DE LA POLYNESIE FRANCAISE
RAPPORT D’OBSERVATIONS
DEFINITIVES
RAPPEL DE LA PROCEDURE
Le contrôle a été ouvert le 8 septembre 2008, après avis du Ministère public, par lettre
adressée en courrier recommandé avec accusé de réception à M. Léonard TOUATINI,
président de l’association.
Le délai imparti pour répondre à ces observations était de deux mois. Tous les
destinataires ont accusé réception. M. Vito MAAMAATUAIAHUTAPU, président de
l’association, s’est limité à produire en réponse les comptes 2008 certifiés, à
l’exclusion de tout commentaire écrit.
L’association Te Reo O Tefana, dont le siège social est situé à l’ancienne mairie de FAA’A, a été
créée en 1984 et exploite une radio FM. Elle est présidée depuis le 8 septembre 2008 par M. Vito
MAAMAATUAIAHUTAPU qui a succédé à M. Léonard TOUATINI.
Radio Tefana, avec le soutien indéfectible de la commune de FAA’A, produit et diffuse des
programmes socio-éducatifs, culturels et informations diverses.
La diffusion sur les ondes hertziennes est encadrée par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication, sous le contrôle du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel
(CSA) et du comité technique radiophonique (CTR) qui le représente localement et in fine de
l’autorité judiciaire.
Depuis sa création, Radio Tefana a constamment bénéficié d’autorisations d’émettre délivrées par
le CSA. Actuellement, elle est autorisée à émettre dans le cadre d’une convention n° 2006-815
signée le 28 novembre 2006 pour une durée de 5 ans.
Radio Tefana disposait en 2007 d’un budget de 80 MF CFP, alimenté par des recettes publicitaires
d’environ 20 MF CFP et par une subvention municipale de 60 MF CFP, auxquelles il conviendrait
d’ajouter plus de 20 MF CFP de subventions en nature sous forme de prises en charge diverses par
le budget communal (agents mis à disposition, locaux, matériels). Il s’agit du plus gros budget de
radio associative polynésienne, grâce au soutien financier exclusif de la commune de FAA’A. Ce
budget a toutefois été réduit en 2008 par une baisse drastique et rapide de la subvention
communale.
La chambre a constaté que plusieurs remarques formulées dans le cadre de son dernier rapport
d’observations 1 relatif à la gestion de la commune de FAA’A au sujet de Radio Tefana ont été
suivie d’effet.
Les conditions dans lesquelles l’association reçoit des subventions communales ont, pour
l’essentiel, été formellement mises en conformité avec le cadre légal et réglementaire : en
particulier, une convention encadre depuis 2003 les relations financières entre Radio Tefana et la
commune de FAA’A.
Depuis 2004, date du dernier rapport d’observations adressé à la commune, la qualité des comptes
produits par l’association s’est nettement améliorée, même si des progrès en matière de
transparence comptable sont encore souhaitables.
Radio Tefana se trouve, en dépit des améliorations apportées, dans une situation fragile. Jusqu’à
présent la situation financière n’était équilibrée que grâce aux fortes subventions publiques versées
par la commune de FAA’A. L’apparition d’un déficit, provoqué par la diminution des subventions
en 2008, souligne l’extrême dépendance de la radio vis-à-vis de cette collectivité.
Le développement d’une radio non commerciale par une commune moyenne, au-delà d’un certain
format, peut en effet trouver des limites financières naturelles qui doivent nécessairement être
prises en compte dans le cadre de la convention liant la collectivité et l’organisme subventionné.
1
Commune de FAA’A, rapport d’observations définitives du 2 août 2004 (IV – La radio « Te Reo O Tefana »).
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 2 sur 18
SOMMAIRE
2.1 – Les subventions communales prédominent dans l’ensemble des recettes ............... 13
CONCLUSION....................................................................................................................... 16
ANNEXE ................................................................................................................................. 18
Te Reo O Tefana est une association de la loi de 1901, créée le 20 août 1984. Son siège social
est fixé à FAA’A, à l’emplacement de l’ancienne mairie (gendarmerie désaffectée).
Dans ce cadre, en application de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901, Te Reo O Tefana a été
soumise au simple régime déclaratif imposé aux associations pour jouir de la capacité
juridique. Des statuts ont été adoptés lors de la première assemblée générale, le 20 août 1984.
La déclaration et le dépôt des statuts sont intervenus plus tard, le 15 janvier 1985. Une
insertion au Journal officiel de la Polynésie française a été réalisée le 1er mars 1985.
Depuis sa création, l’association avait pour objet « la mise en place et l’exploitation d’une
station d’émission radiophonique en moyenne fréquence, la préparation de programmes
d’émission à caractère socio-éducatif, culturel et la diffusion d’informations diverses
(actualités, loisirs, etc…) » et depuis 1999 « l’organisation de journées culturelles sportives
et récréatives ». Après une modification, intervenue le 6 septembre 2008, l’objet associatif a
été redéfini. Il s’énonce désormais comme suit : « L’association Te Reo o Tefana a pour objet
la mise en place et l’exploitation d’une station d’émissions radiophoniques en modulation
fréquence, et à travers elle, la promotion de la lutte anti-nucléaire et l’accession à la
souveraineté ».
L’activité principale de l’association est d’exploiter une radio locale non commerciale
émettant depuis TAHITI. Essentiellement subventionnée par la commune de FAA’A,
l’association a toujours entretenu d’étroites relations avec son maire, M. Oscar TEMARU, qui
en était le président d’honneur, jusqu’en 2008, et avec son parti politique, le Tavini
Huira’atira, qui se reconnaît sans doute pleinement dans le dernier objectif de l’association,
ajouté en 2008 lors de la modification des statuts.
En outre, elle doit aussi s’astreindre à respecter les conditions qu’impose la loi au
financement par subventions publiques des radios et associations.
Te Reo O Tefana est une association à vocation culturelle qui exploite une radio non
commerciale. A ce titre, elle doit respecter les obligations légales qui découlent de son activité
radiophonique.
Dans le cadre de la loi sur la liberté de communication, Te Reo O Tefana est également
soumise aux stipulations des conventions qu’elle signe avec le conseil supérieur de
l’Audiovisuel (CSA).
Dans la loi sur la liberté de communication qui encadre cette liberté publique « est considéré
comme service de radio tout service de communication au public par voie électronique
destiné à être reçu simultanément par l’ensemble du public ou par une catégorie de public et
dont le programme principal est composé d’une suite ordonnée d’émissions comportant des
sons ».
Radio Tefana relève, dans la nomenclature du CSA, de la catégorie des radios non
commerciales dites de catégorie A. A ce titre, elle doit assurer un service radiophonique de
type associatif remplissant une mission de communication sociale de proximité, pour lequel
les ressources commerciales 4 qu’elle se procure ne peuvent théoriquement être supérieures à
20 % de son chiffre d’affaires.
Radio Tefana est titulaire d’une autorisation d’émettre délivrée par le CSA. Par décision
n° 90-60 du 13 février 1990, une première autorisation d’exploiter en modulation de
fréquence lui a été donnée pour 5 ans à compter du 31 mai 1990. Depuis, par les décisions
n° 94-140 du 15 mars 1994, n° 97-174 du 29 avril 1997, n° 2001-902 du 27 novembre 2001 et
n° 2006-815 du 28 novembre 2006, le CSA a constamment renouvelé cette autorisation.
2
Autorité administrative indépendante créée par la loi du 17 janvier 1989.
3
Visées aux articles 29 et 29-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.
4
Publicité de marque ou de parrainage.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 5 sur 18
Le dernier renouvellement a été accordé pour cinq ans à compter du 31 mai 2007, après que
des réserves aient été clairement exprimées par le président du CSA 5 , dans un courrier
informant M. TOUATINI que Te Reo O Tefana ne remplissait plus les conditions lui
permettant de relever du régime des radios non commerciales. Il avait en effet été constaté
que le montant des recettes commerciales avait dépassé la limite autorisée en s’élevant à
34,4 % des produits d’exploitation en 2001 et 21,5 % en 2004. Cette situation paraissait
d’autant plus préoccupante au président du CSA que les comptes 2005, ne lui étaient pas
parvenus, ce qui ne lui permettait pas de constater l’évolution de la part des recettes
commerciales. Après des négociations, dans le cadre desquelles l’association aurait annoncé
une diminution de ses recettes publicitaires en 2007, l’autorisation d’émettre a finalement été
renouvelée.
La chambre a néanmoins pu constater que les recettes commerciales sont demeurées depuis
2004 supérieures à 20 %, y compris en 2007 : 24,73 % en 2005, 30,11 % en 2006, et 24,24 %
en 2007 (voir annexe). Il est vrai que les recettes totales apparaissant dans les comptes de
l’association n’intègrent pas la valorisation des subventions en nature accordées par la
commune. En ne procédant pas à cette valorisation, l’association se pénalise puisqu’elle fait
apparaître un taux de recettes commerciales la mettant en infraction avec la règle des 20 %.
Dans sa convention avec le CSA, l’association s’est engagée en outre à respecter une
programmation d’intérêt local ayant pour objet de remplir une mission sociale de proximité,
notamment en retransmettant sur ses ondes toutes informations d’intérêt général émanant des
services publics locaux et à respecter une durée d’émission ne dépassant pas 23h30 en
semaine, 23h le samedi et 21h le dimanche.
Dans les clauses de la convention relatives au contrôle et aux pénalités contractuelles 6 , sont
décrites les modalités permettant au CSA ou au CTR de contrôler les engagements de
l’association en termes de programmation, comme par exemple l’obligation de conserver un
mois les bandes sons, ainsi que la production sur leur demande, d’un enregistrement des
émissions.
Aucune remarque ne semble avoir été formulée par les instances de régulation sur ces deux
derniers points.
Le financement des associations par une commune n’est légal qu’à la condition sine qua non
que l’intérêt public transparaisse clairement dans l’action privée financée par ce moyen et que
soient respectées les règles de transparence permettant de contrôler le respect de cette
condition. En d’autres termes, la légalité du financement public suppose que soient remplies
diverses conditions, qui sont, dans l’ensemble, mieux respectées que dans le passé par Te Reo
O Tefana.
5
Courrier en date du 30 mars 2006.
6
Articles 4-1-1 et 4-1-2.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 6 sur 18
1.2.1 – L’intérêt communal ne doit pas être perdu de vue
En premier lieu, les collectivités ne peuvent financer que des activités licites réalisées par
« des associations régulièrement déclarées 7 » qui interviennent incontestablement dans leur
champ de compétences.
L’intérêt communal justifiant l’octroi d’une subvention municipale doit, en toute hypothèse,
recouper au minimum l’objet et l’activité effective de l’association, le juge administratif
sanctionnant l’absence manifeste d’intérêt local.
Selon la jurisprudence administrative, une subvention publique n’est légale qu’à la condition
d’une part de répondre à un intérêt public et d’autre part de satisfaire « directement » aux
besoins de la population. Autrement dit, une subvention publique doit obligatoirement
présenter un intérêt public, en lien direct avec l’intérêt général de la population, et respecter le
principe d’impartialité.
Si par analogie avec cette affaire, Te Reo O Tefana devait être considérée comme une radio
partisane, la question se poserait de la légalité des subventions communales qui lui sont
versées. La présidente du comité technique radiophonique de la Polynésie française a
d’ailleurs, à ce sujet, déclaré publiquement que « beaucoup de radios non commerciales, dites
associatives, sont en réalité le porte-voix de grands partis politiques. Cela n’est en rien
interdit. Sauf lorsqu’il s’agit de prétendre à des subventions publiques ». Cette appréciation
faisait écho aux déclarations de M. BECK, conseiller d’Etat alors membre du CSA, qui avait,
dans une déclaration publique en novembre 2006, rappelé que le pluralisme était respecté en
Polynésie française par la multiplication des radios partisanes.
A cet égard, la nouvelle rédaction des statuts, issue de la modification votée le 6 septembre
2008, est susceptible de créer des difficultés. En effet, l’objet de l’association répond
désormais très clairement à une motivation politique, « la promotion de la lutte anti-nucléaire
et l’accession à la souveraineté ». Or, c’est précisément parce que la section locale de
l’association subventionnée par la ville de Draguignan avait affirmé publiquement qu’elle « se
proposait de combattre une formation politique dont l’existence était légalement reconnue »,
7
Article 6 de la loi du 1er juillet 1901.
8
Notamment sur la lutte contre l’incivilité.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 7 sur 18
objectif partisan, que le Conseil d’Etat avait annulé la décision par laquelle la commune lui
avait accordé une aide financière, en méconnaissance principe de neutralité du service public.
Cette nouvelle rédaction des statuts n’est d’ailleurs pas en parfaite adéquation avec les
principes affirmés publiquement le jour de leur adoption par le président d’honneur, M. Oscar
TEMARU, qui rappelait fort justement la double exigence que Radio Tefana « soit ouverte à
toutes les sensibilités politiques sans exception » et que l’argent public qu’elle reçoit soit
« justifié par l’intérêt général ».
Certes, Radio Tefana, à l’instar des autres radios évoluant dans l’orbite des communes de
Polynésie française, a toujours revendiqué un caractère militant. L’audit de MM LASSAGNE
et PEYROLLE (janvier 2009), demandé par la commune, notait à ce sujet : « En 1984, lors de
sa création, la radio avait pour mission principale d’être une radio militante. Le contexte
s’étant modifié, on peut raisonnablement s’attendre à une modification de ses missions
actuelles ». Les auditeurs notaient que « la commune souhaiterait que la radio remplisse trois
missions principales : l’information diffusée aux administrés, la communication et la publicité
apportées aux réalisations de l’équipe municipale, la valorisation de la langue et de la
culture maohi. »
Pourtant, le nouveau président de l’association continue d’affirmer que Radio Tefana est une
radio militante. Il a même déclaré à la presse le 9 septembre 2008 : « Je suis militant avant
d’être journaliste. C’est cette ligne que nous devons suivre ». Effectivement, les statuts
modifiés à son initiative en septembre 2008 énoncent clairement que la cause de l’association
est militante : il s’agit de promouvoir « la lutte anti-nucléaire et l’accession à la
souveraineté ».
Il ne faudrait pas que ce glissement observé dans la définition de l’objet associatif se traduise
par un changement de ligne radicale qui conduirait la radio en dehors des engagements qu’elle
a pris devant le CSA.
En 2000, le législateur a précisé les obligations auxquelles étaient tenues les communes
lorsque leurs subventions dépassaient un certain montant. La loi n° 2000-231 du 12 avril 2000
relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, applicable en
Polynésie française depuis sa publication au Journal officiel de la Polynésie française le 4 mai
2000, prévoit en son article 10 : « L'autorité administrative qui attribue une subvention doit,
lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec
l'organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant et les conditions
d'utilisation de la subvention attribuée ». En d’autres termes, les communes sont obligées de
passer des conventions avec les associations qu’elles financent lorsque le montant de la
subvention dépasse le seuil de 23 000 €, soit environ 2 744 590 F CFP.
La chambre a pu constater qu’une convention encadre depuis 2003 les relations financières
entre la commune de FAA’A et l’association, ce qui constitue un progrès par rapport à la
situation observée lors du dernier contrôle de la collectivité.
Cette convention, datée du 9 janvier 2003, sert désormais de référence aux relations entre la
commune de FAA’A et l’association Te Reo O Tefana. Elle prévoit le montant de la
L’article L 212-14-5 du code des communes prévoyait expressément que dans les communes
de 3500 habitants et plus (cas de FAA’A), les documents budgétaires devaient être assortis,
entre autres, du bilan certifié conforme du dernier exercice connu des organismes au bénéfice
desquels la commune avait versé une subvention supérieure à 9 090 000 F CFP.
Depuis le 1er mars 2008, est applicable à la commune de FAA’A l’article L. 1611-4 du code
général des collectivités territoriales qui prévoit : « Toute association, œuvre ou entreprise
ayant reçu une subvention peut être soumise au contrôle des délégués de la collectivité qui l'a
accordée. Tous groupements, associations, œuvres ou entreprises privées qui ont reçu dans
l'année en cours une ou plusieurs subventions sont tenus de fournir à l'autorité qui a mandaté
la subvention une copie certifiée de leurs budgets et de leurs comptes de l'exercice écoulé,
ainsi que tous documents faisant connaître les résultats de leur activité. Il est interdit à tout
groupement ou à toute association, œuvre ou entreprise ayant reçu une subvention d'en
employer tout ou partie en subventions à d'autres associations, œuvres ou entreprises, sauf
lorsque cela est expressément prévu dans la convention conclue entre la collectivité
territoriale et l'organisme subventionné ».
En 2003 et 2004, la chambre territoriale des comptes avait été amenée à relever plusieurs
entorses au cadre légal auquel devaient se conformer les associations recevant en quantité de
l’argent public et à formuler quelques recommandations.
Ces recommandations ont fini par produire leurs effets, notamment dans le domaine
comptable.
Les comptes de l’association qui, dans le cadre des engagements pris à l’égard du CSA,
doivent être certifiés par un comptable agréé, ont rempli cette obligation à compter de 2003.
Depuis 2003, les comptes ont été approuvés par les assemblées générales et transmis à la
commune de FAA’A. Le dernier compte transmis est le compte 2007 certifié par le comptable
le 27 août 2008 et approuvé par l’assemblée générale de septembre 2008.
La chambre relève une incohérence dans la convention passée le 9 janvier 2003 avec la
commune, qui exige la production annuelle des comptes certifiés de l’association « au plus
tard le 31 décembre de l’exercice », alors que les comptes ne peuvent être matériellement
produits qu’au cours du premier semestre de l’année suivante. La convention mériterait donc
En revanche, l’évaluation des subventions en nature continue à ne pas être systématique. Elle
n’est pas intégrée aux comptes de synthèse alors qu’elle aurait toute sa place dans l’annexe.
Sans qu’il en soit fait reproche à Radio Tefana, la chambre relève que l’action de contrôle
exercée par la commune sur les comptes de l’association a simplement consisté, selon son
président, en des interventions du service de la communication de la mairie et des élus de
FAA’A au conseil d’administration : « à chaque réunion du conseil d’administration, un
membre du conseil municipal est invité afin de suivre et de contrôler l’utilisation des fonds ».
Deux documents délimitent le champ des obligations qui règlent la vie et l’activité de Te Reo
O Tefana : les statuts de l’association et la convention passée avec le CSA qui encadre son
activité radiophonique.
Le contrat d’association est, dans le cadre des lois et règlements, fixé librement par les
membres 9 qui déterminent, dans un document communément dénommé statut, l’objet, c’est-à-
dire la cause qui à l’origine de leur engagement associatif et le fonctionnement interne de
l’association.
L’association Te Reo O Tefana fonctionne selon des statuts types à peine remaniés. Ses
organes sont en effet ceux figurant dans les statuts types.
- l’assemblée générale est l’instance la plus haute de l’association (article 7) ; elle fixe
les orientations de l’association et contrôle l’action du conseil d’administration ; d’après le
règlement intérieur, elle se réunit chaque année au moins une fois, au plus tard avant le
31 mars ; elle entend les rapports de gestion, approuve le bilan moral et financier du conseil
d’administration et, à compter de 2008, fixe les orientations de l’association ;
- le conseil d’administration est l’organe exécutif de l’association ; ses membres sont
élus au bulletin secret par l’assemblée générale pour 3 ans ; il est composé de 15 membres
(7 membres de 2001 à 2008) qui doivent se réunir au minimum tous les 3 mois ;
- le bureau, qui comprenait « président, secrétaire et trésorier », était choisi par le
conseil d’administration parmi ses membres pour une durée fixée à un an ; à compter de 2008,
le bureau exécutif est composé de neuf membres du conseil d’administration choisis par le
président.
9
A l’exception de certains contrats dérogatoires.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 10 sur 18
Si en principe, la tenue d’un registre, d’une feuille de présence ou l’établissement de procès-
verbaux n’est nullement une obligation légale ou réglementaire, plusieurs stipulations
particulières des statuts avaient imposé la tenue obligatoire de plusieurs de ces documents :
- article 5 : « les procès verbaux sont signés par le président et le secrétaire. Ils sont
transcrits sans blanc ni rature sur un registre spécial. » ;
- article 10 : « les modifications (statutaires) et changements seront en outre consignés sur
un registre spécial ».
Cependant, ces précisions ont été supprimées dans la nouvelle rédaction du statut en
septembre 2008.
L’association Te Reo O Tefana est composée de trois catégories de membres cooptés (actifs,
bienfaiteurs, d’honneur) qui sont agréés par le conseil d’administration. Les membres (sauf
les membres d’honneur) sont astreints au paiement d’une cotisation annuelle, dont le montant
est actualisé par l’assemblée générale.
Les fonctions dirigeantes étaient gratuites en vertu de la prohibition de toute rétribution qui
figurait à l’article 6 des statuts jusqu’en 2007 : « les fonctions au sein de l’association ne
peuvent être rétribuées ». Bien que la loi n’en fasse nulle obligation, cette disposition
statutaire, véritable loi des parties, interdisait toute rémunération ou salaire au profit des
membres exerçant une fonction particulière, notamment tous les dirigeants. Cette disposition
a été supprimée des statuts en 2008.
La loi est muette au sujet des prescriptions en matière de comptabilité qui pèsent sur les
associations. En général, seules des dispositions statutaires organisent la tenue des comptes.
Dans les statuts de l’association Te Reo O Tefana, la comptabilité faisait l’objet d’une
mention unique. La prescription était minimale puisque, dans une formule laconique, il était
simplement écrit : « il est tenu au jour le jour une comptabilité par recettes et dépenses ».
Cette clause ne figure d’ailleurs plus dans les statuts adoptés en 2008.
Les obligations légales et conventionnelles qui pèsent sur Te Reo O Tefana restent légères, et
ne conduisent assurément pas à un excès de formalisme. Ceci n’est pas un encouragement à
une tenue laxiste de la comptabilité au prétexte que les obligations légales sont moindres
qu’en matière de société. Elle doit, au contraire, être interprétée comme une invitation à
appliquer avec la plus grande rigueur les quelques règles imposées à l’association.
Cette situation perdure malgré la division par deux du subventionnement communal constatée
dans les comptes 2008. Cette brusque diminution de 60 à 30 MF CFP a ramené le budget de
la radio à 50 MF CFP au lieu des 80 MF CFP sur lesquels l’association pouvait compter
auparavant.
Radio Tefana est, à l’instar des autres radios associatives polynésiennes, classée dans la
catégorie des radios non commerciales, ce qui lui impose de ne pas avoir plus de 20% de ses
ressources qui soient apportées par la publicité et les contrats commerciaux.
Les règles de fonctionnement que la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 impose aux radios
associatives obligent celles-ci à faire appel, sans exclusive, soit à l’engagement associatif des
membres de la radio, soit à l’aide des collectivités publiques pour leur activité radiophonique.
Depuis 2001, les recettes publicitaires, sauf en 2003 où elles ne dépassaient pas 13 %, se sont
en permanence échelonnées entre 20 % et 30 % des recettes totales de la radio, apportant en
moyenne chaque année environ un quart des recettes de la radio. En 2008, sous l’effet de la
chute de la subvention publique, les recettes publicitaires, qui n’ont perdu que 3 MF CFP, ont
vu leur poids dans les recettes totales s’accroître et dépasser très nettement le seuil des 20 %
(40 %).
Durant la période examinée, l’association avait cessé de percevoir les cotisations de la part de
ses membres. Cet apport modique (98 600 F CFP en 2001 pour 66 MF CFP de dépenses
annuelles) vient, en 2008, d’être relancé, pour la valeur symbolique que représente la
cotisation.
La chambre territoriale des comptes avait déjà relevé, dans un rapport d’observations
définitives 11 consacré à la commune de FAA’A, l’importance de la subvention communale et
la nécessité de rendre parfaitement transparent le coût global de la radio pour la commune. Il
conviendrait donc de valoriser systématiquement les différentes prises en charge afin de
mieux rendre compte du coût global du fonctionnement de Radio Tefana pour la collectivité
publique. Ceci permettrait en outre de remettre l’association en conformité avec la règle de
non dépassement du seuil de 20 % de recettes commerciales.
La charge salariale est élevée et correspond dans les comptes produits ces dernières années à
la quasi totalité (80 à 95 %) de la subvention versée chaque année par la commune de FAA’A,
dont la valeur moyenne est d’environ 50 MF CFP par an. Ces charges sont très lourdes et
représentent 68 à 72 % des dépenses de l’association depuis 2004. Elles sont directement à
l’origine du déficit apparu dans les comptes 2008.
Mais les comptes ne donnent pas une image fidèle de la réalité des charges salariales
réellement générées par le fonctionnement de Radio Tefana. En effet, deux problèmes se
posent, l’un concernant la valorisation des mises à disposition de personnels, l’autre la
comptabilisation de prestations de service correspondant en réalité à des charges salariales.
10
60 MF CFP pour 72 MF CFP de dépenses.
11
ROD daté du 25 mai 2004.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 14 sur 18
Sur le premier point, les dirigeants associatifs ont déjà été alertés sur la nécessité d’intégrer
dans leurs comptes la totalité des charges de personnel entraînées par le fonctionnement de la
radio. Le rapport d’observations définitives sur la gestion de la commune de FAA’A en
novembre 2004 insistait déjà sur cette question et concluait que la véritable charge supportée
par la commune de FAA’A au titre de l’association, était en 2002 de l’ordre de 120 MF CFP :
«Compte tenu de la mise à disposition de personnel (16 personnes dont 9 journalistes) qui
représente une charge salariale de 45 millions de F CFP, on aboutit à un coût pour la
commune qui a atteint 120 millions de F CFP en 2002 ».
Sur le second point, il faut relever que de 2002 à 2004, la totalité des charges de personnel
supportées par Te Reo O Tefana ne figurait pas au compte 64 de l’association. Des
journalistes, des rédacteurs, des animateurs étaient rémunérés en qualité de prestataires, les
dépenses étant imputées au C/622. Pour obtenir le poids exact des charges de personnel dans
les dépenses de l’association, il conviendrait de procéder à l’addition des dépenses de
prestataires aux charges de personnel inscrites dans les comptes. Ainsi, en les intégrant, le
poids de la masse salariale passerait de 29 % à 46 % en 2002, 32% à 51 % en 2003 et de 51 %
à 68 % en 2004 (voir tableau en annexe). Depuis cette date, ces charges se sont maintenues
entre 68 et 72 % des dépenses.
Ces deux problèmes sont susceptibles de fausser l’analyse que l’on peut faire de l’évolution
des effectifs et de la masse salariale de l’association.
En nombre, l’effectif réellement utilisé par l’association n’a pas augmenté depuis 2003 14 .
Mais les effectifs employés directement par l’association se sont fortement accrus en passant
de 10 salariés en 2004 à 14 salariés en 2005 par le seul effet de l’intégration des anciens
prestataires (1 rédacteur, 5 journalistes et 1 animateur). L’augmentation des charges de
personnel est surtout due à la salarisation effectuée en 2005 de collaborateurs qui étaient
auparavant prestataires.
Radio Tefana ne dispose pas, malgré les sommes qui lui sont consacrées, de moyens en
rapport avec les ambitions qu’elle affiche. L’instruction sur place a permis de partager le
diagnostic sévère de l’audit réalisé en janvier 2009 par la société Christophe LASSAGNE
CONSULTANT : « Les locaux sont vétustes, dangereux, inadaptés, insalubres… ». Il s’agit
12
1 directeur ; 1 secrétaire de direction ; 1 planton ; 1 femme de service ; 2 techniciens ; 2 commerciales (dont
1 CDD) ; 3 animateurs ; 1 rédacteur en chef ; 1 rédacteur en chef adjoint (CDD) ; 3 journalistes.
13
1 journaliste, 2 animateurs, 1 secrétaire, 1 assistante-secrétaire et 1 technicien pour l’entretien et la
maintenance.
14
Il a même diminué : au total, l’effectif contribuant aujourd’hui au fonctionnement de la radio est de l’ordre 22
au lieu de 32 en 2003. Seule la manière de comptabiliser les effectifs a changé.
Chambre territoriale des comptes de la Polynésie française
Observations définitives - Association Te Reo O Tefana « Radio Tefana »
Séance du 2 octobre 2009 - page 15 sur 18
d’une ancienne gendarmerie, aujourd’hui désaffectée, que la commune a récupérée. La
sécurité n’est pas optimale. Les risques d’incendie sont réels eu égard à la vétusté des circuits
électriques. Les évacuations en cas d’urgence présentent des insuffisances évidentes relevées
par le rapport d’audit précité.
En outre, l’association possède un matériel technique relativement ancien qui arrive en fin de
vie. Le rapport d’audit précité notait à cet égard que le fonctionnement des matériels
radiophoniques est assuré grâce au bricolage permanent des techniciens.
Enfin, aucun contrat d’assurance « responsabilité civile » n’a été passé par l’association. Cette
situation demande à être réglée en urgence, en liaison avec les services compétents de la
commune.
Cette situation matérielle peu florissante laisse prévoir une augmentation future des besoins
de financement de la radio, alors que son coût est déjà très élevé. Avant de faire appel à son
principal financeur, l’association est donc invitée à rechercher dans sa gestion toutes les
mesures d’économie qui lui permettront de dégager les ressources nécessaires à sa rénovation
et à son développement.
Conclusion
Bien qu’ayant, jusqu’en 2007 inclus, disposé de moyens annuel supérieurs à 100 MF CFP,
principalement alimentés par les subventions directes et indirectes de la commune de FAA’A,
l’association Te Reo O Tefana ne paraît pas en mesure de faire face à ses ambitions et à ses
besoins futurs sans obtenir de la collectivité une aide qui, par définition, n’est pas extensible à
l’infini.
Il est donc essentiel que l’association et la commune poursuivent l’effort qu’elles ont déjà
accompli pour clarifier leurs relations et sécuriser juridiquement les modalités de
d’intervention de la collectivité dans le financement de l’association.
Ces points ne devraient pas manquer d’être abordés dans le cadre de la renégociation de la
convention liant la commune et l’association.