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Economie

ISL POSSÉDAIT UN PORTEFEUILLE DE DROITS SPORTIFS


suscitant bien des convoitises. Mais, gérée en dépit
du bon sens, l'entreprise suisse a fait faillite. Vivendi,
qui songeait la racheter, a reculé face à l'opacité du
dossier • PAR ISABELLE DOISEAU

'hôtellerie suisse sait employer a rassemblé, en 1998, 33 milliards de

L les grands moyens. Début avril,


quelques collaborateurs du
champion du marketing sportif ISL (In­
téléspectateurs en audience cumu­
lée.. . Une cible dont la valeur se chiffre
en milliards de francs pour les agences
ternational Sports and Leisure), de de pub. Mais Vivendi aurait dû aussi
passage au siège de Zoug, en pleine prendre en charge un gouffre finan­
Suisse alémanique, ont eu la désa­ cier à plusieurs inconnues. Alors, Je
gréable surprise de trouver les portes groupe de Jean-Marie Messier, qui dé­
de leurs chambres cadenassées. Pas cortique les comptes d'ISL depuis jan­
question pour l'aubergiste de sup­ vier, a finalement décidé, Je jeudi 17
porter une ardoise impayée! Et peu mai, que le pari était trop risqué.
importe qu'elle émane de la société Quitte, en se retirant, à laisser le
qui règne, discrètement, sur un pac­ champ libre au rival allemand des mé­
tole très convoité: la vente des pan­ dias, Kirch.
neaux publicitaires et d'une bonne Pour le Bavarois, Je coup est su­
partie des retransmissions télévisées perbe. Explication: alors que Vivendi
de la Coupe du monde de football. aurait dû, pour emporter J'affaire à la
Cruelle marque de déclin pour ce sym­ barre du tribunal, éponger une bonne
bole du sport-business. . . partie de la dette et rompre une sé­
L'hôtelier avait du nez. Quelques rie de contrats non rentables, Leo
jours plus tard, la faillite d'ISL était Kirch, lui, a la partie beaucoup plus
prononcée, suivie d'un court sursis. facile. Il lui suffit d'attendre que la
Le temps de permettre à Vivendi-Uni­ faillite soit prononcée pour mettre la
versai de peaufiner un éventuel pro­ main sur la seule véritable pépite
jet de reprise. Maison mère de Canal+, d'ISL: les droits de retransmission té­
Vivendi-Universal regardait avec en­ lévisée (hors d'Europe) des Coupes
vie les images sportives contenues du monde de football de 2002 et de
dans le catalogue d'ISL. Cela se com­ 2006. Car Kirch dispose déjà d'une
prend: à lui seul, le dernier Mondial option d'achat sur ce trésor.

ISL : l'affaire
dont essier
96 1 25
n'a pas voulu
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Cette largesse lui a été accordée ting mondial. En contrepartie, le tan­ patron d'Adidas, avait convaincu les
par la Fédération internationale de dem garantit des revenus annuels à dirigeants des Jeux olympiques et de
foot (Fifa) en 1996. A l'époque, Kirch la Fifa avant même l'ouverture de la la Coupe du monde de football qu'il
et ISL font une offre commune pour compétition. saurait faire de ces deux compétitions
les droits des deux Coupes du monde, de formidables supports publicitaires.
propriétés de la Fifa. L'acquisition se L'envolée des droits télévisés En retour, le fils d'Adi Dassler, le
fait à prix d'or: 12 milliards de francs C'est tout bénéfice pour le gouver­ cordonnier qui a chaussé Jesse Owens
rien que pour les droits télé ! Le nement du foot mondial, qui n'assume aux JO de Berlin en 1936, espérait
" show)) sportif fait exploser I'Audi­ pas le risque financier de la vente. Sai­ conforter la puissance de sa marque
mat et surenchérir les chaînes : la Fifa sies par la fièvre qui gagne les droits Adidas. ISL, qu'il crée en 1982, est
veut profiter de ce boom spéculatif télévisés dans les années 90, les chargé de faire affluer l'argent des
et décuple les tarifs, il est vrai jusque­ agences de marketing sportif se sont sponsors, McDonald's et Coca-Cola.
là particulièrement bas. transformées en "véritables banquiers Diplomate de l'ombre, Dassler met
Pour rentrer dans leurs frais et se pour les institutions sportives selon
"• son formidable entregent au service
rémunérer, les deux associés se par­ le mot de Laurent Thieule, président du mouvement sportif international.
tagent la tâche. Kirch est chargé de de Havas Advertising Sports, filiale ISL y gagnera une réputation de
vendre les compétitions aux télés eu­ du groupe de pub. grand pourvoyeur de cadeaux et de
ropéennes. Hors de l'Europe, place à On est bien loin des débuts d'ISL! faiseur de rois, ainsi que de confor­
ISL, responsable en outre du marke- Dans les années 70, Horst Dassler, le tables commissions. Mais la machine .,...

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Economie ISL
..,.._ à cash de Horst Dassler, décédé
Les plus gros contrats en 1987, s'est depuis lors enrayée. ISL
"Les dirigeants du foot chinois vou­
laient plus d'argent; on les a laissé fi­
TV du sport s'est retrouvé empêtré avec des droits ler chez ISL. . ", se souvient ainsi avec
.

invendables, payés trop cher pour flegme Eric Drossart, de passage dans
des compétitions de second rang. un grand hôtel parisien. C'était pour­
"L'an passé, la société avait ainsi deux tant !MG - dont cet ancien joueur
fois moins d'argent en caisse que ce belge de Coupe Davis est vice-prési­
qu'elle devait à tous les organisateurs dent- qui avait exporté le ballon rond
sportifs qui lui sont liés par contrat "• en Chine. !MG, c'est l'autre pionnier
se lamente Je président d'une fédé­ du marketing sportif, fondé dans les
ration sportive proche d'ISL. années 60 par le fameux Mark Mc­
En fait, l'empire de la famille Dass­ Cormack. « Mark the shark » (le re­
National Football league (contrat de 1998 à 2005) Jer- propriétaire d'une nébuleuse de quin) a bâti sa puissance en étant l'im­
15 à 18 sociétés avec à sa tête les hol­ présario, le conseiller financier, la
dings Sporis et ISMM, qui détient 90% nounou d'athlètes superstars comme
d'ISL- totaliserait, selon nos recou­ Killy, André Agassi ou Tiger Woods
pements, près de 3 milliards de francs et, accessoirement, l'agent de la Fon­
de dette cumulée. L'an passé, les dation Nobel. Un business moins ris­
pertes s'élevaient à un montant équi­ qué que l'achat et la revente de droits
valent, tout cela pour un chiffre d'af­ télévisuels: !MG ne paie ses cham­
faires pas immensément supérieur. pions qu'une fois la commercialisa­
L'opacité financière suisse interdit tion de leur image assurée.
Comité international olympique (contrat de 2000 à 2008) autre chose que des approximations,
mais l'ordre de grandeur donne une Prévisions « frauduleuses ,,
idée du sinistre. Déjà roi du tennis et du golf, l'Améri­
Pour faire chuter la maison ISL, cain veut alors renforcer ses maigres
deux ans de folle expansion auront positions dans le foot, chasse gardée
suffi. La famille Dassler songe à tou­ d'ISL. Mais celui-ci contre-attaque.
cher Je jackpot en allant en Bourse. Pour évincer !MG de Chine, ISL met­
Mais, pour impressionner les mar­ tra même 2 milliards de francs sur la
chés, il faut étoffer un portefeuille de table! Dans Je tennis, c'est la somme
compétitions déjà mis à mal par la astronomique de 9 milliards de francs
National Basket Association (contrat de 1998 à 2001) perte, en 1996, des très lucratifs JO, qu'ISL s'engagera à débourser, sur dix
dont Je CIO a repris la gestion en di­ ans, auprès des organisateurs des
rect. Au petit jeu de la surenchère, les Masters Series, un circuit rassemblant
équipes d'ISL vont laisser leurs neuf compétitions mineures. A titre
concurrents sur place . . . de comparaison, Dassault a empoché ..,.._

Les télévisions contre


le << racket sportif ,,
Repreneur bienheu- Grande-Bretagne, ce François Nys, cher- la Corée et le japon
reux des droits d'ISL sont les parlemen· cheur au Centre de n'excite pas les
- le volet non euro- taires qui ont crié au droit et d'économie convoitises, l'édition
péen du Mondial de scandale, craignant du sport. En Italie, allemande de
2002 est déjà bénéfi- que les fans ne Murdoch et Messier 2006 risque de s'avé-
ciaire -, Leo Kirch a voient qu'un nombre viennent ainsi de rer bien plus juteuse
pour l'instant moins restreint de matchs fusionner leurs pour Kirch. «Et cer-
de chance en Europe. sur des chaînes gra- chaînes payantes, tains réseaux,
Les télés refusent de tuites. Et en France, largement défici- comme BSkyB, n'ont
Premier league (contrat de 2001 à 2003) payer ses tarifs, TF1 et Canal + ont, taires. Le foot aucune raison de
jugés exorbitants de concert, opposé italien risque d'y vivre sans le sport:
pour un événement un « niet »ferme. perdre quelques sans la Premier
qui sera diffusé très "Les parts de marché recettes... League, le champion-
tôt le matin. Gerhard des chaÎnes se sont Rien n'indique toute- nat anglais, pas
Schriider a dû faire stabilisées: elles ne fois que les télés d'abonnés ! 11
pression pour obtenir sont plus autant obli- parviendront à rétorque-t-on chez
un accord avec les gées de surenchérir gagner leur bras de Mediacontent, une
chaînes publiques dans le sport)), fer. Si la Coupe du agence-conseil bri-
allemandes. En explique jean- monde organisée par tannique .1. D.
Fifa (contrat de 2002 à 2006)

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Economie 1 ISL
.,.... récemment, pour le même prix, une gagements nouveaux conclus à partir tenberger, ex-salarié d'une entreprise
commande de 50 Falcon! Or, jusque­ de 1999. Encore s'agit-il de la partie de grande consommation suisse, et
là, !MG payait à peine 1 milliard sur émergée de l'iceberg. Car ce qui fera Jean-Marie Weber, vieux compagnon
trois ans. L'inflation continue . . . · fuir tous les repreneurs- Vivendi a été de route de Dassler.
Aux Etats-Unis, ISL a également fait le plus opiniâtre d'entre eux-, c'est la Très vite, une sourde lutte d'in­
plus que tripler les tarifs du cham­ crainte de découvrir quelques bombes fluence va opposer Weber et Schur­
pionnat automobile Cart. Lequel le à retardement dans les comptes. Mes­ tenberger, qui finira par quitter la mai­
traînera d'ailleurs devant les tribu­ sier avait prévenu: pas de deal sans son en octobre 2000. L'homme, sur
naux pour n'avoir pas honoré ses en­ la garantie de "bonnes conditions juri­ qui pèsent de forts soupçons, ferait
gagements et avoir présenté des pré­ diques"· Il avait ses raisons. . . l'objet d'une plainte, déposée par la
visions «frauduleuses)), Sans compter Le non-paiement des cotisations famille il y a peu. A-t-il eu des intérêts
des contrats avec deux retraites depuis six mois personnels à conclure certains deals
clubs de foot brésiliens l:'inflation ne représente, en la ma­ pharaoniques? En attendant d'éven­
- officiellement de des droits de tière, qu'un amuse­ tuelles suites judiciaires, Schurten­
quinze ans, mais en réa­ la Coupe du monde gueule. Plus préoccu­ berger s'est reconverti auprès d'un
lité de trente- et l'ob­ Evolution des droits télévisés pant, "ISL a signé des businessman condamné plusieurs fois,
versés à la Fifa pour
tention des droits télé
des cinq championnats la Coupe du monde 6 390 contrats pour des raisons
politiques, pour faciliter
qui projette de lancer une nouvelle
compétition de formule 1 britannique.
(en millions de francs)
brésiliens. des décisions dans l e
ISL se gave donc de football o u l'athlétisme "•
Un train de vie de chef d'Etat
droits. . . et !MG perd du confie, sous couvert Autre règlement de comptes: le res­
terrain. Résultat : le d'anonymat, un proche ponsable du marketing pour la Coupe
chiffre d'affaires des de la société suisse. du monde 2002 s'est fait virer manu
deux sociétés finit par L'existence d'une caisse militari de son poste le mois dernier!
se rapprocher, alors �-���--:::=--:::"
-
48
-.-468 �ê�
--5-75_."---- noire, destinée à rétri­ Les coups volent bas autour de la dé­
qu'IMG était autrefois 191ll 1994 1998 2002 2006 � buer les dirigeants de la pouille d'ISL . . . N'empêche. Tous les
nettement plus gros. nomenklatura sportive, managers du groupe ont entériné cette
Une estimation fournie par plusieurs vient d'ailleurs d'être mise au jour par expansion suicidaire. "Les dirigeants
observateurs, car IMG ne pratique le journal suisse-allemand Bilanz. Com­ d'ISL ont perdu le contact avec la réa­
pas plus la communication financière ment rassurer un repreneur dans ce lité. Rien de plus facile quand on mène
que son frère ennemi. ISL n'arrêtera contexte? un train de vie quasi similaire à celui
sa course folle qu'en décembre der­ d'un chef d'Etat, au contact des prési­
nier: une ultime proposition d'achat La famille porte plainte dents des grandes institutions spor­
des droits du basket universitaire amé­ Le manque de contrôle des action­ tives philosophe un ancien cadre.
"•

ricain est retirée de justesse- au mo­ naires n'a sûrement rien fait pour cla­ Sans compter un salaire annuel es­
ment où la famille Dassler, l'intro­ rifier les choses. Les quatre sœurs du timé à 1 million de dollars !
duction en Bourse enterrée, tente défunt Horst avaient placé toute leur L'euphorie, il est vrai, n'a pas da­
encore de vendre ISL pour sauver un confiance dans un triumvirat chargé vantage épargné le mouvement spor-
peu de son patrimoine. de gérer l'héritage: Daniel Beauvois, tif. ISL y a même trouvé son maître
Trop tard! La facture finale s'élève débauché de chez Kirch pour déve­ en cupidité. Dans le basket, précisé­
à plus de 16 milliards de francs d'en- lopper l'activité télé, Heinz Schur- ment, où la firme suisse commercia- .,..

L'inévitable M. Darmon
A 60 ans, jean-Claude Bourse depuis 1996, géants mondiaux. du nouveau groupe. Claude Darmon a fait Sport + et CLT-Ufa
Darmon se trouve ne pouvait espérer C'était naturellement Comment, en effet, fortune à partir de n'étaient pas jus-
propulsé à la tête pareille consécration. compter sans son se passer de l'homme 1984. qu'ici sur des
d'un nouveau géant Lui, le précurseur du entregent, son bagou qui détient les droits La nouvelle entité - marchés concurrents.
du marketing sportif foot-business, aux extraordinaire et son télé et marketing de qui se cherche encore Ensemble, les deux
au chiffre d'affaires méthodes de «ven- portefeuille de droits 14 clubs de première un nom- se pose en entités géreront les
colossal: 3,7 mil- deur de cravates)) sans doute modeste division du rivale de l'Allemand contrats TV de plus
'
liards de francs. Porté reçoit donc l'onction par la taille mais Championnat de Kirch (détenteur des de 320 clubs et de
sur cette montagne de la crème de l'esta- grand par la valeur. France, ainsi que deux prochaines plus de 40 fédéra-
d'argent par le blishment Comme à son habi- ceux de l'équipe de Coupes du monde et tions et ligues
mariage des filiales audiovisuel au tude, Darmon a su se France championne de la formule 1), de nationales. La
de Vivendi-Universal moment même où rendre 11 incontour- du monde? Ni TF1, ni l'Américain Commission de
(Sport +) et RTL Group certains ne don- noble'', ainsi que le France Télévision, ni McCormack et de Bruxelles devra se
(Ufa Sport) dans le naient pas cher du reconnaît jérôme M6 n'ont pu se l'anglais Octagon prononcer sur cette
sport, le «grand «système Darmon » Valcke, le patron de défaire de lui. Mais, (football anglais, fusion avant la fin de
argentier» du foot- dans un univers en Sport+, qui devien- en vérité, c'est avec rugby, cricket, juin • Emmanuel
bali français, coté en proie à l'appétit des dra directeur général Canal+ que jean- hockey). Berretta

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Economie
� lisait la SuproLeague pour le compte
de la Fédération internationale. Pas
assez cher au goût de certains grands
clubs européens, qui ont lancé leur
propre compétition dissidente, l'Eu­
roleague. Résultat: l'un et l'autre re­
légués sur des télés de second plan,
privés de recettes commerciales, les
deux tournois rivaux viennent fina­
lement. . . de fusionner pour sauver
les meubles.

Le temps des mammouths


Même bide pour les Masters Series
de tennis: les deux ·seuls sponsors
dénichés par ISL n'avaient pas fourni
un centime de cash, seulement des
prestations de services, de l'«échange-

Leo Kirch rachèterait les droit TV du foot •

marchandise>>. " ISL a voulu appliquer


le marketing du foot à d'autres disci­
plines raconte Laurent Thieule, de
"•

Havas. Mais sans l'audience du foot . . .


Ni la stature financière pour tenir le
choc sur un marché si périlleux.
ISL disparu, voici en effet venu le
temps des mammouths de la com­
munication, soucieux de garantir l'ap­
provisionnement en événements spor­
tifs de leurs propres chaînes. Trio de
tête: le Bavarois Leo Kirch, l'Austra­
lien Rupert Murdoch, ainsi que le tan­
dem constitué par le français Vivendi­
Universal et l'allemand Bertelsmann,
qui fusionnent leurs filiales de droits
sportifs avec Jean-Claude Darmon
(voir encadré page 100).
Ainsi mis en coupe réglée par un
véritable oligopole de géants, le mar­
ché des droits sportifs va-t-il conti­
nuer à grimper jusqu'au ciel? Pas si
sûr. Ces derniers temps, les télés mul­
tiplient les signes de révolte et refu­
sent d'acquitter des factures colos­
sales (voir encadré page 98). Les excès
du sport-business semblent gommés.
Pour l'instant •

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