Darrouzès Jean. Actes du Prôtaton. Edition diplomatique par Denise Papachryssanthou. In: Revue des études byzantines,
tome 34, 1976. pp. 338-339;
https://www.persee.fr/doc/rebyz_0766-5598_1976_num_34_1_2058_t1_0338_0000_2
On ne peut que se réjouir du fait que la correspondance officielle ou privée des épisto-
liers byzantins obtient sa place parmi les sources historiques, alors que beaucoup négligent
le genre comme futile ou n'envisagent que le côté esthétique. La satisfaction est d'autant
plus vive devant l'édition des lettres de Nicolas que les éditeurs se sont comme effacés
par recherche de la sobriété et de l'objectivité.
Pour la forme, je relève quelques corrections : à la p. 569, pour la lettre 106, lire Grumel
676 (non 724) ; à la p. 576, pour la lettre 129, lire Grumel 747 (non 722). Dans l'index
(p. 596), je ne préciserais pas que le monastère de Mégas Agros est dans le Mont Olympe ;
d'autre part, il est un peu disgracieux de laisser des blancs dans les notices de l'index
sans remplir la justification de la ligne.
Jean Darrouzès
Des actes édités il y a peu de chose à dire, puisque les qualités de la collection sont
éprouvées depuis longtemps. Je me contenterai de quelques remarques sur deux actes
patriarcaux.
A propos de l'acte 10, original rarissime du couple diplomatique hypomnèsis-lysis,
je remarque la description proposée (p. 238-239). La réponse patriarcale (lysis) est
postérieure à la requête des moines (hypomnèsis) qui demandent une solution ; on pourrait
conclure de ce rapport entre les deux actes que la réponse patriarcale s'inscrit au verso
de la requête, mais la requête est de la même main que la réponse : elle fut donc recopiée
à la chancellerie sans doute d'après l'original reçu. En diplomatique le problème de la
définition du verso et du recto subsiste cependant pour ce genre d'acte, lorsque, par
exemple, une mention indique la position d'un prostagma impérial au dos (έξωθεν)
d'un pittakion patriarcal. Seul l'original permet déjuger s'il s'agit d'une forme d'insertion,
parce que les mentions d'un acte ne définissent pas exactement la nature diplomatique
d'un acte et les originaux sont si rares qu'il est difficile de formuler une règle générale
et commune aux deux chancelleries, impériale et patriarcale. A la réflexion, il semble
anormal que l'empereur, dans le cas envisagé, réponde au patriarche par un prostagma
écrit au verso du pittakion reçu ; il faudrait donc envisager l'hypothèse que le texte
inscrit au verso est en réalité antérieur et constitue une copie de chancellerie par mesure
de précaution en faveur d'un destinataire.
Du point de vue canonique et historique, le sigillion de Niphôn (acte 11) revêt une
importance particulière du fait qu'il modifie sur un point capital le statut du prôte :
le patriarche soumet en effet son élection à une confirmation régulière par l'autorité
ecclésiastique. La communauté athonite s'est formée en effet dans une totale autonomie
et avec le concours du pouvoir impérial, sans qu'intervienne d'une façon quelconque
la hiérarchie ecclésiastique ; du moins les documents anciens n'attestent aucune action
patriarcale notable concernant les premiers statuts. Le patriarcat de Niphôn fut marqué
de diverses irrégularités qui entraînèrent sa condamnation par le synode, mais on ne
lui reproche pas cet acte qui supprimait ou atténuait une exemption exorbitante. Le
sigillion ne comportait guère de conséquences pratiques dans l'immédiat ; il dénote
cependant une tendance réformatrice propre aux patriarches d'origine monastique, qui
se montrèrent en général les plus actifs sur le siège de Constantinople.
Comme toutes les éditions de même genre, la collection des archives de l'Athos est
menacée par l'augmentation des frais d'impression et par les soupçons de non-rentabilité
qui pèsent sur tous les travaux de recherche dans le domaine des sciences humaines.
Espérons qu'il y aura toujours des esprits assez lucides pour comprendre la nécessité
de ces éditions et assez résolus pour poursuivre la réalisation de ces instruments
indispensables à toutes les branches de l'histoire byzantine.
Jean Darrouzès