enquête
Autrement dit 27
A Toulouse,
un voyage
au cœur
de la cité
d A des élèves débarqués du Maghreb,
de Bulgarie ou de Mongolie, le collège Vauquelin
propose un « voyage dans ma ville ».
d Conçu en partenariat avec une association
locale, le projet allie cours de français,
découverte de la cité et ateliers créatifs.
Toulouse
De notre correspondant
Les sons de la cornemuse ricochent sur les murs.
Le professeur, docteur en musicologie, joue et présente
l’instrument, puis un autre. Les élèves sont tout ouïe.
Une quinzaine d’adolescents, de 12 à 17 ans, dans
Adrien MATTOn
ville ». Tous les mercredis matin sont consacrés à des « après la visite artistiques pour l’associa-
explorations de sites patrimoniaux, institutionnels de la médiathèque, tion Terres Nomades. Cer-
ou naturels de la ville rose, à des rencontres avec des tains s’étonnent d’ailleurs
habitants, des associations, des professionnels. Ces je suis revenu seul eux-mêmes, eux qui aupa-
visites doivent aboutir à deux productions artistiques : m’inscrire. ravant ne s’étaient jamais
des photographies en vue d’une exposition en fin Je n’aurais penchés sur une table avec
d’année et des carnets de voyage individuels. « Ce un stylo. D’autres s’appro-
projet n’est pas un gadget, assure Céline Calmejane- peut-être pas osé prient les démarches faites
Gauzins, l’enseignante à l’origine de l’initiative. Il doit sinon. » ensemble pour les repro-
leur permettre de mieux s’intégrer dans leur nouvel duire seuls. »
environnement, mais sans oublier les apprentissages Comme Yaya, 13 ans, débarqué avec sa sœur
de base, pour réussir à l’école. » d’Oran (Algérie) en septembre dernier. Il habite
De fait, les rencontres et les visites sont très orga- aujourd’hui dans la proche banlieue toulou-
nisées, bien loin de la goguette vaguement pédago- saine. « Après la visite de la médiathèque, je suis
gique. Comme ce jour-là, à l’université du Mirail, un revenu seul m’inscrire, raconte-t-il. Je n’aurais
lieu que les élèves fréquenteront peut-être dans peut-être pas osé sinon. » Jessica, 15 ans, arrivée
quelques années. Un professeur disponible, pour un de Lisbonne avec sa tante il y a dix mois, ap-
échange autour d’instruments à vent des quatre coins précie pour sa part « la disponibilité des inter-
du monde, parfois de pays dont ils sont originaires. venants, qui prennent le temps d’expliquer, plus
Puis l’intervention d’une autre association, les Petits que dans les cours. Les ateliers artistiques, c’est
Débrouillards, pour comprendre la constitution des bien aussi pour apprendre. Et puis on voit beau-
sons et même fabriquer des instruments très simples. coup de choses différentes, plus qu’en restant au
Le tout, en travaillant au passage un champ lexical collège. »
utopies
Tous parents de tous les enfants tous se soucieront également peu de ces enfants-là. » Entre
Faire en sorte que les enfants de notre société soient un ces deux positions, une initiative du XXIe siècle. Depuis
peu celui de chaque adulte. L’idée a plus de 2 000 ans. Elle 2006, l’association Actenses déploie un programme dans
est née dans la tête de Platon. À l’époque, le philosophe lequel des adultes bénévoles suivent pendant trois ans la
grec propose, dans la République, d’échanger les bébés à la scolarité d’un jeune et l’aident dans l’élaboration de son
naissance, afin de garantir l’égalité entre tous et la solidarité projet professionnel. L’association propose ce parrainage
de la communauté. Ce à quoi Aristote rétorque, dans sa dans 23 lycées, en région parisienne et en province. Les
Politique : « Si les mille enfants de la cité appartiennent à penseurs d’aujourd’hui s’intéressent de près au dispositif,
chaque citoyen, non pas comme issus de lui, mais comme les chercheurs s’attellent à évaluer son impact.
tous nés, sans qu’on y puisse faire de distinction, de tels ou tels, Jean-BapTisTe François