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• Quelle est l’influence des
■ Certains insectes, appe- paysages proches et plus loin-
lés auxiliaires de culture, sont tains sur l’abondance dans les
les prédateurs ou parasitoïdes parcelles (si elle est effective)
d’autres insectes ravageurs Les toutes premières fleurs, dès février-mars pour certaines espèces et selon et leurs bordures enherbées,
des cultures et sont une aide l’exposition, sont importantes pour la reprise d’activité et les futures pontes des stades pré-imaginaux hi-
des auxiliaires floricoles hivernant au stade adulte. Ici une femelle d’Episyr-
précieuse pour tout agricul- vernants ?
phus balteatus, principale espèce poly-aphidiphage chez les syrphes, buti-
teur s’inscrivant dans une nant une fleur de ficaire (Ranunculus ficaria).
• Quel rôle jouent les stades
démarche de réduction d’usage pré-imaginaux hivernants sur
des produits phytosanitaires. La biologie des syrphes parcelles, différents leviers le contrôle des populations de
La coccinelle, le syrphe ou en- ■ Ce ne sont en réalité que sont possibles : ressources pucerons ?
core la chrysope sont les plus certaines espèces de syrphes à florales continues au cours
cités en tant que prédateurs l’état larvaire qui sont les plus de l’année pour les adultes, Le déroulement de l’étude
des pucerons. Nous disposions efficaces pour réguler les po- éléments semi-naturels du ■ Pour répondre à ces ques-
déjà de beaucoup de connais- pulations de pucerons. Trois paysage (haies, bois, bandes tions, toute une équipe autour
sances sur les conditions de grands groupes d’espèces de enherbées…) pour leur four- de Lucie Raymond, doctorante
réalisation du contrôle bio- syrphes peuvent être dressés nir proies alternatives et abris à l’Inra/Ensat de Toulouse,
logique par les insectes auxi- en fonction de leur régime ali- lors de conditions climatiques a effectué des comptages en
liaires « dévoreurs » de puce- mentaire : ceux se nourrissant défavorables notamment en 2011 et 2012 sur deux sites
rons, dits aphidiphages. Une de nombreuses espèces de pu- hiver. Les syrphes adoptent d’étude que sont les « Vallées
récente étude de l’Inra/Ensat cerons (poly-aphidiphages), justement différentes straté- et Coteaux de Gascogne »
Toulouse nous apporte des élé- ceux s’attaquant à peu d’es- gies pour passer la mauvaise entre Gers et Haute-Ga-
ments de compréhension sup- pèces différentes de pucerons saison. Un certain nombre ronne, et la « Plaine et Val de
plémentaires sur l’hivernation (oligo-aphidiphages) et ceux migre vers le sud de l’Europe Sèvres » 400 km plus haut.
des syrphes aphidiphages et ne s’en nourrissant pas du tout et jusqu’en Afrique du Nord, ■ Dans le premier site, des
sur leur rôle dans la régulation (non aphidiphages). d’autres hivernent sous nos pièges à émergence, englobant
biologique des populations de ■ Afin d’augmenter leur latitudes à l’état larvaire (qui l’équivalent d’un m2 de terre,
pucerons à l’automne. abondance dans et autour des compte trois stades), de pupe ont été installés en hiver dans
(l’équivalent de la chrysa- 52 parcelles de blé d’hiver,
lide chez les papillons), ou 18 de colza et 14 de luzerne.
au stade adulte. Les adultes Chaque parcelle disposait d’au
sédentaires trouvent alors maximum deux pièges : un
refuge dans les éléments semi- placé sur la surface cultivée,
naturels cités précédemment. l’autre sur la bordure enher-
Alors que nous pensions que bée du champ. Les insectes
les larves hivernantes ne se émergents tombaient dans des
trouvaient elles aussi que flacons remplis aux deux tiers
dans ces mêmes milieux non d’éthanol et étaient identifiés
cultivés, voilà que de récents et classés par espèces selon les
travaux nous prouvent que les trois groupes de régimes ali-
cultures d’hiver s’avèrent être mentaires décrits ci-dessus.
elles aussi largement utilisées, ■ Les populations printanières
JEAN-PIERRE SARTHOU
populations de syrphes. À Il est évidemment alors im-
l’heure où les abeilles sauvages portant de respecter si possible
déclinent dans les agroécosys- trois points : (i) choisir une
tèmes européens, les syrphes, espèce de couvert offrant le
Femelle de Melanostoma mellinum, espèce oligo-aphidiphage discrète et second groupe pollinisateur gîte à des pucerons incapables
pourtant très présente dans les parcelles de céréales. Si vos blés ont quelques après ces dernières, sont de de se développer sur la culture
véroniques des champs au mois d’avril, ne les détruisez pas (cette adventice plus en plus regardés en tant à implanter ou nouvelle-
n’est pas concurrentielle) car leurs fleurs aideront ce petit syrphe à prospecter que pourvoyeurs de ce ser- ment implantée, et favorisant
toute votre parcelle à la recherche de colonies de pucerons pour y pondre. vice écologique majeur pour néanmoins le développement
tous les écosystèmes, naturels d’auxiliaires capables d’inter-
tenus permettent ainsi d’affir- refuges) et leurs fortes capaci- comme cultivés. venir contre les ravageurs
mer que le biocontrôle autom- tés de vol leur permettent de de la culture suivante (c’est
nal (et peut-être partiellement grands rayons de prospection Des savoirs à tirer pour généralement le cas s’agissant
hivernal) des pucerons par les dans les cultures de leurs envi- la gestion des systèmes des auxiliaires aphidiphages,
larves de syrphes, joue un plus rons. Concernant les espèces de culture i.e. prédateurs et parasitoïdes
grand rôle dans la diminution de syrphes non aphidiphages, Le biocontrôle réalisé en de pucerons), (ii) privilégier
des populations de pucerons au l’étude a révélé qu’elles sont automne par les larves de un mode de destruction du
printemps, que le biocontrôle au contraire très sensibles à syrphes poly- et oligo-aphi- couvert (si ce ne doit pas être
printanier, déjà largement la présence d’éléments semi- diphages sur les populations le gel) qui provoque la plus
connu et le seul à être pris en naturels et qu’elles émergent de pucerons, peut se révéler faible mortalité possible des
considération jusqu’à mainte- principalement dans les pay- particulièrement utile à l’agri- pucerons et de leurs ennemis
nant. sages de type plutôt bocager culteur quand on sait que les naturels (EN) encore en dé-
(bois, haies…). Cela n’est pucerons sont les principaux veloppement, et le roulage à
Le rôle des éléments semi- pas surprenant quand on se vecteurs des maladies virales l’aide d’un rouleau à couteaux
naturels du paysage pour penche sur leur régime ali- automnales (JNO - jaunisse est certainement le meilleur
préserver toute la biodi- mentaire : matières végétales, nanisante de l’orge - sur cé- procédé de ce point de vue
versité y compris bois, en décomposi- réales à paille, TuYV - jau- (on manque de références sur
Si les syrphes poly-aphidi- tion avec plus ou moins d’eau, nisse du navet - sur colza). Les ce sujet), (iii) si la technique
phages dont nous venons de blessures d’arbres avec coulées différents pesticides (herbi- de destruction doit éliminer
parler sont plus influencés par de sève, chenilles défoliatrices cides, insecticides y compris les populations de pucerons
les populations automnales dans les canopées… En ce en enrobage de semences) et de leurs EN (broyage, her-
de pucerons des cultures que qui concerne les syrphes oli- utilisés en grandes cultures bicide qui élimine à terme
par les éléments semi-naturels go-aphidiphages, leurs larves ne sont pas sans effet sur le les pucerons et leurs EN par
du paysage, ces derniers sont hivernent préférentiellement développement des larves des disparition de leur ressource
néanmoins importants pour dans les bordures enherbées et syrphes aphidiphages, et tout respective), essayer d’attendre
eux (proies de substitution, près des haies, mais aussi dans ce qui permettra de limiter l’émergence de la plus grande
pollen et nectar pour la matu- les cultures à faible distance de les applications d’insecticides partie des auxiliaires. Que
ration ovocytaire des femelles, ces haies, donc partout où les d’automne, sur céréales à ce soit avant culture d’hiver
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nouveaux, les connaissances riche d’un potentiel très en-
manquent encore pour pou- courageant.
voir être plus affirmatif dans Gwendoline LECHAT, élève
tous ces développements. ingénieur agronome INP-ENSAT,
Une larve d’Episyrphus balteatus au 3e stade de développement (elle a alors Quoi qu’il en soit, les systèmes spécialisation AGREST
déjà consommé 200 à 600 pucerons selon leur taille), avant la formation de la de culture développés majori- Jean-Pierre SARTHOU,
pupe dans laquelle elle se métamorphosera en adulte. Cette larve appartient tairement en France et uti- enseignant-chercheur
à la génération n+1, issue donc d’un œuf pondu 4 semaines plus tôt, en mai, lisant des doses importantes INP-ENSAT/INRA UMR AGIR,
par une femelle de la génération n ayant hiverné au stade larvaire, après s’être d’intrants chimiques, surtout responsable de la spécialisation
développée sur les premières colonies de pucerons arrivés dès l’automne. lorsqu’ils sont pratiqués sur AGREST.
Cette régulation automnale des pucerons est déterminante pour limiter leurs de très grandes étendues, ne Cet article est basé sur la publication
pullulations au printemps.
permettent pas de bénéficier scientifique suivante :
ou avant culture d’été, le venir (cas d’un couvert de au mieux des services que Raymond, L., Sarthou, J. P., Plan-
processus reste le même : le sorgho fourrager précédant pourraient nous rendre ces in- tegenest, M., Gauffre, B., Ladet, S.
couvert d’interculture peut une céréale d’hiver), ou bien, sectes auxiliaires à l’automne and Vialatte, A. (2014). Immature
aider à développer les popu- si associé, il peut héberger des et au printemps, et il devient hoverflies overwinter in cultivated
lations d’auxiliaires qui une pucerons qui, s’ils sont pré- important aujourd’hui, alors fields and may significantly control
fois adultes viendront pondre cocement présents, serviront qu’une volonté réelle tant aphid populations in autumn. Agri-
au sein des premières colonies eux aussi de nurserie pour les sur le terrain qu’au niveau culture, Ecosystems and Environ-
de pucerons de la culture à EN des pucerons à venir sur politique s’affiche pour tendre ment 185: 99-105.