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l’Otan, nous dépensons des sommes faramineuses,


disproportionnées. Sur le commerce, les Européens
Donald le voyou menace le monde
PAR FRANÇOIS BONNET
profitent de nous depuis longtemps. »
ARTICLE PUBLIÉ LE MARDI 25 JUIN 2019

Iran, Arabie saoudite, Palestine, Europe… Du chaos


de la présidence Trump, de ses vulgarités et chantages
se dégagent des lignes de force. Entouré d’idéologues
furieux et lui-même prêt à tout, Trump est en train de
transformer les États-Unis en un État voyou.
Y aura-t-il enfin une véritable explication de texte
Donald Trump, lors de son entretien à la chaîne de télévision NBC. © Capture d'écran
entre Donald Trump, les Européens et d’autres
dirigeants de la planète ? L’occasion est là : vendredi En moins d’un mois, et alors qu’il vient de lancer
28 juin s’ouvre à Osaka le sommet du G20. Ce sa campagne pour un second mandat de président,
cénacle, d’ordinaire sans intérêt, se tient alors que le Donald Trump a spectaculairement relancé dans un
monde craque sous les coups de boutoir d’un président climat d’hystérie tous les dossiers ouverts dès son
américain hors de contrôle. arrivée à la Maison Blanche. Un mépris affiché
de l’Europe ; un alignement aveugle sur l’extrême
Il y a d’abord les bruits d’une guerre avec l’Iran
droite israélienne ; une alliance scandaleuse, sur
entretenus par Washington, qui dégénérerait aussitôt
fond d’affairisme de son gendre Jared Kushner, avec
en un conflit régional. Il y a ensuite la conférence,
l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ; et une
ouverte ce mardi à Bahreïn, sur le révoltant « plan de
agressivité avec l’Iran qui renvoie aux grandes heures
paix » du gendre de Trump visant les Palestiniens. Il
des néoconservateurs en Irak.
y a également ce mardi, à Jérusalem, un sommet sur
la Syrie et l’Iran réunissant Israël, les États-Unis et Trump l’isolationniste – il fut élu sur ce programme
la Russie. – a-t-il programmé d’exporter le chaos de sa Maison
Blanche dans le monde entier ? L’« imprévisibilité
Et il y a enfin les propos de Donald Trump sur
d’un président fantasque », puisque les diplomates
l’Europe, tenus le 21 juin sur la chaîne NBC lors
en restent à cette analyse, n’est-elle pas là pour
d’un entretien consacré à l’Iran : « Les Européens, je
masquer le retour d’un impérialisme agressif de
m’en fous. Ils font beaucoup d’argent [avec l’Iran]
l’hyperpuissance ?
… En France, ils vendent des voitures à l’Iran. Avec
« Oui, la guerre [contre l’Iran] est un outil possible,
c’est un moyen dont le président Trump dispose pour
regagner en crédibilité », a estimé l’ancien premier
ministre Dominique de Villepin, interrogé mardi sur
BFM. Mais Villepin, qui s’était opposé en 2003, au
Conseil de sécurité des Nations unies, à la guerre
de Bush en Irak, s’indigne d’abord du silence des
Européens et des alliés des États-Unis.
« La vie internationale s’est trumpisée et nous devons
proposer un discours fort et alternatif », estime-t-il.
Et de citer le fameux plan pour la Palestine : « 50
milliards de dollars pour fermer sa gueule et accepter
d’être déchu de tous ses droits… mais enfin, c’est
ignoble ! » Qualifiant Trump de « grand perturbateur

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du monde », estimant que « notre principal allié ne se Comme l’acceptent Emmanuel Macron et son ministre
comporte pas en allié », l’ancien ministre juge « qu’il des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, qui a eu
est temps de dire son fait à Donald Trump ». « Nous cet étonnant propos sur la crise avec l’Iran : « Il y a
ne pouvons rester passifs et silencieux face au risque encore du temps mais il y a peu de temps », a-t-il dit
qu’il nous fait courir à tous, il faut hausser le ton. » tout en renvoyant dos à dos Téhéran et Washington.
Dire son fait à Donald Trump… Il faut ouvrir très La méthode Trump : « Les faire chier dans
grand les oreilles pour entendre de timides voix leur froc »…
européennes. Jusqu’alors, les Européens, par ailleurs Or il faut bien acter ce qu’est le bilan de deux ans et
profondément divisés, ont fait le dos rond ou adopté demi de présidence Trump. Et mettre des mots sur des
une stratégie de containment. Pour résumer, ne pas situations. Les États-Unis sont en passe de devenir un
prendre au pied de la lettre les éructations trumpiennes, État voyou, un rogue state en capacité d’entraîner le
faire valoir combien les vrais contacts ont lieu avec son monde dans des crises économiques, énergétiques et
administration, ne pas « participer au Grand Barnum militaires d’une ampleur au moins comparable à ce qui
et, surtout, ne pas remettre un euro dans la machine », s’est produit sous la présidence Bush.
comme l’expliquait il y a peu un diplomate européen.
C’est encore et toujours la ligne adoptée par
Emmanuel Macron. Le président, dans un récent
entretien au magazine The New Yorker, estime
platement que Donald Trump «doit clarifier sa
position vis-à-vis de l'Europe ». «Il y a un certain
nombre d'ambiguïtés, particulièrement en ce qui
concerne la position de Trump sur le Brexit et le fait
qu'il fasse la promotion d'un Brexit dur », ajoute-t-il.
Il n’y a pourtant aucune ambiguïté. Trump méprise
l’Europe et l’a dit. Trump a fait campagne pour
Boris Johnson contre Theresa May. Trump déteste
Angela Merkel. Trump a demandé aux Européens
d’augmenter leurs dépenses militaires : ils l’ont fait. Il
a augmenté les droits de douane, sans réelles contre-
mesures européennes.
Il est sorti de l’Accord de Paris sur le climat, a Dans son nouveau livre, État de siège, paru ce mois-
brisé l’accord nucléaire avec l’Iran. Il a contraint ci aux éditions Robert Laffont, le journaliste new-
avec succès les entreprises européennes à quitter yorkais Michael Wolff poursuit sa chronique de la
l’Iran. Il a dénoncé le traité sur les forces nucléaires présidence Trump, inaugurée par un premier ouvrage
intermédiaires, clé de voûte du contrôle des qui fit scandale, Le Feu et la Fureur. Wolff raconte
armements. Il a décidé d’une augmentation sans entre autres un déjeuner avec le vieil Henry Kissinger,
précédent du budget militaire américain. Et il a engagé 96 ans. L’ancien bras droit de Nixon conseille à ses
une guerre commerciale avec la Chine. heures perdues le jeune Jared Kushner, ministre des
affaires étrangères bis de Donald Trump, même s’il n’a
Donald la Menace n’est donc pas un excentrique aucune expérience en la matière.
imprévisible. Il déroule son agenda, défend ses
intérêts, transforme en adversaires ceux qui ne sont Mais ce jour-là, Kissinger saute du navire, écœuré
pas ses supporteurs, et sillonne le monde l’invective des relations entretenues par la famille Trump avec
à la bouche. Faut-il l’accepter ? L’Europe l’accepte. le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane

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après l’assassinat du journaliste Khashoggi. « Toute décidé, lundi, de renforcer les sanctions économiques,
notre politique étrangère repose sur la réaction d’un lesquelles frappent désormais plusieurs responsables
unique individu instable à ce qu’il perçoit comme des politiques et militaires iraniens.
affronts ou des flatteries. Si quelqu’un dit du bien de
lui, il est notre ami ; si quelqu’un dit du mal de lui, s’il
refuse de plier l’échine, il est notre ennemi », assène
Kissinger.
Le tableau dressé par Michael Wolff dans ce nouvel
ouvrage est effectivement effrayant. Le livre a
été critiqué pour plusieurs erreurs factuelles. Mais
John Bolton, un idéologue passé par l'administration
c’est bien l’ambiance de cette présidence, largement Bush au début des années 2000. © Reuters
documentée par les médias américains, qui laisse Il faut d’autant plus prendre au sérieux le danger
pantois, tant une brutalité vulgaire et ignare règne en Trump que, passé les démissions à répétition de
maître. très nombreux conseillers et ministres, le président
« Ne jamais, jamais, jamais céder. La faiblesse, voilà s’est entouré pour sa politique étrangère d’extrémistes
ce qu’ils attendent. La peur. Je n’ai pas peur. Ils le patentés qui n’ont rien d’« isolationnistes ». Parmi eux,
savent. Je les ai fait chier dans leur froc » : cette John Bolton, néoconservateur de l’équipe Bush, est un
phrase de Trump est sa méthode de gouvernement. fanatique du « regime change » à Téhéran (lire ici son
Et c’est bien cette méthode qu’il applique dans ses portrait par Mathieu Magnaudeix).
relations avec le reste du monde. Sa recette, lorsqu’il
Avocat et juriste de formation, Bolton s’était
faut partager la scène avec d’autres dirigeants et se
distingué à l’époque Bush en faisant sortir les
plier aux séances photos ? « Il faut donner l’impression
États-Unis de plusieurs accords multilatéraux hérités
que tous les autres sentent mauvais », théorise Trump.
de la présidence Clinton. C’est un principe
Tout le livre de Michael Wolff est un signal d’alarme néoconservateur : les États-Unis peuvent signer des
sur « le comportement extrémiste, frénétique et mal traités, mais ceux-ci ne doivent pas ligoter l’action
informé de Trump ». Les hommes qui ne sont pas à sa de leur gouvernement, rien n’étant supérieur au
botte sont des « tarés », des « trous du cul », des « texte fondateur, la Constitution. Au nom d’impératifs
débiles » ou des « traîtres ». Les femmes avec qui « il supposés constitutionnels, tout traité peut ainsi du jour
n’a pas tiré sa crampe » sont des « pétasses », habillées au lendemain être ignoré.
en « robe de supermarché », ou qu’il a « virées » –
C’est bien ce qui s’est produit avec la dénonciation
à l’image d’une conseillère renvoyée « parce qu’on
par Trump de l’Accord de Paris, de l’accord sur le
dirait un Frigidaire avec une perruque ».
nucléaire iranien et du traité INF (forces nucléaires
C’est le parler Trump. Et c’est l’agir Trump. Les intermédiaires). Outre l’efficace et furieux Bolton, le
Iraniens ? « Je ne veux pas la guerre mais si cela se secrétaire d’État Mike Pompeo, la directrice de la CIA
produit, l’éradication sera totale », dit-il à NBC. « Gina Haspel et le nouveau ministre de la défense Mark
Si les dirigeants iraniens se comportent mal, ils vont Esper sont eux aussi des « faucons » déterminés à faire
passer une très mauvaise journée », ajoute celui qui a connaître la puissance agressive américaine.
Cette nouvelle équipe entourant la Maison Blanche
ne rend que plus urgentes une réponse européenne
forte et convaincante, ainsi que la mise en place de
nouvelles alliances. L’Europe s’est déjà fait expulser
du dossier israélo-palestinien, puis des négociations
sur la Syrie, puis de l’affaire du nucléaire coréen. Elle a

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accepté sans réagir de voir déchirer l’accord nucléaire première puissance économique de la planète. Paris,
iranien, exemple d’une négociation complexe mais Berlin, Londres ont donc les moyens et les arguments
réussie. Elle ne bouge pas davantage sur la perspective pour parler haut et fort, et faire plier un Donald Trump
d’une escalade aux armements nucléaires entre Russie qui a une élection présidentielle dans moins de dix-
et États-Unis. huit mois. Ne pas le faire aujourd’hui menace notre
Avec le Royaume-Uni et la France, l’Europe dispose sécurité.
de deux sièges de membre permanent au Conseil
de sécurité de l’ONU. L’Union européenne est la

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