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Sous-marins, Golan, roquettes: une
campagne israélienne à rebondissements
PAR THOMAS CANTALOUBE
ARTICLE PUBLIÉ LE MERCREDI 27 MARS 2019
Alors qu’approchent les élections législatives du 9
avril, où Benjamin Netanyahou jouera son poste et
sa liberté, les événements susceptibles d’infléchir le
scrutin ne cessent de se multiplier.
À deux semaines d’élections législatives israéliennes
particulièrement ouvertes dans lesquelles Benjamin
Netanyahou ne joue pas seulement son fauteuil
de premier ministre mais également sa liberté, les
événements susceptibles de faire basculer le vote
s’enchaînent en accéléré et sont tous interprétés à
l’aune du scrutin du 9 avril.
La semaine passée, Netanyahou, qui risque déjà une
mise en examen dans trois affaires de fraude, de
corruption et d’abus de confiance, a été contraint
d’admettre, en direct à la télévision, qu’il avait
encaissé 3 millions de dollars de bénéfices en vendant
ses actions (sept fois leur prix d’achat) dans une
entreprise qu’il a ensuite favorisée, en tant que premier
ministre, lors de la vente de sous-marins. Or il se
trouve que deux des personnes qu’il avait contournées
à l’époque en concluant ce marché sont les leaders
de la principale liste d’opposition qui lui taillent des
croupières dans les sondages : Benny Gantz et Moshe
Yaalon, du parti Bleu et Blanc.
Heureusement, dans la foulée de cette révélation,
Benjamin Netanyahou s’est envolé pour Washington,
où il a été reçu en grande pompe par Donald
Trump et l’AIPAC, le « lobby israélien » (en
anglais, l’expression est parfaitement assumée par les
intéressés). Aucune surprise du côté de ce dernier, dont
les membres comptent parmi ses plus fidèles soutiens,
mais son « ami » le président des États-Unis lui a fait
un beau cadeau : formalisant son tweet de la semaine
précédente, il a reconnu la souveraineté de Tel-Aviv
sur le plateau du Golan, un territoire appartenant à la
Syrie et occupé depuis 1967.
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Trump, qui n’a jamais fait mystère de son appui total
à Netanyahou ni de son allégeance au milliardaire
Sheldon Adelson, grand donateur à la cause sioniste
et aux républicains américains, a écrasé du talon 50
années de diplomatie américaine et internationale.
Non seulement il a reconnu l’annexion unilatérale
d’un territoire conquis par la force (comme la Crimée
par Vladimir Poutine), mais il a jeté aux orties tous
les efforts de Washington depuis l’époque de Ronald
Reagan pour faire en sorte que les échanges de
territoires au cœur du conflit israélo-palestinien soient
assortis de concessions.
Donald Trump devant Netanyahou montrant l’acte par lequel les États-
Unis reconnaissent la souveraineté d'Israël sur le Golan. © Reuters
Même quand les États-Unis se rangeaient aux côtés
d’Israël, c’était en échange d’un retrait militaire, d’un
arrêt des constructions dans les colonies ou d’une
modération de sa politique (comme face à l’Iran, par
exemple). Là, Trump n’a rien demandé et tous les
Israéliens ont bien compris que la Maison Blanche
offrait un gigantesque présent électoral à Netanyahou,
dont un des arguments de campagne est d’afficher sa
proximité avec le « grand frère » américain qui ne lui
refuse rien.
Il y a quelques mois encore, le premier ministre
israélien essayait pourtant de négocier le retour du
Golan à la Syrie en échange d’une protection contre
la présence iranienne dans la région. N’étant pas
parvenu à ses fins avec Bachar al-Assad, Netanyahou
peut donc se gargariser d’avoir obtenu l’assentiment
américain pour occuper définitivement le territoire.
Ce qui pousse les diplomates et les analystes de la
région à se demander quelle sera la prochaine étape :
la réoccupation de Gaza ? l’annexion définitive de la
Cisjordanie ?
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Malheureusement pour le chef du gouvernement
israélien, cette bonne nouvelle pour lui a été
partiellement éclipsée par une reprise des hostilités
avec Gaza. Une roquette tirée lundi depuis l’enclave
palestinienne a frappé une maison israélienne (ne
faisant que des blessés) et provoqué en retour une
série de bombardements visant les structures et les
dirigeants du Hamas, le parti islamiste qui contrôle la
bande de Gaza. Pendant toute la journée du lundi 25
mars, les deux camps ont échangé des tirs avant que les
discussions autour d’un cessez-le-feu ne démarrent.
Même si aucune des parties ne souhaite une
nouvelle confrontation durable, chacune se trouve
dans une position délicate qui peut faire craindre des
dérapages. Le Hamas, qui a réprimé sauvagement une
manifestation contre le coût de la vie, il y a dix jours à
Gaza, a besoin de redorer son blason et de faire oublier,
éventuellement par la guerre, la situation économique
catastrophique à laquelle il n’a pas remédié depuis
plus d’une décennie. Sans compter que ce vendredi 29
mars marquera l’anniversaire de la première « marche
du retour », les manifestations gazaouies qui avaient
éclaté en révolte l’an passé, échappant en grande
partie au Hamas, et qui avaient entraîné une répression
israélienne causant près de 200 morts.
Du côté de Tel-Aviv, Netanyahou ne peut pas se
permettre d’apparaître « faible » dans le pervers
jeu politique israélien, lui qui a toujours fait de la
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sécurité et de l’intransigeance face aux Palestiniens
son fonds de commerce. En même temps, il sait très
bien qu’une guerre contre Gaza n’est pas gagnable au
sens conventionnel du terme et qu’une mobilisation
armée à la veille d’un scrutin peut se retourner contre
lui en cas de bavure. D’autant que le premier ministre
affronte trois anciens généraux de l’armée aux quatre
premières places de la liste Bleu et Blanc.
Benny Gantz est l’un d’entre eux et, puisqu’il
prétend au poste de chef du gouvernement, il s’est
présenté lui aussi devant l’AIPAC à Washington, où,
contrairement aux opposants précédents, il a fait bonne
figure devant cette assemblée très à droite. Selon les
correspondants de la presse israélienne, Gantz, en
jouant à merveille sa partition de soldat rude mais
éclairé, a montré aux juifs américains qu’il existait
désormais une alternative conservatrice et nationaliste
à Netanyahou.
Au rythme des événements de ces dernières semaines
et étant donné la volatilité des prévisions de vote, sans
oublier les manœuvres électoralistes dont Netanyahou
est coutumier, il semble impossible de prévoir qui
sera le prochain premier ministre d’Israël, et surtout
avec quelle coalition il gouvernera : l’extrême droite
religieuse et raciste autour de Netanyahou ou un
assemblage hétéroclite d’ambitions contraires autour
de Benny Gantz ?
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