés primitifs étaient on quelque sorte droite sur le missel, et lit une formule de ser-
comme des curés commendataires ; car de ment. Ensuite il monte à l'autel, ouvre le ta-
même que les abbés commendataires avaient bernacle et touche le saint ciboire, avec les
l'honneur et l'utilité, sans avoir aucune direc- génuflexions. Après l'avoir renfermé, il va au
tion du spirituel, de même les religieux qui côté droit de l'autel et chante l'oraison du
étaient curés primitifs, avaient pareillement saint patron; puis, précédé de la croix, des
l'honneur et l'utilité des cures, sans avoir l'ad- acolytes et d'un thuriféraire, le curé se rend à
ministration. la porte de l'église, qu'il ouvre et ferme; aux
Plusieurs abbés et chapitres étaient curés fonts baptismaux, qu'il ouvre et encense; au
primitifs de certaines paroisses; ils les faisaient confessionnal, où il s'assied; au bas du clocher,
desservir par des vicaires perpétuels ou amo- où il tinte quelques coups; en chaire, d'où il
vibles. adresse quelques paroles à l'assistance. Le
Il y avait, en France, avant la Révolution, des délégué conduit enfin le nouveau curé à la
curés amovibles, au nombre de 2,500, qui stalle qu'il doit occuper, et dans laquelle ce-
avaient ce qu'on appelait alors des bénéfices lui-ci s'assied. Si cette cérémonie précède un
manuels, et des curés inamovibles, au nombre office, par exemple celui des vêpres, en un
de 36,000. Ces curés amovibles, ou possesseurs jour de dimanche ou de fête, comme cela est
de bénéfices manuels, n'étaient ordinairement de convenance, plutôt qu'un jour ouvrable, le
que des religieux envoyés par les supérieurs nouveau curé entonne Deus, in adjutorium, etc.,
des couvents qui étaient curés primitifs de la qui lui a élt imposé par le délégué. Si l'instal-
paroisse ; et comme ils avaient fait des voeux lation a lieu avant la grand'messe, et qu'elle
particuliers, suivant l'ordre auquel ils apparte- ne soit point précédée d'une heure matutinale,
naient, qui entraînaient une dépendance abso- le nouveau curé, après s'être assis un très
lue, ils étaient révocables à la volonté (ad court instant, se lève et va à la sacristie. Dans
nutum manus , d'ou manuels) de leurs supéri- tous les cas, soit après la messe, soit après
eurs. vêpres, on chants le Te Deum. En plusieurs
Voirlemot: Desservant. diocèses, le Te Deumprécède la bénédiction du
g III. Curé. Installation. Saint Sacrement.
Assez généralement, l'installation est accom-
Les curés ayant la primauté dans la paroisse d'un rite moins long. La profession de
pagnée
qui leur est assignée, la première stalle du foi est de rigueur pour les desservants aussi
choeur leur appartient. De là le nom qu'on bien les curés proprement dits. (S.
à que pour
donne la cérémonie par laquelle ils sont mis C. du 15décembre 1866.)L'évêque ne
Concile,
en possession : on installe, c'est-à-dire on fait
asseoir le nouveau curé, in stallo, dans la peut déléguer., en vertu de son droit propre,
un prêtre pour recevoir cette profession de
stalle qu'il devra occuper. Ce cérémonial varie foi des Evêqueset des Réguliers, 14 avril
(S. Cong.
selon les usages diocésains ; néanmoins celui ad 1nm),il lui faut un induit. (S. C. du Con-
1890,
que nous allons présenter est ordinairement cile, 9 mars 1892). On comprend que ce rite
adopté. d'installation peut être diversement modifié,
Le prêtre nommé à une cure se rend à la puisqu'il ne confère point la puissance cu-
porte de l'église,, en surplis et portant l'étole riale, mais n'en est que la proclamation.
pastorale sur le bras gauche : il est accompagné En France, depuis les articles organiques,
des fabriciens et des notables de sa paroisse. Le l'immense majorité des pasteurs du second or-
délégué de l'évêque, pour l'installation, se dre portant le nom de desservants et étant ré-
trouve à cette porte, où il s'est rendu, précédé vocables, l'installation dont nous venons de
de la croix et des acolytes. Le curé lui présente semble présenter quelque chose d'illu-
parler
son titre, afin que lecture en soit donnée, et soire ; elle ne pourrait donc convenir qu'aux
aussitôt après, il est revêtu de l'étole parle dé- curés institués en titre inamovible. Mais comme
légué ; celui-ci entonne le Veni Creator, et l'on la législation révolutionnaire n'est qu'un fait
s'avance vers l'autel. Le curé élu marche à côté et non un droit, et que le curé desservant,
du délégué, qui le tient par la main droite. aussi bien que le curé dit de canton, est pas
Après le verset et l'oraison, le délégué s'assied, teur de la paroisse qui lui est confiée, y exer-
tenant sur ses genoux le missel; et le curé, se toutes les fonctions et toute la juridiction
çant
plaçant debout devant lui, lit la formule de canonique, cette cérémonie peut aussi bien
profession de foi de Pie IV; cette lecture faite avoir lieu-à son égard qu'à du celui curé ina-
le nouveau curé se met à genoux, tient sa main movible.
581 CURÉS
y IV. Droits et devoirs des curés 1. node n'aurait pas lieu tous les ans. (S. C. du C.
La collation d'une paroisse doit se faire au 10déc. 1695. ) « Seront pris pour examinateurs
concours, d'après les dispositions du concile de (paroles du Concile) les maîtres, docteurs, ou
Trente, sess. XXIV,ch. 18, et d'après la consti- licenciés en théologie ou en droit canonique,
tution In conferendis,de Pie V. La S. C. du Con- ou ceux qui paraîtront les plus capables de
cile, sur l'approbation du Souverain Pontife, a cet emploi parmi les autres ecclésiastiques. »
prescrit la forme et les règles de ce concours Le concours est nul lorsqu'aux examinateurs
dans son encyclique du 10 janvier 1721. L'exa- synodaux s'en joint un qui n'est pas synodal.
men de ceux qui concourent doit être fait « par (S. C. du Concile, 13 déc. 1629.)Si cependant cet
l'évêque, ou s'il en est empêché, par son vicaire examinateur n'interroge qu'après l'examen, à
général et d'autres examinateurs dont le nombre titre purement honorifique et sans donner de
ne doit jamais être inférieur à trois ; » ce sont suffrage, le concours est valide.
les propres paroles du concile de Trente, sess. De droit commun, et, en particulier, d'après
XXIV,ch. 18. On peut cependant employer plus les Constitutions Apostolici muneris d'Innocent
de trois examinateurs, mais jamais moins. (S.C. XIII, et In supremode Benoit XIII, c'est au curé
du concile, dans Garcias.) qu'il appartient de choisir et de nommer son vi-
« A l'égard des examinateurs, dit le Concile, caire. Mais avant d'exercer son office, le vicaire
il en sera proposé six an moins, tous les ans, doit obtenir l'approbation de l'évêque; il ne suf-
par l'évêque ou son vicaire général, dans le firait pas qu'il fût déjà approuvé pour les con-
synode diocésain , à l'agrément et à l'appro- fessions.
bation duquel ils seront soumis. » Ces exa- En France, la pratique est contraire. Ce sont
minateurs synodaux doivent rester en place les évêques qui choisissent et qui nomment les
jusqu'au nouveau synode, quand même le sy- vicaires. Il résulte d'une réponse de la Sacrée
1.Toutce§ estprisdanslesInstitutions Canoniques duProfess. Congrégation du Concile à l'évêque d'Aire que
DeCAMLLIS, tomeIII,pages316etsuiv. cette coutume doit être conservée jusqu'à ce que
L'article10du Concordat de 1801porte,sans distinction et le
d'unemanière générale, que«les évêques nommeront aux cures, Saint-Siège en ait disposé autrement.
leurchoixnepourratomber quesur lespersonnes agréespar le I. Du Curé relativement à la résidence et à la
gouvernement. » Dans c econcordat il n'est
n ullement faitmention
dumotdedesservant quin'estconnunià Rome,nidansledroit préséance 1.
canonique. Auxyeuxdel'Eglise, lecuréestletitulaire inamovible I. De la résidence. — 1°Le curé doit résider
d'uneéglise,autrement dittoutprêtrequia charged'âmes. dans sa paroisse, et même dans son presbytère.
Lesarticles organiques seuls,c ontrelesquels Romea toujours
protesté,ontintroduit (art.31) lemotde desservant: Lesvicaires (S. C. du Concile, 13janv. 1720.)Il est tenu de ré-
«
et desservants exerceront leurministère sousla surveillance et la sider là où se trouve l'église paroissiale, lors
direction descurés.Ilsserontapprouvés parl'évêque et révocables même qu'il lui serait donné un coadjuteur en
par lui.» raison de ses infirmités. (S. C.du Concile, dans
« Lescurésamovibles ou desservants, dit Jousse,dansson
Traitédugouvernement spirituelettemporel desparoisses, sontdes Garcias.) Et s'il n'a pas d'habitation propre là
prêtres,quisontchargés defairelesfonctions ecclésiastiquesdans où il doit résider, il doit y en louer une. (Même
les paroisses dontlescuressontvacantes,oudontles curéssont C.) Il peut cependant quitter son presbytère pour
interdits.» (Lemotdesservant estdoncimproprement appliquéen habiter sa propre maison, si celle-ci se trouve
Franceauxcurésdesparoisses appelées succursales.)
Onappelle, en France,curésde1re classe,ceuxdontlavilleou dans la paroisse, de façon qu'il puisse ainsi
commune atteint5,000âmes,et curésde2e classetouslesautres satisfaire au devoir de la résidence.
curésdecantonoud'uneparoisse privilégiée par l'Etat.Lesuns 2° Le curé est tenu de résider personnelle-
comme lesautresnepeuvent être révoquésou destitués qu'avec ment, lors même que son peuple serait
leconcours dugouvernement. égale-
D'après unarrêtédu27brumaire anXI,une décision royaledu ment bien ou même mieux servi par un autre.
29septembre 1819,etunecirculaireministérielle du25septembre Il doit par lui-même, et non par un remplaçant,
1832, le dixième descurésde2eclassepeutêtreélevéà lapremière supporter les charges
comme récompense personnelle, surlademande del'évêque. auxquelles il s'est sou-
Lapolicedel'église,tantà l'intérieur qu'àl'extérieur,appartient 1.L'art.29desArticles organiques porteque: « Lescurésse-
exclusivement auxcurés,et enleurabsence, auxvicaires. C'estce ronttenusderésiderdansleursparoisses. » Et une ordonnance
quirésulte destermesdel'art.9dela loiorganique du18 germi- royaledu13mars1832ajouteque: «L'absencetemporaire, et
nalanX,etdeplusieurs décisions ministériellesen datedu10fé- pourcauselégitime, destitulaires
d'emplois dulieu
ecclésiastiques,
vrier1805,du 30avril1806,du 22mars1831,du21 septembre oùilssonttenusderésider,pourraêtreautorisée parl'évêque dio
1869,du 6 août1870,etc. césain,sansqu'ilenrésultedécompte surle traitement,si l'ab-
Uneordonnance du12janvier1825,modifiant doit
le décretde1809, sencene pasexcéder huitjours.Passécedélai,et jusqu'àce-
attribueaucuréseul,danslesparoisses rurales,ledroitde nomi- luid'unmois,l'évêque notifierale congéau préfetet luienfera
nationetderévocation detouslesserviteurs del'église. connaîtrelemotif.Sila duréedel'absence,pourcausede maladie
D'après l'art.30dudécretdu 30septembre1809, leplacement ouautre,doitse prolonger au delàd'un mois,l'autorisation de
desbancsouchaisesdansl'églisene pourraêtrefait queducon- notreministre del'instructionpubliqueet descultesseranéces-
sentement ducurédesservant, sauflerecoursà l'évêque. saire.»
CURÉS 585
mis. Dans les cas cependant où il lui est per- un jour de fête, qu'il n'y eût pas de malades, et
mis, de droit, de remplir ses fonctions à l'aide que cela n'arrivât que rarement dans l'année. —
d'un vicaire, il peut se faire remplacer dans 3° Si les curés les plus voisins, ayant tous charge
l'exercice de son ministère. (S. C. du Concile, d'âmes, pouvaient se remplacer mutuellement,
3 juillet 1591.) Il peut encore, pour mieux ac- la même Congrégation a répondu négativement,
complir sa tâche, prendre un ou même plusieurs en supposant que cela se fît sans la permission
coadjuteurs, et leur laisser le travail le plus pé- de l'ordinaire. (8 fév. 1747.)
nible, comme les visites de nuit aux malades et 6° Les quatre motifs que nous avons énumérés
les confessions trop nombreuses, pourvu que plus haut relativement à l'évêque, dispensent
lui-même, quand il ne sera plus justement em- aussi le curé de la résidence. Ainsi, pour une
pêché, reprenne personnellement les fonctions oeuvre de charité chrétienne,pour unenécessitéprès-
pastorales les plus importantes. Telle est l'opi- sante, etc. un curé peut s'absenter plus de deux
nion de Barbosa et autres auteurs en général. mois, après en avoir cependant, si c'est possible,",
3° Les curés ne peuvent s'absenter de leurs demandé la permission à l'évêque. Telle est, ent
paroisses, ni pendant les deux mois accordés général, l'opinion des auteurs. Mais si, en pareil
par le concile de Trente (S. C. du C, février cas, le curé alléguait un juste motif qui n'exis-
1573) ni même pendant une semaine, sans une terait pas réellement, il pécherait mortellement,
permission de l'évêque accordée par écrit. (S. C. et il serait tenu à la restitution des fruits qu'il
du Concile, dans Fagnan.) Il y a cependant des aurait perçus dans une telle absence.
auteurs qui prétendent que, pour de bonnes rai- 7° Un curé qui s'absente, pour de bonnes rai-
sons, les curés peuvent s'absenter, sans permis- sons, est toujours tenu de laisser un vicaire ca-
sion de l'évêque, pendant les deux mois accor- pable et approuvé dans le diocèse, pour l'admi-
dés par le concile de Trente ; mais aujourd'hui nistration des sacrements. (Conc. de Trente,
cette opinion ne peut plus être soutenue, parce sess. 23, De Réform.)
qu'il existe, à ce sujet, plusieurs déclarations de Sur la question de savoir si une maladie peut
la S. Congrégation citées par les auteurs, et sur- dispenser un curé de la résidence, il y a deux
tout par Fagnan qui ajoute encore qu'il ne suf- choses à distinguer : ou ce curé est tombé ma-
fit pas que la permission soit demandée, mais lade hors de l'endroit même où se trouve son
qu'il faut de plus qu'elle soit obtenue et donnée bénéfice, et alors évidemment il n'est pas tenu
par écrit. L'évêque cependant ne peut la refu- à la résidence ; ou il tombe malade à l'endroit
ser sans de graves motifs. même de son bénéfice, et alors la S. Congréga-
4° Néanmoins, lorsqu'il y a urgence à partir tion du Concile a déclaré que sa maladie ne pou-
sur-le-champ, le curé peut s'absenter sans per- vait le dispenser de la résidence, à moins qu'il
mission préalable, pourvu qu'il laisse, pour le n'eût sur les lieux ni médecin, ni les choses qui
remplacer, un vicaire capable ; mais il doit, au lui sont indispensables. Car alors il pourrait
plus tôt, faire connaître à l'évêque son départ et obtenir de l'Ordinaire la permission de quitter
le motif qui l'a occasionné pour que le prélat lui sa paroisse; mais s'il le faisait sans cette per-
accorde la permission requise. (S. C. du C, mission, croyant de bonne foi que l'évidence de
dans Garcias.) sa cause lui suffisait pleinement, il ne saurait
5° L'évêque peut défendre, par une constitu- être excusé. (S. C. du Concile, dans Fagnan.)
tion, à tout curé de s'absenter plus de deux jours Un évêque ne peut accorder une permission
sans sa permission. (S. C. du C., dans Garcias.) de ce genre pour plus de deux mois, à moins de
Mais quand il n'y a aucune constitution de ce cause grave. (Ainsi le croient en général les au-
genre, les curés peuvent, pour des raisons légi- teurs d'après le concile de Trente, sess. 23, De
times, s'absenter même sans en demander la Réform.C.1.)
permission. II. De la préséance.—1° Les chanoines et prê-
A la question de savoir : 1° Si le curé d'une tres de l'église cathédrale ont la préséance sur
paroisse de campagne où il ne se trouve pas tous les curés des églises paroissiales dans tou-
d'autre prêtre, peut, sans permission de l'évê- tes les processions et cérémonies sacrés, (S. C.
que, s'absenter de sa paroisse pendant deux ou des Rites, 2 août 1603), même dans les propres
trois jours, sans laisser un vicaire capable, lors églises de ces curés, lors que ces derniers se-
même qu'il n'y aurait pas de malades, la S. Con- raient revêtus du surplis et de l'étole. (Même
grégation du Concile arépondu négativement.— C., 25 juin 1611.)Mais les curés ont la préséance
2° Si au moins ce curé pouvait s'absenter du sur tous les autres prêtres qui n'appartiennent
matin jusqu'au soir, la S. Congrégation a ré- pas à la cathédrale. (S. C. des Rites, dans la
pondu affirmativement pourvu que ce ne fût pas même déclaration.) Les curés, dans les funérail-
586 CURÉS
les, ont rang avant les chanoines qui y assistent que tout le monde sache pour se sauver, et faire
sans leur propre croix, et sans l'autorisation du connaître, avec beaucoup de brièveté et de sim-
chapitre. (Môme Congr., 20 nov. 1603.) plicité dans le langage, les vices qu'on doit évi-
2° La préséance entre les curés eux-mêmes ter et les vertus qu'on doit pratiquer pour s'é-
des églises paroissiales, qu'ils soient séculiers pargner des peines éternelles et pour acquérir
ou réguliers, se base sur les prérogatives de les gloires du ciel.
leurs églises, (S. C. des Rites, 21 mars 1609),c'est- Un curé pécherait gravement, lors même qu'il
à-dire sur l'ancienneté et la dignité dos églises, n'y aurait pas une grande nécessité pour son
et non sur celles des curés eux-mêmes. (10 mai peuple, s'il passait trois mois de l'année, même
1612.) non continus, sans prêcher par lui-même ou par
Le curé qui est protonotaire n'a pas la présé- d'autres. On peut le conclure d'après les paroles
ance sur ceux qui ne le sont pas, parce que la mêmes du concile de Trente disant qu'on doit
préséance entre curés se lire des prérogatives de infliger des censures ou d'autres peines aux cu-
l'église paroissiale. (S. C. des Rites, 21 mars rés qui manqueraient, pendant trois mois de
1676.) l'année, au devoir de la prédication.
3° La p réséance dans les funérailles est due au 2° Les curés peuvent prêcher par eux-mêmes
curé archiprêtre en raison de l'étole, et non à pendant la célébration des messes, même quand
l'archidiacre, quoiqu'il soit le premier en di- l'évêque doit prêcher dans la paroisse, (S. C. du
gnité. (S. C. des Rites, 4 mai 1613.) Concile, 11 juin 1731), ce qui, en pareil cas,
4° Le curé, en dehors de ce qui appartient à ajoute la Congrégation ne doit pas s'entendre
son office, n'a régulièrement aucune préséance de la prédication des curés dans l'église parois-
ou prééminence; par conséquent, au choeur, le siale. Cette dernière déclaration explique cette
curé ne peut occuper une place ni plus élevée ni autre de la même Congrégation (2 mai 1629)di-
plus honorable que les autres prêtres qui s'y sant que, lorsque l'évêque prêche, tout autre
trouvent présents. (Rote, 10 mai 1707.) prédicateur doit se taire. Quand l'évêque officie
5° La préséance qui est due aux curés perpé- solennellement, il ne convieut pas qu'il y ait
tuels est également duc aux prêtres et curés sermon pendant la cérémonie, à moins que ce
amovibles, parce que ces derniers jouissent des sermon ne soit fait par l'évêque lui-même ou
mêmes prérogatives que les curés perpétuels. (S. par quelque chanoine qui, dans ce cas, remplit,
C du Concile, 27 mars 1706.) auprès de l'évêque, l'office de prêtre assistant.
6° Les curés ont la faculté de siéger dans les (Cérémonial des évêques.)
stalles canoniales après tous les chanoines. (S. 3° Si les curés veulent, par eux-mêmes, rem-
C. des Rites, 23 mars 1641.) Les curés qui siè- plir le devoir de la prédication, on ne doit pas
gent, après les chanoines sans doute, mais sur les en empêcher. (S. C. du Concile, dans Barbosa.)
les mêmes bancs, doivent être encensés immé- Mais, dans ce cas, ils ne peuvent en aucune façon,
diatement après les dignitaires et chanoines du et sous aucun prétexte de pauvreté, prétendre
côté où ils se trouvent eux-mêmes, et les curés aux honoraires qu'on a coutume de donner aux
qui se trouvent du côté opposé, après les digni- prédicateurs étrangers appelés pour prêcher. (S.
taires et chanoines de ce même côté. (Ainsi, ceux C. du Concile, 10 mars 1621.)
qui siègent à droite du choeur doivent être en- 4° Les curés ne doivent pas admettre dans
censés immédiatement après les chanoines qui se leurs églises des prédicateurs qui ne seraient
trouvent à droite, et ceux qui siègent à gauche, pas approuvés par l'ordinaire, lors même que
immédiatement après les chanoines qui se trou- le prédicateur serait un évêque. Ainsi l'a déclaré
vent à gauche.) — (S. C. des Rites, 3 déc. 1672.) Clément VIII. Cependant, d'après plusieurs au-
II. Du Curé relativement à la prédication et à la teurs, les curés pourraient donner à un homme
messe paroissiale. savant et connu la permission de prêcher deux
I. De la prédication. — 1° Les curés sont tenus, ou trois fois dans leurs églises, sans autorisation
au moins les jours de dimanche et de fête so- de l'évêque. Mais, à s'en tenir à la déclaration
lennelle, de prêcher par eux-mêmes la parole do de Clément VIII, dit Giraldi, on ne doit jamais
Dieu à leur peuple, ou, s'ils en sont légitime- laisser prêcher sans la permission de l'évêque.
ment empêchés, par d'autres prêtres capables. 5° Les curés, dans leurs sermons, doivent se
Ainsi l'a décidé le concile de Trente (sess. 5, De garder de citer les docteurs ou auteurs moder-
la réforme, ch. 2) qui indique même la manière nes, surtout les vivants. (S. C. du Saint-Office,
dont les pasteurs doivent nourrir de salutaires 27 oct. 1849.) Ils doivent se servir du catéchisme
paroles le troupeau qui leur est confié. Les curés romain, et expliquer clairement et simplement,
doivent donc enseigner ce qu'il est nécessaire à leurs auditeurs, des maximes utiles et qui
CURÉS 587
puissent être à la portée de leur intelligence, rés d'offrir le Saint Sacrificede la messepour le peu-
afin qu'ils écoutent avec plaisir, qu'ils se ren- ple lesjours de dimanche ou au moins les jours de
dent plus assidûment, et qu'ils retirent quelque fêtes supprimées?
fruit de ces prédications. (Clément XI, dans son 3° les curésdoivent-ils eux-mêmesoffrir le Saint
encyclique du 16 mars 1703.) Sacrifice de la messepour le peuple, tant qu'ils n'en
6° Tout curé est tenu de prêcher dans son sont pas empêchéspar uneraison légitime,ou peuvent-
église, et il ne saurait trouver d'excuse dans une ils satisfaireà ce devoirpar unautre, par un chapelain,
coutume même immémoriale, en prétextant qu'il par exemple,ou par un prêtre étranger?
se fait des prédications dans d'autres églises, ou La S. C. du Concile a cru devoir répondre :
que les auditeurs ne se rendent pas. Ainsi l'a A la première question affirmativement.
déclaré Innocent XIII. Il suffit cependant, pour A la seconde négativement.
satisfaire au devoir de la prédication, de faire A la troisième affirmativementpour la première
chaque jour de fête une pieuse allocution. (S. C. partie, négativement pour la seconde, à moins
du Concile, 8 août 1732). qu'il n'y ait une nécessité réelle, et le concours
II. De la célébrationde la messe.— 1° Un curé, d'une cause canonique (25 sept. 1847.)
les jours de fête, doit célébrer la messe dans son 4° Les curés ne peuvent empêcher les recteurs
église et non dans une autre, nonobstant toute de toute autre église de célébrer leurs messes
coutume contraire. (S. C. du Concile, 18 sept. avant la messe paroissiale. (S. C. des Rites, dans
1629.)L'obligation de célébrer pour le peuple la collection de Gardellini, n° 1134.)
est personnelle, par conséquent un curé ne peut 5° L'évêque peut exhorter, mais non pas for-
pas y satisfaire par un autre, à moins qu'il ne cer un curé à fournir les ornements, et tout ce
soit légitimement empêché lui-même, (S. C. 27 qui est nécessaire pour le Saint Sacrifice, aux
fév. 1847 et juillet 1848), ou qu'il ne s'agisse prêtres qui demeurent sur sa paroisse, et qui de-
d'une messe solennelle, suivant l'interprétation mandent à dire la messe dans son église parois-
suivante de ces décrets donnée par Gardellini : siale. (S. C. des Rites, 10 juin 1602, et 31 mars
« Un curé peut célébrer la messe pour le peuple, 1703.)
par lui-même ou par un autre, lorsqu'il s'agit III. Du Curé relativement à l'administration des
d'une messe solennelle, mais s'il s'agit d'une sacrements et aux funérailles.
messe privée, il doit la célébrer par lui-même, à I. 1° Il n'est pas permis à un curé de cathé-
moins qu'il n'en soit légitimement empêché. • drale d'administrer les sacrements dan; une pa-
2° Un curé malade, et ne pouvant, pour ce motif, roisse étrangère. (S. C. du Concile, 20 sept. 1628.)
célébrer la messe un jour de dimancheou de toute Il ne lui est même pas permis do les adminis-
autre fête, est-il tenu de se faire remplacerpar un trer aux chanoines infirmes de cette cathédrale;
autre prêtre s'il y en a; ou bien doit-il, après avoir cela ne regarde que le curé du domicile. (S. C des
recouvréla santé, dire lui-mêmepour le peuple toutes Ev. et Rég., 12 mai 1683.)
les messesqu'il n'aurait pu dire à cette intention? — 2° C'est au curé de la paroisse qu'il appartient
La S. Congrégation du Concile a répondu affir- d'administrer les sacrementsaux serviteurs ou
mativement à la première question et négative- servantes employés dans les couvents de reli-
ment à la seconde, (c'est-à-dire que ce curé ne gieuses, seraient-elles exemptes, et non au con-
doit pas attendre le retour de sa santé, mais se fesseur de ces religieuses. (S. C. du Concile, 14
faire remplacer par un autre prêtre) (14 déc. avril 1685).Les religieux eux-mêmes ne peinent
1859.) — Un curé qui entreprend un voyageun jour pas administrer les sacrements dans les maisons
de fête, et qui ne peut, ce jour-là, dire la messe, est- des tierçaires agrégés à leur ordre, sauf le sacre-
il tenu de célébrer,un autre jour, pour le peuple, la ment de Pénitence ; l'administration des autres
messequ'il a ainsi omise?— La S. Congrégation sacrements appartient au curé. (S. C. du Con-
du Concile a répondu que ce curé devait, pour cile, 20 juin 1609.)
le jour en question, se faire remplacer par un 3° Un curé peut accorder à un simple prêtre
autre prêtre, à moins d'un induit spécial du la permission d'administrer les sacrements dans
Saint-Siège. (Même déclaration.) sa paroisse, sauf celui de Pénitence (S. C. des
3° Aux trois questions suivantes: 1° Les curés Ev. et Rég., 20 août 1602.)
doivent-ilsoffrir le Saint Sacrificepour le peuple les 4° L'ordinaire ne doit pas, sans de très graves
jours de dimanche et mêmeles jours de fête qui ont motifs, enlever aux propres curés la célébration
été suppriméspar un induit apostoliquedu 9 avril du baptême et des mariages, et les administrer
1802,quoiquel'évêquediocésainn'ait pas donnécon- lui-même, ou en déléguer l'administration à
naissancepubliquede cette obligation? d'autres. (S. C. des Ev. et Rég., 17 sept. 1604.)
2° Unecoutumelégitimepeut-elle dispenserles cu- 5° Un curé peut entendre les confessions de
588 CURÉS
ses paroissiens dans un diocèse étranger sans la sont la bénédiction et la distribution des cier-
permission de l'éyêque de ce diocèse; mais s'il ges, des cendres et des rameaux, du feu, des
y était appelé par des curés pour y entendre les semences, des oeufs et autres choses semblables,
confessions de leurs paroissiens, il ne pourrait les cérémonies de la semaine sainte, et la célé-
le faire sans l'autorisation de leur évêque. (S. bration de la messe le jeudi saint. (S. C. des
C. du Concile, 3 déc. 1707.) Il est douteux qu'un Rites, 10 déc. 1703.)Il fut ajouté dans cette même
curé, appelé par un autre curé du même dio- déclaration, que la bénédiction des femmes après
cèse, puisse entendre les confessions dans la leurs couches, et celle des fonts baptismaux de-
paroisse de ce dernier. Il y a des canonistes qui vaient être faites par les curés.
l'affirment, d'autres qui le nient d'après cette Il Des funérailles. — 1° Les héritiers des dé-
déclaration de la Congrégation du Concile : funts ont la faculté de fournir, pour leur sépul-
« Celui qui est pourvu d'une paroisse par voie ture, le nombre de cierges qu'ils veulent, no-
de concours n'est censé approuvé, pour entendre nobstant tout prétexte contraire invoqué par le
les confessions, que dans la ville ou cité où se curé. (S. C. des Ev. et Rég., 5 mai 1617.) Ces
trouve sa paroisse, mais non dans tout le dio- mêmes héritiers peuvent également inviter le
cèse. » Il en serait autrement cependant si la nombre de religieux qu'ils veulent pour accom-
volonté de l'évêque s'était manifestée dans un pagner le cadavre à l'église. (S. C. des Rites,
sens différent. Il suit encore de là qu'un curé, 21 nov. 1627.) Et le curé ne doit appeler à la
après avoir quitté son bénéfice paroissial, ne cérémonie que les clercs désignés par ces héri-
peut entendre les confessions sans une nouvelle tiers, et pas d'autres. (Même C, 30 août 1601.)
approbation de l'évêque. Un curé ne peut pas, contre la volonté des héri-
6° Un curé qui administre le S. Viatique ne tiers des défunts, empêcher aux réguliers, ou
peut, ni de nuit, ni de jour, porter un chapeau, aux autres clercs invités par eux, d'assister aux
même sous prétexte de santé. (S. C. des Rites, funérailles. (Même C, 23 avril 1663.)
13 août 1695.) 2° Un curé ne peut pas forcer les héritiers à
7° Un curé peut prendre le Saint Sacrement, faire célébrer, dans son église paroissiale, pour
pour porter le Saint Viatique à des malades, les défunts qui sont ensevelis dans les églises
dans toutes les églises tant séculières que régu- des réguliers, les services, neuvaines, etc., qui
lières, même exemptes, qui se trouvent dans sa se célèbrent dans les églises des réguliers où
paroisse, pourvu qu'il y ait nécessité. (S. C. des reposent les cadavres ( S . C. des Rites,
Rites, 22 août 1703.) Et même, en l'absence de 23 avril 1633.) Mais il faut, ou la permission,
l'lndultaire, il peut, dans un cas de nécessité, ou l'intervention du curé, pour que des régu-
célébrer dans un oratoire privé pour adminis- liers puissent faire la levée du corps dans sa
trer le S. Viatique à un malade (Même C, dans paroisse, à moins que lui-même n'ait formelle-
Gardellini, n° 4782.) ment refusé de le faire. (Même C, 18 oct. 1619.)
8° Parmi les droits curiaux, ou parmi les fonc- Lorsqu'un curé, invité à faire la levée du corps,
tions qui appartiennent en particulier aux cu- refuse d'y aller ou d'envoyer quelqu'un, les ré-
rés, Monacellus énumère : 1° le port de l'étole guliers peuvent la faire sans le curé, et même
dans les cérémonies funèbres (S. C. du Concile, porter le cadavre dans leurs églises pour l'y
25 juin 1695); 2° la bénédiction des maisons le ensevelir. (Même C, 22 juin 1675.)
samedi-saint; 3° l'administration du sacrement 3° Quoique pour une sépulture, on n'ait de
d'Eucharistie au temps pascal et dans les cas mandé que des réguliers, le propre curé cepen-
de maladie; 4° la garde de la clef du tabernacle dant ne doit jamais être exclu. (S. C. des Ev.
et de tout ce qui appartient aux sacrements et Rég., 1581.)C'est même à lui qu'il appartient
(S. C. du Concile, 11 nov. 1693); 5° la bénédic- d'indiquer la voie par laquelle on portera le ca-
tion des époux et celle des cadavres des défunts davre, et de faire tout ce qui est nécessaire jus-
avant la levée du corps à la maison mortuaire; qu'à la porte de l'église des réguliers où doit se
6° la publication des mariages, des excommuni- faire la sépulture. (Même C, 3 janvier 1594.)
cations et des indulgences (S. C. des Evêq. et 4° Les réguliers qui meurent hors de leurs
Rég., 3 juillet 1615). Toutes ces différentes fonc- cloîtres, peuvent être portés à leurs églises sans
tions ne doivent être exercées et remplies que le consentement des curés. (S. C. du Concile,
par le curé, ou avec sa permission. On ne peut 2 juillet 1620.)
même rien faire, rien établir, malgré lui, 5° Un curé doit faire la cérémonie funèbre
dans son église paroissiale. (S. C. des Rites, sur le corps du défunt, lors même qu'il y aurait,
15 sept. 1649.) dans son église, des chanoines de l'église cathé-
Les fonctions qui ne sont pas purement curiales drale. (S. C. des Rites, 28 avril 1607.)
CURÉS 589
5° Le curé du défunt a la préséance sur celui la croix et l'étole, mais au confesseur lui-même
dans la paroisse duquel le défunt est mort à des religieuses. (S. G. du Concile, 22 août 1726.)
l'improviste. (S. C. des Rites, 9 déc. 1634.)Il est 10° Les curés qui assistent à un convoi fu-
permis à un curé, qui fait des funérailles hors nèbre ne peuvent prétendre à un plus grand
de son église, de passer sur les limites des au- nombre de cierges qu'un supérieur de réguliers
tres paroisses, même de la cathédrale, sans en accompagné de ses autres religieux. (S. C. du
être inquiété. (S. C. des Rites, 17 nov. 1674.) Concile, 15 mars 1604.) Il faut en dire autant
Mais il ne lui est pas permis d'arborer sa croix pour les autres prêtres ou chanoines.
et de porter l'étole en procédant à des funé- Du droit de sépulture. — 1° Toute personne qui
railles dans une autre paroisse (serait-ce même n'en est pas empêchée de droit, peut se choisir
la paroisse du défunt). (Même C, 21 avril 1714.) un lieu de sépulture dans n'importe quelle église
7° Un chanoine de cathédrale qui meurt sans qui jouit du droit d'inhumation. Cela ressort
s'être choisi le lieu de sa sépulture, doit être de plusieurs décrétales des Souverains Pontifes.
enseveli dans la cathédrale même, pourvu qu'il Quiconque ne s'est pas choisi un lieu de sépul-
y ait un tombeau particulier aux chanoines; ture, doit être enseveli dans la tombe de ses
sinon il doit être senseveli dans le tombeau de aïeux. Et si l'on n'a pas même un pareil tom-
ses ancêtres. (S. C. du Concile, 14 mai 1685.) beau, et qu'on ne s'en soit pas choisi un, on
Pour la sépulture des chanoines, il est dû au doit être enseveli dans sa propre paroisse, là où
curé du domicile une quarte funéraire qui n'est l'on a reçu les sacrements.
due ni au curé de la cathédrale, ni au curé de 2° Les pèlerins qui sont de passage doivent
la paroisse où se trouve le tombeau des an- être ensevelis à la cathédrale, à moins qu'ils ne
cêtres. (Même déclaration.) se soient choisi eux-mêmes un lieu de sépulture.
8° Le curé doit marcher à la suite de la croix Pour les étrangers et pèlerins qui auraient, pen-
des réguliers, lorsque le cadavre est porté à dant quelque temps, séjourné dans une paroisse,
l'église de ces derniers. (S. C. du Concile, 21 juil- ils doivent être ensevelis dane l'église parois-
let 1645, etc.) A moins qu'il ne soit acquis, par siale. (S. C. des Evêq. et Rég., 3 juillet 1592.)
une coutume légitime, que les curés comme les Les soldats, serviteurs, étudiants, où qu'ils
réguliers peuvent arborer chacun sa croix. soient, s'ils ne se sont pas choisi un lieu de sé-
Un curé ne peut pas, avec son étole et la croix pulture, doivent être ensevelis dans la paroisse
en tête, entrer dans les églises des réguliers qu'ils habitent et où ils sont morts. Pour les
pour y. accompagner les cadavres. (S. C du jeunes gens et les jeunes filles encore séculiers
Concile, 22 avril 1625,et S. C. des Evêq. et Rég., qui n'ont pas sans doute pris l'habit religieux,
16 déc. 1661.)Il y a cependant plusieurs autres mais qui sont à même de le prendre, ils doivent
déclarations de ces mêmes congrégations qui être ensevelis dans le couvent où ils sont
attribuent ce droit au curé. Aussi, d'après la morts.
constitution Praetiosus de Benoît XIII, semble- 3° « Nous défendons très expressément à tous
rait-il que, par ces déclarations, l'exemption sur les religieux et clercs séculiers de n'importe
ce point aurait été enlevée aux réguliers. Mais quel état ou condition, en vertu de la sainte
cette constitution a été révoquée par Clé- obéissance, et sous peine do malédiction éter-
ment XII, et par conséquent c'est la discipline nelle, de pousser n'importe qui à jurer ou même
confirmée par les déclarations citées en premier à promettre qu'on choisira leurs églises pour
lieu qui subsiste toujours. lieu de sépulture, ou qu'après les avoir choisies
C'est le propre curé du défunt dont le cadavre on ne changera plus. » Ainsi s'exprime Boni-
doit être porté dans une église de réguliers, qui face VIII. Et dans la clémentine Cupiente, il est
doit le bénir et entonner les prières des morts; même dit, qu'en pareil cas, il y a lieu d'encou-
aux réguliers appartient le soin de célébrer l'of- rir une excommunication n' ajoure réservée au
fice dans leur propre église. (S. C. des Rites, Pape. Il est néanmoins controversé, entre les
18 nov. 1606.) Un curé, qui conduit un convoi canonistes, si les curés qui empêcheraient
funèbre à une église de réguliers doit se retirer, leurs paroissiens de choisir leur sépulture dans
une fois qu'il est parvenu à la porte de l'église une autre église, encourraient l'excommunica-
et qu'il a donné une dernière bénédiction au ca- tion, parce que la clémentine Cupiente semble
davre. (S. C. des Rites, 23 mars 1619.) avoir été faite en faveur des curés.
9° Lorsqu'il y a lieu de transporter le cadavre 4° Un curé ne peut différer une sépulture sous
d'une religieuse à une église extérieure au cou- prétexte qu'on ne lui assure pas sa quarte funé-
vent, ce n'est pas au curé de la paroisse qu'il raire, (S. C. des Evêq. et Rég., 5 mai 1617),ou
appartient de faire la cérémonie funèbre avec que les droits de sépulture ne lui sont pas payés.
500 CURIE ROMAINE
(Même C, 17 sept. 1617.)Les cadavres des pau- bénéficia veri nominis non teneant, a munere suo
vres doivent recevoir gratuitement les honneurs recedere, nonobtenta prius ordinarii licentia?
de la sépulture. (Même C, 5 mai 1617.) 2° An ex praeceptoobedienliae,adhibitis etiam, si
5° Un curé, à l'occasion du transport à travers opus fuerit, censuris episcopus jus habeat eos co
ut in suo munere persistant, usquedumipsis
sa paroisse d'un mort appartenant à une paroisse gendi de idoneo successoreprovidere valeat?
étrangère, ne ni
peut exiger cire, ni argent pour 3° Utrum sub eodemproecepto,iisdemque intenta-
sa quarte funéraire, ou à tout autre titre. (S. C. tis censuris, facultatemhabeat episcopus,sacerdotes
des Evêq. et Rég., 24 nov. 1713.) viribus pollentes, et ab aliis ofdciis tiberos, compel-
6° On ne peut, ni avant le lever, ni après le lendi ad earum ecclesiarumcuram percipiendamus-
coucher du soleil, porter et ensevelir les morts, quedum illis alio modoproviderequeat?
sans une permission de l'évêque. (C. S. du C, Die 9 maii 1884, Sacra Congregatio EEmorum.
15 mars 1713.) S. R. E. Gardinalium Goncilii Tridentini Interpre-
— tum, attentis peculiaribus circumstantiis, censuit
De la quarte funéraire. 1° La quarte funé aire rescribendum: Ad primum : négative; —ad secun-
est la portion, fixée par le droit canonique, qui dum : affirmative; — ad tertium : affirmative,vi-
est due au curé pour l'administration des sacre- gore facultatum quae,approbante SSmoDominonos-
ments. On la trouve établie dans plusieurs dé- tro, Emo archiepiscopooratori tribuuntur ad septen-
crétales des Souverains Pontifes. Cette quarte nium tantum, si tamdiu expositae circumstantise
funéraire est attribuée à l'église où le paroissien perduraverint.
qui doit la payer a l'habitude d'entendre la L. card. NINA,Proefect.
messe et de recevoir les sacrements. Par consé- J. VERGA, Secret.
quent elle est, de droit, due au propre curé ou Pour copie conforme:
prêtre qui est chargé des paroissiens. (Rote, 14 i& FL., card. archiepiscopusTolos.
mars 1622.)Si un paroissien entendait la messe CURIE ROMAINE:.
dans sa paroisse et recevait les sacrements dans
une autre, c'est à cette dernière que serait due Curies, divisions du peuple introduites par
la quarte funéraire. Romulus. Chaque curie avait un bâtiment spé-
2° La quarte funéraire est due sur ce que don- cial pour ses réunions. Ce bâtiment s'appelait
nent les héritiers du défunt pour les honoraires curia.
des funérailles. (Sixte IV, dans sa constitution Le nom passa plus tard aux assemblées déli-
Etsi. mendicantium.)Cependant elle n'est pas due bérantes et aux bâtiments destinés aux affaires ju-
sur les messes, anniversaires ou legs pieux lais- diciaires. Les affaires dépendantes de ces curies
sés en faveur do l'église où s'est faite la sépul- se nommaient curiales. On dit encore aujour-
ture. (Benoit XIII, dans sa constitution Roma- d'hui, en Allemagne, par exemple, style curial
nus Pontifex. ) pour le style du palais, c'est-à-dire pour dési-
Nous croyons devoir faire suivre cette ques- gner les formes régulières et la terminologie
tion déjà un peu-longue, d'une décision donnée, propre dont on se sert pour la rédaction des do-
le 9 mai 1884,par la S. C. du Concile: cuments publics des tribunaux.
En droit canonique, on entend par le mot
L'évêquepeut-il, et quand, obligerses prêtres à exer- curie l'Administration centrale qui est préposée
cer le ministèreparoissial? au gouvernement des affaires publiques de l'É-
Voici les réponses données par la S. C. du glise.
Concile aux demandes suivantes, portées à la Il s'ensuit que chaque siège épiscopal a sa cu-
décision du Saint-Siège par S. Em. le card. ar- rie, et que la curie romaine est la curie su-
chevêque de Toulouse : prême.
Les curies diocésaines,quelle que soit leur di-
BeatissimePater gnité, n'ont nécessairement qu'un petit nombre
Cardinalis archiepiscopusTolosanusreverenterex- d'officiers et une forme très simple, puisque,
ponit, quod non raro accidit, ut sacerdotesquibus chez elles, tout consiste dans les offices du vi-
cura amovilis ecclesiarum succursalium commissa caire général et de l'officialilé.
fuit, muneri suo renuntient, et antequam ordinarius La curie romaine, en tant qu'elle est diocé-
renuntiationemacceptet, ad propria, co quod bénéfi-
cia proprie dicta non possident, redeoant.Unde con- saine, n'a pas une forme différente. Elle consiste,
tingit non paucossacerdotesvitam otiosamtraducere, en effet, en un vicariat auquel est préposé un
dum plures parochialesecclesiaesuis careart rectori- cardinal vicaire aidé dans ses fonctions, par un
bus. Quapropter praedictus cardinalis archiepisco- prélat revêtu du caractère épiscopal, qui porte
pus quserit. titre de vice-gérant,avec un prélat pour la visite
1°Utrum liceat memoratis sacerdotibus, eo quod des monastères, un autre prélat, promoteur fiscal
CUSTODE 591
pour les affaires ecclésiastiques, deux délégués CUSTODE.
pour les affairos matrimoniales, et un défenseur Le mot custode se prend pour sacristain et
des professions religieuses et matrimoniales. Le
vicariat apostolique a sa chancellerie , et ses pour ciboire, ce qui divise ce titre en deux pa-
commissions comme toutes les administrations ragraphes.
diocésaines. § I. Custode, sacristain.
Mais la curie romaine se rapportant à toute On appelait ainsi autrefois celui qui avait,
la république chrétienne, celle que l'on désigne dans l'église, le soin des cloches, du linge, des
généralement quand on dit la Curie romaine, ou lampes et de tous les différents meubles à l'u-
même simplement la Curie, comprend dans le sage de l'église. Il était entièrement soumis et
sens strict du mot les autorités dont le pape se subordonné à l'archidiacre, qui pouvait le des-
sert habituellement' pour régir l'Église univer- tituer. (C. 1 de Officiocustodis.) Le concile de To-
selle; c'est l'administration de la primauté pa- lède fit un règlement touchant l'étal et les fonc-
pale. tions de custode, qui se trouve dans le chapitre
Dans un sens plus étendu, on ajoute les auto- second de ce môme titre. En voici les ternies :
rités et les fonctionnaires qui composent l'en- « Custos sollicilus débet esse omni ornamento
tourage immédiat du pape, ou la cour pontificale. ecclesae, et luminariis, sive incenso ; necnon
Si on a tant élargi la signification de ce mot, panem et vinum omni tempore praeparatum ad
c'est que presque toutes les institutions faites missam habere débet, et per singulas horas ca-
par les papes ont quelque rapport avec celles nonicas signum ex consensu archidiaconi sonare,
qui concernent le gouvernement général de l'É- et omnes oblationes, seu elcemosynas, seu deci-
glise. mas (cum ejusdem ,tamen consensu absente
Nous allons d'abord dire quelques mots de la episcopo) inter fratres dividat. In his tribus Ec-
Curie dans le sens strict du mot. clesiae columnis (ut sancta sanxit synodus) con-
Benoît XIV fit diverses modifications à la Cu- sistere debet alma mater Ecclesia, ut ad hoc
rie et la divisa en deux sections : la Curie de opus taies ordinentur, quales meliores et sanc-
grâces et la Curie de justice. tiores esso viderint, ut nulla negligentia in
I. — La Curie de grâces comprend : sancta Dei Ecclesia videatur. »
1° la Chancellerie apostolique ; « Hi tres archidiaconus, archipresbyter, cus-
2° la Daterie; tos, simul juncti uno animo provide peragant et
3° la Chambre apostolique; perfecte, et non sit invidia neque zelus inter
4° la Pénitencerie apostolique ; illos. »
5° les Secrétaireries Palatines, qui sont : L'office de custode avait, comme l'on voit, des
1° la Secrétairerie d'Etat; 2° la Secrétairerie fonctions dont l'exercise sera toujours néces-
des Brefs; 3° la Secrétairerie des Mémoriaux; saire dans les églises. On ne connaît, dans plu-
4° l'Auditorat de Sa Sainteté; 5° l'Aumônerie sieurs cathédrales, cet office de custode que sous
de Sa Sainteté; — 6° la Secrétairerie des Brefs le nom de sacristain, sous lequel aussi est un pe-
aux princes; 7° la Secrétairerie des Lettres tit sacristain chargé du soin de la sacristie 1.
latines. Tout cela dépend des usages.
II. — La Curie de justice comprend la Rote, et Les supérieurs de certains couvents sont aussi
l'une et l'autre signature, c'est-à-dire la Signa- appelés custodes, gardiens. La province qu'ils
ture de justice et la Signature de grâce. régissent s'appelle, pour cette raison, custodie.
Les Congrégations Romaines qui font aussi On trouve même quelquefois le nom de custos
partie de la Curie, ont, comme nous l'avons vu, donné au recteur ou curé d'une paroisse.
une situation particulière. Voirles mots: Sacristain,
Discret.
Si l'on prend le mot Curie dans le sens le plus § II. Custode, ciboire.
étendu, il faut ajouter à l'énumération ci-dessus Les ordos romains parlent d'un vase destiné
la Famille pontificale (Familia pontificia),autre- à contenir les hosties consacrées, et qu'ils ap-
ment dit la cour du pape dont nous donnerons la pellent custodia deaurata. Ce n'est autre chose
composition au mot Famille pontificale. que ce qu'on nomme aujourd'hui ciboire. On
. On trouvera les explications nécessaires sur nomme plus communément custode le petit ci-
les différentes parties de la Curie en se repor- boire, avec ou sans pied, qui sert à porter la
tant, dans l'ouvrage, aux différents noms qui sainte Eucharistie aux malades. Assez souven.
les désignent. Pour la Chancellerie apostolique, la tige de ce vase est disposée pour conteni
on voudra bien aussi consulter l'Appendice du l'huile des infirmes; il est néanmoins beaucoup
présent volume. 1.Barbosa,deJureecclesiastico,
lib, I, cap.27.
592 DAIS
plus décent que cette huile soit dans un vase cras particulas, accensoque thymiamate, ter
particulier. Le nom de custode est pareillement Sanctus cantabis cum Symbolo fidei, trinaque
donné à la boîte munie de deux cristaux, et dans genuum flexione adorans, sumes sacrum pre-
laquelle est la sainte Hostie qu'on expose dans tiosi Christi corpus. « Il fait placer sur la table
l'ostensoir. sacrée le vase des présanctifiés, quand c'est un
Il paraît que du temps des persécutions, lors- oratoire ; si c'est une chambre, on le place sur
qu'il était permis aux fidèles d'emporter l'Eu- un banc ou escabeau très propre ; ensuite, dé-
charistie dans les maisons, on avait des boîtes ployant le petit voile, vous y mettez les sacrées
ou custodes pour la conserver. On lit, dans la particules; puis, brûlant de l'encens, vous chan-
vie de S. Luc le Solitaire, un passage qui est terez trois fois Sanctus et le Symbole de la foi.
cité par Grandcolas, et dans lequel il est parlé Enfin, adorant l'Eucharistie par une triple gé-
d'un vase de cette nature. Nous citons entier ce nuflexion, vous prendrez le saint et précieux
passage curieux, tel que nous le lisons dans l'au- corps de Jésus-Christ. »
teur précité : « Imponendum sacrae mensae per-
CUSTODINOS.
sanctificatorum vasculum (nous présumons qu'il
faut lire proesanctificatorum), siquidem est ora- Les canonistes appellent ainsi une sorte de
torium ; sin autem cella, scamno mundissimo; dépositaire dont il est parlé sous le mot : Re-
tum explicans velum minus, propones in eo sa- grès.