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LES "MÉCANIQUES" ATTRIBUÉES A ARISTOTE ET LE RENOUVEAU DE LA SCIENCE DES

MACHINES AU XVI e SIÈCLE


Author(s): François De Gandt
Source: Les Études philosophiques, No. 3, L'ARISTOTÉLISME AU XVIe SIÈCLE (JUILLET-
SEPTEMBRE 1986), pp. 391-405
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41582298
Accessed: 29-03-2017 06:27 UTC

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LES MÉCANIQUES ATTRIBUÉES A ARISTOTE
ET LE RENOUVEAU
DE LA SCIENCE DES MACHINES
AU XVIe SIÈCLE

Les Mécaniques, ou Questions mécaniques, attribuées à Aristote , ont ét


redécouvertes au début de la Renaissance , stimulant la discussion sur la science de
machines , particulièrement dans les œuvres de Tartaglia , Benedetti, Guido Ubaldo et
Galilée . Qu* est-ce que la mécanique ? Comment est possible Vunion entre géométrie et
science de la nature ? Peut-on tromper la nature Ì La mécanique doit-elle recevoir un
fondement dynamique ou géométrique ? Galilée s9 inspira des Mécaniques pour définir
un invariant poids-vitesse , le momento qui lui servirait à étendre la théorie mécanique
à la chute des corps .

Pseudo- Aristotle* s Mechanics, or Mechanical Questions, rediscovered at the


beginning of the Renaissance , stimulated discussions of the science of machines , notably
in the works of Tartaglia , Benedetti* Guido Ubaldo and Galileo . What is mechanics ?
How is it possible to unite geometry and the science of nature ? Can nature be deceived ?
Does mechanics require dynamical or geometrical foundations ? Drawing his inspiration
from the Mechanics, Gelileo defined an invariant that combined weight and speed ,
which he called the momento. He used this concept to try to apply mechanics to falling
bodies .

Voici un petit écrit au destin singulier, exactement proportionné


à ce que nous appelons Renaissance. Après un oubli total durant le
Moyen Age arabe et latin, les Mécaniques (ou Questions mécaniques)1 furent
éditées à Venise en 1497, à partir d'un manuscrit de Bessarion venu
de Byzance2. Elles donnèrent lieu à traductions, discussions, contro-
verses très actives, autour des interrogations essentielles de la culture
nouvelle : y a-t-il des lois de la Nature, que l'Art ne pourrait enfreindre

i. Medianica, in Aristotelis Opera , ed. Bekker, p. 847-858. L'étude la plus importante


est celle de Rose et Drake (cf. bibliographie).
2. Dans le volume II de l'édition d'Aldus (1495-1498).
Les Etudes philosophiques , n° 3/1986

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39 2 François De Gandt

ni contourner ? peut-il y avoir une


physique et mathématiques ? est-ce
première et doit fonder la théorie d
L'allure même du texte, sous f
convenait au goût de l'époque pou
listes d'observations remarquables
de réduire les merveilles des machin
Cette théorie ne serait pas sans fr
pour son projet intellectuel, d'une
les Mécaniques : la compensation de
de momento cet invariant est l'outi
dans le cadre d'une science des mach
les mouvements des fluides, la perc
tance des matériaux.
Les Mécaniques connurent trois traductions en latin, et d'autres en
italien, allemand et espagnol3. Il en circula une paraphrase et des commen-
taires intégrés à plusieurs recueils composites : les Quesiti de Tartaglia
et le Speculationum liber de Benedetti. A Paris Ramus en traita dans son
enseignement vers 1565, et à Padoue surtout les Mécaniques connurent
un notable succès universitaire : un cours de Catena vers 1570, de Meleto
en 1581 et de Galilée en 1598. Les auteurs de théorie des machines,
plus généralement tous ceux qui traitaient de philosophie naturelle,
avaient bien des occasions de citer les Mécaniques dites d'Aristote. Dans
les Discorsi de Galilée par exemple, elles sont mentionnées explicitement
en six endroits différents au moins4, et pour des raisons différentes, et
pas toujours dans la bouche de Simplicio !
Après cette flambée d'intérêt, le petit écrit est retourné dormir
dans la poussière des bibliothèques, d'un sommeil si profond qu'il
n'en existe aujourd'hui aucune traduction française. Les versions et
paraphrases en latin et en italien ont suffi à en assurer la diffusion.
La durée de vie des Mécaniques , au sens où un texte est vivant s'il excite
la discussion, couvre ainsi très précisément l'empan de la Renaissance :
de l'arrivée des manuscrits grecs de Byzance jusqu'à la maturité de
Galilée.
L'idéal de la Renaissance était de restituer aux Anciens leur saveur
pleine, leur force originelle. La lecture des Mécaniques était bien faite
pour nuancer l'image médiévale du maître Aristote, « le philosophe ».
Cette fois on lisait un texte fait d'une suite de questions, n'offrant que

3. En latin : Fausto (15 17), Tomeo (1525), Monantheuil (1599); en italien : Guarino
(1573); en allemand : Moegling (1629); en espagnol, restée manuscrite : Mendoza. Picco-
lomini a publié une Paraphrasis en 1547.
4. Dans la Première Journée, p. 68, 94 (a propos de la « roue d Aristote »); dans la
Deuxième Journée, p. 152 (sur le levier, la 3e question), 165 (sur la seizième question : les
poutres plus longues sont plus fragiles), 173-174 (sur la 14e question : un morceau de bois
à briser); dans la Quatrième Journée, sans tenir compte du passage sur la percussion où il
n'y a pas de citation explicite : p. 310 (sur la compensation de la vitesse par le poids).

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristote 393

des réponses partielles et parfois ouvertement contradictoires. Im


de réduire en système cet Aristote-là. C'était un texte ouvert, a
les objections et la discussion. L'auteur proposait certes une
unifiée, mais avec des réserves, des interrogations et des à-c
ébauches d'analyse consacrées à divers phénomènes naturels p
stimuler et guider une réflexion sur les observations empiriq
L'auteur était-il Aristote lui-même ? La plupart le croyaient,
et Patrizzi émirent des doutes5. Aujourd'hui seuls quelques
isolés considèrent qu'il s'agit bien d'un ouvrage d'Aristote.
moins un écrit issu de son entourage, tant il est proche du corpu
télicien par le vocabulaire, les formes de raisonnement et même
thèses particulières.

Un recueil de trente-cinq questions

Les Mécaniques se composent d'un préambule assez bref, pu


succession de questions, chacune suivie d'une ébauche de ré
quelques lignes (la réponse à la première question est imbriq
l'exposition du principe général). La seule liste des trente-cinq q
forme un assemblage assez pittoresque. Extrayons-en quelques-u
« Pourquoi les rameurs du milieu meuvent-ils davantage le navire ?
« Pourquoi fabrique-t-on les lits avec la longueur double de la l
(n° 25).
« Pourquoi les médecins retirent-ils plus facilement les dents en utilisant
une pince dentaire plutôt que la main nue ? » (n° 21).
« Pourquoi au bord de la mer les pierres que l'on appelle galets sont-elles
rondes ? » (n° 15).

Certaines questions sont moins futiles d'apparence :


« Pourquoi les projectiles s'arrêtent-ils dans leur mouvement? » (n° 32).

En guise de réponse, l'auteur ne propose que d'autres questions :


« Est-ce parce que cesse la force qui les a lancés, ou à cause de la résistance,
ou à cause du poids, si la résistance ou le poids sont plus forts que la force
qui a projeté ? ou bien est-il absurde de discuter ces difficultés 'aporeiri', dès
lors que manque le principe correct ?» (858 a 13-17).

Et l'auteur enchaîne sur la question suivante (n° 33) qui pose le


problème dans l'autre sens :
« Pourquoi un objet se meut-il s'il ne se meut pas par son mouvement
propre, lorsque ce qui l'a lancé ne le suit plus et ne le pousse plus ?» (858 a
17-18).

5. Cardan, Opus Novum de Proportionibus , 1570 (Opera, Lyon, 1662, p. 515 du t. IV);
F. Patrizzi, Discussiones Peripateticae , 15 71, I, lib. 3.

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394 François De Gandt

Ces discussions sur les projectil


au reste du texte, mais elles alime
sur Timpetus et l'inertie.
D'autres questions des Mécaniqu
putées durant ces années. La qu
pour Galilée et son entourage un
« Pourquoi, si Ton pose sur le bois
par-dessus, elle coupe si peu le bo
mais si on lève la hache et que l'o
(855 b 14).

Le problème ainsi formulé revient à comparer les effets du poids


simple et ceux du poids qui percute (que Galilée appellera peso morto
et peso vivo).
La question 35, la dernière, concerne les phénomènes de tourbillons,
qui seront un des thèmes essentiels de la philosophie naturelle du
xvne siècle :

« Pourquoi les objets en mouvement dans l'eau tourbillonnante finissent-ils


tous leur mouvement au milieu ? » (858 b 4).

Enfin la question 24 propose une énigme physico-géométrique, dite


« roue d'Aristote », qui exerça la sagacité de Benedetti, Galilée, Descartes.
Il s'agit de deux cercles concentriques roulant sur une base horizontale :
« On ne comprend pas [aporeitai] pourquoi le plus grand cercle trace une
ligne égale au petit cercle, si les deux cercles sont autour du même centre.
Mais si on les fait rouler séparément, alors les lignes qu'ils engendrent seront
entre elles comme la taille du premier cercle est à la taille du second » (858 b 27).

Un amas aussi hétéroclite de questions n'avait rien pour rebuter les


hommes de la Renaissance. Il suffit de feuilleter Léonard de Vinci ou
Montaigne pour se persuader que la bigarrure et le coq-à-l'âne étaient
moins redoutés qu'aujourd'hui. Les titres mêmes des ouvrages dont
nous parlons le disent clairement : Quesiti ed invenzioni diverse , Diversarum
speculationum liber . La rhétorique des textes savants était moins éloignée
de la bonhomie de la conversation familière, et plus ouverte aux occasions
et aux surprises.
Galilée lui-même a laissé des manuscrits qui permettent de saisir sur
le vif le passage du problème d'école à l'exposé dialogué (au volume VIII
de l'Edizione Nazionale, p. 571-642). Une même question fait l'objet
d'une discussion en forme, puis d'une présentation plus vivante, rédigée
comme un entretien entre Salviati et Sagredo. Les « problèmes » propre-
ment dits sont au moins aussi variés et amusants que ceux du Pseudo-
Aristote :

« Problème 1 : Pour quelle raison, si un nageur veut se tenir immobile à la


surface de l'eau, il est nécessaire qu'il soit couché sur le dos, les jambes
ouvertes... »

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristote 59 j

« Problème 5 : D'où vient que les étoiles apparaissent immobiles à


sens, bien qu'elles cheminent à très grande vitesse... »
« Problème 6 : D'où vient que par temps de brouillard et le matin de bon
heure, on voit une très grande quantité de toiles d'araignées autour
buissons, là où on n'en voit plus une seule par temps serein et à mid
(Galilée, en, VIII, p. 598-607).

Qu'est-ce que la Mécanique ?

Les questions de notre petit écrit ont pourtant leur unité, elles s
nettement distinctes des autres problemata recueillis pêle-mêle dans
corpus aristotélicien, et répartis en 38 sections, depuis les quest
médicales, les questions sur la sueur, sur l'usage du vin, sur Facte am
reux, ... les mathématiques, ... l'harmonie, ... la peur, ... les yeux
oreilles, jusqu'aux dernières questions sur la couleur de la peau. Si
en croit leur titre commun, les questions de notre petit ouvrage res
tissent toutes à la « mécanique ». Mais qu'est-ce que la mécanique
Héron d'Alexandrie, qui écrivait environ quatre cents ans plus tar
la définit nettement : c'est l'étude des cinq machines simples, lev
poulie, treuil, vis et plan incliné. Ces machines peuvent se combi
mais le problème général reste toujours : comment mouvoir une gra
résistance avec une petite force? Cette définition est beaucoup t
stricte pour embrasser nos trente-cinq questions.
A l'autre extrémité du monde grec, chez Homère, il y a déjà
mécanicien célèbre, en la personne d'Ulysse, le maître de la « mécha
fertile en ruses et moyens ingénieux (polymechanos Odysseus).
machine n'est rien d'autre qu'un « truc ». Mais lorsque Ulysse parvie
à échapper au Cyclope, réussit à écouter les sirènes sans tomber e
leurs griffes, dirons-nous que c'est de la mécanique ?
Nous voilà prêts à entendre le préambule des Mécaniques du Pseud
Aristote, qui situe la « méchané » entre celle d'Ulysse et celle de Héron

« On s'émerveille de ce qui arrive selon la nature, si la cause en est incon


nue, et de ce qui arrive contre nature, si c'est l'art [techné] qui le réalise p
l'utilité des hommes. Car dans bien des cas la nature produit des effets cont
à nos intérêts, parce qu'elle se comporte toujours d'une manière identiq
simple, alors que notre intérêt varie beaucoup.
« Dès lors qu'il nous faut agir contre la nature, la difficulté nous arrête
c'est l'art qui est requis. Pour cette raison, la partie de l'art qui nous se
dans de telles difficultés, nous l'appelons "méchané". Ainsi qu' Antiph
poète l'a écrit : "Là où la Nature nous dominait, l'Art nous rend vainque
« C'est bien le cas lorsque le plus petit est vainqueur du plus grand
lorsque avec une petite force on meut de grands poids, et dans presque
ce que nous nommons problèmes mécaniques. Ils ne sont pas exactem
identiques aux problèmes physiques, ils n'en sont pas non plus entièrem

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396 François De Gandt

distincts,mais ils sont communs au


Car dans ces problèmes le "comme
sujet de quoi" est clair par la phys
« A ce genre de difficulté resso
étrange en effet qu'un grand poids
qu'on ajoute encore au poids; car
poids, le mouvra très vite en ajou
« Or la cause de tout cela trouve
Pseudo- Aristote, L
début (847 a 10

Ce texte très ancien est trop


intéresser les philosophes et les h
sur la Mécanique. Les premières
à la manière des Sophistes : l'ar
refusait. Les merveilles de la mé
opérations « techniques », des ar
et de renverser les rôles établis, afi
Cependant de tels effets ont leu
à une certaine théorie dont la sit
machines appartient aux math
par un autre. Par exemple l'opé
poids et force, s'explique par la
de la Nature, mais le comment v
A quelles conditions la mécaniq
Pour qu'une science mixte soit p
ou les causes formelles d'ordre
matière, qu'elles informent ré
géométrique ne doit pas être un
la nature des choses.
Sur ce point le préambule des Mécaniques est ambigu. Dans les pre-
mières lignes s'opposent l'art mécanique et la Nature. La techné permet
de passer outre aux empêchements naturels, elle semble capable de
produire l'impossible, le contre-nature. Dans les phrases finales au
contraire les problèmes mécaniques sont rattachés aux spéculations
physiques ou naturelles, l'opposition n'est plus entre art et Nature,
mais entre les raisonnements génériques et les raisonnements mixtes :
le géomètre raisonne à l'intérieur du genre « figure », ou le physicien
à l'intérieur du genre « corps matériel doté de mouvement », alors que
le mécanicien raisonne dans un domaine hybride, il parle du poids, mais
il en traite à l'aide des propriétés du cercle.

6. Il sera encore question de tromperies et de supercheries dans notre texte, à propos


des effets merveilleux organisés dans les temples pour l'ébahissement des âdèles (848 a 35) et
à propos des marchands qui truquent les balances (849 b 35).

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristote 397

Arguments physiques et arguments mathématiques


relatifs à la balance (Tartaglia)

Comment concevoir ce caractère mixte de la mécanique ? C


ce thème que Tartaglia, dans ses Quesiti de 1546, ouvre son e
avec l'ambassadeur Mendoza sur les Mécaniques . La discussio
peu longue et diffuse, sans doute d'autres auteurs ont exposé pl
ment le problème de la science mixte7; ce texte donnera néanm
idée du style de ces discussions, et de la manière dont les Mécan
Pseudo- Aristote ont pu être intégrées à la problématique médié
« balances physiques » opposées aux « balances mathématiques »

L'ambassadeur. - Comment se considèrent et se jugent les cho


tant que naturelles, et comment se jugent-elles et se considèrent-elles
que mathématiques ?
Niccolo. - Le naturaliste [// naturale ] considère, juge et déter
choses selon les sens et les apparences dans la matière. Mais le mathém
les considère, juge et détermine non selon les sens mais selon la
(abstraite de toute matière sensible) ainsi qu'Euclide a coutume de
comme le sait Votre Excellence.

L'ambassadeur. - Sur ce point je ne sais que répondre, parce que je ne


me souviens pas sur le moment du sujet de sa première question [la première
Question Mécanique]. Aussi dites-moi ce qu'il dit.
Niccolo. - Voici ce qu'il dit, parlant exactement en la forme que voici :
« Pour quelle raison les plus grandes balances sont-elles plus exactes 'diligente'
que les plus petites ? »
L'ambassadeur. - Eh bien, que voulez-vous dire sur cette question ?
Niccolo. - Je veux dire ceci : en la prenant ou la considérant comme
mathématique (c'est-à-dire abstraite de toute matière), sans aucun doute une
telle question est universellement vraie, tant pour les raisons qu'il a mises en
avant que pour beaucoup d'autres raisons que l'on pourrait tirer de la science
des poids. Parce que • cette ligne qui avec son extrémité mobile s'éloigne
davantage du centre d'un cercle, étant mue par une même vertu ou puissance
(à son extrémité), sera mue, poussée ou portée plus facilement et avec une
plus grande vitesse ou promptitude qu'une ligne dont l'extrémité s'éloignera
moins dudit centre; et pour cette raison les balances plus grandes s'avèrent
plus exactes que les petites.
Mais si l'on veut d'autre part considérer et approuver cette question dans
la matière et avec des arguments naturels, telle que la considère et l'approuve
l'auteur vers la fin, à savoir par le sens de la vue sur des balances matérielles,
je dis qu'avec cette sorte d'argument on ne vérifie pas en général une question
de cette sorte, mais qu'il s'ensuit tout le contraire, à savoir que les balances

7. On pourrait regarder les commentaires sur certains passages importants d'Aristote


à ce sujet : Physique, II, 2 (à propos de la différence entre astronomie et géométrie) et An.
Post. t I, 13, 78 b 31 et suiv. (Voti et le dioti peuvent relever de sciences différentes : cas des
blessures circulaires).

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398 François De Gandt

plus petites sont plus exactes que


les balances matérielles, l'expérien
nous voulons savoir de combien de g
c'est-à-dire l'une de celles qu'utili
épices, le sucre, le gingembre, la can
pourrons très, malaisément y arr
petites balances qu'utilisent les ba
aucun doute nous pourrons en êtr
le contraire de ce qui est conclu et d
que les balances plus petites sont
qu'elles démontrent plus exactem
poids.
Et la cause de cet inconvénient ne provient de rien d'autre que de la
matière, parce que les choses construites ou fabriquées dans la matière ne
peuvent jamais être aussi précisément faites que celles que l'on vient à imaginer
par l'esprit en dehors de cette matière, par laquelle il arrive alors que soient
causés dans ces choses certains effets très contraires à la raison.
Pour ce motif et pour d'autres semblables, le Mathématicien n'accepte ni
ne reconnaît les démonstrations ou preuves faites par la vigueur et l'autorité
des sens dans la matière, mais seulement celles faites par des démonstrations
et arguments abstraits de toute matière sensible. Et pour cette cause, les
savants jugent que les disciplines mathématiques sont non seulement plus
certaines que les naturelles, mais même qu'elles ont le premier degré de la
certitude. Et par conséquent ces questions qui se peuvent démontrer avec
des arguments mathématiques, il ne convient pas de les approuver avec des
arguments naturels £ Quesiti , libro settimo, p. 78 recto et verso).

Tartaglia reproche à l'auteur des Mécaniques de n'avoir pas toujours


distingué assez soigneusement les raisons physiques et les raisons
mathématiques.
Plus loin il expliquera que la mécanique est subordonnée à la « science
des poids », et que cette dernière dérive en partie de la géométrie et en
partie de la philosophie naturelle : les propositions de la science des
poids se démontrent en partie par des arguments géométriques, en partie
par des raisons naturelles (ibid., lib. 8°, p. 83).
Cependant Tartaglia n'attache aucune imperfection essentielle à la
matière, il ne considère pas que la matière serait intrinsèquement rebelle
à l'exactitude géométrique :
L'ambassadeur. - J'ai la ferme opinion que celui qui étudierait avec soin
une telle matière découvrirait toutes ces particularités matérielles qui sont
cause qu'une telle question et conclusion ne se vérifie pas dans la matière,
ainsi que l'auteur le conclut et le dit. Et lorsqu'elles seraient découvertes et
connues, je soutiens que ce serait facile d'y remédier, et de faire en sorte que
ces conclusions se vérifiassent précisément dans la matière, comme l'auteur
le propose.
Niccolo. - Votre Excellence n'a pas une opinion fausse, parce qu'en
effet toutes ces choses qui sont connues pour vraies dans l'esprit, et surtout
par des démonstrations abstraites de toute matière, doivent raisonnablement

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristote 399

se vérifier encore pour le sens de la vue dans la matière (autrement les m


matiques seraient totalement vaines, et sans aucun avantage ou profi
l'homme)... (ibid., p. 79 recto et verso).

On se souvient que c'est précisément sur ce thème que s'ouv


les Discorsi de Galilée : la discordance entre la matière imparfaite e
fondements géométriques de la science des machines. L'énigme qui
de ressort initial à la discussion des Discorsi est la suivante : comment
peut-il se faire que le même modèle de navire soit moins résistant à
une grande échelle, alors que les lois de la mécanique dépendent de la
géométrie où les questions de taille ne jouent aucun rôle ? Tartaglia
et Galilée semblent s'accorder finalement : si l'enquête de philosophie
naturelle est poussée assez loin et menée avec assez de rigueur, la matière
elle-même se révélera docile aux raisons géométriques.

La Nature peut-elle être vaincue ou trompée ?

Mais si l'on admet sans réserves cette participation de la matière aux


lois de la géométrie, comment peut-on encore souscrire aux vantardises
sophistiques du début des Mécaniques ? Dès lors que la mécanique met
en œuvre des principes géométriques, tout n'est pas possible. Si le plus
petit parvient à l'emporter sur le plus grand, c'est à certaines conditions
bien déterminées.
Ce thème est fondamental dans la pensée de Galilée : on ne vainct
pas la Nature, on ne la trompe pas. Tartaglia pour sa part est moins
net, il croit possible, semble-t-il, « d'augmenter à l'infini » la force de
l'homme par le moyen des machines (ibid., p. 82 v., quesito 20).
Galilée se méfie de l'émerveillement et des merveilles. La mécanique
ne se contente pas de rapporter des faits surprenants, des victoires
inattendues. Son but est au contraire de faire cesser l'émerveillement
naïf. Si l'on vient à connaître la cause, il n'y a plus de merveille (« la
riconosciuta cagion de l'effetto leva la maraviglia », Discorsi , p. 5 3 ; on
trouve souvent aussi : « cessa la maraviglia... »).
La science des machines est fondée sur ce présupposé d'une légalité
ou régularité naturelle des effets merveilleux engendrés par les machines.
Le tout premier exposé de Galilée à ce sujet, remontant probablement
à ï 5 93 (vers l'époque où il a enseigné les Mécaniques du Pseudo- Aristote),
commence par une déclaration de principe :
« ... j'ai vu se tromper la totalité des mécaniciens lorsqu'ils voulaient
appliquer des machines à bien des opérations impossibles par leur nature
même [...]. De ces erreurs il me semble avoir compris la raison principale :
c'est la croyance qu'ont eue ces hommes de l'art [artefici] et qu'ils continuent
à avoir, de pouvoir avec peu de force mouvoir et élever de très grands poids ;
trompant ainsi d'une certaine manière la Nature avec leurs machines, cependant

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400 François De Gandt

que l'instinct [istinto] de celle-ci et sa


résistance ne peut être vaincue par
qu'elle » (Galilée, Le Meccaniche, en

C'est la réponse de Galilée à A


vaincre ni tromper. La formule
la suite.
Ainsi Galilée s'en explique assez longuement dans une occasion
curieuse : le grand-duc Ferdinand II avait reçu la proposition d'une
machine extraordinaire pour élever l'eau à l'aide d'un pendule et d'autres
artifices. Avant de décomposer l'appareil en ses différents constituants
mécaniques (un levier assorti d'un pendule, accumulant les élans acquis
pour les restituer en percussion), Galilée expose les principes directeurs
de cette sorte de théorie :

« Quand je dis que la Nature ne permet pas qu'elle soit vaincue ni trompée
par l'art, j'entends (si l'on reste dans la matière ici traitée) que si la Nature
m'a accordé par exemple dix degrés de force, ce qui revient à dire la vertu
d'égaler dix degrés de résistance, elle me refuse et ne me permet par aucun
artifice de vaincre aucune résistance qui soit de plus de dix degrés » (en,
VIII, p. 572).
Galilée parle un peu plus loin d'un « ajustement entre la Nature et
l'Art » (ibid.). Pour permettre cet ajustement, il faudra définir autrement
la force et la résistance. Puisque le faible poids semble vaincre la grande
résistance, c'est que le poids n'est pas seul en cause, et que d'autres
facteurs doivent se combiner avec le poids ou la force. Avant d'exposer
l'idée fondamentale de Galilée à ce sujet, nous devons revenir aux
Mécaniques du Pseudo-Aristote.

Les principes des machines selon le Pseudo-Aristote

L'auteur des Mécaniques présente l'esquisse d'une théorie unifiée des


machines. Toutes les questions qu'il pose ne reçoivent pas une réponse,
et les réponses ne convergent pas toujours, mais la majorité des problèmes
est réduite à quelques « merveilles » fondamentales, que nous appellerions
les machines simples : cabestan, poulie, balance. Finalement presque
tout se réduit au levier, ou à la balance à bras inégaux. Ainsi « la pince
dentaire est [un ensemble de] deux leviers opposés » (854 a 23), « l'aviron
est un levier » (850 b 12), « les rameurs font levier sur la mer »(851 b 12),
« la poulie agit de la même manière que le levier » (853 b 1). Le levier
à son tour est expliqué par le cercle, qui est le principe de toutes les
merveilles mécaniques. Cet enchaînement explicatif est posé dès le
début du texte :

... « il n'est pas étonnant que le cercle soit le principe même de toutes les
merveilles. Les propriétés de la balance se réduisent au cercle, les propriétés

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Les « Mécaniques » attribuées à Avistóte 401

du levier se réduisent à la balance, et presque tout ce qui concerne les m


ments mécaniques se réduit au levier » (848 a 10-15).

Pourquoi à son tour le cercle est-il le principe de la balance


levier ? La raison tient en une formule qui revient sous diverses fo
- « dans le cercle le point qui est plus éloigné du centre est mû plus
ment [...] par la même force » (848 b 2);
- «le mobile le plus éloigné du point d'appui sera déplacé davantage
même force » (850 b 7 ; cf. 849 b 20) ;
- « par la même force l'extrémité la plus éloignée du centre est déplacée
rapidement » (852 b 17).

Le principe peut se présenter sous une forme dynamique, ment


nant la force et la vitesse, ou la force et le déplacement, ou la for
la « facilité » de mouvement. On le trouve aussi sous une forme stricte-
ment cinématique : « plus le rayon est grand, plus le mouvement est
rapide » (852 b 9; cf. 848 a 15). C'est la propriété essentielle du déplace-
ment angulaire qui est alors prise comme point de départ. Mais il s'y
ajoute un raisonnement dynamique, avec des prémisses explicites :
une même force produira plus d'effet si elle est moins détournée ou
empêchée. Or sur un plus grand cercle le mouvement rectiligne est
moins détourné. Donc sur un plus grand cercle une force donnée pro-
duira plus d'effet, c'est-à-dire engendrera un déplacement plus grand
ou plus rapide8.
Le texte tel qu'il nous est parvenu n'est pas parfaitement cohérent
et rigoureux. C'est surtout l'articulation des considérations géométriques
et dynamiques qui n'est pas absolument convaincante. Mais il est clair
que les machines simples sont réduites aux propriétés du mouvement
circulaire et à certains principes régissant les forces.
On a même pu, sans trop de distorsion, intégrer cette dynamique
assez sommaire dans le cadre des règles de proportionnalité du mouve-
ment qu'Aristote expose en Physique, VII, 5. Par exemple Pierre Duhem9
voit dans ces Mécaniques , qu'il attribue à Aristote, une application des
règles énoncées en Phys., VII, 5 (la force, la résistance, la distance par-
courue et le temps sont liés par certaines relations simples).

Lé a discussion de ces principes


che % Tartaglia , Benedetti et Guido Ubaldo

Les auteurs de la Renaissance sont loin d'accepter unanimement


la théorie exposée dans notre petit écrit. Tartaglia reconnaît que les

8. On trouvera une analyse détaillée dans F. De Gandt, Force et science des machines.
9. P. Duhem, Les origines de la statique , vol. I, Paris, 1905, chap. Ier.

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402 François De Gandt

explications des Mécaniques ne


(p. 81). Aussi ajoute-t-Û, après
(dans le libro settimo), un exp
poids » (libro ottavo), qui lui perm
la justification des effets mécani
Mais l'inspiration de Tartaglia
niques : il évalue la vitesse qu'u
cercle plus ou moins éloigné du
Aristote, présuppose certaines
ou potentia d'un corps par l'espac
temps (Définitions 3, 4, 5, 6 d
grande potentia doivent descendr
potentia peut se trouver modifiée
à cause de l'inclinaison de la direction du mouvement. De cette manière
les lois de la balance se trouvent justifiées en termes de vitesse sur des
arcs de cercle (prop. 3, p. 88 r. et v.); aux deux extrémités d'une balance
à bras inégaux, la potentia des corps est inversement proportionnelle à
leur vitesse.
Benedetti au contraire corrige les Mécaniques attribuées à Aristote
en fonction d'un point de vue tout différent. Dans son Diversarum
speculationum liber (1585), il discute assez longuement (chap. 10-25,
p. 151-167) plusieurs des problèmes de notre écrit grec, et montre
comment la solution doit être donnée par les propriétés du levier,
démontrées à la manière d'Archimède. La vitesse ne doit pas entrer
dans les prémisses, tout doit être réduit au principe fondamental du levier
pris comme énoncé initial :

« La cause n'est pas celle qu 'Aristote énonce » (chap. 12, p. 155).


« L'explication de la question 1 3 [le cabestan] doit être basée entièrement
sur le levier » (p. 161).
« Les principes de la question 14 [la fracture d'un barreau] dépendent de
ceux du levier » (p. 162), etc.

La géométrie des poids créée par Archimède est ainsi le seul fonde-
ment des effets mécaniques.
Un autre auteur très influent, Guido Ubaldo, dans son Mechanicorum
liber de 1 577, mentionne les Mécaniques d'Aristote en termes très élogieux
dans sa Préface, mais suit une méthode démonstrative totalement
différente, inspirée d'Archimède comme celle de Benedetti. La notion
fondamentale est pour lui celle de centre de gravité10.

10. Les principaux textes sont traduits en anglais dans : Drabkin et Drake, Meebanits
in iétb Century Italy .

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristo te 403

Galilée et V invariant poids-vitesse

La tradition dynamique semble ainsi s'interrompre vers la fin


xvie siècle. C'est Galilée qui renoue le fil, et s'inspire des Mécani
pour tenter une extension de la théorie mécanique à d'autres phé
mènes naturels.
L'analyse galiléenne des effets mécaniques, dans son petit traité
manuscrit de 1593, est guidée par sa thèse que la Nature ne peut être
vaincue ni trompée : si le plus petit l'emporte, c'est qu'il était en réalité
plus grand, sous un autre aspect. Il ne faut pas seulement considérer la
force et la résistance, mais aussi les autres grandeurs caractéristiques
du mouvement : le temps et la grandeur parcourue, autrement dit la
vitesse ( Meccaniche , en, II, p. 156).
Prenant une vue plus complète des termes du mouvement, on fait
s'évanouir le miracle : certes le faible poids peut mouvoir la très grande
résistance, mais c'est qu'il possède une vitesse beaucoup plus grande.
Ainsi, aux deux extrémités d'un levier, les poids sont inversement pro-
portionnels aux vitesses (virtuelles ou réelles, peu importe). Par exemple,
celui qui lève un énorme fardeau au moyen de la multiplication de
poulies schématisée ici, doit tirer six longueurs de corde pour élever
le fardeau d'une seule longueur : le gain de poids (ou de force) est

compensé par la perte en longueur de corde, c'est-à-dire en vitesse de


déplacement. Selon Galilée (ibid.), on peut analyser fictivement la situa-
tion en faisant comme si la petite force accomplissait six fois le chemin
avec à chaque fois une sixième partie de la résistance. Ce qui est gagné
en poids est perdu en vitesse. La Nature n'est donc pas trompée, elle
qui a imposé aux effets mécaniques des règles infrangibles : une force
ne peut vaincre une résistance, à moins que les vitesses ne soient en
proportion inverse.
Cette nouvelle formulation de la théorie des machines par Galilée
est un événement décisif, dont l'importance n'a pas été suffisamment
reconnue dans les études sur la « science nouvelle » du xvne siècle.
Parce que le faible poids est compensé par la grande vitesse, la véritable
quantité qui importe, celle qui se conserve à travers les opérations

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404 François De Gandt

mécaniques, c'est la combinaison


dirions-nous.
Cet invariant poids-vitesse permet une analyse féconde et très souple
dans la diversité des cas : le plan incliné par exemple, que les Médiévaux
avaient peine à intégrer à leur théorie, se trouve aisément expliqué.
Galilée a clairement perçu la plasticité et la fécondité de la notion qu'il
venait de définir (et qu'il appellerait momento ), il en a fait l'outil d'une
série d'extensions successives de la science des machines. L'invariant
poids-vitesse devait rendre compte des mouvements des fluides, de la
chute des corps, de la percussion, de la résistance des matériaux.
La percussion est le premier domaine nouveau que Galilée tente
d'englober dans une science des machines généralisée, à la fin de son
petit traité de 1593 sur Les Mécaniques (Le Meccaniche , en, II, p. 188-190).
La proportion entre la masse du corps percutant et celle du corps percuté
devrait être l'inverse de la proportion entre leurs vitesses respectives
de déplacement. Malheureusement les choses ne sont pas aussi simples,
et Galilée se heurtera toute sa vie à un obstacle infranchissable dans
l'analyse de la percussion : la proportion entre poids empêché ( peso
morto ) et poids percutant est indéterminée ou infinie, la pesanteur et
la percussion semblent donc incommensurables. Les disciples de Galilée
rapporteront la perplexité durable du Maître devant « l'infinité de la
percussion », et ses longs efforts qui n'aboutiront qu'à un texte posthume,
assez composite et insatisfaisant, ajouté comme Sixième Journée aux
Discorsi après la première édition (en, VII, p. 321-346)11.
L'analyse des mouvements des fluides, que Galilée expose dans son
Discorso intorno alle cose che stanno in su V acqua (1612), est fondée sur cette
même invariance, illustrée par l'exemple de la balance (en, IV, p. 68), et
justifiée par une référence explicite aux Mécaniques d'Aristote :
« Une telle compensation entre la gravité et la vitesse se retrouve dans
tous les instruments mécaniques, et fut considérée par Aristote comme
principe dans ses Questions mécaniques » (Discorso..., 1612, en, IV, p. 69).

Cette simple phrase nous en apprend beaucoup :


- Galilée considérait Aristote comme l'auteur des Mécaniques ;
- il croyait que l'invariant poids-vitesse était déjà le principe de la
théorie exposée dans les Mécaniques ;

Galilée rattache donc explicitement l'outil conceptuel qu'il a défini,


à la tradition antique d'une analyse dynamique des machines, On n'a pas
coutume d'entendre Galilée se ranger sous la bannière d'Aristote !
Il resterait, mais c'est une autre histoire12, à raconter comment

II. Voir la traduction française par S. Moscovici, in Revue ďHist. des Sciences , 1963,
P. 97-137.
12. Voir l'étude remarquable de P. Galluzzi, Momento , Studi galileiani.

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Les « Mécaniques » attribuées à Aristote 405

l'invariant poids-vitesse (le momento ) s'est avéré fécond dans l'


du mouvement accéléré (dont la percussion est un aspect). Les « m
de vitesse » qui s'ajoutent à chaque instant au mouvement d
pesant en chute libre (Discorsi de 1638, Troisième Journée),
bien les héritiers des « moments mécaniques » de 1593 et 1612 ?
explique en 1602 à Guido Ubaldo qu'il s'efforce de démontr
chronisme du pendule « sans outrepasser les bornes de la sci
machines » (« senza trasgredire i termini meccanici », en, X
Y est-il parvenu à la fin de sa vie, lorsqu'il dicte aveugle à Vi
célèbre addition aux Discorsi qui ferait reposer tout l'édifice de la
nouvelle du mouvement sur des principes « mécaniques », à s
ce qui avait été démontré « dans un ancien traité de mécani
autrefois à Padoue par notre académicien, seulement pour l'u
ses disciples » (en, VII, p. 216) ? Les prémisses ainsi admises
deux suivantes : 1 / Y impeto de descente d'un poids est égal
petite force qui suffit à l'empêcher; 2 / il y a équilibre entre d
si leur vitesse est inversement proportionnelle à leur pesant
reconnaît une fois encore la compensation de la force par la vit
on peut s'émerveiller de voir le vieil homme ainsi fidèle à lu
invoquant l'un de ses tout premiers ouvrages pour assurer l
ments de la science nouvelle qu'il a mise au jour.

François De Gandt
CNRS

Bibliographie

Aristotelis mechanicae questiones, graece et latine, Van Cappelle, Amsterdam, 1812.


Aristotelis Opera , graece et latine, Paris, Didot, 5 vol., 1850.
Aristotle, Minor Works , Loeb Classical Library, transi, by W. S. Hett, Cambridge-London
1963.
P. L. Rose and S. Drake, The pseudo-aristotelian questions of mechanics in Renaissance
culture, Studies in the Renaissance , vol. XVIII (1971), p. 65-104.
Mechanics in sixteenth century Italy , Selections from Tartaglia, Benedetti, Guido Ubaldo and
Galileo, transi, and annotated bv Stillman Drake and I. E. Drabkin. Madison. 1060.
P. Galluzzi, Momento. Studi galileiani^ Roma, 1079.
P. Duhem, Les origines de la statique , Paris, 1905 et 1906.
F. De Gandt, Force et science des machines, in Science and speculation. Studies in bellenistic
theory and practice , edited by J. Barnes et al., Cambridge-Paris, 1982.
w. K. Knorr, Ancient sources of the medieval tradition of mechantes , greek, arable and latin studies
of the balance, Supplemento agli Annali dell'Istituto e Museo di Storia della Scienza,
Anno 1982, fascicolo 2 (Piazza dei Giudici, 1, Firenze).

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